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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 17 décembre 2013

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 29

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, Président

Examen du projet de loi, modifié par le Sénat, habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises (n° 1617) (M. Jean-Michel Clément, rapporteur)

La séance est ouverte à 9 heures 30.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président.

La Commission examine, en deuxième lecture, sur le rapport de M. Jean-Michel Clément, le projet de loi, modifié par le Sénat, habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises (n° 1617).

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises n’a guère suscité la polémique au sein de notre Commission en première lecture.

M. Jean-Michel Clément, rapporteur. Je ne reviendrai pas sur l’objet de ce texte, que notre Commission a examiné il y a quelques semaines ; je me contenterai de dire un mot sur l’accélération de son calendrier d’examen, avant de vous résumer les principales modifications qui lui ont été apportées par le Sénat.

Comme vous le savez, il était initialement prévu que ce texte soit examiné par une commission mixte paritaire cet après-midi. Le Gouvernement, en concertation avec le Parlement, a cependant préféré ne pas convoquer cette commission, afin de procéder à une seconde lecture dans notre assemblée qui aboutira, je l’espère, à une adoption conforme de ce projet de loi. Ce choix traduit une volonté d’accélération du calendrier d’adoption des mesures figurant dans ce texte, afin de permettre leur entrée en vigueur le plus rapidement possible, car le contexte économique et les attentes très fortes des entreprises exigent que le « choc de simplification » décidé par le président de la République produise ses effets dans les meilleurs délais.

J’en viens maintenant au fond, c’est-à-dire aux modifications qui ont été apportées au texte par le Sénat. Six articles ont été adoptés conformes par ce dernier. S’agissant de ceux qui restent en discussion, les modifications me semblent pouvoir être approuvées sans difficulté ; aussi vais-je vous recommander d’adopter ce texte, afin de permettre une entrée en vigueur rapide des ordonnances de simplification qui en seront issues.

Voici les apports les plus significatifs.

En premier lieu, trois nouvelles habilitations ont été ajoutées à l’initiative du Gouvernement. À l’article 14 bis, le Gouvernement est ainsi habilité à créer, à titre expérimental, une procédure unique intégrée pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de la loi sur l’eau ; à l’article 14 ter, l’expérimentation d’un nouvel outil appelé « opération d’intérêt économique et écologique » est prévue, pour une durée maximale de trois ans ; enfin, à l’article 14 quater, le Gouvernement a sollicité une habilitation en vue de mettre en place un nouveau produit d’assurance-vie, le contrat « euro-croissance », reprenant l’une des recommandations formulées par nos collègues Karine Berger et Dominique Lefebvre dans le rapport qu’ils ont remis au Premier ministre en avril dernier sur la dynamisation de l’épargne financière des ménages.

En deuxième lieu, deux habilitations, déjà prévues par le texte initial, ont été étendues. À l’article 13, relatif au certificat de projet, un amendement gouvernemental a précisé le contenu possible dudit certificat ainsi que le régime contentieux applicable. Sur ce second point, la solution retenue s’inspire des conclusions du rapport du Conseil d’État, qui sera prochainement publié, sur la procédure de rescrit. L’ordonnance précisera ainsi les conditions dans lesquelles le certificat peut faire l’objet d’un recours juridictionnel, les pouvoirs du juge administratif saisi de ce recours et l’invocabilité de cet acte par la voie de l’exception.

L’article 14, qui prévoit l’expérimentation d’une procédure d’autorisation unique pour les installations classées pour la protection de l’environnement, a vu, quant à lui, son champ étendu aux projets de méthanisation injectant du biométhane et à ceux qui valorisent du biométhane. Les dispositions applicables au contrôle, aux recours contentieux et aux sanctions, tant en matière administrative que pénale, pourront par ailleurs être précisées.

En troisième lieu, de nouvelles modifications du droit en vigueur ont été insérées. Un nouvel article 16 bis a été ajouté, qui supprime le contrôle de l’État en matière de police et de sécurité de l’exploitation de la distribution d’électricité et restreint le champ de l’approbation des projets d’ouvrages du réseau électrique principal aux ouvrages du réseau de transport d’électricité. Un nouvel article 22 supprime par ailleurs le mot « physique » à l’article 706-14 du code de procédure pénale, afin d’étendre aux personnes morales la possibilité d’obtenir le paiement de dommages et intérêts sur les biens du débiteur ayant fait l’objet d’une confiscation pénale définitive, qui n’a été prévue par la loi du 9 juillet 2010 que pour les personnes physiques.

Enfin, des articles revoyant des dispositions du droit en vigueur ont été modifiés par le Sénat. À l’article 9, l’assouplissement des obligations de publication des informations à caractère social et environnemental pesant sur les établissements de crédit et les mutuelles a été étendu, par cohérence, aux institutions de prévoyance. À l’article 16, les emballages ménagers en verre ont été exclus du dispositif prévu par l’article L. 541-10-5 du code de l’environnement prévoyant une signalétique commune informant le consommateur que le produit concerné relève d’une consigne de tri par l’apposition du logo dit « triman ». Pour le verre, il existe en effet déjà, depuis de nombreuses années, un système de collecte et de recyclage, et le caractère recyclable de ce matériau est bien connu des consommateurs français. L’apport du logo « triman » sur ces produits présenterait un intérêt limité.

Je le répète, aucune de ces modifications ne me paraît soulever de difficultés. La plupart d’entre elles me semblent, au contraire, soit avoir précisé ou clarifié utilement les articles concernés, soit leur avoir apporté des enrichissements bienvenus. Je vous invite donc à adopter le projet de loi dont nous sommes saisis, afin de permettre l’entrée en vigueur rapide des mesures de simplification qu’il prévoit et qui sont attendues par les entreprises.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Je m’interroge, monsieur le rapporteur, sur le sens de la mesure visée à l’article 5 et tendant à instituer le salariat comme mode d’exercice de la profession d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation. Il y a aujourd’hui 104 avocats aux Conseils, sur un nombre potentiel de 240. Le salariat risque d’engendrer de profondes inégalités. Puisqu’il existe un potentiel de nominations, pourquoi ne pas user de la possibilité offerte de bénéficier du régime libéral ?

Par ailleurs, l’article 20 modifie l’article L. 216-7 du code de la sécurité sociale de sorte qu’à l’issue de l’expérimentation, menée en Lozère, d’une caisse unique de sécurité sociale regroupant la caisse d’allocations familiales (CAF), l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocation familiales (URSSAF) et la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), le ministre chargé de la sécurité sociale puisse constituer de manière définitive une caisse commune par arrêté. Mais nous craignons dans ce département que l’arrêté ne fasse disparaître l’URSSAF de cette caisse commune. Nous souhaitons que l’expérimentation soit pérennisée et que les trois caisses demeurent au sein de la caisse unique.

M. le rapporteur. Vous m’aviez déjà alerté sur le statut d’avocat aux Conseils salarié. Le texte vise essentiellement la promotion interne des personnels. On ne comprendrait pas que les avocats aux Conseils restent en retrait de telles évolutions. Cela dit, nous réfléchissons avec la garde des Sceaux au moyen de structurer le salariat dans les professions juridiques. Il faut adopter sur ce chapitre une perspective globale, en prenant en compte différents niveaux.

Certaines professions sont frappées d’un numerus clausus, alors que l’accès aux autres est ouvert. Dans d’autres, un concours ou une formation crée un barrage interne très différent, par exemple, des règles qui régissent le notariat, lequel dépend d’un arrêté du garde des Sceaux. Avant de mener une réflexion globale, le Gouvernement a souhaité avancer sur ce point.

Par ailleurs, je sais que vous êtes attaché au regroupement des caisses. Je comprends qu’on veuille développer une expérimentation qui s’est avérée satisfaisante, mais ce qui est vrai en Lozère ne l’est peut-être pas partout. Il faut savoir où l’expérimentation doit devenir la règle et à quel niveau fixer le seuil.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Je souhaite seulement vous entendre dire que l’expérimentation est satisfaisante et qu’elle peut se pérenniser. C’est la position qu’attendent les salariés de la caisse.

M. le rapporteur. À titre personnel, je suis d’accord avec vous, mais il n’appartient pas à la loi de pérenniser l’expérimentation.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er : Habilitation en vue de simplifier et de sécuriser la vie des entreprises

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 2 : Habilitation à réformer le droit des entreprises en difficulté

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 3 : Habilitation à simplifier la vie juridique des entreprises

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 6 : Habilitation à réformer les conditions d’exercice de la profession d’expert-comptable

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 7 : Habilitation à adapter les obligations déclaratives applicables aux établissements et pratiques d’activités physiques et sportives et les sanctions correspondantes

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 8 : Habilitation en vue de modifier les textes applicables à la Société du Grand Paris

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 9 (art. L. 114-17 du code la mutualité, L. 931-15 du code de la sécurité sociale et L. 511-35 du code monétaire et financier) : Assouplissement des obligations de publication des informations à caractère social et environnemental des mutuelles, des établissements de crédit et des institutions de prévoyance

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 10 : Habilitation en vue de moderniser la gouvernance des entreprises publiques

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 12 : Habilitation en vue de mettre la législation française en conformité avec le mécanisme de supervision unique du secteur bancaire par la Banque centrale européenne

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 13 : Habilitation en vue de l’expérimentation d’un certificat de projet

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 14 : Habilitation en vue de l’expérimentation d’une autorisation unique pour certaines installations classées pour la protection de l’environnement

La Commission examine l’amendement CL1 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Les ouvrages de production d’électricité ne peuvent être mis en service sans liaison de raccordement au réseau électrique. Or, dans l’hypothèse où ce raccordement s’effectue sur le réseau public de transport de l’électricité, les délais observés pour l’obtention des autorisations de réalisation sont souvent supérieurs aux délais d’autorisation de réalisation des installations de production elles-mêmes. L’amendement vise à permettre aux représentants de l’État de déroger à cette règle, afin de raccourcir les délais.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Comme je l’avais indiqué lors de la première lecture, l’article 38 de la Constitution et la jurisprudence constitutionnelle réservent au Gouvernement l’initiative de solliciter une habilitation à légiférer par ordonnance ou d’étendre une telle habilitation. Nous ne pouvons donc pas intervenir sur ce point.

Sur le plan technique, le problème que vous signalez procède de dysfonctionnements ponctuels. Pour présider un syndicat d’électricité, dans un département où celle-ci est gérée par une société d’économie mixte dépendant des collectivités locales, j’ai constaté qu’on peut aller plus vite que certains opérateurs dont je tairai le nom.

La Commission rejette l’amendement.

Elle étudie ensuite l’amendement CL 2 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Défendu.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 14 sans modification.

Article 14 bis : Habilitation en vue de l’expérimentation d’une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation dans le domaine de l’eau

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 14 ter : Habilitation en vue de l’expérimentation des « opérations d’intérêt économique et écologique »

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 14 quater : Habilitation en vue de mettre en place un nouveau produit d’assurance-vie orienté vers le financement de l’économie

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 15 (art. L. 511-34, L. 511-4-1 du code monétaire et financier et art. 6, 27 et 34 de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement) : Ratification de l’ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011 relative aux communications électroniques et de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 16 : Report au 1er janvier 2015 de la signalétique commune applicable aux produits recyclables soumis à un dispositif de responsabilité élargie des producteurs et exclusion des emballages ménagers en verre de son champ d’application

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 16 bis (art. L. 323-11 du code de l’énergie) : Suppression de la procédure d’approbation pour les ouvrages de distribution d’électricité

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 18 : Délais d’habilitation

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 21 (art. L. 41-1-1, 214-24-1, 214-24-2, 224-24-10, 224-24-16, 214-24-22, 214-36, 214-44, 214-24-46, 214-51, 214-60, 214-81, 214-151, 214-167, 231-5, 231-12, 231-17, 231-21, 341-10, 341-11, 532-9, 533-13-1 du code monétaire et financier, art. 44 septies, 119 bis, 235 ter ZCA et 990 E du code général des impôts et art. L. 3334-11 du code du travail) : Ratification de l’ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013 modifiant le cadre juridique de la gestion d’actifs et rectification d’erreurs matérielles issues de cette ordonnance

La Commission adopte l’article sans modification.

Article 22 (art. 706-164 du code de procédure pénale) : Extension aux personnes morales de la possibilité d’obtenir le paiement de dommages et intérêts sur les biens du débiteur ayant fait l’objet d’une condamnation pénale définitive

La Commission adopte l’article sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi sans modification.

M. Patrick Devedjian. Une fois de plus, nous nous en remettons aux ordonnances et nous adoptons une procédure accélérée que rien ne semble justifier. Le projet de loi est un inventaire à la Prévert. Tous les services de Bercy ont passé leur commande, ce qui donne un texte hétérogène, bâti à la va-vite, qui vise à « assouplir », « permettre », « favoriser », « alléger », « soutenir », « simplifier »… Quelle est la portée normative de telles mesures ? On ne peut être que favorable à un ramassis de bonnes intentions, mais ce n’est pas en légiférant de cette manière qu’on réhabilitera le rôle du Parlement.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Cela dit, mieux vaut clarifier et alléger que l’inverse ! Je vous remercie.

La séance est levée à 9 heures 55.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Christian Assaf, M. Jean-Michel Clément, M. Patrick Devedjian, M. Olivier Dussopt, M. Yann Galut, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, M. Edouard Philippe, Mme Cécile Untermaier, M. Jean-Jacques Urvoas, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Sergio Coronado, M. Jean-Pierre Decool, M. Marc Dolez, Mme Laurence Dumont, M. Édouard Fritch, M. Daniel Gibbes, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Bernard Roman, M. Roger-Gérard Schwartzenberg