ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

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RAPPORT D'INFORMATION

présenté à la suite de la mission effectuée au Liban
du 9 au 14 juin 2001

par une délégation du

GROUPE D'AMITIÉ FRANCE-LIBAN(1)

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(1) Cette délégation était composée de M. Gérard Bapt, Président, de MM. Bruno Bourg-Broc, Richard Cazenave, Bernard Charles, Roland Garrigues et de Mme Bernadette Isaac-Sibille.

SOMMAIRE

Introduction 7

I - L'évolution de la situation politique 13

II - Une situation économique fragile 22

III - Le Liban et le processus de paix au Proche-Orient 28

IV - La francophonie au Liban 32

Quelques repères chronologiques de l'histoire institutionnelle et politique du Liban 37

Mesdames, Messieurs,

A l'invitation de la Chambre des députés du Liban, une délégation du groupe d'amitié France-Liban s'est rendue au Pays du Cèdre du 9 au 14 juin 2001.

Elle était conduite par M. Gérard Bapt (S, Haute-Garonne), son président, et composée de MM. Bruno Bourg-Broc (RPR, Marne), Richard Cazenave (RPR, Isère), Bernard Charles (RCV, Lot), Roland Garrigues (S, Tarn et Garonne) et de Mme Bernadette Isaac-Sibille (UDF, Rhône).

Un an après le retrait israélien du Liban-sud, l'accession au pouvoir de Bachar El Assad en Syrie et les élections législatives de l'été dernier, cette mission avait tout d'abord pour objet d'apprécier les évolutions de la situation politique interieure et régionale. A cette fin, la délégation a eu des entretiens avec MM. Emile Lahoud, Président de la République, Rafic Hariri, Président du Conseil, Elie Ferzli, Vice-Président de la Chambre des députés et Président du groupe d'amitié Liban-France et Walid Joumblatt, Président du parti socialiste progressiste. Elle a également rencontré le Patriarche maronite Sfeir, le mufti de la République, cheikh Kabbani et le Vice-Président du Conseil supérieur chiite, cheikh Kabalan.

Elle visait également à mesurer l'effort de reconstruction du pays et les difficultés financières actuelles alors que le Liban négocie un accord d'association avec l'Union européenne et a demandé son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Outre l'exposé général présenté par M. Frédéric Kaplan, conseiller économique et commercial, la mission s'est entretenue avec M. Salah Bouraad, président directeur général de Cellis, filiale de France Telecom et avec le docteur Georges Farah, responsable Moyen-orient des laboratoires Bio Mérieux - Pierre Fabre.

Elle entendait enfin évaluer les perspectives d'avenir de la francophonie au Liban, avant la tenue du sommet francophone à Beyrouth, fin octobre prochain. La délégation a rencontré MM. Alain Fouquet, conseiller de coopération et d'action culturelle, Yves-Alain Corporeau, attaché de coopération éducative et Pierre Devoluy, attaché audiovisuel, ainsi que Mme Michèle de Freige, responsable de Radio-Liban.

Avec le souci d'avoir une vue d'ensemble de la situation du Liban, la mission a visité le site de Baalbek, s'est rendue à Byblos et à Eddé où elle a rencontré les autorités locales ainsi qu'au Liban-sud où elle s'est entretenue avec le responsable de la FINUL et le détachement français, avant de visiter le centre de formation pédagogique et linguistique de Marjayoun puis le nouveau centre culturel de Nabatieh.

A toutes les personnes rencontrées, la délégation exprime sa gratitude pour la cordialité de l'accueil reçu. Elle adresse également ses remerciements à M. Philippe Lecourtier, ambassadeur de France au Liban et à ses collaborateurs qui, par leur compétence et leur courtoisie, ont largement contribué au bon déroulement de sa mission.

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Tout au long de son séjour, la délégation a pu mesurer combien le Liban se prête mal aux interprétations définitives et aux analyses théoriques. Cette exception libanaise tient pour une part à son histoire et à sa géographie.

Terre de passage, pont entre l'Orient et l'Occident, le Liban est aussi, du fait d'un relief montagneux, un lieu de refuge qui fut utilisé notamment par les minorités religieuses, qu'elles soient chrétiennes (maronites) ou musulmanes (chiites et druzes)

En dépit d'une histoire très ancienne, le Liban ne s'est constitué en Etat que très récemment, la proclamation de l'indépendance n'étant intervenue qu'à la fin de l'année 1943. C'est alors que les communautés chrétienne et musulmane passent un accord non écrit destiné à poser les bases d'une vie collective. Par ce « pacte national », le confessionnalisme politique est maintenu et la souveraineté du Liban affirmée.

Si, dans un premier temps, le Liban, dont l'Etat reposait sur un fragile équilibre islamo-chrétien, a connu une période de paix et de prospérité sans être impliqué dans le conflit israélo-arabe, il ne pourra, par la suite, pas résister aux pressions des groupes ethniques ou religieux, sensibles aux influences extérieures et deviendra progressivement le principal champ d'affrontement entre l'Iran, la Syrie, les Palestiniens et Israël.

Après quinze ans de guerre qui a entraîné l'institutionnalisation de l'intervention extérieure, la victoire des milices sur l'armée et les institutions civiles, l'émigration ou le repli sur soi d'une partie de la population, l'appauvrissement des classes moyennes et la dégradation des services publics, le rétablissement de la paix même, imposé de l'extérieur, a ouvert de nouveaux horizons et suscité bien des espoirs.

Pour établir un nouvel équilibre entre les communautés, les députés du parlement élu en 1972 ont, sous l'égide de Damas, ratifié en octobre 1989 les accords de Taëf qui préconisaient la fin des hostilités, un nouveau partage des pouvoirs, le redéploiement des troupes syriennes dans la Bekaa et l'élection d'un nouveau président.

Après des débuts difficiles marqués par l'assassinat du nouveau président, M. René Moawad et par le départ du Général Aoun, s'est alors engagé un lent processus de restauration de l'autorité de l'Etat : les milices ont été démantelées sauf dans le sud ou Amal et le Hezbollah ont conservé des armes pour résister à l'occupation israélienne. Un gouvernement d'union nationale a été formé tandis que l'armée libanaise était réunifiée. Ce processus a cependant été strictement encadré par la tutelle syrienne, officialisé par la signature en mai 1991 d'un traité de fraternité et de coopération.

L'an 2000 au Liban a été marqué par trois événements majeurs : le retrait israélien du Liban-sud en mai, l'accession au pouvoir de Bachar El Assad en juin et la victoire de Rafic Hariri aux élections législatives de l'été puis son retour au Serail, siège de la présidence du Conseil, fin octobre. Ces événements ont suscité de nouveaux espoirs pour une population libanaise marquée par un certain désenchantement. Les défis que le nouveau gouvernement doit relever n'en demeurent pas moins considérables puisqu'il lui faut tout à la fois relancer une économie déprimée, renforcer l'Etat de droit et redéfinir si possible la relation avec Damas, le tout dans un contexte régional tendu.

Présentation rapide du Liban

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Superficie : 10 452 km2

Population : 4,5 millions d'habitants dont 3,7 millions de Libanais, 300 000 Palestiniens et 400 000 travailleurs syriens

Densité : 382 habitants au km2

Taux d'urbanisation : 60 %

Espérance de vie : 67 ans

Taux d'alphabétisation : 80 %

Agriculture : 17 % du PIB

Industrie : 14 % du PIB

Services : 69 % du PIB

PIB : 16,3 milliards de dollars

PIB p/habitant : 4 000 dollars

Taux de croissance : 0 %

Taux de chômage : 25 % (estimation)

Inflation : 0,6 %

Déficit budgétaire : 50 % du PIB (23 % en 1997)

Dette publique : 24 milliards de dollars, soit 140 % du PIB

Service de la dette : 103 % des recettes de l'Etat (78,5 % en 1998)

I. L'évolution de la situation politique

A. Les spécificités de la vie politique libanaise

1. Le confessionnalisme politique

Tout Libanais est à la fois citoyen libanais et membre d'une des quinze communautés confessionnelles reconnues et dont l'existence est assurée par la Constitution et la législation. Chaque communauté a son propre statut personnel qui relève de la compétence exclusive des tribunaux confessionnels. Le droit libanais ignore le mariage civil, si bien que le citoyen, pour se marier, doit impérativement adhérer à une communauté. Mais cette appartenance va au-delà de l'adhésion à une foi pour fournir un cadre aux relations sociales et politiques. Sur ce dernier plan, la structure communautaire apparaît comme la garantie d'une représentation équitable des minorités confessionnelles et comme une protection face à un Etat éloigné et fragile.

Dans ce contexte, il serait utile de connaître avec précision la répartition démographique de la population entre les principales communautés. Il n'existe malheureusement pas de statistiques récentes et les chiffres avancés diffèrent selon que l'on prend en compte les seuls libanais vivant dans le pays ou les libanais vivant à l'étranger ou ayant émigré ces dernières années pour une durée variable.

La première traduction institutionnelle de ce principe d'une répartition confessionnelle des pouvoirs s'applique au partage des présidences entre les trois plus importantes communautés : aux Maronites revient la présidence de la République, aux Sunnites la présidence du Conseil et aux Chiites la présidence du Parlement.

La deuxième concerne les groupes parlementaires qui se définissent et agissent davantage sur des préoccupations confessionnelles ou communautaires immédiates que sur des enjeux politiques généraux. L'accord de Taëf, afin de tenir compte des évolutions démographiques des communautés, a substitué à une répartition inégale entre chrétiens (deux tiers) et musulmans (un tiers) une parité dans la composition du Parlement.

Le confessionnalisme s'applique également à la composition du gouvernement et a pénétré l'administration, les collectivités locales puis l'ensemble de la société libanaise.

Loin de s'estomper, le confessionnalisme a tendance à s'exacerber du fait du strict encadrement syrien de la vie politique au Liban où les politiciens n'ont, pendant longtemps, pas cru devoir évoquer les grands problèmes de la société libanaise et ont limité le débat politique à un conflit d'affirmation des identités primaires. La Syrie a su habilement jouer des rivalités entre communautés pour empêcher toute tentative d'alliance entre les élites en dehors de son contrôle et pour devenir l'intermédiaire obligé de chacune d'elles dans leurs relations réciproques.

2. Le grippage institutionnel

L'accord de Taëf avait instauré un système parlementaire classique avec un pouvoir exécutif bicéphale incarné dans le Conseil des ministres et un parlement chargé de voter la loi et de contrôler l'exécutif. Or ce partage des pouvoirs va conduire au blocage, à l'inertie, voire à la paralysie des institutions.

_ Le Président de la République voit tout d'abord ses prérogatives réduites. Elu pour 6 ans par le parlement, il préside le Conseil des ministres quand il le désire mais ne prend plus part au vote. Chef suprême des armées, celles-ci n'en sont pas moins soumises à l'autorité du Conseil des ministres.
Il nomme le chef du gouvernement mais sur la base de consultations parlementaires auxquelles il est lié. Obligé d'informer le Président de la Chambre du résultat de ces consultations, ce dernier exerce une influence déterminante dans le choix du président du Conseil.

_ Le Président du Conseil exerce la réalité du pouvoir exécutif. C'est lui qui convoque et préside le Conseil des ministres, sauf lorsque le Président de la République y assiste. Responsable de l'exécution de la politique générale, il signe tous les décrets et convoque la Chambre des députés en session extraordinaire.

_ La Chambre des députés, et plus particulièrement son Président, se voit confier une autorité accrue. Elu pour la durée de la législature au lieu de chaque année, le Président de la Chambre joue un rôle déterminant dans le choix du chef du gouvernement. En outre, il détient désormais la maîtrise de l'ordre du jour de l'assemblée et peut donc refuser d'inscrire un projet gouvernemental, surtout s'il dispose d'une large base parlementaire. Placé ainsi au carrefour de toutes les initiatives parlementaires et gouvernementales, le Président du parlement résume à lui seul le pouvoir législatif.

Le Liban est ainsi dirigé par une troïka de présidents que les intérêts communautaires, les options politiques, voire les relations personnelles, peuvent opposer au point de paralyser le système institutionnel et de favoriser ainsi le recours à l'arbitrage syrien.

3. Les relations libano-syriennes

La politique de la Syrie au Liban ne peut se comprendre sans rappeler les circonstances qui ont présidé à la fondation du Liban à la suite de l'effondrement de l'empire ottoman.

La conférence de San Remo a donné à la France, en 1920, un mandat sur la Syrie. Toujours en 1920, la France a proclamé la naissance d'un Grand-Liban qui inclut, outre le gouvernorat du Haut Liban et Beyrouth, des territoires pris sur la Syrie (une partie de la Bekaa, Tripoli, Tyr, Saïda). Cette entité libanaise a été ensuite confirmée par la déclaration de mandat de la SDN en 1922 et par la Constitution de 1926, mais n'a jamais été admise par la Syrie qui, d'ailleurs, n'a jamais voulu ouvrir d'ambassade à Beyrouth. 

Entrée au Liban en 1976 sous la forme d'un contingent de la force de dissuasion de la ligue arabe, l'armée syrienne s'est progressivement étendue sur l'ensemble du territoire pendant la guerre. Depuis le rétablissement de la paix, la tutelle syrienne pèse sur tous les secteurs de la vie libanaise. L'accord de Taëf d'octobre 1989 mentionne ainsi que le Liban entretient avec la Syrie des relations privilégiées qui tirent leur force du voisinage, de l'histoire et des intérêts fraternels communs, tandis que le traité de fraternité, de coopération et de coordination de mai 1991 consacre juridiquement ce tutorat de fait.

Cette tutelle syrienne sur le Liban se traduit d'abord sur le plan militaire par la présence de 35 000 soldats et de quelque 6 000 membres des services de sécurité syriens.

Elle se manifeste également sur le plan politique, même si le contrôle exercé par la Syrie tient avant tout à la savante exploitation par Damas des profondes divisions de la classe politique libanaise et à l'action des services spéciaux syriens qui ont su quadriller le pays et organiser le réseau ramifié des allégeances et des clientèles pro-syriennes.

Elle s'exprime également dans le domaine économique du fait de la présence au Liban de 400 à 450 000 travailleurs syriens qui rapportent en Syrie des devises et des différents prélèvements opérés par les Syriens. Selon une estimation qui nous a été donnée mais qu'il est difficile d'apprécier, cette ponction représenterait entre 15 et 20 % du Produit Intérieur Brut du Liban.

Damas sait toutefois exercer une tutelle habile en respectant les formes de l'indépendance et les principes qui définissent la nation libanaise. Tout en fixant des limites convenues et reconnues, elle laisse prospérer une société aux traditions libérales bien ancrées.

Dans ces conditions, la Syrie a tout intérêt à maintenir la situation actuelle. Arbitre du jeu politique libanais, la Syrie ne pouvait se désintéresser des élections législatives de l'été 2000.

B. L'enjeu des élections de l'été 2000

1. Une loi électorale modifiée

· La loi électorale de 1996 a été modifiée en décembre 1999. Elle prévoit que les 128 députés seront élus dans le cadre de 13 circonscriptions. Or ce découpage est déterminant, puisqu'il s'agit en fait de savoir si le député doit continuer d'être l'élu de sa communauté ou de son district ou si, au contraire, son élection doit être le résultat d'une alliance transconfessionnelle, privilégiant un programme au détriment du clientélisme traditionnel et favorisant l'émergence d'un véritable débat politique.

Le nouveau découpage n'a pas tranché entre une petite circonscription au niveau du district ou une circonscription plus large au niveau du gouvernorat (il y a administrativement six mohaffazats au Liban) mais retient des solutions variables selon les régions. Dans le Chouf, le Metn et la Bekaa, c'est le principe du district qui a été retenu, sans doute pour éviter une alliance entre Druzes et Chrétiens. Dans le sud-Liban, compte tenu de l'occupation israélienne, la loi électorale a, au contraire, imposé une grande circonscription composée de deux gouvernorats. Ailleurs, ce sont des circonscriptions moyennes rassemblant deux ou trois districts qui ont été créées, parfois d'une manière artificielle. Ainsi, le découpage de Beyrouth en trois circonscriptions électorales a été perçu comme politique par ses habitants.

· Malgré un découpage favorisant le pouvoir en place et un verrouillage des listes, ce scrutin législatif, même si son résultat ne diffère par fondamentalement des deux précédents, a été marqué par l'élection de plusieurs personnalités de l'opposition et par la défaite de plusieurs leaders traditionnels.

Les élections dans les circonscription du Mont Liban sont à cet égard significatives puisqu'une ligne de clivage politique s'y est clairement dégagée entre les soutiens du régime et de la tutelle syrienne et une opposition plurielle allant du député maronite Nassib Lahoud au chef druze Walid Joumblatt.

En dénonçant le rôle des services de sécurité dans la vie politique libanaise et en se prononçant en faveur d'un rééquilibrage des relations entre le Liban et la Syrie, la nouvelle opposition dans le Chouf s'est efforcée de donner au scrutin une signification nationale et d'ouvrir une perspective politique, contrairement au reste du pays où les enjeux ont souvent été brouillés par un tribalisme local ou familial. En dépit d'une campagne médiatique hostile, la liste de Walid Jumblatt a remporté l'intégralité des huit sièges, battant toutes les personnalités soutenues par le pouvoir et les Syriens.

Dans le Metn, l'élection opposait au ministre de l'intérieur le député Nassib Lahoud, connu pour son engagement démocratique et sa volonté de moraliser la vie politique. Même si la plupart des candidats de la liste du ministre ont été élus, Nassib Lahoud a réussi à assurer sa réélection, tandis que Pierre Amin Gemayel, candidat indépendant, fils de l'ancien Président de la République, était élu.

Dans une des deux circonscriptions du nord, la liste Frangié et du ministre des transports était en lice avec celle d'Omar Karamé, ancien Président du Conseil, allié à Nayla Mouawad qui, tous deux, ont été élus ainsi qu'un candidat indépendant, à Tripoli.

A Beyrouth, Rafic Hariri remporte dix-huit des dix-neuf sièges et provoque l'échec de trois ministres du gouvernement, confirmant ainsi son statut d'unique leader sunnite dans la capitale et de candidat incontournable à la présidence du Conseil. Replacé dans le contexte libanais, ce sursaut des électeurs constitue une surprise qu'il est tentant d'interpréter comme une revendication de renaissance sinon d'indépendance.

· Ces élections ont consolidé la position de plusieurs personnalités au sein des communautés en confirmant un leader sunnite (Rafic Hariri, avec un bloc de 22 députés), un chef druze (Walid Jumblatt avec 13 députés), deux forces chiites (18 députés pour Amal et 12 pour le Hezbollah), mais sans assurer une représentation politique à l'électorat chrétien. Une majorité de députés chrétiens ne doit son élection qu'à des marchandages entre formations musulmanes et ne représente pas la sensibilité politique du camp chrétien. Des progrès ont néanmoins été accomplis dans la voie d'une réintégration progressive des Chrétiens dans le jeu politique.

Parmi les indices d'apaisement de la scène intérieure libanaise, figure le retour, en août dernier, de l'ancien Président Amine Gemayel puis l'élection de son fils, Pierre Amine, comme député du Metn. Par ailleurs, plusieurs événements à caractère commémoratif (mort de Béchir Gemayel, obsèques de Raymond Eddé...) ou religieux (réouverture de la cathédrale maronite Saint-Georges) se sont transformés en manifestations politiques en faveur des forces libanaises ou des Kataeb. Enfin, plusieurs manifestations d'étudiants ont ponctué l'année et ont attesté de la volonté des Chrétiens de sortir de la marginalité politique.

D'une manière générale, la visibilité des mouvements politiques chrétiens s'est accrue (Forces libanaises dissoutes, Kataeb, CNL, PNL, BN, Aounistes). Toutefois, leurs divisions internes ont constitué un handicap majeur pour la crédibilité de leurs revendications et le contrôle exercé par les services de renseignements a limité jusqu'à présent leur marge de man_uvre. Pour ces raisons, le patriarche maronite, Nasrallah Boutros Sfeir, a joué le rôle essentiel de catalyseur du message politique chrétien, porteur des demandes adressées aux autorités libanaises (concernant notamment une meilleure représentativité des Chrétiens au parlement et au gouvernement) et aux autorités syriennes (avec le souhait d'une redéfinition des relations bilatérales et l'élaboration d'un agenda du redéploiement, puis du retrait du Liban, conformément à l'accord de Taëf). Ainsi, le patriarche est-il allé jusqu'à dénoncer le danger d'un « anschluss » syrien sur le Liban, au risque de susciter des attentes fortes de la part de son audience et de provoquer la radicalisation de certains mouvements chrétiens d'opposition, impatients d'obtenir des résultats concrets sur le plan politique.

· Le scrutin, qui intervenait quelques semaines après le retrait israélien du Liban-sud et le décès du Président syrien Hafez El Assad, s'est également traduit par la levée de tabous relatifs à la présence syrienne au Liban.

S'il est, à ce stade, trop tôt pour parler d'un rééquilibrage des rapports entre le Liban et la Syrie, un processus de redéfinition des relations bilatérales a été engagé à l'automne, influençant la scène intérieure libanaise. Il faut relever à cet égard la fin des tabous relatifs à la présence syrienne au Liban et au redéploiement des forces armées de Damas. Ces sujets sensibles appartiennent désormais au débat public, grâce notamment à plusieurs personnalités (patriarche maronite Sfeir) et à certains médias (rôle joué par le quotidien An Nahar). En novembre dernier, ce thème a pénétré pour la première fois l'enceinte parlementaire, lors des débats précédant le vote de confiance du gouvernement de M. Hariri.

Dans ce contexte, le leader druze, Walid Joumblatt, a multiplié depuis l'automne les critiques vis-à-vis du régime libanais (militarisation de la société, dysfonctionnements des services de renseignement) et des autorités de Damas (poids de la présence syrienne), qui lui ont valu d'être considéré implicitement comme « persona non grata » par le régime syrien. La rupture, même momentanée, a valu avertissement sans précédent pour le leader du Parti socialiste progressiste.

Après une pause relative au début de l'année, la polémique a été récemment relancée, au retour des Etats-Unis (fin mars) du patriarche Sfeir et a pris un tour confessionnel. La plupart des dignitaires musulmans, ainsi que les principaux responsables sunnites et chiites (Rafic Hariri ; Sayyed Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah ; Jamil Al Sayyed, chef des services secrets libanais) ont clairement pris le parti de Damas en vantant les mérites de la présence syrienne et en exigeant « la fin d'un débat qui menace l'ordre public » (Nabih Berry), tandis que l'opposition chrétienne appelait, dans des manifestations de masse, au retrait syrien et à « l'indépendance retrouvée du Liban ». Cette dernière s'est unie, le 30 avril, autour du document de « Kornet Chehwan » (du nom du siège épiscopal d'Antelias), par lequel elle réclame notamment l'application des accords de Taëf qui prévoyaient le redéploiement des forces syriennes dans la Bekaa dans un délai de deux ans, préalable à leur retrait complet.

Tout en adoptant jusqu'à présent une attitude réservée, évitant d'interférer directement dans le débat interlibanais, la Syrie a attendu la mi-juin pour amorcer un redéploiement de ses troupes. Début août, le patriarche Sfeir a effectué une visite historique dans le Chouf, fief de Walid Joumblatt, pour sceller la réconciliation entre chrétiens et druzes après des décennies d'hostilités et de massacres. Au moment même où s'achevait cette visite, débutait une vague d'arrestation opérée, dans des conditions pour le moins douteuses, dans les milieux chrétiens d'opposition. Devant le tollé suscité dans la société civile libanaise par le recours à de telles méthodes, la plupart des personnes arrêtées ont été relâchées ou remises en liberté sous caution, les autres étant condamnées à des peines de 5 à 45 jours de prison. Quatre libanais, dont deux journalistes, restent emprisonnés et plusieurs autres sont passibles de 3 à 15 ans de prison au prétexte d'avoir voulu renverser le régime. S'agit-il d'une réaction à l'inquiétude des services de renseignements libano-syriens et des entourages présidentiels à une manifestation d'union nationale entre communautés échappant à leur contrôle et d'une tentative pour endiguer une revendication de rééquilibrage des relations libano-syriennes et de liberté d'expression ? Il est encore trop tôt pour tirer tous les enseignements de ces événements. On ne peut, à ce stade, que condamner le coup ainsi porté à l'image du Liban et déplorer ses conséquences pour la réconciliation nationale.

2. Le retour au Sérail de M. Hariri

Vainqueur incontestable du scrutin législatif et disposant du bloc parlementaire le plus important, M. Hariri, ancien Président du conseil des ministres de 92 à 98, a retrouvé la présidence en octobre, allié à la fois des « opposants » au régime actuel comme M. Walid Joumblatt et des « loyalistes » comme M. Frangié et M. Miqati. Après de longs et subtils marchandages visant à respecter les équilibres confessionnels et socio-politiques, M. Hariri a formé le 26 octobre un nouveau gouvernement constitué de 30 membres dans lequel ses proches et ceux du Président Lahoud sont bien représentés. A ce titre, on peut parler d'un gouvernement « économico-sécuritaire ». Pour sa part, M. Berry conserve quelques représentants mais les Chiites n'ont pas de portefeuille de premier plan, hormis celui des affaires étrangères.

De son côté, le Président Lahoud, conscient de son image négative, en particulier au sein de sa propre communauté, a tenté de redorer son blason. Après l'échec électoral subi par son gouvernement aux élections législatives et la défaite de son Premier ministre, M. Selim Hoss, le Président a encouragé une répartition tacite des rôles avec son nouveau Premier ministre. Le chef de l'Etat et ses proches conservent ainsi la haute main sur tous les aspects politico-sécuritaires et le rappel des « constantes » de la politique étrangère. Au chef du gouvernement et ses alliés reviennent la définition et la mise en _uvre de la politique socio-économique.

A ce stade, aucun conflit ouvert n'est apparu entre les deux hommes, qui n'entretiennent pourtant pas de bons rapports. Plusieurs sujets ont ainsi fait l'objet de tensions, comme la convocation inopinée, en décembre dernier, par le Président de la République du conseil supérieur de défense (organe qui ne s'était pas réuni depuis 1993), les réactions aux actions du Hezbollah à la frontière israélo-libanaise ou la question sensible de l'implantation des réfugiés palestiniens au Liban. Sur ce point, le Président Lahoud suspecte le Premier ministre d'être ouvert à de futures concessions en contrepartie de garanties financières. En outre, le maintien de tout ou partie des 300 à 350 000 réfugiés palestiniens au Liban permettrait de rééquilibrer la donne démographique en faveur de la communauté sunnite. En tout état de cause, cette question pourrait devenir, à terme, une pomme de discorde entre les deux hommes.

3. Le Hezbollah, auréolé du « mythe de la résistance », cultive l'image d'un parti « normalisé »

Avec l'élection de 12 députés en septembre dernier, le résultat électoral du Hezbollah demeure inférieure à sa popularité réelle, notamment dans le sud, où des listes communes avec Amal lui ont été imposées par Damas. Le Hezbollah a finalement décidé, après hésitations et tensions internes, de ne pas participer à l'équipe gouvernementale, préférant adopter une position d'attente et conserver intacte sa légitimité issue de son action de « résistance » à Israël.

A ce stade, et avant d'achever sa mue politique, le Hezbollah continue de mener son action de résistance au Liban-sud dans le cadre d'une stratégie de provocation contrôlée, exigeant le retrait total des forces israéliennes et le retour sous souveraineté libanaise de la zone des fermes de Chebaa. Absent du gouvernement de M. Hariri mais bénéficiant d'une large popularité, le Hezbollah n'en demeure pas moins au c_ur de l'équation politique libanaise actuelle et constitue paradoxalement le principal soutien du Président Emile Lahoud.

II. Une situation économique fragile

Dix ans après la fin du conflit, l'économie libanaise présente un bilan contrasté. Aux progrès indéniables enregistrés au début de la reconstruction du pays, ont succédé, à partir de 1999, un ralentissement économique et une détérioration de la situation financière en 2000. La dynamique du changement engagée par le nouveau gouvernement repose sur le constat que l'économie libanaise a besoin d'un choc conjoncturel fort pour relancer une croissance aujourd'hui nulle.

A. Des progrès notables ont été accomplis mais depuis
trois ans, la croissance marque le pas

Erreur! Signet non défini.A la fin de la guerre civile, l'économie libanaise se caractérisait par une chute de l'investissement privé, l'effondrement du secteur public, une inflation de 70 % et une pratique de prélèvement quasi-institutionnel par les milices.

Jusqu'en 1998, la croissance a été soutenue du fait notamment de la reconstruction du pays et d'un effet de rattrapage après 15 ans de guerre. Entre 1990 et 1997, le produit intérieur brut (PIB) par tête a été multiplié par quatre, passant de 1 100 à près de 4 000 dollars, tandis que l'inflation était ramenée à moins de 1 %.

Mais cette évolution s'est accompagnée d'un déficit budgétaire croissant, d'un alourdissement de la dette publique et de la constitution d'une bulle foncière. De 1993 à 1999, l'Etat libanais a financé ses dépenses à 43 % par ses recettes et à 57 % par l'endettement. Les dépenses courantes ont accaparé 54 % du total contre 34 % pour les intérêts et seulement 12 % pour les investissements. Grâce à une meilleure perception de l'impôt et surtout à des recettes douanières qui ont suivi le rythme des importations, les recettes publiques ont connu une croissance continue qui les a fait multiplier par 2,7 sur la période.

La dette publique a suivi la même évolution, passant de 2,7 à 22 milliards de dollars entre 1993 et 1999. Presque entièrement en livres libanaises jusqu'en 1994, la part en devises a connu depuis une progression rapide pour atteindre 25 % en 2000. Ce changement dans la structure de la dette a contribué à abaisser son coût moyen et freiné la croissance du service de la dette tout en aggravant le risque pour l'Etat.

· L'économie libanaise se caractérise aujourd'hui par la faiblesse de l'agriculture (17 % du PIB) et de l'industrie (14 %) face aux services (60 %), par la prépondérance du secteur privé qui contribue à près de 90 % du PIB face à un secteur public défaillant (téléphone, eau, électricité et transports notamment). Le Liban, petit marché de 4 millions d'habitants, importe 90 % des produits qu'il consomme. Il ne peut dès lors connaître que des échanges extérieures structurellement déséquilibrés. Le Liban importe en volume dix fois plus qu'il n'exporte (6,2 milliards de dollars contre 710 millions) d'où un déficit commercial de 5,5 milliards de dollars. Dans l'état actuel de l'outil statistique, il n'est toutefois pas possible de connaître la part des importations réexportées vers les pays voisins notamment la Syrie. Ce déficit de la balance courante imputable à 52 % au déficit privé, est presque entièrement compensé par l'entrée de capitaux attirés par des taux élevés, permettant ainsi de dégager une balance de paiements proche de l'équilibre.

· Au ralentissement économique constaté depuis 1999 et caractérisé par une croissance nulle, s'est ajoutée en 2000 une détérioration des principaux indicateurs économiques et financiers.

L'exécution budgétaire en 2000 s'est sensiblement écartée de l'épure optimiste contenue dans le projet de loi de finances. Si l'inflation a fait mieux que prévu (0,6 % au lieu de 1,8 %), la croissance a été nulle (au lieu de 2,2 %), si bien que le PIB est resté très en deçà de l'objectif fixé (16,3 contre 18 milliards de dollars) que le déficit budgétaire s'est fortement creusé (50 % contre 37,3 % prévus) du fait d'un dérapage des dépenses et que la dette publique a atteint un record (24 milliards de dollars soit 147 % du PIB), le service de la dette (6,6 milliards de dollars) étant équivalent aux recettes de l'Etat.

Le gouvernement de M. Hoss n'a pu ni mener à bien la deuxième année de son plan d'assainissement économique et financier, ni engager le plan de privatisation des services publics, ni relancer les investissements. Enfin, le Liban a été inscrit en juin 2000 sur la liste noire du GAFI mettant à l'index les pays non coopératifs dans la lutte contre le blanchiment d'argent sale.

En outre la vie chère, la stagnation des salaires, la montée du sous-emploi en dépit d'une émigration soutenue, la crise immobilière, ont entraîné une paupérisation de larges couches de la population qui contraste avec la réussite ostentatoire d'une minorité. Et pour réduire cette fracture sociale, il n'existe au Liban ni services sociaux efficaces ni prestations sociales. Seule intervient une aide fondée sur des critères d'appartenance confessionnelle ou familiale qui donnent une base économique au communautarisme et au clientélisme sans résoudre les problèmes sociaux.

B. La dynamique du changement du nouveau
gouvernement

Le nouveau gouvernement de M. Hariri s'efforce de relancer la croissance par la mise en place de mesures destinées à restaurer la confiance et à décrisper le contexte économique et commercial par la reprise du commerce courant et les privatisations. Avec pour objectif de transformer le Liban en pôle régional sur les plans financier, commercial et industriel, cette politique consiste à baisser la fiscalité, rendre plus libérales les lois foncières, faciliter l'investissement, ouvrir à la concurrence des services comme le transport aérien ou les télécommunications.

Il a déjà pris une série de mesures de nature à provoquer cette relance en baissant les tarifs douaniers dont le taux moyen est désormais estimé à 10 % - même si les taxes douanières varient entre 0 et 70 % -, ainsi que les charges fiscales pesant sur les activités des entreprises et l'investissement. Un projet de loi en cours d'adoption prévoit d'imposer, en contrepartie, une TVA de 10 % sur la majorité des produits avec quelques exemptions limitées pour l'instant à l'agriculture, à l'éducation et à la santé. 

Le programme de privatisation pourrait être accéléré et de nouvelles lois visant à faciliter l'investissement et à encadrer la concurrence devraient être présentée au parlement. Mais, dans l'immédiat, il en résulte une diminution des recettes budgétaires, l'introduction de la TVA et le produit des privatisations n'interviendront que dans quelques mois, soit après la réduction des tarifs douaniers.

De même, le gouvernement a proposé au parlement de modifier la législation relative à la lutte contre le blanchiment d'argent, aux centres « offshore », au contrôle de transactions de biens bancaires, à la lutte contre l'enrichissement illicite, afin que le Liban soit rayé de la liste noire du GAFI.

S'agissant des privatisations, le dossier de la compagnie aérienne libanaise MEA serait sur le point d'être ouvert, tandis que la téléphonie mobile vient de faire l'objet d'une mesure contestée sur laquelle il faut revenir.

· En 1994, la gestion du réseau de téléphonie mobile a été confiée par les autorités libanaises à deux opérateurs liés par des contrats BOT (Bâtir, Organiser, Transférer) pour une durée de 12 ans dont deux en option et de 7 ans et demi en exclusivité :

- A la société Cellis-Ftml, filiale à 67 % de France Telecom dont l'Etat français est actionnaire à 55 %,

- à Liban-Cell qui appartient à hauteur de 14 % à la société finlandaise Sonera.

Depuis 1998, un conflit financier oppose l'Etat libanais à ces deux opérateurs sur le nombre d'abonnés et les redevances relatives à de nouveaux services comme le GPRS. Ce litige fait l'objet d'un arbitrage devant une instance internationale contesté en justice par le gouvernement libanais. Pour résoudre le conflit, les deux opérateurs ont proposé, il y a un an, de transformer les contrats en licences et de verser en contrepartie 1,3 milliards de dollars chacune. Aucune suite n'a été donnée à cette proposition, le gouvernement gardant le choix, soit de poursuivre les négociations avec les deux opérateurs actuels en vue de parvenir à un accord sur le prix de la transformation, soit de résilier les contrats avant leur date d'expiration, de les dédommager et de procéder à un appel d'offre international.

Avant même que le projet de loi sur les télécommunications ne soit adopté en conseil des ministres et sans en avertir préalablement les deux opérateurs, le gouvernement libanais a, le 13 juin, opté pour la résiliation, le versement de dommages et intérêts et la mise en concurrence internationale 180 jours plus tard pour l'octroi de deux licences d'exploitation du réseau cellulaire sur une durée de 20 ans.

Arguant du souhait des deux opérateurs de transformer leur contrat en licence, les autorités libanaises en concluent qu'il ne s'agit pas d'une décision unilatérale mais d'une résiliation à l'amiable d'autant qu'elles acceptent le versement d'une indemnisation pour rupture anticipée des contrats en cours.

Elles ajoutent que la mise en concurrence constitue la méthode la plus transparente, en permettant d'éviter tout soupçon de malversation et la moins contestable pour fixer, dans le contexte actuel, le prix des licences.

Les opérateurs font, quant à eux, valoir qu'ils ont investi au Liban des centaines de millions de dollars pour construire le réseau GSM (400 millions pour Cellis entre 1995 et 2000), qu'ils ont créé directement ou indirectement plusieurs milliers d'emplois et qu'ils ont contribué d'une manière non négligeable au budget de l'Etat libanais par le versement de redevances et taxes fixées à un niveau élevé.

Ils rappellent qu'en 1997, ils avaient accepté une majoration de la rétrocession sur chaque minute d'appel en contrepartie de l'engagement par le gouvernement libanais de ne pas résilier les contrats en cours.

Ils estiment donc juridiquement la résiliation unilatérale non conforme à l'engagement de 1997 et pour Cellis contraire à l'accord sur la protection et la promotion des investissements conclu entre la France et le Liban.

Ils s'interrogent par ailleurs sur l'intérêt financier de cette décision, le montant des dommages et intérêts pour rupture anticipée de contrats compensant largement le prix des licences, compte tenu de l'effondrement du secteur depuis un an.

La délégation, pour sa part, observe qu'une telle mesure n'apparaît pas de nature à encourager les sociétés étrangères à investir au Liban d'autant que plusieurs procédures d'arbitrage sont actuellement en cours opposant certaines d'entre elles au gouvernement libanais dont la crédibilité finit ainsi par être atteinte.

En définitive, la stratégie retenue par le nouveau gouvernement s'inscrit sur le moyen terme car elle repose sur la réalisation effective de réformes structurelles qui ne pourront porter leurs fruits qu'avec une amélioration de la compétitivité globale de l'économie libanaise. Même si, à court terme, une dégradation des finances publiques est prévisible, le crédit dont bénéficie M. Hariri devrait permettre de rétablir la confiance et d'obtenir le soutien des principaux bailleurs de fonds, d'autant que la perspective de l'association à l'Union européenne et de l'accession à l'OMC devrait permettre d'affermir cette confiance.

C. Les relations avec la communauté économique et financière internationale

Depuis la conférence de Barcelone en novembre 1995, la présence au Liban de l'Union européenne s'est intensifiée. Elle est devenue à la fois le premier partenaire commercial du pays du cèdre (elle assure 45 % des importations libanaises et 33 % des exportations) et l'un des principaux bailleurs de fonds avec 30 % de l'aide extérieure. L'accord d'association, du même type que ceux déjà conclu avec la Tunisie et le Maroc, est en cours de négociation ; il prévoit l'établissement d'un dialogue politique, la mise en place d'un libre échange industriel au terme d'une période transitoire et des coopérations sectorielles.

Suspendues à deux reprises, les négociations ont repris en mars 1999 et enregistré un progrès avec l'abaissement des taxes douanières à l'importation décidé par le nouveau gouvernement et la perspective de libéralisation des transports aériens, des ventes de propriétés immobilières et des privatisations. S'agissant du volet agricole, le Liban fait valoir la taille réduite et les spécificités de son agriculture pour recommander une ouverture large du marché européen pour les produits agricoles libanais à l'exception de quelques secteurs sensibles. En dépit de ces avancées reste, au Liban, à confirmer son intérêt et sa volonté de se soumettre aux disciplines contenues dans l'accord d'association.

Pour accompagner les transformations internes, l'Union européenne a défini un premier programme MEDA de 182 millions d'euros pour la période 1995-1999.

La mise en _uvre effective des projets s'avère toutefois très lente puisque les déboursements effectués depuis fin 1999 se limitent à 30 millions d'euros destinés à renforcer les réformes fiscales. Une deuxième tranche de 20 millions d'euros devrait être versée cette année en liaison avec l'introduction de la TVA. Ces crédits sont complétés par 330 millions d'euros de prêts de la BEI sur la même période.

· Parallèlement, le Liban a déposé, en 1999, une demande d'adhésion à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) dont le conseil général a confié à la France la présidence du groupe d'adhésion.

Le memorandum de situation sur l'économie libanaise, qui est la première étape des négociations, a été remis en mai 2001 au secrétariat général de l'OMC, mais il est probable que le processus d'intégration sera assez long du fait des réformes structurelles à réaliser au préalable.

III. Le Liban et le processus de paix au Proche-Orient

En dépit du retrait israélien du Sud-Liban en mai 2000, aucune paix n'a encore été conclue entre Beyrouth et Israël et le Liban apparaît plus que jamais, dans le contexte de l'Intifada, de l'instabilité persistante au Sud-Liban et du blocage des négociations israélo-syriennes, comme un enjeu plutôt qu'un acteur de la politique régionale.

A. Après 22 ans d'occupation, Israël s'est retiré du Sud-
Liban en mai 2000

La Syrie et le Liban ont eu du mal à accepter la réalité de l'annonce faite par M. Ehud Barak, avant même son élection en mai 1999, d'un retrait israélien du Liban sud dans un délai d'un an. Les Libanais considéraient cette annonce comme une tentative, refusée par Damas, de dissocier les volets syriens et libanais. Ils ont pris acte, à leur corps défendant, du retrait des forces israéliennes, le 24 mai 2000, qui s'est déroulé dans le calme. Les Israéliens ont quitté leurs positions en quelques jours, laissant le choix aux miliciens de l'ALS de gagner Israël ou de se rendre au Hezbollah. Plusieurs milliers de personnes (miliciens et leurs familles, civils compromis avec Israël) choisirent de se rendre en Israël alors qu'environ 2 200 miliciens préféraient se rendre au Hezbollah, qui les a remis aux autorités libanaises.

L'envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies au Proche-Orient, M. Roed-Larsen, a pu conduire avec succès, en juin, les travaux de certification du retrait et tracé une « ligne pratique de retrait », ou « ligne bleue » destinée à permettre la vérification de l'application de la résolution 425, tout en précisant « qu'il ne s'agissait pas, pour l'ONU, de procéder à la démarcation d'une frontière ». Le Conseil de sécurité a ensuite entériné, le 27 juillet, en adoptant la résolution 1310, un rapport du Secrétaire général prenant acte du retrait israélien, appelant au déploiement de la FINUL, dans l'ensemble de la zone libérée et demandant au Liban d'y assumer ses responsabilités. Le Liban a alors accepté de prendre acte de la fin du processus de certification du retrait israélien, tout en maintenant plusieurs réserves sur le tracé de la ligne bleue, sur certains points de la frontière libano-israélienne et de la frontière libano-syrienne, dont le secteur des fermes de Chebaa.

Les autorités libanaises ont accepté, début août 2000, le déploiement de la FINUL dans la zone libérée et décidé, quelques jours plus tard, l'envoi d'une force mixte armée-gendarmerie de 1 000 hommes. Cette dernière ne s'est déployée que dans la partie nord de la zone évacuée, afin d'éviter tout contact avec la bande frontalière elle-même, contrôlée exclusivement par le Hezbollah. La FINUL s'est déployée en quelques semaines et, depuis le mois de septembre, est présente dans l'ensemble de la zone évacuée où elle cohabite avec le « parti de Dieu » qui dispose d'une totale liberté de mouvement. Une réduction progressive des effectifs de la force est prévue jusqu'en juillet 2002 ( de 5 800 aujourd'hui à 2 000 hommes) pour adapter le format de la FINUL à son rôle effectif sur le terrain, comprenant pour l'essentiel des tâches d'observation et d'aide au rétablissement de l'autorité de l'Etat dans la zone libérée.

B. Un nouveau statu quo, fragile, s'est instauré à la
frontière israélo-libanaise

Les autorités libanaises insistent régulièrement sur le fait que le Liban et Israël sont toujours théoriquement en guerre et que le départ des forces israéliennes ne peut, en aucun cas, les conduire à donner à Israël des garanties de sécurité, un tel geste ne pouvant intervenir que dans le cadre d'un accord de paix global. D'où le refus répété du Liban de déployer son armée le long de la « ligne bleue », la mission de la force mixte libanaise n'étant pas, selon le Président Lahoud, « de jouer les garde-frontières d'Israël ».

Le retrait a certes mis un terme aux combats incessants qui opposaient l'armée israélienne au Hezbollah au Liban-Sud. Il n'a toutefois pas mis fin à toute activité militaire. En effet, le Hezbollah a reconstitué une ligne de front dans le secteur des fermes de Chebaa dont une partie se trouve en territoire syrien occupé en juin 1967, au sud de la ligne bleue (et de la frontière internationalement reconnue). S'appuyant sur la thèse officielle libanaise qui veut que cette région fasse partie intégrante du territoire national, le Hezbollah y a mené une dizaine d'opérations armées ces derniers mois (enlèvement de trois soldats israéliens le 7 octobre, attentats ponctuels contre des patrouilles israéliennes qui ont provoqué plusieurs morts dans les rangs de Tsahal depuis l'automne).

Le Hezbollah maintient donc de façon artificielle un front militaire réduit qui lui permet de pratiquer une « provocation contrôlée » à l'égard d'Israël et d'éviter toute normalisation libano-israélienne. Les termes de la relation du faible au fort qui régit la situation au Liban sud sont désormais les suivants : Le Hezbollah estime avoir les mains libres pour mener les actions militaires dans les fermes de Chebaa et toute risposte israélienne sur des populations civiles libanaises entraînerait des tirs de katiouchas sur le territoire israélien. Les Israéliens ont jusqu'à récemment refusé de se laisser entraîner dans une telle logique d'escalade pour éviter d'ouvrir un second front au nord.

Cependant, la tension est montée d'un cran durant le dernier week-end de Pâques. Le bombardement sans précédent depuis 1996 d'une station radar syrienne au Liban, le 17 avril 2001, à la suite d'une opération meurtrière du Parti de Dieu (15 avril) a constitué un avertissement sérieux d'Ariel Sharon au gouvernement syrien, qui a promis de réagir et de « faire payer cet acte à Israël au moment approprié ». Si la capacité de riposte directe de Damas était limitée, en revanche les Syriens pouvaient instrumentaliser le Hezbollah ou les groupes palestiniens sous leur coupe pour frapper de nouveau Israël dans les semaines qui suivaient, au risque de provoquer une nouvelle escalade des tensions.

Si la situation des camps palestiniens est restée globalement calme, le FPLP-CG, faction palestinienne hostile à Yasser Arafat, entièrement contrôlée par la Syrie et l'Iran, s'est manifesté à deux reprises pour établir un lien entre le Liban et la Palestine. Fin janvier, deux miliciens du FPLP-CG ont été tués alors qu'ils menaient une opération dans le secteur des fermes de Chebaa et, le 6 mai 2001, la marine israélienne a arraisonné un bateau de pêche libanais convoyant des armes appartenant à la faction d'Ahmed Jibril, du Liban vers Gaza. Ces deux opérations ne peuvent avoir été montées sans l'accord des Syriens. Ces derniers entendent ainsi faire la preuve de la variété des instruments de nature militaire dont ils disposent pour intervenir au Liban sud, comme en Palestine.

C. Au-delà des difficultés actuelles, l'accord de paix
israélo-libanais demeure hypothéqué par l'inconnue
syrienne et la délicate question des réfugiés palestiniens.

Le Liban et la Syrie se sont efforcés de limiter la portée du retrait israélien de mai 2000 en feignant de ne pas en percevoir toutes les conséquences. Si le couplage des volets syriens et libanais du processus de paix a pu être préservé, il a largement perdu de son poids diplomatique. Reste que le Liban est aujourd'hui confirmé dans son rôle de vassal et qu'il ne dispose d'aucun levier lui permettant d'engager une négociation avec Israël en position de force. C'est une nouvelle fois de Damas que Beyrouth attendra, en 2001, le signal lui permettant d'engager des négociations dont il ne maîtrisera ni le contenu, ni l'issue.

Les Libanais sont en particulier dépourvus de moyens de pression ou d'action pour obtenir le départ des réfugiés palestiniens (dont le nombre varie, selon les estimations, entre 180 000 et 400 000) que leurs dirigeants présentent comme une condition sine qua non à tout accord de paix global. Les autorités libanaises n'entretiennent en effet aucun dialogue politique avec les Palestiniens qu'elles soupçonnent de vouloir abandonner la revendication du droit au retour. Elles n'ont pas davantage confiance dans la fermeté de la position syrienne sur ce sujet. Le Liban s'est ainsi inquiété du contenu des négociations israélo-palestiniennes de Taba, au cours desquelles des solutions pratiques pour encadrer le droit au retour ont commencé à être envisagées. En tout état de cause, l'arrivée au pouvoir d'Ariel Sharon devrait geler durablement toute perspective de paix israélo-libano-syrienne.

IV. La francophonie au Liban

Le Liban est, par tradition et par choix, le pays le plus francophone du Proche-Orient. Le maintien de repères francophones peut contribuer, de manière dynamique, à la reconstitution d'une nation libanaise. Même si l'anglais domine dans le monde des affaires, le français reste la langue de formation et de culture dans 80 % des écoles et dans les universités la tendance est au trilinguisme. En outre, le français n'est plus l'apanage des Chrétiens ou des élites, il s'apprend et se pratique dans toutes les communautés et dans toutes les régions (antenne de Baalbeck dans la Bekaa depuis 1999, Liban-sud). Le retrait israélien a ainsi suscité de nouvelles demandes de coopération dont certaines commencent d'ailleurs à être mises en _uvre telles la formation des enseignants de français (Saïda, Nabatieh, Tyr), l'extension de l'action des centres culturels (Saïda, Nabatieh), l'appui aux bibliothèques (Jezzine) et l'implantation du Groupe des retraités éducateurs sans frontières (GREF) à Jezzine.

Notre action, institutionnalisée en octobre 1993 par un accord bilatéral de coopération culturelle, scientifique et technique et complétée en 2000 par un accord de coopération cinématographique et un memorandum sur le secteur audiovisuel public libanais, s'est fixée pour objectif principal de renforcer et de consolider la francophonie dans l'ensemble des communautés et des régions du pays. Une étape nouvelle a été franchie en 1999 avec l'inscription du Liban dans la zone de solidarité prioritaire. Le ministère des Affaires étrangères a consacré en 2000 plus de 100 MF à la coopération avec le Liban, somme à laquelle s'ajoutent la coopération décentralisée, les protocoles du Trésor et les concours de l'Agence française de développement.

Face au développement rapide de l'influence anglophone a été engagé, depuis quelques années, un effort en vue de restructurer et de recentrer notre coopération autour de plusieurs grands projets. Beyrouth est ainsi devenu un pôle régional d'enseignement supérieur et de formation de cadres francophones. Parallèlement, l'accent a été mis sur un renforcement de l'enseignement du français dans l'ensemble du système éducatif privé et public du Liban. Il s'agit maintenant de relayer cet effort par une présence audiovisuelle renforcée, si l'on entend conforter la francophonie sur le long terme.

· Université et recherche

Dans le domaine universitaire , la création en 1996 de l'Ecole supérieure des affaires (ESA) de Beyrouth, qui résulte d'un partenariat entre la Banque du Liban, la Chambre de commerce et d'industrie de Paris et le gouvernement français se révèle une réussite. Les premières promotions se sont placées sans difficultés auprès d'entreprises libanaises de plus en plus intéressées par une formation de haut niveau à la gestion et aux finances en français. Ce succès s'explique surtout par le choix de partenaires solides qui se sont dès le début fortement impliqués dans ce projet.

Le partenariat rénové avec l'université Saint-Joseph, choisie par les gouvernements français et libanais comme pôle d'excellence francophone régional, s'est achevé en 2000 : en trois ans et avec un budget de 51 MF de part et d'autre, cette institution a été rénovée dans plusieurs disciplines (droit, sciences, linguistique, médecine). Un projet de post-partenariat continue d'accompagner le développement de cette université.

Le programme Cèdre, qui associe universités et laboratoires libanais et français, permet des partenariats avec d'autres universités libanaises. Il a ainsi permis de lancer en trois ans une quarantaine de projets dans les secteurs de la santé, de l'environnement et de la technologie.

Cette action s'appuie également sur des associations comme l'AULUF, l'active Association des Universitaires libanais diplômés de l'université française.

Dans le domaine de l'enseignement technique supérieur, la création, en 1996, de l'IUT de Saïda, issue d'un partenariat entre la France, la fondation Hariri et l'université libanaise, commence, semble-t-il, à obtenir des résultats prometteurs. Il faut s'en féliciter et accentuer notre action en faveur des formations technologiques qui correspondent aux besoins des entreprises.

· Instituts de recherche

Deux instituts de recherche français à vocation régionale ont leur siège à Beyrouth :

- l'IFAPO, créé en 1946, se consacre à la recherche archéologique. Ses activités se sont déplacées vers la Syrie et la Jordanie, les recherches au Liban connaissant une pause depuis deux ans.

- Le CERMOC, créé en 1977 et consacré aux sciences humaines est une structure plus légère qui accueille des chercheurs et doctorants français et libanais.

Compte tenu des difficultés que rencontrent ces établissements pour fonctionner de manière autonome, une réforme en cours des instituts de recherche en Méditerranée visant à un rapprochement plus institutionnel avec le CNRS et le ministère de la recherche, va permettre un renforcement en personnel et en moyens budgétaires du CERMOC et de l'IFAPO.

· Enseignement du français et action culturelle

Cette action est dirigée en direction des 560.000 francophones libanais et des 600.000 élèves concernés par l'enseignement du français, des classes maternelles aux terminales. Après avoir joué un rôle déterminant dans la réforme des programmes, actuellement en cours de mise en _uvre, il s'agit maintenant de renforcer la formation des enseignants et des chefs d'établissement. A cet effet, la France s'est associée à un programme de la Banque mondiale d'une durée de cinq ans qui a fait l'objet d'un fonds de solidarité prioritaire (FSP) de 12,5 MF.

Une action de mise à niveau pédagogique des enseignants du français commencée dans l'enseignement privé qui scolarise 60 % des enfants, se poursuit désormais dans le secteur public, là ou le besoin s'en fait le plus sentir. Le centre culturel de Beyrouth et les sept centres de province apportent sur ce point un appui déterminant. Pour les années qui viennent, l'accent sera mis sur l'enseignement préscolaire et élémentaire dans le secteur public, afin de tenir compte du transfert du privé vers le public entraîné par une baisse du pouvoir d'achat.

Outre les cours de français qu'il dispense, notre réseau de centres culturels répartis sur tout le territoire contribue à la diffusion culturelle (cinéma, théâtre, musique, arts plastiques...). En cette année du sommet de la francophonie, de nombreuses opérations de prestige sont organisées en coopération avec d'autres Etats francophones. La France cofinance ainsi des concerts de l'orchestre national de Lille et des représentations du ballet de l'opéra de Paris dans le cadre des festivals de Beit Eddine et de Baalbeck.

La France dispose en outre d'un réseau de six lycées français conventionnés avec l'AEFE et de 19 établissements privés homologués, scolarisant au total plus de 40.000 élèves. En dehors de la région de Beyrouth qui reste privilégiée, il existe un lycée français conventionné à Tripoli et un lycée homologué a été créé, en 1996, par la mission laïque à Nabatieh dans le Liban-sud.

Dans le domaine du livre enfin, est organisé, depuis 1992, à Beyrouth un salon annuel « lire en français et en musique » qui rencontre un succès croissant, y compris chez les écoliers et lycées (30 % des entrées).

· Coopération audiovisuelle

Outre le soutien à la renaissance du cinéma libanais, la promotion de l'édition musicale française et francophone et la modernisation de l'Agence nationale de l'information en partenariat avec l'AFP, la coopération audiovisuelle consiste pour l'essentiel à aider le développement de programmes francophones de télévision et avec, jusqu'à présent, plus de succès, de radio.

S'agissant de la télévision, un memorandum a été signé l'an dernier pour relancer un projet de canal francophone avec Télé-Liban, chaîne publique dont la situation ne s'améliore que lentement malgré une réforme récente et la coopération avec les huit autres chaînes privées (chacune proche d'une communauté confessionnelle) se limite à soutenir la diffusion et la production de programmes francophones.

Les perspectives de développement dans le secteur de la radio sont meilleures avec la signature en mai dernier d'une nouvelle convention de coopération entre Radio-France Internationale (RFI) et Radio Liban, redéfinissant pour cinq ans les modalités du partenariat qui lie les deux radios depuis 1995.

Afin de redonner à la radio nationale libanaise son audience, trois priorités ont été retenues :

- A cet effet, une meilleure couverture du grand Beyrouth RFI prendra à sa charge la rénovation complète du site émetteur de Beit Mery (1 MF).

- Une diffusion des programmes à l'ensemble du territoire libanais. La France financera à ce titre la rénovation des installations techniques actuelles et la construction d'un réseau d'émetteurs FM ainsi que la formation des personnels.

- Une répartition horaire plus précise des 12 heures quotidiennes de programmes de RFI diffusés par Radio-Liban.

Pour financer cette opération, un fonds de solidarité prioritaire (FSP) de 6 MF a été mis en place dès cette année, auquel s'ajoute 1 MF apporté par RFI.

Ce soutien financier élevé devrait renforcer durablement la présence de programmes en langue française au Liban.

Le succès de ce projet, qui dépend aussi de nos partenaires libanais, sera déterminant pour une éventuelle coopération dans le secteur de la télévision. Il faut souhaiter qu'à terme soit ainsi réduit le décalage qui existe au Liban entre un enseignement scolaire très francophone et un audiovisuel qui l'est très peu.

Après une période de grandes réalisation (ESA, IUT de Saïda, partenariat rénové avec St Joseph, lycée de Nabatieh), notre coopération est entrée dans une nouvelle phase avec l'entrée du Liban dans la zone de solidarité prioritaire. A des actions exceptionnelles surtout menées avec le secteur privé, devront succéder des projets à moyen terme, établis sur des bases contractuelles claires, avec des partenaires publics ou privés.

Histoire institutionnelle et politique du Liban

(Quelques repères chronologiques)

1916

Accords secrets « Sykes-Picot » de partage du Proche-Orient conclu entre la Grande-Bretagne et la France

25 avril 1920

La Conférence alliée de San Remo attribue à la France un mandat sur la Syrie

1er septembre 1920

Le Haut Commissaire français proclame la constitution du Grand Liban séparé de la Syrie

24 juillet 1922

La SDN confirme le mandat français sur la Syrie et le Liban

23 mai 1926

Proclamation de la Constitution de la République libanaise sur le modèle de la IIIème République

8 juin 1941

Proclamation par le Général Cahona de l'indépendance du Liban et de la Syrie

Nov-déc 1943

Le parlement libanais supprime tous l es articles de la Constitution qui limitaient la souveraineté du Liban.

Un accord non écrit conclu entre les communautés chrétienne et musulmane, le « Pacte national libanais », fonde un compromis politico-social sur la base du confessionnalisme.

23 mars 1949

Convention d'armistice entre le Liban et Israël. Afflux massif de réfugiés palestiniens.

1958

Tensions intercommunautaires. Débarquement américain à Beyrouth en juillet. Le Général Fourad Chefab succède à Camille Chamoun à la présidence de la République.

3 novembre 1969

L'accord libano-palestinien du Caire légalise la résistance palestinienne au Liban sud.

2 mai 1973

Début des affrontements entre l'armée libanaise et les forces palestiniennes.

13 avril 1975

Début de la guerre entre les milices chrétiennes et les islamo-progressistes soutenues par les Palestiniens.

8 mai 1976

Entrée de 6 000 soldats syriens au Liban.

14 mars - 23 juin 1978

Invasion du Liban sud par Israël.

19 mars 1978

Adoption de la résolution 425 du Conseil de sécurité demandant à Israël de retirer sans délai ses forces du territoire libanais et création de la Force intérimaire des Nations Unies pour le sud du Liban (FINUL).

6 juin 1982

Invasion du Liban par Israël.

Août/sept. 1982

Evacuation des forces palestiniennes de Beyrouth.

17 mai 1983

Accord de paix libano-israélien.

10 juin 1985

Israël achève son retrait du Liban à l'exception de la partie sud dite zone de sécurité.

20/26 février 1987

Retour de l'armée syrienne à Beyrouth ouest dont elle avait été chassée en 1982.

Septembre 1988

Le Liban a deux gouvernements, l'un chrétien dirigé par le général Michel Aoun, l'autre musulman conduit par Selim Hoss.

22 octobre 1989

Les députés du parlement élu en 1972 adoptent les accords de Taëf pour mettre fin à la guerre.

2 mars 1990

Les combats inter-chrétiens s'arrêtent.

13 octobre 1990

Le général Aoun est évincé du palais présidentiel.

22 mai 1991

Signature du traité libano-syrien de fraternité, de coopération et de coordination.

Automne 1992

Elections législatives : M. Nabib Berry, chef de la milice chiite Amal est élu Président du parlement. Le Président Elias Hraoui nomme Rafic Hariri Président du Conseil (1992-1998).

Automne 1996

Elections législatives : M. Nabib Berry est réélu à la présidence de la Chambre.

Mai 2000

Retrait israélien du Liban sud.

Juin 2000

Accession au pouvoir de Bachal El Assad en Syrie.

Automne 2000

Elections législatives : M. Nabib Berry est réélu à la présidence de la Chambre. Le Président Emile Lahoud (1998-2004) nomme Rafic Hariri Président du Conseil

Une délégation du groupe d'amitié France-Liban de l'Assemblée nationale a effectué une mission au Liban du 9 au 14 juin 2001. Ce déplacement avait pour objet d'apprécier, un an après le retrait israélien du Liban-sud et l'accession au pouvoir de Bachar El Assad en Syrie et dix mois après les élections législatives, l'évolution de la situation intérieure et régionale. Il visait également à mesurer les difficultés économiques et financières que traversent actuellement ce pays et à évaluer les perspectives d'avenir de la francophonie au Liban.

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Rapport d'information de M. Gérard Bapt présenté à la suite de la mission effectuée au Liban du 9 au 14 juin 2001 par une délégation du groupe d'amitié France-Liban.


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