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La place du Palais Bourbon

 

Selon un plan conservé au musée Condé à Chantilly, les architectes de la duchesse de Bourbon avaient déjà pensé à une place en forme de triangle devant le palais alors en construction ; il s'agissait, en réalité, d'élargir en éventail la rue de Bourgogne pour mieux dégager l'entrée du palais. Le projet n'eut pas de suite.

En 1769, le prince de Condé procédait à l'acquisition des terrains qui étaient nécessaires à la réalisation d'une place dans le double objectif de mettre en valeur son palais, mais aussi de spéculer en réalisant une opération immobilière. Il obtint du roi les lettres patentes à cet effet en 1775.

Plusieurs projets précédèrent le choix définitif, mais tous supposaient le redressement de la rue de Bourgogne à partir de la rue Saint-Dominique dans l'axe de l'entrée du palais.

Le premier, conçu par Bellisard en 1776, consistait en une place semi-circulaire bordée d'immeubles dessinés sur le modèle des pavillons encadrant le portail du palais.

Le second, élaboré par Leroy en 1782, repoussait l'arc de cercle au-delà d'une première partie en forme de quadrilatère. L'augmentation consécutive de la longueur des façades entraînait une diminution de la hauteur des immeubles. Ce plan figurait dans un acte de vente de terrains passé par Condé en 1782, comme devant être respecté.

Les transactions immobilières s'éternisaient. Les premières constructions commencèrent à l'est en 1788, en mars 1789, deux hôtels seulement étaient achevés. Condé, ayant émigré dès le 15 juillet, ne pouvait plus imposer son plan en arc de cercle aux constructeurs qui y substituèrent une forme trapézoïdale, plus simple, plus facile à réaliser, donc plus économique.

Tous les hôtels étaient construits en 1804.

Entre temps, le palais avait été confisqué comme bien d'émigré en 1791 et les scellés avaient été apposés l'année suivante. En 1794, la place devint celle de la Maison de la Révolution. La Convention finissante avait décidé de placer le Conseil des Cinq-Cents au Palais Bourbon et, avant même cette installation, la place était nommée « place du Conseil des Cinq-Cents ».

Après le coup d'État de Brumaire, Bonaparte maintint le Corps législatif au palais Bourbon et la place devint celle du « Corps législatif » jusqu'à la Restauration, époque à laquelle elle reprit son nom originel, « place du Palais Bourbon ».

Quant à un éventuel décor, il n'en est jamais fait mention. En effet, la raison d'être de cette place était la mise en valeur du palais par le dégagement de son entrée ; il n'était donc pas concevable de l'obstruer par un monument.

La Révolution ne s'était préoccupée que de la décoration intérieure du palais des Cinq-Cents, qu'elle n'avait pu assurer que grâce à des prélèvements sur l'ensemble sculptural des jardins de Marly.

L'Empire s'était employé à donner un aspect monumental à la façade du côté de la Seine, pour l'arrivée du souverain au palais lors de l'ouverture de la session, et avait délaissé la place.

En revanche, la construction, en 1832, des trois salons précédant le nouvel hémicycle, dont l'un en forme de vestibule de temple antique, avait reporté l'entrée royale, donc principale, sur la place.

La statue de La Loi

Dans l'édition de 1845 du Voyage autour de la Chambre des députés par un Slave, qui signera Tanski l'édition de 1847, il est écrit : « Avant d'entrer sur la place du Palais-Bourbon, vous remarquez un beau piédestal sur lequel devait être érigée la statue équestre de Louis XVIII ; on ne sait à quel heureux mortel, prince, héros, législateur ou souverain est réservée la place de l'auteur de la Charte de 1814. »

Il faudrait conclure de cette formulation que le projet de placer une représentation de Louis XVIII avait été abandonné. Avait-il été conçu sous la Restauration ? A l'évidence non, car Louis XVIII, qui avait adopté le cérémonial mis au point par Napoléon pour l'ouverture de la session, empruntait l'entrée de la nouvelle façade ; quant à Charles X, considérant sans doute qu'un roi de droit divin ne se déplaçait pas, il convoquait les Chambres au Louvre.

Ce projet s'inscrit mieux dans la stratégie politico-historique de réconciliation nationale adoptée par Louis-Philippe.

Dans sa notice du musée impérial de Versailles, Soulié confirme que la statue d'Astyanax-Scevola Bosio, représentant Louis XVIII assis sur son trône et tenant la Charte, "devait être exécutée pour la place du Palais Bourbon à Paris." Une figure assise était, en effet, plus en harmonie avec les proportions de la place. En outre, était-il bienséant de représenter un roi podagre à cheval ? En 1845, un socle vide s'élevait donc au milieu de la place.

Dès le 18 mars 1848, le Gouvernement provisoire lançait un "concours pour la figure peinte et la figure sculptée de la République française". Le 27 avril, l'exposition des esquisses était ouverte. Le jury des esquisses sculptées se réunissait les 18 et 24 mai pour en choisir dix parmi lesquelles celle de Jean-Jacques Feuchère, qui fut chargé d'en exécuter le grand modèle en plâtre.

Il ressort de la description de l'exposition, parue dans L'Illustration du 13 janvier 1849, que cette oeuvre correspond à celle figurant sur la photographie de la place du Palais Bourbon, prise par Marville en 1852. Elle aurait donc été placée sur le socle vide, puis remplacée par la statue en marbre, commandée à Feuchère le 13 février 1849 pour figurer La Constitution, qu'il termina en 1852 et qui ne fut érigée qu'en 1855 sous le nom de La Loi, intitulé moins contraignant pour le nouveau régime ! L'accent est mis sur l'ordre ainsi que le montre la posture assise, la gravité et la coiffure végétale. Dans la main gauche de la statue : le sceptre avec main de justice ; dans la main droite les tables gravées évoquent la Loi.

Charles Marville

Place du Palais Bourbon, 1852

© BnF

Les aménagements récents

À l'initiative de M. le Président de l'Assemblée nationale, la Ville de Paris a procédé, entre avril et octobre 2000, au réaménagement de la place et de ses abords, c'est à dire de la place Édouard Herriot, des rues Aristide Briand, de l'Université et de Bourgogne. Afin qu'elle retrouve son caractère historique et prestigieux, la place du Palais Bourbon a été transformée en zone semi-piétonne, l'éclairage a été amélioré et harmonisé et le stationnement aux abords de l'Assemblée limité.

La statue de La Loi a été restaurée à l'automne 2001.

La loi. Feuchère

Etat actuel

© Assemblée nationale