Document

mis en distribution

le 30 mai 2000

   

N° 2424

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 mai 2000

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la proposition de directive du Conseil établissant un cadre général relatif à l'information et à la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne

(COM [1998] 612 final / n° E 1182)

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement)

PRÉSENTÉE,

en application de l'article 151-1 du Règlement,

par M. Gaëtan GORCE

Rapporteur de la Délégation

pour l'Union européenne,

Député.

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Voir le numéro : 2423.

Travail.

EXPOSE DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Droit fondamental au sens de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, l'information et la consultation des travailleurs revêtent aujourd'hui une importance particulière à plusieurs titres.

Elles constituent, d'abord, un moyen d'assurer à l'égard des salariés un minimum de transparence concernant les décisions des entreprises ou des services auxquels ils appartiennent.

Elles permettent, en deuxième lieu, de leur garantir d'être associés à certaines décisions, notamment celles qui peuvent avoir des conséquences directes sur leurs conditions de travail ou leurs perspectives d'emploi.

Ces droits sont également un outil privilégié pour favoriser le dialogue social dans les entreprises, voire dans les administrations publiques.

Ils constituent un moyen de prévenir ou de combattre certains inconvénients de la mondialisation, tels que les délocalisations, les restructurations ou les fusions d'entreprises qui ne tiennent pas suffisamment compte des conséquences sociales négatives qu'elles entraînent.

Ils présentent donc l'avantage de contribuer à la lutte contre certaines formes de dumping social, consistant, pour les entreprises, soit à prendre des libertés avec le droit, soit à adopter des décisions de délocalisation, de restructuration ou de fusion pour échapper à des contraintes liées à la réglementation sociale ou au coût du travail.

Enfin, l'information et la consultation des salariés permettent de faciliter leur capacité d'anticipation et d'adaptation au regard des besoins de l'économie. Elles peuvent favoriser un accès à la formation professionnelle plus large et mieux adaptée. De ce fait, elles contribuent à accroître le niveau de qualification et la motivation des salariés et, par là même, la compétitivité des entreprises ou des administrations.

La Communauté européenne a, depuis trente ans, pris plusieurs mesures pour en favoriser l'application. En témoignent notamment les directives 75/129/CE du 17 février 1975 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs, 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements, et 94/45/CE du Conseil du 22 septembre 1994 concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises et les groupements d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs.

Pourtant, malgré les effets positifs de ces mesures, la réglementation communautaire demeure insuffisante. Si elle fixe des obligations dans certains cas déterminés, comme les licenciements collectifs, elle n'offre pas un cadre général. Par ailleurs, elle n'assure pas une information suffisamment précoce des salariés pour toutes les décisions pouvant avoir des conséquences directes sur leurs conditions d'emploi. Elle ne garantit pas non plus que les violations du droit dans ce domaine donnent lieu à des sanctions suffisamment dissuasives.

C'est précisément ces lacunes que la proposition de directive susvisée tend à combler.

Compte tenu de l'importance du sujet, l'Assemblée nationale ne saurait y être indifférente. D'autant que si cette proposition appelle de sa part un vif soutien, elle pourrait être améliorée sur plusieurs points.

Le dispositif pourrait, en effet, être applicable à un plus grand nombre d'entreprises et prévoir une information et une consultation sur d'autres sujets que ceux retenus, tels l'évolution prévisible des rémunérations ou des conditions de travail. De même, pourrait-il contenir l'obligation, pour les Etats membres, de prendre des mesures équivalentes pour les agents des administrations publiques et donner lieu à une évaluation approfondie dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur.

Tels sont les éléments du débat qui motivent le dépôt de la présente proposition de résolution, que la Délégation vous demande, en conclusion de son rapport d'information (n° 2423), de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE RESOLUTION

Article unique

L'Assemblée nationale,

    - Vu l'article 88-4 de la Constitution,

    - Vu la proposition de directive du Conseil établissant un cadre général relatif à l'information et à la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne (COM [1998] 612 final / n° E 1182),

    - Considérant l'importance que présente l'information et la consultation des travailleurs en termes de transparence pour les salariés, d'association de ceux-ci aux décisions des entreprises - voire des administrations -, de dialogue social, de capacité à combattre les inconvénients liés aux délocalisations, restructurations ou fusions d'entreprises, et d'accroissement du niveau de qualification des salariés et de compétitivité des entreprises ;

    - Considérant que la réglementation communautaire demeure incomplète dans ce domaine, qu'elle n'assure pas une information suffisamment précoce des salariés pour toutes les décisions susceptibles d'avoir des effets directs sur leurs conditions d'emploi et qu'elle ne garantit pas que les violations du droit donnent lieu à des sanctions suffisamment dissuasives en la matière ;

    - Considérant que la proposition de directive susvisée offre un cadre général tendant à remédier à ces lacunes ;

    - Considérant, cependant, que le seuil de 50 salariés envisagé pour l'application de ce texte reviendrait, selon la Commission, à soumettre seulement 3 % des entreprises de l'Union européenne à ce dispositif ;

    - Considérant, par ailleurs, que l'information et la consultation devraient également porter sur des éléments aussi importants que la situation et l'évolution prévisible des rémunérations, des conditions de travail - notamment en matière d'hygiène et de sécurité -, de l'aménagement du travail, de la formation et de la promotion professionnelles ;

    - Considérant, en outre, qu'on gagnerait, ne serait-ce que pour des motifs d'équité, que ce dispositif ne bénéficie pas seulement aux entreprises, mais donne lieu à des mesures équivalentes pour les agents des administrations publiques ;

    - Considérant, enfin, que l'importance du dispositif proposé justifierait, de préférence à un simple examen par la Commission, une évaluation de son application par un ou plusieurs organismes indépendants dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur ;

    1. Approuve la proposition de directive susvisée sous les réserves suivantes ;

    2. Demande au Gouvernement d'obtenir que :

    - le dispositif d'information et de consultation envisagé s'applique à un nombre plus important d'entreprises et, si possible, à celles d'au moins 20 salariés, plutôt qu'à celles d'au moins 50 travailleurs ;

    - l'information et la consultation concernent la situation et l'évolution prévisible des rémunérations, des conditions de travail - notamment en matière d'hygiène et de sécurité -, de l'aménagement du travail, de la formation, de la promotion professionnelle, de la parité entre les hommes et les femmes et de l'association des salariés aux résultats des entreprises ;

    - le dispositif prévoie que les Etats membres devront prendre des mesures équivalentes pour les administrations publiques ;

    - le texte donne lieu à une évaluation de son application par un ou plusieurs organismes indépendants dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur, plutôt qu'un simple examen par la Commission.

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