Accueil > Travaux en commission > Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 18 juin 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 86

Présidence de M. Gilles Carrez,
Président

–  Examen du projet de loi de finances rectificative pour 2014 (n° 2024) (Mme Valérie Rabault, rapporteure générale)

–  Présences en réunion

La Commission examine, sur le rapport de Mme Valérie Rabault, rapporteure générale, le projet de loi de finances rectificative pour 2014 (n° 2024).

Article liminaire : Prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour l’année 2014

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CF40 du président Gilles Carrez et CF164 de Mme Karine Berger.

M. le président Gilles Carrez. L’amendement CF40 ajuste la prévision de solde structurel et de solde effectif pour l’année 2014, à partir de l’avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques et du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques présenté hier par le Premier président de la Cour.

Mme Karine Berger. Notre situation économique s’est objectivement dégradée par rapport à la prévision de 2012, et les chiffres fournis par l’INSEE font état d’un taux de croissance plus faible que celui prévu par la loi de programmation des finances publiques en vigueur : si le taux de croissance s’est bien établi comme prévu à 0,3 % en 2012, il a également été de 0,3 % en 2013 alors que la loi de programmation prévoyait 0,8 %, cependant que, pour 2014, les prévisions ont été revues à la baisse, passant de 2 % à 1 %. Il s’agit bien d’une dégradation de la conjoncture économique.

La répartition entre déficit conjoncturel et déficit structurel que propose l’article liminaire ne reflète pas cette dégradation et rend assez injustement responsable notre politique de l’aggravation du déficit, au motif que nous n’aurions pas atteint nos objectifs de réduction de la dépense publique. Mon amendement propose donc d’imputer pour moitié le déficit global de 3,8 % au solde conjoncturel et pour moitié au solde structurel. Il faut être clairs : le fait que nous n’ayons pas atteint notre objectif de 3 % de déficit tient pour partie au fait que la croissance a été plus faible que prévu ces deux dernières années.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La dégradation des soldes structurel et effectif de 0,2 point de PIB que vous proposez, monsieur le président, ne tient compte que des aléas baissiers pesant sur la prévision de croissance, non des aléas haussiers liés notamment à l’assouplissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne et au fait que nous bénéficions de taux d’intérêt très bas, ce qui témoigne de notre crédibilité auprès des investisseurs. Avis défavorable donc à votre amendement CF40, ne serait-ce que parce que cet ajustement serait en tout état de cause prématuré.

Le Premier président de la Cour des comptes nous rappelait d’ailleurs, hier encore, que les moindres recettes que nous enregistrions étaient dues à la conjoncture, et non à des facteurs structurels et c’est ce que reflète l’évaluation équilibrée que vous proposez dans votre amendement, madame Berger. J’y suis donc favorable.

M. Jean-Pierre Gorges. J’appuie les propos de Mme Berger. Il n’est pas correct de faire porter tout le poids de l’aggravation du déficit sur la dégradation du solde structurel, en négligeant l’influence de l’évolution de l’activité économique. Il est d’autant plus important de rectifier ces chiffres que nous ne sommes pas près de renouer avec la croissance. Ne donnons pas aux Français une information fausse, de surcroît de nature à les inquiéter !

La Commission rejette l’amendement CF40, puis adopte l’amendement CF164.

Elle adopte ensuite l’article liminaire modifié.

PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

RESSOURCES AFFECTÉES

Article premier : Réduction exceptionnelle d’impôt sur le revenu en faveur des ménages modestes

M. Charles de Courson. Les mesures proposées à l’article 1er visent à rendre non imposables 1,9 million de foyers qui seraient sinon soumis à l’impôt sur le revenu. Nous souhaiterions savoir combien de personnes non imposables au titre des revenus de 2012 sont devenues imposables sur les revenus de 2013 du fait des quatre mesures suivantes : l’extension en année pleine de la fiscalisation des heures supplémentaires ; la fiscalisation des majorations de pension pour enfants et celle de la contribution des employeurs aux complémentaires santé ; l’abaissement du plafond du quotient familial pour chaque demi-part. Nous avions posé la question au secrétaire d’État mais, puisque vous êtes allée chercher ces informations à Bercy, peut-être pouvez-vous nous répondre, madame la rapporteure générale.

Mme la rapporteure générale. Les informations que j’ai obtenues de Bercy proviennent de simulations effectuées à partir d’un échantillon de 500 000 déclarations de revenus. Les ménages concernés changent d’une année sur l’autre et, par ailleurs, les calculs ont été effectués à partir des revenus de 2012 « vieillis », les revenus de 2013 venant à peine d’être déclarés. À ces réserves près, les calculs nous fournissent des ordres de grandeur satisfaisants.

Selon ces informations, la fiscalisation des majorations de pension concernerait 340 000 foyers et celle de la participation de l’employeur aux complémentaires santé 250 000. La majoration de la décote, quant à elle, ferait sortir 200 000 personnes de l’impôt. Pour celles qui demeurent imposables, le Gouvernement a donc décidé des mesures correctrices : c’est l’objet de l’article 1er.

M. Charles de Courson. Vous n’avez pas mentionné les incidences de la refiscalisation des heures supplémentaires.

Mme la rapporteure générale. En année pleine, selon les simulations, 200 000 foyers seraient concernés.

M. Charles de Courson. À quelle proportion peut-on évaluer la part des foyers fiscaux qui, devenus imposables du fait de la loi de finances initiale pour 2014, cesseraient de l’être grâce à ces mesures correctrices ? À la moitié ? Au quart ?

Mme la rapporteure générale. L’échantillon utilisé pour les simulations varie, je l’ai dit, d’une année sur l’autre. C’est un biais méthodologique dont nous devons tenir compte et je ne suis donc pas en mesure de vous répondre. Cela étant, le nombre de foyers concernés par cette nouvelle mesure est assez important pour couvrir tous les contribuables modestes touchés par les augmentations d’impôt.

M. Charles de Courson. Les évaluations préalables jointes au projet de loi font apparaître un problème méthodologique assez grave. On nous avait en effet expliqué qu’il n’était pas possible de calculer l’incidence de la fiscalisation de la majoration de pension pour enfants, et une note de la page 110 semble le confirmer. Qu’en est-il ?

Par ailleurs, comment se fait-il que le tableau de la même page ne dise rien de l’impact de l’article 1er sur les collectivités territoriales et sur les autres administrations publiques ? Qu’en est-il de la perte de recettes liée au fait que 1,9 million de foyers fiscaux n’acquitteront ni la redevance audiovisuelle, ni la taxe d’habitation puisqu’ils ne seront plus redevables de l’impôt sur le revenu ?

M. le président Gilles Carrez. Je m’étonne pour ma part du montant des réductions d’impôt proposées, que je trouve légèrement surcalibré compte tenu de la limite fixée à 1,1 SMIC. Par quelle méthode le Gouvernement est-il parvenu au chiffre de 350 euros pour un célibataire et de 700 euros pour un couple ?

M. François Pupponi. Quelles sont les conséquences sur les impôts locaux de la sortie de l’impôt sur le revenu des contribuables concernés, et quelles économies cela représente-t-il pour le budget de l’État, puisque le mécanisme de compensation des exonérations et dégrèvements ne jouera plus ?

Pour ceux qui sortiront de l’impôt sur le revenu, y aura-t-il correction automatique des avis d’imposition locaux ?

M. Christophe Castaner. M. de Courson fait tout ce qu’il peut pour masquer le fait que 3,7 millions de ménages vont voir leur impôt diminuer tandis que 1,9 million vont sortir de l’impôt. Il oublie néanmoins les contribuables qui deviennent « naturellement » imposables du fait de la hausse de leurs revenus : ils étaient 2,6 millions en 2013, 2,9 millions en 2012, 3,1 millions en 2011 et 3,3 millions en 2010.

M. Marc Le Fur. Est-il exact que nous n’avons pas d’éléments chiffrés sur la fiscalisation des majorations de pension pour charge d’enfants ?

Le modèle utilisé par Bercy permet-il de déterminer le nombre de contribuables entrés dans l’impôt à cause de l’application en année pleine de la mesure de refiscalisation des heures supplémentaires ?

Je m’interroge enfin sur la familialisation des réductions fiscales proposées par le Gouvernement. J’ai bien compris que celles-ci interviendront après calcul de l’impôt, mais font-elles l’objet d’une majoration pour enfant à charge ?

M. Nicolas Sansu. Si les mesures proposées à l’article 1er ont un intérêt évident pour les ménages modestes, elles n’en sont pas moins problématiques. En effet, ces réductions d’impôt ne sont pas la meilleure manière d’aborder le problème de l’entrée dans l’impôt des foyers touchés par le gel du barème en 2012 et en 2013 ou par certaines dispositions comme la fiscalisation de la majoration des pensions. Elles se heurtent notamment à des effets de seuil, et certains ménages ne pourront en bénéficier alors qu’ils sont loin d’être parmi les plus fortunés. Plutôt que de multiplier les mesures dérogatoires, mieux vaudrait donc revoir le barème afin d’éviter que les ménages les plus modestes ne deviennent imposables, sachant que, ne serait-ce que sous la forme de la TVA, tous les citoyens paient l’impôt.

Mme Véronique Louwagie. Peut-on évaluer le nombre de ménages qui bénéficieront de l’intégralité de la réduction d’impôt proposée et de ceux qui n’en bénéficieront que partiellement parce que leur impôt ne s’élève, par exemple, qu’à 100 euros ?

M. le président Gilles Carrez. Il s’agit bien, en effet, d’une réduction et non d’un crédit d’impôt.

M. Marc Goua. Les collectivités locales dans lesquelles un grand nombre d’habitants vont bénéficier de ces réductions d’impôt sont aussi les collectivités les plus pauvres. Or, dans la mesure où l’État n’assume pas 100 % des exonérations, ces communes devront prendre à leur compte une partie de ces compensations – on parle de 50 millions d’euros. Il est paradoxal que ce soient les pauvres qui paient pour les plus pauvres.

M. le président Gilles Carrez. Pour être précis, il s’agit, non pas d’une compensation, mais d’un dégrèvement compensé par l’État, sur la base des taux fixés en 2000.

Si les collectivités ont baissé ou maintenu leurs taux par rapport à 2000, elles ne perdent rien. Si, en revanche, elles les ont augmentés, elles perdent à proportion de la différence.

M. Dominique Lefebvre. La réduction proposée ne règle pas l’ensemble des questions qui se posent à propos du barème de l’impôt sur le revenu, non plus que celle posée par les changements brutaux de situation que peuvent connaître les ménages modestes du fait d’effets de seuil, amplifiés par toutes les mesures correctives qui se sont accumulées au fil des années.

Selon le barème actuel, restructuré autour de cinq tranches, un célibataire commence en théorie à acquitter l’impôt sur le revenu à partir de 6 085 euros de revenus annuels, et un couple avec un enfant à partir d’environ 15 000 euros. Dans la pratique, la décote et le seuil de mise en recouvrement font qu’un célibataire n’acquitte pas d’impôt en dessous de 12 000 euros de revenus. En d’autres termes, quasiment plus personne n’est imposé au taux marginal de 5,5 %, et l’on entre souvent dans l’impôt au taux marginal de 14 %, ce qui est brutal.

Quant à la polémique sur le nombre de ménages qui entrent ou sortent de l’impôt, je rappelle que, dès lors que les salaires augmentent plus vite que l’inflation, sur laquelle le barème est indexé, le nombre de nouveaux foyers imposables augmente chaque année, notamment dans le bas du barème.

Le gel du barème touche toutes les catégories de contribuables, mais ses incidences sont particulièrement sensibles pour les taux marginaux les plus bas. De même, la suppression de la demi-part dite « vieux parents » a créé beaucoup de nouveaux imposables. Par conséquent, il me semble qu’autant de gens sont entrés dans l’impôt du fait du précédent gouvernement que du fait du gouvernement actuel. D’autre part, je suis persuadé que nous avons eu raison de réintégrer dans le revenu imposable, dans le cadre du plan de rééquilibrage des retraites, la majoration de 10 % pour les retraités ayant eu trois enfants, car c’était une mesure totalement antiredistributive. En effet, les effets d’une majoration en pourcentage sont d’autant plus forts que la pension de base est élevée et la défiscalisation ne fait que les amplifier puisque plus le taux marginal est élevé, plus l’avantage fiscal est important.

Cela étant, comme la non-déductibilité de la CSG, les mesures de fiscalisation, si elles touchent toutes les tranches du barème, sont particulièrement douloureuses pour les titulaires des plus bas revenus.

Je rappelle également que, dès la loi de finances pour 2013, puis dans la suivante, nous avons revalorisé non seulement la décote, mais aussi les seuils du revenu fiscal de référence. Pour autant, un nombre notable de contribuables sont devenus imposables alors qu’ils ne l’étaient pas auparavant. L’objectif de la présente mesure est donc simple : faire sortir du bas du barème des ménages qui y sont entrés en raison, non de l’accroissement de leurs revenus, mais de la modification du calcul du revenu fiscal de référence.

Il ne s’agit que d’une mesure temporaire, en attendant une remise à plat du barème dont nous débattrons lors de l’examen de la loi de finances pour 2015, mais il n’y avait guère le choix : au cours des discussions entre le Gouvernement et le groupe socialiste, il est apparu que, pour que cette disposition puisse être prise en compte dans les avis d’imposition qui seront envoyés à l’automne, elle devait être mise en production le 15 mai – ce qui, entre parenthèses, limite beaucoup nos possibilités d’amendement. Cela étant, je le répète, la discussion du projet de loi de finances pour 2015 sera l’occasion de débattre sur la manière de restructurer le bas du barème de manière à éviter les effets de seuil, en attendant de réfléchir aux moyens d’un allégement plus général des prélèvements obligatoires, et cela sachant qu’aujourd’hui nos concitoyens ne commencent à payer l’impôt sur le revenu qu’à partir du moment où ils se situent entre les quatrième et sixième déciles de la pyramide des revenus.

M. le président Gilles Carrez. Notre collègue Dominique Lefebvre a raison d’indiquer que la mesure est déjà intégrée dans les programmes informatiques des services fiscaux…

M. Marc Le Fur. Mais elle n’est pas encore votée !

M. le président Gilles Carrez. …En effet, comme le secrétaire d’État s’en est flatté la semaine dernière, elle sera d’application rétroactive.

Depuis un certain nombre d’années, de très gros problèmes se posent dans le bas de barème en raison d’effets de seuil brutaux : en pratique, les contribuables qui commencent à payer l’impôt y entrent en étant immédiatement soumis à la deuxième tranche, à 14 %. À ce sujet, je ne peux que recommander la lecture du rapport de notre collègue Dominique Lefebvre et de M. François Auvigne. Il faudra trouver une solution satisfaisante, mais cela demande du temps et ne pourra être fait que dans le cadre de la loi de finances pour 2015.

M. Hervé Mariton. La rétroactivité n’est pas heureuse quand elle est défavorable au contribuable, mais est-il sûr qu’elle le soit toujours quand elle lui est favorable ? Je regrette qu’on invoque les contraintes informatiques pour mettre le Parlement dans l’impossibilité de modifier substantiellement l’imposition sur le revenu en 2014. La rétroactivité en matière fiscale ne se justifie que par des circonstances exceptionnelles ; or ces circonstances ne me semblent pas réunies aujourd’hui, de sorte que la mesure proposée, peu respectueuse de nos droits, ne relève que d’un pur choix d’opportunité.

M. le président Gilles Carrez. Des marges de manœuvre existent cependant, du côté de la redevance audiovisuelle ou des impôts locaux par exemple – je lance des idées !

Mme la rapporteure générale. Les avis d’imposition sont préparés dès la fin juillet par l’administration fiscale, mais la direction du Trésor peut sans attendre engager une réflexion sur l’intégration de mesures législatives dans ses logiciels, dans l’hypothèse de leur adoption par le Parlement, pour une application en septembre. L’article 1er vise en effet à protéger les ménages modestes contre les conséquences non voulues de mesures votées, ce grâce à une mesure de correction qui doit produire des effets tangibles dès septembre 2014. Mais cela n’empêche pas, monsieur Sansu, une réflexion plus générale sur l’imposition sur le revenu au cours de l’examen du projet de loi de finances pour 2015, en se concentrant sur ses effets sur les ménages aux revenus les plus modestes.

Monsieur Le Fur, mon rapport inclura des données sur la prise en considération des familles, pour l’attribution de la réduction d’impôt. Dans le projet, les demi-parts par enfant sont prises en compte pour déterminer si un contribuable bénéficiera ou non du dispositif proposé compte tenu de son revenu fiscal de référence, mais le montant de la réduction d’impôt ne dépendra pas du nombre d’enfants.

M. Marc Le Fur. Aux termes du premier alinéa de l’article 1er, la réduction d’impôt s’appliquera à partir de 14 145 euros de revenus pour un célibataire et de 28 290 euros pour un couple, mais les demi-parts suivantes n’ouvriront droit qu’à une majoration de 3 536 euros de ce seuil, soit d’à peine un quart. Pourquoi faire ainsi échec à la familialisation, ici comme d’ailleurs dans l’alinéa suivant, lequel fixe le montant de la réduction d’impôt ?

Mme la rapporteure générale. Il y a une prise en compte, même si elle n’est pas linéaire.

M. le président Gilles Carrez. La jurisprudence impose que la famille soit prise en considération, mais non que cette prise en considération s’opère à stricte proportion du quotient familial.

Mme la rapporteure générale. Les projections réalisées pour évaluer le nombre de foyers fiscaux bénéficiaires, à revenus constants, de la mesure proposée sont fondées comme je l’ai dit sur un échantillon représentatif de 500 000 déclarations d’impôt sur le revenu de 2012. Mais pour cette année de référence, la part de l’employeur aux complémentaires santé n’était pas prise en compte dans le revenu imposable, de sorte que l’administration fiscale ne disposait pas de cette donnée. Il en était d’ailleurs de même s’agissant de la majoration de pension de 10 % pour enfants, dans la mesure où ces enfants ne sont plus à charge sauf exception. Sous réserve de ces limitations, l’intégration dans le revenu imposable de la majoration de retraite pour enfants aurait fait entrer 340 000 retraités dans le champ de l’impôt et le nombre de foyers devenus imposés du fait de la fiscalisation des heures supplémentaires serait de 200 000.

M. Marc Le Fur. Mais quelle part représentent ces 340 000 retraités dans l’ensemble des retraités ayant eu trois enfants et plus ?

Mme la rapporteure générale. Les retraités n’ayant plus à déclarer d’enfants à charge, il est impossible de vous répondre. Les données dont nous disposons sont issues d’extrapolations et nous n’aurons de vraies informations sur le sujet qu’à la fin de juillet.

La fusion des bases de taxe d’habitation et d’impôt sur le revenu représente un défi, monsieur Pupponi, mais j’ai demandé qu’elle se fasse car c’est le seul moyen d’avoir une vision globale, qui est impossible pour l’instant.

Madame Louwagie, la mesure figurant à l’article 1er a été voulue suffisamment large pour être sûr que toutes les personnes qui sont entrées dans le champ de l’impôt malgré de faibles revenus puissent en sortir. Dès que je disposerai d’évaluations plus précises à ce sujet, je vous les transmettrai, bien entendu.

La Commission examine l’amendement CF79 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Merci, madame la rapporteure générale, de nous avoir donné le nombre de foyers fiscaux devenus imposables du fait de la fiscalisation de la majoration de pension pour enfants, mais… ce chiffre de 340 000 est manifestement faux ! En effet, si cette majoration est de 10 % dans le secteur privé, elle varie entre 10 % et 30 % dans les différents régimes spéciaux.

La suppression de l’exonération de cette majoration a concerné 3,2 millions de foyers fiscaux et seulement à peine plus de 10 % seraient à cette occasion devenus imposables ? De mémoire, 60 % des retraités étaient déjà imposables ; pour ceux qui étaient juste en dessous de ce seuil, a-t-on vraiment tenu compte du taux de la majoration, qui atteint par exemple 30 % dans le cadre de l’IRCANTEC, pour avancer ce chiffre de 340 000 foyers entrés dans l’impôt ?

Mme la rapporteure générale. Oui.

M. Charles de Courson. D’autre part, je rappelle à Dominique Lefebvre que la majoration pour enfants a pour fins de compenser le moindre revenu perçu par des mères de trois, quatre ou cinq enfants qui ont dû réduire leur activité professionnelle pour les élever et ont ainsi constitué de moindres droits à pension…

M. le président Gilles Carrez. Vous pourrez développer en séance cette argumentation.

M. Dominique Lefebvre. C’est un raisonnement fallacieux.

M. Charles de Courson. La mesure proposée est insupportable pour celles qui n’ont que 900 euros de pension. Elle prouve que vous ne connaissez pas la réalité sociale ! Certes, elle corrige les erreurs que vous avez faites, mais elle n’en attaque pas la cause.

Mme la rapporteure générale. Ne concernant que les retraités, votre amendement exclut tous les ménages d’actifs entrés dans l’impôt. L’avantage fiscal que vous proposez améliore le niveau de vie des plus riches, non des plus modestes. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Je maintiens que le revenu fiscal de référence se trouvera majoré à hauteur de la majoration pour enfants, et cela pour de nombreux contribuables, avec toutes les conséquences que cela induit pour eux en matière de taxe d’habitation et de redevance audiovisuelle.

M. le président Gilles Carrez. Vous avez soulevé les mêmes questions en octobre 2013, au cours du débat sur le projet de loi de finances pour 2014, puis en décembre 2013, au cours de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2013.

Mme la rapporteure générale. Je rappelle que la loi de finances pour 2014 a revalorisé de 4 % les seuils du revenu fiscal de référence. Même si, faute de fusion des deux bases, nous manquons de données, il est certain que cela diminue l’impact de la fiscalisation de revenus jusqu’alors non imposables en matière de taxe d’habitation ou de redevance audiovisuelle.

M. Dominique Lefebvre. À qui m’accuse de méconnaître la réalité, je signale que j’ai commencé ma carrière comme assistant social. Et, pour ma part, j’estime entre 35 et 40 % la proportion des ménages de retraités qui bénéficient de la majoration pour enfants, tous niveaux de revenus confondus.

Dans notre rapport, François Auvigne et moi avons montré que les effets de seuil sont d’autant plus difficiles à maîtriser que les revenus pris en compte varient, qu’il s’agisse de l’imposition ou des droits à prestations. L’exonération de taxe d’habitation intervient dès que le revenu fiscal de référence est inférieur à 10 400 euros et les revalorisations dont celui-ci a fait l’objet depuis deux ans ont plutôt évité que de nouveaux contribuables ne soient soumis à cet impôt. Certes, l’intégration de la majoration pour enfants dans le revenu imposable fait augmenter de 8 % à 9 % le revenu fiscal de référence des retraités en bas de barème, mais un amendement sera présenté par le groupe socialiste, visant à pallier les effets de cette augmentation sur le paiement de la taxe d’habitation.

Mme la rapporteure générale. Je rappelle que nous examinons aujourd’hui un projet de loi de finances rectificative. Le projet de loi de finances pour 2015 donnera l’occasion de débattre des questions que vous soulevez, monsieur de Courson.

La Commission rejette l’amendement CF79.

La Commission en vient à l’amendement CF80 de M. Charles de Courson.

M. Philippe Vigier. Cet amendement vise à rendre du pouvoir d’achat aux salariés en rétablissant l’exonération fiscale de la participation de l’employeur aux contrats collectifs de complémentaire santé. La suppression de cette exonération par la loi de finances pour 2014 a touché 13 millions de salariés, à qui elle a fait perdre en moyenne 320 euros annuels de pouvoir d’achat. Il convient de venir au secours non seulement des ménages non imposables, mais plus largement des classes moyennes, qui ont supporté ces dernières années la plus lourde part des augmentations d’impôts.

Mme la rapporteure générale. À l’inverse de l’amendement précédent, la mesure que vous proposez ne bénéficierait qu’aux salariés. Nous voulons au contraire prendre une mesure qui bénéficie à la fois aux salariés et aux retraités. L’an dernier, nous avons précisément rééquilibré, avec le soutien du président Carrez d’ailleurs, un régime fiscal trop à l’avantage de certains ménages bénéficiaires d’une couverture complémentaire financés partiellement par leur entreprise.

M. Charles de Courson. Je suis étonné d’entendre qu’ils n’auraient été que 250 000 foyers, soit moins de 2 % des 13,2 millions de ménages frappés par cette mesure, à entrer de ce fait dans le champ de l’impôt sur le revenu. L’avantage annuel qui leur est consenti sous la forme de la couverture complémentaire santé ne s’élève qu’à 300 euros en moyenne, mais il peut grimper jusqu’à 800 euros, voire 1 000 euros dans certaines branches. Il n’est donc pas possible de croire aux chiffres que vous avancez.

Mme la rapporteure générale. Je conviens que la distribution statistique de l’avantage consenti est assez large, mais la direction générale du Trésor a pris en compte un éventail ouvert pour bâtir ses estimations. Il s’agit seulement des foyers qui sont entrés dans le champ de l’imposition – il suffit parfois pour cela d’une augmentation de 200 euros du revenu fiscal de référence.

M. le président Gilles Carrez. Le chiffre de 250 000 foyers ne m’étonne pas, dans la mesure où l’avantage de la complémentaire bénéficie surtout à des salariés de grandes entreprises, déjà imposables.

M. Nicolas Sansu. Soumettre l’ensemble des revenus à l’impôt est un principe de bon sens. Il était censé de le faire pour la complémentaire santé, de même que pour les heures supplémentaires. Mais notre débat soulève la question plus large du niveau des salaires, qui n’augmenteront pas par le simple allégement de cotisations sur les bas salaires. Il faut plutôt augmenter les salaires, chacun payant ensuite son impôt en fonction de ce qu’il a perçu. Mon observation vaut au demeurant pour le bas du barème, mais aussi pour le barème dans son ensemble.

La Commission rejette l’amendement CF80.

Puis elle examine l’amendement CF68 de M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert. L’amendement vise à améliorer au profit des ménages les plus modestes, les dispositions prévues, en portant de 3 536 euros à 4 000 euros la majoration par demi-part du seuil à partir duquel le foyer sera éligible à la réduction d’impôt. Fixé à 1 500 euros, le crédit d’impôt maximal accordé au titre du quotient familial ne bénéficie qu’aux titulaires de revenus relativement élevés.

Dans le dispositif proposé, un couple doit avoir un revenu fiscal de référence inférieur à 28 290 euros pour bénéficier de la réduction d’impôt. Ce plafond n’est relevé que de 3 536 euros s’il a un enfant, du double s’il en a deux. En relevant ce plafond de 4 000 euros, on consentira un petit avantage supplémentaire aux familles. Il s’agit d’une mesure de justice, car le bonheur d’avoir un enfant s’accompagne d’une charge financière.

M. le président Gilles Carrez. Notre collègue Marc Le Fur ne renierait pas cette disposition favorable à la famille, mais nous ne savons pas quel en serait le coût.

Mme la rapporteure générale. Il faut en effet se demander à qui elle profiterait et combien elle coûterait. La réduction d’impôt prévue par l’article 1er bénéficierait à toutes les familles de trois enfants percevant jusqu’à 3,4 SMIC. Cet amendement l’étendrait jusqu’aux ménages percevant 3,5 SMIC, ce qui a nécessairement un coût. Or le Gouvernement a précisément fait le choix de rester dans une enveloppe budgétaire raisonnable. Avis défavorable.

M. Marc Le Fur. La logique de la familialisation voudrait que l’on porte la majoration non pas à 4 000 euros, mais à la moitié de 14 145 euros. Cela étant, l’amendement va dans le bon sens et je le voterai donc.

La Commission rejette l’amendement CF68.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CF42 et CF41 du président Gilles Carrez.

M. Hervé Mariton. Une des rares réussites de la majorité – bien involontaire sans doute – est d’avoir fait reposer l’impôt sur le revenu sur un plus grand nombre de citoyens. Mais, comme cela n’entrait pas dans l’intention de départ, il en est résulté divers effets fâcheux que vous vous efforcez maintenant de corriger.

Certes, nous préférons un impôt sur le revenu à taux faible et à base large, et nous considérons que l’augmentation du nombre de contribuables n’est pas une mauvaise chose en soi. Mais, pour réparer les dégâts que vous avez vous-mêmes provoqués en rendant imposables des contribuables dont le revenu n’avait pas augmenté, au moins faudrait-il un correctif efficace !

Le secrétaire d’État chargé du budget a qualifié de « classes moyennes » les catégories ciblées par ce projet de loi. C’est une conception inédite, puisqu’il s’agit de personnes gagnant 1 200 euros par mois au plus ! Nous proposons, à l’inverse, une franchise d’impôt forfaitaire de 150 euros pour un contribuable seul – 300 euros pour un couple –, dès lors que le revenu fiscal de référence est inférieur à 40 000 euros – ou à 80 000 euros pour un couple, en relevant ce seuil pour chaque demi-part supplémentaire. Seraient ainsi concernés 14 millions de foyers.

Soit vous assumez de vous inscrire dans une logique d’extension de l’impôt sur le revenu, auquel cas nous pourrions vous entendre, soit vous ne l’assumez pas, auquel cas la correction des méfaits de vos augmentations d’impôt doit être plus large.

Mme la rapporteure générale. Ces amendements visent à accorder une réduction d’impôt quasiment sans condition de ressources, ce qui se traduira par un effet de saupoudrage important.

En outre, les ménages modestes bénéficieraient d’un avantage fiscal bien moindre qu’avec la mesure proposée par cet article, qui vise à leur redonner du pouvoir d’achat.

Enfin, bien qu’ardent partisan des réductions de dépenses, vous vous gardez de chiffrer le coût de votre proposition, qui devrait s’élever à 4 ou 5 milliards d’euros.

Pour toutes ces raisons, avis défavorable.

M. Laurent Wauquiez. Ces amendements nous rappellent que nous sommes en train de jouer les Pénélope. S’il y a de tels effets de seuil, c’est parce que vous avez augmenté massivement l’impôt sur le revenu. Comme le dit justement Charles de Courson, vous essayez de corriger les méfaits que vous avez commis l’année dernière et qui vous embarrassent fortement.

M. Christophe Castaner. Et la demi-part des veufs et veuves, qui l’a supprimée ?

M. Laurent Wauquiez. Dans votre approche, l’essentiel des réductions fiscales va aux personnes ne gagnant pas plus de 1,3 SMIC. Vous laissez les classes moyennes, en particulier les classes moyennes modestes, dans une désespérance totale. Ce que soulignent bien ces amendements, c’est que vous allez encore aggraver les choses avec cet allégement de cotisations salariales qui ne concernera, en 2015, que les salaires inférieurs à 1,3 SMIC. Vous avez imposé un effort fiscal majeur aux classes moyennes et vous n’atténuez la peine qu’au-dessous de ce seuil. Quelles sont, pour vous, les populations qui ont besoin d’une atténuation du poids de la fiscalité ? Vous concentrez les augmentations sur les classes moyennes et ne déclenchez les allégements qu’autour du SMIC. Votre raisonnement fiscal est entaché d’une profonde injustice.

M. Marc Le Fur. Les effets de seuil sont déjà un problème majeur pour les personnes aux revenus les plus modestes et je crains que le dispositif gouvernemental ne les aggrave, créant un clivage entre les contribuables les plus modestes et les catégories qui viennent juste après.

Je salue à cet égard le travail de notre collègue Dominique Lefebvre et de M. François Auvigne sur les effets de seuil autour du SMIC pour les célibataires : dans certaines situations, une personne qui gagne 100 euros de plus se voit retirer plus de 60 euros. Il faudrait d’ailleurs étendre cette étude aux familles, afin de déterminer à partir de quel seuil les gains supplémentaires produisent de tels effets.

Bref, je suis favorable à ces amendements tout en regrettant qu’ils n’intègrent pas la dimension familiale.

M. le président Gilles Carrez. Nous apporterons des améliorations avant la séance publique, mon cher collègue.

Votre rapport, monsieur Lefebvre, souligne la grande concentration de l’impôt sur le revenu…

M. Dominique Lefebvre. Ce rapport est le fruit de la réflexion collective du groupe de travail sur la fiscalité des ménages mis en place par Monsieur Jean-Marc Ayrault. Il faut le lire de façon globale. En particulier, monsieur Wauquiez, finissons-en avec le poncif selon lequel beaucoup de citoyens ne paieraient aucun impôt : les impôts indirects qui pèsent sur les ménages en France s’élèvent à plus de 200 milliards d’euros, contre 80 milliards d’euros pour l’impôt sur le revenu. En outre, le barème actuel fixe l’entrée dans l’impôt sur le revenu à 6 085 euros pour un célibataire.

Il nous faudra donc, lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2015, engager une réforme. Celle-ci ne pourra être menée que par étapes et elle aura un coût, ne serait-ce qu’en raison des incohérences du système actuel – auxquelles les plus anciens de cette commission, de quelque bord qu’ils soient, ont contribué. Notre rapport met en évidence la difficulté politique de mener des réformes qui font, quoi qu’il arrive, des perdants, y compris dans les catégories qui ont de faibles revenus. À titre d’exemple, le rapport consacré à la fusion entre l’impôt sur le revenu et la contribution sociale généralisée montre qu’une mère célibataire avec deux enfants à charge et 1 300 euros de revenu mensuel pourrait perdre à cette mesure.

Je propose donc d’en rester là. Cet article, et nous l’assumons, vient « nettoyer » les effets de mesures qui ont fait entrer dans le barème des populations qui ne devaient pas y entrer. Nous devrons ensuite effectuer un travail de lissage.

S’agissant enfin de la définition des classes moyennes, notre rapport montre que l’on commence à être imposable au cinquième décile. Sur un plan mathématique, c’est là que se trouvent les classes moyennes. Je rappelle, monsieur Wauquiez, que le dernier décile de revenu imposable commence à 47 030 euros. Ce décile, du reste, concentre une partie importante de l’impôt sur le revenu et de la CSG.

M. le président Gilles Carrez. On arrive en effet à une imposition de 49 %.

M. Dominique Lefebvre. Ces chiffres devraient vous amener à porter un regard différent sur la réalité des revenus fiscaux des Français et sur leur répartition.

Mme Marie-Christine Dalloz. Avec les effets de seuil que provoque le resserrement du dispositif sur le bas du barème, vous pénaliserez considérablement les classes moyennes. Combien de retraités seront ainsi laissés de côté ? J’aimerais avoir des données précises sur ce point.

Il est inexact, madame la rapporteure générale, d’affirmer que la réduction d’impôt forfaitaire proposée ne tient pas compte des revenus, puisque la disposition ne concerne que les revenus inférieurs à 40 000 euros.

M. Philippe Vigier. Je soutiens ces amendements, et la majorité ne doit pas y voir d’intention polémique. La promesse non tenue selon laquelle neuf Français sur dix échapperaient aux hausses d’impôt a traumatisé tout le monde. On sait ce qui en a résulté !

Que vous essayiez de corriger le tir, soit ! Mais l’allégement proposé ne concerne les salariés que jusqu’à 1,13 fois le SMIC, tandis que les classes moyennes subiront 12 ou 13 milliards d’impôts supplémentaires en 2014. Le traumatisme sera donc encore plus grand à la fin de 2014. Mieux vaut ne pas attendre : les amendements permettent de toucher 14 millions de foyers fiscaux sur les 19 millions qui paient l’impôt sur le revenu. C’est une mesure de bon sens dont, au surplus, les plus hauts revenus ne bénéficieront pas. Si vous la repoussez, ce matraquage fiscal complémentaire vous rattrapera avant la fin de l’année !

M. Jean-Jacques Bridey. C’est vous qui avez commencé !

M. Olivier Carré. Selon l’OCDE, non seulement le « coin » socio-fiscal appliqué aux revenus les plus élevés en France est un des plus forts de l’ensemble des pays membres, mais celui qui est appliqué aux ménages visés par le projet de loi est un des moins élevés. Alors que la pente est relativement faible chez la plupart de nos voisins, l’écart d’imposition entre les bas et les hauts revenus est chez nous considérable.

Dans la mesure où il ne s’applique qu’à l’imposition des revenus de 2013, votre dispositif ne fait que différer un problème qui se reposera chaque année. En 2014, il fera passer un nombre significatif de ménages sous le seuil d’entrée dans l’impôt sur le revenu. Mais que se passera-t-il l’année prochaine ? Ces ménages entreront-ils de nouveau dans l’impôt ? Non seulement un opprobre général sera jeté sur la parole politique, mais le consentement à l’impôt, déjà sérieusement écorné depuis quelques années, en prendra un sacré coup ! Cette mesure qui paraît bonne à court terme peut se révéler désastreuse à moyen et long termes.

M. le président Gilles Carrez. Plus généralement, les mesures d’exonération fiscale et sociale prises depuis une vingtaine d’années ont un effet structurant très puissant sur notre politique des salaires.

M. Olivier Carré. Oui, elles provoquent une « smicardisation ».

M. le président Gilles Carrez. Les exonérations de cotisations sociales patronales pour les salaires inférieurs à 1,6 SMIC représentent 40 milliards d’euros, soit deux points de PIB. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi s’applique à une fourchette un peu plus large, mais reste centré sur des salaires plutôt faibles. Et voici qu’aujourd’hui on dote la tenaille de sa seconde mâchoire, avec la mesure sur les cotisations salariales, applicable jusqu’à 1,3 SMIC, et la présente mesure fiscale, applicable jusqu’à 1,13 SMIC.

Il est grand temps d’étudier les effets de ces dispositifs sur les salaires.

Mme la rapporteure générale. Les retraités bénéficient déjà d’un abattement spécifique, madame Dalloz.

D’autre part, vous caractérisez les classes moyennes par des revenus annuels allant jusqu’à 52 000 euros pour une personne seule, alors que le seuil du dernier décile de l’impôt sur le revenu est à 52 000 euros. Même si nous débattons aujourd’hui d’une mesure exceptionnelle pour 2014, rien ne nous interdit de discuter de ces questions lors de l’examen du PLF pour 2015, en nous fondant notamment sur le rapport de MM. Lefebvre et Auvigne. Mais ce qui est proposé dans ces amendements est un coûteux saupoudrage dont pourrait bénéficier, par exemple, un couple gagnant 80 000 euros au total, soit 6,4 SMIC. Cette utilisation de l’argent public me semble mal ciblée.

M. Laurent Wauquiez. Le seuil de 40 000 euros correspond à un salaire mensuel de 3 300 euros, ce qui, en Île-de-France, n’est pas forcément considérable.

Je vous invite, à l’inverse, à vous interroger sur votre borne de 1,3 SMIC. Pourquoi avoir choisi un plafond aussi bas ? Vous laissez totalement de côté les classes moyennes modestes et creusez un écart qui est, pour elles, une véritable trappe à pauvreté.

Mme la rapporteure générale. La politique fiscale a trois objectifs : procurer des ressources à l’État, organiser la redistribution, mais aussi obtenir des effets macroéconomiques et, notamment, déclencher par la relance de la consommation un cycle favorable à la reprise de l’économie et à l’emploi. De ce point de vue, les réductions de cotisations salariales sur les revenus jusqu’à 1,3 SMIC sont celles qui ont la meilleure efficacité immédiate en matière d’emploi.

M. Dominique Lefebvre. Mais elles relèvent du projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative, alors que la mesure que nous examinons vise à faire sortir des foyers de l’impôt sur le revenu. Or, à coût budgétaire égal, plus on relève le seuil, plus on arrose le sable et moins l’effet est important pour chaque contribuable. En d’autres termes, il y aura d’autant moins de personnes qui sortiront de l’impôt que vous viserez plus de foyers fiscaux avec votre mesure d’allégement. À vous de choisir votre objectif politique. Le nôtre a été fixé dès le début : faire ressortir de l’impôt les 400 000 à 500 000 ménages qui y sont entrés du fait de mesures prises depuis trois ans, c’est-à-dire revenir sur un état de fait injuste.

M. Hervé Mariton. Le lissage qui fait passer de 1,1 à 1,13 SMIC correspond-il à un dessein politique quelconque, ou est-il seulement dicté par la contrainte venant du Conseil d’État ? N’aurait-on pu imaginer un mécanisme plus intelligent et plus intelligible ?

Mme la rapporteure générale. Le dispositif vise à atteindre notre objectif de justice sociale tout en respectant une contrainte budgétaire.

M. Dominique Lefebvre. Le lissage était nécessaire pour des raisons de constitutionnalité. Si l’on a choisi 1,13 SMIC, c’est pour éviter que, au-delà du seuil, un euro de revenu supplémentaire n’entraîne plus d’un euro d’impôt supplémentaire. Dans ce dispositif, lorsque les revenus dépassent le seuil d’un euro, la réduction est de 349 euros ; lorsqu’ils le dépassent de 10 euros, la réduction passe à 340 euros, etc. Ce n’est pas idéal, mais cela devrait recueillir l’assentiment du Conseil constitutionnel.

Mme la rapporteure générale. Le rapport comprendra des simulations de l’impact du lissage selon les niveaux de revenu.

M. le président Gilles Carrez. Si l’on n’était pas passé de 1,1 à 1,13 SMIC, certains ménages auraient dû payer bien plus d’un euro d’impôt pour un euro de revenu supplémentaire.

La Commission rejette successivement les amendements CF42 et CF41.

Puis elle adopte l’article 1er sans modification.

Après l’article 1er

La Commission est saisie de l’amendement CF59 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il s’agit de relever le plafond global de la déduction au titre de la déduction pour investissement – DPI – et de la déduction pour aléas – DPA – pour les exploitations agricoles constituées en GAEC – groupements agricoles d’exploitation en commun. La loi prévoit que l’avantage doit être multiplié par le nombre d’associés, mais il semblerait qu’elle soit appliquée de manière restrictive.

L’adoption de cet amendement permettrait de prendre date pour la séance publique.

Mme la rapporteure générale. Nous n’avons pas encore réussi à tirer au clair toutes les implications de votre proposition. Je vous suggère de retirer l’amendement pour le déposer à nouveau avant la séance publique. Nous nous engageons à vous apporter alors des réponses précises.

M. Laurent Wauquiez. J’ai les mêmes retours que M. Le Fur. L’interprétation de l’administration fiscale semble contraire au texte que nous avons voté. L’expertise de Mme la rapporteure générale sera la bienvenue.

L’amendement CF59 est retiré.

L’amendement CF60 du même auteur est également retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF25 du même auteur.

M. Marc Le Fur. L’amendement est défendu.

Mme la rapporteure générale. Les stocks de fourrage auxquels vous proposez d’appliquer la DPI ne peuvent être considérés comme des investissements au même titre par exemple qu’une machine agricole. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF25.

Elle examine ensuite l’amendement CF64, également de M. Marc Le Fur.

Mme la rapporteure générale. Cette liste de nouvelles dépenses éligibles à la DPI, que l’amendement a pour objet de compléter, est quelque peu imprécise et l’amendement risque de se révéler coûteux. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF64.

Elle examine l’amendement CF23 du même auteur.

Mme la rapporteure générale. Vous proposez de ne pas appliquer l’intérêt de retard à la DPA non utilisée au bout de sept ans, et donc réintégrée au bénéfice. Cela ne paraît pas opportun.

M. Marc Le Fur. La DPA est un moyen d’atténuer les incertitudes croissantes auxquelles le monde agricole est exposé. Une prolongation du délai permettrait de mieux utiliser cette épargne pour faire face aux années de vaches maigres.

Mme la rapporteure générale. Les assureurs disposent certainement de statistiques concernant les intempéries et autres phénomènes affectant la production agricole. D’après ce que j’ai pu observer ces dernières années dans mon département, une période de sept ans semble suffisante. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF23.

Elle est saisie de l’amendement CF22 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je propose de relever le plafond global de la DDI et de la DPA fixé au premier alinéa de l’article 72 D ter du code général des impôts.

Mme la rapporteure générale. La proposition me paraît intéressante, mais je ne puis que donner un avis défavorable en raison de son coût.

La Commission rejette l’amendement CF22.

Elle examine ensuite l’amendement CF58 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. L’amendement tend à relever de 30 % à 50 % la proportion maximale dans laquelle des activités non agricoles peuvent être rattachées à l’activité d’une exploitation, éligible au régime des bénéfices agricoles.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable : les plafonds existants sont satisfaisants.

La Commission rejette l’amendement CF58.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure générale, elle rejette l’amendement CF61 de M. Marc Le Fur.

De même, suivant l’avis défavorable de la rapporteure générale, la Commission rejette successivement les amendements en discussion commune CF9 et CF7 de M. Hervé Mariton.

Elle examine l’amendement CF27 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cet amendement vise à rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires. Je suis sûr que nombre de salariés sont venus dans vos permanences vous expliquer que la suppression de cette mesure avait entraîné pour eux une perte de revenus. Dominique Lefebvre fait valoir que des dispositions permettent d’atténuer cette difficulté. Ce n’est pas du tout mon avis. L’article 1er que vous invoquez ne bénéficiera qu’aux salariés gagnant jusqu’à 1,13 SMIC. Or l’ouvrier moyen qui effectue des heures supplémentaires est rémunéré au-delà. C’est le cas dans ma circonscription pour les 10 à 20 % d’ouvriers qui relèvent d’agences d’intérim et touchent déjà l’indemnité de précarité correspondant à 10 % de leur rémunération totale brute, ainsi que pour les salariés d’entreprises qui perçoivent des avantages liés aux résultats de celles-ci. L’article 1er ne leur permettra donc pas de regagner ce qu’ils ont perdu avec la suppression de cette défiscalisation.

Revenons par conséquent sur cette mesure : plutôt que de réparer un mur qui ne tient pas, il vaut mieux le rebâtir entièrement.

Mme la rapporteure générale. La défiscalisation des heures supplémentaires n’apparaît pourtant pas dans le contre-projet de budget de l’UMP pour 2014 !

Vous en appelez à plus de cohérence, mais vous souhaitez dans le même temps faire baisser le coût du travail et dépenser de l’argent public pour encourager les heures supplémentaires : n’est-ce pas marcher sur la tête ?

Je rappelle que 3,7 millions de ménages bénéficieront de la mesure de rattrapage prévue à l’article 1er, dont 1,9 million sortiront de l’impôt. Avis défavorable.

M. Dominique Lefebvre. Pour avoir une démarche cohérente, il convient de distinguer les mesures en faveur du pouvoir d’achat et celles qui visent la justice fiscale. La disposition fiscale que vous avez adoptée en 2007 relevait de la première catégorie. Or nous savons tous que plus on réduit l’assiette à produit constant, plus on doit augmenter les taux, ce qui a des effets extrêmement pervers sur la cohérence des systèmes d’imposition – et ce qui explique en partie l’incompréhension de nos concitoyens. Nous devons donc nous montrer systématiquement défavorables à toute mesure de ce genre.

Nous prévoyons une compensation à la refiscalisation des heures supplémentaires. Elle figure, non dans le présent texte, mais dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative : il s’agit de l’allégement des cotisations salariales de quelque 500 euros pour les salariés rémunérés à temps plein au SMIC. En effet, dès lors qu’on estime que l’augmentation du SMIC brut aurait, en l’état, un effet destructeur sur l’emploi, il faut, pour augmenter le salaire net, réduire les cotisations. Et cette disposition bénéficiera à l’ensemble des salariés, et non aux seuls qui font des heures supplémentaires, conformément à la position que nous avons défendue lors du débat macroéconomique que nous avons eu à l’époque, à savoir que la défiscalisation des heures supplémentaires, alors que les heures normalement travaillées restaient fiscalisées, ne pouvait avoir que des effets pervers sur le marché du travail.

M. Charles de Courson. Vous avez affirmé, madame la rapporteure générale, que le nombre de personnes rendues imposables par la refiscalisation, en année pleine, des heures supplémentaires était de 200 000. Est-ce au seul titre de 2014 ? Ce dispositif est en effet en vigueur pour la deuxième année. Votre estimation paraît douteuse sachant que 9,2 millions de salariés étaient concernés.

M. Olivier Carré. Si j’ai bien entendu Dominique Lefebvre, je suppose qu’il n’a pas voté l’article 1er, qui prévoit bel et bien une réduction de l’assiette.

Nous avons ici une illustration de l’obligation où nous sommes de prendre des mesures très complexes pour limiter l’entrée de certains dans le barème, cela parce qu’on a déstabilisé un mécanisme qui avait pourtant fait ses preuves précisément en ce qui concerne les bas salaires.

Mme la rapporteure générale. En septembre 2013, monsieur de Courson, le nombre de personnes devenues imposables du fait de la refiscalisation des heures supplémentaires était de 156 000. En septembre 2014, on en comptera 200 000. Il convient donc d’additionner ces deux chiffres.

Pour répondre à M. Carré, l’avantage fiscal lié aux heures supplémentaires ne bénéficie par définition qu’aux seuls salariés qui peuvent en effectuer, d’où une injustice vis-à-vis de ceux qui ne sont pas dans ce cas. La mesure proposée en ce moment même au Conseil des ministres, visant à réduire les cotisations sociales de 500 euros par an pour les salariés rémunérés au SMIC, profitera à tous les salariés qu’ils fassent ou non des heures supplémentaires, ce qui semble beaucoup plus juste.

M. Marc Le Fur. Il n’a pas été répondu à ma question : j’ai cité l’exemple précis de gens venus dans ma permanence qui bénéficiaient de cette défiscalisation et qui ne vont pas profiter des correctifs que vous avez imaginés, même si l’exonération de cotisations salariales de 500 euros que vous venez d’évoquer doit jouer un peu en leur faveur. J’insiste sur le fait que les intérimaires qui touchent l’indemnité de fin de mission de 10 % et font des heures supplémentaires, perçoivent des revenus dépassant 1,13 SMIC et n’en restent pas moins des gens au niveau de vie très modeste.

La Commission rejette l’amendement CF27.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CF5 et CF10 de M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Ces amendements visent, l’un à rétablir l’exonération fiscale de la participation de l’employeur aux contrats collectifs de complémentaire santé, l’autre à en reporter la suppression à l’an prochain.

M. le président Gilles Carrez. La Commission s’est déjà prononcée sur le sujet.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure générale, la Commission rejette successivement les deux amendements CF5 ET CF10.

Elle examine ensuite l’amendement CF2 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je propose de maintenir le prélèvement forfaitaire libératoire pour les intérêts des plans d’épargne-logement (PEL) au-delà de douze ans.

Mme la rapporteure générale. J’imagine qu’il s’agit du prélèvement forfaitaire de 24 % pour lequel peuvent opter certains contribuables, sous condition de ressources. Or les intérêts imposables des PEL bénéficiant déjà de ce dispositif, votre amendement est satisfait. Nous en avons eu confirmation ce matin même par la direction de la législation fiscale. Je vous suggère donc de retirer votre amendement, monsieur Le Fur.

L’amendement CF2 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CF13 M. Marc Le Fur.

Mme la rapporteure générale. Cet amendement me paraît inconstitutionnel puisque vous faites une distinction entre, d’un côté, les veufs, et, de l’autre, les célibataires et divorcés qui ne seraient pas soumis au même régime s’agissant de la demi-part.

M. le président Gilles Carrez. Je me souviens avoir donné la même réponse il y a quelques années à M. Le Fur !

M. Hervé Mariton. C’est la différence, madame la rapporteure générale, entre une situation subie et une situation choisie.

Mme la rapporteure générale. Reste que le Conseil constitutionnel n’entrerait pas dans ce genre de subtilités car il considère le résultat. Donc avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF13.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CF6 de M. Hervé Mariton et CF53 du président Gilles Carrez.

M. Hervé Mariton. L’amendement CF6 vise à annuler la baisse du plafond de l’avantage procuré par le quotient familial ; quant à l’amendement CF53, il propose le report de cette mauvaise disposition.

Mme la rapporteure générale. M. Mariton semble nostalgique de la discussion sur le PLF pour 2014 et souhaiter la reprendre ici.

M. Hervé Mariton. La vérité survit à la nostalgie.

Mme la rapporteure générale. Parfois la nostalgie l’emporte sur la vérité.

Nous aurons en septembre et octobre une discussion sur l’impôt sur le revenu. Nous avions précisé, à l’automne dernier que le gain retiré de cette mesure relative au quotient familial, soit un milliard d’euros, serait reversé à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) pour une redistribution verticale en faveur des ménages qui ont des enfants. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les deux amendements CF6 et CF53.

Elle en vient à l’amendement CF91 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il s’agit d’un amendement d’appel qui vise à anticiper la suppression de la contribution exceptionnelle de 50 % sur les rémunérations brutes supérieures à un million d’euros. Nous devons réfléchir dès à présent à l’instauration d’une tranche nouvelle de l’impôt sur le revenu, pour laquelle on ne retiendra pas nécessairement les modalités que je propose ici – un taux de 49 % à partir d’un seuil de 200 000 euros de revenus.

M. le président Gilles Carrez. Je rappelle à M. Alauzet que s’ajoute notamment à la tranche à 45 % la contribution exceptionnelle de 3 % ou 4 %, selon le niveau du revenu fiscal de référence, qui a été maintenue.

Mme la rapporteure générale. Cet amendement relève d’une discussion générale sur une éventuelle refonte de l’impôt sur le revenu, comme cela a du reste été proposé pour septembre.

De plus, je vous rappelle qu’une tranche supplémentaire à 45 % a déjà été créée, que le plafond des réductions fiscales a été abaissé à 10 000 euros et, enfin, qu’un euro perçu sur des intérêts ou sur des dividendes est désormais fiscalisé comme un euro perçu sur le revenu du travail.

Je vous propose d’aborder cette question – qui exige une approche globale – à l’occasion de la discussion sur le projet de loi de finances.

M. Éric Alauzet. Je suis d’accord sur la méthode, d’autant plus que j’ai bien précisé qu’il s’agissait d’un amendement d’appel. Nous pouvons néanmoins nous interroger sur le fait de savoir si nous préférons demander un effort supplémentaire aux personnes qui gagnent 18 000 euros par mois ou bien geler les prestations dont bénéficient les travailleurs handicapés ou victimes d’un accident du travail.

Mme la rapporteure générale. Le sujet doit être appréhendé en tenant compte de toutes ses implications, fiscales et sociales, ce que ne permet pas un projet de loi de finances rectificative.

M. Dominique Lefebvre. Sur la forme, il ne me paraît pas de bonne politique, en effet, de présenter ce type d’amendement d’appel sur un projet de loi de finances rectificative. Sur le fond, je ne crois pas de bonne politique non plus, dans l’état actuel du consentement à l’impôt et au vu de l’objectif de baisser les prélèvements obligatoires, de prendre des mesures ponctuelles de ce type.

Deux pour cent des 36 millions de foyers fiscaux déclarant les revenus les plus élevés, à savoir supérieurs à 90 000 euros – soit un célibataire qui gagne 8 000 euros par mois, soit un couple de cadres touchant chacun 4 000 euros par mois –, paient aujourd’hui 40 % du produit de l’impôt sur le revenu. Non seulement donc on entre très brutalement dans cet impôt du fait des effets de seuil, mais son produit est très concentré sur le dernier décile puisque celui-ci y contribue à hauteur de 70 %. Les deux derniers centiles, que je viens d’évoquer, paient 25 % du total du produit de l’impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée.

Le problème se situe sur quelques dizaines de milliers de foyers, ceux relevant des derniers millièmes du dernier centile, où l’on constate des effets d’imposition des plus dégressifs. On doit donc se montrer très prudent quand on évoque une plus grande progressivité de l’impôt, compte tenu de la réalité de la mécanique fiscale et d’effets de redistribution importants. Des impôts plus progressifs encore frapperaient rapidement le milieu de barème, c’est-à-dire les foyers déclarant environ 30 000 à 40 000 euros de revenus fiscaux par an…

M. le président Gilles Carrez. J’ajouterai que l’hyperconcentration sur les deux derniers centiles rend notre pays très vulnérable du point de vue budgétaire à des changements de comportements. Je vous renvoie, monsieur Alauzet, à la page 78 du rapport de la Cour des comptes sur l’exécution de la précédente loi de finances où est émise l’hypothèse que « la forte augmentation des prélèvements a pu induire des changements de comportement des agents économiques, influençant à la baisse la croissance spontanée des recettes fiscales » – baisse qui a atteint quelque 5 milliards d’euros, ce qui est sans précédent, et qui a été surtout sensible dans les tranches les plus hautes de l’impôt sur le revenu, précise la Cour. C’est pourquoi j’ai demandé au ministre, qui s’y est engagé, de mettre à notre disposition, d’ici à la fin juin, des données précises sur les éventuels départs de ménages au titre des revenus 2012.

M. Charles de Courson. Des spécialistes des questions fiscales m’indiquent que les travailleurs indépendants, notamment, se mettent à capitaliser leurs revenus ; autrement dit, ils ne distribuent plus et attendent des jours meilleurs. Or il se dit que ce phénomène est en train de se généraliser. Je partage donc totalement l’avis de notre collègue Lefebvre : arrêtons de vouloir accentuer la progressivité d’un impôt sur le revenu déjà trop progressif. Accroître la progressivité ne fera qu’aggraver les phénomènes de réduction de l’assiette fiscale.

M. Éric Alauzet. Évidemment, l’étude du comportement des uns et des autres mérite d’être menée. Reste que, j’y insiste, le dispositif que je propose se substituerait à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

L’amendement CF91 est retiré.

La Commission examine l’amendement CF35 de M. Hervé Mariton.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous nous avez indiqué, madame la rapporteure générale, que la fiscalisation de la majoration de pension de 10 % pour les retraités qui ont eu trois enfants conduisait à l’imposition de 340 000 foyers supplémentaires tandis que la refiscalisation des heures supplémentaires en année pleine faisait de même pour 200 000 autres. Nous proposons donc une mesure relativement simple et souple : augmenter la décote – de 508 à 550 euros – afin d’éviter à ces foyers d’entrer dans l’impôt.

Mme la rapporteure générale. Lorsque vous avez gelé le barème de l’impôt sur le revenu, vous n’avez procédé à aucune revalorisation de la décote. Nous, nous l’avons fait, ce qui a produit un effet dès septembre 2013 puisque 400 000 foyers fiscaux sont sortis de l’impôt sur le revenu. Il est prévu de faire sortir de la même manière 200 000 foyers supplémentaires en septembre 2014. Ces chiffres ne tiennent pas compte, bien sûr, de l’application de l’article 1er du présent PLFR une fois qu’il sera définitivement adopté.

J’émets un avis défavorable puisque le dispositif prévu à l’article 1er bénéficiera aux populations visées par votre proposition.

La Commission rejette l’amendement CF35.

La Commission en vient à l’amendement CF43 du président Gilles Carrez.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’imposition sur le revenu est susceptible de connaître une augmentation excédant les capacités contributives des contribuables, qui peuvent alors être conduits à demander à l’administration fiscale un échelonnement de leurs versements. Nous proposons donc de limiter à 10 % la hausse d’impôt résultant des nouvelles mesures que vous avez prises au titre des revenus de 2013.

M. le président Gilles Carrez. Cet amendement vise en quelque sorte à écrêter les hausses d’impôt.

Mme la rapporteure générale. Alors que, comme l’a rappelé Dominique Lefebvre, l’objectif était d’élargir la base fiscale en y faisant entrer des revenus qui n’en faisaient pas partie, vous allez dans un autre sens et écrasez la redistributivité que peut receler l’impôt sur le revenu. Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Au-delà de l’aspect technique, l’amendement met en lumière un vrai problème, celui des « polyhandicapés » de l’impôt, comme le serait un couple ayant cinq enfants et dont le mari militaire, par exemple, aurait repris une activité après son départ en retraite à l’âge de quarante-cinq ans. L’accumulation de mesures non coordonnées augmente considérablement le niveau des revenus imposables. Le Gouvernement envisage-t-il un lissage sur deux ou trois ans, comme c’est l’usage en de pareils cas ?

M. le président Gilles Carrez. L’amendement, que j’ai cosigné, pourrait intéresser des dizaines de milliers de ménages. Ceux-ci auraient à subir une augmentation d’impôt de 10 à 20 %, soit en raison de l’intégration dans le revenu imposable de la majoration de 10 % des pensions pour charges de famille, soit par la conjonction des mesures relatives aux heures supplémentaires et à la part des employeurs aux complémentaires santé.

Pour faciliter le consentement à l’impôt, il est préférable, à revenu inchangé, d’étaler dans le temps une augmentation qui, sans cela, serait excessive. Les contribuables n’acceptent pas que leur impôt augmente de 20 à 40 % alors que leurs revenus n’ont pas évolué. D’où la limite de 10 % proposée.

Mme la rapporteure générale. J’ai reçu ce matin un document qui précise l’impact, par décile, du cumul des mesures visées – impact estimatif pour certains revenus inconnus de l’administration fiscale. Je transmettrai ces informations à la Commission après en avoir pris connaissance.

M. Charles de Courson. Ne voulez-vous pas prendre une initiative ?

Mme la rapporteure générale. Comme saint Thomas, je ne crois que ce que je vois. Il faut aussi vérifier que l’amendement n’écrase pas la redistributivité et la progressivité de l’impôt.

M. le président Gilles Carrez. Il serait intéressant d’avoir une idée du nombre de ménages concernés : l’effet ne serait évidemment pas le même selon qu’ils sont quelques milliers ou 150 000.

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous n’entendons pas écraser la redistributivité, madame la rapporteure générale, mais prendre en compte l’impact des mesures nouvelles. Il en va en effet du consentement à l’impôt, mais aussi de son recouvrement car l’impossibilité de payer entraîne des stratégies d’évitement ou des exils fiscaux.

Mme la rapporteure générale. Les dispositions que nous votons article par article finissent effectivement par se cumuler pour les ménages. C’est pourquoi nous avons demandé, pour celles dont nous parlons, une analyse d’impact par tranche de revenus, étant entendu qu’elle portera sur les revenus de 2012 et que nous ne connaissons pas l’effet de la fiscalisation de la majoration de 10 % de certaines pensions, ni de la fiscalisation de l’abondement des complémentaires santé par les employeurs. J’étudierai attentivement les chiffres reçus ce matin.

M. Dominique Lefebvre. Si l’amendement est aussi sympathique que, par exemple, la défiscalisation des heures supplémentaires, ses conséquences le seraient sans doute beaucoup moins.

Le problème posé est celui du rendement de l’impôt, mais aussi de la justice fiscale ; en l’occurrence, je ne suis pas convaincu que l’amendement soit juste, quel que soit l’effet psychologique des hausses d’impôt. Selon une annexe du rapport que j’ai rédigé avec M. Auvigne, 90 % des foyers fiscaux ont un taux moyen d’imposition égal ou inférieur à 9 %, et 49 % sont à 0 % ; le reste des contribuables se répartit approximativement par tiers dans les fourchettes comprises entre 0 et 3 %, 3 et 6 % et 3 et 9 %. Le taux d’imposition moyen ne dépasse 15 % que pour 3 % des foyers fiscaux.

Le taux marginal impressionne, mais il faut regarder la réalité. Le taux d’imposition moyen peut effectivement dépasser 40 % pour quelques dizaines de milliers de foyers fiscaux mais, aux niveaux de revenus en cause, l’impact psychologique d’une hausse d’impôt n’est sans doute pas très considérable.

Sur un plan plus technique, l’augmentation de l’impôt dû, liée au cumul de dispositions fiscales, tient à des raisons complexes et multiples – parmi lesquelles un changement de tranche, par exemple.

Chacun, ici, défend le principe d’un impôt personnalisé, qui dépend d’abord de la situation fiscale et des éventuels crédits ou réductions d’impôt. Or l’application d’un plafond de 10 % à l’impôt brut – avant crédits ou réductions d’impôt – plutôt qu’à l’impôt net serait de nature à figer le système. À ce stade, il serait donc sage de retirer l’amendement et de se pencher plus attentivement sur le sujet.

La Commission rejette l’amendement CF43.

Puis elle passe à l’amendement CF12 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Selon l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale - l’ACOSS – entre 2012 et 2013, le nombre d’employeurs à domicile a diminué de 3,2 %, les volumes horaires déclarés de 6,1 % et la masse salariale nette correspondante de 5,7 %. Sans doute certains particuliers ne déclarent-ils pas l’ensemble des activités ; reste que le secteur connaît une décrue sensible après avoir créé de nombreux emplois pendant plusieurs années.

Le système repose sur deux dispositions essentielles, la réduction d’impôt et le crédit d’impôt : le premier profite à l’ensemble des employeurs à domicile, tandis que le second est conditionné au fait que chacun des deux membres d’un couple marié est en activité. Dans ces conditions, un retraité aisé bénéficie de la réduction d’impôt alors qu’un retraité modeste n’en bénéficiera pas. Or c’est souvent à l’âge de la retraite que l’on est amené à recourir aux services à domicile.

Nous devons endiguer l’effondrement du secteur ; M. Eckert a d’ailleurs laissé entendre que le Gouvernement prendrait des mesures à cet effet : avez-vous des informations sur ce point ?

Mme la rapporteure générale. Le coût d’une extension du crédit d’impôt aux retraités serait très élevé, sans doute de plus d’un milliard d’euros. D’autre part, tout particulier employeur âgé de plus de soixante-dix ans bénéficie d’une exonération totale de cotisations sociales, dans la limite de 65 heures mensuelles rémunérées au SMIC : cette disposition a un coût brut, pour la collectivité, de 465 millions d’euros. Les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans, elles, ont droit à un abattement, certes plafonné, de 10 % sur les pensions. Il faudrait donc faire la synthèse de l’ensemble des avantages sociaux et fiscaux par tranche d’âge. Avis défavorable.

M. le président Gilles Carrez. D’après ce que j’ai pu lire dans la presse, le Gouvernement envisage de porter de 0,75 à 1,50 euro l’exonération horaire de cotisations patronales. Cette mesure avait été proposée l’an dernier par M. Eckert, alors rapporteur général du budget.

Mme la rapporteure générale. En effet, nous avions tous deux cosigné un amendement en ce sens au PLFSS pour 2013.

M. Marc Goua. La baisse du nombre d’emplois à domicile a été de 37 000 au cours des trois dernières années.

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous l’avions prédit !

M. le président Gilles Carrez. Nous avions alerté sur ce point à deux reprises : une première fois sous la précédente législature, lorsque le Gouvernement, par la voix de M. Baroin, avait proposé de supprimer l’abattement de 15 points de cotisations patronales pour les employeurs de salariés à domicile, une seconde fois, sous la législature actuelle, lors de la suppression de l’assiette forfaitaire.

M. Marc Goua. L’emploi concerné n’est pas délocalisable, et les aides vont directement à la création d’emplois.

Selon mes informations, l’exonération pourrait effectivement être portée de 0,75 à 1,50 euro, mais cette disposition relève du domaine réglementaire.

M. Charles de Courson. Vous avez raison, mais elle a un impact budgétaire pour l’État ; or aucun crédit n’est ouvert, dans le présent projet, pour y faire face. Le Gouvernement, madame la rapporteure générale, a-t-il prévu une ligne budgétaire à ce propos ?

M. le président Gilles Carrez. Une hausse de l’exonération appelle en effet une mesure de coordination dans le collectif budgétaire.

M. Dominique Lefebvre. Nous ne sommes pas en mesure, à ce stade, de voter un amendement sur ce sujet qui relève du domaine réglementaire. Le Gouvernement s’exprimera peut-être en séance. L’hypothèse de porter l’exonération à 1,50 ou 1,75 euro a en effet été évoquée, mais rien n’est encore décidé à ma connaissance.

M. Marc Le Fur. Je retire l’amendement, pour le redéposer en article 88.

L’amendement CF12 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF11 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. L’effort, nous avait-on expliqué en instaurant le zonage relatif au logement, doit porter en priorité sur les zones tendues ; mais cette carte a été conçue à une époque de relative prospérité, qui incitait à hiérarchiser les priorités. Depuis, la crise a pris une tout autre ampleur et s’il est un secteur qui souffre de ses effets sur l’emploi, c’est bien le logement, en particulier – je puis en témoigner – dans les zones exclues des aides. L’heure n’est donc plus à la hiérarchie des demandes, mais à la relance économique du secteur. Aussi me paraît-il nécessaire de reconsidérer le zonage, même si je ne prétends pas apporter par ce moyen une réponse définitive à la crise du logement.

Mme la rapporteure générale. Le secteur connaît effectivement des difficultés. L’objectif de la réduction d’impôt dite Duflot, je le rappelle, est de diriger les moyens publics vers les zones où ils sont le plus nécessaires.

La ministre du logement a prévu, sur le thème dont nous parlons, une communication au Conseil des ministres le 25 juin ; je vous invite donc à retirer votre amendement, quitte à le redéposer en fonction des annonces qui seront faites. Faute de ce retrait, mon avis serait défavorable.

M. Marc Le Fur. Dans le Tarn-et-Garonne comme dans mon département, j’en suis sûr, seules quelques communes bénéficient actuellement des aides. Quoi qu’il en soit, j’accepte de retirer l’amendement à ce stade.

L’amendement CF11 est retiré.

La Commission examine l’amendement CF47 du président Gilles Carrez.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le pacte de responsabilité s’attaque au problème de l’emploi et de la compétitivité. Pour avoir une politique cohérente, l’amendement tend à replacer la réduction d’impôt dite « Madelin » dans le plafonnement spécifique de 18 000 euros. Cela éviterait en effet de pénaliser les petites entreprises nouvellement créées, qui forment un vivier d’emplois, par rapport aux entreprises déjà existantes, auxquelles s’adresse le pacte de responsabilité.

Mme la rapporteure générale. La réduction d’impôt « Madelin » coûte aujourd’hui 192 millions d’euros à l’État ; un relèvement du plafond à 18 000 euros porterait cette somme à 250 ou 260 millions. Pour la réduction d’impôt au titre des souscriptions dans les sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle – SOFICA – soumise au plafond de 18 000 euros, la dépense fiscale est de 20 millions d’euros ; elle descendrait sans doute à 15 millions ou un peu moins avec le plafond à 10 000 euros que vous suggérez en forme de contrepartie à votre amendement. Les ordres de grandeur ne sont donc pas du tout les mêmes. Avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ces chiffres montrent toute la différence dans le soutien accordé à telle ou telle activité économique quant à la création d’emplois. Le dispositif « Madelin » me paraît donc être la bonne cible.

La Commission rejette l’amendement CF47.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CF86 de M. Olivier Dassault.

M. Olivier Carré. Cet amendement participe du même esprit que le précédent. Presque toutes les niches fiscales – à l’exception du dispositif « Malraux », qui reste déplafonné – sont soumises à un plafond unique, fixé à 10 000 euros. Celui-ci doit-il demeurer à ce niveau ? Nous posons la question à travers cet amendement d’appel, qui permettrait d’ouvrir le débat avec le Gouvernement.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable à ce retour au plafond initial de 25 000 euros, que nous avons progressivement ramené à 10 000 euros lors de précédents débats budgétaires, et ce d’autant que l’amendement porte également le plafond à 10 % du revenu imposable, ce qui serait source de très larges économies d’impôt.

La Commission rejette l’amendement CF86.

Elle rejette ensuite, suivant l’avis défavorable de la rapporteure générale, l’amendement CF87 de M. Olivier Dassault.

Puis elle se saisit de l’amendement CF140 de M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Les plans de prévention des risques technologiques peuvent imposer à des ménages, en l’espèce souvent modestes, de réaliser certains travaux s’ils sont propriétaires d’habitations situées à proximité d’un site « Seveso ». Le système actuel repose sur la composition du foyer fiscal ; or les travaux visent une habitation. L’amendement pourrait recueillir l’assentiment du Gouvernement, sous réserve d’un sous-amendement rédactionnel, car il faut éviter qu’une même habitation fasse l’objet de plusieurs crédits d’impôt. Notre collègue Yves Blein soutient lui aussi cet amendement après avoir participé à son élaboration.

Mme la rapporteure générale. Effectivement, le problème est que deux concubins, faisant chacun une déclaration d’impôt, peuvent vivre au sein d’une même habitation, qui bénéficierait alors deux fois du crédit d’impôt. En outre, l’amendement vise aussi les plafonds applicables au crédit d’impôt pour l’installation d’équipements conçus pour des personnes âgées ou handicapées, ce qui n’est sans doute pas l’intention de l’auteur.

M. Dominique Lefebvre. Je retire l’amendement pour le redéposer lorsque nous nous réunirons en application de l’article 88, après en avoir revu la rédaction avec la rapporteure générale et, le cas échéant, avec les services de Bercy.

M. le président Gilles Carrez. Le dispositif avait été créé, il y a trois ans, par un amendement de M. David Habib.

M. Charles de Courson. L’exposé sommaire indique que les investissements visés sont financés par le crédit d’impôt, mais aussi par « une participation des industriels de 25 % d’un montant de travaux plafonné à 20 000 euros » et « une participation des collectivités ». Ces participations résultent-elles d’obligations légales ?

M. le président Gilles Carrez. Le sujet avait fait l’objet d’un amendement au projet de loi relatif au Grenelle de l’environnement.

M. Charles de Courson. Oui, mais seulement sur l’aspect fiscal.

M. Dominique Lefebvre. Compte tenu de l’origine des nuisances, une participation des industriels me semble logique ; mais je vérifierai ce point.

M. le président Gilles Carrez. Je vous invite à vous rapprocher de David Habib, qui avait évoqué le problème pour la commune de Mourenx.

L’amendement CF 140 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF76 de M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Il s’agit de relever le seuil de lucrativité des organismes à but non lucratif, selon une proposition faite par M. Laurent Grandguillaume dans le rapport remis au Premier ministre sur la fiscalité de ce secteur, et qu’avait approuvée le Gouvernement.

J’avais présenté le même amendement lors de l’examen pour avis du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire ; Christian Eckert, alors rapporteur général du budget, m’avait invité à le représenter dans le cadre du collectif budgétaire.

Les organismes à but non lucratif bénéficient, à condition que leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes, d’une franchise d’impôt sur les sociétés si les recettes d’exploitation perçues dans le cadre de leurs activités lucratives n’excèdent pas 60 000 euros. Le seuil, instauré en 2000, n’a pas été relevé depuis 2002. Je propose de le porter à 80 000 euros ou à un pourcentage des recettes – cette dernière mention posant visiblement problème à la rapporteure générale, je suis bien entendu disposé à réécrire l’amendement d’ici à l’examen en séance.

Mme la rapporteure générale. Un tel amendement serait plus à sa place dans le projet de loi de finances initiale.

M. le président Gilles Carrez. J’en suis d’accord.

Mme la rapporteure générale. Mais, surtout, la limitation du plafond à 5 % des recettes d’exploitation supprime de fait toute limite, puisque les recettes n’en ont pas. Je vous invite donc au retrait de l’amendement, y compris pour réfléchir au plafond en euros, qui, tel que vous le proposez, excède légèrement l’inflation constatée depuis 2002.

M. Charles de Courson. Nous approuvons tous la mesure dans son principe, pourvu qu’en soit exclu le taux de 5 % des recettes et qu’elle prévoie une indexation du seuil.

M. Régis Juanico. Je suis disposé à réécrire l’amendement en ce sens. La question s’était en effet posée de savoir si le seuil devait désigner une valeur absolue ou un pourcentage des recettes.

M. le président Gilles Carrez. Il faut s’en tenir au critère de valeur absolue.

M. Régis Juanico. Celui-ci n’incite pas au regroupement des acteurs, et pénalise les organismes les plus centralisés ; d’où l’adjonction du critère alternatif de 5 %, que je suis cependant prêt à supprimer. Comme je l’ai dit, lors de l’examen pour avis du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, le 9 avril dernier, notre commission avait conclu qu’une telle mesure pourrait être débattue dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Nous en reparlerons donc avec le Gouvernement la semaine prochaine.

L’amendement CF76 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CF92 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Cet amendement, bien connu de la rapporteure générale, de Karine Berger et de Pierre-Alain Muet, a suscité ici même un vif débat. Il tend à réintégrer à la base imposable d’une entreprise française les bénéfices dégagés par des établissements ou filiales installés dans un territoire à fiscalité privilégiée – et non plus seulement identifié comme un paradis fiscal –, sauf à démontrer le caractère légitime de l’option contraire, en étendant cette obligation aux membres de l’Union européenne. En d’autres termes, il renverse la charge de la preuve en imposant aux entreprises de démontrer qu’elles ne procèdent pas à des montages ayant pour but principal de maximiser leurs économies d’impôt.

Mme la rapporteure générale. Je ne saurais m’opposer à cet amendement dans son principe puisque je l’ai cosigné lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014. Mais nous examinons ici le projet de loi de finances rectificative. C’est en vue de la loi de finances pour 2015 que nous retravaillerons certains articles de la loi de finances initiale censurés par le Conseil constitutionnel.

Cet amendement n’en faisait pas partie puisqu’il n’a pas été adopté, mais il présente quelques difficultés d’application au niveau européen. Les membres de la Commission des comptes publics de la Chambre des communes – que j’ai rencontrés la semaine dernière avec le bureau de notre Commission, dont Pierre-Alain Muet et le président Carrez – sont tout à fait d’accord pour que nous travaillions ensemble sur ces questions ; nous avons d’ailleurs prévu une grande réunion à l’automne. Les pays européens, en effet, ont tous intérêt à préserver leur base fiscale.

Je vous prie donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Alauzet.

M. le président Gilles Carrez. En nous présentant dernièrement son rapport « de suite » sur l’optimisation fiscale des entreprises dans un contexte international, Pierre-Alain Muet a annoncé que de nouvelles propositions pourraient être formulées à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances initiale.

M. Dominique Lefebvre. Dans ce collectif budgétaire, mieux vaut ne prendre que des mesures d’urgence qui réduisent les prélèvements obligatoires et qui ne posent pas de problèmes constitutionnels. Nous devons en effet tous être attentifs à la constitutionnalité des dispositions que nous adoptons : rien de plus énervant que les jeux de posture qui ne débouchent sur rien et qui nous font prendre du retard, comme on l’a vu en décembre 2013. Si l’on peut débattre politiquement de l’appréciation par le Conseil constitutionnel de telle ou telle disposition, le principe de réalité doit s’imposer à nous : une disposition censurée par le Conseil ne s’applique pas, donc elle ne sert à rien.

Nous proposerons dans le cadre de l’article 88 plusieurs amendements soutenus par le groupe SRC afin de lutter contre la fraude fiscale et de clarifier les conditions de l’optimisation fiscale, mais en veillant à leur rédaction compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel et dans le respect de la stricte compétence du législateur, qu’il ne peut déléguer ni à l’administration fiscale ni aux juges.

Mme Karine Berger. Je voudrais tendre la main à notre collègue Alauzet. Nous n’avons pas encore réussi à construire un dispositif juridiquement assez solide pour que le Conseil constitutionnel ne maintienne pas sa position, que je persiste à qualifier de politique. Mais nous le ferons d’ici à la loi de finances initiale pour 2015, avec l’aide de nos collègues britanniques et, peut-être, d’autres collègues européens. Nous aborderons alors les questions relatives à la base fiscale européenne, à l’abus de droit et au dépôt des schémas d’optimisation fiscale. Il faut simplement nous laisser un peu de temps.

M. Éric Alauzet. J’ai toute confiance en Valérie Rabault, Karine Berger et Pierre-Alain Muet. Si j’ai déposé cet amendement dès à présent, c’est parce que les aides aux entreprises sont le principal enjeu du projet de loi de finances rectificative et du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. À l’heure où des efforts sans précédent sont consentis en faveur des entreprises, le pacte de responsabilité ne porterait pas bien son nom si celles-ci se dérobaient au paiement de l’impôt. Mais, naturellement, c’est un peu plus tard que nous répondrons concrètement à la question que j’ai voulu soulever.

L’amendement CF92 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF112 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il s’agit de subordonner les aides aux entreprises à leur investissement dans la transition écologique, en réduisant l’impôt sur les sociétés de celles qui consacrent au développement durable plus de 10 % de leur chiffre d’affaires.

Mme la rapporteure générale. C’est en loi de finances initiale que nous aurons un débat global sur l’impôt sur les sociétés. L’amendement étant présenté isolément, je ne puis qu’y être défavorable.

M. Dominique Lefebvre. Que les choses soient claires : nous souhaitons tous favoriser la transition énergétique, objet du texte présenté aujourd’hui même en Conseil des ministres. Il ne s’agit manifestement ici que d’un amendement d’appel. En effet, comment définir juridiquement une action « liée à la stratégie nationale de développement durable » ? En l’état, cet amendement est purement politique et inapplicable, car c’est un nid à contentieux. Pour atteindre l’objectif poursuivi, il faudra élaborer des dispositifs robustes qui ne plongent pas les contribuables dans la confusion.

En outre, comme l’a rappelé la rapporteure générale, nous devrons procéder à une réforme globale de l’impôt sur les sociétés, dont le pacte de responsabilité prévoit à terme de réduire le taux moyen.

M. Éric Alauzet. Notre amendement se réfère à deux lois, dont la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement : il faut assurément préciser et sécuriser juridiquement sa rédaction, mais cela ne signifie pas que nous partions de rien !

L’amendement CF112 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CF111 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il ne serait pas normal que les entreprises utilisent les aides sans précédent que leur consent l’État, non pour développer la compétitivité, l’investissement et l’emploi, mais pour accroître les dividendes versés aux actionnaires, si légitimes soient-ils dans une économie de marché. L’optimisation de la dépense publique ne doit pas se limiter aux aides sociales. Nous proposons donc que le taux de l’impôt sur les sociétés soit majoré de 2 % lorsque les dividendes distribués représentent plus de 10 % du bénéfice imposable.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur Alauzet, la seule mesure de ce collectif budgétaire qui concerne la fiscalité des entreprises tend à l’alourdir, puisqu’elle repousse d’un an la suppression de la surtaxe.

Mme la rapporteure générale. Je rappellerai à M. Alauzet comme à notre président qu’il faut adopter un point de vue global : en réservant ce débat à la loi de finances, pour le premier, et, pour le second, en se souvenant que le CICE représente 20 milliards d’euros alloués aux entreprises.

M. Marc Le Fur. À certaines entreprises ! Les coopératives en sont exclues.

M. Éric Alauzet. Si l’on ne prend en considération que les articles du projet de loi, 90 % de ce que nous disons tous depuis le début de cette séance est sans objet ! Je maintiens que les aides aux entreprises constituent l’axe principal du présent texte comme du PLFRSS.

La Commission rejette l’amendement CF111.

L’amendement CF90 de M. Éric Alauzet est retiré.

La Commission en vient ensuite à l’amendement CF45 du président Gilles Carrez.

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous en avons parlé hier avec le Premier président de la Cour des comptes, l’effet sur les recettes fiscales des dispositions déjà adoptées va être minoré au cours des mois et des années à venir. Il nous faut donc nous attaquer à la réduction des dépenses fiscales. Voilà pourquoi nous proposons de ramener de 60 % à 50 % du montant des dons la réduction d’impôt liée au mécénat d’entreprise. Certes, la mesure ne modifiera pas le dispositif en lui-même, mais permettra de le circonscrire un peu plus et d’éviter les effets d’aubaine. En dix ans, le coût de cette réduction d’impôt a été multiplié par sept et le nombre d’entreprises bénéficiaires est passé de 6 500 à 32 000 ! Nous devons nous montrer plus rigoureux.

M. le président Gilles Carrez. La loi d’août 2003 qui instaurait ce dispositif n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact – il ne s’agissait d’ailleurs pas d’une loi de finances –, mais d’une simple évaluation de son coût, très inférieure à la réalité. Aujourd’hui, et c’est heureux, il est convenu de réserver aux lois de finances les mesures de dépense fiscale.

De manière globale, malgré de gros efforts, l’économie réalisée sur l’ensemble des dépenses fiscales ne dépasse pas 500 millions d’euros en 2013, ce qui est très surprenant. Le cas du mécénat d’entreprise en fournit un élément d’explication : la dynamique de progression des dépenses fiscales est telle que même des mesures contraignantes de plafonnement la freinent à peine. Nous devons donc nous montrer extrêmement vigilants à cet égard.

J’approuve par conséquent la proposition d’Olivier Carré de créer au sein de la commission des finances une mission sur la dépense fiscale, peut-être en vue de leur substituer des dépenses budgétaires. Cela permettrait de poursuivre le travail entamé sous la présidence de Didier Migaud, lorsque nous avons quasiment imposé au Gouvernement le plafonnement global de ces dépenses et leur transformation systématique en réductions d’impôt, qui en était la condition.

Mme Karine Berger. Monsieur le président, lorsqu’il s’agissait des amendements de M. Alauzet, le moment n’était pas venu de traiter des questions politiques relevant de la loi de finances initiale, mais lorsque l’on en vient au vôtre, il y a urgence !

Les dépenses fiscales sont évidemment une question clé dont notre Commission devra s’occuper. Elle y sera considérablement aidée par l’INSEE, qui publiera en septembre son nouveau calcul du niveau de dépenses publiques de notre pays, intégrant une grande partie des dépenses fiscales, à savoir toutes celles qui correspondent à des crédits d’impôt. Cela ne doit pas nous dispenser d’analyser les conséquences de ce nouveau calcul et de réfléchir à l’efficacité des décisions prises en la matière.

M. le président Gilles Carrez. Vous avez raison, madame Berger : je vais retirer mon amendement et le redéposer au titre de l’article 88, car il s’agit d’un amendement d’appel en vue de la loi de finances pour 2015.

Mme la rapporteure générale. Effectivement, ce sujet relève de la loi de finances initiale. Dans ce cadre, nous devrons débattre de l’ensemble des dépenses fiscales, à la lumière de leur requalification par l’INSEE.

M. Olivier Carré. C’est notamment l’annonce de ces nouvelles normes qui m’a conduit à suggérer au président la création d’une mission. En effet, avant d’être considéré du point de vue strictement technique, le mode de calcul devrait faire l’objet d’une approche politique, grâce à un dialogue avec l’INSEE, nécessairement transpartisan – car nous sommes collectivement responsables des dépenses décidées dans le passé. Cela nous permettra de savoir de quoi nous parlons au cours des débats à venir. Il en va de 2 à 4 % du PIB selon le positionnement du curseur qu’arrêteront l’INSEE et Eurostat. Il importe donc que notre information ne dépende pas de notes de Bercy plus ou moins bien expliquées et qui nous parviennent du jour au lendemain.

M. Marc Goua. Il faut réduire les dépenses fiscales, certes. Mais, dans le domaine du mécénat, notre pays accuse un retard colossal, notamment en matière de création artistique. Le modeste élu de province que je suis peut vous assurer que l’animation culturelle y doit beaucoup au mécénat d’entreprise. Si la réduction d’impôt est fortement limitée, ce sont les collectivités qui prendront le relais, ce qui n’est guère satisfaisant.

M. Dominique Lefebvre. L’inflation des dépenses fiscales au cours des années 2000 est l’enfant illégitime des normes instituées pour maîtriser la dépense publique, doublées d’un réflexe traditionnel de l’administration et, parfois, d’une forme d’intervention publique. Mais, en supprimant une dépense fiscale, on ne réalise pas une économie : on augmente les prélèvements obligatoires, contrairement à notre objectif.

Mme Karine Berger. Pas dans la nouvelle comptabilité.

M. Dominique Lefebvre. Je maintiens que le taux de prélèvements obligatoires s’en trouve accru. Supprimer les dépenses fiscales implique de réfléchir aux outils, aux bénéficiaires et à l’efficacité de l’intervention publique. Est-ce un bon moyen de redresser les comptes publics ? Cela ne saurait en tout cas se substituer à l’effort de maîtrise de la dépense publique.

M. Charles de Courson. Deux remarques. Premièrement, nous ne nous tirerons d’affaire que lorsque nous budgétiserons les dépenses fiscales. Cela va être fait en comptabilité nationale, mais pas dans le budget de l’État. Notre collègue Lefebvre a raison. J’étais favorable à une norme étendue aux dépenses fiscales, afin de montrer que l’on continue à substituer de la dépense fiscale à la dépense budgétaire pour faire croire à notre rigueur.

M. le président Gilles Carrez. Monsieur de Courson, je rappelle qu’en transformant une dépense budgétaire en dépense fiscale, on passe de crédits limitatifs à des crédits évaluatifs.

M. Charles de Courson. Et évalués n’importe comment, ainsi que l’ont montré plusieurs études sur l’évaluation des dépenses fiscales !

S’agissant ensuite des dons, qu’ils émanent des entreprises ou des particuliers, on a complètement dérapé. Je suis peut-être vieux jeu, mais il est dit dans la Bible : « Quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite ». Or, aujourd’hui, il n’y a plus de vrai don. On fait croire que l’on est généreux aux frais des finances publiques.

Pire encore : quand vous êtes fortuné et que vous faites une réserve temporaire d’usufruit, non seulement un don de 100 ne vous en coûte que 25 après prise en compte de l’avantage fiscal, mais vous pouvez récupérer ce reliquat puisque des circulaires administratives permettent aux fondations de faire bénéficier les généreux donateurs d’un retour de 25 %. C’est M. Arnault qui a mis au point cette technique, grâce à laquelle on peut organiser par le biais d’une fondation de grandes manifestations culturelles auxquelles on invite tous ses amis, sans que cela vous coûte rien, aux frais de l’État français ! On marche sur la tête !

M. le président Gilles Carrez. C’est un sujet très délicat. Je me suis senti bien seul face à l’avalanche de critiques qui a plu sur moi lorsque je me suis risqué à m’y attaquer il y a trois ans.

L’amendement CF45 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CF69 de M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert. Parce que la pauvreté touche nombre de nos compatriotes, nous proposons de pérenniser, en la modifiant quelque peu, la mesure temporaire d’incitation fiscale aux dons de lait par les producteurs que le Gouvernement a prise cet hiver.

Mme la rapporteure générale. C’est un sujet auquel nous sommes tous très sensibles. Votre amendement posant quelques problèmes juridiques, je vous propose de le retirer pour nous laisser le temps d’en reparler avec le Gouvernement.

L’amendement CF69 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CF94 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. On nous reproche de présenter en projet de loi de finances rectificative ce qui relève de la loi de finances initiale, mais ce collectif est la première occasion qui nous est donnée, après les élections municipales et européennes, de tenir compte des messages adressés par les Français. En outre, comme l’a dit Éric Alauzet, il comporte d’importantes mesures d’aide aux entreprises. Il est donc légitime que nous prenions position sur leur conditionnalité. En conséquence, nos amendements CF94, 93 et 125 tendent à améliorer l’utilisation des fonds dédiés au crédit d’impôt recherche.

Aux termes de l’amendement CF94, déjà déposé – par la rapporteure générale – et discuté ici, c’est au niveau des groupes et non des entreprises que s’apprécierait le plafond de 100 millions d’euros, afin de les empêcher de contourner le dispositif en répartissant leurs dépenses entre leurs différentes filiales, et de réorienter le crédit d’impôt recherche vers son objectif initial : favoriser l’innovation au sein des PME.

Je rappelle que le présent projet annule 288 millions de crédits destinés à l’écologie et gèle les pensions de retraite au-delà de 1 200 euros. Soyons donc tous attentifs à l’efficacité de la dépense publique. Si l’on veut faire des économies, la moindre des choses est de bien cibler les aides accordées aux entreprises.

Mme la rapporteure générale. À l’exception de celle qui porte sur le pouvoir d’achat des ménages, qui s’appliquera dès septembre 2014, les mesures comprises dans ce projet sont destinées à s’appliquer en 2015.

L’amendement que, comme le rappelle Mme Sas, j’avais cosigné lors de l’examen de du dernier projet de loi de finances, était lié à un autre, destiné quant à lui à réduire l’impôt sur les sociétés payé par les PME. J’en suggère ici le retrait pour un examen en loi de finances dans une perspective globale, de manière à ajuster la cible.

M. Dominique Lefebvre. Les questions qui font l’objet des amendements CF94, CF93 et CF125 de Mme Sas ont déjà été débattues l’année dernière. La position du groupe SRC en faveur de la sanctuarisation du crédit d’impôt recherche n’a pas changé, non plus que sur l’ensemble des amendements tendant à conditionner le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Nous voterons contre ces amendements s’ils sont maintenus.

M. Eva Sas. Je retire donc l’amendement, mais je le défendrai à nouveau en séance publique après l’avoir redéposé dans le cadre de l’article 88.

L’amendement CF94 est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CF93 de Mme Eva Sas.

M. Eva Sas. La sanctuarisation évoquée par M. Lefebvre doit avoir des limites. L’amendement tend ainsi à éviter que certaines dépenses soient éligibles à la fois au CICE et au crédit d’impôt recherche, comme c’est aujourd’hui le cas pour certaines dépenses de personnel, cela pour une base fiscale qui se situe entre 400 et 560 millions d’euros. Les mêmes dépenses ne peuvent, en effet, ouvrir droit à deux crédits d’impôt.

Mme la rapporteure générale. Madame Sas, tout en souscrivant à ce principe, je recommande de ne pas préempter les conclusions que doit rendre en septembre la mission d’information consacrée au CICE, à laquelle vous appartenez.

M. le président Gilles Carrez. C’est là en effet un principe que l’on ne puisse appliquer deux crédits d’impôt différents à une même assiette.

M. Eva Sas. Je retire donc l’amendement, mais je le redéposerai également dans le cadre de l’article 88 afin qu’il soit examiné en séance publique. Il est en effet inutile d’attendre les conclusions de la mission d’information pour corriger une situation absurde ou, en tout cas, éloignée de ce que voulait le législateur.

Mme Karine Berger. En septembre, une grande partie du crédit d’impôt recherche et l’intégralité du CICE seront vraisemblablement qualifiées comme des dépenses. Il nous faudra donc reconstruire, dans les textes comme dans notre esprit, l’assiette de ces crédits d’impôt. Mieux vaut dès lors attendre – même si nous en connaissons officieusement les grandes lignes – l’analyse d’Eurostat sur ce point.

M. Alain Fauré. Il faut surtout affiner notre connaissance de l’impact du CICE, ce à quoi travaille la mission d’information. La question que soulève Mme Berger sera examinée en temps et heure, sans doute dans le cadre de la loi de finances pour 2015.

L’amendement CF 93 est retiré.

Puis la Commission est saisie de l’amendement CF125 de M. Eva Sas.

M. Eva Sas. Cet amendement tend à créer une sorte de bonus-malus pour le crédit d’impôt recherche, afin d’encourager plus nettement les dépenses favorisant la transition écologique. Les critères de cette incitation fiscale seraient les objectifs de la stratégie nationale de développement durable, définis clairement par l’exécutif et par le Parlement.

Mme la rapporteure générale. L’imprécision de la définition d’une entreprise non vertueuse de ce point de vue pourrait être censurée par le Conseil constitutionnel, qui attend du législateur qu’il assume pleinement sa compétence, notamment en matière fiscale.

M. Eva Sas. Je retire donc l’amendement, mais il me semble qu’il incombe précisément au législateur d’orienter une incitation fiscale en fonction d’intérêts généraux.

M. le président Gilles Carrez. C’est une jurisprudence constante que la loi doit définir l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement de l’impôt, et qu’on ne peut se satisfaire de critères généraux.

L’amendement CF125 est retiré.

La Commission est alors saisie des amendements CF119 et CF120 de M. Eva Sas, pouvant être soumis à discussion commune.

M. Eva Sas. Ces amendements ont pour objet de mieux conditionner les aides publiques aux entreprises, notamment le CICE, auquel le Parlement a assigné des objectifs. L’amendement CF119 tend ainsi à substituer à la notion d’« efforts » celle, plus précise, d’augmentation des dépenses.

Mme la rapporteure générale. Par respect pour les parlementaires participant à la mission d’information, il me semble tout d’abord qu’il faut attendre les conclusions de celle-ci.

Sur le fond de votre amendement, je rappelle que les objectifs assignés au CICE ne sont pas des conditions. Les dispositions que vous proposez ne changeraient donc pas le régime de ce crédit d’impôt. Avis défavorable, donc.

M. Eva Sas. Je retire ces deux amendements, mais j’assume pleinement mon intention de transformer en conditions les objectifs assignés au CICE.

Les amendements CF119 et CF120 sont retirés.

La Commission examine ensuite l’amendement CF121 de M. Eva Sas.

M. Eva Sas. Cet amendement tend à étendre les objectifs fixés au CICE à la création d’emplois, à l’augmentation des salaires et au renforcement de l’égalité salariale femmes-hommes.

Mme la rapporteure générale. Pour les mêmes raisons que précédemment, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement CF121.

Puis elle examine l’amendement CF122 de M. Eva Sas.

M. Eva Sas. Le coût du CICE, qui se montera cette année à 12 milliards d'euros, puis à 20 milliards d’euros en 2015, est compensé par une hausse de la TVA, qui pèse sur les ménages, particulièrement sur les plus modestes. Il est dès lors normal que les entreprises justifient de leur utilisation de ce crédit d’impôt et l’amendement tend à ce que chacune ait à démontrer concrètement, notamment au moyen d’indicateurs quantitatifs, que cette utilisation aura contribué aux objectifs que nous venons d’évoquer.

Mme la rapporteure générale. La loi prévoit que les comptes annuels des entreprises comportent un suivi du CICE. Ce suivi ne saurait se passer d’éléments quantitatifs. Je m’en remets toutefois à la sagesse de la Commission – non sans rappeler encore une fois qu’il serait préférable d’attendre les conclusions de la mission d’information.

M. Dominique Lefebvre. On ne pourra mesurer les effets du CICE qu’en constatant ce que les entreprises auront fait du préfinancement de la mesure. Mieux vaut en effet attendre les conclusions que la mission rendra en septembre, même si elles ne peuvent être définitives puisque les entreprises commencent tout juste à bénéficier réellement du crédit d’impôt. Si ces amendements ne sont pas retirés, nous voterons contre.

M. Eva Sas. La recommandation d’attendre les conclusions de la mission est recevable et je retire donc l’amendement. Cependant, depuis la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE), les écologistes savent bien que l’obligation de rendre des comptes sur le respect de certains objectifs peut se solder par de beaux rapports sur papier glacé qui, s’ils nourrissent des cabinets de conseil, font peu avancer la cause du développement durable dans les entreprises. Il convient donc de demander aux entreprises de rendre compte très précisément de l’utilisation du CICE.

L’amendement CF122 est retiré.

La Commission est alors saisie de l’amendement CF88 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Cet amendement tend à encadrer le versement du CICE en s’assurant qu’il revient bien aux entreprises elles-mêmes. C’est une question de cohérence et de transparence.

Mme la rapporteure générale. J’ai déposé après l’article 5 un amendement visant à permettre une traçabilité en imposant la tenue d’un compte bancaire séparé. Je vous demande donc de retirer votre amendement.

L’amendement CF88 est retiré.

Puis la Commission est saisie de l’amendement CF56 de M. Hervé Mariton.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement d’appel a pour objet de porter dès 2015 le taux du CICE de 6 % à 6,5 % de la masse salariale. En effet, le coût du CICE apparaît plus faible que prévu, ce qui réduit le montant global bénéficiant à la réduction du coût du travail.

Mme la rapporteure générale. Le fait que le montant du CICE n’atteigne pas encore 20 milliards d’euros tient à ce que le taux est cette année de 4 %, et non de 6 %, et au fait que le remboursement de certaines créances peut être décalé dans le temps. Avis défavorable, donc.

Je précise en outre que cet amendement coûterait 1,5 milliard d’euros – à ce propos, j’envisage de calculer l’impact global budgétaire, positif ou négatif, de l’ensemble des amendements déposés par l’opposition : vous aurez quelques surprises, chers collègues.

Mme Marie-Christine Dalloz. J’ai présenté tout à l’heure un amendement proposant une baisse de la dépense publique.

La Commission rejette l’amendement CF56.

Elle examine ensuite l’amendement CF107 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Le CICE vise à restaurer les marges des entreprises pour leur permettre d’innover, de se développer et d’embaucher, mais ces marges de manœuvre ne doivent pas être employées trop largement pour rémunérer les actionnaires. L’amendement tend donc à réduire le montant du CICE lorsque les dividendes versés représentent plus de 10 % du bénéfice imposable.

Mme la rapporteure générale. Je propose d’attendre l’évaluation globale que devrait présenter la mission d’information en cours.

M. Éric Alauzet. Peut-être vais-je retirer l’amendement – en espérant, chers collègues, vous avoir sensibilisés à cette question.

M. Olivier Carré. L’un des points clés du dispositif mis en place par le Gouvernement était la non-conditionnalité de l’octroi du CICE. Rien n’est donc plus létal pour ce dispositif que vos propositions : le chef d’entreprise qui redoute, à chaque loi de finances, la remise en cause d’une mesure qui assure parfois jusqu’à 100 % de sa marge d’autofinancement, sur laquelle reposent ses plans d’investissement à long terme, cessera d’investir et d’embaucher. Si l’on se contente de renforcer la trésorerie des entreprises et qu’on les pousse à thésauriser sans enclencher la dynamique économique, on gâche bel et bien l’argent public.

M. Alain Fauré. Pour faire écho à M. Carré, j’ajoute que certains chefs d’entreprise pourront, en recourant à des conseils, afficher des distributions de dividendes inférieures à 10 % et continuer à percevoir le CICE tandis que d’autres, trop occupés à travailler, ne le pourront pas et seront sanctionnés. En outre, le manque de lisibilité cassera l’investissement. Plus grave encore, de tels amendements cassent la notion même de confiance. Le CICE a été créé pour moderniser l’outil de travail et permettre d’investir, et non pas pour encourager la défiscalisation.

M. Pierre-Alain Muet. Avant toute réforme fiscale, il convient de bien réfléchir, afin d’en assurer la pérennité et de garantir la stabilité des dispositifs. Il nous faut donc réfléchir à l’avenir de tous nos crédits d’impôt qui, comme le CICE et le CIR, seront requalifiés en dépenses. En soutenant le CICE, je préférais, pour des raisons conjoncturelles, un crédit d’impôt à un allégement, mais je pensais qu’il faudrait, à terme, le pérenniser sous forme d’allégement, même si le décalage d’un an des effets de chacune des deux formules rend l’entreprise complexe.

Je me réjouis que notre assemblée ait lancé une mission d’information pour y voir plus clair. De fait, face à l’accumulation d’allégements que vous avez évoquée, monsieur le président, une analyse globale de leur efficacité s’impose afin que nous puissions prendre les bonnes décisions et stabiliser l’impôt.

M. Éric Alauzet. Cette exigence de stabilité, à laquelle je souscris, ne doit pas pour autant nous interdire de remédier aux anomalies que la mission d’information pourrait mettre en lumière. Alors qu’on cherche partout des économies et qu’on réduit la dépense publique – avec, comme l’a rappelé hier le Premier président de la Cour des comptes, des conséquences sur l’économie et sur l’emploi –, il serait anormal que ce secteur échappe à notre évaluation et qu’une grande part des marges de manœuvre que l’on permet aux entreprises de reconstituer soit redistribuée aux actionnaires. Je maintiens donc mon amendement.

La Commission rejette l’amendement CF107.

Puis elle est saisie de l’amendement CF89 de M. Eva Sas.

M. Eva Sas. Faire passer par amendement des allégements de plus de 20 milliards d’euros n’est pas le meilleur moyen d’assurer la stabilité fiscale. Il faudrait réfléchir préalablement au ciblage de ces aides et à leurs conséquences. À défaut, il n’y a rien d’étonnant à devoir rectifier le dispositif.

L’amendement CF89 est de bon sens : il tend à exclure du bénéfice du CICE les entreprises coupables de manquements au droit du travail ou condamnées pour fraude fiscale – c’est bien la moindre des choses.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable, car cette mesure introduirait une forme de « double peine », contraire à la Constitution.

La Commission rejette l’amendement CF89.

Elle examine alors l’amendement CE118 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Cet amendement de transparence, conforme à l’esprit de ce que devrait être le pacte de responsabilité, tend à subordonner le versement du CICE à la publication d’un rapport sur l’état de l’emploi dans l’entreprise, sur le chiffre d’affaires soumis à l’impôt et sur la répartition de la valeur ajoutée.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable. Je propose, là encore, d’attendre les conclusions de la mission d’information.

La Commission rejette l’amendement CF118.

Elle est ensuite saisie des amendements CF123 et CF124 de M. Eva Sas, pouvant faire l’objet d’une présentation commune.

M. Eva Sas. Mon amendement CF123 a pour objet d’associer le comité d’entreprise à l’analyse de l’utilisation du CICE et de lui permettre de signaler à l’administration fiscale les manquements aux objectifs fixés à ce crédit d’impôt.

L’amendement CF124 tend à rendre contraignants ces mêmes objectifs en en faisant des conditions, dans un souci de plus grande efficacité de la dépense publique.

Mme la rapporteure générale. Avis défavorable à ces deux amendements, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. Eva Sas. Je les retire donc, dans l’attente des conclusions de la mission.

Les deux amendements CF123 et CF124 sont retirés.

*

* *

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 18 juin 2014 à 9 h 30

Présents. - M. Éric Alauzet, M. Dominique Baert, M. Jean-Marie Beffara, Mme Karine Berger, M. Étienne Blanc, Mme Brigitte Bourguignon, M. Jean-Jacques Bridey, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Christophe Castaner, M. Yves Censi, M. Alain Claeys, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Dassault, M. Henri Emmanuelli, M. Alain Fauré, M. Olivier Faure, M. Marc Francina, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Yann Galut, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, Mme Arlette Grosskost, M. David Habib, M. Régis Juanico, M. Jérôme Lambert, M. Jean-François Lamour, Mme Colette Langlade, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Marc Le Fur, M. Victorin Lurel, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, M. Michel Pajon, Mme Valérie Pécresse, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Monique Rabin, M. Camille de Rocca Serra, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Gérard Terrier, M. Thomas Thévenoud, M. Michel Vergnier, M. Philippe Vigier, M. Laurent Wauquiez, M. Éric Woerth

Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Laurent Baumel, M. Xavier Bertrand, M. Gaby Charroux, M. Pascal Cherki, M. Jean-Claude Fruteau, M. Thierry Robert, M. Alain Rodet

Assistaient également à la réunion. - Mme Véronique Louwagie, M. Patrice Martin-Lalande, M. François Pupponi

——fpfp——