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Commission des affaires économiques

Mardi 23 juillet 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 104

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition de Mme Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du logement, sur le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (n° 1179)

– Examen du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (n° 1179) (M. Daniel Goldberg et Mme Audrey Linkenheld, rapporteurs)

La commission a auditionné Mme Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du logement, sur le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (n° 1179).

M. le président François Brottes. Madame la ministre, je suis heureux de vous accueillir pour la discussion du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Après votre intervention, je propose, conformément à la décision du bureau de notre Commission, qu’un seul orateur par groupe prenne la parole dans la discussion générale.

Je note que vous nous proposez une rénovation des règles d’urbanisme assez conséquente. Ce sujet passionne la Commission et, parce que vous n’êtes pas la première à le traiter, vous constaterez que, sur ce point, le passé a laissé certaines marques, y compris sur le président de la Commission que je suis. (Sourires.)

Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Le projet de loi que je vous présente aujourd’hui a été élaboré sur la base de nombreux travaux parlementaires passés – propositions de loi, rapports parlementaires… – et il répond à des amendements déposés par certains d’entre vous. Il repose sur trois axes : la régulation, la protection et l’innovation.

La démarche de régulation proposée se fonde sur un constat : la libre organisation par le marché du secteur du logement n’a pas rencontré les succès escomptés, ni pour améliorer l’offre ni, surtout, pour faire baisser les loyers. Depuis 1984, ils ont en effet augmenté à un rythme deux fois supérieur à celui de l’indice des prix, provoquant un véritable décrochage avec le niveau des revenus. Lors des dix dernières années, on a constaté en Île-de-France, une augmentation de 40 % des loyers à la relocation ! Les zones tendues sont devenues très tendues. Dans ce contexte, ce projet de loi introduit un mécanisme d’encadrement des loyers, qui doit être suffisamment contraignant pour être efficace, et suffisamment souple pour que nous n’entrions pas dans une logique de prix administrés. Je sais que des amendements ont été déposés pour améliorer le dispositif.

Ce mécanisme s’accompagnera d’un volet de simplification et de sécurisation de la location comportant la création d’un bail type, d’un état des lieux type avec l’utilisation d’une grille de vétusté… Les relations entre bailleurs et locataires seront simplifiées. Par ailleurs, par souci de justice, les meublés comme résidence principale seront soumis aux mêmes obligations que les biens loués vides.

La régulation portera également sur les professionnels de l’immobilier. Certaines des mesures que nous proposons sont issues d’un travail effectué par les représentants de ces professionnels ; d’autres sont inspirées par des travaux parlementaires. Nous avons voulu assurer davantage de transparence, de clarté et de simplicité, par exemple en ce qui concerne la gestion des copropriétés. Nous voulons également mettre fin au surenchérissement des prestations des agences immobilières. Nous répondons à une proposition de la profession en créant un Haut conseil des professions immobilières qui ouvrira la voie à des procédures disciplinaires sans doute plus efficaces que la voie judiciaire, seul recours possible aujourd’hui.

La régulation doit aussi permettre de favoriser la transition écologique des territoires. Certaines dispositions ont déjà été adoptées dans le cadre du projet de loi d’habilitation, et je vous ai déjà présenté la première ordonnance ; d’autres suivront. Nous sommes déterminés à lutter contre l’artificialisation des sols. Les bonnes intentions sont très largement partagées en la matière mais, depuis quinze ans, aucune mesure efficace n’a été prise pour enrayer la disparition des terres agricoles. Nous voulons donner aux élus des outils qui leur permettent d’agir et non plus de subir. Je rappelle que le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) est aujourd’hui directement corrélé au nombre d’habitants, à la voirie et à la richesse de la population. Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, et moi-même avons estimé qu’il était temps d’en modifier l’assiette, et d’intégrer les richesses collectives que constituent, par exemple, les zones agricoles, les zones naturelles, les zones de captages… Les collectivités concernées ne doivent pas être défavorisées par rapport à d’autres.

La démarche de protection est illustrée par un dispositif dont le projet de loi pose les fondations, et qui a vocation à se renforcer au cours du débat parlementaire : la garantie universelle des loyers (GUL). Elle apporte une réponse à de nombreuses situations que nous avons identifiées, et elle concerne de très nombreuses populations – en particulier les jeunes auxquels le Président de la République avait souhaité que soit apportée une caution locative. Elle permettra aussi de prévenir les expulsions. Ce drame social et familial a un coût financier considérable pour l’État, mais aussi pour les départements par le biais du Fonds de solidarité pour le logement (FSL). La détection précoce des situations d’impayés – dues dans 75 % à des accidents de la vie, comme l’a montré l’étude de l’agence nationale d’information sur le logement (ANIL) – permettrait de mettre en œuvre les dispositifs qui existent déjà.

Cette démarche répond aussi au problème des 3,5 millions de logements qui restent vacants dans notre pays. Nous savons que la crainte d’une relation directe avec le locataire constitue un frein à la location. L’intervention d’un tiers sécuriserait l’apport financier que le loyer peut représenter pour le propriétaire ; elle simplifierait la gestion du rapport parfois conflictuel avec les locataires. Le risque serait minimisé en étant mutualisé entre l’ensemble des locations du parc privé, contrairement aux dispositifs précédemment mis en œuvre qui avaient été fragilisés du fait de leur concentration sur une seule catégorie de population – c’était le cas de la Garantie des risques locatifs (GRL), mécanisme qui ne s’adressait qu’aux personnes dans les situations les plus difficiles.

De nombreuses mesures sont également destinées à sécuriser le logement des personnes les plus fragiles : la fusion entre le plan départemental d’accueil, d’hébergement et d’insertion (PDAHI) et le plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD), la consolidation du rôle des services intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO), et la participation des personnes accueillies dans les lieux d’hébergement. Un certain nombre de dispositifs sont issus des travaux de la Conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Ils prennent place dans le cadre de la réforme de structures d’hébergement que nous avons lancée.

Protéger c’est également lutter contre l’habitat indigne. Nous proposons de nombreuses mesures législatives qui permettront aux élus mobilisés d’être plus efficaces et qui donneront aux collectivités locales les moyens d’agir car elles sont trop souvent démunies face aux marchands de sommeil.

Le projet de loi est enfin marqué par l’innovation.

Une grande concertation a été menée sur l’attribution des logements sociaux. Un large consensus a été trouvé concernant, d’une part, la nécessaire transparence relative aux délais, et, d’autre part, la création du dossier unique. Cette dernière disposition, déjà expérimentée, doit être généralisée.

Le projet de loi met aussi en place un cadre législatif pour les « autres modes d’habitat » afin que soit assuré un traitement égalitaire. Je pense aux résidences principales à caractère léger ou démontable, et à l’habitat participatif – qui représente déjà 15 % de l’habitat en Suisse – que certaines collectivités locales souhaitent développer.

La réforme de l’urbanisme compte aussi parmi les innovations car nous avons la volonté de franchir un cap. Nous ne changeons rien à ce qu’a voulu le législateur en 1982 en confiant aux maires la possibilité de délivrer les autorisations d’urbanisme et les permis de construire, mais nous voulons que les élus travaillent dans de meilleures conditions en les associant à la rédaction de documents intercommunaux d’urbanisme. Aujourd’hui, 36 % des communes de France, pour l’essentiel des petites communes, se trouvent sous le régime du règlement national d’urbanisme, et n’ont en conséquence aucune latitude pour prendre des décisions en matière d’urbanisme puisque celles-ci relèvent des services de l’État : nous devons leur rendre une autonomie de décision !

Ce projet de loi ne constitue pas une « couche législative » supplémentaire ; il permet de revenir sur les textes essentiels en matière de logement que sont la loi de 1989, celle de 1965 sur les copropriétés, et celle de 1970 relatives aux professionnels de l’immobilier.

M. Jean-Marie Tetart. Oui, madame la ministre, vous innovez ! Vous innovez en donnant aussi peu de temps aux députés pour examiner, en fin de session extraordinaire un ensemble de documents de près de 900 pages présentant en 216 pages les 84 articles du dispositif. Vous innovez également en termes de concertation avec les parlementaires. Près de 900 amendements ont été déposés par les seuls députés de la majorité, ce qui en dit long sur les relations entre la majorité parlementaire et le Gouvernement, et sur le degré de finalisation du texte qui nous est présenté. Vous auriez pu mettre à profit l'été pour mettre au point un texte mieux ficelé, qui ait meilleure allure (Sourires), et ne nous en proposer l'examen qu'à la rentrée.

La densité et la complexité de ce texte ne nous permettent pas de réagir en quelques minutes à tous les articles. Nous souhaitons néanmoins en évoquer quelques-uns.

Nous aurons peu de désaccords s'agissant du titre II qui traite de l'habitat indigne et des copropriétés dégradées. Les travaux de l’ancien sénateur Dominique Braye, président de l’agence nationale de l’habitat (ANAH), et du sénateur Claude Dilain, nous ont confortés dans notre décision. En revanche, le titre premier nous semble dangereux. Vous souhaitez détendre et réguler le marché du parc locatif privé, pacifier les relations entre propriétaires et locataires, assainir les activités professionnelles immobilières, prévenir et encadrer les expulsions, mais vous imposez l'encadrement des loyers en zone tendue, la garantie universelle des loyers, et une avalanche de nouveaux documents et de dossiers types complexifiant les règles. Ce n'est pas avec ce type de dispositions que vous rassurerez les bailleurs privés actuels et que vous attirerez de nouveaux investisseurs !

On peut presque dire que vous voulez mettre en place une sorte de collectivisation du logement locatif privé par laquelle, entre plafonnement du loyer et charges obligatoires liées au foisonnement des dépenses et contraintes s'imposant aux biens loués, vous déterminez en quelque sorte le revenu maximum auquel peut prétendre le bailleur.

La méthode d'encadrement du loyer que vous proposez sera sans nul doute contre-productive car on observera un alignement progressif des loyers vers le loyer médian + 20 %, alignement qui contribuera à augmenter le loyer médian. Quant à la garantie universelle des loyers à la charge du bailleur en lieu et place des cautionnements volontaires, elle déresponsabilisera les locataires, elle conduira à une fiscalité accrue sur les loyers ou à un prélèvement supplémentaire sur Action Logement, et elle fera naître une nouvelle administration.

Nouvelle taxe, nouvelle administration, nouvel empilement réglementaire tout cela pour un niveau d'impayés de 2,5 % ! N'était-il pas plus simple de renforcer les sanctions envers les tricheurs, et la solidarité avec les plus démunis ? On a l'impression que vous préférez de grands systèmes à de petites mesures efficaces pour améliorer la situation des locataires, à l'exception, il est vrai, de certaines dispositions issues du projet de loi dit « Lefebvre », comme le renforcement des sanctions en cas de rétention abusive du dépôt de garantie, l'action en diminution de loyer en cas de sous-estimation de la surface habitable, l'allégement de la solidarité en cas de colocation, ou encore mise en place d'une grille de vétusté. Nous en prenons acte.

Le titre Ier répond aussi à la stigmatisation à l'égard des professionnels de l'immobilier que vous abordez dès les premières lignes de l'exposé des motifs en évoquant, je cite, « tarifs injustifiés et excessifs, non-respect des obligations, opacité… ». Si vous reconnaissez immédiatement que ces mauvaises pratiques sont le fait d’une minorité, vous n’en remettez pas moins en cause le modèle économique d’une profession qui s'adaptera certainement, mais avec quelles conséquences sur l'emploi du secteur ?

Quant au titre IV, il tente de répondre à l'objectif de construction de 500 000 logements tout en respectant les contraintes de la transition écologique des territoires. Nous partageons bien évidemment vos préoccupations concernant ce qui peut réduire la consommation des zones agricoles et des zones naturelles par une mobilisation des friches industrielles et commerciales, par une densification de l'urbanisation. Pourquoi ne pas modifier l’assiette de la DGF, comme vous venez de l’évoquer ? Nous sommes d'accord pour que la hiérarchie des documents d'urbanisme soit revue au profit du schéma de cohérence territorial (SCoT) et que l'intercommunalité joue un rôle de premier plan dans la responsabilité de l'aménagement du territoire et de l'urbanisation, mais nous n’approuverons cette disposition que si elle s’applique sur une base volontaire en ce qui concerne les PLU. Oui au PLU intercommunal (PLUi), mais pour les intercommunalités qui le décident ! Je crois que nous aurons sur ce point un allié précieux en la personne du président Brottes qui s'est vivement opposé au PLUi lors de la législature précédente.

M. Benoist Apparu et M. Michel Piron. Hélas ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Tetart. Nous espérons en tout cas qu’il n’a pas changé d’avis.

Pour conclure, ce texte oppose les propriétaires aux locataires, stigmatise une profession et décourage l'investissement locatif. Il complexifie tellement les règles et les procédures qu'il augmente les risques de contentieux entre propriétaires et locataires au lieu de participer à la pacification de leurs rapports. Il rendra laborieuse et à risque la gestion locative directe par le propriétaire ; la location sera si complexe que le recours à des professionnels deviendra indispensable.

Il s’agit par ailleurs d’un texte irréaliste quant aux délais de mise en œuvre des différentes dispositions envisagées, qui, de surcroît, ne tient pas compte des échéances municipales et départementales à venir en 2014 et en 2015.

Ce projet de loi crée un choc de complexification comme vous aimez les proposer, comme si un texte multipliant documents types, nouveaux organismes, observatoires et accréditations était le signe d'une œuvre aboutie !

Vous l'avez compris, nous reconnaissons l'importance des enjeux, mais nous doutons que votre projet de loi puisse y répondre. Heureusement, il réserve un avenir radieux aux yourtes ; c'est un des éléments qui nous permettra de rester zen dans les débats à venir. (Sourires.)

Mme Jacqueline Maquet. Je souhaite avant tout remercier les rapporteurs, Mme Audrey Linkenheld et M. Daniel Goldberg, pour leur travail très approfondi mené dans des délais très courts. Ce projet de loi, dit projet de loi ALUR, pour « accès au logement et urbanisme rénové », s'inscrit pleinement dans la feuille de route que s'est fixée le Gouvernement pour faire du logement une priorité. Il concrétise les vingt mesures du plan en faveur de l'investissement pour le logement présenté le 21 mars dernier à Alfortville par le Président de la République. Je rappelle qu’en matière de construction, l’objectif du quinquennat est fixé à 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux.

Depuis un an toutes les lois votées sur le logement vont dans ce sens. Pour mémoire, nous avons déjà voté, et cela dès juillet 2012, le renforcement des obligations de construction de logements sociaux passée de 20 à 25 %, la cession jusqu'à la gratuité de terrains de l'État, le relèvement du plafond du livret A, la mise en place d'un dispositif d'incitation à l'investissement locatif, le Plan d’investissement pour le logement afin de lever les freins à la production, l'encadrement des loyers à la première location ou à la relocation en zone tendue, ou encore le plan de rénovation énergétique des logements. Il y a deux mois, nous avons adopté la loi autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin d'éliminer les freins aux projets de construction de logements, de répondre dans l'urgence à la crise que connaît notre pays avec ses 3,6 millions de mal logés, et de permettre l'accès au logement pour tous.

Ce projet de loi composé de 84 articles est issu d'une large concertation avec l'ensemble des acteurs du secteur et des parlementaires. On ne peut que s'en féliciter. Il s’organise autour de quatre titres.

Les Titres I et II sont consacrés à l’encadrement des loyers, la prévention des expulsions, l’encadrement des professions immobilières, la lutte contre l'habitat indigne et les copropriétés dégradées, la réforme des syndics. Le projet de loi était très attendu afin de rétablir l'égalité d'accès au logement et de réguler le marché. Grâce à un travail d'expertise important effectué ces dernières semaines, nous avons déposé des amendements, avec mon collègue, Christophe Borgel, afin d'améliorer divers dispositifs du texte.

En ce qui concerne les titres III et IV du projet de loi, je peux vous dire, pour avoir travaillé durant toute ma carrière professionnelle dans un organisme HLM, qu'il est nécessaire de faire évoluer les politiques publiques du logement en les modernisant. Les attributions de logements sociaux doivent être plus transparentes et plus simples, et le demandeur doit être mieux informé. Le texte va dans ce sens. Je pense également que les demandes devraient être plus personnalisées ce qui permettrait de mener une bonne politique de peuplement et de mixité sociale.

Sur la gouvernance les mesures du texte sont intéressantes et vont dans le bon sens tout comme celles relatives au 1 % logement.

Enfin les mesures visant à améliorer le contrôle du secteur du logement social et la modernisation des organismes HLM sont également nécessaires.

Sur le dernier titre relatif à la modernisation de l'urbanisme dans une perspective de transition écologique des territoires, qu'ils s'agissent de planification stratégique, de modernisation des documents d'urbanisme, de lutte contre l'étalement urbain ou des politiques foncières, secteur dans lequel les règles complexes s'empilent, modernisation et simplification s’imposent.

Le groupe socialiste est totalement favorable à ce projet de loi.

M. Michel Piron. Madame la ministre, je connaissais bien évidemment votre don en matière de synthèse mais, cette fois, cela tient du prodige ! (Sourires.) En quelques minutes, vous évoquez 95 pages d’exposé des motifs, 216 pages de projet de loi stricto sensu et 600 pages d’études d’impact : reconnaissons combien votre talent est grand et sans doute à la mesure de votre capacité de création législative !

La tentation irrésistible de l’inflation normative sévit dans notre pays hypercentralisé – le Parlement en prend sa part comme le montre le nombre d’amendements que nous devons examiner sur ce texte. Elle nous amène à traiter dans la loi de questions qui, ailleurs, relèveraient du champ réglementaire. Cela ne contribue pas à la simplification que nous appelons tous de nos vœux. Je rappelle que nous avons habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification en matière de construction de logements. Cette situation devrait tout de même nous interroger !

Sur le fond, je commence par me réjouir que vous abordiez la question délicate – et transpartisane – du PLUi. Nous avons naguère eu ce débat très nourri en commission des affaires économiques et en commission du développement durable, puis dans l’hémicycle. Dans l’une des commissions, le vote s’était d’ailleurs terminé à sept voix contre sept…

Le PLUi me paraît un outil indispensable – rappelons que 27 000 communes françaises comptent moins de mille habitants, ce qui implique une capacité d’ingénierie réduite. À mon sens, le PLU devrait être intercommunal de droit sauf s’il se trouvait une majorité, peut-être qualifiée, pour y renoncer : ce serait déjà un pas considérable, ne serait-ce que pour bien rétablir le lien entre logement, zones d’activité et mobilité, mais aussi pour permettre des constructions en plus grand nombre et pour favoriser la mixité sociale et fonctionnelle.

En revanche, je crains que votre dispositif d’encadrement des loyers ne représente une erreur majeure : je ne conteste pas vos bonnes intentions, mais l’enfer en est pavé ! Vous partez d’un principe louable d’observation des loyers – même s’il faudra s’assurer que les observatoires observent correctement. Vous avez choisi de fonder ce mécanisme sur le loyer médian, et sur un écart de plus ou moins 20 % par rapport à cette médiane. En Île-de-France, cela représente 23 à 24 euros le mètre carré : beaucoup ne peuvent pas payer de telles sommes. Le risque existe que le seul résultat de ce mécanisme soit de faire diminuer le loyer de ceux qui appartiennent aux trois déciles supérieurs, quand les trois derniers déciles risqueraient de se voir demander une révision de leur bail pour rapprocher leur loyer de la médiane ! La question des loyers est une vraie question, et nous partageons tous votre préoccupation, mais j’ai peur que la réponse que vous apportez ne soit très mauvaise.

Le groupe UDI estime qu’il est d’abord nécessaire d’augmenter l’offre de logements : ce projet de loi facilite-t-il ce nécessaire accroissement ? Le PLUi y contribuera, mais à long terme : à court terme, les mesures que vous proposez seront-elles suffisantes ?

S’agissant de la garantie du risque locatif, comment mutualiser sans déresponsabiliser ? Il faut d’abord se demander qui finance le dispositif : il est nécessaire que les locataires soient impliqués. Il faudrait également étudier l’idée d’un ticket modérateur ; sinon, on risque simplement de créer une incitation à ne pas payer son loyer. C’est un sujet important, mais qui mérite des réglages précis.

Ce projet de loi aborde de très nombreux autres sujets, qui souvent ne posent pas problème de fond ; mais le diable se cache toujours dans les détails : nous devrons demeurer attentifs, et nous espérons que des amendements ne tétaniseront pas un marché qui a surtout besoin de souplesse.

S’agissant du fonds de prévoyance obligatoire, je me réjouis de vos projets, madame la ministre : j’ignorais que la propriété excluait la prévoyance !

Le groupe UDI aborde donc ce texte de façon constructive. Méfions-nous toutefois des délires de la raison : les experts estiment que l’énorme hausse des coûts de construction ces dernières années est due pour deux tiers à la production de nouvelles normes. Cela mérite que nous nous posions quelques questions.

M. François de Rugy. La loi ALUR, monsieur Tetart, c’est toujours mieux que la loi MOLLE (loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion), qui l’a précédée…

De l’hébergement d’urgence à l’accession à la propriété, du logement locatif privé au logement locatif social, ce projet de loi traite de tous les maillons de la chaîne. Pour répondre à la crise du logement, il fallait avoir une vision globale du problème : cela implique un texte volumineux. Ceux qui s’en plaignent aujourd’hui regrettaient hier l’absence de tel problème ou de telle mesure dans les textes précédents !

Le Gouvernement adopte ici une démarche nouvelle : le précédent voulait une France de propriétaires, mais n’avait pas fait grand-chose – à part quelques mesures qui ont fait grimper les prix. Lors d’un voyage en Espagne, avant même l’éclatement de la bulle immobilière, les responsables politiques de ce pays avaient pourtant mis en garde les nôtres : attention à ces folies !

Ce projet de loi applique aussi le principe selon lequel toutes les villes, toutes les régions, toutes les campagnes ne peuvent pas être traitées de la même façon.

Nous soutenons notamment l’encadrement des loyers. Il faut rompre avec l’idée, encore présente chez certains, selon laquelle la hausse des prix attirerait les investisseurs : au contraire, elle risque de nourrir une bulle spéculative, et elle restreint l’accès au logement, conduisant à la stagnation économique, voire à la récession. On le voit bien aujourd’hui. La maîtrise des loyers aura, à l’inverse, des effets bénéfiques pour toute la chaîne du logement, comme d’ailleurs la GUL, réponse concrète à la question de la solvabilité des locataires et moyen d’équilibrer les rapports entre propriétaires et locataires.

Plusieurs d’entre nous ont déjà, au cours de la législature précédente, soutenu le PLUi face aux conservatismes divers que nous allons retrouver. Si le PLUi ne devait se faire que sur une base volontaire, très peu seraient signés… Il est temps d’agir sur ce sujet.

Je veux enfin souligner que nous accorderons une attention particulière à la lutte contre l’étalement urbain et à la protection des terres agricoles, y compris en secteur périurbain, à la biodiversité, notamment en ville, à l’encadrement des loyers, à l’amélioration de la performance énergétique.

Les nombreux amendements déposés par la majorité sont, je crois, le signe d’une volonté de coopérer avec le Gouvernement.

M. André Chassaigne. On ne peut que se réjouir de la volonté du Gouvernement d’affronter cette terrible crise du logement. Ce projet de loi apporte à ce problème des réponses globales, et d’autres sur des points plus précis. Les quelques critiques que je me permettrai se veulent donc tout à fait constructives : je ne suis en rien hostile à ce texte.

Je regrette néanmoins le calendrier de son examen, en commission comme en séance publique : c’est un texte important, lourd, qui aurait mérité un autre traitement.

Les problèmes de politique du logement sont avant tout budgétaires : tant que les aides à la pierre n’auront pas été accrues suffisamment pour faire sortir de terre 150 000 logements sociaux par an, la crise du logement demeurera. Les mesures techniques ne remplaceront jamais les crédits manquants ! Le lobby bancaire redouble d’efforts pour mettre la main sur le livret A ; il faut au contraire que celui-ci finance le logement social, et non les profits des banques.

Je me réjouis de votre volonté de lutter contre la hausse des loyers – en Île-de-France, une augmentation de plus de moitié en dix ans ! Toutefois, le mécanisme d’encadrement que vous prévoyez est risqué – il pourrait provoquer une inflation des loyers, qui tendraient à s’aligner à la limite supérieure de 20 % au-dessus de la médiane. Il est de toute façon insuffisant : il ne faut pas entériner la hausse vertigineuse du coût du logement depuis vingt ans. Nous proposons donc plutôt de diminuer les loyers dans les zones tendues.

Avec la GUL, vous voulez protéger les propriétaires contre les impayés et donc réduire le nombre d’expulsions. Ce mécanisme serait mis en place en 2016 : n’est-ce pas trop tard ? Que se passera-t-il entre-temps ? Il y a urgence : Christophe Robert, délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre, estime que ce projet de loi n’est pas à la hauteur du problème des expulsions locatives.

Je regrette que vous ne reveniez pas sur les réformes iniques de la droite, notamment la loi Boutin. On ne peut pas évacuer la question de la mixité sociale, aujourd’hui menacée par une ghettoïsation croissante. Vous ne prévoyez rien non plus contre la spéculation immobilière.

Enfin, la réquisition de logements vacants a donné peu de résultats jusqu’à maintenant. Beaucoup d’associations soulignent que ce projet de loi ne traite pas suffisamment des plus défavorisés.

Encore une fois, je n’adopte pas ici une posture d’opposition : il s’agit pour nous d’améliorer ce texte.

M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cette loi modifiera la vie quotidienne de millions de nos concitoyens : se loger dans de bonnes conditions est l’une de leurs préoccupations majeures. Pouvoir mieux se loger, et plus facilement, c’est aussi avoir moins peur du lendemain : avec ce projet de loi très équilibré, nous rendrons service à nos compatriotes.

L’été semble être propice aux lois sur le logement : la loi sur la copropriété date du 10 juillet 1965, la loi Quilliot du 22 juin 1982, la loi Mermaz et Malandain du 6 juillet 1989… J’adresse d’ailleurs un salut à Guy Malandain, porteur depuis longtemps de cette question de l’urbanité et du vivre ensemble, et aujourd’hui maire de Trappes, ville qui traverse d’importantes difficultés.

Nous voulons faire partager une conviction : les intérêts des différents acteurs du logement – des propriétaires et des locataires, des copropriétaires et des syndics, des acheteurs, des vendeurs et des professionnels de l’immobilier – ne sont pas contradictoires.

La crise du logement a tant duré que ce n’est plus une simple crise : c’est un défaut structurel, qui pèse sur notre compétitivité. Il faut donc mobiliser l’ensemble des acteurs pour rassurer, sécuriser, mais aussi professionnaliser – les grandes fédérations du secteur y sont d’ailleurs favorables. Il faut établir plus de transparence dans les rapports entre propriétaires et locataires, par exemple sur le montant des loyers ; cette transparence accrue permettra aussi de séparer les bons professionnels de la très faible minorité qui n’exercent pas bien leur métier. Il faut plus d’efficacité pour aider les copropriétés en difficulté et pour résorber l’habitat indigne. Vos rapporteurs vous proposeront différentes améliorations sur ces sujets.

Monsieur Tetart, s’il y a 900 amendements de la majorité, voyez-y le souci d’améliorer le texte : vous parliez de « coproduction législative », nous la mettons en œuvre.

Sur les rapports locatifs, vous avez évoqué une « collectivisation » : nous sommes bien loin du modèle soviétique, dénoncé par tous ; en revanche, nous introduisons équilibre, sécurité et transparence.

Le Gouvernement proposera, via un amendement qui me semble aller dans le bon sens, de compléter le dispositif de l’article 8 visant à mettre en place une garantie universelle des loyers, et je pense que nous pourrons encore l’améliorer en séance. En tout état de cause, cela n’a pas de sens d’opposer comme vous le faites, monsieur Tetart, à ce dispositif, dont les objectifs et les moyens couvrent un champ très large, les dispositifs limités qui existent d’ores et déjà et dont l’efficacité reste à démontrer.

Les interventions de Mme Maquet et M. de Rugy ont permis de rappeler le contexte dans lequel ce projet de loi s’inscrit.

Je partage votre sentiment, monsieur Chassaigne, sur nos conditions de travail. Les risques inflationnistes que vous voyez dans le dispositif d’encadrement des loyers n’avaient pas échappé aux rapporteurs, mais il me semble que les garde-fous prévus par le texte sont susceptibles d’apaiser vos inquiétudes à cet égard.

Je vous rejoins, monsieur Piron, sur le sujet de l’offre de construction disponible, mais ce n’est pas l’objet principal de ce texte. Vous serez sans doute d’accord avec moi sur la nécessité d’augmenter la disponibilité du foncier, tant public que privé, si on veut faire baisser les coûts de construction. Je suis par ailleurs persuadé que le philosophe que vous êtes et le scientifique que j’ai été se rejoindront aussi sur le sujet de l’encadrement des loyers.

Je voudrais enfin rappeler que nous avons, avec Audrey Linkenheld, conduit plus de soixante-quinze auditions, qui ont été toutes enrichissantes.

M. le président François Brottes. Je voudrais quant à moi rappeler à M. Chassaigne que le travail en commission est tout à fait indépendant des dates d’ouverture et de clôture de la session. Cela signifie que nous pouvons nous réunir quand nous le voulons.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Quasiment tous ceux que nous avons entendus dans le cadre de nos auditions ont salué la concertation qui a présidé à l’élaboration de ce projet de loi. Je pense notamment aux dispositions relatives à l’habitat participatif, fruit d’une longue concertation tant avec les associations qu’avec les collectivités, comme l’est la réforme des procédures d’attribution des logements sociaux. Cette concertation n’est d’ailleurs pas terminée, les dispositions du texte ne constituant que les deux premières étapes de la réforme. En tant que membre du comité des sages, chargé de rendre un avis sur les propositions du Gouvernement, je peux vous dire que cette concertation a été guidée par le principe de l’universalité du logement social et de la mixité sociale.

De même, les dispositions réformant la gouvernance du logement social n’ont été élaborées qu’après consultation des partenaires de la gouvernance du logement social, tels l’Union sociale pour l’habitat ou encore l’Union d’économie sociale du logement, comme ils le reconnaissent eux-mêmes.

Je n’ai qu’un petit regret : que le Gouvernement ne nous propose qu’en séance la création de la future Agence nationale de contrôle du logement social, l’ANCOLS, qui doit résulter de la fusion de la mission interministérielle d’inspection du logement social, la MIILOS, et de L’Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de Construction, l’ANPEEC. J’aurais préféré que nous puissions en discuter en commission.

Les sujets de la densification et de l’artificialisation ont également donné lieu à concertation.

En ce qui concerne la réforme des documents d’urbanisme proposée au titre IV du projet de loi, toutes les associations d’élus et de nombreux acteurs du monde de l’urbanisme ont jugé qu’elle pouvait encore être améliorée, notamment en définissant des délais plus réalistes sans perdre en efficacité et en renforçant la collaboration entre les intercommunalités et les maires. D’autres sujets devront encore être débattus, notamment les conditions de l’automaticité du transfert du PLU intercommunal, la préservation des terres agricoles, la biodiversité, l’urbanisme commercial – je ne doute pas que la question des « drive » donne lieu à quelques échanges.

M. Philippe Bies, rapporteur pour avis de la commission de développement durable et de l’aménagement du territoire. Je rappelle que la commission du développement durable s’est saisie pour avis du titre IV, relatif à la modernisation des règles d’urbanisme. Je ne reviendrai pas sur la question du SCoT intégrateur, qui fait l’objet d’un consensus, ni sur celle de la généralisation des PLU intercommunaux, disposition qui semble moins consensuelle. Sur la question des délais, notre commission a voté un certain nombre d’amendements. La question des capacités d’ingénierie des collectivités locales, en particulier des communes, a également fait débat.

Surtout notre commission a voté la création de deux nouveaux outils, conformément à sa vocation d’innovation dans le domaine environnemental : l’inscription dans le code de l’urbanisme des espaces de continuité écologique ainsi que l’instauration d’un coefficient de biotope par surface, que certaines grandes villes, comme Berlin, expérimentent actuellement. L’objectif n’est pas de le rendre obligatoire, mais de permettre aux communes qui le souhaitent de le mettre en œuvre.

Mme la ministre. Vous qui me reprochez aujourd’hui l’ampleur de ce texte, monsieur Tetart et d’autres, dois-je vous rappeler que vous reprochiez aux deux précédents textes que j’ai défendus devant vous d’être lacunaires ? Si nous avons fait le choix aujourd’hui de vous présenter un projet de loi englobant l’ensemble des dispositions susceptibles de remédier aux difficultés du logement et de la construction, c’est dans le but de donner aux parlementaires une vision globale de l’action du Gouvernement dans ce domaine. Une série de textes consacrés à des dispositifs particuliers ne vous aurait pas permis de voir la cohérence d’ensemble de ce que nous vous proposons.

Comme madame Maquet l’a relevé, les modifications que nous vous proposons permettront de renforcer l’efficacité des procédures, notamment en matière d’attribution de logements sociaux. Nous le devons à la très large concertation qui a présidé à leur élaboration, et je voudrais à ce stade remercier tous ceux qui ont bien voulu y participer, en particulier les parlementaires. Je voudrais également saluer le travail extrêmement approfondi des deux rapporteurs.

Je voudrais ensuite souligner deux points. Premièrement, simplifier n’est pas déréguler, et la situation actuelle du logement, bien de première nécessité, rend plus que jamais nécessaire l’intervention de la puissance publique et la modification des règles en vigueur depuis 1989. Il faut simplifier le droit si on veut faciliter la construction de logements. C’est précisément l’objectif de l’ordonnance relative aux recours abusifs : grâce à cette ordonnance, la lutte contre l’abus de recours contre les permis de construire, serpent de mer des débats parlementaires, deviendra effective dans moins d’un mois.

Deuxièmement, encadrer n’est pas bloquer. Je ne conteste pas la sincérité de ceux qui évoquent les risques d’un mécanisme d’encadrement des loyers, mais il est quand même curieux de voir ceux qui se sont montrés des spectateurs acharnés de la dérégulation s’inquiéter aujourd’hui d’un risque de hausse des plus petits loyers. En tout état de cause, je suis ouverte à toute proposition susceptible d’améliorer les modalités du dispositif. Monsieur Piron, votre raisonnement serait valable si c’était les plus riches qui acquittaient les loyers les plus chers : or c’est loin d’être le cas. Par ailleurs, l’argument selon lequel l’encadrement des loyers favoriserait la hausse des loyers me semble pour le moins spécieux. Le choix de retenir le loyer médian comme loyer de référence traduit précisément notre volonté de permettre une évolution des loyers, mais une évolution contrôlée. Je me fais fort de vous démontrer que ce dispositif, loin d’être inutile, ne permettra pas de voir des hausses de 40 % à la relocation comme nous en avons vu ces dernières années. À ce propos, je vous informe dès maintenant que nous approuvons l’amendement du rapporteur relatif à la prise en compte du loyer au mètre carré dans le dispositif d’encadrement des loyers.

S’agissant de la garantie universelle des loyers, elle vise avant tout à protéger les petits propriétaires, aujourd’hui les premières victimes des impayés. Aucun des dispositifs existants, pas même les dispositifs de nature assurancielle, ne permet de les protéger, ni la garantie loyers impayés, la GLI, dont les critères sont désormais plus restrictifs que ceux retenus par les bailleurs, ni la garantie des risques locatifs, la GRL. La GUL est un dispositif équilibré qui ne déresponsabilise pas les locataires : ses mécanismes permettront toujours d’obtenir plus rapidement des résultats que les procédures que devrait engager une dame propriétaire d’un deux-pièces à Colombes et qui vit dans une maison de retraite à Menton. L’existence d’un tiers facilitera très significativement le recouvrement des loyers ou la mise en œuvre précoce de dispositifs d’accompagnement social. Ce dispositif permettra de remettre des logements sur le marché locatif, de préserver les intérêts des petits propriétaires et de faciliter l’accès au logement, en particulier des jeunes.

En ce qui concerne le PLU intercommunal, beaucoup ont évoqué la question des délais. Je voudrais préciser que le texte n’oblige pas les EPCI à lancer un PLUi dont ils n’auraient pas besoin.

S’agissant de l’ANCOLS, madame la rapporteure, le calendrier des travaux préparatoires au projet de loi n’a pas permis de vous présenter l’intégralité du dispositif, d’autant qu’il nous paraît nécessaire de consulter officiellement les organisations syndicales après une concertation qui a été très longue. C’est un dossier dont la majorité actuelle a hérité et la question a déjà fait l’objet de plusieurs rapports. La réforme d’Action Logement et la réduction du nombre de collecteurs d’une centaine il y a quelques années à une vingtaine aujourd’hui m’a semblé imposer la création d’un organisme unique de contrôle.

Le projet d’amendement sera présenté à votre commission en amont du travail en séance. Il s’agit pour nous d’agir dans la transparence la plus parfaite, mais également de rassurer les salariés de la MIILOS et de l’ANPEEC : il ne s’agit pas de remettre en cause leur statut, ni leur compétence professionnelle.

Je ne conteste pas l’utilité du coefficient de biotope, monsieur le rapporteur pour avis, déjà mis en œuvre par certains PLU. Je ne suis pas certaine pour autant qu’il peut trouver sa place dans le projet de loi, mais nous continuons à y travailler, notamment dans le cadre des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement.

En matière de réquisition des logements vacants, monsieur Chassaigne, j’ai tenu mes engagements : un décret d’application de la loi du 18 janvier, en voie de publication, devrait permettre, comme vous l’aviez proposé par voie d’amendement, d’éviter que certains propriétaires n’usent du délai qui leur est accordé pour remettre leur logement en état comme d’une manœuvre dilatoire. Je précise à cette occasion que 75 % des logements qui ont fait l’objet d’une réquisition ont été remis sur le marché à l’issue de la procédure.

M. le président François Brottes. Mes chers collègues, avant que nous commencions l’examen des amendements, je vous informe qu’ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 les amendements suivants : l’amendement CE 494 de M. Chassaigne relatif à la rétroactivité de l’aide personnalisée au logement, l’amendement CE 560 de M. Vignal relatif à l’hébergement chez l’habitant, l’amendement CE 604 de M. Éric Alauzet sur le droit de priorité des communes sur certains logements sociaux, les amendements CE 12, CE 13 et CE 15 de M. Guy Teissier, sur la création d’une commission nationale de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilière, l’amendement CE 687 de Mme Jacqueline Maquet sur les conditions d’attribution des aides au logement, les amendements CE 119, CE 115, CE 116 et CE 256 de M. François Pupponi, visant à déléguer aux maires des pouvoirs de police de santé publique appartenant aux préfets ou à instituer un permis de louer assorti d’un droit de visite incombant aux communes.

M. François Pupponi. Je suis surpris de voir l’irrecevabilité ainsi opposée à des amendements exactement conformes à la logique du projet de loi et qui ne coûtent pas un euro supplémentaire. Je pense notamment aux deux amendements qui proposent d’étendre la possibilité de faire des maires les bénéficiaires du transfert des pouvoirs de police du préfet, déjà prévu au bénéfice des présidents d’intercommunalités.

M. le président François Brottes. Le transfert d’une compétence de l’État constitue toujours une charge supplémentaire pour les collectivités locales. Je précise que votre amendement CE 116 a été déclaré irrecevable en l’état.

Ont également été déclarés irrecevables l’amendement CE 256 de M. François Pupponi élargissant le droit de préemption des communes aux parts de SCI, l’amendement CE 270 de M. Fabrice Verdier, relatif au statut du personnel en cas de cession d’un office public de l’habitat à une HLM, l’amendement CE 566 de Christophe Caresche, relatif à la gratuité de la garantie de la caisse de garantie du logement locatif social, l’amendement CE 89 d M. Jean-Marie Tetart, relatif à la mobilisation des terrains de l’État pour l’accueil des grands rassemblements, l’amendement CE 661 de M. Vincent Feltesse relatif à la création d’agences d’urbanisme par les collectivités territoriales, les amendements CE 498 de M. Dominique Potier et CE 457 de M. André Chassaigne relatifs à la création d’établissements publics fonciers régionaux, l’amendement CE 456 de M. André Chassaigne relatif à la création d’une agence nationale foncière, les amendements CE 455, toujours de M. André Chassaigne, et CE 421, de M. Daniel Fasquelle, relatifs à l’extension du droit de préemption des communes – il est vrai que c’est là une interprétation quelque peu extensive de l’article 40 !

M. François Pupponi. Mon amendement CE 256 vise à ce que la commune bénéficie de droit de la faculté d’exercer un droit de préemption sur les parts de SCI, dont elles ne bénéficient actuellement que si elles en font la demande. Je ne vois pas en quoi un droit déjà existant relèverait de l’article 40.

M. le président François Brottes. Il est vrai que notre commission a pu voter au cours de la législature précédente le droit de préemption des fonds de commerce. Je demanderai des précisions au président de la commission des finances.

La Commission en vient à l’examen des articles.

TITRE Ier

FAVORISER L’ACCÈS DE TOUS
À UN LOGEMENT DIGNE ET ABORDABLE

Chapitre Ier

Améliorer les rapports entre propriétaires
et locataires dans le parc privé

Article 1er  (articles 1er, 2, 3, 3-1, 3-2, 3-3 [nouveau], 4, 5, 6, 7,7-1 [nouveau], 8 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) : Modernisation des dispositions générales applicables aux rapports entre bailleurs et locataires

La commission examine l’amendement CE 504 de M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. L’article 1er ne me semble pas devoir satisfaire l’objectif qui lui est assigné, notamment parce que la rigueur de ses dispositions est hors de proportion avec le nombre extrêmement limité des cas concernés. Une telle sévérité ne pourra qu’inquiéter les propriétaires et risque de bouleverser le modèle économique des professions de l’immobilier.

M. le rapporteur. Défavorable.

Mme la ministre. Défavorable.

La commission rejette cet amendement.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CE 398 de M. Lionel Tardy, CE 289 du rapporteur et CE 58 de Mme Chantal Guittet. 

M. Lionel Tardy. L’article 1er actualise la liste des discriminations prohibées dans l’accès au logement figurant dans la loi de 1989 – le mot « race » est ainsi supprimé, ce qui fera certainement plaisir aux membres du groupe GDR. Le Défenseur des droits a répertorié dix-huit motifs de discrimination dont la liste figure dans l’article 225-1 du code pénal. Il est donc inutile d’alourdir le texte avec le rappel de ces motifs alors qu’un simple renvoi au code pénal a les mêmes effets.

M. le rapporteur. Je retire mon amendement au profit de celui de M. Tardy.

Les amendements CE 289 et CE 58 sont retirés.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CE 398.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE 295, CE 293, CE 297, CE 298 et CE 300 à CE 302 du rapporteur.

La commission examine en présentation commune les amendements CE 505 et CE 506 de M. Jean-Marie Tetart. 

M. Jean-Marie Tetart. Ces amendements contestent la création d’un contrat de location type puisque le bail est un acte négocié entre deux parties, libres d’en arrêter le contenu. Si la présence de mentions obligatoires dans le contrat peut avoir son utilité, l’existence d’un bail type est incompatible avec la liberté contractuelle. En outre, les dispositions qui s’y rapportent sont contradictoires puisqu’elles renvoient au décret la définition du contrat type tout en précisant dans la loi un certain nombre de mentions obligatoires.

Les amendements proposent que les mentions obligatoires soient fixées par décret, laissant pour le reste les parties établir le bail librement.

M. le rapporteur. J’émets un avis défavorable. La rédaction de l’article 3 de la loi de 1989, prévue par le projet de loi, n’empêche pas les parties de convenir dans le bail d’autres dispositions. Elles ont l’obligation d’y faire figurer les indications définies par le projet de loi mais, afin de préserver la liberté contractuelle, d’autres mentions demeurent possibles.

Mme la ministre. Vos amendements sont pour ainsi dire satisfaits par le texte du projet de loi. En imposant des mentions obligatoires consistantes, celui-ci simplifie la vie des propriétaires et des locataires puisqu’ils pourront se référer avec sérénité et certitude à un document lisible. En outre, rien n’interdit de compléter le bail type dès lors que les dispositions ajoutées respectent les prescriptions légales. Enfin, pour votre information, cette disposition a été discutée avec les professionnels de l’immobilier. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

Mme Laure de La Raudière. Vous obligez les bailleurs et locataires à souscrire un contrat type – dont nous ne connaissons pas encore le contenu – alors que votre objectif est d’introduire des mentions obligatoires.

Sans user de la contrainte législative pour créer un nouveau formulaire « Cerfa » et sans faire preuve d’un excès de formalisme, l’État pourrait proposer à ceux qui le souhaitent un modèle de contrat. Je m’interroge : dans quels autres domaines de la vie quotidienne des Français, l’État s’autorise-t-il par la loi à définir un contrat type ? Toute innovation juridique, et le bail type en est une, doit être maniée avec précaution.

L’amendement que nous défendons est presque de nature rédactionnelle : dès lors que les mentions obligatoires figurent dans le contrat, vous devez laisser les personnes concernées libres d’écrire ce qu’elles veulent. Rien ne vous empêche de mettre en libre accès sur le site du ministère chargé du logement un modèle de contrat.

M. Guy Teissier. Le bail type existe déjà sous la forme de formulaires, disponibles dans les papeteries, qui sont une source de conflits incalculables.

Chacun sait que le contrat lie les parties. Pourquoi alors leur imposer certaines clauses sur lesquelles ils n’auraient pas souhaité s’entendre ?

Vous dites qu’il est possible d’ajouter des clauses : cela n’est que l’application du droit. Je partage les interrogations de Mme de La Raudière sur des contrats préétablis par l’État régissant la vie quotidienne. Cela relève d’une forme de dirigisme et d’une dérive du droit qui ne sont pas acceptables.

Je ne suis évidemment pas opposé à ce que la possibilité soit offerte à ceux qui le souhaitent de recourir à un contrat type, notamment ceux qui n’utilisent pas les services des professionnels de l’immobilier.

M. Michel Piron. Quels sont les professionnels qui ont demandé la mise en place de ce contrat ?

M. le rapporteur. Vos amendements me semblent contradictoires : dans l’amendement CE 505, vous substituez au contrat type des mentions obligatoires tandis que dans l’amendement CE 506 vous supprimez ces mêmes mentions, affectant ainsi quelque peu leur caractère obligatoire…

Je vous rappelle les éléments devant être précisés dans le contrat de location : le nom ou la dénomination du bailleur ; le nom ou la dénomination du locataire ; la date de prise d’effet du bail et la durée de celui-ci ; la consistance, la destination ainsi que la surface habitable de la chose louée ; la désignation des locaux ; le montant du loyer ; le montant du loyer médian de référence majoré ; le montant du dernier loyer acquitté ; la nature et le montant des travaux effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat ; le montant du dépôt de garantie, si celui-ci est prévu. Or, j’entends que cette liste serait attentatoire aux libertés…

Les formulaires disponibles en papeterie posent problème. Avec le bail type que propose le projet de loi, chacun disposera d’un document de référence qui améliorera la transparence et apportera une simplification bienvenue, notamment pour les nombreux baux signés de gré à gré, souvent par des propriétaires d’un seul bien. Cette mesure permettra de pacifier les rapports locatifs, à tout le moins cet aspect-là.

Les professionnels ne sont pas défavorables à cette initiative puisqu’ils sont confrontés aux nombreux contentieux générés notamment par les formulaires type vendus dans le commerce.

M. Jean-Marie Tetart. L’amendement CE 506 ne propose pas de supprimer les mentions obligatoires mais de renvoyer leur définition à un décret. Mme la ministre, si vous considérez que les mentions obligatoires sont consistantes, cela signifie bien que les autres détails du bail sont réglés par les parties. C’est pourquoi nous préférons que soit arrêtée une liste d’exigences incompressibles mais qu’ensuite les parties demeurent libres d’organiser le contrat à leur guise.

Mme Laure de La Raudière. Sur le fond, nos positions ne sont pas très éloignées mais je maintiens que le contrat type soulève un problème juridique. Dès lors que le contrat type est défini par la loi, comment éviter en cas de mentions complémentaires que celles-ci soient considérées comme abusives ? J’aimerais que vous me rassuriez sur ce point.

Mme la ministre. Madame de La Raudière, afin de vous rassurer, sachez que le Conseil d’État a analysé en détail le projet de loi et n’a fait part d’aucune inquiétude au sujet du contrat type.

Il sera plus simple pour les usagers de disposer d’un document type que de devoir insérer des mentions type dans le contrat. Cela leur sera également plus utile.

Monsieur Piron, les syndicats de professionnels de l’immobilier que nous avons consultés n’ont manifesté aucune opposition aux documents type, qu’il s’agisse du contrat de location, de la grille de vétusté ou de l’état des lieux.

Ce bail type, légal et utile, devrait permettre de diminuer la conflictualité en matière de contrat de location.

M. le rapporteur. Le bail n’est pas la seule transaction commerciale entre deux personnes privées à laquelle la République prétend s’intéresser – il en est ainsi de la vente d’automobiles pour laquelle un certain nombre de règles sont fixées.

Nous avons choisi d’inscrire dans la loi plutôt que dans un décret les dix informations devant figurer dans le contrat car il s’agit d’éléments majeurs du contrat. De surcroît, il semblait important que la loi prenne acte des nouveautés dans le contenu du bail que sont les montants du dernier loyer et du loyer médian.

M. Benoist Apparu. Pourquoi est-il proposé de substituer le décret à la loi ? Parce que – Mme la ministre le confirmera – ce ministère ne peut rien entreprendre sans changer la loi – ce qui explique le pavé législatif que nous examinons aujourd’hui.

La principale mesure à prendre en matière de logement et d’urbanisme serait une grande loi de déclassement qui redonnerait de la souplesse. Or le projet de loi ajoute encore des dispositions législatives.

La précédente majorité a fait adopter six lois en six ans – vous nous l’avez assez répété, monsieur le Président – mais l’actuel gouvernement bat un record : cinq textes en un an !

Avec ce projet de loi, vous accentuez encore le caractère ultra-législatif de la matière qui en fait son défaut majeur.

M. le président François Brottes. Je ne suis pas loin de partager l’idée qu’il ne faut pas sanctuariser certains sujets dans la loi au risque de ne plus pouvoir rien y changer. Mais il est vrai que dans le cas d’espèce, la volonté de proposer une réforme durable devrait nous prémunir contre ce danger.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE 505 et CE 506.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE 304 du rapporteur.

La commission examine ensuite l’amendement CE 353 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement ajoute à la mention obligatoire du loyer médian majoré dans le contrat de location celle du loyer médian de référence.

La commission adopte l’amendement CE 353 ainsi que les amendements rédactionnels CE 362 et CE 366 du rapporteur.

La commission en vient à l’amendement CE 618 de Mme Michèle Bonneton. 

Mme Michèle Bonneton. L’amendement proposait d’indiquer dans le bail le loyer médian comme vient de le faire le rapporteur. En conséquence, je retire l’amendement.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE 373 à CE 375 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CE 620 de Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement a pour objectif de passer d’un à trois mois le délai pendant lequel le locataire peut demander à son propriétaire d'ajouter dans le contrat de bail les indications relatives au loyer précédent et au loyer de référence augmenté.

M. le président François Brottes. Que se passe-t-il lorsque le logement n’est pas loué dans les mois précédant la relocation ?

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le délai prévu par le projet de loi est suffisant pour permettre d’ajouter les informations manquantes dans le bail.

Mme la ministre. Je ne suis pas défavorable à cet amendement. Dans certains cas, le délai d’un mois peut être trop court. Monsieur le Président, le loyer précédent correspond au loyer acquitté par le dernier locataire, y compris en cas de vacance du logement pendant une certaine période.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CE 377 du rapporteur.

La commission examine en discussion commune les amendements CE 589 de Mme Laurence Abeille et CE 385 du rapporteur. 

Mme Laurence Abeille. L’article 1er donne la possibilité au locataire d’intenter une action en justice afin d’obtenir une diminution de loyer proportionnelle à l’écart constaté entre la surface du logement indiquée dans le bail et la surface réelle.

Or cette action ne peut être intentée que dans un délai de six mois à compter de la prise d’effet du bail, ce qui exclut nombre de locataires – notamment ceux titulaires de baux depuis plus de six mois lors de la promulgation de la loi. S’il est nécessaire de sécuriser les contrats de location en encadrant le recours, il importe de donner à tous les locataires la possibilité de l’exercer.

L’amendement prévoit également de limiter à six mois l’effet rétroactif de la diminution de loyer, contribuant ainsi à la sécurité des contrats en cours.

M. le rapporteur. Vous proposez de supprimer le délai fixé pour contester le loyer au motif d’une surface réelle inférieure à celle mentionnée dans le bail. Parallèlement, afin de limiter la rétroactivité de la mesure, vous précisez que la diminution de loyer prend effet à compter de la demande. Je suis favorable à votre amendement car la surface du logement est un élément essentiel du contrat de location. Je retire l’amendement CE 385.

Mme la ministre. Même avis pour les mêmes raisons.

M. Michel Piron. Je crains que vous ne renforciez l’insécurité juridique. En autorisant une demande en diminution du loyer au-delà de six mois après la prise d’effet du bail, vous fragilisez encore le contrat.

Mme la ministre. Le nombre de mètres carrés est une donnée objective. Le contrat n’est pas fragilisé dès lors que le métrage initial était correct.

M. Benoist Apparu. Une procédure similaire existe pour les ventes d’immeubles. Les délais sont-ils les mêmes ?

M. le président François Brottes. Votre question est notée en vue d’une réponse ultérieure.

L’amendement CE 385 est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CE 589.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE 386 et CE 388 du rapporteur.

La commission en vient à l’amendement CE 120 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. Cet amendement vise à rendre obligatoire la remise d’un exemplaire de l’état des lieux à chacune des parties intéressées. Il n’y a aujourd’hui pas d’obligation légale pour le bailleur de remettre un exemplaire au locataire. La jurisprudence a clairement indiqué que l’état des lieux est dénué de force probante dès lors qu’il n’est pas un contrat. Afin d’éviter les litiges et de renforcer les droits des locataires, l’amendement permet donc de donner à l’état des lieux la fiabilité qu’il possède déjà en pratique, en faisant de la remise d’un exemplaire aux parties une condition de sa validité.

M. le rapporteur. Votre amendement est satisfait. L’état des lieux est par nature contradictoire puisqu’il est signé par les deux parties. L’alinéa 36 de l’article 1er indique que celui-ci est établi en autant d’exemplaires que de parties lors de la remise et de la restitution des clés.

Mme la ministre. En réponse à M. Apparu, l’action en diminution de prix dans le cas d’une vente s’exerce dans un délai d’un an à compter de la signature de l’acte authentique.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CE 390 et CE 397 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CE 121 de M. Lionel Tardy. 

M. Lionel Tardy. Il est défendu.

M. le rapporteur. Même avis que sur l’amendement précédent.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE 394 du rapporteur.

Elle en vient ensuite l’amendement CE 392.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à accorder au locataire un délai de dix jours à compter de l'établissement de l'état des lieux pour demander au bailleur ou à son représentant de le compléter. Cela correspond à la pratique actuelle des professionnels de l'immobilier.

Mme la ministre. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission examine l’amendement CE 858 du rapporteur.

M. le rapporteur. Lorsque le bailleur ou son représentant refusent de compléter l’état des lieux, le locataire doit pouvoir saisir la commission départementale de concertation.

M. le président François Brottes. Pourra-t-il en connaître facilement l’adresse ?

M. le rapporteur. Oui car elle figure dans la notice d’information jointe au bail.

M. le président François Brottes. Je vérifierai.

Mme la ministre. Avis favorable.

M. Benoist Apparu. Cela signifie-t-il que l’ouverture d’un processus juridictionnel serait dès lors possible ?

M. le rapporteur. Si le locataire n’est pas satisfait, il peut engager les démarches qu’il jugera utiles de faire après avoir saisi la commission de concertation.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements CE 425 de M. Mathieu Hanotin et CE 1075 du rapporteur pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

M. Mathieu Hanotin. La mise en place d’une forme de « contrôle technique » des logements me semblerait opportune afin de promouvoir une politique de prévention et de parfaire notre droit positif.

Lors de la signature du bail, le propriétaire se doit de transmettre à son locataire des diagnostics concernant notamment la sécurité des installations de gaz, d’électricité, d’aération – contre le risque de monoxyde de carbone – ainsi que la présence d’amiante. En cas de vente, le code de la construction fait d’ores et déjà état d’une fréquence de trois années qu’il ne me paraît pas opportun de modifier.

Cela permettra de favoriser la prévention, de faire en sorte que les propriétaires réalisent le plus de travaux possibles afin d’éviter qu’un logement ne devienne insalubre et, enfin, de mieux évaluer l’éventuelle dangerosité d’un logement.

M. le rapporteur. Nous partageons largement les préoccupations de M. Hanotin, très attentif à ces questions depuis les drames qui ont eu lieu à Saint-Denis. Il est vrai que des propriétaires indélicats ne respectent pas les conditions minimales de sécurité et que les défaillances de certaines installations peuvent entraîner des catastrophes.

Néanmoins, je le prie de bien vouloir retirer son amendement au profit de l’amendement CE 1075 qui le satisfait partiellement. Outre que les articles L. 134-6 et suivants du code de la construction et de l’habitation concernent la vente et non la location, il est difficile que de tels diagnostics soient réalisés lors de chaque nouveau bail.

Par l’amendement CE 1075, je propose en revanche qu’il soit possible de demander à chaque nouveau bail la copie de l’état mentionné à l’article L. 1334-13 du code de la santé publique relatif à l’amiante ainsi qu’un état de l’installation intérieure d’électricité datant de moins de sept ans lorsque celle-ci a été réalisée depuis plus de quinze ans.

M. François Pupponi. Nous évoquons un sujet sensible et je partage les propos de M. Hanotin concernant la dangerosité de certains logements. Ces deux amendements vont dans le bon sens pour faire en sorte que le locataire soit le mieux informé possible. Néanmoins, une fois que tel est le cas, que se passe-t-il ? Sans doute conviendrait-il de rendre toute location impossible lorsque l’installation n’est pas aux normes.

M. le président François Brottes. Un « bidouillage » de l’installation électrique est toujours possible pendant la période de sept ans, ce qui n’est pas très rassurant pour les locataires.

M. Mathieu Hanotin.  Je suis d’accord avec l’amendement du rapporteur car l’information du locataire est importante en tant que telle mais il faut aller plus loin en faisant en sorte que le diagnostic réalisé soit opposable au propriétaire. Si ce dernier ne respecte pas ses obligations, le locataire doit pouvoir réaliser les travaux qui s’imposent en défalquant leur coût de son loyer.

M. Michel Piron. Je suis un peu étonné de ces propos.

La loi dite MOLLE a renforcé les droits des locataires en prévoyant, me semble-t-il, que ces derniers puissent réaliser des travaux dans un logement qui n’est pas aux normes et que leur coût soit facturé au propriétaire.

Les problèmes liés aux squats sont bien entendu différents.

M. Guy Teissier. Lors d’une vente, l’acte notarial précise que le preneur acquiert un bien qu’il accepte en l’état après l’avoir vu. Les différentes lois qui ont été votées imposent également un certain nombre de contrôles techniques, notamment en ce qui concerne la présence de plomb ou d’amiante.

Dans le domaine locatif, les problèmes qui viennent d’être soulevés me semblent très importants, l’absence de réparations essentielles à un logement me paraissant indigne de la part d’un propriétaire public ou privé, petit ou grand.

La situation décrite par M. Pupponi excède toutefois le strict domaine législatif puisque les marchands de sommeil, par définition, ne proposent pas de baux et qu’ils se situent dans une parfaite illégalité, d’où les drames que nous connaissons.

Il me semble que l’ajout du coût des diagnostics à la charge exclusive et particulière du propriétaire risque de restreindre le marché du logement locatif alors que les petits propriétaires notamment contribuent au développement du logement social et que, de surcroît, les loyers seront encadrés.

Plutôt que d’imposer un diagnostic, je propose que le locataire puisse prendre connaissance des factures attestant de la réalisation des travaux qui ont été entrepris, le cas échéant, afin de rendre conformes les installations de gaz et d’électricité. Lorsqu’un logement est occupé par un locataire depuis quinze ou vingt ans, le propriétaire doit être contractuellement obligé, s’il s’apprête à relouer, de procéder aux travaux qui s’imposent afin que son bien soit aux normes en vigueur à ce moment-là et de les justifier sur factures.

Mme la rapporteure. Lorsqu’un locataire considère que l’installation électrique de son logement est en mauvais état, il peut le signaler au service communal d’hygiène et de santé ou à l’agence régionale de santé. Si les inspecteurs assermentés confirment le défaut et si l’installation se révèle dangereuse, la collectivité peut engager des travaux d’office aux frais du propriétaire, comme le prévoit la loi MOLLE.

Je proposerai tout à l’heure un amendement CE 1071 visant à introduire dans notre débat la question de la décence, un décret en Conseil d’État en définissant par ailleurs les caractéristiques. L’obligation de louer un logement décent pèse en effet sur le bailleur mais lorsqu’un locataire est confronté à un logement indécent – et non insalubre, il n’est donc pas question ici des marchands de sommeil –, c’est à lui qu’il appartient paradoxalement d’en apporter la preuve, ce qui est extrêmement compliqué. Nous devons donc réfléchir à un moyen d’inverser la charge de la preuve de telle sorte que ce soit au propriétaire de démontrer le caractère décent de son bien. Je propose de joindre au bail un « constat de décence », ce qui suppose qu’un diagnostic de décence soit réalisé.

J’invite ceux qui partagent ces préoccupations mais qui considèrent que le dispositif proposé est très compliqué à formuler des propositions alternatives sur un sujet majeur porté par les associations et que les élus connaissent bien.

Enfin, cet amendement doit être associé à l’amendement CE 1072 concernant l’alinéa 52 et expliquant de façon plus détaillée ce que pourrait être ce constat de décence, sa fréquence – tous les cinq ans – et proposant son annexion au contrat de location.

M. le président François Brottes. Je propose à M. le rapporteur de rectifier l’amendement CE 1075 en renvoyant au décret la question des dates des installations électriques et en y ajoutant les installations de gaz.

Mme la ministre. Ce sujet est complexe car si chacun partage les objectifs définis par M. Hanotin, les moyens proposés ne sont pas nécessairement les bons. Par exemple, les risques existant en matière de monoxyde de carbone résultent d’un mauvais entretien de la chaudière et non de l’état du logement lorsque le locataire en prend possession. L’amendement CE 1075 me semble de ce point de vue-là plus intéressant que l’amendement CE 425.

Je souscris aux propos du président Brottes quant au renvoi de la question des dates à un décret car nous avons besoin d’une évaluation précise du coût des diagnostics mais, en revanche, je ne suis pas d’accord s’agissant de l’ajout des installations de gaz. Si les risquent relèvent de l’entretien de la chaudière, ils portent aussi sur des pièces mobiles comme des flexibles, lesquels ne relèvent pas de l’installation elle-même contrairement au domaine électrique.

J’ajoute que les tuyaux qui relient le bâtiment au réseau de gaz et à la prise de sortie présentent moins de risques qu’un réseau électrique dont les normes sont anciennes ou qui a été mal réaménagé ou transformé.

Je souhaite que M. Hanotin retire son amendement CE 425 au profit de celui du rapporteur, rectifié dans le sens indiqué.

M. le président François Brottes. Ne pas changer un flexible de gaz peut avoir des conséquences extrêmement graves.

M. Benoist Apparu. Vous tenez à préserver un équilibre entre propriétaires et locataires mais si la résolution des problèmes relatifs aux tuyaux de gaz incombe aux premiers, cela sera difficile.

N’est-on pas en train de confondre les normes en vigueur avec les éléments de décence alors que les premières s’appliquent au logement neuf et pas à l’ancien ? Sur un plan juridique, ne se dirige-t-on pas vers une obligation de travaux ?

Enfin, quid du choc de simplification et de l’absence de toute nouvelle norme ?

M. le président François Brottes. Je propose que le d) de l’amendement CE 1075 soit ainsi rédigé : « Un état de l’installation intérieure d’électricité, défini par un décret en Conseil d’État, dont l’objet est d’évaluer les risques pouvant porter atteinte à la sécurité des personnes. »

M. le rapporteur. Soit.

Monsieur Apparu, il ne s’agit pas de rendre les installations électriques conformes aux normes de 2013 mais de vérifier les conditions minimales de sécurité.

M. Mathieu Hanotin. Je retire l’amendement CE 425 mais je compte que nous discutions des questions qu’il soulève en séance publique s’agissant notamment du gaz, des émissions de monoxyde de carbone et de l’opposabilité du diagnostic.

L’amendement CE 425 est retiré.

M. le rapporteur. Je précise qu’il n’est pas question de réaliser un diagnostic lors de la signature de chaque nouveau bail.

M. François Pupponi. Il conviendrait de nous occuper également des situations induites par des propriétaires qui ne font pas signer de baux et de durcir les sanctions à leur encontre. Je vérifierai ce qu’il en est dans les textes actuels.

M. Jean-Marie Tetart. Le diagnostic proposé par l’amendement AC 1075 rectifié devrait distinguer les travaux à réaliser par le propriétaire et par le locataire.

M. le président François Brottes. Le renvoi au décret nous laisse du temps pour parachever la concertation avec les professionnels. Tout le monde ne pouvant être logé à la même enseigne, si vous me passez l’expression, le législateur se doit de laisser une certaine latitude au pouvoir exécutif.

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LISTE DES AMENDEMENTS EXAMINÉS

La liste des amendements examinés par la commission est disponible ici. 1

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 23 juillet 2013 à 17 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, Mme Ericka Bareigts, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Razzy Hammadi, M. Mathieu Hanotin, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, Mme Annick Lepetit, M. Philippe Le Ray, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, M. Alain Marc, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Michel Piron, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, M. Jean-Claude Bouchet, M. Jean-Michel Couve, Mme Jeanine Dubié, M. Daniel Fasquelle, M. Joël Giraud, M. Thierry Lazaro, Mme Annick Le Loch, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - Mme Laurence Abeille, M. Éric Alauzet, M. Benoist Apparu, M. Sylvain Berrios, M. Philippe Bies, Mme Kheira Bouziane, M. Jean-Louis Bricout, M. Christophe Caresche, M. Guillaume Chevrollier, Mme Carole Delga, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. William Dumas, Mme Annie Genevard, M. Bernard Gérard, Mme Chantal Guittet, Mme Viviane Le Dissez, M. Michel Ménard, M. François de Rugy, M. Martial Saddier, Mme Suzanne Tallard, M. Guy Teissier

1 http://recherche2.assemblee-nationale.fr/amendements/resultats.jsp?NUM_INIT=1179&LEGISLATURE=14&ORGANE=Affaires%20économiques