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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 29 septembre 2015

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 93

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, Président

– Audition de M. Francis Delon, dont la nomination est proposée par M. le Président de la République à la fonction de président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (M. Éric Ciotti, rapporteur), et vote sur cette proposition de nomination

– Examen du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (n° 3037) (M. Luc Belot, rapporteur)

La séance est ouverte à 15 heures.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président.

La Commission procède à l’audition de M. Francis Delon, dont la nomination est proposée par M. le Président de la République à la fonction de président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (M. Éric Ciotti, rapporteur), et vote sur cette proposition de nomination.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Nous sommes réunis pour entendre M. Francis Delon dont la nomination à la fonction de président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) est proposée par le Président de la République. Aux termes de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, le président de la CNCTR est nommé par le Président de la République parmi les membres de cette commission issus du Conseil d’État ou de la Cour de cassation. Ce pouvoir n'est pas discrétionnaire puisque le choix a été fait, au cours de l’examen du texte, de soumettre cette nomination à l’avis préalable des commissions parlementaires concernées, afin d’offrir « une garantie supplémentaire de compétence et d’indépendance à une nouvelle autorité appelée à jouer un rôle essentiel dans la protection de nos libertés publiques ». C’est une disposition nouvelle : elle ne s’appliquait pas pour le président de la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité – la CNCIS – à laquelle succède la CNCTR.

Conformément à l’article 13 de la Constitution, cette nomination ne pourra avoir lieu si l’addition des votes négatifs des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat représente plus de trois cinquièmes de l’ensemble des suffrages exprimés.

M. Francis Delon a été entendu ce matin par la commission des Lois du Sénat, dont les membres voteront, comme nous le ferons, à 16 heures 30, à l’issue de nos débats, procédant dans la foulée au dépouillement du scrutin.

C’est la huitième fois depuis le début de la législature que la commission des Lois est appelée à se prononcer sur une nomination proposée par le Président de la République. Elle le fera en suivant les règles que, seule des commissions, elle a définies pour ces occasions. Ainsi que le permet l’article 29-1 du règlement de l’Assemblée nationale, nous avons décidé de nommer un rapporteur appartenant à un groupe de l’opposition ; le groupe Les Républicains a désigné M. Éric Ciotti. Pour que M. Francis Delon précise ses intentions, le rapporteur lui a adressé un questionnaire, auquel il a répondu par écrit. Ces réponses ont été adressées aux commissaires vendredi dernier et, pour que le public soit informé du parcours, des intentions et des observations éventuelles du candidat, elles ont été mises en ligne hier sur le site Internet de l’Assemblée. Enfin, conformément à l’article 1er de la loi du 23 juillet 2010 qui précise la procédure de nomination, l’audition est ouverte à la presse. Nous pouvions, compte tenu du sujet, décider le huis clos, mais en accord avec M. Philippe Bas, président de la commission des Lois du Sénat, nous avons considéré qu’il était de l’intérêt des deux chambres et de l’opinion que chacun puisse suivre les échanges.

M. Éric Ciotti. Il appartient donc à notre commission d’émettre un avis sur la nomination de M. Francis Delon à la fonction de président de la CNCTR. Diplômé de l’École nationale d’administration, M. Delon est conseiller d’État. Son parcours professionnel l’a amené à exercer des fonctions juridictionnelles, et d’autres au sein de plusieurs administrations, en France et à l’étranger, dont celles de secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale de 2004 à 2014.

M. Francis Delon a été nommé membre de la CNCTR par le vice-président du Conseil d’État. Sa nomination à la fonction de président de cette commission, proposée par le Président de la République, est soumise à la procédure définie par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, que vient de rappeler le président de notre commission.

La CNCTR est l’un des dispositifs essentiels du nouveau cadre législatif des activités de renseignement adopté par le Parlement en juillet dernier. J’ai eu l’occasion, lors de nos débats sur ce texte, de souligner l’urgence de doter nos services de renseignement de moyens à la hauteur de la menace, en premier lieu d’ordre terroriste, à laquelle notre pays est exposé, qui atteint un niveau sans précédent. Dans ce contexte, la CNCTR aura pour mission de contrôler l’ensemble des techniques de renseignement définies par la loi : non seulement les interceptions de sécurité et l’accès aux données de connexion, comme le faisait la CNCIS à laquelle elle succédera, mais aussi les nouveaux moyens mis à la disposition des services, telles la sonorisation de lieux ou de véhicules, la captation d’images et de données informatiques ainsi que la mise en œuvre d’algorithmes sur les réseaux des opérateurs afin de détecter une éventuelle menace terroriste.

À ce champ élargi correspondent des moyens étoffés au regard de ceux dont disposait la CNCIS : un contrôle a priori consacré, de larges pouvoirs d’information et la capacité de saisir le Conseil d’État dans le cadre d’un nouveau mécanisme de contrôle juridictionnel.

La CNCTR aura la mission essentielle de veiller à l’équilibre entre la défense et la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation d’une part, le respect de la vie privée d’autre part. Le contrôle administratif qu’elle exercera, ainsi que le contrôle juridictionnel confié par la loi au Conseil d’État, constituent des garanties indispensables du respect des libertés fondamentales auquel nous sommes tous attachés. Les modalités de ces contrôles ont été validées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 23 juillet 2015. Cela devrait mettre fin aux critiques entendues lors des débats sur la loi relative au renseignement.

Les conditions dans lesquelles la CNCTR commencera d’exercer ses missions et les choix qu’elle opérera, qu’il s'agisse des techniques de contrôle ou de l’interprétation des textes, seront décisifs. Dans cette perspective, je vous ai adressé un questionnaire, monsieur Delon ; les réponses écrites que vous avez bien voulu y apporter ont été communiquées aux commissaires et publiées sur le site Internet de l’Assemblée nationale.

J’en retiens votre volonté que la CNCTR exerce pleinement les missions confiées par le législateur. Vous souhaitez ainsi qu’elle soit immédiatement opérationnelle pour les contrôles a priori et que, pour les contrôles a posteriori, la période de transition soit la plus courte possible. À la question cruciale des moyens, vos réponses apportent aussi un éclairage utile à la représentation nationale qui a souhaité inscrire dans la loi que la commission dispose « des moyens humains et techniques nécessaires à l’accomplissement de ses missions ». Vous exprimez en particulier votre engagement en faveur du renforcement de l’expertise technique dont la CNCTR doit disposer. Vous considérez encore que la commission ne devra pas hésiter à saisir le Conseil d’État en cas de désaccord avec le Premier ministre. D’une façon générale, il ressort de vos réponses votre souhait de donner une large place à la collégialité.

Compte tenu de votre parcours au service de l’État et de vos réponses au questionnaire que je vous ai adressé, et sans préjuger des précisions que vous apporterez lors du débat qui s’ouvre, votre nomination à la présidence de la CNCTR, monsieur Delon, me paraît correspondre parfaitement aux exigences de la fonction et aux défis que la nouvelle commission devra relever.

M. Francis Delon. Comme votre président et votre rapporteur l’ont indiqué, je me présente devant vous parce que, après que le vice-président du Conseil d’État m’a nommé comme l’un des deux membres de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) que la loi le charge de désigner, le Président de la République a choisi de me proposer à votre assentiment dans la perspective d’exercer les fonctions de président de cette commission.

La loi sur le renseignement est le fruit d’une longue maturation à laquelle le Parlement a apporté une contribution décisive. Je ne me risquerai pas à en faire l’exégèse, mais j’énoncerai les lignes de force que j’en ai retenues, puisqu’elles guideront mon action si je suis nommé président de la CNCTR.

La loi affirme que les services de renseignement exercent une mission de service public, renforce à ce titre leur légitimité et accroît leur capacité d’action. Elle fixe le cadre juridique de leurs activités en veillant à ce qu’il réponde aux défis auxquels nous sommes confrontés en matière de sécurité et à l’exigence de respect de la vie privée, dans toutes ses composantes. Elle renforce le contrôle de l’action des services de renseignement en créant une nouvelle autorité administrative indépendante aux pouvoirs de contrôle accrus par rapport à ceux de la CNCIS et en organisant l’accès au contrôle juridictionnel du Conseil d’État. Ce contrôle est destiné à vérifier que l’atteinte que peut porter au respect de la vie privée la mise en œuvre des techniques de renseignement est strictement proportionnée aux finalités, définies par la loi, qui peuvent seules justifier l’intervention des services de renseignement. C'est donc une loi de protection des libertés publiques, et la CNCTR qu’elle crée a un rôle éminent à jouer à cet égard.

Suis-je qualifié pour présider la nouvelle autorité ? Pour éclairer votre jugement, je me présenterai, puis vous exposerai le projet que j’envisage pour la commission si je suis nommé à sa présidence.

J’ai été nommé au Conseil d’État en 1979. J’y ai exercé pendant quinze ans des fonctions juridictionnelles, à la section du contentieux où j’ai été rapporteur, puis comme commissaire du Gouvernement et enfin comme président d’une sous-section, c’est-à-dire d’une chambre. J’ai aussi exercé au Conseil d’État des fonctions consultatives à la section des finances, et à la section de l’intérieur où je siège actuellement.

J’ai par ailleurs occupé plusieurs fois des fonctions en dehors du Conseil d’État. D’abord au ministère des affaires étrangères – dans la direction des affaires juridiques de ce ministère, au cabinet du ministre et à la délégation permanente de la France auprès des Nations Unies à New York. Ensuite, au ministère de l’Éducation nationale, en qualité de directeur chargé des affaires juridiques et de la coopération internationale, puis de directeur du cabinet du ministre. Plus récemment et jusqu’en 2014, j’ai été à la tête du secrétariat général de la défense nationale puis du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale qui l’a remplacé.

J’ai exercé diverses autres fonctions au cours de ma carrière, dont, cinq années durant, la présidence de la commission de classification des œuvres cinématographiques. Si je cite cette activité particulière, c’est qu’elle n’est pas sans liens avec la fonction dont il est question aujourd’hui, puisqu’il s’agissait de concilier deux exigences : la liberté de création et la protection de l’enfance.

Lorsque j’ai été pressenti pour la présidence de la CNCTR, je me suis demandé si j’y étais préparé. J’ai eu l’immodestie de penser que tel était le cas. La fonction réclame une expérience juridictionnelle, que j’ai. Les fonctions juridictionnelles préparent à la collégialité et au contrôle de proportionnalité que la CNCTR devra exercer pour s’assurer que les techniques de renseignement envisagées ne portent pas une atteinte excessive aux libertés publiques et particulièrement au respect de la vie privée. Elles exigent l’indépendance et l’impartialité dont la commission et son président devront faire preuve.

Le président devra aussi avoir une bonne connaissance des enjeux de sécurité nationale mais aussi du fonctionnement des services de renseignement et des techniques que ceux-ci utilisent, car le renseignement technique a pris une place déterminante dans la plupart des services de renseignement du monde ; une bonne compréhension de cette dimension technologique ne peut donc que faciliter l'exercice du contrôle. Or ma qualité de secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale me donnait autorité sur l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) qui a pour mission la protection des systèmes d’information de l’État et des opérateurs d’importance vitale. Ces fonctions m’ont permis d’acquérir une solide connaissance des enjeux de sécurité nationale et d’appréhender, sans être ingénieur, la dimension technologique du cyberespace.

Je sais que cette expérience peut faire douter certains de mon indépendance à l’égard des services de renseignement. Je veux les rassurer. Connaissance ne signifie ni connivence ni complaisance. Mon indépendance à l’égard des services était complète lorsque j’exerçais les fonctions de secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale. La loyauté qui me liait au Président de la République et au Premier ministre ne s’étendait nullement aux services de renseignement. L’ensemble de ma carrière au Conseil d’État, dans les fonctions juridictionnelles et consultatives que j’y ai exercées et que j’y exerce toujours, témoigne de mon indépendance. Cette indépendance, qui est la marque de l’institution, permet, même si le Gouvernement en est contrarié, d’annuler un acte parce qu’il est illégal ou d’émettre un avis défavorable sur un projet de loi ou de règlement parce qu’il soulève de sérieuses difficultés juridiques. Indépendance, impartialité, recherche constante de l’équilibre voulu par la loi entre la protection des libertés publiques et la protection de notre sécurité : tels sont les principes qui me guideront si je suis nommé président de la CNCTR.

Mon projet pour la CNCTR est à la fois ambitieux et pragmatique. Ambitieux parce que je veux, dès l’installation de la CNCTR, relever le défi lancé par la loi : exercer, dans un champ nettement plus étendu, un contrôle renforcé par rapport à celui qu’exerce la CNCIS aujourd’hui. Il faut pour cela davantage de moyens que ceux dont disposait la CNCIS afin de pouvoir traiter, dans les délais très courts qu’a fixés le législateur, un flux de demandes qui va beaucoup s’accroître. Jean-Marie Delarue, auquel je rends hommage pour son action courageuse à la tête de la CNCIS, a heureusement anticipé, en accord avec le cabinet du Premier ministre, la montée en puissance de la CNCTR, et obtenu des arbitrages qui prévoient une hausse substantielle des effectifs et des moyens – je l’ai détaillée dans mes réponses au questionnaire. La première tâche du président de la commission devra être de s’assurer de l’obtention effective de ces moyens, de vérifier s’ils sont adaptés, de recruter de nouveaux agents dotés des compétences nécessaires – elles sont, à mon sens, d’abord juridiques et technologiques – et d’organiser, en fonction des exigences de l’urgence et du volume des demandes, le travail de la commission et de ses agents, travail qui impliquera notamment des permanences.

C’est un projet ambitieux parce que je souhaite tirer parti de la composition de la commission, qui réunira des compétences éminentes, et faire de la collégialité un élément de son efficacité et de son autorité. Le collège sera très vite sollicité et il le sera fréquemment, notamment dans les premiers mois, durant lesquels il devra rendre un avis sur plusieurs textes réglementaires importants, prendre parti sur l’organisation pratique du contrôle a priori et a posteriori et commencer à bâtir la jurisprudence de la CNCTR.

Projet ambitieux encore parce que je souhaite, pour l’efficacité et la lisibilité du contrôle, développer le dialogue de la CNCTR avec les services de renseignement, notamment par des auditions des chefs de service par la commission et par des visites de cette dernière dans les services. Pour mieux être en mesure de peser, en pleine connaissance de cause, les avis qu’il sera amené à rendre sur les demandes d’autorisation, chaque membre de la commission doit connaître le fonctionnement des services et les défis auxquels ils sont confrontés. En corollaire, chaque service devra connaître la commission pour mieux comprendre ses raisonnements et la logique qui sous-tend ses avis.

Projet ambitieux enfin parce que je pense indispensable de bâtir la confiance du public sur la qualité du contrôle qu’exercera la CNCTR. À cet égard, j’attacherai un soin particulier au contrôle de l’algorithme qui a nourri et qui continue de nourrir tant d’inquiétudes. Je le ferai en m’appuyant sur les compétences de la personnalité qualifiée nommée sur proposition du président de l’ARCEP et sur celles des ingénieurs de haut niveau qui viendront renforcer les services de la commission. Je veillerai aussi à ce que la CNCTR renforce la pédagogie sur sa mission et les modalités de son exercice.

Ce projet devra cependant être pragmatique. Si les capacités de la CNCTR doivent nécessairement et notablement augmenter, la structure doit demeurer légère pour être efficace et réactive. Pendant l’inévitable phase de montée en puissance de la nouvelle instance, phase que je souhaite la plus brève possible, je concentrerai les moyens sur le contrôle a priori, qui doit continuer de s’exercer sans discontinuité entre la CNCIS et la CNCTR. À mesure de l’arrivée de nouveaux moyens, le contrôle a posteriori sera renforcé. La centralisation des renseignements collectés, nécessaire pour permettre un contrôle a posteriori effectif, devra être réalisée en prenant en compte les impératifs de protection du renseignement et les capacités techniques disponibles. La possibilité de recourir davantage à des procédures dématérialisées, pour autant qu’elles offrent des garanties adéquates de protection du secret, sera attentivement étudiée.

Tels sont les éléments que je voulais porter à votre connaissance à titre liminaire.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je vous remercie. La parole est maintenant à ceux de mes collègues qui souhaitent vous interroger.

M. Pascal Popelin. La présence de parlementaires au sein de la composition de la CNCTR a fait l’objet de longs débats. Il en résulte que l’article L. 831-2 du code de la sécurité intérieure organise la commission en une formation restreinte et en une formation plénière, les parlementaires siégeant à la seconde uniquement. Comment concevez-vous l’articulation entre les deux formations ? Selon quelle périodicité comptez-vous les réunir ? Quel contenu donnerez-vous aux séances plénières ? Vous avez indiqué vouloir donner priorité dans un premier temps aux contrôles a priori mais, étant donné l’élargissement des prérogatives allouées à la commission, elle devra aussi, pour commencer, élaborer sa propre jurisprudence ; dans quelle proportion la formation plénière et la formation restreinte seront-elles respectivement appelées à participer à cette élaboration ?

M. le président Jean-Jacques Urvoas. La loi relative au renseignement dispose que seul le président de la CNCTR y travaille à temps plein. Comment, alors, envisagez-vous l’implication des autres membres de la commission, dont la disponibilité ne pourra être entière alors que les contrôles doivent se faire dans des délais très courts, parfois sur place et sur pièces, parfois outre-mer ?

M. Francis Delon. La loi répond pour partie à vos interrogations. Ainsi dispose-t-elle que pour toute opération de renseignement concernant les professions protégées, la CNCTR doit statuer en formation plénière.

Effectivement, seul le président de la commission devra y travailler à plein temps. Les autres membres peuvent le faire : la loi ne leur en fait pas obligation ni ne leur interdit ; en précisant que la fonction est incompatible avec toute activité professionnelle ou autre emploi public exercés à temps plein, le texte dit que les membres de la CNCTR doivent lui consacrer une part suffisante de leur temps. Je ne connais pour l’instant que trois membres de la CNCTR, et j’ignore à ce jour s’ils comptent y travailler à plein temps. Toutes les hypothèses devront être envisagées. J’exclus en tout cas qu’un membre de la commission ne participe pas au moins aux réunions de la formation restreinte et de la formation plénière – les membres qui ne sont pas parlementaires devront se rendre disponibles. C’est, selon moi, le service minimum, mais je souhaite que ceux des membres qui le voudront et le pourront aient aussi une activité de fond de préparation des dossiers, des jurisprudences ou des avis à formuler pour s’en faire les rapporteurs devant les formations.

J’envisage, au début au moins mais cela pourra continuer, des réunions assez fréquentes de la formation restreinte, ne serait-ce que pour définir les questions d’organisation. Elles ne sont en rien secondaires et pour que les membres de la commission y adhèrent, ils doivent en parler entre eux. La loi prévoit que la formation plénière se réunit au moins une fois par mois. J’en parlerai avec les parlementaires qui seront nommés au sein de la commission pour connaître leur disponibilité. Mon intention n’est pas de multiplier les réunions de la formation plénière, mais je convoquerai celles qui sont nécessaires. Les parlementaires ne peuvent qu’être une richesse pour la CNCTR. Leur présence est un élément de sa légitimité ; cet élément devra être pleinement utilisé dans la collégialité que je compte mettre en œuvre.

En résumé, j’envisage que la formation restreinte se réunisse fréquemment, surtout dans la phase initiale, et que la formation plénière siège peut-être plus d’une fois par mois, au moins au début.

M. Guillaume Larrivé. Après nous avoir beaucoup occupés ces derniers mois, la loi relative au renseignement a été votée par une majorité transpartisane, formée de celles et ceux qui, sur divers bancs, l’ont considérée comme une grande loi de sécurité et de liberté, essayant d’apporter une réponse juridique à des nécessités opérationnelles. Je me réjouis que, grâce à une initiative parlementaire qui a modifié les conditions de désignation du président de la CNCTR, cette audition ait lieu.

On ne peut, monsieur Delon, avoir un parcours plus adapté que le vôtre aux fonctions que le Président de la République envisage de vous confier. Votre entière légitimité découle de votre expérience du contrôle juridictionnel et donc de la nécessité de concilier les libertés et l’ordre public, avec une pratique du contrôle de légalité et de proportionnalité. Elle tient aussi à votre connaissance des services, qui me paraît heureuse car je ne suis pas de ceux pour qui la légitimité vient de l’incompétence, laquelle serait un gage d’indépendance ; je considère à l’inverse que bien connaître le sujet dont on aura à traiter peut aider, d’autant que, comme vous l’avez dit, cette connaissance ne signifie pas connivence. On se réjouira donc qu’une personnalité telle que la vôtre occupe, si le Parlement donne son feu vert, une fonction aussi délicate.

Pour la première fois, le juge administratif pourra être saisi de ces affaires. Dans quel état d’esprit envisagez-vous de faire usage de votre pouvoir de saisine du Conseil d’État dans l’hypothèse où le Premier ministre, comme c’est son droit, choisirait de ne pas suivre les avis de la CNCTR ?

J’ai lu dans les réponses que vous avez faites au questionnaire de notre rapporteur que le Gouvernement s’engageait dans le projet de loi de finances pour 2016 à faire plus que tripler les moyens de la CNCTR par rapport à ceux qui étaient alloués à la CNCIS. C’est une augmentation assez considérable, et il nous appartiendra de veiller à ce que ces crédits vous soient effectivement octroyés. Eu égard à ces moyens, de quelle marge de manœuvre disposerez-vous pour vous assurer de la centralisation des données collectées, gage de l’efficacité du contrôle ?

Je n’en fais pas mystère : je voterai en faveur de la proposition de nomination qui nous est faite.

M. Patrick Mennucci. Vous avez indiqué à notre rapporteur que vous entendez user de la nouvelle possibilité donnée à la commission de saisir le Conseil d’État en cas de désaccord entre elle et le Premier ministre. Pour de nombreux parlementaires, cette disposition a conditionné le vote de la loi relative au renseignement ; elle nous permet aussi de rassurer très largement ceux qui, dans la société française, s’inquiétaient de ce texte, car ils savent que le juge administratif a souvent défendu les libertés publiques et permis à la République de progresser.

Je vous le dis d’emblée, je donnerai un avis favorable à votre candidature. Mais j’aimerais vous entendre préciser les raisons qui vous conduiraient à saisir le Conseil d’État et la manière dont vous envisagez les relations entre la CNCTR et l’exécutif. Si la saisine du Conseil d’État a été un élément essentiel pour convaincre les Français que la loi relative au renseignement est un texte protecteur, on ne peut en permanence recourir au Conseil d’État ; un équilibre judicieux doit donc être trouvé.

M. Francis Delon. Je remercie M. Larrivé et M. Mennucci pour leurs propos. Je relierai la question cruciale qu’ils m’ont posée à un sujet plus large. J’ai compris de la loi sur le renseignement que l’équilibre général dépend de l’effectivité du contrôle. L’augmentation des moyens des services et la légitimité qui leur est conférée vont de pair avec l’accroissement de la capacité de contrôle, nécessaire pour que nos concitoyens aient confiance dans le dispositif. J’attache une très grande importance au contrôle et, si je suis nommé président de la CNCTR, je veillerai à ce que la commission exerce la plénitude de ses compétences.

Le contrôle n’est pas seulement exercé par la commission, autorité administrative indépendante qui a les moyens juridiques d’un contrôle a priori sur à peu près tout, sauf en cas d’« urgence absolue » – mais ces cas doivent rester exceptionnels, dit la loi, et je m’exprime sur ce point dans mes réponses au questionnaire de votre rapporteur. Le reste du temps, la commission se prononce a priori. Elle a un délai très court pour statuer mais je veillerai à ce que ce délai soit utilisé : la commission doit répondre dans les temps, et décider. Il faut donc trouver le bon équilibre entre son rôle et celui du juge.

Le Premier ministre a parfaitement le droit de ne pas suivre l’avis de la commission. Il peut parfois estimer, en son âme et conscience, que la sécurité nationale exige que l’on prenne une décision qui ne correspond pas à ce qu’a voulu la commission. Il doit alors l’en informer immédiatement, en indiquant les motifs. C’est alors qu’il appartient à la commission de décider si elle est convaincue par ces motifs ou, si elle ne l’est pas, d’aller devant le Conseil d’État.

Le contrôle doit être assuré par la CNCTR elle-même pour des raisons de bon sens : il faut répondre à l’urgence et au volume et le juge administratif ne peut traiter les milliers de demandes dont nous allons être saisis, et si l’on ne procédait pas ainsi, il n’y aurait plus de contrôle. Mais la commission doit pouvoir s’appuyer sur la possibilité du contrôle juridictionnel. Cela signifie que si la commission n’est pas convaincue par les motifs avancés, je veillerai à ce que le Conseil d’État soit saisi et tranche, fixant la jurisprudence.

Il existe d’autres cas dans lesquels le Conseil d’État peut être saisi. Si une technique de renseignement est mise en œuvre mais que le contrôle a posteriori montre que l’exécution ne correspond pas à l’autorisation donnée, la commission demandera au Premier ministre d’interrompre cette opération ; s’il ne le fait pas, la commission pourra saisir le Conseil d’État. Autrement dit, la possibilité de saisine du Conseil d’État conférée à la CNCTR conforte son autorité car l’exécutif saura qu’un conflit éventuel se réglera devant le juge ; mais l’on ne peut en faire un usage systématique. Le Conseil d’État ne doit pas être l’arbitre de tous les désaccords. Il faut porter devant lui ceux qui le méritent et qui justifient qu’il tranche et qu’il nous aide à fixer la jurisprudence. Le président de la CNCTR peut certes saisir, seul, le Conseil d’État et il le fera peut-être, mais je pense qu’en pareil cas il faut saisir la commission pour qu’elle délibère et pour que le président ait l’avis du collège.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. L’Assemblée nationale attache une importance particulière à la centralisation des renseignements collectés, dont traitent quatre articles de la loi. Ce qui a fait l’efficacité de la CNCIS, c’est que lorsqu’une ligne était sous surveillance, la production lui était transmise directement par le truchement du groupement interministériel de contrôle (GIC) ainsi qu’aux services. Ce ne sera plus le cas pour les renseignements collectés par le biais d’autres techniques – les balises, par exemple – dont la production ne sera pas reliée à un réseau. L’efficacité du contrôle étant conditionnée par l’accès à des données centralisées, de quels moyens techniques vous doterez-vous pour avoir un regard sur ce qui peut vous être proposé par le Gouvernement ?

M. Francis Delon. La centralisation conditionne l’effectivité du contrôle et, dans son dernier rapport, la CNCIS met l’accent sur l’importance du contrôle a posteriori, ce que j’approuve sans réserve. Heureusement, la loi donne à la CNCTR un droit de regard – par avis donné au Premier ministre – sur les modalités de mise en œuvre des procédures qu’appliquera notamment le GIC pour assurer cette centralisation. Les entretiens que j’ai eus avec Jean-Marie Delarue m’ont convaincu que, pour les interceptions de sécurité, la centralisation fonctionne.

La difficulté provient de ce que la loi sur le renseignement du 24 juillet dernier donne à la CNCTR le contrôle de techniques telles que la pose de balises et l’utilisation des IMSI catchers, qui sont des opérations délocalisées. Comment faire pour assurer la centralisation des données ainsi collectées ? À ma connaissance, la question n’est pas tranchée à ce jour et la commission devra éclairer le Gouvernement sur ce qu’elle souhaite. Je veillerai à ce que l’on fasse le maximum pour favoriser la centralisation de la collecte des données recueillies par le biais de ces autres techniques de renseignement, mais ce ne sera probablement pas aussi simple que pour les interceptions de sécurité – il sera impossible, par exemple, de disposer en temps réel des résultats de la pose d’une balise ou d’un IMSI catcher. Pour des raisons pratiques, il faudra veiller, et cela demandera une étude technique détaillée, à centraliser ces données, autant qu’il est possible, en quelques lieux précisément délimités seulement, et aux alentours de Paris : il faut tenir compte de ce que la CNCTR n’a que 9 membres et que ses effectifs demeureront réduits. Elle ne pourra donc, pour exercer le contrôle a posteriori, passer son temps en déplacements. Cette question cruciale pour l’effectivité du contrôle sera l’une des premières qui retiendront l’attention de la commission et de son président.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Vous avez manifestement pris la mesure de l’élargissement des pouvoirs de la commission par rapport à ceux de la CNCIS. Vous avez aussi mis l’accent sur l’importance de la collégialité ; sur ce point, on ne peut guère que faire confiance à quelqu’un qui l’a déjà pratiquée pour se dire qu’il saura la mettre en œuvre.

Ma question a trait aux compétences indispensables aux agents des services de renseignement dont vous allez être appelés à contrôler l’action sinon à les contrôler directement. Ce contrôle comporte de nombreux problèmes techniques et l’on conçoit qu’il pose la question des capacités techniques des membres de la CNCTR et de ceux qui les appuieront. Mais, sans jeter l’opprobre sur quiconque, on peut aussi se demander si la qualité de l’entraînement et de la formation des agents des services de renseignement est suffisante, notamment pour ce qui est de la pratique de certaines langues et de la connaissance de certaines cultures, compétences qui, on le voyait avec la CNCIS, permettent le décryptage plus rapide de certains types de messages et ainsi une appréciation plus efficiente du danger qui peut donner lieu à une demande d’interception. Vous qui connaissez le monde du renseignement, pensez-vous qu’il faille améliorer la formation et le recrutement des agents des services et si oui, selon quelles pistes ? Enfin, quelle importance accordez-vous à la traçabilité de l’exécution des techniques autorisées, essentielle à un contrôle démocratique ?

M. Francis Delon. Avec votre première question, nous sortons du domaine de compétence de la CNCTR et je vous répondrai à titre personnel. Oui, j’ai connu les services de renseignement et ce que j’ai vu de leur production m’a convaincu que ces services sont de grande qualité. Cela ne signifie pas qu’une formation ne soit pas indispensable. Je rappelle à cet égard que, conformément aux recommandations formulées en 2008 dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, une académie du renseignement a été créée. Elle est chargée de dispenser une formation générale aux cadres supérieurs des services de renseignement et de favoriser l’émergence d’une culture partagée entre les services pour faire tomber les cloisonnements qui peuvent nuire à la coordination de leur action. La création de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) va dans le sens que vous indiquez : cette direction générale aux pouvoirs plus étendus que ceux de l’ancienne Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) peut recruter des agents dans les rangs de la police mais aussi dans l’ensemble du spectre des compétences nécessaires, notamment dans les domaines technologiques.

De gros efforts ont donc été menés et continuent de l’être pour améliorer les compétences des services de renseignement. Reste le sujet très compliqué des langues rares, pour lesquelles nous n’avons pas forcément de spécialistes. Dans certains cas, les services sont alors confrontés à un dilemme : celui de faire appel, pour traduire ces langues, à des personnes dont ils ne sont pas entièrement sûrs. On peut s’efforcer de pallier ces manques en mettant les compétences disponibles en commun, mais il n’y a pas de réponse absolument satisfaisante.

Je répondrai à votre seconde question en rappelant que la loi donne toutes les possibilités juridiques à la commission d’exercer sa compétence sur la traçabilité de l’exécution des techniques autorisées. Il faudra s’assurer que les moyens pratiques de sa mise en œuvre existent et je suis convaincu que nous les trouverons.

M. Paul Molac. Nous examinerons dans quelques jours une proposition de loi de Mme Patricia Adam relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales. Il est question d’exploitation par traitement automatisé non individualisé des données de connexion interceptées, pour des sujets qui, contrairement aux algorithmes, dépassent la simple lutte contre le terrorisme. D’autre part, le texte ne prévoit pas de circuit particulier d’autorisation pour des mesures de surveillance individualisées. Comment envisagez-vous le contrôle de l’application de cette loi ?

M. Sébastien Pietrasanta. Le débat parlementaire sur l’algorithme a été très vif. Vous appuierez-vous, pour juger des effets de l’algorithme, sur la personnalité qualifiée que désignera l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) ou recruterez-vous des ingénieurs à cette fin ? Si tel est le cas, quel sera leur profil ?

Mme Laure de La Raudière. Ma question prolonge la précédente. Le débat a porté en particulier sur le contenu, l’encadrement et la mise en œuvre du dispositif qualifié de « boîte noire » introduit à l’article 2 de la loi relative au renseignement. La CNCTR est chargée d’assurer le contrôle « démocratique » des enquêtes administratives, et vous nous avez dit connaître les technologies utilisées dans le cyberespace. Aussi, j’aimerais avoir votre éclairage sur la mise en œuvre de cet article. Lors de l’examen du texte, le Gouvernement s’est prononcé plusieurs fois sur deux points capitaux pour les libertés publiques, assurant d’une part qu’il n’y aurait pas de surveillance de masse, d’autre part que la technologie dite d’inspection des paquets en profondeur – deep packet inspection –, qui permet la collecte massive de données, ne serait pas utilisée. Avec quels moyens contrôlerez-vous qu’il en sera bien ainsi ? Quelles garanties propres à rassurer les Français pouvez-vous donner que la collecte des données sur les réseaux ou auprès des hébergeurs ne sera pas généralisée ?

M. Francis Delon. La proposition de loi de Mme Patricia Adam et celle, assez proche, qui a été déposée au Sénat tiennent à ce que le Conseil constitutionnel a censuré une disposition de la loi relative au renseignement pour des motifs qui ne tiennent pas au fond, mais parce qu’il a jugé que le Parlement n’avait pas exercé la plénitude de ses compétences. Aussi les propositions de loi sont-elles plus précises que le texte de la loi du 24 juillet 2015 et inscrivent dans la loi ce qui aurait pu figurer dans un décret, y compris un décret non publié. À la lecture de ces deux textes, il m’a semblé qu’un dispositif assez précis et élaboré permettant le contrôle était proposé. Mais vous conviendrez que le candidat pressenti pour exercer la présidence de la CNCTR n’a aucune légitimité pour s’immiscer dans le débat parlementaire en cours. Si le Parlement décidait de saisir la CNCTR, elle rendrait son avis. Je constate simplement que le Parlement va plus loin dans la surveillance des communications internationales que ce que le texte initial prévoyait, et que ce n’est pas sur ce point que les débats avaient été les plus enflammés.

J’ai dit dans mon propos liminaire avoir entendu l’inquiétude qui s’est exprimée au sujet de l’algorithme et la comprendre. Il faut y répondre. Le Gouvernement a déjà donné de nombreuses réponses au cours du débat. Le Parlement s’est attaché à ce que la procédure soit très détaillée dans la loi elle-même. Plusieurs phases sont décrites. Dans la première, la commission, consultée a priori, se prononce sur le dispositif lui-même. Dans la phase suivante, le dispositif est mis en œuvre ; ensuite, si les services veulent exploiter des données qui peuvent laisser supposer une activité terroriste pour identifier la personne concernée, une nouvelle autorisation est nécessaire. J’ajoute que cette procédure très détaillée est réservée aux menées terroristes. La pratique est donc encadrée. La première chose que devra faire la commission est d’étudier l’aspect technique du dispositif. Si je suis nommé à la présidence de la CNCTR, je demanderai à la personnalité qualifiée que désignera l’ARCEP de le faire. M. Jean-Marie Delarue a déjà recruté un ingénieur qui m’a été présenté comme très brillant. D’autres ingénieurs nous seront nécessaires – puisqu’une bonne partie de notre activité consistera à contrôler des renseignements techniques, il nous faudra une forte capacité technique. Ils devront veiller à ce que le paramétrage de l’algorithme corresponde effectivement à la finalité fixée, la lutte contre le terrorisme, et au cahier des charges présenté par le service qui aura élaboré l’algorithme.

La loi dispose que les résultats obtenus par l’algorithme, dont l’usage est autorisé pour deux mois, sont communiqués à la CNCTR. On verra alors si la collecte des données est trop large ; ces premiers résultats seront éclairants pour avoir une idée de la validité de l’algorithme et sur ses éventuels effets pervers. Chacun convient que s’il s’agit d’arrêter des terroristes, il faut le mettre en place, mais que s’il a pour effet d’intercepter ou de mettre l’accent sur des données qui n’ont rien à voir, la chose devient problématique. J’ai bien l’intention que les moyens de la CNCTR soient employés à contrôler la proposition d’algorithme quand elle sera émise.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. La CNCTR devra donc être en mesure d’exercer un contrôle rigoureux sur le plan juridique et éclairé sur le plan technologique. Mais, pour ne donner qu’un exemple, la société Volkswagen est actuellement accusée d’avoir camouflé très longtemps quelques lignes de codes informatiques dans un logiciel, ce qui a eu des effets très importants. Pensez-vous faire appel à des expertises extérieures pour suivre la vitesse vertigineuse des innovations techniques ? D’autre part, puisque les activités de renseignement concernent tout le territoire national, comment orchestrer les liens avec les services de police et de gendarmerie et avec les procureurs, partout en France ?

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Permettez-moi d’observer que la deuxième question ne relève pas de la compétence de la CNCTR.

M. Francis Delon. Je rappelle que la CNCTR a pour mission de contrôler les techniques de renseignement et non de vérifier toutes les activités des services de renseignement. Cela étant, des balises seront posées et des IMSI catchers seront installés en province comme en région parisienne. Il faudra donc aller sur le terrain, mais la commission ne peut se consacrer qu’à cela ; une organisation du travail rationnelle devra être définie pour éviter des déplacements permanents, ce qui implique un peu de centralisation.

Nous utiliserons tous les moyens disponibles, et je n’exclus pas, si c’est nécessaire, le recours à des expertises extérieures, toutes précautions étant prises pour protéger le secret de la défense nationale. J’ai eu à connaître de ce sujet complexe en ayant autorité sur l’ANSSI : je sais que vérifier les dizaines de milliers de lignes de code d’un logiciel pour s’assurer qu’il ne contient pas de lignes de code cachées est une gageure, mais il faudra s’y atteler.

Mme Sandrine Mazetier. Vous souhaitez, avez-vous dit, un minimum de centralisation pour éviter que les membres et les agents de la CNCTR ne soient tout le temps sur les routes. Mais les bonnes pratiques s’érodent, et le meilleur contrôle est le contrôle aléatoire. L’épée de Damoclès démocratique qu’est la CNCTR doit être redoutée en permanence : tout service de renseignement utilisant quelque technique que ce soit doit savoir qu’il peut faire, à tout moment, l’objet d’un contrôle sur pièces et sur place du respect des autorisations données, dans toutes leurs composantes. Nous y sommes très attachés. Sans que vous passiez tout votre temps en voyage, il faudrait qu’une part importante de l’activité de la CNCTR consiste en des contrôles aléatoires – non en chambre, mais sur place.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Cette question est très sensible. Bien que tentés de mentionner dans la loi les cœurs de réseaux, qui permettent une centralisation, nous n’avons pas fait état dans le texte des techniques définies, pour permettre à la loi de vieillir en s’adaptant à l’évolution technologique. Il nous importe donc au plus haut point que la CNCTR apporte des garanties à ce sujet.

M. Francis Delon. Je précise mon propos : la centralisation sert d’abord à la collecte des renseignements produits par les services et elle est essentielle. Je le redis, le contrôle n’est effectif que s’il a lieu à la fois a priori et a posteriori. Le contrôle a posteriori s’exerce en effet de plusieurs manières : par un accès aux données qui doit être le plus libre et le plus facile possible et par des contrôles sur place, qui peuvent être annoncés ou aléatoires. C’est ce que fait la CNCIS et je puis vous assurer que je veillerai à ce que la CNCTR fasse de même. Mais, pendant la phase de montée en puissance des moyens de la commission, il faudra mettre l’accent sur la continuité du service par le contrôle a priori : la commission devra répondre à toutes les demandes. C’est pourquoi le contrôle a posteriori ne sera pas la priorité dans la première phase. Cela ne signifie nullement qu’il sera négligé ; dès lors que les moyens seront là – et ils le seront assez vite – il sera pleinement assuré. Étant donné la multiplicité des questions qu’elle devra traiter dans les premiers mois suivant son installation, la CNCTR ne pourra immédiatement sillonner la France pour vérifier ce qui doit l’être. Mais il faut le faire, et cela sera fait aussitôt que les bonnes personnes auront été recrutées.

Mme Cécile Untermaier. La loi dispose qu’après avoir été exploitées, les données collectées doivent être détruites. On sait les réticences des services de renseignement à cette idée. Comment ferez-vous respecter cette exigence et avec quels moyens ?

M. Lionel Tardy. La CNCTR devant, aux termes de la loi, tout voir et tout contrôler, je vous souhaite beaucoup de couragesurtout avec un budget de 392 000 euros… Je ne m’appesantirai pas sur les chiffres inquiétants mentionnés dans le dernier rapport de la CNCIS, montrant que ses avis sont de plus en plus souvent ignorés. Je reviens en revanche sur certains propos tenus par M. Jean-Marie Delarue lors de son audition par le Sénat le 16 septembre dernier. À la question : « Est-il crédible que certaines activités de renseignement aient échappé au contrôle de la CNCIS ? », il a répondu : « Oui, c’est crédible », évoquant certaines « zones grises » et précisant que, dans certains cas, les services modifient les listes des écoutes une fois l’autorisation du Premier ministre donnée. Il a d’autre part indiqué aux sénateurs que la loi relative au renseignement est déjà en retard puisqu’elle ne mentionne pas certaines techniques qui se développent très vite ; il en donne pour exemple l’emploi de drones. Quelle analyse faites-vous de ces propos ?

D’autre part, que pensez-vous du fait que la proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales nous sera soumise sans étude d’impact, et de ce que la CNCTR n’aura pas à donner son avis sur la surveillance des membres de certaines professions protégées ?

M. Francis Delon. Le contrôle de la mise en œuvre de la destruction, obligatoire, des données collectes est une des prérogatives nouvellement explicitées de la CNCTR et l’un des éléments importants de l’effectivité du contrôle a posteriori. La commission doit disposer des moyens nécessaires pour l’exercer et, si je suis nommé à sa présidence, je veillerai à ce qu’ils existent.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Avant de laisser M. Francis Delon poursuivre, je tiens à dire que je ne me reconnais pas dans les propos de M. Lionel Tardy. Je pense pour ma part que la loi a été conçue pour bien vieillir. D’autre part, je ne peux pas laisser M. Tardy dire que les services de renseignement contournent la loi. Je suis, comme M. Jean-Marie Delarue, membre de la CNCIS, et je conteste cette affirmation.

M. Lionel Tardy. Ces propos figurent dans le compte rendu de l’audition du président de la CNCIS par le Sénat, le 16 septembre dernier.

M. Francis Delon. Je laisse à M. Jean-Marie Delarue, mieux placé que moi, es qualité, pour exprimer un point de vue, la responsabilité de ses propos. J’aurai une opinion si je suis nommé président de la CNCTR. Aujourd’hui, je ne pense rien des propos tenus. J’écoute ce que dit M. Delarue et cela éveille chez moi de l’intérêt et de la vigilance – c’est ici le maître-mot – mais je ne fais de procès d’intention à quiconque. La logique de la loi est de reposer sur un dispositif qui fonctionne. C’est l’intérêt des services, qui savent que c’est la contrepartie des moyens nouveaux qui leur ont été donnés. C’est aussi l’intérêt, pratique mais aussi politique, du Gouvernement, puisque le texte donne au Premier ministre la responsabilité, devant le peuple, d’autoriser une technique de renseignement. Je suis convaincu qu’il aura à cœur de veiller à exercer parfaitement cette responsabilité. Je pense que la volonté politique existe, et qu’elle nous aidera aussi à trouver les moyens adéquats. S’il apparaissait que les arbitrages sont insuffisants ou inadéquats, il serait de la responsabilité du président de la CNCTR d’en demander d’autres, et il n’hésitera pas à le faire.

Sur le vieillissement de la loi, je n’ajouterai rien à ce qu’a dit le président de votre commission à l’instant.

J’ai indiqué tout à l’heure que je ne souhaite pas m’immiscer dans le débat parlementaire en cours sur la proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales. Les parlementaires pourront demander l’avis de la CNCTR, mais le candidat à la présidence de la commission que je suis ne saurait s’exprimer à ce sujet.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. L’article L.811-4 du code de la sécurité intérieure prévoit que le périmètre du « second cercle » de la communauté du renseignement sera défini par décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNCTR au regard des finalités fixées par la loi. Lors de nos débats, il était communément admis que ce « second cercle » comprenait uniquement la sous-direction à l’anticipation opérationnelle de la gendarmerie, le service central du renseignement territorial rattaché à la direction centrale de la sécurité publique (DCSP) et la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris. Il semble que d’autres services de la police nationale – ainsi des brigades de sûreté urbaine de la préfecture de police de Paris et d’autres unités de la DCSP – souhaitent être intégrés dans ce second cercle. Cela me paraît une demande exorbitante au regard des finalités fixées par la loi. Qu’en pensez-vous ?

Enfin, dans son premier rapport public, en 1992, la CNCIS indiquait être restée six mois sans locaux, une situation qui ne contribue pas à l’exercice convenable des missions allouées. La CNCTR compte aujourd’hui sept agents ; ils seront vraisemblablement dix à la fin de l’année et dix-huit en 2016, et il leur faudra aussi travailler de nuit. La question a-t-elle été évoquée avec le Gouvernement et des assurances ont-elles été données sur les locaux qui devront les accueillir dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions ?

M. Francis Delon. C’est à la CNCTR qu’il reviendra de donner son avis sur l’élargissement du « second cercle » des services de renseignement ; il ne m’appartient pas de le préempter. À titre personnel, je considère comme vous que le « second cercle » ne doit pas être trop large car les techniques de renseignement doivent rester entre peu de mains. Notre préoccupation est double : protéger la sécurité et protéger les libertés publiques. Plus le cercle est élargi à des unités qui peuvent opérer de manière déconcentrée, plus grand est le risque d’un contrôle beaucoup moins rigoureux. La CNCTR examinera le projet de texte quand il lui sera soumis.

Je ne me suis pas cru autorisé à traiter des locaux avec le Gouvernement avant que la procédure de nomination à la présidence de la commission soit arrivée à son terme, mais je m’en suis ouvert à M. Jean-Marie Delarue. Il m’a indiqué que la décision était prise d’affecter à la commission des locaux supplémentaires dans l’immeuble où est située la CNCIS et qu’elle serait mise en œuvre très rapidement. Le futur président de la CNCTR traitera de la question de la manière la plus pressante.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Monsieur Delon, je vous remercie.

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* *

Délibérant à huis clos, la Commission procède au vote par scrutin secret, en application de l’article 29–1 du Règlement, sur la nomination de M. Francis Delon à la fonction de président de la commission de contrôle des techniques de renseignement. Les résultats de ce scrutin ont été annoncés au cours de l’examen du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des données du secteur public :

Nombre de votants : 21

La Commission a émis un avis favorable à la nomination de M. Francis Delon aux fonctions de président de la CNCTR.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Les résultats du scrutin qui s’est tenu au Sénat étant connus, je vous indique que, en additionnant les votes des deux commissions, les résultats sont les suivants :

Nombre de votants : 49

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La Commission examine, sur le rapport de M. Luc Belot, après engagement de la procédure accélérée, le projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (n° 3037).

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Madame la secrétaire d’État chargée de la réforme de l’État et de la simplification, je vous souhaite la bienvenue dans notre commission. Pourriez-vous nous présenter la philosophie du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public, qui transpose une directive européenne ? Le Conseil constitutionnel nous ayant avertis pendant l’été, en censurant dans une loi de transposition toutes les dispositions qui n’avaient pas pour objet de mettre en œuvre le droit communautaire, de l’étroitesse de notre « marge de manœuvre », nous devrons nous limiter à cette épure.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État chargée de la réforme de l’État et de la simplification. Chargée, au sein du Gouvernement, de faire respecter les bonnes résolutions en matière de transposition des directives européennes, je commencerai par les appliquer moi-même. Certes, comme notre pays est en avance sur la législation européenne, le Gouvernement a souhaité, sur plusieurs points, aller plus loin que la directive ; mais les dispositions en question ont été examinées par le Conseil d’État.

Ce texte consacré à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public concerne l’open data – un enjeu dont on parlera de plus en plus. La France est en pointe dans ce domaine et le Gouvernement a pris des engagements forts visant à partager toutes les données produites par les administrations dans le cadre de leur mission de service public. Très variées, ces données portent sur l’ensemble du champ de l’administration : impôts, subventions, aménagement du territoire, qualité de l’air… Une mission créée au sein des services du Premier ministre, Etalab, est chargée, grâce à un portail unique interministériel – data.gouv.fr –, de rassembler et de mettre à disposition, en accès libre, l’ensemble des informations publiques de l’État, des établissements publics administratifs et, si elles le souhaitent, des collectivités locales. Les ministères participent largement à cette politique. La semaine dernière, le ministère de l’intérieur a ainsi ouvert l’accès aux données électorales depuis 1999, avec un degré élevé de précision, les informations allant jusqu’au niveau du bureau de vote. Au total, 18 000 jeux de données sont aujourd’hui publics, libres d’accès et de réutilisation.

Le Gouvernement s’engage d’autant plus volontiers dans ce chantier – auquel vous reviendrez avec le texte d’Axelle Lemaire et celui portant sur l’innovation – que celui-ci ouvre un vaste champ économique, générateur de valeur et créateur d’entreprises, de start-ups et d’emplois. Nous comptons y contribuer largement. Il s’agit également d’un levier important d’amélioration des politiques publiques : grâce à la mission Etalab, les services de l’État mettent au point des applications numériques innovantes. Ainsi, une application de cartographie permet d’intégrer la géolocalisation dans les démarches des usagers, rendant par exemple possible, pour une entreprise, de savoir à quelles aides elle peut prétendre en fonction de son territoire d’implantation. Enfin, c’est la démocratie même qui sortira transformée et redynamisée de cette ouverture des données. Cet été, le Président de la République a signé un plan en faveur d’un Gouvernement ouvert ; une démocratie plus transparente et plus collaborative permettra d’engager des débats publics – comme celui qu’Axelle Lemaire a lancé dans le cadre de son projet de loi. L’ouverture des données conduit enfin à la création d’outils tels qu’Handimap, une application de calcul d’itinéraire pour des handicapés moteurs mise en place par les villes de Rennes et de Montpellier.

Si, dans ce domaine, la France est en avance sur les autres pays, c’est qu’elle a une longue tradition qui remonte au discours d’Hourtin, en 1997, et au programme d’action du Gouvernement pour préparer l’entrée de la France dans la « société de l’information ». Un projet de loi en ce sens avait alors été déposé. Depuis 2012, le Gouvernement a réaffirmé sa volonté de rendre gratuit l’accès aux données publiques – point essentiel sur lequel nous allons plus loin que les autres pays européens.

La directive de 2013 – que transpose ce texte – a précisé le champ d’application de celle de 2003, mais notre avance permet de restreindre le champ des dispositions législatives à modifier. Il s’agit de légiférer sur trois points : le texte élargit le champ d’application des obligations de rediffusion aux informations contenues dans les documents détenus par les établissements culturels : bibliothèques, universités, musées, archives… Dans le système antérieur, ce domaine faisait l’objet d’une dérogation ; nous pourrons désormais revenir au droit commun tout en maintenant un dispositif particulier de protection. Le projet de loi encadre ensuite les possibilités d’accorder un droit d’exclusivité à un tiers pour la réutilisation des données, limitant la durée de l’accord à dix ans, avec un réexamen tous les trois ans. Notons à ce propos que le ministère de la Culture participe également à cette politique d’open data. Fidèle à sa tradition, la France instaure enfin un principe de gratuité, alors que la directive se limite à plafonner le montant des redevances aux coûts marginaux de production, de mise à disposition et de diffusion des données. Des dérogations sont prévues dans certaines situations particulières.

M. Luc Belot, rapporteur. Avec ce texte, nous donnerons à notre pays un nouveau cadre particulièrement ambitieux pour la politique d’ouverture et de diffusion des données. En pointe dans ce domaine depuis longtemps, la France a été classée troisième en matière d’open data par l’association internationale Open Knowledge Foundation. Dans la transposition de la directive, il s’agit donc de ne pas reculer par rapport à nos acquis.

Le principe de gratuité de la réutilisation des données publiques représente l’élément essentiel du projet de loi. Comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d’État, nous posons là une première pierre à l’édifice de la République numérique qui donnera lieu, pendant cette session parlementaire, à trois textes cohérents : celui que nous examinons ; le projet de loi pour une République numérique, dit « projet Lemaire », qui fait l’objet, depuis samedi dernier, d’une consultation en ligne pour trois semaines ; et – pour les éléments liés aux écosystèmes numériques – le futur « projet de loi Macron 2 ». Lors de nos débats, nous devrions garder à l’esprit cette perspective d’ensemble, garante de la cohérence ; mais l’objet du présent projet de loi est très précisément circonscrit. Le 13 août dernier, le Conseil constitutionnel a censuré vingt-six articles de la loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne parce qu’ils ne relevaient pas d’une transposition de directive. Aussi, je donnerai un avis défavorable à tous les amendements relatifs à l’open data mais ne répondant pas à cet impératif. Nous pourrons en débattre dans un autre cadre, notamment à l’occasion du projet de loi pour une République numérique.

Le délai de transposition justifie la procédure accélérée engagée par le Gouvernement. Malgré un calendrier particulièrement serré, j’ai réussi à mener des auditions avec les émetteurs et les producteurs de données – l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), Météo France ou la Bibliothèque nationale de France (BNF) – et avec les représentants des utilisateurs, notamment Regards citoyens. Ce travail permet de bénéficier d’une vue d’ensemble susceptible d’éclairer le texte comme les amendements.

Globalement bien accueilli, le projet de loi ne soulève pas d’opposition majeure. Le sujet est éminemment politique, mais l’action de l’État depuis 2010 – François Fillon crée Etalab en 2011 – se caractérise par sa continuité et sa cohérence. Je souhaite nous voir nous inscrire dans cette tendance. Aussi, mis à part quelques amendements qui excèdent le cadre de la transposition, je ne formulerai quasiment que des demandes de retrait, car le plus souvent le texte satisfait l’esprit de vos propositions. Nous devrions donc pouvoir avancer sereinement.

En remerciant Mme la secrétaire d’État et son cabinet, ainsi que les administrateurs de l’Assemblée pour la qualité du travail qu’ils ont accompli dans des délais très courts, je propose d’adopter ce texte sous réserve de quelques amendements, notamment rédactionnels, que je vous soumettrai.

M. Paul Molac. Le droit français satisfaisant déjà en grande partie la directive européenne transposée dans ce texte, nous devons aller plus loin.

Dans la plupart des cas, les redevances génèrent peu de recettes ; une partie d’entre elles étant payée par les autres administrations, elles ne sont pas d’un grand intérêt. Le contribuable investit parfois beaucoup d’argent dans la production de données par des services publics tels que l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), dont les redevances ne représentent pourtant que 3 % des ressources. La gratuité nous paraît donc souhaitable.

Le groupe Écologiste exprime toutefois deux regrets. D’une part, le texte est centré sur la question des redevances et ne parle que très peu de l’open data et de la libération des données. Les modifications indispensables à la loi de 1978 sont renvoyées au projet de loi sur le numérique qui fait l’objet d’une consultation depuis ce week-end. Je porterai toutefois quelques amendements sur cette question, car ces deux sujets sont très liés. Inspirées du rapport des sénateurs Corinne Bouchoux et Jean-Jacques Hyest, mes propositions portent notamment sur la définition d’un format ouvert et réutilisable et sur la création d’un droit à une publication régulière des données d’intérêt général.

D’autre part, si la loi prévoit la gratuité des données, l’essentiel du texte consiste à en énumérer les nombreuses exceptions. Dans plusieurs cas, le projet de loi prévoit également des accords d’exclusivité d’une durée supérieure à dix ans. Enfin, les redevances ne seront plus arrêtées par décret, celui-ci ne fixant que la liste des administrations susceptibles de les établir. Nous regrettons ce recul et souhaitons que le texte soit amendé sur ce point.

M. René Dosière. La transposition dont nous sommes saisis ne soulève pas de problèmes particuliers. D’abord, la liberté d’accès aux documents administratifs est la règle en France depuis la loi de juillet 1978 et ses versions ultérieures, dont la mise en œuvre repose sur le travail de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) où j’ai l’honneur de siéger sur décision de votre commission. La législation française satisfait déjà les objectifs assignés par la directive, quand elle ne va pas au-delà.

Ensuite, le Gouvernement est favorable à une large ouverture des données publiques, et les dispositions du projet de loi en concernent essentiellement la réutilisation, dont elles précisent les modalités et généralisent la gratuité. Le groupe Socialiste, républicain et citoyen votera donc ce texte qui a recueilli un avis très favorable et circonstancié de la CADA.

M. Bertrand Pancher. La question de l’ouverture des données au public est essentielle à la fois en matière économique et démocratique. C’est pourquoi les pays occidentaux s’en saisissent à travers des mesures d’incitation ; l’enjeu figurait par exemple parmi les thèmes centraux du discours du candidat Obama lors de la dernière élection présidentielle américaine.

La France est-elle aujourd’hui en avance dans ce domaine ? Les chiffres sont ambivalents : certes, les entreprises publiques sont en pointe, tout comme certaines grandes collectivités, mais restons modestes face aux résultats des administrations ! D’importants efforts sont nécessaires pour engager une stratégie dans ce domaine.

Les initiatives de l’État avaient très bien démarré avec le lancement par Mme Lemaire d’une vaste consultation publique ; mais le processus s’enraie à cause du télescopage des textes. Sans doute le calendrier s’explique-t-il par l’urgence à transposer la directive ; mais, tout comme pour la « loi Macron » et la « loi Lemaire » à venir, les internautes intéressés, qui ont beaucoup contribué à faire avancer le sujet, ont du mal à retrouver leurs petits ! Il ne suffit pas de lancer des consultations : encore faut-il recueillir les avis et en tenir compte dans les textes de loi. Le recours à une procédure accélérée est également regrettable. Au total, les problèmes de forme entachent le contenu du texte, qui relève du bon sens.

Le groupe Union des démocrates et indépendants déplore le choix fait par le Gouvernement de traiter la question de l’ouverture des données publiques à travers plusieurs véhicules législatifs. Le Parlement devra prochainement examiner le projet de loi sur le numérique porté par Axelle Lemaire, qui devrait poser le principe de l’ouverture des données publiques par défaut. Certes, en instaurant la gratuité de la réutilisation des informations, le texte de transposition de la directive de 2013 va dans le bon sens, mais ces sujets auraient dû être traités en même temps. Pourquoi morceler cette question ? Tout regrouper au sein d’un seul texte aurait donné du sens à cette démarche qui va dans le bon sens, mais dont on attend de voir l’aboutissement.

Nous regrettons l’oubli, à l’article 2, de l’inscription des redevances et des exceptions dans un registre public accessible à tous. Le droit d’exclusivité accordé à un tiers pour la réutilisation d’informations publiques et les redevances octroyées aux administrations constituent des exceptions aux principes de gratuité et de mise à disposition publique énoncés par la loi ; il convient donc de donner aux citoyens l’accès à toutes les informations en cette matière. Le citoyen ainsi mis au cœur du système devrait être en mesure de veiller à la bonne application de ces règles.

Le manque de précision de certaines mesures constitue un autre problème du texte : certains termes devraient être mieux définis, notamment s’agissant du montant des redevances et des hypothèses dans lesquelles celles-ci peuvent être maintenues. Ainsi, à l’alinéa 6 de l’article 3, que fixe exactement le décret en Conseil d’État ? Quelles sont les modalités de fixation des redevances ? Quid de la liste des catégories d’administration et de celle des redevances ? Quel est le rôle précis de la CADA ? Ces points doivent être discutés en commission.

Enfin – même si cette remarque ne remet pas en question le fond du projet de loi –, il faut pointer l’absence de limite dans la durée du droit d’exclusivité en matière de numérisation des ressources culturelles. S’agit-il de renflouer les caisses du ministère de la Culture au prix de l’accès du public aux données ? Il conviendrait de mieux encadrer cette période dans le temps. S’il semble exagéré d’accorder une dérogation sans limites, une échéance ne saurait être fixée ni justifiée que par l’étude d’impact ; or celle-ci n’est pas précise sur ce point.

M. Lionel Tardy. J’aurai l’occasion de revenir sur le fond lors de l’examen des amendements, mais avant tout nous sommes nombreux à être étonnés par le calendrier. Quelle surprise de voir ce texte présenté en Conseil des ministres en plein été alors qu’un projet de loi numérique censé traiter exactement du même sujet devait intervenir à l’automne ! La loi numérique ayant été sans cesse repoussée, nous avons l’impression qu’on a prévu de la découper en morceaux. C’est dommage, car la transposition de la nouvelle directive Public Sector lnformation (PSI) aurait mérité de s’insérer dans une vue globale sur l’open data en France.

Cette directive aurait dû être transposée avant le 18 juillet, et j’ai lu dans la presse que ce projet de loi était destiné à « rassurer Bruxelles ». Cela laisse songeur sur l’organisation du temps parlementaire par le Gouvernement ! Décidément, nous ne nous y ferons jamais… Nous voilà donc avec un morceau de projet de loi qui faisait partie de la version de l’avant-projet de loi numérique ayant fuité, et qui aurait tout à fait trouvé sa place dans le texte dévoilé samedi qui – cela ne s’invente pas ! – comporte une partie entière sur l’ouverture des données publiques.

Aux yeux du groupe Les Républicains, cette transposition au pas de course ne doit pas nous conduire à faire les choses a minima. Il n’est pas question de légiférer à la va-vite et sans ambition, car c’est le bon moment pour finir de lancer le mouvement de l’open data. Ne laissons pas passer le train !

Mme la secrétaire d’État. Je souhaite d’abord répondre aux interventions qui ont évoqué le calendrier et l’ordre de présentation des textes. Personne n’ignore qu’il existe des délais pour la transposition des directives. En l’espèce, nous devions transposer la directive PSI avant le 18 juillet dernier, ainsi que vous l’avez vous-même rappelé, monsieur Tardy. L’initiative du Gouvernement, qui consiste à transposer cette directive le plus rapidement possible, n’est donc pas contestable. Je précise que la France a déjà reçu un avis au titre de la procédure en manquement. En d’autres termes, bien que le délai de transposition ait été dépassé de deux mois à peine, nous sommes déjà dans une situation où nous manquons à nos obligations. Le texte qui devait comprendre l’ensemble des éléments relatifs à l’ouverture des données ayant été retardé, il était urgent de transposer la directive, afin de respecter le cadre légal dans lequel nous nous inscrivons.

D’autre part, messieurs Molac, Pancher et Tardy, je comprends que vous exprimiez votre frustration de ne pas pouvoir traiter l’ensemble du champ de l’ouverture des données, alors que nous abordons enfin ce beau sujet. Cependant, une autre contrainte s’impose, avec laquelle la commission des Lois vit d’ailleurs en permanence : ainsi que le Conseil constitutionnel l’a rappelé un peu brutalement cet été, le législateur ne peut pas ajouter de dispositions dépourvues de lien avec l’objet du projet de loi initial, en l’espèce la transposition de la directive. À cet égard, nous avons pris nos précautions : nous nous sommes assurés a priori auprès du Conseil d’État que nous n’enfreignions pas cette règle s’agissant des quatre points sur lesquels nous nous écartons de la directive.

M. le rapporteur. Monsieur Molac, la question des redevances entre administrations est un sujet important, de même que celle de la réutilisation des données par les administrations elles-mêmes. Elles seront traitées dans un rapport qui a été commandé à M. Antoine Fouilleron et dont nous devrions connaître les conclusions avant la fin du mois d’octobre. Nous pourrons aborder à nouveau ces questions à ce moment-là.

Je ne peux que souscrire à vos propos sur les données d’intérêt général. On peut regretter que cette question ne soit pas discutée aujourd’hui, mais tel n’est pas l’objet du projet de loi, et nous devons nous inscrire dans le cadre rappelé par le Conseil constitutionnel s’agissant de la transposition des textes européens. Néanmoins, un certain nombre d’éléments figurent déjà dans le texte, en particulier le principe de la gratuité, dont la portée est très ambitieuse.

S’agissant du décret en Conseil d’État prévu à l’alinéa 6 de l’article 3, messieurs Molac et Pancher, l’amendement que je proposerai vous donnera, selon moi, satisfaction.

De même, les amendements que vous avez déposés, monsieur Dosière – tout le monde connaît votre grande compétence et votre vigilance sur ces questions – sont déjà satisfaits sur le fond par le texte lui-même ou le seront par les réécritures que je proposerai.

Monsieur Pancher, je salue et partage votre forte ambition pour la France en matière d’open data. Toutefois, j’ai trouvé votre jugement sur notre pays très dur. L’association internationale indépendante que j’ai mentionnée l’a classé en troisième position. Ce n’est pas si souvent ! Certes, le French bashing est un sport national, mais, en l’espèce, nous sommes plutôt en pointe. Néanmoins, nous pouvons toujours faire mieux. Tel sera le cas grâce à ce texte, qui contient des éléments très forts, notamment le principe de la gratuité.

En ce qui concerne la cohérence des textes présentés, messieurs Pancher et Tardy, Mme la secrétaire d’État vous a répondu.

De même, elle a répondu à vos interpellations d’ordre politique, monsieur Tardy. Je retiens votre conclusion, notamment votre volonté de bien légiférer, ambition qui est aussi la mienne.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Avant l’article 1er

La Commission examine l’amendement CL13 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement reprend une recommandation du rapport sénatorial Refonder le droit à l’information publique à l’heure du numérique. Il s’agit de permettre à un citoyen de demander la publication régulière d’un document d’intérêt général. De nombreux documents ou jeux de données n’ont en effet d’intérêt que s’ils sont publiés régulièrement.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Vous avez gagné le droit d’obtenir une copie de la décision n° 2015-719 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2015, monsieur Molac !

M. le rapporteur. Je m’inscris dans la continuité des propos du président : votre idée est tout à fait intéressante, monsieur Molac, mais elle ne relève pas de la transposition de la directive. Je vous invite donc à retirer cet amendement, ainsi que le suivant, pour la même raison.

L’amendement est retiré.

L’amendement CL21 de M. Paul Molac est également retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL22 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à instaurer une possibilité de republication des informations transmises à un demandeur. Le droit de communication prévu par la loi de 1978 doit évoluer vers une ouverture plus importante des données.

M. le rapporteur. Votre amendement concerne l’accès aux documents administratifs, question qui sort là aussi du cadre de la transposition de la directive. Je vous invite donc à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL25 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit d’affirmer que la réutilisation des informations publiques constitue un droit. À cette fin, je propose que le chapitre II du titre Ier de la loi de 1978 soit intitulé « Du droit de réutilisation des informations publiques ».

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL27 du rapporteur, qui fait l’objet du sous-amendement CL46 du Gouvernement.

M. le rapporteur. Il est souhaitable que les organismes du secteur public mettent leurs documents à disposition dans un format ouvert. C’est pourquoi je propose d’insérer la phrase suivante au premier alinéa de l’article 10 de la loi de 1978 : « Ces informations sont communiquées sous forme électronique et dans un format ouvert. »

Mme la secrétaire d’État. Le sous-amendement du Gouvernement vise à insérer les mots « si possible » entre virgules après les mots « sous forme électronique », afin de coller exactement au texte de la directive. Cela devrait vous convenir, monsieur le président, de même qu’au Conseil constitutionnel.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Si vous aviez souhaité insérer l’adverbe « notamment », nous aurions été contre ! (Sourires.)

M. le rapporteur. Notre pays étant actuellement en pointe, et conformément à l’esprit même de l’open data, il est vraiment souhaitable que les documents soient toujours mis à disposition dans un format ouvert. Néanmoins, j’ai cru comprendre que nous avions des difficultés à communiquer certains types de documents très spécifiques dans un tel format. Je donne donc un avis favorable à ce sous-amendement.

M. Lionel Tardy. Le terme « ouvert » ne suffit pas : il faudrait aussi préciser que cette transmission doit se faire dans un format « librement réutilisable ». Le terme « librement » figure dans l’article de la « loi Macron » qui porte sur les données des services réguliers de transport public de personnes et sera peut-être inscrit dans la loi relative à la liberté de la création – nous allons en effet évoquer tout à l’heure en séance publique la constitution d’une base de données sur l’utilisation des 25 % de la rémunération pour copie privée qui sont consacrés à l’aide à la création. Dans un souci d’harmonisation, il serait bon d’insérer le terme « librement » dans l’amendement CL27.

La Commission adopte le sous-amendement CL46 du Gouvernement.

Puis elle adopte l’amendement CL27 sous-amendé.

Article 1er (art. 11 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Suppression du régime particulier de réutilisation des informations contenues dans les documents produits ou reçus par les établissements ou institutions d’enseignement et de recherche ou culturels

La Commission adopte l’article 1er sans modification.

Article 2 (art. 14 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Limitation à dix ans de la durée des accords d’exclusivité, sauf droit d’exclusivité accordé pour les besoins de la numérisation culturelle

La Commission est saisie de l’amendement CL14 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Les deux dernières phrases de l’alinéa 2 de l’article 2 créent une dérogation permettant la conclusion d’accords d’exclusivité d’une durée supérieure à dix ans. Dix ans nous semblent déjà une durée très importante. Une durée encore plus longue serait disproportionnée. La directive PSI indique d’ailleurs que la durée du droit d’exclusivité pour les numérisations de ressources culturelles ne devrait pas, en général, dépasser dix ans. D’autre part, l’étude d’impact ne précise pas quels accords pourraient être concernés. C’est pourquoi nous souhaitons supprimer cette dérogation.

M. le rapporteur. Je suis a priori plutôt favorable à l’esprit de votre amendement. Tel est l’esprit même de l’open data, et il serait cohérent de limiter la durée des accords d’exclusivité à dix ans. Cependant, il ressort des auditions que certains établissements, notamment des bibliothèques municipales, ont parfois passé des accords d’exclusivité de quinze ans. Aussi, je vous invite à retirer votre amendement, afin que nous puissions prendre le temps de voir ce qu’il en est exactement, d’évaluer les conséquences dudit amendement et de trouver une solution d’ici à la séance publique.

M. Paul Molac. Nous proposerons un amendement modifié pour la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL36 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL10 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Les droits d’exclusivité accordés à un tiers pour la réutilisation d’informations publiques et les redevances établies par un certain nombre d’administrations énumérées par décret constituent des exceptions aux principes de gratuité et de mise à disposition publique énoncés par le présent projet de loi. Dès lors, il serait très intéressant de donner aux citoyens l’accès libre à toutes les informations relatives à ces exceptions. Ainsi placés au cœur du système, ils pourraient veiller à ce que les règles soient appliquées. Nous proposons donc que les accords d’exclusivité et les modalités d’octroi de ces droits soient transparents et inscrits sur un registre public créé par décret.

M. le rapporteur. Le projet de loi prévoit que les accords d’exclusivité sont transparents, disposition que vous entendez maintenir. Toutefois, vous souhaitez remplacer la publication des accords par leur inscription sur un registre. Je ne suis pas convaincu que cette procédure soit un progrès ni qu’elle soit la plus adaptée à l’heure du numérique. Je vous invite donc à retirer votre amendement. Vous pourriez le cas échéant préciser, d’ici à la séance publique, les conditions dans lesquels les accords doivent être publiés, par exemple dans un format numérique ou sur une plate-forme de l’État.

M. Bertrand Pancher. Je préciserai les choses d’ici à la séance publique. Il est clair que la publication devrait se faire sous forme numérique. D’autre part, afin de faciliter l’accès à l’information, il serait utile de centraliser sur un même support les données relatives à ces accords, ainsi que les règles et les conditions de transparence. Tel est le sens de mon amendement, que je maintiens.

Mme la secrétaire d’État. Il s’agit de dispositions de nature non pas législative, mais réglementaire. Pour faire suite aux propos du rapporteur, je précise que le site data.gouv.fr a vocation à accueillir les informations relatives aux accords d’exclusivité, en effet très utiles, et à les mettre à disposition du public intéressé.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL1 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. La phrase « Les accords d’exclusivité sont transparents et rendus publics » est redondante. Dès lors que les accords sont rendus publics, ils sont nécessairement transparents. Le mieux est parfois l’ennemi du bien.

M. le rapporteur. Je suis assez d’accord avec vous, monsieur Tardy : la publicité des accords assure leur transparence. Cependant, cette phrase reprend la formulation de la directive. D’autre part, si le terme « transparent » appliqué à un accord n’a guère de signification en droit, il y a certainement d’autres notions sous-jacentes, telles que la transparence des conditions de négociation, ainsi que des modèles économiques et des critères qui ont été retenus pour l’élaboration de l’accord. Si nous supprimions complètement le mot « transparents », nous risquerions d’être très mal compris, ce qui n’est ni votre objectif ni le nôtre. Je préférerais que l’on récrive votre amendement d’ici à la séance publique en tenant compte des éléments que je viens d’évoquer. Je vous invite donc à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 2 modifié.

Article 3 (art. 15 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Principe de gratuité de la réutilisation des informations du secteur public et dérogations à ce principe

La Commission est saisie de l’amendement CL2 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. L’alinéa 2 de l’article 3 du présent projet de loi fait référence à des « administrations », alors que l’article 1er de la loi de 1978 renvoie à des « personnes ». La première version du projet de loi numérique contenait, elle, le terme « personnes ». Je précise que la concertation sur ce dernier texte n’était pas encore lancée au moment où j’ai rédigé cet amendement. Malheureusement, nous sommes bien obligés de nous fier aux informations que l’on veut bien nous donner ou que nous sommes contraints de recueillir ! En tout cas, je vois au moins une différence entre « administrations » et « personnes » : dans le cas où l’on retiendrait le second terme, l’ouverture des données pourrait aussi concerner les personnes de droit privé chargées d’une mission de service public.

M. le rapporteur. Vous avez à nouveau parfaitement raison du point de vue juridique, monsieur Tardy : le terme « administrations » est celui qui a été retenu dans toute la loi de 1978, sauf dans son article 1er. S’agissant du présent texte, soit nous le conservons partout, soit nous le remplaçons partout par « personnes », et pas seulement à l’alinéa 2 de l’article 3 ainsi que vous le proposez par cet amendement.

Par ailleurs, il convient d’être vigilant sur l’emploi du terme « personnes », car l’article 1er de la loi de 1978 fait aussi référence au « droit de toute personne à l’information ». Il pourrait donc y avoir un doute sur la ou les personnes qui sont visées. Quoi qu’il en soit, je souscris à vos propos en ce qui concerne les personnes de droit privé chargées d’une mission de service public.

Je vous invite à retirer votre amendement et à soulever à nouveau cette question lors de l’examen du projet de loi pour une République numérique. Nous pourrions alors harmoniser les termes dans l’ensemble de la loi de 1978, dans un souci de cohérence.

M. Lionel Tardy. Je retire mon amendement et réexaminerai ce point d’ici à la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL26, CL31, CL32, CL30, CL37, CL33 et CL34 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL18 de M. René Dosière.

M. René Dosière. Cet amendement vise à préciser que les coûts de reproduction des informations doivent aussi être pris en compte dans le calcul des redevances.

M. le rapporteur. Je partage l’objectif de votre amendement, monsieur Dosière, mais je vous invite à le retirer, car il est déjà satisfait par la rédaction actuelle du projet de loi : la mise à disposition des informations comprend leur reproduction.

M. René Dosière. Mon souci de précision tient au fait que je fréquente sans doute trop la CADA. (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL35 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL15 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à préciser que les critères de fixation du montant des redevances sont non seulement transparents, mais aussi publics. Il s’agit donc de reprendre les mêmes termes que ceux qui sont utilisés à l’article 2 pour les accords d’exclusivité.

M. le rapporteur. Je connais votre vigilance sur ces questions, monsieur Molac. Néanmoins, je vous invite à retirer votre amendement, car il est satisfait par l’alinéa 6 de l’article 3, qui dispose que « les modalités de fixation de ces redevances sont fixées par décret en Conseil d’État », ainsi que par l’article 5, lequel réécrit le second alinéa de l’article 17 de la loi de 1978 comme suit : « Les conditions de réutilisation des informations publiques ainsi que, le cas échéant, les bases de calcul retenues pour la fixation du montant des redevances sont rendues publiques, dans un format ouvert, par les autorités qui les ont produites ou reçues. »

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL3 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Afin que les choses ne soient pas figées dans le temps, cet amendement prévoit que les critères de fixation du montant des redevances sont réévalués de façon régulière. Nous pourrions imaginer, par exemple, une révision annuelle, sachant que les coûts de fonctionnement liés à la mise à disposition des données sont amenés à évoluer et, potentiellement, à baisser. Une redevance ne saurait en aucun cas être une rente permanente.

M. le rapporteur. L’enjeu porte davantage sur le réexamen de la liste des catégories d’administrations autorisées à établir des redevances que sur celui des critères de fixation de leur montant. Je vous renvoie à mes amendements CL38 et CL40, qui me paraissent répondre à vos attentes.

Mme la secrétaire d’État. Je vous invite à retirer votre amendement, monsieur Tardy, afin que nous puissions travailler à une rédaction qui convienne mieux d’ici à la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL12 de M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement va nous permettre de montrer l’exemple, en faisant de l’open data sur la loi relative à l’open data ! (Sourires.) Je propose que les redevances pratiquées, ainsi que les mises à jour des montants ou des modalités de ces redevances, soient inscrites sur un registre public. Ainsi éclairés, nos concitoyens pourront donner leur avis et, éventuellement, interpeller le Gouvernement ou les parlementaires si l’on assiste à des dérives d’année en année.

M. le rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat lorsque nous avons examiné l’amendement CL10 et n’avons pas décidé de créer de registre de cette nature. Je vous invite à retirer votre amendement, car il est satisfait par l’alinéa 6 de l’article 3 : la liste des catégories d’administrations autorisées à établir des redevances sera fixée par décret en Conseil d’État et sera donc publique. De plus, mon amendement CL38, que je présenterai tout à l’heure et qui vise à ce que chaque nouvelle redevance soit expressément autorisée, est lui aussi de nature à vous donner satisfaction.

M. Bertrand Pancher. Vous êtes habile, monsieur le rapporteur, mais vous ne répondez pas complètement à ma question. Je maintiens mon amendement et verrai ce que vous proposez tout à l’heure.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL4 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Nous nous perdons un peu dans les règles de fixation des redevances. Celles-ci sont définies de façon générale à l’alinéa 2 de l’article 3, mais on voit apparaître d’autres critères à l’alinéa 6 du même article, relatif au décret d’application : la nature de l’activité des administrations et les conditions de leur financement. Or les conditions de financement des administrations sont, selon moi, un critère trop large. Quant à la nature de leur activité, je ne vois pas concrètement ce qui sera pris en compte, ni de quelle manière cela le sera. Le critère de fixation du montant de la redevance doit être avant tout les coûts induits par l’ouverture des données, ainsi que le prévoit la directive PSI.

M. le rapporteur. Votre intention est louable, mais la précision que vous proposez de supprimer à l’alinéa 6 – « en raison de la nature de leur activité et des conditions de leur financement » – est utile. En effet, l’alinéa 2 mentionne les « administrations », alors que le décret prévu à l’alinéa 6 devra déterminer, lui, la liste des « catégories d’administrations » autorisées à établir des redevances. Cette structuration de l’article 3 résulte d’une proposition du Conseil d’État. Je propose d’en rester à celle-ci et vous invite donc à retirer votre amendement.

M. Lionel Tardy. Je maintiens mon amendement.

Mme la secrétaire d’État. Je suis du même avis que le rapporteur.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL5 rectifié de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je propose de préciser que les redevances sont « limitées aux coûts marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion » des données, ainsi que le prévoit textuellement l’article 6 de la directive PSI. Je sais que l’on peut prendre quelques libertés dans la transposition de ladite directive, mais, en l’espèce, si l’on ne colle pas suffisamment au texte, notre politique d’open data risque sérieusement de perdre de sa force.

M. le rapporteur. Une fois n’est pas coutume, je suis en désaccord avec vous sur le fond, monsieur Tardy. Le projet de loi consacre le principe de gratuité de la réutilisation des informations du secteur public et prévoit des dérogations à ce principe. Ce dispositif est plus ambitieux en matière d’open data que l’établissement de redevances limitées aux coûts marginaux, qui me paraît, de plus, aller à l’encontre des autres propositions que vous avez formulées. Nous ne devons pas, selon moi, retenir la notion de coûts marginaux. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL40 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je propose que la liste des catégories d’administrations autorisées à établir des redevances soit révisée tous les cinq ans. Cette disposition me semble de nature à satisfaire les préoccupations de MM. Pancher et Tardy.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine les amendements CL16 de M. Paul Molac et CL38 du rapporteur, qui peuvent faire l’objet d’une discussion commune.

M. Paul Molac. L’amendement CL16 prévoit que les redevances sont fixées par décret spécifique afin de permettre une plus grande transparence et un avis systématique de la CADA.

M. le rapporteur. Votre souhait, monsieur Molac, est déjà en partie satisfait par l’amendement CL40 et le reste le sera par l’amendement CL38, qui évitera qu’un décret en supprime un autre et que certaines administrations ouvrent un open bar de la redevance.

Par ailleurs, votre rédaction inclut les collectivités locales dans le décret, ce qui ne serait pas sans poser problème à celles-ci.

L’amendement CL16 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL38.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

Article 4 (art. 16 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Délivrance de licences en vue de la réutilisation des informations publiques

La Commission examine l’amendement CL19 de M. René Dosière.

M. René Dosière. Il s’agit de favoriser un recours beaucoup plus large aux licences.

M. le rapporteur. L’amendement est satisfait par l’actuelle rédaction de l’article 4.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL39 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je propose de supprimer les mots « le cas échéant ». En 2015, les licences doivent être communiquées sous format électronique.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La Commission examine l’amendement CL6 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je propose une modification rédactionnelle qui va dans le sens de la première version de l’avant-projet de loi numérique. À l’article 16 de la loi de 1978, la mise à disposition des éventuelles licences types n’est pas forcément prévue par voie électronique. Or, dix ans après sa rédaction, les choses ont évolué et une telle mise à disposition se fait sans aucun doute systématiquement de cette manière. Il convient donc de le préciser.

M. le rapporteur. Tandis que l’amendement CL39 voté à l’article 4 prévoit une communication « sous format électronique », le présent amendement écrit « par voie électronique ». Je propose d’en rester à la première rédaction.

La Commission rejette l’amendement.

Article 5 (art. 17 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Publicité des bases de calcul retenues pour la fixation des redevances

La Commission examine l’amendement CL23 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Il s’agit de prévoir que le document fixant les conditions de réutilisation et les bases de calcul des redevances soit publié dans un format ouvert, mais également librement réutilisable. C’est la question des PDF (Portable Document Format) que j’ai soulevée dans un précédent amendement.

M. le rapporteur. C’est déjà prévu puisque, en tant que document administratif, celui-ci entre dans le droit commun de l’article 10 de la loi de 1978 sur les conditions de réutilisation des informations publiques. L’adoption de l’amendement alourdirait le texte sans apporter de précision utile.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL28 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL7 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. L’article 5 prévoit la publication des bases de calcul retenues pour les redevances. C’est une bonne chose, mais nous pourrions aller plus loin en prévoyant que cette publication soit centralisée. Le portail data.gouv.fr serait sans doute l’instrument le plus approprié. Les modalités pourraient être précisées par décret. L’accès à ces données serait ainsi facilité et nous serions parfaitement dans la ligne recommandée par le Conseil national du numérique dans son rapport Ambition numérique, publié en juin.

M. le rapporteur. La publicité des redevances étant prescrite au niveau législatif, il ne me paraît pas utile de prévoir un décret. Cet amendement inclut les collectivités locales, ce qui n’est pas sans poser problème.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 5 modifié.

Après l’article 5

La Commission examine l’amendement CL20 de M. René Dosière.

M. René Dosière. Il s’agit de tirer les conséquences de la directive, qui ne limite plus la mention des voies de recours aux seules décisions défavorables, comme c’est actuellement le cas à l’article 25 de la loi de 1978, mais l’étend à toutes les décisions relatives à la réutilisation.

M. le rapporteur. L’erreur que relève M. Dosière est liée à l’emploi, à l’alinéa 2 de l’article 6, du terme « refus », alors que l’on parle de « décision de refus » dans le cas de l’accès, et de « décision défavorable » dans le cas de la réutilisation. Ce sera corrigé par l’amendement CL29, à l’article 6.

L’amendement est retiré.

Article 6 (art. 25 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Exception à l’obligation de motivation d’une décision défavorable en matière de réutilisation de données publiques fondée sur l’existence d’un droit de propriété intellectuelle

La Commission adopte l’amendement CL29 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 6 modifié.

Article 7 (art. 59 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal) : Application outre-mer

La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL41 et les amendements rédactionnels CL42 et CL43 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 7 modifié.

Article 8 : Application dans le temps

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL17 de M. Paul Molac et CL44 du rapporteur.

M. Paul Molac. Cet article prévoit, pour les accords d’exclusivité, des dérogations possibles jusqu’en 2043. Bien que la directive le permette, cela ne nous semble pas acceptable, surtout pour des œuvres qui relèvent souvent du domaine public. Il importe d’en rester à la limite de dix ans.

M. le rapporteur. L’amendement de précision CL44 transpose le paragraphe 4 de l’article 11 de la directive de 2003 dans la rédaction résultant de la directive de 2013. L’article 12 de l’ordonnance de 2005 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques prévoit que tous les accords d’exclusivité existants qui ne relèvent pas de l’exception prévue au premier alinéa de l’article 14 de la loi du 17 juillet 1978 prennent fin à l’échéance du contrat et, au plus tard, le 31 décembre 2008. Le I du présent amendement précise que ce n’est que si l’article 12 de l’ordonnance n’est pas applicable à l’accord en cause, parce qu’il ne relevait pas de la loi de 1978 en 2005, que la date butoir applicable est le 18 juillet 2043. En d’autres termes, en cas de conflit entre ces deux règles d’application de la loi dans le temps, c’est l’article 12 de l’ordonnance de 2005 qui devra prévaloir. Cette solution est similaire à celle retenue par la directive 2003 révisée. L’Europe exprime souvent le souhait que les textes de loi nationaux citent les directives : ce sera le cas avec cet amendement.

Mme la secrétaire d’État. Je suis favorable à l’amendement du rapporteur.

L’amendement CL17 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL44.

Elle examine ensuite l’amendement CL8 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Du retard ayant déjà été pris, autant ne pas faire traîner les choses une fois la loi adoptée. La mise en conformité des licences devrait pouvoir se faire dans les six mois après la publication de la loi, au lieu des douze mois actuellement prévus.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Si nous rendons applicable une nouvelle règle à un contrat en cours, nous portons atteinte à la liberté contractuelle, constitutionnellement protégée. C’est ce qu’a souligné le Conseil constitutionnel dans son avis sur le projet de loi. Je préfère donc ne pas prendre un risque inutile en réduisant cette durée à six mois.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 8 modifié.

Article 9 : Habilitation à intégrer les dispositions de la présente loi dans le code des relations entre le public et les administrations

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL45 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

La Commission adopte à l’unanimité l’ensemble du projet de loi modifié.

La séance est levée à 17 heures 50.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Christian Assaf, Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Luc Belot, M. Éric Ciotti, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. René Dosière, M. Olivier Dussopt, M. Bernard Gérard, M. Philippe Houillon, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, Mme Sandrine Mazetier, M. Patrick Mennucci, M. Paul Molac, M. Bertrand Pancher, M. Sébastien Pietrasanta, M. Pascal Popelin, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier, M. Jean-Jacques Urvoas, M. Daniel Vaillant, Mme Paola Zanetti

Excusés. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Sergio Coronado, Mme Pascale Crozon, M. Carlos Da Silva, M. Marc Dolez, Mme Laurence Dumont, M. Georges Fenech, M. Daniel Gibbes, M. Yves Goasdoué, Mme Marietta Karamanli, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Bernard Roman, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Marie-Jo Zimmermann

Assistaient également à la réunion. - Mme Laure de La Raudière, M. Lionel Tardy