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Conférence des parlements de l'Union européenne contre le blanchiment
à l'Assemblée nationale le vendredi 8 février 2002

Discours de Monsieur Raymond Forni,

Président de l'Assemblée nationale

Monsieur le Premier ministre,

Messieurs les Présidents,

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Mesdames, Messieurs,

Je suis heureux d'ouvrir cette dernière journée de la Conférence européenne sur le blanchiment et d'accueillir à cette occasion Monsieur le Premier ministre, Lionel JOSPIN, ainsi que les Présidents des Parlements de Grèce et du Portugal.

Nous avons voulu mobiliser les Parlements de l'Europe et vous êtes venus nombreux puisque sont réunis aujourd'hui les parlementaires de 33 assemblées venant de 25 Etats membres de l'Union européenne et de pays candidats à l'adhésion, sans compter le Parlement européen. Il nous a paru en effet intéressant que des pays, désireux de nous rejoindre au sein de l'Union européenne, nous fassent part dès aujourd'hui des engagements qu'ils seraient prêts à prendre dans ce domaine. De même nous nous réjouissons de la présence de la Fédération de la Russie qui, il y a quelques jours, a adopté une loi importante contre le blanchiment.

Je tiens à rendre hommage au travail accompli par l'ensemble des délégations et des experts européens depuis trois mois lors des deux réunions du comité de pilotage. Les fructueux échanges qui se sont noués hier ont permis de parachever le texte qui vous est aujourd'hui proposé en tenant compte le plus largement qu'il nous a été possible de vos suggestions.

Pourquoi sommes-nous ici ? Parce que le blanchiment est une maladie de nos démocraties et qu'elle affecte depuis trop longtemps notre vie économique. Cette perversion des circuits financiers internationaux facilite le développement d'une criminalité grave liée aux fraudes, au trafic de drogue, aux activités mafieuses, à la corruption... Les attentats du 11 septembre ont en outre provoqué une prise de conscience internationale de l'urgence à lutter contre le terrorisme et son financement qui a parfois recours à des circuits identiques et des méthodes semblables. Combattre le blanchiment, c'est donc aussi combattre le terrorisme.

Ce combat nécessite des mesures fortes. Il ne s'agit pas seulement de traquer quelques centaines de comptes suspects, mais de réexaminer plus globalement les règles qui régissent les mouvements internationaux de capitaux.

Les chiffres montrent l'ampleur du mal et de la tâche : l'argent sale représente plus de 500 milliards de dollars ; les paradis fiscaux drainent plus de la moitié des avoirs détenus hors frontière. On y recense plus de 4 000 banques off shore et plus de 2 millions de sociétés écran.

Face à cette menace, nous, parlementaires, devons jouer pleinement notre rôle, aux côtés des gouvernements, de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Qu'il s'agisse de ratifier dans les meilleurs délais des conventions internationales ou d'élaborer des règles propres et compatibles entre elles au sein de l'Union, c'est dans nos assemblées que s'élabore cet instrument essentiel de la lutte contre le blanchiment : la LOI.

(Notre démarche s'inscrit dans la ligne du sommet de Laeken qui a réaffirmé les engagements pris à l'égard des orientations politiques et des objectifs défendus à Tampere mais qui soulignait aussi que de nouvelles impulsions étaient nécessaires. Cette Conférence en est l'illustration.

Ce même sommet demandait que les décisions prises par l'Union européenne soient rapidement transposées dans le droit national et que les conventions conclues depuis Maastricht soient ratifiées sans retard. Notre réunion de Parlements nationaux a permis de s'interroger sereinement et franchement sur ces retards.)

Nous, Européens, devons être en ce domaine des pionniers. Car nous avons notre part de responsabilité. L'Europe est le lieu de plus de la moitié du blanchiment direct ou indirect des capitaux, dans ses frontières immédiates ou dans les territoires qui dépendent d'elle. Nous ne pouvons plus traiter ces problèmes de façon isolée. Ces sujets exigent que soient dépassés les clivages politiques traditionnels. Ils doivent être appréhendés avant tout au niveau européen avec le souci de bâtir le consensus le plus large : la diversité des interventions, dont nous avons bénéficié depuis le début de nos travaux, le démontre assez. Nous pourrons ensuite en parlant d'une seule voix nous tourner vers les autres pays et organisations multilatérales afin de forger ensemble, dans ce domaine, les instruments d'une nouvelle régulation.

Nous avons besoin d'un socle de mesures touchant tous les secteurs et tous les acteurs concernés par le blanchiment. C'est pourquoi, à tous ceux qui le voudront nous proposons aujourd'hui d'être dans leurs Parlements et dans leur pays, les porte-parole de ce message exigeant que constitue la Déclaration de PARIS sur le blanchiment. Nous proposons aussi, comme l'a suggéré la délégation néerlandaise, de nous donner rendez-vous pour évaluer l'impact de ces engagements sur nos politiques nationales.

Mesdames, Messieurs,

L'assemblée, nombreuse, que vous formez aujourd'hui le démontre : nous avons eu raison de parier sur la détermination des plus engagés des parlementaires de l'Union européenne - et de la « Grande Europe ». C'est par cet engagement de chacun que nous pourrons ensemble traduire en actes l'ambition que nous affirmons aujourd'hui.