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Commission des affaires économiques

Mercredi 18 juin 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 94

Présidence de M. François Brottes Président

– Examen, en deuxième lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, facilitant le déploiement d’un réseau d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur l’espace public (n° 1995) (Mme Frédérique Massat, rapporteure)

La commission a examiné, en deuxième lecture, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, facilitant le déploiement d’un réseau d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur l’espace public (n° 1995) sur le rapport de Mme Frédérique Massat.

M. le président François Brottes. La proposition de loi est une des premières étapes de la transition énergétique, puisqu’elle vise à faciliter le déploiement d’un réseau d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur le territoire. Le Sénat ayant accompli sur ce texte un travail de qualité, comme il en a l’habitude, la rapporteure invitera les membres de la Commission à un vote conforme, ce qui ne leur laisse qu’une faible marge de manœuvre.

Mme Frédérique Massat, rapporteure. Monsieur le président, vous avez parfaitement résumé la situation. Les quelques ajouts de Sénat me semblent pertinents, et aucun amendement n’a été déposé sur le texte. Le vote conforme auquel je convie nos collègues permettrait son adoption définitive avant la fin de la session extraordinaire.

Déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 25 février 2014, la proposition de loi a été examinée par la commission des affaires économiques le 15 avril, et adopté le 6 mai par l’Assemblée en séance publique. Votée par le Sénat le 6 juin, elle nous revient en deuxième lecture. Sur ce dossier, le Gouvernement comme le Parlement manifestent la volonté d’aller vite, sans attendre le projet de loi sur la transition énergétique, dont l’examen commencera au plus tôt en septembre.

La présente proposition de loi contient un dispositif clair et ciblé. Elle permet à un opérateur national de déployer un réseau d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur le domaine public, si l’opération s’inscrit dans un projet de dimension nationale. Les modalités d’implantation du réseau d’infrastructures de recharge font l’objet d’une concertation entre l’opérateur national, les acteurs locaux et les responsables du réseau électrique.

Le Sénat a apporté une modification de fond, en définissant deux critères, qui permettront de considérer qu’un projet est de « dimension nationale ». D’une part, celui-ci doit concerner au moins deux régions, soit un espace qui, aux termes de la future législation, pourrait couvrir un quart de la France. D’autre part, le nombre et la répartition des bornes à implanter doivent assurer un aménagement équilibré du territoire. Un tel ajout garantit la Constitutionnalité du texte : le Gouvernement ne pourra pas refuser d’approuver un projet pour des raisons qui ne seraient pas précisées dans la loi.

Le Sénat a également apporté des modifications techniques. La compétence octroyée à l’État ou à l’opérateur national couvre, outre l’implantation du réseau d’infrastructures de recharge, son entretien et son exploitation, qui ne sauraient incomber aux collectivités locales. Les charges de chacun sont ainsi précisées. Par ailleurs, les collectivités gestionnaires du domaine public sont incluses dans la concertation quant aux modalités d’implantation des bornes sur le domaine public, ce qui, en pratique, concerne les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Ces modifications complètent et améliorent le texte, que je vous propose d’adopter dans les mêmes termes que le Sénat.

M. Antoine Herth. Le texte va dans la bonne direction, car l’absence de réseau de bornes structuré limite le développement des véhicules électriques rechargeables. Le groupe UMP a cependant choisi de s’abstenir, pour trois raisons.

Notre première réserve est politique. Un projet de loi visant à redessiner la carte des régions est présenté aujourd’hui même au Conseil des ministres, et nous n’entendons pas donner de blanc-seing à un texte dont les termes demeurent très malléables. Ce n’est pas la même chose de parler de deux régions comme, par exemple, l’Alsace et la Lorraine actuelles, ou du quart de la France.

Nous regrettons également que la proposition de loi ne mentionne pas l’implication des collectivités locales. Les véhicules actuellement disponibles sur le marché sont de type citadin, signe que les constructeurs s’adressent à des utilisateurs qui circuleront à l’intérieur ou à proximité des agglomérations. Il faut pourtant que les véhicules puissent traverser la France.

Le texte prévoit enfin que le nombre et la répartition des bornes implantées assurent un aménagement équilibré des territoires concernés. Or cet aménagement dépend en partie des évolutions technologiques, notamment de la capacité de charge des batteries. Il suffira qu’un constructeur commercialise demain une batterie de grande capacité pour que le maillage imposé devienne superflu.

M. le président François Brottes. Le principe qui consiste à subordonner l’octroi d’une licence nationale à la présence d’un opérateur sur deux régions a été utilisé pour les licences de télécommunication, notamment pour WIMAX.

Mme Fanny Dombre Coste. Les rapporteurs du texte – Mme Massat à l’Assemblée nationale, M. Filleul au Sénat – ont travaillé à un rythme soutenu, ce dont je les remercie. Je souhaite moi aussi que le texte soit adopté avant la fin de la session extraordinaire de juillet, ce qui donnera une dimension concrète à l’installation des bornes de recharge. Il faut aller vite, car le potentiel de développement des véhicules électriques suscite les convoitises, comme le montre le rapprochement du groupe américain Tesla et de l’allemand BMW. Si leur discussion aboutit à une unification des normes, elle ouvrira le marché américain aux entreprises françaises.

Notre responsabilité est de maintenir dans notre pays un environnement favorable, qui permette à nos industriels de conserver leur place de leader sur le marché. Pour cela, il faut accélérer la mise en place des bornes, tandis que les constructeurs poursuivront les investissements, afin de relever les défis techniques que constituent la durée de charge, l’autonomie des batteries et l’universalité des normes de recharge.

Le Sénat a utilement complété le texte en précisant le moyen d’apprécier la dimension nationale du projet présenté par l’opérateur. Le sujet a été au cœur de nos débats. L’État étant le garant d’un déploiement équilibré sur tout le territoire, il vérifiera que les opérateurs respectent des exigences spatiales et temporelles. Tout le territoire devra être couvert – il faut éviter que les opérateurs équipent les centres urbains avant de pourvoir les territoires périurbains et ruraux – et les délais d’équipement devront être raisonnables.

Pour toutes les raisons que nous avons évoquées lors du débat à l’Assemblée, et compte tenu des enjeux environnementaux, industriels et sociétaux du dossier, nous voterons le texte en l’état.

M. Thierry Benoit. Le groupe UDI soutient la proposition de loi, qui s’inscrit dans le prolongement des travaux menés par M. Borloo. Celui-ci, lorsqu’il était ministre de l’écologie, avait initié un plan national pour le développement des véhicules électriques, lequel prévoyait des objectifs chiffrés pour 2015. La proposition de loi est également fidèle à l’esprit du Grenelle de l’environnement. Sur des sujets aussi importants que la transition énergétique ou les enjeux climatiques et environnementaux, il n’y a pas lieu de ralentir le processus.

Nous appelons toutefois votre attention sur quatre points.

La rapporteure avait envisagé que les collectivités territoriales disposent d’un droit de veto sur le déploiement des bornes. Le mot peut paraître un peu fort, mais il est indispensable que les maires aient leur mot à dire à ce sujet.

Pour garantir la dimension nationale d’un projet, il me semble restrictif de se limiter à deux régions, d’autant que deux régions actuelles pourront, dans quelques mois, n’en faire plus qu’une. Nous connaissons mal les intentions du Président de la République et du Gouvernement en matière de redécoupage. Préciser le nombre de régions concernées par un projet peut donc mener à des malentendus.

En troisième lieu, notre groupe souhaite que le Parlement soit associé à toutes les étapes du déploiement, notamment à la phase de consultation et de sélection des opérateurs.

Le quatrième point, qui pourra être mis en œuvre dans le projet sur loi sur la transition énergétique, a trait à l’information, à la vulgarisation et à la démocratisation. Les territoires ne sont pas égaux face aux nouvelles technologies. Le gaz naturel n’est pas accessible sur l’ensemble du territoire. Les transports, comme la téléphonie mobile ou la technologie numérique, sont moins performants dans les territoires ruraux que dans les grandes métropoles. Nous devons tout faire pour que nos concitoyens comprennent que le projet de déploiement des bornes électriques les concerne tous. C’est un point auquel nous resterons vigilants, ce qui ne nous empêchera pas de voter le texte avec conviction.

Mme Brigitte Allain. Le groupe écologiste adhère totalement à cette proposition de loi.

La dimension régionale ou interrégionale est très intéressante. Mais il faut qu’elle soit déclinée de manière à ce que tous les territoires soient assurés de disposer d’un bon maillage. C’est peut-être ce qui manque dans ce texte.

Il faudrait aussi que l’implantation des stations de recharge électrique soit liée aux zones de covoiturage, de façon à permettre une offre complète en matière d’économie d’énergie, notamment dans les territoires ruraux, où les services publics de transport ne sont parfois pas faciles à organiser ou pas toujours appropriés. Cet élément devra être pris en compte, en particulier dans la future loi de transition énergétique.

Mme Delphine Batho. Je félicite la rapporteure pour son travail sur ce texte de bon sens.

Dans le développement du véhicule électrique, il faut éviter les hésitations et la succession de signaux et contre-signaux. J’avais dénoncé en octobre dernier le décret réduisant le bonus pour l’achat d’un véhicule électrique, qui s’est traduit par une diminution de 26 % des ventes en la matière. Dans le débat au Sénat, le ministre a reconnu que ce décret posait effectivement problème et qu’il serait corrigé. Je souhaite donc que ce bonus soit rétabli à 7 000 euros et que les entreprises de location de longue durée notamment soient éligibles. Avez-vous des informations sur la publication de ce décret, dont le ministre avait annoncé qu’il entrerait en vigueur le 1er juillet prochain ?

M. Lionel Tardy. Ma principale objection sur ce texte portait sur la condition restrictive visant l’opérateur national : je me réjouis que le Gouvernement ait perçu le risque de rupture d’égalité contenu dans la rédaction initiale et prévu que cet opérateur ne se limite pas à un organisme dans lequel une personne publique détient une participation. Il ne faut en effet pas fermer la porte à des opérateurs privés, qui ne sont pas moins compétents que les autres. J’aurais préféré que la référence aux opérateurs au sein desquels une personne publique détient une participation disparaisse, mais j’ai cru comprendre que le Gouvernement n’irait pas plus loin – ce que je regrette.

Par ailleurs, plusieurs opérateurs pourront-ils intervenir sur des zones différentes ?

Mme la rapporteure. Monsieur Herth, je vous remercie de reconnaître que le texte va dans la bonne direction.

Concernant les critères rajoutés par le Sénat, je rappelle que, non seulement il est prévu un périmètre d’au moins deux régions, mais aussi que le nombre et la répartition des bornes devront assurer un aménagement équilibré des territoires concernés. C’est au vu de ces deux critères que le Gouvernement appréciera si les projets qui lui seront présentés pourront être retenus.

S’agissant des collectivités territoriales, une concertation est prévue, de même qu’avec les gestionnaires de réseaux et, à la suite de l’adoption d’un amendement du groupe UMP que j’avais sous-amendé, les autorités organisatrices du réseau de distribution d’électricité qui assument la maîtrise d’ouvrage. Conformément à ce que nous avions déjà décidé lors de l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale, les collectivités conservent par ailleurs la maîtrise totale de la décision d’implantation à travers la délivrance du titre d’occupation du domaine public : si cette autorisation n’est pas délivrée, aucune implantation ne pourra avoir lieu ! Le texte prévoit seulement une exonération de la redevance d’occupation de ce domaine. En outre, le Sénat a renforcé la proposition de loi en ajoutant que la concertation s’appliquera aussi aux gestionnaires du domaine public.

Cela dit, je serais étonnée que beaucoup de collectivités refusent l’implantation de bornes, dans la mesure où elles n’auront pas à en assumer le coût, pas plus que celui lié à l’entretien ou à l’exploitation.

Madame Dombre Coste, merci pour votre participation active aux travaux sur ce texte.

Je vous remercie également, M. Benoit, pour votre position. Le Grenelle de l’environnement avait en effet déjà engagé cette démarche et l’implantation de bornes de recharge électrique avait été initiée par le précédent Gouvernement, notamment au travers d’appels à projets financés par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) permettant aux collectivités locales de se saisir de cette implantation. Mais nous souhaitons aujourd’hui passer à la vitesse supérieure au regard de ce qui a été fait et des lacunes qui subsistent sur le territoire. Par ailleurs, je partage votre souci d’information et de démocratisation. Nous en sommes à une première étape et le texte sur la transition énergétique nous permettra de compléter le dispositif.

Je souhaite aussi vous remercier, Mme Allain, pour l’implication de votre groupe en vue de l’adoption de ce texte. Je vous rassure : celui-ci permettra au Gouvernement de rejeter les projets qui n’auraient pas pour ambition un aménagement équilibré des territoires.

S’agissant des zones de covoiturage, je rappelle qu’un tour de table sera organisé entre les collectivités concernées et les gestionnaires des infrastructures de réseau, de manière à ce que le meilleur endroit possible puisse être trouvé. Là encore, le texte sur la transition énergétique nous permettra le cas échéant de compléter le dispositif.

Madame Batho, le ministre Arnaud Montebourg s’est engagé à modifier le décret que vous évoquez et je ne doute pas que ce dernier soit publié d’ici l’examen en séance publique. Cela dit, je demanderai des précisions au ministre sur ce point.

Monsieur Tardy, vous avez raison lorsque vous considérez que le texte ouvre la possibilité de plusieurs opérateurs et non d’un opérateur unique. Plusieurs projets pourront être agréés en même temps pour développer le réseau des bornes, ce qui permet une certaine réactivité et l’implication croisée de plusieurs opérateurs, publics ou privés.

Mme Anne Grommerch. La question des territoires frontaliers n’a pas été prise en compte. Il y a ainsi en Lorraine un projet de développer un réseau de parkings avec des véhicules électriques en auto-partage en partenariat avec le Luxembourg. Pourra-t-on bénéficier également de l’exonération de la redevance dans ce cadre ?

Mme la rapporteure. Le texte concerne des projets ayant une dimension nationale, ce qui n’empêche pas par ailleurs des coopérations transfrontalières. Un opérateur pourra donc, dans le cadre du projet de dimension nationale qu’il présentera, avoir parallèlement une vision de coopération avec des pays voisins.

La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Octroi d’une compétence à l’État en matière d’implantation d’infrastructures de recharge de véhicules électriques sur le domaine public

La Commission adopte l’article sans modification.

Puis elle adopte la proposition de loi sans modification.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 18 juin 2014 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, Mme Fanny Dombre Coste, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Razzy Hammadi, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, M. Philippe Le Ray, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Hervé Pellois, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Lionel Tardy, Mme Clotilde Valter

Excusés. - Mme Jeanine Dubié, M. Franck Gilard, M. Thierry Lazaro, Mme Annick Le Loch, Mme Annick Lepetit, Mme Audrey Linkenheld, M. Kléber Mesquida, Mme Josette Pons, M. Bernard Reynès, M. Franck Reynier, Mme Catherine Troallic

Assistait également à la réunion. - M. Paul Molac