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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mercredi 28 novembre 2012

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 13

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Examen, ouvert à la presse, de la proposition de loi de Jean-Charles Taugourdeau visant à créer une médaille d’honneur du bénévolat (n° 222) (M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur)

– Amendements examinés par la commission

– Informations relatives à la Commission

– Présence en Commission

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 28 novembre 2012

La séance est ouverte à dix heures dix.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède, sur son rapport, à l’examen, ouvert à la presse, de la proposition de loi de M. Jean-Charles Taugourdeau, visant à créer une médaille d’honneur du bénévolat (n° 222).

M. le président Patrick Bloche. Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi de notre collègue Jean-Charles Taugourdeau visant à créer une médaille d’honneur du bénévolat, laquelle est inscrite à l’ordre du jour réservé au groupe UMP le jeudi 6 décembre prochain.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur. Le sujet qui nous réunit aujourd’hui est de ceux qui transcendent les clivages politiques. Chacune et chacun d’entre nous a très certainement vécu une expérience personnelle d’engagement bénévole dans le monde associatif ou dans un autre cadre. Pour certains, le bénévolat est même une porte d’entrée dans la vie publique. Nous sommes donc tous bien placés pour connaître l’utilité, l’intérêt et la nécessité du bénévolat.

Il n’y a d’ailleurs pas une seule manifestation, dans nos circonscriptions, où nous nous rendons sans avoir l’occasion de remercier ou de féliciter des bénévoles.

Il n’existe pas de définition légale ou conventionnelle du bénévolat. Selon l’appréciation qu’en a donnée le Conseil économique et social dans son avis du 24 février 1993, « le bénévole est celui qui s’engage librement pour mener à bien une action non salariée, non soumise à l’obligation de la loi, en dehors de son temps professionnel et familial ».

Sur la base des dernières données disponibles, on dénombre actuellement quelque 16 millions de bénévoles en France. Depuis 1999, le volume d’heures consacrées à des activités non rétribuées a augmenté chaque année de 5 %. Selon l’INSEE, le bénévolat représenterait ainsi plus de 1,3 milliard d’heures d’intervention par an. La valorisation de ces heures effectuées atteint la fourchette de 12 à 17 milliards d’euros, soit 1 % du produit intérieur brut.

Les secteurs d’activité bénéficiant le plus du concours des bénévoles sont très majoritairement orientés vers le sport (23 %), la culture (15 %), les loisirs (15 %) et l’action sociale, la santé et l’humanitaire (10 %). Cette répartition n’a rien de surprenant dans la mesure où elle correspond assez fidèlement au profil des associations les plus nombreuses en France. Le bénévolat y pèse quelque 935 000 emplois équivalents temps plein.

La France se situe dans la moyenne européenne, avec 37 % de bénévoles parmi les plus de quinze ans – ce qui la place au dixième rang sur vingt-sept – et 26 % de bénévoles au sein de la population adulte. Ce résultat est certes satisfaisant, mais appelle de la part des pouvoirs publics une certaine vigilance, car le dynamisme du bénévolat est par nature fragile.

En effet, les jeunes générations semblent moins enclines que par le passé au bénévolat – seuls 29 % des jeunes de quinze à vingt-quatre ans s’engageant à des titres plus ou moins directement bénévoles –, alors que cette proportion atteint 45 % chez les plus de cinquante ans, et 51 % chez les retraités, selon l’enquête France Bénévolat-IFOP de 2010. Ainsi, le renouvellement des bénévoles actifs constitue un réel défi.

En outre, les caractéristiques intrinsèques du bénévolat rendent la « fidélisation » des bénévoles assez difficile. L’extrême liberté laissée à l’engagement peut conduire les intéressés à abandonner sans préavis. Il existe d’ailleurs un certain niveau de rotation des bénévoles, de l’ordre de 20 %, dont les causes, multiples, ont souvent trait au manque de temps laissé par la vie professionnelle et familiale.

Ce constat rend d’autant plus remarquables les engagements bénévoles qui s’inscrivent dans une durée assez longue. La volonté de les reconnaître plus solennellement, comme le prévoit le texte que j’ai déposé le 26 septembre dernier sur le Bureau de notre Assemblée et dont nous débattons ce matin, prend ainsi tout son sens.

Chacun d’entre nous en conviendra : le bénévolat est insuffisamment reconnu dans notre pays. Il est vrai que, parmi les motivations des bénévoles, ne figure pas la recherche d’honneurs ou de gratifications. Il n’en demeure pas moins que leur apport au vivre-ensemble est essentiel et que, faute d’être mis en exergue, il pourrait finir par se tarir.

Aucune des différentes catégories de médailles officielles civiles ne permet de reconnaître l’engagement bénévole. Certes, des bénévoles figurent régulièrement dans les promotions des ordres nationaux de la Légion d’honneur ou du Mérite, notamment sur proposition du ministre chargé de la vie associative, mais ce sont le plus souvent des responsables associatifs, plutôt que des anonymes plus proches des réalités concrètes, même si une instruction du Premier ministre datant du 24 septembre 2008 a quelque peu infléchi, à la demande du Président de la République d’alors, les choix ministériels afin de favoriser une meilleure représentativité des promotions à ces deux ordres.

Quant à la médaille d’honneur de la jeunesse et des sports, elle permet de reconnaître davantage les bénévoles associatifs. Néanmoins, elle s’adresse essentiellement à celles et ceux qui agissent dans le cadre d’associations sportives ou d’éducation populaire, et non à l’ensemble des bénévoles.

Restent les récompenses décernées par des entités de droit privé, fondations et associations notamment. Parmi ces médailles non officielles figurent les Palmes du bénévolat, créées en décembre 2000 par la Fondation du bénévolat, présidée par M. Bernard Marie et reconnue d’utilité publique par décret du 5 mai 1995. Quelque 350 distinctions sont ainsi attribuées chaque année, sur proposition des maires ou de responsables associatifs, à des bénévoles particulièrement méritants, justifiant d’un certain nombre d’années passées au service des autres. Il n’en reste pas moins que ces Palmes du bénévolat ne constituent pas une récompense officielle.

La proposition de loi que j’ai l’honneur de rapporter devant vous vise à remédier à ce qui me semble constituer une carence et, pour tout dire, une injustice flagrante pour la très grande majorité des bénévoles qui donnent de leur énergie et de leur temps à la collectivité. Elle instaure, en son article 1er, une médaille d’honneur spécifique, comme il en existe actuellement une trentaine.

Depuis les années 1980, de nombreux parlementaires se sont interrogés, soit par voie de questions écrites, soit par le dépôt de propositions de loi, sur l’opportunité d’instituer une telle distinction. Il a toujours été répondu que le monde bénévole n’attendait pas un tel geste. Nul ne peut nier cependant qu’une récompense symbolique et officielle de l’engagement bénévole aurait valeur d’exemplarité et de reconnaissance collective à l’égard de ceux qui contribuent, au quotidien, à la vie associative, sociale, publique et même économique de notre pays. Je pense particulièrement aux sans-grades, à ceux qui œuvrent dans l’ombre, comme les personnes qui font depuis vingt ou trente ans le ménage dans les salles des Restos du Cœur, qui méritent toute notre reconnaissance et à qui l’on ne peut décerner une manifestation de cette reconnaissance.

Le dispositif retenu s’inspire du cadre existant pour les autres médailles civiles officielles, notamment de l’une des plus décernées, la médaille d’honneur du travail. La médaille d’honneur du bénévolat viserait ainsi à récompenser tout à la fois l’ancienneté des services honorables effectués à titre bénévole et la qualité exceptionnelle des initiatives prises à titre bénévole. Elle serait décernée, sans considération de nationalité, sous la forme de quatre échelons qui récompenseraient des durées passées au service des autres oscillant de vingt à trente-cinq ans. Sur ce dernier point, toutefois, il me semble qu’un raccourcissement s’impose pour mieux tenir compte de la spécificité du bénévolat, le parallèle avec la médaille d’honneur du travail étant sans doute inadapté. Je présenterai donc un amendement en ce sens.

L’autorité compétente pour attribuer la médaille d’honneur du bénévolat serait le ministre chargé de la vie associative, qui désignerait par arrêté deux promotions, à l’occasion des 1er janvier et 14 juillet de chaque année. Les préfets joueraient, eux aussi, un rôle décisionnel, sur délégation ministérielle.

Je n’ignore pas que le support législatif pour instituer cette nouvelle médaille d’honneur peut donner lieu à débat, car la plupart des médailles officielles actuelles reposent sur un fondement réglementaire. J’estime néanmoins que l’on ne peut dénier au Parlement toute capacité d’initiative en la matière. Certaines médailles officielles ont d’ailleurs été créées par le législateur, à l’instar de la médaille d’honneur des eaux et forêts, par la loi du 21 janvier 1910, de la médaille d’honneur des sociétés musicales et chorales, par la loi du 24 juillet 1924, ou encore de la médaille d’honneur des sapeurs-pompiers par la loi du 22 décembre 1937.

En outre, bien que l’article 34 de la Constitution énumère limitativement les différents aspects relevant du domaine de la loi, les empiétements du Parlement sur le domaine réglementaire ne sont pas rares. La jurisprudence du Conseil constitutionnel, issue de sa décision du 30 juillet 1982 sur la loi sur les prix et les revenus, autorise d’ailleurs ces situations en écartant, pour toute disposition réglementaire contenue dans une loi, tout motif d’inconstitutionnalité exclusivement fondé sur la violation des articles 34 et 37 de la Constitution.

Enfin, le Parlement a vu son rôle profondément évoluer à la suite de la révision constitutionnelle adoptée par le Congrès le 21 juillet 2008. Grâce à une meilleure répartition de l’ordre du jour ou à l’extension de nos pouvoirs de contrôle, une place plus importante a été accordée à nos initiatives, ce qui traduit le souhait du pouvoir constituant de donner davantage de poids aux propositions des parlementaires, en phase avec les réalités de terrain.

En tout état de cause, en adoptant cette proposition de loi, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation adresserait un signal important à l’exécutif, appelé, à son tour, à prendre des initiatives fortes. Le Parlement est en droit de manifester sa volonté de changement. La discussion de ce texte nous en offre l’occasion.

J’ai cru comprendre que certains députés de la majorité siégeant dans cette Commission partagent l’objectif poursuivi par ma proposition de loi. Je suis persuadé qu’un consensus peut se dégager aujourd’hui sur la nécessité d’avancer, quitte à revoir notre position en cas d’engagement gouvernemental en séance. Cette éventualité m’apparaît hautement souhaitable, afin de montrer la considération que la représentation nationale accorde à des femmes et à des hommes qui sont des modèles d’altruisme et de générosité.

M. Pierre Léautey. Nous partageons avec nos collègues de l’opposition le souci de défendre et de promouvoir l’engagement bénévole et le monde associatif, qui apportent une importante contribution à la vie démocratique, à la construction du lien social et à la création de richesses, qui permettent notamment de conserver hors du champ du secteur marchand nombre d’activités dans les domaines du sport, de la culture, des solidarités ou des loisirs. Aujourd’hui, au même titre que tous les acteurs de la société, les associations connaissent une conjoncture difficile. Il convient donc de soutenir le développement de la vie associative, comme le fait le Gouvernement, au travers du financement de têtes de réseaux, de la formation des bénévoles, ou encore des projets associatifs, par le biais de la création d’emplois associatifs qualifiés.

Mais il faut aussi aller plus loin. Si nous sommes tous d’accord pour honorer les bénévoles, il apparaît que la création d’une médaille d’honneur du bénévolat est finalement une fausse bonne idée. Il est vrai que la symbolique est importante, voire nécessaire, dans la reconnaissance de l’engagement bénévole, mais il existe déjà un grand nombre de décorations civiles et cette initiative reste trop limitée et insuffisante au regard de la reconnaissance et des moyens qui doivent être accordés aux bénévoles pour leur permettre d’accomplir dans de bonnes conditions leur engagement associatif.

En outre, nous nous demandons pourquoi l’opposition propose aujourd’hui un tel texte, après avoir fait si peu de cas du monde associatif pendant dix ans. Sans doute répondra-t-on qu’une promotion du bénévolat associatif dans la Légion d’honneur et dans l’ordre national du Mérite a été créée en 2008 sur décision du Président de la République. Mais, là encore, nous sommes dans le symbolique. La réalité de votre bilan, c’est une baisse de 36 % des crédits alloués aux réseaux associatifs dans le domaine de la jeunesse et de l’éducation populaire entre 2008 et 2012. Et c’est plus globalement un certain mépris à l’égard des corps intermédiaires, en particulier des associations, bien mal traitées ces dix dernières années.

Est-il donc vraiment opportun de créer cette médaille d’honneur du bénévolat ? N’y a-t-il pas de meilleures réponses à apporter aux très fortes attentes des bénévoles et du monde associatif ? Certes, une forme de reconnaissance du bénévolat est indispensable, mais, pour les associations et leurs membres, elle ne passe pas uniquement par une distinction honorifique. Le bénévolat, c’est avant tout une action, souvent à plusieurs, avec la volonté de porter collectivement un projet. La reconnaissance de l’engagement bénévole se joue d’abord au sein de l’association.

De même, la reconnaissance de l’action bénévole ne peut se traduire exclusivement par des critères d’ancienneté, comme le propose ce texte, car cela ne permet pas de valoriser l’engagement des jeunes, par exemple, qui sont le plus à même d’être stimulés par une reconnaissance de leur investissement personnel. L’obtention d’une distinction honorifique ne peut être mécaniquement liée au nombre d’années passées au sein d’une association. D’autres critères doivent être retenus, comme la qualité de l’investissement, sachant qu’un parcours associatif n’est jamais complètement linéaire et qu’il existe des temps d’investissement différents en fonction de l’âge et de la disponibilité.

De plus, il existe déjà diverses distinctions honorifiques pour les bénévoles, réparties en trois grandes familles ; les ordres nationaux, dont l’ordre national de la Légion d’honneur et l’ordre national du Mérite avec, pour le bénévolat, une promotion du bénévolat associatif ; les ordres ministériels ; les médailles d’honneur, au nombre de vingt-deux, qui s’attachent à un secteur d’activité particulier ou à une administration, trois d’entre elles valorisant des qualités personnelles pour acte de courage et de dévouement – médaille d’honneur du travail, médaille de la famille, médaille d’honneur de la santé et des affaires sociales.

La médaille de la jeunesse et des sports, instaurée par le décret du 14 octobre 1969, est destinée à récompenser les personnes qui se sont distinguées d’une manière particulièrement honorable au service de l’éducation physique et des sports, des mouvements de jeunesse et des activités socio-éducatives, des colonies de vacances et œuvres de plein air, et de toutes les activités se rattachant aux catégories définies ci-dessus. L’association française des médaillés de la jeunesse et des sports comprend aujourd’hui environ 17 000 licenciés, avec une faible proportion de femmes, au nombre de 2 900. La médaille comporte trois grades : bronze pour huit années de bénévolat, argent pour douze années, et or pour vingt années de bénévolat.

L’instruction est essentiellement déconcentrée : elle est assurée par les directions départementales de la jeunesse et des sports, sous l’autorité des préfets, qui disposent d’un contingent par promotion. Ils décident seuls pour le premier grade et transmettent les autres candidatures au ministère, avec un avis circonstancié.

Une circulaire annuelle aux préfets trace les orientations et priorités du ministère, après avis d’un comité consultatif national des médaillés. La récente circulaire du 12 août 2012 mentionne ainsi une règle de parité et ouvre déjà en partie le champ des activités, en indiquant : « Vos prochaines propositions devront comporter des candidatures relevant du domaine sportif, mais également tenir compte, tout particulièrement, de celles émanant du secteur de la jeunesse et des activités socio-éducatives. Ce rééquilibrage permettra ainsi de distinguer par cette décoration des dirigeants associatifs, des animateurs, des directeurs de centres de vacances et des responsables de chantiers de jeunes ».

Au-delà de l’opportunité même d’une médaille du bénévolat, la proposition de loi pose un problème d’ordre juridique puisque la création d’une nouvelle décoration nationale, aussi bien que l’élargissement du champ d’une décoration, relève par nature du domaine réglementaire, quel que soit le type de la décoration. Toute création prend ainsi la forme d’un décret simple : rien n’impose de le soumettre au Conseil d’État ou de l’adopter en conseil des ministres. En revanche, le grand chancelier de l’ordre national de la Légion d’honneur, garant de la cohérence du dispositif national des décorations civiles et militaires, doit être préalablement consulté en vertu de l’article R. 117 du code de la Légion d’honneur et de la médaille militaire.

Aussi le vecteur inhabituel d’une proposition de loi conduirait-il à court-circuiter la grande chancellerie et il ne fait guère de doute que son avis serait réservé, non seulement du fait de l’empiétement du Parlement sur les pouvoirs propres du Gouvernement, mais aussi vraisemblablement sur le fond.

Enfin, plus généralement, instaurer une simple médaille serait réducteur vis-à-vis de l’engagement bénévole, d’autant que le Gouvernement a donné un certain nombre de garanties quant au projet politique global qu’il souhaite conduire en la matière. En effet, la ministre s’est déjà engagée à plusieurs reprises à étendre le périmètre de la médaille de la jeunesse et des sports à l’ensemble des acteurs de la vie associative, mais elle souhaite inscrire cette mesure dans un projet gouvernemental de portée plus large et plus globale.

Dans les mois à venir, un congé d’engagement bénévole à destination des actifs pourrait être mis en place. Ce congé devrait contribuer à développer le bénévolat et donner les moyens à ceux qui souhaitent s’y investir, ou qui exercent déjà des responsabilités associatives, de le faire dans de bonnes conditions. L’idée serait un capital temps attaché à une personne qui pourrait ainsi utiliser un certain nombre de jours par an pour exercer des responsabilités associatives. La nature de ce congé serait analogue au congé de représentation.

De même, les outils déjà existants, en particulier la validation des acquis de l’expérience (VAE) dans le cadre du bénévolat, devraient être davantage promus et simplifiés, afin d’en garantir l’accès au plus grand nombre. Une réflexion sera également engagée sur les leviers et les freins à l’engagement.

En matière de vie associative, la politique du Gouvernement est construite sur le développement de relations fondées sur le partenariat et la concertation avec l’ensemble des composantes associatives.

Par ailleurs, d’autres chantiers très attendus par le secteur associatif sont en cours, comme celui sur la sécurisation des modalités de contractualisation entre la puissance publique et les associations. À cet égard, le ministère des sports et le ministère de l’économie sociale et solidaire viennent d’ouvrir un chantier visant à remettre à plat les modalités de contractualisation État-collectivités-associations.

Ce chantier, qui fera d’abord l’objet d’une concertation interministérielle approfondie, puis d’une concertation avec les collectivités territoriales et le secteur associatif, pourrait déboucher sur l’adoption de dispositions législatives dans le cadre du projet de loi sur l’économie sociale et solidaire.

Dans le courant de l’année 2013, le Gouvernement prendra également l’initiative d’une charte commune entre l’État, les associations et les collectivités, dans la continuité de la charte des engagements réciproques, signée entre l’État et le secteur associatif en 2001 sous le gouvernement de Lionel Jospin. Cette nouvelle charte fixera les conditions du partenariat entre l’État et le monde associatif : elle sera, en quelque sorte, la « boussole » de l’action gouvernementale dans sa relation avec le monde associatif. Il s’agit donc de la réactiver.

En résumé, cette proposition de loi apparaît inopportune pour deux raisons : d’une part, la création ou la modification d’une médaille relève du domaine réglementaire et non législatif ; d’autre part, Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative s’est d’ores et déjà engagée à étendre le périmètre de la médaille de la jeunesse et des sports à l’ensemble du secteur associatif. Ainsi, c’est bien un projet de portée plus large et plus globale qui répondra aux besoins des bénévoles et du monde associatif. Le Gouvernement travaille en ce sens.

Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles le groupe SRC vous demande de voter contre cette proposition de loi.

Mme Dominique Nachury. Je serai, quant à moi, plus brève et positive que l’orateur précédent : 22 % des Français, soit 11 à 12 millions de nos concitoyens, sont engagés dans une association. Ils sont 28 % si l’on inclut ceux qui sont engagés dans une organisation, une école ou un syndicat. Mais selon l’enquête France Bénévolat de 2012, les Français seraient 36 % à donner de leur temps pour les autres, que ce soit au sein d’une association, d’une organisation ou de manière informelle dans leur immeuble, leur quartier ou leur village, ce qui représente 18 millions de personnes, soit un Français sur trois. Les jeunes ne sont pas en reste, puisqu’ils sont près de 33 % à donner de leur temps, malgré toutes les sollicitations de la vie sociale.

Alors que l’on peut déplorer la perte du lien social dans nos sociétés et que les études sur la solitude sont alarmantes, ces chiffres rassurants montrent la nécessité de protéger et d’encourager ceux qui sont prêts à s’engager, sans compter, pour les autres.

Plusieurs initiatives ont déjà été prises en faveur de la reconnaissance du bénévolat. Il s’agit des Palmes du bénévolat, de la Fondation du bénévolat ; du passeport du bénévolat, qui permet aux bénévoles de valoriser leur engagement dans leur vie professionnelle – plus de 100 000 passeports ont été diffusés depuis 2008 – ; de la promotion du bénévolat associatif, intégrée à la promotion de la Légion d’honneur et à celle de l’ordre national du Mérite, créée sous le précédent quinquennat et qui permet de reconnaître et de récompenser l’ensemble d’une carrière et l’engagement associatif d’une personne dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’action sociale et de l’action humanitaire.

Cependant, la solidarité et l’engagement sont, comme le travail, des valeurs universelles situées au cœur du pacte républicain. Elles justifient donc la reconnaissance de la nation et, par conséquent, l’existence d’une médaille d’honneur.

Certes, on pourrait reprocher à ce texte de comporter des dispositions d’ordre réglementaire. Mais ce que souhaite Jean-Charles Taugourdeau, c’est avant tout envoyer un signe fort. Espérons qu’il sera soutenu dans cette entreprise au service du bien commun. Voilà pourquoi le groupe UMP soutient cette proposition de loi.

Mme Barbara Pompili. Je ne peux, pour ma part, cacher la consternation que m’inspire cette proposition de loi – et je pèse mes mots. Sous le précédent gouvernement, les subventions de l’État au monde associatif ont connu une baisse constante et drastique. Dans son rapport pour avis sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2013, notre collègue Malek Boutih a montré que ces diminutions ont été très préjudiciables au fonctionnement de certaines associations, au point de menacer la pérennité de certaines d’entre elles, comme le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), le Planning familial, mais aussi nombre de petites structures. Ce sont les associations d’action sociale ou œuvrant dans le domaine de la santé et du médicosocial qui ont été les premières victimes des diminutions des concours de l’État.

Monsieur le rapporteur, vous indiquez vouloir reconnaître et récompenser les mérites des bénévoles. Nous pouvons tous ici remercier ces personnes qui s’engagent généreusement, sans compter leur temps, au service des autres. Mais pourquoi l’ancienne majorité s’est-elle systématiquement acharnée à diminuer leurs moyens ? N’y a-t-il pas là une contradiction entre les actions passées de l’UMP et vos grandes déclarations d’aujourd’hui ? Assistons-nous à un acte de communication, visant à redorer l’image bien ternie de l’UMP, ou à une nouvelle forme de clientélisme ?

Soyons sérieux ! Qu’attendent les associations et les bénévoles associatifs ? Ce qu’attendent les associations et les bénévoles, c’est la reconnaissance par les pouvoirs publics de leur travail au bénéfice de l’intérêt général. Ils attendent la co-construction de politiques publiques et l’octroi de moyens financiers avec un engagement dans la durée. Les associations espèrent un changement d’approche radical, car la politique menée par l’ancien président Sarkozy était destructrice du vivre-ensemble, destructrice des liens sociaux, destructrice du tiers secteur.

Aujourd’hui, la ministre Valérie Fourneyron prend le contre-pied de cette politique. Il ne s’agit pas d’agiter un hochet politique, comme vous le faites, servant à renforcer la loyauté d’individus au pouvoir en place. C’est un changement d’approche radical qui est proposé par la majorité, les associations étant à nouveau reconnues comme des acteurs incontournables des politiques publiques, ce dont je me félicite.

Des réflexions sont en cours, auquel le tissu associatif participe, afin de recréer le partenariat État-associations. La volonté de redynamiser la charte des engagements réciproques pour bâtir un nouveau cadre général de travail s’inscrivant dans la durée est un exemple. La création de médailles supplémentaires pour susciter des engagements et remercier les bénévoles n’est pas la solution : fort heureusement, il existe d’autres pistes que celle du bling-bling !

Tout d’abord, et c’est en ce sens que la majorité actuelle avance, il convient de traiter les associations comme de réels partenaires, mais aussi de s’engager – y compris financièrement – dans la durée. C’est par cette approche que les pouvoirs publics se montreront respectueux du travail accompli par les associations et leurs nombreux bénévoles.

Au-delà de ce cadre général, d’autres leviers existent pour susciter l’engagement des uns et des autres, comme le service civique pour les jeunes. Je pense également à la création du « congé engagement », sur lequel les réflexions devront se poursuivre. Enfin, le fonds pour le développement de la vie associative, qui permet notamment de financer les formations des bénévoles, devrait être revalorisé. À cet égard, il me semble plus opportun de trouver des financements pour renforcer la formation et l’accompagnement des bénévoles, que d’accorder des gratifications symboliques à quelques-uns, telles des médailles en chocolat !

C’est en considérant avec respect et constance le monde associatif que nous remercierons de la meilleure façon qui soit les milliers de bénévoles qui s’investissent et agissent pour la collectivité.

Vous l’aurez compris : le groupe des Écologistes ne soutient pas cette proposition de loi.

M. Rudy Salles. Je suis consterné par les interventions de mes collègues de la majorité. Ils se sont contentés de lire des papiers sans doute mûrement réfléchis par leurs groupes respectifs pour démolir une proposition de loi somme toute extrêmement généreuse. On se croyait revenu à 1981, lorsque l’on était passé « de l’ombre à la lumière », avec des bons, qui aimaient les associations, et des méchants, qui ne les aimaient pas. Soutenir qu’il y a eu dix ans de destruction des associations est ridicule ! Que des porte-parole de groupes s’expriment ainsi me fait honte pour notre Commission. Je vous invite, mes chers collègues, à vous familiariser avec le débat parlementaire, qui requiert un tout autre niveau !

Jean-Charles Taugourdeau a accompli un excellent travail. Nous connaissons tous la situation sur le terrain et je n’ai pas encore entendu d’association se réjouir de quelque changement que ce soit intervenu depuis le 6 mai !

Cette proposition de loi est utile car elle contribue à revaloriser le statut des bénévoles, de toutes ces personnes modestes qui font un travail remarquable. La majorité s’est montrée tellement injuste que je souhaite rendre hommage à ce texte.

M. Pierre Léautey. Vous ne nous avez pas écoutés !

M. Rudy Salles. Je sais bien que cela ne changera rien pour vous, tant votre position est idéologique. Vous ne cherchez pas le consensus, y compris sur des sujets qui, comme celui-ci, en valent la peine. Je siège dans cette Assemblée depuis assez longtemps pour savoir que c’est votre habitude et que vous utilisez certaines associations comme des courroies de transmission. Pour notre part, nous nous y refusons !

Bien entendu, le groupe UDI soutiendra cette proposition de loi.

Mme Marie-George Buffet. Nous reconnaissons tous le rôle des associations dans la vie démocratique de notre pays, dans le lien social, dans l’organisation des loisirs, dans l’accès à la culture et au sport, mais aussi pour répondre à des besoins urgents : des associations caritatives telles que les Restaurants du cœur, le Secours populaire, le Secours catholique, ont commencé il y a quelques jours à distribuer des repas aux familles les plus en difficulté. Il faut également mentionner l’aide aux devoirs, grâce à laquelle des enfants en échec retrouvent le chemin de la réussite.

On compte 14 à 16 millions de bénévoles ponctuels et 3 millions de personnes engagées pleinement. Cet engagement représente du temps pris sur la vie de famille, sur les soirées et sur les week-ends, au bénéfice de plus de 1 million d’associations. Il y a là, je crois, une spécificité française dont il faut se féliciter.

De plus, on sous-estime trop souvent le rôle économique du monde associatif, qui représente pourtant 820 000 emplois à plein temps et 1 point du produit intérieur brut.

Il est bon que cette proposition de loi permette à notre Commission de parler des bénévoles. Je ne saurais contester la nécessité de les honorer, ayant moi-même eu l’occasion de remettre à de nombreuses reprises la médaille de la jeunesse et des sports. Pour les hommes et les femmes qui se sont engagés dans une association ou un club pendant des années, c’est toujours un moment d’émotion. Il ne faut pas négliger cet aspect.

De reste, comme l’a rappelé M. Pierre Léautey, il existe déjà des Palmes du bénévolat délivrées par la Fondation du bénévolat, et la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative compte étendre à l’ensemble des bénévoles associatifs la possibilité d’être honorés par la médaille de la jeunesse et des sports. Je m’en réjouis et j’espère que cela se fera rapidement.

Cela dit, les bénévoles aspirent à d’autres formes de reconnaissance. Ainsi, ne serait-il pas plus urgent d’élaborer un statut du bénévole ? Aucune majorité ne l’a fait. Nous devons y travailler ensemble en examinant les questions relatives aux congés, à la formation, mais aussi à la retraite. Sans les retraités, des pans entiers du monde associatif s’écrouleraient. Si j’ai défendu le droit à la retraite attaqué par la précédente majorité, c’est que je considère que ce temps est utile, notamment lorsqu’il est consacré au bénévolat.

Il faudrait ensuite attribuer des moyens. Le quotidien du bénévole, c’est souvent de chercher les bouts de ficelle permettant d’organiser une sortie pour les enfants, de payer le car, de louer un local, etc. Après des années de baisse, les crédits du ministère chargé de la vie associative sont gelés. J’espère que les années à venir verront une croissance des moyens alloués aux associations. Comme l’a souligné la ministre lors de son audition budgétaire, il conviendra également d’abandonner le système d’appels à projets, qui revient à soumettre les associations au bon vouloir des responsables ministériels. Ce n’est pas à eux de décider des priorités dans lesquelles doit s’inscrire le mouvement associatif pour obtenir des subventions. Il faut revenir à des subventions qui garantissent son fonctionnement et l’autonomie de ses choix.

Notre Commission s’honorerait en adoptant une démarche consensuelle pour répondre à ces besoins essentiels des bénévoles et en travaillant avec la ministre à l’élaboration d’une loi plus globale et d’un budget adapté.

M. Thierry Braillard. Le groupe RRDP ne soutient pas cette proposition de loi.

Le jeune parlementaire que je suis – n’en déplaise à M. Rudy Salles – ressent la nécessité absolue, au vu du bilan des dernières années, de passer d’un climat de défiance des associations vis-à-vis des pouvoirs publics à un climat de confiance. Ce n’est pas en créant une médaille que l’on franchira ce pas, mais, comme l’ont dit d’autres orateurs, en travaillant à un statut du bénévole, en améliorant la valorisation des acquis de l’expérience, en développant le service civique – engagement que nous avons pris dans le projet de loi de finances pour 2013 –, en offrant aux bénévoles, comme le font de nombreuses collectivités locales, des formations sur les risques juridiques et financiers de leur activité.

Bref, cette médaille nous apparaît plutôt comme un gadget.

Outre le fait que la disposition est d’ordre réglementaire, comme le souligne M. Pierre Léautey, le texte proposé soulève deux problèmes.

Premièrement, en indiquant que les activités récompensées peuvent être effectuées « au sein d’une association ou non », il met en cause la définition spécifique du bénévole. Comment le rapporteur définirait-il un bénévole hors du cadre associatif ?

Deuxièmement, il n’apporte aucune précision quant aux actions bénévoles au service d’une collectivité, au service d’autrui ou dans le cadre d’un service public. Un approfondissement serait souhaitable.

Enfin, seuls le ministre chargé de la vie associative et les représentants de l’État ayant reçu sa délégation pourraient décerner la médaille. Cela me semble contradictoire avec l’idée que le bénévolat récompensé peut avoir été exercé en dehors d’une association : il conviendrait plutôt d’établir une transversalité entre plusieurs ministères.

Compte tenu du défaut d’opportunité du texte, de son caractère juridiquement inadapté, des approximations de sa rédaction et de l’existence de dispositifs pour récompenser les bénévoles, nous ne le voterons pas.

Mme Brigitte Bourguignon. Personne ici ne doute de la valeur du bénévole. Chacun souhaite lui apporter une reconnaissance à sa juste valeur, même si c’est d’une manière différente.

Si l’intention de cette proposition de loi est louable, le texte n’en relève pas moins du symbole et apparaît trop restrictif.

Je suis peut-être une parlementaire inexpérimentée, monsieur Salles, mais je m’investis dans la vie associative depuis longtemps. Bénévole aux côtés de bénévoles, je peux vous affirmer que ces personnes ne cherchent pas une médaille mais une véritable reconnaissance du combat qu’ils mènent au jour le jour, du travail qu’ils accomplissent et de la cause qu’ils servent.

Les bénévoles rendent une mission de service public dans des domaines variés. À côté du sport, il faut mentionner l’économie sociale et solidaire, l’agriculture, la culture. La meilleure des reconnaissances est l’octroi des décorations existantes dans chacun de ces domaines.

La reconnaissance passe aussi par un travail plus large et plus respectueux sur le statut du bénévole, incluant la validation des acquis professionnels, voire, un jour, le bénéfice de points de retraite.

Je regrette que le dispositif exclue de fait les jeunes, puisqu’une médaille ne peut être accordée qu’à partir de vingt années d’activité. C’est d’autant plus dommage que l’on a beaucoup de mal, aujourd'hui, à recruter de jeunes bénévoles. Nous devrions faire davantage pour reconnaître et valoriser leur action. Le travail engagé par le ministère va dans le bon sens.

Puisque nous sommes tous d’accord sur la valeur du bénévole, nous devrions œuvrer ensemble à un dispositif beaucoup plus large plutôt que de nous lancer des noms d’oiseaux !

M. Dominique Le Mèner. Chacun est d’accord pour reconnaître le rôle irremplaçable des bénévoles dans notre société et nous sommes tous très attachés à ce modèle de vivre-ensemble.

Le propos du texte n’est pas de créer un nouveau « hochet de la vanité », comme disait Napoléon. La démarche se fonde sur la réalité des petites associations – et non celles qui ont une multitude de membres et emploient de nombreux salariés –, ces clubs sportifs ou autres qui font vivre les communes et qui, à travers cette distinction symbolique et spécifique, seraient heureux de bénéficier de la reconnaissance de la Nation.

Je félicite Jean-Charles Taugourdeau pour sa proposition. Néanmoins, étant moi-même l’auteur d’une proposition de loi tendant à créer un statut de l’élu associatif, déposée durant une précédente législature, je rejoins les propos de Mme Marie-George Buffet. Il est certes important de s’occuper du bénévolat, mais, aujourd’hui, la principale difficulté des associations est d’arriver à maintenir et à renouveler leurs cadres dirigeants. Le statut d’élu associatif me semble répondre à la volonté de reconnaissance de ceux qui s’engagent au-delà du rôle de simple bénévole. De nombreux bénévoles sont devenus des « consommateurs » qui passent d’une association à une autre et qui, en dépit de leur engagement, n’attendent pas cette reconnaissance.

Il faut donc distinguer, à mon sens, les personnes qui s’engagent dans le fonctionnement de l’association en participant à son bureau – ma proposition de loi, du reste, prévoyait que des points de retraite leur soient accordés – et les personnes simplement bénévoles.

Comme le dit Mme Buffet, les associations fonctionnent souvent avec des bouts de ficelle. C’est ce qui en fait la richesse et la solidarité. Il faut se demander à cet égard si la subvention doit être la règle. La déduction fiscale au titre des dons aux associations s’élève à 1,4 milliard d’euros par an et n’a pas connu de diminution. Ce dispositif, qui n’est pas un subventionnement, permet lui aussi à la Nation de montrer son attachement à la vie associative.

Le débat mérite donc d’être prolongé, non qu’il ne faille pas distinguer le bénévolat en créant une médaille d’honneur mais parce que le travail en profondeur sur le statut de l’élu associatif doit se poursuivre.

Mme Isabelle Attard. Nous sommes nombreux dans cette salle à avoir œuvré au sein d’associations en tant que bénévoles, voire en tant que responsables, et nous savons parfaitement quels sont les besoins réels : besoin de reconnaissance, de constance dans le soutien – pour ne pas avoir à se demander en permanence comment on pourra fonctionner l’année suivante –, de locaux, de terrains ou de véhicules. Ce n’est pas une médaille qui pourra pallier ces manques !

Par ailleurs, le texte prévoit de récompenser des activités bénévoles de très longue durée. Cet objectif me gêne profondément, car on sait bien que l’engagement n’est pas linéaire : on peut, par exemple, s’être engagé comme scout pendant quelques années dans sa jeunesse, arrêter pour faire ses études et élever ses enfants, adhérer plus tard à d’autres associations, et c’est tant mieux ! La variété des engagements, c’est la richesse de l’existence.

De même, un responsable d’association doit pouvoir passer le flambeau. Rester quarante ans dans la même structure n’est pas forcément bénéfique.

M. Paul Salen. Je pensais que notre Commission voterait ce texte à l’unanimité et sans restriction. Les bénévoles constituent un tissu indispensable pour notre société. Quand 36 % des personnes de plus de quinze ans sont engagées dans une action bénévole, il est normal que la Nation marque sa reconnaissance.

Le porte-parole du groupe SRC estime que ce n’est pas une bonne idée. J’espère que cet avis ne tient pas seulement au fait qu’elle émane d’un groupe de l’opposition !

L’ancienne majorité, a-t-il été dit également, n’aurait pas envoyé de signes de reconnaissance au monde associatif. Mais hier matin, lors de la séance de questions orales sans débat, c’est la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion qui m’a répondu alors que ma question avait trait à la vie sportive et associative !

M. Jean-Pierre Allossery. Cela n’a rien à voir !

M. Paul Salen. Le texte a le mérite de créer une médaille spécifique. Pour ma part, je remets aux bénévoles des médailles de l’Assemblée nationale. Loin de considérer que ce sont des hochets, ils apprécient ces marques de reconnaissance. Et la proposition de loi de M. Jean-Charles Taugourdeau envoie un signe fort dans leur direction.

M. Michel Ménard. Il y a au moins un consensus pour saluer l’action irremplaçable des bénévoles. Mais la démarche de la proposition de loi, qui ne vise qu’à l’attribution d’une médaille, est très réductrice. J’y retrouve ce à quoi le précédent Président de la République nous avait habitués : faire une loi pour communiquer plutôt que pour améliorer la vie de nos concitoyens. J’estime que les bénévoles méritent beaucoup mieux.

Non qu’il ne faille pas les honorer : beaucoup apprécient l’attribution d’une médaille. Mais il n’y a pas lieu de faire une loi supplémentaire, d’autant que la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative a lancé un travail bien plus large sur l’engagement associatif.

On entend souvent dire qu’il y a trop de lois en France et qu’il conviendrait d’en supprimer une ancienne lorsque l’on en vote une nouvelle. Ce n’est pas vraiment la perspective de ce texte !

Enfin, je partage l’interrogation de M. Thierry Braillard : comment la ministre de la vie associative pourrait-elle récompenser un bénévole n’agissant pas dans le cadre d’une association ?

M. Guénhaël Huet. Sans se bercer d’illusions, on espère parfois que certaines propositions puissent échapper au manichéisme politique. Il serait bon que, sur des sujets qui ne sont pas polémiques, nous puissions nous retrouver. La majorité se targuait d’apporter « un souffle de modernité ». L’adoption d’une proposition de loi n’ayant d’autre but que de reconnaître le mérite des bénévoles de nos associations était une belle occasion de le prouver !

Comme Mme Marie-George Buffet, je crois qu’il faut élaborer un statut des bénévoles. Mais, quand certains prennent pour argument les moyens financiers accordés ces dernières années, je rappelle que le budget du sport et de la vie associative pour 2013 est en diminution de 5 % par rapport à 2012.

Mes chers collègues de la majorité, qui peut le plus peut le moins. Vous demandez un statut du bénévole : dont acte, travaillons-y ! Vous demandez davantage de moyens pour les associations : c’est vous qui avez désormais la main ! Acceptez seulement la mesure que nous proposons : elle est honorable et devrait nous réunir. Pour ma part, je la soutiendrai.

M. Hervé Féron. À ceux qui nous accusent de vouloir être polémiques, je répondrai que le sujet est très politique.

Parlons, si vous le voulez bien, d’éducation populaire. À l’origine, c’était par exemple un contremaître qui donnait chez lui, une fois par semaine, des cours du soir aux ouvriers qui le souhaitaient. Il leur permettait ainsi de progresser dans l’échelle sociale et dans leur vie quotidienne. La loi de 1901 a favorisé les initiatives de grands ministres. À l’époque de Léo Lagrange, les pionniers bénévoles de l’éducation populaire prennent la pelle et la pioche pour construire des colonies de vacances. Pour la première fois, des enfants peuvent passer des vacances à la montagne ou à la mer, parfois pour un bénéfice plus sanitaire que de loisirs. Léo Lagrange demande au ministre chargé des chemins de fer que ces enfants soient transportés gratuitement. C’est l’époque de l’imagination. Les moyens supplémentaires que l’on trouve pour le monde associatif constituent une énorme reconnaissance de l’action des bénévoles. La France était à reconstruire et à construire. Sans l’éducation populaire et les associations, c’était impossible.

Depuis, le monde associatif a toujours accompagné les avancées en matière de culture, de sport, de vacances, de logement, de santé et de solidarité en permettant l’accès à la citoyenneté active et à la formation permanente. Mais, en l’espace de dix ans, la droite a mis à mal les associations, non seulement par absence de reconnaissance, mais aussi, parfois, par défiance. Des lignes budgétaires et des postes FONJEP, financés par le fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, ont été supprimés. Les gouvernements n’ont mené aucune politique en direction de la jeunesse.

Dès lors, une médaille d’honneur du bénévolat risque d’être reçue comme une provocation.

M. le rapporteur. J’aurai au moins appris une chose ce matin : provoquer un débat serait « réducteur » !

J’aurais souhaité que notre discussion conforte la situation du bénévole. Or la majorité, sans doute à dessein, confond deux choses : l’action et le dévouement du bénévole d’une part, la politique de l’État ou de tel ou tel gouvernement en matière de vie associative d’autre part.

Certaines actions sociétales sont uniquement tributaires des associations et des bénévoles, mais elles relèvent aussi de choix politiques. Je remarque à cet égard que le budget de l’action « Développement de la vie associative » pour 2013 est le même que celui de 2012.

Je remercie mes collègues de l’UDI et de l’UMP pour leur soutien. Je salue également l’intervention très constructive de Mme Marie-George Buffet. J’ajoute que si la ministre prend un décret pour inclure le bénévolat dans le périmètre de la médaille de la jeunesse et des sports, je ne pourrai personnellement que m’en réjouir.

Pour le reste, on a invoqué le « respect » tout en parlant de « médaille en chocolat ». Je ne trouve pas cela très respectueux à l’égard de ceux qui reçoivent une médaille ! La majorité adopte une position très politique sur un sujet qui devrait être très consensuel. Car, je le répète, ce texte n’est qu’un début pour arriver, un jour, à ce statut du bénévole dont on parle depuis des dizaines d’années.

Quant à l’idée d’attribuer des congés aux bénévoles pour qu’ils puissent exercer dans les associations, faut-il vous rappeler que les 35 heures nous ont fait passer de 5 à 10 semaines de congés payés ?

M. Jean-Pierre Allossery. Vous mélangez tout !

M. le rapporteur. Il n’empêche que l’on a donné ainsi du temps à des personnes qui souhaiteraient s’occuper de tel ou tel mandat associatif.

La majorité conteste aussi la durée de bénévolat à partir de laquelle la médaille peut être attribuée. L’amendement que je vous présenterai ramène cette durée à dix ans. Et, en tout état de cause, il ne s’agirait pas du temps passé dans une seule association.

Comme l’a dit M. Paul Salen, nous sommes parfois contraints, pour honorer les bénévoles, de remettre une médaille de l’Assemblée nationale. On pourrait reprocher aux députés de se mettre trop en valeur à cette occasion.

Du reste, mes chers collègues, l’engagement dans la vie associative dont vous faites tous état vous a permis de vous faire connaître. Vous avez pu y démontrer vos mérites et il y a lieu de penser que cela a contribué à votre élection à l’Assemblée nationale.

Bien entendu, l’attribution de la médaille ne serait pas automatique. Mais comment expliquer qu’un responsable d’association très connu se voie récompensé de la Légion d’honneur alors que rien n’est prévu pour les bénévoles ?

En mars 2012, lorsque j’ai déposé cette proposition de loi pour la première fois, j’avais déjà entendu dire que c’était un coup politique et médiatique pour redresser l’image médiatique de l’UMP. Je continue de revendiquer ce geste symbolique. Si les interventions de mes collègues peuvent inciter la ministre à étendre l’attribution de la médaille de la jeunesse et des sports aux bénévoles, je m’en réjouirai. Je tiens néanmoins à ce que l’on ne se limite pas aux associations. Le contremaître dont parlait M. Hervé Féron n’intervenait pas forcément dans le cadre d’une association. Et la médaille qui pourrait récompenser son action, ce n’est pas seulement lui qui en sera fier, ce sont aussi ses enfants et ses petits-enfants.

Il s’agit de délivrer un message : dans ce monde où chacun a tendance à se replier sur soi-même, donnez un peu de votre temps pour les autres !

La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Institution de la médaille d’honneur du bénévolat

La Commission est saisie de l’amendement 1 AC du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à réécrire l’article 1er de manière à simplifier et à améliorer les différents échelons de la médaille d’honneur du bénévolat. Il abaisse à dix, quinze, vingt et vingt-cinq ans les durées d’activité bénévole ouvrant droit à l’attribution de cette distinction. Il précise que son octroi pour services exceptionnels rendus à titre bénévole ne dépend pas des conditions d’ancienneté requises dans le cadre commun. Il prévoit enfin que la médaille est attribuée dans la limite d’un contingent annuel fixé par le ministre chargé de la vie associative.

La Commission rejette l’amendement 1 AC.

Puis elle rejette l’article 1er.

Article 2 : Gage financier

La Commission est saisie de l’amendement 2 AC du rapporteur, tendant à supprimer l’article 2.

M. le rapporteur. L’article de gage de la proposition de loi n’a pas lieu d’être car le dispositif, en l’absence de toute gratification des bénévoles médaillés, ne comporte que des charges de gestion pour l’administration.

La Commission adopte l’amendement 2 AC.

En conséquence, l’article 2 est supprimé.

La Commission ayant rejeté l’article 1er et supprimé l’article 2, l’ensemble de la proposition de loi est rejeté.

La séance est levée à onze heures vingt-cinq heures.

——fpfp——

Amendements examinés par la Commission

Amendement n° 1 AC présenté par M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur

Article 1er

Rédiger ainsi cet article :

« I. – La médaille d’honneur du bénévolat est destinée à récompenser :

« 1° Soit l’ancienneté des services honorables effectués, à titre bénévole, au sein d’une association ou non ;

« 2° Soit la qualité exceptionnelle des initiatives prises, à titre bénévole, au sein d’une association ou non.

« Peut se voir décerner la médaille d’honneur du bénévolat toute personne, qu’elle soit ou non de nationalité française, ayant exercé une activité à titre bénévole sur le territoire de la République.

« À titre exceptionnel et sous réserve que soient remplies les conditions d’ancienneté, la médaille d’honneur du bénévolat peut être décernée à toute personne, qu’elle soit ou non de nationalité française, résidant à l’étranger, si son activité bénévole a particulièrement contribué au bon renom de la France.

« II. – La médaille d’honneur du bénévolat comporte quatre échelons :

« 1° La médaille de bronze, qui est décernée après dix années d’activité bénévole ;

« 2° La médaille d’argent, qui est décernée après quinze années d’activité bénévole ;

« 3° La médaille d’or, qui est décernée après vingt années d’activité bénévole ;

« 4° La grande médaille d’or, qui est décernée après vingt-cinq années d’activité bénévole.

« La médaille d’honneur du bénévolat peut être décernée sans condition d’ancienneté à l’un quelconque des quatre échelons pour des services exceptionnels rendus à titre bénévole, au sein d’une association ou non.

« À condition que la demande ait été formulée dans les cinq ans suivant la date du décès, la médaille d’honneur du bénévolat peut être décernée, à titre posthume, aux personnes qui, au moment de leur décès, remplissaient la condition de durée d’activité associative bénévole requise en application du 1° du I. La grande médaille d’or peut être décernée, à titre posthume, sans condition de durée d’activité bénévole, à toute personne victime d’un accident mortel dans l’exercice de cette activité.

« III. – La médaille d’honneur du bénévolat est conférée dans la limite d’un contingent annuel fixé par arrêté du ministre chargé de la vie associative.

« IV. – La médaille d’honneur du bénévolat est retirée de plein droit :

« 1° Par déchéance de la nationalité française ;

« 2° Par toute condamnation à une peine afflictive ou infamante.

« V. – La médaille d’honneur du bénévolat est décernée par arrêté du ministre chargé de la vie associative à l’occasion des 1er janvier et 14 juillet de chaque année. Dans l’intervalle de ces deux promotions, elle ne peut être décernée qu’à l’occasion de cérémonies ayant un caractère exceptionnel, ou présidées par un membre du Gouvernement ou son représentant.

« Les représentants de l’État dans les départements, les collectivités d’outre-mer, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises peuvent recevoir délégation du ministre chargé de la vie associative pour décerner la médaille d’honneur du bénévolat dans leur département, collectivité d’outre-mer ou territoire respectif.

« La médaille d’honneur du bénévolat ne peut être décernée aux personnes résidant depuis moins de six mois dans un département, une collectivité d’outre-mer ou un territoire qu’après avis du représentant de l’État dans le département, la collectivité d’outre-mer ou le territoire de leur résidence antérieure. »

Amendement n° 2 AC présenté par M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur

Article 2

Supprimer cet article.

Informations relatives à la Commission

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a désigné :

– M. Yves Durand rapporteur pour le projet de loi de programmation et d’orientation pour la refondation de l’école de la République (sous réserve de son dépôt) ;

– M. Thierry Braillard rapporteur d’information et Mme Marie-George Buffet, MM. Pascal Deguihem et Guenhaël Huet corapporteurs sur l’application du « fair play » financier au modèle économique des clubs de football professionnel français.

Présences en réunion

Réunion du mercredi 28 novembre 2012 à 10 heures

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Isabelle Attard, M. Luc Belot, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Malek Boutih, M. Thierry Braillard, M. Emeric Bréhier, M. Xavier Breton, Mme Isabelle Bruneau, Mme Marie-George Buffet, Mme Dominique Chauvel, Mme Valérie Corre, M. Yves Daniel, M. Gérald Darmanin, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dessus, Mme Sophie Dion, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, Mme Françoise Dumas, M. William Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Vincent Feltesse, M. Hervé Féron, Mme Michèle Fournier-Armand, Mme Annie Genevard, M. Jean-Pierre Giran, M. Michel Herbillon, M. Patrick Hetzel, M. Guénhaël Huet, Mme Colette Langlade, M. Pierre Léautey, M. Dominique Le Mèner, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Lucette Lousteau, Mme Marion Maréchal-Le Pen, Mme Martine Martinel, M. François de Mazières, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Maud Olivier, Mme Barbara Pompili, M. Michel Pouzol, M. Franck Riester, M. Paul Salen, M. Rudy Salles, Mme Claudine Schmid, M. Claude Sturni, Mme Michèle Tabarot, M. Jean-Charles Taugourdeau, Mme Sylvie Tolmont, M. Stéphane Travert

Excusés. – Mme Huguette Bello, M. Jean-Louis Borloo, M. Ary Chalus, M. Bernard Debré, Mme Sonia Lagarde, Mme Julie Sommaruga, M. Jean Jacques Vlody