Accueil > Archives de la XIe législature > Discours de M. Raymond Forni, Président de l'Assemblée nationale

Hommage solennel à André Angot
Hémicycle - mercredi 9 janvier 2002

Discours de M. Raymond Forni,

Président de l'Assemblée nationale

Monsieur le Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Mesdames et Messieurs les députés, mes chers collègues,

Mesdames, Messieurs,

Madame,

Aujourd'hui, par ma voix, la Représentation nationale rend hommage à un héritier du Gaullisme qui, avec discrétion et simplicité, avait choisi de devenir un fidèle serviteur de la République.

Le 20 novembre dernier, à l'âge de cinquante-quatre ans, André Angot nous a quittés. Sur les bancs de cet hémicycle, la tristesse fut unanime. A l'annonce de cette nouvelle, les clivages politiques s'effacèrent pour laisser place à une émotion sincère. Nous avons perdu l'un des nôtres : l'un de ces hommes qui a décidé de consacrer sa vie à l'intérêt de son pays, par le respect des principes chers à son coeur et par la défense de ses convictions.

André Angot avait fait ce choix par humanisme et générosité. Elu de ces terres bretonnes que l'on dit parfois un peu rudes, sa gentillesse, sa disponibilité et son attention aux autres lui avaient permis de conquérir le respect et la confiance de ses concitoyens.

D'origine normande, né dans le département de la Manche, il fut accueilli par la Bretagne voisine pour préparer au prestigieux lycée Chateaubriand de Rennes le concours d'entrée de l'Ecole vétérinaire. Il en sortira premier. A Maisons-Alfort, pendant cinq années, il fut à nouveau un étudiant d'exception, assidu et travailleur, dont les efforts furent légitimement récompensés puisqu'il sortit major de sa promotion. André Angot était cet homme vif, brillant, dont l'exigence et la rigueur apparurent comme le prolongement naturel d'indéniables qualités intellectuelles.

Armé de son diplôme, le jeune vétérinaire prit la décision de partir apprendre son métier là où il est sans doute le plus dur, mais où ses compétences seraient aussi les plus précieuses : dans le canton de Briec, sur des terres agricoles, au coeur de sa Bretagne d'adoption.

Il fut rapidement séduit par ce milieu rural, dont il appréciait tant la franchise et la simplicité. Il se prit d'affection pour cette terre sauvage, ouverte sur l'océan. A arpenter les routes cantonales et départementales à longueur de journée, d'une exploitation agricole à l'autre, André Angot suscita le respect et la confiance de tous.

Son souci des autres et son sens de l'intérêt général le conduisirent rapidement à prendre part à la vie de la cité, sans pour autant rêver de grande carrière politique, ou de destin national. Présent sur les listes comme simple conseiller municipal, il fut désigné en 1983 Premier magistrat de la commune d'Edern, sur une décision unanime du conseil, alors qu'il n'était même pas candidat au fauteuil de Maire. Homme de responsabilité, il acceptera cette charge comme un devoir, mais surtout, et d'abord, comme un honneur. Il s'acquittera de sa tâche de façon exemplaire, et sera réélu sans difficultés lors des scrutins de 1989, 1995 et de 2001.

Ce premier mandat municipal fut pour lui l'occasion d'éprouver ce bonheur empreint de fierté qu'accompagne l'exercice d'une responsabilité politique. Servir sa commune et ses habitants était pour cet homme discret et réservé la plus belle façon de leur rendre hommage, et de leur exprimer son attachement.

En 1988, il se présenta aux élections cantonales de Briec, sans l'investiture officielle des instances départementales de sa famille politique, mais avec le soutien d'un grand nombre de ses concitoyens. Il fut élu conseiller général, puis réélu en 1994 avec une très large majorité, et en mars 2001, à nouveau, avec plus de 60 % des voix.

Son action pour le canton fut le meilleur de ses discours. Il favorisa l'implantation d'une zone industrielle florissante aux environs de Briec, tout en prenant des mesures énergiques pour faciliter la croissance de la population. Car il était convaincu que le dynamisme économique ne pouvait exister localement sans essor et vitalité démographiques.

En 1993, face à de tels succès, il reçut l'investiture naturelle de son parti pour se présenter comme candidat aux élections législatives, à Quimper, dans la première circonscription du Finistère, où sans attendre il fut élu, puis réélu en 1997.

En franchissant avec fierté les portes du Palais Bourbon, André Angot découvrit les joies, les difficultés parfois, mais surtout la grande noblesse du métier de parlementaire. Membre de la Commission des échanges et de la production, il mit sa solide formation scientifique et son expérience de vétérinaire au service de la loi. Il devint un spécialiste écouté et respecté des problèmes de sécurité alimentaire, à un moment où ces questions commençaient à préoccuper fortement nos concitoyens.

En 1999, il fut l'attentif Vice-président de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la transparence et la sécurité sanitaire de la filière alimentaire en France. L'année dernière, il fut nommé Secrétaire de la commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), et les enseignements de la crise en terme de pratiques agricoles et de santé publique. Sur tous ces sujets, il intervint aussi à plusieurs reprises, lors des séances de questions d'actualité, et contribua ainsi à faire vivre le débat public et à animer nos discussions.

Mais il s'engagea aussi fortement sur les questions de sécurité maritime. Passionné de sports nautiques, marin averti qu'on pouvait parfois croiser, l'été, au large des Îles de Glénan, il avait été profondément meurtri par le naufrage de l'Erika et ses dramatiques conséquences sur les plages du littoral breton. Il avait choisi de prendre la défense de cette terre de Bretagne s'ouvrant sur l'océan qui, de nombreuses années auparavant, l'avait accueilli avec tant de chaleur et de sincérité.

Il fut un homme d'une intégrité et d'une détermination exemplaires, comme le fut son courage face à la maladie. Affaibli, il continuait d'être fidèle à ses concitoyens, en se rendant quotidiennement à sa mairie ou à sa permanence parlementaire. Il ne voulut jamais trahir la confiance qu'ils lui avaient témoignée. Ce fut son honneur ; ce fut sa fierté.

Mesdames et messieurs, chers amis, en pensant avec affection à ses proches, à sa famille, à son épouse Marguerite, comme à ses enfants Nathalie et Stéphane, à qui j'adresse les condoléances émues de notre Assemblée, je vous demande de bien vouloir vous recueillir à la mémoire d'André Angot.