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Ouverture des Assises sur l'avenir de l'Europe
à l'Assemblée nationale - salle Victor Hugo - le mercredi 7 novembre 2001

Allocution de M. Raymond FORNI,

Président de l'Assemblée nationale

Monsieur le Ministre,

Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues,

Mesdames et messieurs,

Je suis très heureux de vous accueillir nombreux, ce matin, à l'Assemblée nationale, pour ouvrir avec vous ces Assises sur l'avenir de l'Europe.

L'initiative en revient très largement à Alain BARRAU, Président de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale, que je salue amicalement. Cette initiative, j'ai voulu la soutenir, pour qu'elle soit une contribution de notre Assemblée à la réflexion de notre pays sur l'avenir de l'Europe, en même temps qu'un moment important du débat démocratique sur ces questions.

Par ces Assises, notre Assemblée prend part à la réflexion nationale sur l'avenir du continent.

Voici près d'un an, en décembre 2000, les chefs d'Etat et de gouvernement, réunis à Nice, ont souhaité que cette réflexion collective s'organise dans chacun des Etats membres de l'Union européenne.

En France, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, ce débat s'est engagé, sous l'impulsion de Pierre MOSCOVICI, ministre chargé des affaires européennes. Les Français ont pu s'exprimer dans le cadre d'une vingtaine de forums régionaux sur l'Europe, depuis celui de Nantes, le 2 juillet dernier, à celui qui s'est tenu à Rennes, le 29 octobre.

Au-delà du travail essentiel de réflexion et de contrôle qu'accomplit la délégation pour l'Union européenne, au travers des rapports qu'elle prépare, des résolutions qu'elle adopte sur les propositions de textes européens, l'Assemblée nationale devait s'impliquer avec plus de force dans ce débat.

Parce que l'Europe est le pain quotidien non seulement des députés spécialisés dans les questions européennes, mais encore de la grande majorité de nos collègues parlementaires : une part prédominante de la législation nationale, - de la loi que nous élaborons ici au nom du peuple français - traduit le droit communautaire, en émane, ou subit son influence.

Parce que l'avenir de l'Europe est aussi celui, immédiat, de notre patrie. François MITTERRAND avait coutume de dire que « La France est ma patrie, l'Europe est son avenir ». Que de chemin parcouru depuis ! - notamment grâce à des hommes comme lui, Européens engagés qui ont su peser sur le destin collectif de nos peuples. Aujourd'hui, pour nous, l'Europe n'est pas un « avenir » encore lointain, un horizon un peu vague et indécis : c'est demain. Car demain, en 2002, nous aurons dans nos mains, dans nos poches l'euro. Après-demain, en 2003, nous verrons se former une première force armée européenne. Et un an plus tard, en 2004, nous verrons au seuil de l'Union des pays qui nous demandent de réunifier le continent, de refermer définitivement la longue parenthèse de l'Histoire que fut l'Europe des blocs.

L'Assemblée nationale devait enfin prendre sa part de ce débat, parce que ces changements qui s'annoncent, sont, par essence, « constitutionnels ». Les mots de « constitution européenne » ne sont d'ailleurs plus un tabou - depuis que le Président de la République, Monsieur Jacques CHIRAC, les a prononcés. C'est sans doute que nous avons pris conscience que ces étapes nouvelles appellent une refondation de l'Union européenne. L'Europe restera encore longtemps, j'en suis personnellement convaincu, une construction sans équivalent, ne répétant aucun précédent, ni Fédération, ni Confédération. Car les nations qui la composent ne veulent pas s'y fondre et s'y perdre. Mais l'élargissement, le besoin d'une Europe forte, apte à contribuer à l'édification d'une régulation mondiale, la recherche de la sécurité de notre continent, et l'irruption brutale, depuis le 11 septembre, de nouveaux risques nous appellent à renouer le pacte qui unit les uns aux autres les Européens.

Au travers de vos débats de ce jour, sur les priorités de l'Europe, sur les institutions dont elle a besoin, sur les principes qui la fondent, c'est bien la future « constitution » de l'Europe que vous vous efforcerez de dessiner.

C'est pourquoi ces Assises doivent exprimer la vitalité du débat démocratique sur l'Europe.

Certes, nous ne prétendrons pas que vous formez une nouvelle « Constituante » européenne. Il faudrait pour cela que vous soyez les représentants élus dans ce but, par le suffrage universel, de l'ensemble des peuples d'Europe.

Mais nous avons cherché, au travers de ces Assises, à explorer des nouvelles formes de démocratie participative.

Etudiants, membres d'associations, syndicalistes, politiques, engagés aussi bien en France qu'à l'échelon européen, vous représentez par votre diversité la pluralité des opinions qui prévalent, dans notre pays, sur l'Europe.

Un forum Internet est ouvert, depuis le mois de juin dernier, sur le site de l'Assemblée nationale. Vous avez répondu nombreux au questionnaire qu'il propose. Vos réponses sont parfois surprenantes ou provocantes. Vous étiez par ailleurs invités à formuler vos propres questions, à tracer votre vision personnelle de l'avenir de l'Europe. Les résultats de cette consultation ont fait l'objet d'une synthèse qui vous a été remise et qui nourrira vos discussions.

Nous avons voulu faire de ces Assises le lieu d'un débat libre et ouvert. Les tables rondes qui vous sont ouvertes ne visent pas à apporter des réponses définitives aux questions qui se posent. Il s'agit d'entendre tous les points de vue, de faire naître la discussion, de soulever des questions qui vous paraîtraient insuffisamment traitées.

Trop souvent, le sentiment prévaut que, dans ces débats publics, les réponses sont connues d'avance, que les conclusions sont écrites avant même que la discussion ne s'engage.

Aujourd'hui, rien n'est gravé, par avance, dans le marbre. Nous attendons beaucoup de votre participation. Elle se prolongera, demain, dans une séance solennelle qui permettra à la fois de procéder à une première synthèse de vos travaux, et de conduire un débat plus direct entre les élus et les citoyens.

Je vous invite donc à vous exprimer très librement : c'est à cette condition seulement que nous pourrons conclure, demain, ensemble, au plein succès de ces Assises.