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N° 1141

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 octobre 1998.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ
en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1)
sur la mission effectuée par une délégation de la Commission
en
Algérie

ET PRÉSENTÉ

PAR M. FRANÇOIS LONCLE,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Affaires étrangères

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, M. René Rouquet, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, MM. Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Jean Espilondo, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Claude Lefort, François Léotard, Pierre Lequiller, François Loncle, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Jean Rigal, Mme Yvette Roudy, MM. Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, MM. Michel Terrot, Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Aloyse Warhouver.

SOMMAIRE

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COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION5

INTRODUCTION7

I - L'ALGÉRIE FACE A DE MULTIPLES DÉFIS9

A - LE DÉFI SÉCURITAIRE9

1) Une amélioration fragile de la situation 10

2) Une violence endémique 11

B - LE DÉFI DÉMOCRATIQUE 13

1) Un certain pluralisme institutionnel 13

2) Un manque de transparence dans la prise de décision 15

3) Les critiques de certains dirigeants politiques et de la société civile 16

C - LE DÉFI ÉCONOMIQUE ET SOCIAL 18

1) Des indicateurs macro-économiques rassurants 19

2) Les réformes envisagées 20

3) L'ampleur de la crise sociale 21

II - DES RELATIONS BILATÉRALES A RENFORCER 25

A - UN ENJEU MAJEUR : L'AUGMENTATION DU NOMBRE DES VISAS ACCORDÉS AUX ALGÉRIENS 26

1) Une politique de visas extrêmement restrictive menée jusqu'en 1996 26

2) La mise en place d'un nouveau dispositif 26

B - LA RELANCE DE LA COOPÉRATION EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE 27

1) La France, partenaire commercial important de l'Algérie 28

2) Les demandes algériennes 29

C - DYNAMISER LA COOPÉRATION CULTURELLE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE AVEC L'ALGÉRIE 30

1) Une certaine ambivalence 31

2) Une coopération culturelle, scientifique et technique soutenue 32

3) Les perspectives de relance de la coopération culturelle, scientifique et technique 33

CONCLUSION 35

EXAMEN EN COMMISSION 37

ANNEXES 39

Composition de la délégation

- M. François Loncle, ancien ministre, député socialiste de l'Eure

- Mme Marie-Hélène Aubert, députée RCV de l'Eure-et-Loir

- M. Georges Hage, vice-président de la Commission des Affaires étrangères, député communiste du Nord

- M. Jacques Myard, député RPR des Yvelines

- Mme Yvette Roudy, ancien ministre, députée socialiste du Calvados

- M. Marc Reymann, député UDF du Bas-Rhin

Mesdames, Messieurs,

A l'initiative du Président et du Bureau de la Commission des Affaires étrangères, une délégation de six députés, conduite par M. François Loncle, s'est rendue en Algérie du 19 au 23 juillet 1998.

Le succès de la visite du Président Jack Lang, les déplacements à titre individuel de plusieurs députés français dont Mme Yvette Roudy, avaient largement révélé la nécessité de conférer une impulsion nouvelle aux relations franco-algériennes par des rencontres régulières avec les autorités politiques, les responsables économiques et la société civile.

En organisant une telle mission, la Commission des Affaires étrangères qui n'avait pas envoyé de délégation aussi importante en Algérie depuis 1982, souhaitait montrer sa volonté, tous groupes parlementaires confondus, de renforcer ces relations et porter sur ce pays un regard neuf et dépourvu d'a priori, certains membres de la délégation s'y rendant pour la première fois.

Soucieuse d'aller à la rencontre de l'Algérie dans sa diversité, la délégation avait manifesté le désir, quelque temps avant son départ, de se déplacer à Annaba, ce qui fut possible et à Tizi Ouzou où elle ne put se rendre en raison de la situation tendue en Kabylie après l'assassinat du chanteur et militant berbère Lounès Matoub.

A Alger, la délégation accueillie par ses homologues de la Commission des Affaires étrangères, de la coopération et de l'immigration de l'Assemblée Populaire Nationale (APN) présidée par M. Abdelkader Hadjar, s'est entretenue avec M. Abdelkader Bensalah, Président de l'APN, M. Mohamed Salah Mentouri, Président du Conseil National Economique et Social, le Président, M. Alaoui Ben El Moukhi et les membres de la Commission des affaires économiques, du développement, de l'industrie, du commerce et de la planification, le Président, M. Moham El Hichoubi et les membres de la commission des Finances et du Budget, le Président, M. Boualem Bessaieh, et les membres de la Commission des Affaires étrangères, de la coopération internationale et de la communauté algérienne à l'étranger du Conseil de la Nation et avec les responsables et les députés des groupes parlementaires de l'APN : Rassemblement National démocratique (RND), Mouvement de la Société pour la Paix (MSP), Front de Libération Nationale (FLN), Mouvement de la Renaissance (Ennahada), Front des Forces socialistes (FFS), Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD), et Parti des Travailleurs (PT). Malgré ses demandes, la délégation n'a pu rencontrer aucun responsable de l'exécutif.

Grâce à M. Alfred Siefer-Gaillardin, ambassadeur de France en Algérie, et à son équipe, de nombreux contacts avec la société civile algérienne ont été possibles et plusieurs réunions de travail importantes se sont tenues avec des chefs d'entreprise, des associations de femmes, des journalistes, des représentants de la communauté française et des autorités religieuses, comme M. Abdelmadjid Meziane, Président du Haut Conseil Islamique (HCI) et Mgr Henri Teissier, archevêque d'Alger. La délégation s'est entretenue, à sa demande, avec les familles de disparus et leurs défenseurs.

Par ailleurs à Blida où elle a été reçue par le wali (préfet), le recteur de l'Université, les représentants de l'assemblée locale et de la chambre de commerce, la délégation s'est rendue à l'université et à l'Hôpital Franz Fanon où sont soignées les victimes du terrorisme. A Annaba la délégation a rencontré le wali, les autorités locales, des représentants de la communauté française et visité des entreprises.

Tant à Alger qu'à Blida et Annaba, les députés français ont été libres de leurs mouvements, les autorités algériennes acceptant avec disponibilité les modifications de programme demandées. Aussi, des contacts informels nombreux et chaleureux avec les Algériens ont-ils été possibles.

La délégation a été impressionnée par la complexité de la situation et la multiplicité des défis auxquels l'Algérie doit faire face. Elle est revenue persuadée de la nécessité de renforcer les relations bilatérales entre la France et l'Algérie.

I - L'ALGÉRIE FACE A DE MULTIPLES DÉFIS

"Complexité extrême" davantage encore qu'"opacité", tel est le qualificatif qui convient le mieux à la situation de ce pays dont la diversité frappe. Plusieurs sociétés, plusieurs cultures, plusieurs langues et plusieurs conceptions de l'État s'efforcent de cohabiter. Les tentatives de renforcer l'unité nationale par une forte centralisation et l'arabisation autoritaire de l'administration semblent accentuer les divisions plus que les réduire. Or, les Algériens revendiquent ces différences comme une richesse. La modernité de la société civile algérienne, sa capacité à résister aux pires violences en témoignent.

L'Algérie se trouve à un tournant important de son histoire, il lui faut faire face simultanément et rapidement à des défis que les pays européens ont mis plusieurs siècles à relever : défi sécuritaire, défi institutionnel et défi économique et social.

A - Le défi sécuritaire

L'origine de la violence remonte aux émeutes à Alger, Oran et Annaba d'octobre 1988 qui ont fait vaciller le pouvoir du Président Chadli Benjedid. Après une période de répression, l'état d'urgence a été décrété pendant six jours, plus d'une centaine de personnes, selon les estimations officielles, ont été tuées et près de 3500 personnes arrêtées. Une série de réformes institutionnelles a permis l'ouverture du système politique, l'instauration du pluralisme et la liberté de la presse tandis qu'un programme de libéralisation économique était proposé. Néanmoins, aux élections locales de juin 1990, le Front Islamique du Salut (FIS) recueillait 55 % des voix. En juin 1991, 700 membres et sympathisants du FIS dont le Président Abani Madani et le vice-président Ali Belhadj étaient arrêtés à la suite d'affrontements meurtriers entre islamistes et forces de l'ordre et de l'appel du FIS à la grève générale. Le FIS montrait alors sa capacité à canaliser et organiser les mécontents. Il obtenait d'ailleurs 47,5 % des suffrages au premier tour des élections législatives du 26 décembre 1991 et donc 231 sièges sur les 430 de la nouvelle assemblée.

En janvier 1992, l'Assemblée Populaire Nationale était dissoute, le Président Chadli démissionnait, le deuxième tour des élections législatives était suspendu, le pouvoir était confié à un Haut Comité d'État (HCE) de cinq membres présidé par Mohamed Boudiaf. Au début de février 1992, les forces de sécurité investirent les bureaux du FIS alors que le pays connaissait des flambées de violences sporadiques et l'état d'urgence fut instauré puis prorogé sine die. En mars 1992 le FIS était officiellement dissous par décision de la Cour suprême. Le 29 juin 1992, le Président Boudiaf était assassiné. L'année 1992 et les suivantes ont été marquées par la violence. Le FIS, à cette époque, a créé des groupes armés, notamment l'Armée Islamique du Salut (AIS) avec dans certains cas l'appui matériel de pays étrangers. Le terrorisme a d'abord visé les forces de sécurité, notamment la haute hiérarchie militaire, puis les fonctionnaires ; il a ensuite pris pour cible les intellectuels, écrivains, artistes, avocats, médecins, et surtout journalistes ; puis il s'est efforcé de paralyser le pays en s'attaquant aux infrastructures et notamment aux écoles. Des maquis ont été créés et des zones importantes du pays ont été contrôlées par les islamistes.

Depuis 1992, les actions terroristes et les ripostes des forces de sécurité ont occasionné la mort de quelques 60 000 personnes. Cependant, le renversement de l'État algérien par les islamistes, envisageable de 1992 à 1994, n'est plus possible aujourd'hui. Les groupes armés ne semblent plus en mesure de l'emporter militairement malgré les actes de violence aveugles et barbares qu'ils continuent de commettre.

1) UNE AMÉLIORATION FRAGILE DE LA SITUATION

La plupart des officiels, malgré de réelles nuances constatent une amélioration de la situation sur le plan sécuritaire depuis 1994 et le spectacle de la rue dans la journée paraît conforter cette analyse. A Alger et à fortiori Annaba, la délégation a observé que la population se pressait en foule dans les rues et aux terrasses des cafés. De nombreux Algériens remarquent avec satisfaction que "la peur a changé de camp". Les actes de la tragédie algérienne ne s'écrivent pas tous dans le sang et les larmes. En dépit de la violence, l'Algérie se défend. Le pays s'acharne à vaincre sa peur. La société civile relève la tête.

Les succès remportés par les autorités algériennes dans leur lutte anti-terroriste sont incontestables, des zones entières contrôlées par les groupes armés ont été reprises. L'AIS branche armée du FIS, forte de 5 000 hommes environ respecte la trêve depuis octobre 1997. La population horrifiée par les massacres perpétrés par les quelques 2 000 hommes du GIA, aspire à se défendre elle-même. La multiplication de groupes d'autodéfense et de gardes communaux contribue à la protection de populations et fait reculer la peur. L'armée et les forces algériennes de sécurité qui disposent de 100 000 à 160 000 hommes peut désormais se consacrer à des opérations de grande ampleur contre les GIA alors que les patriotes sont chargés de quadriller le territoire de leur commune et de protéger la population des attaques terroristes. Cette stratégie produit des effets car des pertes importantes ont été essuyées par les GIA. Malgré ces succès, on peut s'interroger sur l'impact de la "privatisation" de la violence sur l'autorité de l'État d'autant que son niveau reste élevé, notamment dans la plaine de la Mitidja.

A cet égard, les responsables du FFS se démarquent nettement des autres partis politiques en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme dont ils mettent en doute le recul. Selon eux, la seule solution sécuritaire est insuffisante et il est nécessaire d'établir un dialogue avec les dirigeants du FIS pour arriver à une solution politique qui permettrait de mettre fin au cycle infernal de la violence.

2) UNE VIOLENCE ENDÉMIQUE

Depuis l'appel à la trêve lancé par l'AIS, la stratégie des GIA a changé et ils conservent de fortes capacités de nuisance malgré les opérations de ratissage lancées par les forces de sécurité. Moins aptes à commettre des attentats dans les villes, ils s'attaquent à des villages isolés et la reprise des massacres à l'occasion du Ramadan en est la triste illustration. De la fin 1997 au début 1998, des milliers de villageois, des femmes et des enfants, des bébés ont été assassinés de façon particulièrement horrible et il ne se passe guère de semaines sans qu'un massacre ne soit découvert malgré la présence des patriotes. L'assassinat de Lounès Matoub revendiqué par Hassan Habab, émir dissident du GIA, montre que le dispositif anti terroriste présente des failles. Certains interlocuteurs de la délégation se sont interrogés sur la capacité de l'État à mettre un point final à la violence car l'armée algérienne entraînée à la défense du territoire face à des menaces extérieures ne dispose ni des équipements, ni de la logistique adaptés à la lutte anti-terroriste dans des villages isolés de montagne. La passivité de l'armée, lors des massacres du Ramadan a été dénoncée.

Les possibilités de reconstitution des GIA qui recrutent auprès d'une jeunesse désoeuvrée et désenchantée restent vastes Même si les effectifs des groupes terroristes ne dépassent pas quelques milliers, leur capacité de nuisance demeure. La rupture entre l'AIS et les GIA semble avoir accentué leur caractère incontrôlable. Il est vraisemblable qu'ils commettent des actes de pur banditisme. M. Abdelkader Hajar et de nombreux députés ont critiqué l'attitude de certains pays membres de l'Union européenne qu'ils accusent d'abriter des réseaux terroristes. Ils ont demandé que la lutte contre ces réseaux soit intensifiée et que la France appuie l'Algérie dans ses démarches auprès de ces pays. Le combat contre le terrorisme ne peut être exempt de dérapages et de confusions. Construire un état de droit dans un pays en proie au terrorisme n'est pas une tâche aisée.

Certains groupes de légitime défense ont exercé des actes de vengeance sur des familles réputées avoir aidé des terroristes et plus généralement, les opérations de vendetta sont assez fréquentes dans certains villages. A la violence aveugle des GIA, répond une répression brutale de l'armée, les exécutions sommaires ne sont pas rares. Les autorités algériennes le reconnaissent en en minimisant le nombre. Elles évoquent "les dépassements" que le terrorisme génère inévitablement et l'embarras des responsables des organisations algériennes officielles des droits de l'homme est manifeste. Il n'empêche que ce problème crucial existe, de nombreuses familles déplorent la disparition d'un proche, un père, un frère et un mari et soupçonnent fortement les forces de sécurité d'être à l'origine de leur drame.

Il est difficile de connaître le nombre exact de disparus et les familles ont saisi les autorités compétentes, sans obtenir de réponse. Cette douloureuse question doit être réglée car elle génère un réel malaise dans un État qui se veut démocratique et respectueux de la légalité. La délégation a rencontré les familles de disparus qui exigent à juste titre de savoir ce qu'il est advenu de leurs proches. Cette rencontre extrêmement émouvante a plongé certains membres de la délégation dans une profonde perplexité quant à la réalité de l'existence d'un état de droit en Algérie. Mais, on doit s'inscrire en faux contre l'idée avancée par certains observateurs français que les atteintes par l'Etat aux droits fondamentaux légitimeraient le terrorisme.

Pourtant, seul le renforcement de l'état de droit permettra à une partie de la population -notamment en Kabylie- qui doute de la capacité des autorités à gouverner, de reprendre confiance. L'Etat a fait reculer le terrorisme islamique mais il n'a pas encore acquis une véritable légitimité vis à vis de la population algérienne.

B - Le défi démocratique

La liberté de la presse écrite dont on a perçu ces jours derniers les limites, le goût du débat, la pluralité des opinions, la franchise des réponses aux questions, les critiques véhémentes contre le pouvoir en place dans l'enceinte du Parlement comme dans la société civile et la presse frappent les observateurs. La quasi totalité des personnalités politiques a insisté sur la jeunesse des institutions et sur l'exception algérienne. L'existence d'un certain pluralisme institutionnel paraît de prime abord peu contestable, même si la façon dont les décisions sont prises en dernier ressort n'apparaît pas toujours clairement.

1) UN CERTAIN PLURALISME INSTITUTIONNEL

L'interruption des élections législatives en 1992 avait remis en cause la légalité constitutionnelle de 1993 à 1995, il n'y avait ni président ni parlement, ni assemblée locale élue. Seul le Haut Conseil d'État détenait le pouvoir. Les élections présidentielles du 16 novembre 1995 ont marqué un tournant car malgré les menaces des terroristes qui appelaient au boycott, la population a massivement voté : 74,92 % de participation ; le Général Liamine Zéroual a remporté ces élections avec 61,43 % de suffrages devant le candidat islamiste modéré Mahfoud Nahnah (25,38 %) et Said Saadi, candidat du RCD (9,29 %). Les résultats de ces élections ont immédiatement été contestés par le FFS et le FIS qui avaient appelé au boycott. Mais les observateurs internationaux comme la communauté internationale avaient porté un jugement positif sur ce scrutin. Après avoir déclaré "clos" le dossier du FIS, le Président Zéroual a entamé un dialogue avec les autres partis politiques qui a abouti en mai 1996 à une plate-forme de réconciliation. Celle-ci devait proposer des réformes constitutionnelles discutées et approuvées par une Conférence nationale à laquelle ont été soumis des amendements constitutionnels. Les amendements à la Constitution ont été approuvés par 84,9 % de voix lors du référendum du 28 novembre 1996, avec un taux de participation de 79,8 %. Ce scrutin s'est déroulé sans observateurs étrangers, les journalistes ayant en outre dénoncé les entraves mises par le pouvoir à leur déplacement.

L'interdiction des partis politiques créés sur une base religieuse linguistique, raciale, sexuelle, corporatiste ou régionaliste, le maintien de l'islam comme "religion d'État" et la création d'un Haut Conseil Islamique sont les principales modifications apportées à la Constitution dont le nouveau préambule stipule que les composantes fondamentales de l'identité du peuple algérien sont "le nationalisme, l''Islam, l'arabité et dans une certaine mesure l'amzighté". Par ailleurs, il est précisé que tout amendement à la Constitution portant atteinte à la nature républicaine de l'État, à l'Islam en tant que religion d'État ou à la langue arabe en tant que langue officielle est interdit. Les pouvoirs du Président de la République restent étendus. Il est autorisé à légiférer par décret en dehors des sessions de l'Assemblée Populaire Nationale et en cas d'urgence. Il nomme le Premier Ministre, le Gouverneur de la Banque d'Algérie, les juges, les responsables de la sécurité et les walis. Une nouvelle chambre, le Conseil de la Nation, dont le Président de la République nomme un tiers des membres, a été créée.

Le 5 juin 1997 des élections législatives ont eu lieu avec une participation électorale plus faible 65,16 % selon les chiffres officiels ; des fraudes ont été signalées par les observateurs comme par les partis politiques. Le scrutin a été marqué par la victoire, au sein de la mouvance nationaliste, du nouveau parti présidentiel, le RND (avec 33,7 % de suffrages exprimés, 156 sièges) qui a devancé le FLN (14,2 % , 62 sièges). La mouvance islamiste légale composée du MSP (14,8 %, 69 sièges) et du parti de la Renaissance Ennahada (8,7%, 34 sièges) constitue une force importante alors que la mouvance démocrate : FFS (4,4%, 20 sièges) et RCD (4,2 %, 19 sièges) est faiblement représentée. Le 23 octobre 1997, les élections municipales et départementales ont été remportées par le RND avec 53 % des voix et un taux de participation de 67,69 % pour les élections municipales et de 62,73 % pour les départementales.

Le 25 décembre 1997 l'édifice institutionnel mis en place par le Président Zéroual était parachevé par l'élection au suffrage indirect par les assemblées locales des deux tiers du Conseil de la Nation. Le RND a obtenu 80 des 96 sièges à pourvoir, le FLN 10, le FFS 4, le MSP 2. Le Président a en outre nommé les 48 autres membres du Conseil de la Nation.

Ainsi, toutes les institutions sont dominées par le parti du Président, le RND. Toutefois, ce parti n'est pas monolithique ; sur les grands débats qui agitent la classe politique algérienne, de fortes divergences d'appréciation ont été constatées en son sein où se côtoient nostalgiques du parti unique et jeunes cadres progressistes et démocrates. Dans la semaine suivant le scrutin, des manifestations ont été organisées par l'ensemble des partis, à l'exception du RND, pour dénoncer la fraude électorale.

Le regard que porte la classe politique dans son ensemble sur les nouvelles institutions est lucide sans autosatisfaction. Elle souligne que malgré la faiblesse de ses pouvoirs l'Assemblée populaire Nationale reste un lieu d'échanges privilégiés où le gouvernement est interpellé comme en témoigne le débat houleux, diffusé intégralement par la télévision, sur les problèmes de sécurité après les massacres du Ramadan. La liberté d'expression, l'ouverture et le pluralisme sont perçus comme un progrès par la classe politique qui se montre néanmoins embarrassée : elle revendique une forme d'indulgence pour la jeune démocratie algérienne, tout en dénonçant, avec plus ou moins de vigueur selon les partis politiques, les failles du système. Le vrai clivage entre le pouvoir algérien et les aspirations de la société civile est celui du monolithisme face au concept de l'Algérie plurielle. L'Algérie, le plus occidental des pays arabes est à la fois berbère, arabe, méditerranéenne, africaine aussi, c'est sa richesse. Il y a urgence pour le pouvoir à reconnaître cette diversité.

2) UN MANQUE DE TRANSPARENCE DANS LA PRISE DE DÉCISION.

Si les partis politiques débattent avec âpreté de la situation sécuritaire, du code de la famille, de l'État, des libertés publiques comme de la nature de l'État, ils semblent peu ou pas associés à la prise de décision qui émane d'un exécutif dominé par les militaires comme le rappellent le RCD et le FFS. Trois décisions le démontrent.

- Le 5 juillet 1998, soit dix jours après l'assassinat de Lounès Matoub sur une route de Kabylie, la loi sur la généralisation de l'utilisation de la langue arabe adoptée par le conseil national de transition le 17 décembre 1996 entrait en vigueur. Au terme de la loi, l'usage exclusif de l'arabe s'impose aux "administrations publiques, institutions, entreprises et associations quelle que soit leur nature". D'après les responsables du FFS et du RCD comme certains membres du RND, cette décision qui a généré des émeutes dans une Kabylie endeuillée par la mort d'un des siens, ne s'imposait pas et était inapplicable dans la réalité. Elle a exacerbé les divisions au sein de la société algérienne. La généralisation de l'arabe est perçue par certaines couches sociales, comme un gage donné à la mouvance islamiste qui en est d'ailleurs très satisfaite. Pour elle, l'arabité constitue le fondement essentiel de l'identité nationale. En recevant M. Ahmed Djedaï, secrétaire général du FFS le 6 juillet 1998, le Président Zéroual s'est ensuite efforcé de minimiser l'impact de cette mesure, qui serait selon lui appliquée graduellement. La plupart des entretiens officiels de la délégation se sont déroulés en français même s'ils commençaient fréquemment en arabe.

- Au début de son séjour, la délégation a entendu de véhémentes protestations de journalistes de la presse privée contre la décision du Ministre de la culture et de la communication de les expulser de leur logement de sécurité de l'hôtel Mazagran situé à 30 km d'Alger car l'hôtel devait être rénové pour accueillir une organisation internationale. Cette décision a entraîné une grève d'une quinzaine de jours, soutenue par les éditeurs de la presse privée. Certains de nos interlocuteurs ont observé que les journalistes visés par la mesure étaient, comme par hasard, peu complaisants à l'égard des autorités.

- Pendant sa mission, la délégation a appris que 300 enfants algériens démunis avaient été empêchés de se rendre en France au moment de leur embarquement au port d'Alger alors que des familles d'accueil les attendaient dans notre pays. Les dirigeants des associations algériennes organisatrices de l'opération ont littéralement été mis devant le fait accompli. La délégation a protesté contre cette décision brutale, mais n'a obtenu aucune explication concluante de la part de responsables politiques proches du pouvoir qu'elle a interrogés au Conseil de la Nation.

Ces exemples pris sur le vif illustrent largement la nécessité de faire progresser la démocratie et l'état de droit en Algérie.

3) LES CRITIQUES DE CERTAINS DIRIGEANTS POLITIQUES ET DE LA SOCIÉTÉ CIVILE

Les principales critiques ont porté sur la nature du régime politique, l'absence de respect des droits de l'Homme et le code de la famille en vigueur.

a) La nature du régime politique.

Pour le FFS, les institutions mises en place ne confèrent qu'une simple façade démocratique au régime ; le gouvernement ne détient pas le pouvoir ; seuls les militaires décident, avec une redoutable capacité de manipulation de la presse et de la communauté internationale. L'ancienne nomenklatura au pouvoir perdure ; aussi les pratiques mafieuses et la corruption restent-elles fréquentes. Le FFS va même plus loin, selon lui, le terrorisme est le produit de l'échec du régime, incapable de mettre fin à la crise sociale et donc aux causes premières de la violence.

Pour le RCD, l'Algérie vit une crise, le fossé entre les aspirations de la société et le pouvoir s'élargit ; les jeunes générations ne se reconnaissent pas dans le discours politique fossilisé qu'on leur tient, le souci de l'État et du bien public ne constitue pas la préoccupation principale de dirigeants qui désirent avant tout se maintenir au pouvoir. Sans base sociale, le régime actuel n'est pas performant, il est incapable de surmonter la crise institutionnelle. Le pluralisme apparent a été arraché par la société civile qui aspire à la modernité. Alors que l'islamisme politique a échoué, l'Algérie vit dans une atmosphère de fin de règne et le pouvoir prend des décisions rétrogrades comme l'arabisation et conforte inutilement l'islamisme.

Pour la mouvance démocrate et la mouvance islamique, les élections législatives, comme les élections locales ont été entachées de fraudes massives, ce qui jette la suspicion sur la volonté de construire une véritable démocratie. Le FFS considère que les autorités ont établi à l'avance des quotas de sièges pour chaque parti.

b) L'absence de respect des droits de l'Homme

Le RCD a vigoureusement dénoncé le silence du Président de la République lors de l'assassinat de Lounès Matoub et les violences policières qui ont fait trois victimes dans les rangs des manifestants en Kabylie. Selon lui, l'État algérien reste culturellement policier.

Pour le FFS, les droits de l'Homme sont constamment bafoués, l'immunité parlementaire est contestée, les journalistes sont en grève, et il n'y a pas de syndicat autonome. Depuis 1992, 10.000 personnes sont détenues, la torture dans les prisons est systématique, les exécutions extrajudiciaires fréquentes. Les familles de disparus sont prêtes à témoigner de la violence de l'État. Selon le FFS, la répression du terrorisme n'excuse pas la violation des droits de l'Homme car l'État se doit de respecter la légalité. Ce parti considère d'ailleurs que la communauté internationale, trop complaisante avec le régime politique algérien, aurait dû appuyer la venue d'une commission d'enquête internationale. Cette position est fortement contestée par le RND et le FLN qui considèrent que la venue d'une commission d'enquête internationale en Algérie constituerait une ingérence inacceptable dans les affaires intérieures algériennes et ferait douter de l'identité des terroristes qui sont membres des GIA. Cependant, la stratégie anti-terroriste des responsables fait l'objet de critiques récurrentes des organisations non gouvernementales comme de la communauté internationale. Le rapport d'information de la mission chargée par le Secrétaire Général de l'ONU d'apprécier la situation en Algérie a rappelé que "les forces de police devaient être tenues d'observer les règles les plus strictes de la légalité".

c) Le code de la famille

La réforme du code de la famille suscite des débats passionnés. L'actuel code de la famille contient des dispositions anti-démocratiques, fortement discriminatoires et dégradantes à l'égard des femmes qui sont traitées comme des mineures. Il autorise la bigamie et la répudiation unilatérale par le mari, ce qui prive fréquemment l'épouse répudiée et ses enfants de leur logement. Les solidarités familiales traditionnelles s'estompant avec la crise et l'urbanisation, chaque année, des femmes répudiées et leurs enfants se retrouvent à la rue. La situation des Algériennes est d'autant plus préoccupante qu'elles sont doublement victimes du terrorisme. Elles sont enlevées, maltraitées, violées, assassinées par les terroristes et indirectement victimes des violences perpétrées contre des membres de leur famille, ce qui les oblige à élever seules leurs enfants. De plus, certaines familles en zone rurale refusent d'envoyer leur fille à l'école de peur qu'elles ne soient victimes d'attentats.

Les associations féminines, le FFS, le RCD mais également des députés du RCD semblent prêts à réformer le code de la famille. Les propos de M. Meziane, président du Haut Conseil islamique (HCI), ont démontré que les partis de la mouvance islamique qui souhaitent le maintien, voire le durcissement du code de la famille au nom de l'arabité et de l'Islam, faisaient fausse route. Le Président du HCI a estimé que la polygamie, la répudiation à la seule initiative de l'époux, la mise sous tutelle de la femme ne sont pas conformes à l'esprit du Coran qui prône la tolérance, l'égalité et la liberté. Il n'est pas opposé à la possibilité pour les femmes violées par les terroristes de se faire avorter sous certaines conditions. Le débat sur le statut de la femme et le code de la famille révèle le profond clivage entre deux Algérie, une Algérie rurale et traditionaliste et une Algérie urbaine tournée vers la modernité. La nécessité de réformer avec lenteur le code de la famille comme l'attitude prudente sur ce point de la France pendant la colonisation sont fréquemment invoquées pour bloquer tout changement.

La démission du Président Zéroual, sur fond de guerre des clans, au sommet du pouvoir, le 11 septembre dernier démontre que le système politique algérien, malgré une certaine ouverture, demeure instable. Les atteintes récentes à la liberté de la presse privée montrent la fragilité du pluralisme auquel les Algériens sont pourtant très attachés. Les répercussions sociales de la crise économique que traverse l'Algérie risquent d'accroître ces incertitudes.

C - LE DÉFI ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Malgré ses richesses, l'Algérie, troisième puissance économique de l'Afrique doit faire face à d'immenses problèmes économiques et sociaux et ses chances de rétablir la stabilité sont directement liées à sa capacité à les résoudre. Le gouvernement algérien a réussi à stabiliser la situation macro-économique de l'Algérie et a entrepris des réformes structurelles mais le coût social de ces mesures pèse lourdement sur une population de 28,9 millions d'habitants dont 56% est concentrée sur 3% du territoire et 52% vit dans les villes.

1) DES INDICATEURS MACRO-ÉCONOMIQUES RASSURANTS

La chute brutale du cours du pétrole au cours de la deuxième moitié des années 1980 a largement contribué à la dégradation de l'économie algérienne fortement dépendante du cours des hydrocarbures. En 1994 et 1995, l'Algérie avait été contrainte de conclure des accords avec le FMI pour obtenir un rééchelonnement de sa dette extérieure aux clubs de Paris et de Londres. La période de grâce du premier rééchelonnement et de l'accord de facilité de financement élargi conclu avec le FMI a pris fin en mai dernier. L'aide apportée par les institutions financières internationales, notamment grâce au rééchelonnement de la dette extérieure (32,6 millions de dollars en 1997, soit 69% du PIB) a permis d'en alléger le service qui grevait le budget de l'État et déséquilibrait la balance des paiements. Cependant, le Gouvernement a décidé de ne pas renouveler son accord avec le FMI mais maintient avec lui un contact économique étroit et poursuit les politiques économiques qu'il avait lancées.

La situation financière de l'Algérie s'est sensiblement améliorée au cours des cinq dernières années. La capacité de paiements extérieurs de l'Algérie a été restaurée. L'excédent de la balance des paiements courants, après avoir représenté 2,7% du PIB en 1996, s'est élevé à 6,7% environ en 1997. Parallèlement au maintien d'excédents courants, les réserves de change ont atteint 7,6 milliards de dollars en 1997 (contre 4,2 en 1996). Le taux de croissance s'élève à 2,3% en 1997 contre - 2,2% en 1993 et 3,8% en 1996 et d'après les prévisions algériennes, la conjoncture pétrolière durablement défavorable ne devrait pas remettre en cause les paiements extérieurs de l'Algérie avant 2004-2005, ce qui paraît très optimiste.

Le parachèvement de la libéralisation des prix et du commerce extérieur et le maintien de politiques monétaire et budgétaire restrictives a permis l'absorption du marché noir par le marché officiel et la limitation de la croissance des prix. Au total, le taux d'inflation est passé de 29,8% en moyenne annuelle en 1995 à 18,7% en 1996 et 6,1% en 1997. La croissance des prix devrait se stabiliser à 5% en 1998. L'Algérie a donc maîtrisé son inflation. Les finances publiques ont été assainies grâce à la stabilisation des dépenses d'équipement et de fonctionnement, notamment de personnel. Le budget de l'État a enregistré un excédent de 2,3% du PIB en 1997, après un excédent de 3% en 1996, alors que le déficit s'élevait à 9% en 1993.

Parallèlement, l'Algérie a cherché à s'intégrer à l'économie régionale et aux marchés extérieurs. Elle s'efforce de mener des négociations avec l'Union européenne et de trouver des partenaires étrangers. Ces bons indicateurs économiques sont encourageants et des réformes structurelles sont envisagées.

2) LES RÉFORMES ENVISAGÉES

La privatisation est à l'ordre du jour et semble faire l'unanimité auprès des opérateurs économiques algériens, comme des dirigeants politiques. Un programme de privatisation a été mis en oeuvre : le secteur touristique, les eaux thermales sont en cours de privatisation. Il est également prévu de privatiser les transports. Le système retenu est celui de l'appel d'offres, les opérations de partenariat avec des investisseurs étrangers sont privilégiées. D'après les membres du Conseil national de privatisation, les résultats sont encourageants, mais l'accélération des privatisations implique une réforme en profondeur du système financier et bancaire qui n'est pas suffisamment performant.

La restructuration des terres agricoles (8 millions d'hectares) est également à l'étude pour assurer à l'Algérie l'autosuffisance alimentaire et réduire la part de ses importations agro-alimentaires en modernisant l'agriculture. Un projet de loi foncière doit être débattu afin de mettre en vente ou en location les terres agricoles appartenant à l'État. Ce secteur est important pour l'avenir de l'économie algérienne, car de réelles possibilités de développer une industrie agro-alimentaire créatrice d'emplois existent. Les visites d'unités de production à Blida et Annaba le démontrent. Le développement du petit commerce est réel et utile dans un pays qui connaît des difficultés de distribution.

Par ailleurs, le projet de loi de finances complémentaire pour 1998, adopté le 6 mai dernier, a prévu une relance budgétaire d'inspiration keynésienne reposant sur une augmentation des dépenses d'équipement de 25% par rapport à la loi de finances initiale. Un déficit budgétaire, d'environ 2% du PIB, devrait réapparaître pour la première fois depuis 1994. Le choix des secteurs retenus (logements, infrastructures publiques et agricoles) devrait favoriser la reprise de l'activité. Selon les membres de la Commission des finances et du budget, les budgets de l'éducation et de l'enseignement supérieur pour l'exercice 1999 seront en hausse et un programme de création de 1,2 million d'emplois et de construction de 800.000 logements d'ici l'an 2000 sera lancé.

L'accélération des réformes est nécessaire car les autorités algériennes ne parviennent pas encore à créer un environnement économique favorable aux investissements privés. Des incertitudes pèsent sur le cadre juridique des investissements et dissuadent les opérateurs étrangers. Les réformes structurelles ont pris du retard alors que la crise sociale s'accentue.

3) L'AMPLEUR DE LA CRISE SOCIALE

La croissance actuelle est insuffisante pour répondre aux besoins de la population, alors que le chômage touche 2,3 millions de personnes (près de 30% de la population active). M. Mentouri, Président du Conseil national économique et social comme la plupart des dirigeants politiques, a insisté sur l'ampleur du taux de chômage des jeunes : 60 à 70%. Ce phénomène, aggravé par quatre années de politiques d'ajustement structurel, risque de perdurer en raison des privatisations projetées et de la réduction du nombre des fonctionnaires. Or, selon lui, la population active continue de croître de près de 5% par an à la suite du choc démographique des années 1970. Le tassement actuel de la démographie (taux de croissance de 2,5%) n'aura d'effet sur le chômage que dans 15 ans. La maîtrise de la démographie, encore insuffisante, reste préoccupante.

L'impact de ce choc démographique combiné aux politiques d'ajustement structurel a des conséquences graves sur la vie quotidienne des Algériens. Ainsi, le déficit cumulé dans la production de logements est à l'origine de taux moyens d'occupation de près de 7,5 personnes par appartement et souvent 3 personnes par pièce. La crise du logement est un facteur majeur de tension sociale.

Le système scolaire est sinistré et de nombreux Algériens l'accusent d'incompétence, voire de véhiculer une vision étroite et rétrograde de l'Islam. Il génère comme le craignait Kateb Yacine "des analphabètes trilingues". L'arabisation du système scolaire dans de mauvaises conditions par des professeurs d'arabe littéraire étrangers souvent liés à des milieux intégristes proche-orientaux est dénoncée comme l'une des causes de la montée de l'intégrisme religieux auparavant peu répandue en Algérie. D'après nombre d'Algériens, ce système scolaire peu performant et répondant insuffisamment à l'explosion démographique a accentué le fossé entre les francophones qui, privilégiés, avaient pu étudier en France et les arabophones. Aussi, pour eux, la question prioritaire n'est-elle pas d'arabiser le système d'enseignement mais d'en améliorer le fonctionnement unanimement jugé déplorable.

La généralisation de l'arabe dans l'enseignement primaire ou secondaire où le français n'est enseigné qu'en 4ème (équivalent CM1), se révèle impossible à l'université d'ici l'horizon 2000, faute de manuels et d'enseignants arabophones. La majorité des cours sont encore dispensés en français, en particulier en médecine et dans toutes les autres matières scientifiques. Cette situation crée un réel désarroi et de forte frustration chez les étudiants. A l'université de Blida, presque les trois quarts des étudiants rencontrés étaient arabophones et s'exprimaient mal ou pas du tout en français. Or, la plupart ignoraient en quelle langue les disciplines où ils s'inscrivaient, allaient être enseignées. Dans de tels cas, l'usage du français ne peut être vécu que comme une contrainte génératrice de discrimination.

Les Algériens se plaignent également de leur système de santé, de moins en moins efficace malgré le travail remarquable accompli par nombre de médecins compétents et courageux, comme ceux rencontrés à l'hôpital Franz Fanon de Blida. Les assassinats et les destructions commises par les terroristes qui ont touché les infrastructures, ont contribué à désorganiser le système de garanties sociales dont bénéficiaient les Algériens au début des années 1980.

Les autorités accordent une attention particulière au coût social des mesures économiques et espèrent financer par la privatisation de certains secteurs les réformes. La réduction du chômage des jeunes et l'amélioration des secteurs du logement, de l'éducation et de la santé sont une urgence pour l'Algérie, car le plein succès dans la lutte contre le terrorisme en dépend.

Les Algériens attendent beaucoup de l'Union européenne et de la France pour développer des partenariats renforcer et diversifier leur économie, trop dépendante des hydrocarbures (96,5% des exportations algériennes en 1997). Dans ce contexte, le renforcement des relations bilatérales entre l'Algérie et la France est une priorité pour les deux pays.

II - DES RELATIONS BILATÉRALES À RENFORCER

La crise violente en Algérie depuis 1992 et ses répercussions sur la sécurité des ressortissants français, dont une quarantaine ont été assassinés, avaient contraint la France à limiter ses relations avec ce pays en y réduisant au minimum sa présence. La prise d'otages de l'Airbus d'Air France en décembre 1994 et l'enlèvement et l'assassinat des sept moines de Tibérine au printemps 1996 avaient contribué à accentuer la réserve de la France. Or, l'Algérie évolue et aujourd'hui aspire à s'ouvrir vers l'étranger.

La France comme l'Algérie, au-delà de leur histoire commune qui suscite de part et d'autres des relations passionnelles et complexes, doivent rénover et renforcer leurs relations bilatérales. La délégation a sans cesse entendu ce message, que l'accueil chaleureux qu'elle a reçu à Alger, à Blida et à Annaba de la part des officiels comme des Algériens rencontrés fortuitement, confirmait. Les rapports directs, francs et confiants qu'elle a établis lors de contacts programmés comme imprévus le démontrent. Il n'était pas évident pour les organisateurs algériens de la mission d'accepter la venue d'une délégation parlementaire étrangère à l'hôpital Franz Fanon de Blida où sont soignées les victimes du terrorisme.

En débattant avec ses homologues comme avec les représentants des associations et les responsables économiques, la délégation a constaté que l'amélioration des relations bilatérales passe obligatoirement par l'augmentation du nombre des visas accordés par la France aux ressortissants algériens, par une coopération économique axée sur le partenariat et une coopération culturelle plus intense.

A - UN ENJEU MAJEUR : L'AUGMENTATION DU NOMBRE DES VISAS ACCORDÉS AUX     ALGÉRIENS

1) UNE POLITIQUE DE VISAS EXTRÊMEMENT RESTRICTIVE MENÉE JUSQU'EN 1996

En 1990 la France avait délivré 507 000 visas d'entrée en France à des ressortissants algériens, en 1996 ce chiffre tombait à 50 000 soit dix fois moins. L'Algérie ont été le seul pays touché par la politique de restriction du nombre de visas, menée par le gouvernement précédent mais plus qu'ailleurs cette politique a eu un résultat catastrophique sur les relations bilatérales. Les Algériens ayant très mal vécu la suspicion dont ils étaient l'objet alors qu'ils subissaient chez eux les drames provoqués par le terrorisme. La fermeture des consulats d'Oran, d'Annaba et d'Alger en 1995 au demeurant parfaitement justifiée par la situation sécuritaire, a accentué un certain sentiment d'abandon.

Dès le début de la législature, le Président et les membres de la Commission des Affaires étrangères, comme ceux du Groupe d'amitié France-Algérie de l'Assemblée Nationale ont attiré l'attention du ministère des Affaires étrangères sur la gravité de la situation. A de multiples reprises, le Président Jack Lang s'est indigné de cette situation dont l'impact sur les 800.000 Algériens vivant en France et les très nombreux français d'origine algérienne était calamiteux. La délégation ne peut que se faire l'écho des difficultés persistantes que connaissent encore actuellement les Algériens qui désirent se rendre en France. Les récits des conditions kafkaïennes et incompréhensibles dans lesquelles sont accordés ou refusés les visas d'entrée en France, parfois à une même personne, abondent. Avec finesse, amertume ou colère, les Algériens expliquent qu'ils n'ont pu se rendre en France pour assister à une fête familiale, revoir un proche mourant, se faire soigner, participer à un échange universitaire ou signer un contrat important pour une entreprise. Il ne se passe pas un jour sans qu'un parlementaire français ne soit saisi de plusieurs cas de refus ou de non-réponse à une demande de visa qui paraît faite en bonne et due forme. Cependant, des mesures seront prises dans les mois à venir pour assainir cette situation inacceptable.

2) LA MISE EN PLACE D'UN NOUVEAU DISPOSITIF

Une première série d'instructions données en 1997 a permis d'enrayer la chute du nombre des visas. Après avoir identifié les goulots d'étranglement dans le traitement des demandes, les autorités françaises ont décidé de moderniser le Bureau des Visas Algérie (BVA) de Nantes qui gère par correspondance toutes les demandes. Onze fonctionnaires ont été ajoutés sur quarante cinq déjà en poste et la modernisation du réseau interne de Nantes a permis d'accélérer les procédures dont la durée reste dépendante du délai de réponse du bureau des visas du Ministère de l'Intérieur et de la rapidité de réaction des pays de l'espace Schengen obligatoirement consultés s'agissant de l'Algérie et qui disposent d'un délai de près de trois semaines pour répondre.

Conformément à la nouvelle politique des visas mise en oeuvre en mai dernier, les intellectuels, les scientifiques, les hommes d'affaires et les familles de ressortissants français voient désormais leur dossier intégralement traité à Alger sans passer par le BVA de Nantes. Pour atteindre l'objectif du doublement des visas pour 1998 et à terme, le niveau du début des années 1990, d'autres mesures doivent intervenir rapidement. De nouveaux locaux consulaires actuellement en construction à l'intérieur du parc de l'ambassade de France à Alger seront prochainement achevés. Il est prévu d'accroître de deux à sept le nombre de guichets afin de remédier aux difficultés liées à la la fermeture des consulats. La délégation s'est interrogée sur l'opportunité de les rouvrir dès lors que toutes les garanties de sécurité sont offertes aux personnels qui y travaillent. La réouverture à court terme du consulat de France à Annaba où la communauté française nombreuse et dynamique le souhaite et, à plus longue échéance, de celui d'Oran, constituerait des signes forts et hautement symboliques de réchauffement des relations franco-algériennes et encouragerait les entreprises françaises qui désirent investir en Algérie.

L'augmentation du nombre des visas aura sans nul doute des effets bénéfiques sur l'accroissement des relations économiques et commerciales auxquelles l'Algérie comme la France aspirent.

B - LA RELANCE DE LA COOPÉRATION EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE

Pour sortir de la crise, l'Algérie doit s'ouvrir à l'extérieur et développer des relations économiques plus intenses avec ses voisins comme avec l'Union européenne. Les représentants de la classe politique comme les opérateurs économiques reprochent à la France sa frilosité alors qu'elle reste le premier partenaire de l'Algérie et qu'elle détient 23 % de part du marché algérien. De nombreux responsables algériens louent le dynamisme des entreprises américaines, allemandes, canadiennes et espagnoles mais freinent par ailleurs, la présence de la France dans certains secteurs de l'économie. L'existence d'une circulaire datant de 1996 recommandant de freiner les importations françaises en Algérie le démontre. Le choix par Air Algérie de Boeing, de préférence à Airbus, pour le renouvellement de sa flotte est décevant, même si la France reste le premier partenaire commercial de l'Algérie.

1) LA FRANCE, PARTENAIRE COMMERCIAL IMPORTANT DE L'ALGÉRIE

En 1984, la France était déficitaire vis à vis de l'Algérie avec 23,6 milliards de francs d'exportations pour 24,9 milliards d'importations ; depuis cette date, ses exportations ont été divisées par deux et les importations par trois. Pourtant, la France reste le premier exportateur devant l'Espagne et l'Italie, 1,96 milliard de dollars en 1997 et le 3ème importateur après l'Italie et les États-Unis, 1,87 milliard de dollars. Plusieurs protocoles de coopération économique ont été signés par le passé, en 1982 et en 1994. Depuis 1995 il n'y a plus de protocole financier avec l'Algérie à sa demande.

L'intérêt des entreprises françaises pour l'Algérie s'accentue mais il n'est pas assez visible selon les opérateurs économiques algériens. Pourtant une mission du CNPF conduite par M. François Perigot et composée de chefs d'entreprise s'est rendue en Algérie en mars dernier et a été suivie par une visite en mai d'une délégation de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris regroupant dix-huit PME et PMI. Mais, les entrepreneurs algériens qui souhaitent établir des opérations de partenariat avec leur homologues français ne semblent pas avoir saisi l'importance de ces gestes et le suivi qu'ils appellent de leur part. Aucun date n'est fixée pour la visite de retour.

L'opinion des opérateurs économiques français qui travaillaient en Algérie est nuancée : certains secteurs sont dynamiques. Les possibilités d'investissement dans les régions peu touchées par le terrorisme sont réelles. La coopération décentralisée entre petites unités de production, notamment dans le secteur agricole, a la faveur des uns et des autres et son suivi est plus aisé. Toutefois, les entrepreneurs français estiment que les privatisations doivent être accélérées et ont, en outre, le sentiment que la France est écartée de certains grands contrats au profit d'entreprises américaines. Des malentendus subsistent et génèrent une certaine méfiance qu'il faut dissiper.

En fait les autorités politiques algériennes, les responsables économiques comme les membres de la société civile attendent le règlement de certains dossiers.

2) LES DEMANDES ALGÉRIENNES

Les préoccupations algériennes se cristallisent sur quatre dossiers majeurs : la reprise par Air France de ses vols sur l'Algérie, le classement du risque Algérie par la COFACE, la ratification par la France de l'accord d'encouragement réciproque des investissements signé en février 1993 et l'aide de la France dans les négociations d'un accord d'association entre l'Algérie et l'Union européenne.

- La reprise des vols d'Air France sur l'Algérie a pour les Algériens un caractère hautement symbolique. Selon eux, elle constituerait un signe capital de normalisation des relations entre les deux pays permettant d'accroître concrètement les échanges car Air Algérie fait difficilement face à la demande. Le retour d'Air France conditionne aux yeux des Algériens celui des autres compagnies aériennes. Mais Air France traumatisée par la prise d'otages de l'Airbus en décembre 1994 souhaite obtenir des garanties de sécurité particulières avant de se réinstaller en l'Algérie. Une négociation devrait s'engager ; le retour d'Air France en Algérie doit être encouragé, dès lors que cette compagnie estime suffisante les garanties de sécurité qu'elle est en droit d'exiger, encore faut-il que cette volonté de reprise se manifeste dans les deux sens.

- La question du classement de leur pays en catégorie 6, la plus élevée actuellement par la COFACE et du taux de prime afférent est perçue comme une brimade par les Algériens qui exigent leur passage en catégorie 4 et considèrent que la France donne le mauvais exemple au sein de l'OCDE. L'état de l'économie algérienne permet semble-t-il une appréciation moins frileuse du risque. Le passage de l'Algérie en catégorie 4 serait de nature à stimuler les investissements français dans ce pays et constituerait un geste de bonne volonté.

- La ratification par la France de l'accord sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements signé le 13 février 1993 et ratifié l'année suivante par l'Algérie fait partie des demandes récurrentes des Algériens. Ils s'interrogent sur le long délai de ratification (5 ans) de cet accord de facture classique qui permettrait, selon eux, de rassurer les investisseurs français en Algérie. Le projet de loi de ratification a été déposé devant le Sénat en juillet 1997 et adopté en Commission le 14 octobre dernier. Il sera discuté en séance publique le 12 novembre prochain. La Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée Nationale devrait l'examiner très prochainement.

- La contribution de l'Algérie au processus euro-méditerranéen de Barcelone a été maintes fois soulignée car elle attache une grande importance au partenariat euro-méditerranéen en y voyant, à juste titre, des possibilités d'échanges intéressantes. L'Algérie a bénéficié en 1991 et 1994 de prêts communautaires de soutien à sa balance des paiements de 250 millions d'écus dans le cadre du programme MEDA de subventions communautaires pour la période triennale 1996-1998. Ce pays demande que la spécificité de son économie en cours de privatisation soit prise en compte dans la négociation d'un accord d'association avec l'Union européenne ouverte les 4 et 5 mars 1998. Il a marqué son intérêt en accueillant le déplacement de la troïka européenne en janvier dernier et une délégation du parlement européen le mois suivant. Les députés algériens, conscients du bénéfice que pourrait tirer l'économie algérienne d'une meilleure intégration à l'espace euro-méditerranéen espèrent que la France soutiendra leur pays dans ses relations avec l'Union européenne.

Les demandes de la société civile algérienne concernant la coopération culturelle scientifique et technique avec l'Algérie sont multiples et il convient d'y répondre.

C - DYNAMISER LA COOPÉRATION CULTURELLE SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE AVEC L'ALGÉRIE

C'est dans le domaine de la coopération culturelle scientifique et technique que l'ambiguïté voire l'ambivalence des Algériens à l'égard de la France s'exprime le plus, même si l'Algérie reste un des premiers partenaires de la France dans le secteur et s'il convient de dégager de nouvelles perspectives.

1) UNE CERTAINE AMBIVALENCE

La coopération culturelle avec la France pose clairement la question linguistique et avec elle celle du passé colonial, de l'identité arabophone, berbérophone, francophone. Bien que considérée comme une langue étrangère et malgré la politique d'arabisation brutalement relancée, le français reste très présent dans l'administration, le monde des affaires, la presse nationale et la télévision grâce à la réception satellitaire des chaînes françaises par plus de 10 millions de téléspectateurs. Parmi les langues étrangères dont près de 67,8 % de parents déplorent la place insuffisante dans l'enseignement scolaire, le français demeure de loin la langue préférée des algériens pour 68,7 % des personnes interrogées contre 30,2 % pour l'anglais. Les langues étrangères et, notamment le français, sont perçues comme un moyen privilégié d'ouverture sur l'étranger, d'accès à un enseignement de qualité et d'insertion professionnelle.

L'usage exclusif de l'arabe a été érigé en obligation générale depuis le 5 juillet 1998 ; il s'impose aux "administrations publiques, institutions, entreprises et associations quelle que soit leur nature dans l'ensemble de leur activité" mais se révèle d'une mise en oeuvre délicate, de très nombreux fonctionnaires ne maîtrisant qu'insuffisamment l'arabe, ce qui nourrit une suspicion à l'égard des Algériens francophones soupçonnés d'être le parti de la France.

En effet, selon les autorités algériennes, la généralisation de l'arabe a pour objectif de renforcer la cohésion de société algérienne. La pratique des langues étrangères est en effet un facteur de discrimination sociale très marquée en Algérie : les arabophones, généralement plus défavorisés que les francophones, éprouvent un sentiment d'injustice du pouvoir à leur égard. Les jeunes générations, scolarisées en arabe, risquent de se trouver exclues des autres sphères de l'administration et de l'armée, où le français est encore la langue de travail. Il est regrettable que le français n'ait pas été pris "comme un butin de guerre" comme le souhaiterait Kateb Yacine.

L'attitude des médias français et tout particulièrement de la télévision, largement diffusée sur le territoire algérien, fait l'objet d'appréciations contradictoires. Elle est accusée simultanément de manipulation, voire d'ingérence, d'un intérêt réduit pour l'Algérie, de donner une image fausse du pays en montrant uniquement ce qui ne fonctionne pas, ou de permettre à des mouvements terroristes de s'exprimer. En même temps, les algériens admettent qu'elles diffusent des informations que les médias locaux ne transmettent pas. Les journalistes français qui n'obtiennent plus de visa pour se rendre en Algérie parce qu'ils ont déplu aux autorités algériennes font les frais de ces analyses, ce qui ne contribue pas à dépassionner les relations culturelles entre les deux pays. Alors que pour nombre d'intellectuels algériens, être reconnu en France est capital, certains gestes symboliques, comme l'absence du ministre algérien de la culture au Festival de Cannes ou le refus opposé à un intellectuel français de venir tourner un film en Algérie révèlent clairement le caractère ambivalent de ces relations au demeurant considérable.

2) UNE COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE SOUTENUE

L'Algérie reste un de nos premiers partenaires dans le monde, dans tous les domaines de la coopération culturelle, linguistique, scientifique et technique grâce à une enveloppe budgétaire de 96 millions de francs pour 1998 ce qui permet de recevoir en France plus de 3000 boursiers et stagiaires algériens dont près de 800 au titre du programme de bourses franco-algérien. Le français est enseigné à 4,6 millions d'élèves sur un total de 6,9 millions d'élèves dans l'enseignement primaire et secondaire. Dans l'enseignement supérieur, on estime que 150 000 des 275 000 étudiants algériens suivent des cours de français ou des enseignements en français, notamment dans les disciplines scientifiques et dans les formations de 3ème cycle.

Avec une enveloppe de 23,5 millions de francs, la coopération culturelle, linguistique et éducative avec l'Algérie apporte un soutien indispensable aux 39 000 professeurs de français à tous les niveaux d'enseignement. Elle s'efforce d'accompagner la modernisation du système éducatif algérien, en permettant aux cadres administratifs et pédagogiques du ministère de l'Education (230 en 1998) de bénéficier de notre expertise en France dans des domaines tels que la rénovation des programmes, la gestion des établissements et la formation des maîtres. Toutefois, le maintien d'une politique d'échanges culturels est limité en raison des contraintes sécuritaires. Elle se réduit à l'envoi d'ouvrages français, à la promotion des auteurs et éditeurs algériens de langue française et au soutien à des artistes algériens sur place et en France dans les domaines de la musique, du théâtre et des arts plastiques.

La coopération scientifique et technique dispose d'une enveloppe de 69,5 millions de francs en 1998 et s'articule autour de trois programmes. Le programme boursier franco-algérien bénéficie à des étudiants, des enseignants et des cadres algériens car les formations d'étudiants ne pouvaient plus répondre, à elles seules, aux besoins de l'Algérie. La France participe à hauteur de 60 % des dépenses, soit pour 1998, 40 millions de francs. Dans le domaine de la coopération scientifique universitaire, les principaux échanges se développent dans le cadre des projets de recherche-formation dont le nombre en 1998 s'élève à une centaine. L'objectif de ces échanges est d'apporter un appui à la formation des universitaires algériens travaillant sur des projets de recherche fondamentale ou appliquée au développement de l'Algérie. Un programme d'aide au secteur tertiaire vise à soutenir les efforts de l'Algérie dans sa transition vers l'économie de marché, au moyen d'opérations de formation ou d'assistance technique en France. Les actions de formation et de perfectionnement des cadres administratifs algériens se sont nettement développées au cours des dernières années. Pour 1998, les interventions sont regroupées en trois pôles : les écoles de formation généraliste et spécialisée, l'administation des Finances, et les ministères techniques.

La France est ainsi associée à la formation des élites algériennes et à la transition de ce pays vers une économie de marché. D'autres perspectives de coopération pourraient être envisagées.

3) LES PERSPECTIVES DE RELANCE DE LA COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE

En 1994, les conditions de sécurité ont obligé la France à fermer ses centres culturels, ses écoles et à renoncer à l'envoi sur place d'experts français. Ce dispositif a été généralisé à toute l'Algérie. Or, actuellement, la violence terroriste semble ne toucher que des régions très limitées de l'Algérie. Aussi, la question de la réouverture de certains centres culturels mérite d'être étudiée. C'est le cas du centre culturel d'Annaba, ville peu touchée par la violence terroriste. L'envoi d'experts français dans certaines régions pourrait être encouragé s'il est établi que la situation sécuritaire le permet.

Côté algérien, l'assouplissement des contraintes bureaucratiques et certains gestes à l'égard des journalistes français qui demandent des visas contribueraient à lever les ambiguïtés.

Côté français, il est vain d'espérer un renforcement des liens entre l'Algérie et la France sans présence française sur place. En outre, il est évident que la promotion de la langue et de la culture française doit être menée dans une perspective d'échange et d'ouverture de l'Algérie vers l'extérieur, ce qui correspond au désir profond des jeunes générations. Cette action n'est envisageable que dans le respect de l'identité arabe de la population algérienne. L'arabisation ne signifie pas l'islamisation.

La transition de l'Algérie vers la démocratie pourrait être encouragée par une coopération interparlementaire entre l'Assemblée populaire nationale et l'Assemblée nationale qui a manifesté à maintes reprises sa disponibilité sur ce point. La rapide reconstitution du groupe d'amitié France-Algérie de l'Assemblée nationale comme la nette augmentation des missions d'élus français en Algérie en témoignent. Aussi, la constitution d'un groupe d'Amitié Algérie-France à l'Assemblée populaire nationale, comme la visite en France du Président et des membres de la Commission des affaires étrangères de la coopération et de l'immigration de cette assemblée sont-elles attendues.

CONCLUSION

Porter un regard neuf sur l'Algérie avec une exigence de transparence et de vérité pour rénover et renforcer les relations franco-algériennes, tel était l'objectif de la mission.

Le terrorisme a reculé même si sa capacité de nuisance reste extrêmement forte. L'intégrisme islamique en tant que force militaire n'est plus une hypothèque pour l'Algérie. Un processus de démocratisation de la vie politique est enclenché même si l'émergence d'un état de droit n'est pas évidente.

La démission annoncée du Président Liamine Zéroual sur fond de guerre des clans dans la haute hiérarchie militaire accentue les incertitudes politiques. D'autres événements comme les entraves récentes à la liberté de la presse écrite privée, risquent d'accroître la défiance. Cependant, la vigueur de la société civile, l'existence d'institutions pluralistes, le travail exemplaire des associations témoignent des potentialités de ce pays.

Ainsi, la réalité algérienne reste infiniment complexe et déroutante au plan politique, économique et sociologique ; elle laisse l'observateur perplexe comme le souligne le caractère extrêmement nuancé et prudent du rapport du groupe de personnalités éminentes chargé par le Secrétaire Général de l'ONU de recueillir des éléments d'information sur la situation en Algérie. Nombre de constats de cette délégation présidée par M. Mario Soares ont été les nôtres. Il faut se défier des schémas simplistes et manichéens et des jugements définitifs sur la situation de ce pays. Au retour de la mission, la délégation a incontestablement plus d'interrogations que de certitudes.

La disparition du terrorisme comme le triomphe de l'état de droit, du pluralisme et de la démocratie auxquels la grande majorité des Algériens aspirent, passent avant tout, par la réduction du chômage et des poches de misères et de pauvreté encore trop fortes dans ce pays. Les réformes économiques en cours sont encourageantes et il convient d'inciter l'Algérie à se tourner vers l'extérieur, à conforter ses relations avec ses voisins immédiats et avec l'Union Européenne.

Les relations bilatérales franco-algériennes qu'obèrent les questions de sécurité doivent et peuvent être améliorées. L'augmentation par la France du nombre des visas accordés aux ressortissants algériens est la clé de ce renforcement car la multiplication des liens et des rencontres formelles et informelles entre les sociétés civiles de ces deux pays comme entre les dirigeants politiques est seule susceptible de créer les conditions d'un dialogue fructueux et plus serein entre l'Algérie et la France.

Les élus ont de part et d'autre un rôle important à assumer pour conforter cette relation et établir un pont entre ces deux grands pays riverains de la Méditerranée et fortement liés par leur histoire.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 21 octobre, la Commission a entendu le compte rendu de la mission en Algérie.

Après l'exposé du Rapporteur, le Président Jack Lang a déclaré partager les analyses du Rapporteur. Selon lui, l'Algérie est entrée dans une période nouvelle marquée par la décision du Président Zéroual de provoquer des élections présidentielles anticipées et par les entraves imposées à la liberté de la presse indépendante. La démocratie est une arme contre le terrorisme, une plus forte légitimité du pouvoir algérien le renforcera dans cette lutte.

Approuvant les vues du Rapporteur, Mme Yvette Roudy a estimé que la Commission des Affaires étrangères devait suivre le déroulement du processus électoral en Algérie, en y envoyant des observateurs soit dans le cadre de l'Assemblée nationale, soit dans celui de l'Union européenne.

Mme Louise Moreau s'est demandée si l'Algérie accepterait l'envoi d'observateurs de l'ONU ou de l'Union européenne lors des élections présidentielles. Elle a voulu savoir où en étaient les négociations sur les contrats de gaz.

Plus pessimiste sur la situation de l'Algérie que le Rapporteur, Mme Marie-Hélène Aubert a dénoncé les stères de "langue de bois" employés par les autorités algériennes à propos de la maîtrise du terrorisme et de l'existence d'un pluralisme démocratique. Les contacts directs de la délégation avec la population algérienne n'ont pas été aisés et n'ont été possibles que grâce à la diligence de quelques députés algériens.

Elle s'est demandé quelle initiative prendre pour que des observateurs internationaux puissent assister aux élections présidentielles. Elle a souhaité que le Ministre des Affaires étrangères soit auditionné par la Commission au sujet de l'Algérie et que les relations bilatérales franco-algériennes soient dynamisées pour répondre aux attentes de la jeunesse algérienne.

M. Georges Sarre s'est félicité de la concordance des observations du Rapporteur avec celles de la délégation du Mouvement des Citoyens qui a séjourné en Algérie. Le soutien à la liberté de la presse dans ce pays doit être total. Il y a effectivement une guerre des clans, et des problèmes de corruption en Algérie. La venue d'observateurs internationaux pendant les élections présidentielles est subordonnée à une demande de l'Algérie.

Il a demandé qu'Air Algérie dispose en France d'un espace plus grand pour ses guichets et qu'Air France reprenne ses vols sur l'Algérie. Il a dénoncé la situation inacceptable faite aux Algériens qui demandent des visas. Il faut qu'en 1998 au moins 80 000 visas leur soient délivrés.

M. François Loncle a estimé que le suivi du processus électoral pouvait être effectué par des observateurs mandatés par l'Union européenne ou les Nations Unies.

Le Président Jack Lang a souhaité que l'on parvienne à convaincre les Algériens de l'importance de la crédibilité des futures élections présidentielles. Un suivi de la politique des visas et plus généralement de la coopération et du dialogue franco-algérien s'impose.

En application de l'article 145 du Règlement, la Commission a autorisé la publication du présent rapport d'information.

ANNEXES

ANNEXE 1 - Programme de la mission

ANNEXE 2 - Chronologie de l'Algérie depuis 1988

ANNEXE 3 - Communiqués de presse

ANNEXE 1

Programme de la mission

Dimanche 19 juillet 1998

- 16 heures : réunion avec le Président et les membres de la commission des finances et du budget de l'APN.

- 17 heures : réunion avec le Président et les membres de la commission des affaires économiques, du développement, de l'industrie, du commerce et de la planification de l'APN.

- 18 heures 30 : réunion de travail avec Son Exc. M. Alfred Siefer Gaillardin, ambassadeur de France en Algérie.

- 19 heures 30 : réception de la société civile algérienne à la Résidence de l'ambassadeur de France.

Lundi 20 juillet 1998

- 9 heures : réunion avec le Président et les membres de la Commission des affaires étrangères de la coopération et de l'émigration de l'APN.

- 11 heures : entretien avec le Président et les membres du groupe parlementaire RND.

- 11 heures 30 : entretien avec le Président et les membres du groupe parlementaire MSP.

- 12 heures : entretien avec le Président et les membres du groupe parlementaire FLN.

- 13 heures : déjeuner offert par l'APN.

- 15 heures 30 : entretien avec le Président et les membres du groupe parlementaire Ennahada.

- 16 heures 30 : réunion avec le Président et les membres du groupe parlementaire FFS.

- 17 heures : réunion avec le Président et les membres du groupe parlementaire RCD (hors de l'APN).

- 18 heures 30 : réunion de travail avec les opérateurs économiques suivie d'une réception à la mission économique et financière de l'Ambassade de France.

Mardi 21 juillet 1998

- 9 heures 30 : réunion à la Wilaya de Blida.

- 10 heures : visites de l'Université de Blida, des chantiers de la Cour de justice, de l'hôtel des finances et du centre culturel.

- 11 heures 30 : visite de l'imprimerie Mauguin.

- 12 heures 30 : visite de l'unité de pédo-psychiatrie de l'hôpital Franz Fanon.

- 13 heures 30 : déjeuner.

- 15 heures : visite de l'unité de semoulerie SIM à Aïn Romana.

- 16 heures : entretien avec M. Mohamed Salah Mentouri Président du Conseil national économique et social.

- 17 heures : entretien avec le Président et les membres de la commission des affaires étrangères, de la coopération internationale et de la communauté algérienne à l'étranger du Conseil de la Nation

- 18 heures : entretien avec M. Abdelmadjid Meziane, Président du Haut conseil islamique et Mgr Henri Teissier, archevêque d'Alger.

- 20 heures : diner officiel à la résidence de l'Ambassadeur de France.

Mercredi 22 juillet 1998

- 9 heures 30 : visites de l'unité de transformation de tomates SIPA et de l'unité Boutalbi pour la fabrication des équipements frigorifiques à Annaba.

- 11 heures : rencontre avec les opérateurs économiques et la société civile à l'hôtel de ville.

- 12 heures 30 : réunion à la Wilaya d'Annaba en présence du Wali.

- 13 heures : déjeuner de travail avec les élus de la Wilaya.

- 15 heures 30 : visites de la basilique St-Augustin, du musée et des ruines d'Hippone et de la corniche.

- 17 heures : visites du Consulat général de France et du centre culturel français.

- 18 heures : rencontre avec les membres de la communauté française.

Jeudi 23 juillet 1998

- 9 heures : entretien avec M. Abdelkader Bensalah, Président de l'APN.

- 10 heures : visites de Notre-Dame d'Afrique, de la grande poste.

- 13 heures : déjeuner offert par M. Abdelkader Hadjar, Président de la Commission des Affaires étrangères de la coopération et de l'émigration de l'APN.

- 15 heures 30 : rencontres avec les associations de femmes et avec les familles de disparus.

- 17 heures : conférence de presse.

ANNEXE 2

Chronologie de l'Algérie depuis 1988

1988

- 4 octobre : début des émeutes à Alger

- 10 octobre : discours télévisé du Président Chadli Bendjedid, qui s'engage à mettre en oeuvre des réformes

- 3 novembre : référendum sur la révision de la constitution instituant notamment le multipartisme

- 5 novembre : remplacement d'Abdelhamid Brahimi, Premier ministre, par Kasdi Merbah

- 22 décembre : réélection de Chadli Bendjedid à la Présidence de la République

1989

- 10 septembre : remplacement de Kasdi Merbah, Premier ministre, par Mouloud Hamrouch

-14 septembre : légalisation du Front Islamique du Salut (FIS)

- 15 décembre : retour en Algérie d'Hocine Aït Ahmed, Président du Front des Forces Socialistes (FFS), reconnu officiellement le 20 novembre

- 21 décembre : manifestation devant l'Assemblée nationale des femmes en hidjeb (foulard islamique), réclamant l'application de la charia (loi coranique)

1990

- 20 avril : manifestation à Alger de 100 000 partisans du FIS demandant l'abandon du bilinguisme et l'application de la charia

- 31 mai : manifestation à Alger de 100 000 partisans du FFS

- 12 juin : victoire du FIS aux élections locales

- 26 décembre : adoption du projet de loi sur la généralisation de l'utilisation de la langue arabe

- 27 décembre : défilé à Alger de 400 000 personnes pour la démocratie et contre la généralisation de la langue arabe

1991

- 5 juin : affrontements meurtriers entre islamistes et forces de l'ordre ; instauration de l'état de siège : remplacement de Mouloud Hamrouch, Premier ministre, par Sid Ahmed Ghozali

- 15 juin : appel du FIS à la grève générale

- 30 juin : emprisonnement d'Abassi Madani, Président du FIS, et d'Ali Belhadj, vice président

- 26 décembre : victoire du FIS au premier tour des élections législatives

1992

- 11 janvier : démission du Président Chadli Benjedid ; dissolution de l'Assemblée nationale

- 12 janvier : suspension du deuxième tour des élections législatives

- 14 janvier : création d'un Haut Comité d'Etat (HCE), présidé par Mohamed Boudiaf

- 9 février : instauration de l'état d'urgence

- 14 mars : dissolution du FIS

- 29 juin : assassinat de Mohamed Boudiaf

- 2 juillet : désignation d'Ali Kafi à la présidence du HCE

- 8 juillet : remplacement de Sid Ahmed Ghozali, Premier ministre, par Belaïd Abdesslam

- 15 juillet : condamnation à 12 ans de prison d'Abassi Madani et d'Ali Belhadj

1993

- 21 août : remplacement de Belaïd Abdesslam, Premier ministre, par Rédha Melek

- 25 décembre : prolongation par le HCE de son mandat jusqu'au 31 janvier 1994

1994

- 25-26 janvier : échec de la conférence nationale du consensus, boycottée par l'ensemble des formations politiques représentatives

- 30 janvier : désignation de Liamine Zéroual comme Chef d'Etat

- 31 janvier : fin du mandat du HCE

- 11 avril : remplacement de Rédha Malek, Premier ministre, par Mokdad Sifi

- 18 mai : mise en place du Conseil national de transition (CNT), organe à caractère législatif

- 13 septembre : placement en résidence surveillée d'Abassi Madani et d'Ali Belhadj

1995

- 8-13 janvier : signature à Rome par le FIS et une partie de l'opposition dont le FLN et le FFS d'une "plate-forme" proposant une "solution négociée" (plate-forme de Sant'Egidio)

- 11 juillet : constat d'échec par le Président Liamine Zéroual des négociations engagées avec le FIS

- 7 octobre : revendication par le GIA des attentats commis en France depuis 1994

- 16 novembre : élection, à l'issue du premier tour, de Liamine Zéroual à la Présidence de la République , avec 61,34 % de suffrages exprimés.

1996

- 15 juillet : le Président Liamine Zéroual déclare que le "dossier du FIS est clos"

- 28 novembre : référendum sur la révision de la constitution, consacrant les valeurs fondamentales de la nation algérienne (nationalisme, arabité, islamité et, dans une moindre mesure, amzighté) et renforçant les pouvoirs de l'exécutif.

1997

- 5 juin : élections législatives marquées par la victoire du Rassemblement National pour la Démocratie (RND) ; mise en place de la première assemblée pluraliste de l'histoire algérienne

- 15 juillet : libération conditionnelle d'Abassi Madani

- 1er septembre : assignation à résidence d'Abassi Madani

- 1er octobre : entrée en vigueur de l'appel à la trêve lancé par l'Armée Islamique du Salut (AIS), branche armée du FIS

- 23 octobre : élections municipales et départementales (wilayas) remportées par le RND ; vive contestation des résultats par l'ensemble des partis politiques qui dénoncent la fraude électorale

- 25 décembre : élection du Conseil de la Nation, chambre haute du parlement algérien, marquée par une très large victoire du RND, qui s'adjuge 80 des 96 sièges à pourvoir ;

1998

- 25 juin : assassinat du chanteur et militant berbère Lounès Matoub, revendiqué par Hassan Hattab, émir dissident du GIA ; émeutes en Kabylie

- 5 juillet : entrée en vigueur de la loi sur la généralisation de l'utilisation de la langue arabe

- 11 septembre : démission du Président Liamine Zéroual

- 17 octobre : sept quotidiens de la presse francophone suspendent leur parution

- 18 octobre : démission de Mohamed Adami, ministre de la justice

- 19 octobre : démission de Mohamed Betchine, ministre conseiller à la présidence

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N° 1141.- Rapport d'information de M. François Loncle, déposé en application de l'article 145 du Règlement par la commission des affaires étrangères, sur la mission effectuée par une délégation de la Commission
en Algérie.