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19/10/2004 - Discours de Monsieur Jean-Louis DEBRÉ - Président de l'Assemblée nationale lors de la remise des Rubans du Développement durable

Maison de la Chimie, le 19 octobre 2004

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président du Directoire Dexia-Crédit local
Chers Collègues,
Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi de vous dire combien je suis heureux d'assister à cette seconde édition des Rubans du développement durable.

Nous nous retrouvons aujourd'hui pour récompenser onze collectivités sélectionnées à juste titre pour leur engagement et leurs projets audacieux en faveur du développement durable.

Cette cérémonie revêt incontestablement, au delà du plaisir qu'il y a à honorer des collectivités innovantes, une vertu pédagogique ; une vertu qu'il nous faut conforter dans l'espoir d'encourager de futurs lauréats dans des démarches qui sont encore trop souvent difficiles à mettre en œuvre.

Le développement durable est pourtant l'affaire de tous. C'est l'affaire du législateur, certes, et de l'Etat en général. Nous venons par exemple d'achever ces jours-ci à l'Assemblée nationale la seconde lecture du projet de loi sur les territoires ruraux. Ce projet de loi comporte des mesures importantes pour des pratiques agricoles plus respectueuses, pour la préservation des zones humides. Il permet aussi une approche dépassionnée du dossier « chasse ». Il encourage les biocarburants et protège aussi davantage nos forêts et nos montagnes. Mais, on ne peut s'en remettre à la seule détermination des pouvoirs publics. Au delà des objectifs chiffrés et des programmes d'action définis par le gouvernement, c'est un changement de comportement de chaque citoyen dans sa vie quotidienne. Nous sommes devant un enjeu de proximité et de persuasion.

Ce sont précisément les élus locaux qui représentent le mieux cette proximité !

Votre proximité avec les préoccupations environnementales de nos concitoyens constitue un atout indéniable :

- dès lors qu'il nous revient de réagir souvent, hélas, sur le front des catastrophes écologiques (inondations, pollutions diverses)

- dès lors qu'il nous revient aussi et principalement d'AGIR pour anticiper, prévenir et répondre à des normes de plus en plus contraignantes.

Nous avons déjà lourdement payé le prix d'une certaine lucidité. La seule mode qui vaille à mes yeux est celle de la prise de conscience, enfin, de la nature des enjeux. Et quand il s'agit de notre environnement, par définition unique et aux équilibres précieux, rien n'est jamais simple, surtout quand il faut révolutionner les mentalités et les comportements.

On ne peut pas prétendre s'occuper sérieusement d'environnement en appliquant sa « petite idée », chacun dans son « petit coin ». Le grand mérite des Rubans du développement durable est de nous faire comprendre cela. Je le redis : additionner des petites idées ne forme pas une grande pensée.

Un seul exemple : celui du climat. La ville de Chalon sur Saône va d'ailleurs être récompensée pour son plan municipal de lutte contre l'effet de serre. Le protocole de Kyoto prévoit l'ouverture de négociations en 2005 pour de nouveaux engagements de réduction après 2012.

La 10ème Conférence de l'ONU sur le climat va bientôt s'ouvrir en décembre prochain à Buenos-Aires. L'un des enjeux de ces négociations internationales sera la participation à la lutte contre le réchauffement climatique de pays émergents, comme la Chine, ainsi que celle du premier pollueur de la planète, les Etats-Unis, qui ont rejeté Kyoto. Je salue à ce propos la récente décision de la Russie qui vient de ratifier, elle, le protocole de Kyoto.

Pour atteindre l'objectif fixé à Kyoto, les émissions mondiales des gaz à effet de serre devront être réduites de plus de 50%, estime la présidence néerlandaise de l'Union européenne qui souligne la nécessité d'agir dans de nouveaux secteurs comme les transports maritime et aérien.

Les efforts à faire restent considérables mais les mentalités en France sont aujourd'hui mûres pour le changement !  Votre présence et votre implication personnelle sur le terrain le prouvent.

Je prends un autre exemple : le salon mondial de l'automobile vient de fermer ses portes. Nous avons tous remarqué l'offensive et le succès des « voitures propres ». Le 20 septembre dernier, le gouvernement français a débloqué les premiers crédits du « plan véhicule propre » : 40 millions d'euros sur deux ans en faveur de la Recherche sur les technologies plus respectueuses de l'environnement.

Menacée d'être bannie des centres villes, pointée du doigt, chahutée par des normes antipollution de plus en plus sévères, la voiture est en train de prendre et doit prendre le virage de l'environnement car la hausse des gaz à effet de serre s'est accélérée, ces deux dernières années, à un rythme inédit et inquiétant !

Pour les experts qui ont rédigé, à la demande du gouvernement, l'avant-projet du Plan national santé environnement, « 7 à 20% des cancers seraient imputables à des facteurs environnementaux ». Il ne s'agit pas d'effrayer les populations, il s'agit simplement d'évaluer les risques pour mieux les combattre.

Ce besoin vital et cette utilité du diagnostic, on les retrouve à la base de chacun de vos projets, Mesdames et Messieurs.

C'est ce même besoin qui m'a conduit à proposer la création, à l'Assemblée nationale, d'une mission d'information sur les conséquences environnementales et sanitaires des autorisations d'essais des OGM. Sur ce dossier des OGM, les élus locaux se trouvent, la plupart du temps, confrontés au fait accompli alors même que des signes alarmants soulignent le caractère fragile des connaissances scientifiques. Au delà d'un certain nombre d'éléments qui font consensus, comme l'étiquetage et la traçabilité, la transparence des procédures, la poursuite de la Recherche en biotechnologies, je forme le vœu que cette mission d'information sur les OGM réponde dans la sérénité et sans brouhaha médiatique, à une préoccupation croissante chez nos concitoyens.

Mesdames et Messieurs, chers Amis,

Je conclus mon propos avec la portée très symbolique du prix Nobel de la paix de cette année.

C'est en plantant un tulipier d'Afrique dans sa ville natale de Nyeri, au pied du Mont Kenya, que Wangari Maathai a célébré son prix Nobel de la paix. Wangari Maathai est la première femme africaine à remporter le Nobel de la paix pour s'être battue, depuis trente ans, contre la déforestation et la corruption. Dans sa région d'origine, sur les pentes du Mont Kenya, la déforestation cause régulièrement des glissements de terrains meurtriers à la saison des pluies. Avec son « Mouvement de la ceinture verte », le nouveau prix Nobel de la paix revendique la création de milliers d'emplois et la plantation, au travers d'associations jumelées, de 30 millions d'arbres en Afrique !

Votre engagement sur le terrain, Mesdames et Messieurs, me fait songer au nouveau prix Nobel de la paix, à ses 3000 pépinières africaines qui fournissent du travail à quelque 80.000 personnes.

Je souhaite vivement que les Rubans du développement durable deviennent, eux aussi, et à leur manière, pour nous tous une pépinière d'idées à répandre.

Je vous remercie.