N° 1526 ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTJTUTION DU 4 OCTOBRE 1958 Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 avril 1999. PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final / n° E 1236), (Renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution PRÉSENTÉE en application de 1'article 151-l du Règlement, ________________________________________________________________________________________________________________________________________ (2) MM. Yvon Abiven, Léo Andy, Alain Calmat, Jean-Claude Daniel, Camille Darsières, Christian Franqueville, Daniel Marsin, Mmes Michèle Rivasi et Christiane Taubira-Delannon. EXPOSE DES MOTIFS MESDAMES, MESSIEURS, La proposition de directive du Conseil présentée par la Commission européenne le 17 février 1999 propose de modifier la directive 77/388/CEE (dite « sixième directive D) relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, en vue d'autoriser les Etats membres à appliquer, à titre expérimental, un taux de TVA réduit sur des services à forte intensité de main-d'oeuvre. Ce texte était très attendu. En effet, sous réserve que l'évolution de la conjoncture permette à la France de disposer de marges de man_uvre budgétaires suffisantes, la volonté du Gouvernement et de sa majorité est de réduire le niveau trop élevé, dans notre pays, des prélèvements obligatoires. Or, dans cette perspective, la priorité doit être accordée à l'allégement de la fiscalité indirecte en général, et de la TVA en particulier. Par rapport à la fiscalité directe, le poids des prélèvements assis sur la consommation des ménages est effectivement proportionnellement plus lourd en France que dans les autres Etats membres de l'Union européenne, cette situation ayant été aggravée par le relèvement de deux points, en 1995, du taux normal de la TVA. En outre, les allégements de TVA sont susceptibles de bénéficier à l'ensemble des ménages, ce qui est plus équitable que les mesures intéressant l'impôt sur le revenu, et le gain de pouvoir d'achat qu'ils leur procurent sont de nature à soutenir l'activité. Néanmoins, l'utilisation de cet instrument fiscal est rendue malaisée par la réglementation communautaire, qui encadre, de façon très stricte, le régime de TVA des Etats membres de l'Union européenne, et limite, en particulier, les possibilités d'extension du taux réduit. Ainsi, la directive no 92/77/CEE du 19 octobre 1992, qui a modifié la sixième directive précitée, dispose que les Etats membres ne peuvent appliquer qu'un ou deux taux réduits, que le niveau minimum de ceux-ci est de 5%, et, surtout, qu'ils ne peuvent s'appliquer qu'à une liste limitative de biens et de services énumérés dans son annexe H. Or, ces contraintes soulèvent aujourd'hui deux types de difficultés. - En premier lieu, le champ des activités qui peuvent être soumises au taux réduit a été déterminé à des fins d'harmonisation fiscale, en fonction de la législation des Etats membres en 1992. Il ne prend pas en compte le contenu en emplois de ces activités, qui devrait pourtant être un critère essentiel. - En second lieu, la France, qui a mis en _uvre de nombreuses baisses ciblées de TVA depuis dix-huit mois (travaux de réhabilitation dans le logement social, médicaments et appareillages destinés aux personnes souffrant de certains handicaps, abonnements souscrits pour la fourniture de gaz et d'électricité, opérations de collecte séparative, de tri et de traitement des ordures ménagères, etc.), a déjà largement exploité les possibilités offertes par l'annexe H précitée. Dans ces conditions, il est rapidement apparu que notre pays ne pourrait promouvoir l'emploi au moyen d'une réduction de la fiscalité indirecte sans oeuvrer, en parallèle, pour un assouplissement de ces contraintes communautaires. La France a inscrit sa demande dans le cadre d'une approche plus large. Dès le mois de juin 1997, elle a invité ses partenaires de l'Union européenne à s'engager dans une démarche tendant à réorienter la politique communautaire, qui n'intégrait pas suffisamment la lutte contre le chômage parmi ses priorités. Cette volonté s'est manifestée lors du Conseil européen extraordinaire pour l'emploi de Luxembourg, en novembre 1997, puis, de nouveau, à l'occasion du Conseil européen de Vienne, en décembre 1998. L'Assemblée nationale a manifesté, à plusieurs reprises, son souci de voir cette orientation aboutir. La proposition de directive du 17 février dernier constitue, s'agissant de la fiscalité, le fruit de ces initiatives. Elle prévoit que le Conseil pourra autoriser les Etats membres del'Union européenne à appliquer le taux réduit de la TVA à certains services à forte intensité de main _uvre, de façon optionnelle et expérimentale. Tout Etat membre souhaitant introduire une telle mesure devra en informer la Commission avant le lerseptembre 1999 et, en cas d'autorisation, soumettre les services choisis au taux réduit durant toute la période allant du 1"`janvier 2000 au 3 1 décembre 2002. A cette date, l'efficacité de la mesure, en termes de création d'emplois et d'efficience, fera l'objet d'une évaluation. Aucune liste des services potentiellement éligibles au taux réduit n'est proposée. Néanmoins, deux secteurs sont fréquemment cités, y compris dans l'exposé des motifs de la proposition de directive : les services rendus aux personnes (sous forme d'aide à domicile, à la jeunesse, aux personnes âgées ou handicapées) et les prestations de réparation et de rénovation d'immeubles anciens à usage d'habitation. L'Assemblée nationale doit prendre position sur ce sujet important. Il lui revient, en premier lieu, de demander au Gouvernement de tout faire pour que cette proposition de directive soit effectivement adoptée dans les meilleurs délais, afin que des mesures fortes puissent être mises en _uvre dans le cadre de la prochaine loi de finances. En second lieu, quelques ajustements techniques semblent souhaitables pour faciliter son application et pour préserver la liberté fiscale des Etats membres. Enfin, l'Assemblée nationale est en droit de se prononcer sur le champ de cette expérimentation. A cet égard, un assujettissement au taux réduit de la TVA des "aides à la personne » pourrait stimuler la présence des entreprises dans ce secteur d'activité, et donc favoriser des créations d'emplois. Une telle mesure, de nature incitative, ne représenterait d'ailleurs qu'un coût relativement réduit pour le budget de 1'Etat. Il conviendra néanmoins de mesurer préalablement le risque d'éviction qu'une telle évolution pourrait exercer par rapport à une offre associative, qui, sur ce marché, joue un rôle important, de façon satisfaisante. Au-delà, votre Commission, puis, en séance, l'Assemblée nationale, ont clairement indiqué au Gouvernement, durant l'examen du projet de loi de finances pour 1999, que le secteur des travaux dans les logements anciens devait être considéré comme prioritaire pour une baisse de la TVA. Ce choix, qui suppose néanmoins l'existence de marges budgétaires importantes, mérite d'être réaffirmé. PROPOSITION DE RÉSOLUTION Article unique L'Assemblée nationale. Vu l'article 88-4 de la Constitution, Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main _uvre (COM [99] 62 fïnal/n° E 1236) Considérant que, dans la limite des marges de man_uvre budgétaires que l'évolution de la conjoncture permettrait de dégager, la France doit s'orienter vers une réduction progressive du niveau de ses prélèvements obligatoires ; Considérant que, dans cette perspective, la baisse de la TVA doit être privilégiée, en raison du poids de la fiscalité indirecte dans notre pays et de la nécessité de mettre en _uvre des mesures qui bénéficient à l'ensemble des ménages, à la croissance et à l'emploi ; Considérant que ces objectifs d'équité fiscale et de soutien de l'activité ne pourraient être atteints, dans l'immédiat, en revenant sur la hausse de deux points du taux normal décidée, en 1995, par le précédent Gouvernement, en raison du coût budgétaire d'une telle mesure et du caractère aléatoire de la répercussion de cette baisse du taux de l'impôt sur les prix et, partant, sur le pouvoir d'achat des ménages ; Considérant que la mise en _uvre de baisses ciblées de TVA apparaît, dans ces conditions, comme prioritaire ; Saluant, à cet égard, les efforts importants réalisés depuis dix-huit mois ; Saluant, également, les efforts accomplis par le Gouvernement pour réorienter la politique de l'Union européenne, afin que la définition des politiques communautaires prenne davantage en considération le critère de l'emploi ; Considérant, dans ces conditions, que la présentation de la proposition de directive susvisée concrétise le succès de cette démarche et qu'elle offre des perspectives intéressantes dans le cadre de la lutte contre le chômage ; Considérant, en effet, que cette proposition de directive permet d'envisager l'adoption rapide de mesures fortes en matière de baisse de la TVA ; Considérant qu'il pourrait être opportun de viser, dans ce cadre, certains services rendus aux personnes, qui répondent aux conditions posées par la Commission européenne, compte tenu de la sensibilité de ce marché aux prix et de ses importantes perspectives de développement ; Considérant, néanmoins, qu'une baisse de la TVA sur ces prestations ne peut être envisagée sans que soit préalablement mesuré le risque d'éviction qu'une progression de la présence des entreprises sur ce marché pourrait exercer sur l'offre associative ; Considérant que les travaux de réparation et de rénovation d'immeubles anciens à usage d'habitation constituent également des prestations de services à forte intensité de main-d'_uvre, et que leur assujettissement au taux réduit de la TVA serait une mesure socialement juste et significative en termes de soutien à l'activité et pourrait favoriser une réduction du travail dissimulé ; Demande au Gouvernement : 1. d'oeuvrer pour que le Conseil de l'Union européenne adopte, dans les meilleurs délais, cette proposition de directive, afin que le taux réduit de la TVA puisse effectivement être appliqué à certains services à forte intensité de main d'oeuvre à compter du 1er janvier 2000 ; 2. de faire en sorte que l'exigence d'une majorité qualifiée soit substituée à celle d'une décision unanime en ce qui concerne l'autorisation que le Conseil est appelé à donner pour qu'un Etat puisse appliquer le taux réduit de la TVA à un service à forte intensité de main d'_uvre ; 3. de préserver la liberté fiscale des Etats membres en leur accordant la possibilité de revenir, à tout moment, sur un éventuel assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services à forte intensité de main d'_uvre, y compris au cours de la période allant du 1"`janvier 2000 au 3 1 décembre 2002 ; 4. de mesurer avec soin les effets qu'un assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services rendus aux personnes pourrait exercer sur l'offre associative, avant d'envisager de mettre en _uvre une telle mesure dans le cadre de l'expérimentation proposée par la Commission européenne ; 5. d'informer la Commission européenne, avant le le' septembre 1999, que la France envisage, dans la mesure où les marges de manoeuvre budgétaires le permettront, de soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finances, les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, au taux réduit de la TVA. _____________ |
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