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N° 1737

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 juin 1999.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1)

sur le partenariat euro-méditerranéen

ET PRÉSENTÉ

PAR M. MICHEL VAUZELLE,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Affaires étrangères

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, M. René Rouquet, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, Yves Dauge, Jean-Claude Decagny, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Laurent Fabius, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Claude Lefort, François Léotard, Pierre Lequiller, François Loncle, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, MM. Michel Terrot, Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Aloyse Warhouver.

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I -UN SUCCÈS DIPLOMATIQUE 11

A - LES ATTENTES DES PARTENAIRES DE L'UNION EUROPÉENNE 11

B - DE BARCELONE À STUTTGART 17

II -UNE POLITIQUE EN CHANTIER 23

A - LES ACCORDS EURO-MÉDITERRANÉENS 23

1) Les nouveaux accords d'association 24

2) Les cas particuliers d'Israël et de l'Autorité palestinienne 29

3) Les régimes spéciaux de la Turquie, Malte et Chypre 30

B - LES ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'UNION 34

1) Présentation 34

2) Le bilan 38

C - LE VOLET POLITIQUE ET DE SÉCURITÉ DU PROCESSUS DE BARCELONE 44

1) Le bilan avant Stuttgart. 45

2) L'évolution récente 46

III - REFLEXIONS SUR LE LIBRE-ECHANGE 49

A - LA SITUATION ÉCONOMIQUE DES PAYS MÉDITERRANÉENS. 49

B - LE LIBRE-ÉCHANGE EST-IL LA PANACÉE ? 52

1) Les échanges euro-méditerranéens 53

2) Le pari du libre-échange 56

CONCLUSION 61

EXAMEN EN COMMISSION 63

ANNEXES 65

I. Déclaration de Barcelone

II. Engagement et paiement des crédits MEDA

III. Les conférences ministérielles thématiques

IV. Lignes directrices relatives à l'élaboration d'une charte
    euro-méditerranéenne pour la paix et la stabilité

Mesdames, Messieurs,

Ce rapport d'information poursuit deux objectifs :

Il s'agit en premier lieu de présenter un bilan transitoire d'un processus défini en 1995 par l'Union européenne qui se traduit par des conférences, des accords d'association et un programme d'assistance technique communautaire, le programme Méda. Cette politique réunit depuis 1995 les Quinze, tous les autres pays méditerranéens du pourtour sud de la Méditerranée à l'exception de la Libye (1), ainsi que l'Autorité palestinienne, c'est à dire au total vingt-sept entités. Cette politique communautaire échappe en partie aux parlements nationaux qui ne sont formellement consultés sur son contenu qu'à l'occasion des autorisations de ratification des accords d'association. Il paraît utile que notre assemblée puisse suivre les étapes de ce processus.

Mais il s'agit surtout, à l'heure où l'Union européenne paraît accaparée par ses problèmes internes et par l'élargissement vers l'Est, de manifester un intérêt pour le flanc sud de l'Europe, intérêt qui mériterait, selon votre Rapporteur, d'acquérir une place beaucoup plus grande dans les préoccupations des Européens.

En effet, les différences de développement entre le nord et le sud de la Méditerranée sont loin de se résorber et la Méditerranée demeure et demeurera encore longtemps une zone de turbulences potentielles.

Les enjeux de la politique que l'Union européenne a engagée en direction des pays méditerranéens du sud sont nombreux.

Ils sont tout d'abord culturels. Sans doute, la coexistence entre le monde judéo-chrétien et le monde arabo-islamique n'a jamais été simple. Mais, depuis le début des années 1990, les oppositions se sont accentuées. Une partie du monde islamique a succombé à la tentation d'une politique trop exclusivement identitaire. Une partie de l'opinion occidentale a suivi une évolution symétrique qui conduit au racisme et à la xénophobie. La montée de cet antagonisme constitue une menace pour la paix entre les Etats mais, bien plus encore peut-être, pour la paix civile et pour la démocratie.

Les enjeux sont aussi économiques. Le Sud de la Méditerranée, à la différence de l'Amérique latine ou du Sud-Est asiatique, n'a pas su devenir une région économique émergente. A l'exception de la Turquie et d'Israël, ces pays se caractérisent par une offre industrielle peu compétitive et leurs exportations sont encore largement celles de pays en voie de développement. Ils ne sont pas parvenus non plus à constituer entre eux des espaces économiques organisés : l'Union du Maghreb Arabe, créée en 1989, n'a pas répondu aux espoirs placés en elle. Des divisions entre les pays du Machrek ont empêché un début d'intégration économique. Leurs économies ont malheureusement stagné depuis le milieu des années 1980 ; certaines ont subi de plein fouet le contre-choc pétrolier. Ces pays sont entrés dans une phase de transition démographique mais les taux d'accroissement de la population demeurent élevés. Sans doute aussi, les politiques d'ajustement structurel appliquées au cours des dernières années ont permis de rétablir les équilibres macro-économiques de certains pays, mais les économies réelles ne reposent toujours pas sur des bases solides et le coût social des ajustements a été lourd. Cette situation entretient des antagonismes culturels et se traduit par une forte pression migratoire aux portes de l'Europe. Pourtant, ces pays représentent un marché potentiel et donc une chance pour l'économie européenne.

L'enjeu concerne enfin la sécurité des pays du Sud et par conséquent celle des Européens. La région est tourmentée par des conflits inter et intra étatiques aigus. Certains datent de l'immédiat après-guerre. D'autres sont apparus plus récemment. De nouvelles puissances régionales ont émergé à la périphérie de la région (l'Irak, l'Iran). Or, l'Europe, dans ces conflits, apparaît le plus souvent comme indifférente, impuissante ou simple complice des Etats-Unis. La guerre du Golfe a, de ce point de vue, constitué un tournant. Si les gouvernements arabes ont soutenu la politique des Américains et des Européens à l'égard de l'Irak, les opinions publiques l'ont réprouvé quasi-unanimement. De la même façon, la politique visant à contenir l'intégrisme est bien souvent perçue comme une nouvelle manifestation d'impérialisme.

Ces considérations justifiaient en 1995 ce que la diplomatie française a appelé "un rééquilibrage" de la politique de l'Union européenne. Il s'agissait de faire en sorte que la politique méditerranéenne ne soit plus le seul apanage des pays européens riverains de la Méditerranée mais de l'ensemble de la Communauté et qu'elle prenne autant d'importance que la politique à l'égard des pays d'Europe centrale et orientale. Il s'agissait également, au lendemain des accords d'Oslo, que l'Union devienne un acteur dans un dossier fondamental et emblématique : le conflit israélo - palestinien.

La première conférence euro-méditerranéenne s'est tenue à Barcelone les 27 et 28 novembre 1995 et a abouti à une déclaration considérée comme l'acte fondateur du dialogue euro-méditerranéen (1).

Ce dialogue se distingue de toutes les autres tentatives antérieures par son champ géographique qui rassemble les 15 membres de l'Union européenne et 12 pays tiers ou entité méditerranéens (2).

La déclaration de Barcelone a défini les trois volets d'un partenariat qui se veut global.

Le volet politique et de sécurité vise à établir un "espace commun de paix et de sécurité" à travers le respect d'un certain nombre de principes. Ces principes constituent un vaste programme qui touche aussi bien l'organisation politique interne des Etats (démocratie, droits de l'Homme) que la conduite de leur politique étrangère. La déclaration mentionne la possibilité à terme de mettre en _uvre un "pacte euro-méditerranéen".

Le volet économique et financier rompt avec la politique de préférence commerciale en retenant l'année 2010 comme date objectif pour instaurer une zone de libre-échange industriel. Pour atténuer les effets économiques et sociaux de cette ouverture, la déclaration étend les domaines où la coopération doit se développer. Elle rappelle également l'engagement du Conseil européen de Cannes de porter l'assistance financière de la Communauté au niveau de 4,685 milliards d'écus pour les années 1996-1999, auxquels s'ajoutent les prêts de la BEI (3,9 milliards d'écus pour 1995-1999). L'objectif est de créer une zone intégrée aussi bien dans sa dimension sud-sud que nord-sud.

Le volet social, culturel et humain vise à développer les ressources humaines et favoriser la compréhension entre les cultures et les échanges entre les sociétés civiles. Il prévoit également une coopération tendant à diminuer la pression migratoire.

Pour atteindre ces objectifs, l'Union a prévu de mettre en _uvre deux types de mécanismes :

- des accords d'association, conclus entre l'Union et chacun des partenaires, qui doivent programmer la libéralisation des échanges, organiser la coopération bilatérale et instituer le dialogue politique ;

- un programme de coopération technique, le programme MEDA, qui doit accompagner la mise en _uvre du libre-échange.

L'architecture de Barcelone comprend une instance intergouvernementale - le Comité euroméditerranéen - qui se réunit à 15+12 au niveau des hauts fonctionnaires coordonnateurs. Ce comité prépare les réunions des ministres et assure le suivi des deux derniers volets. La Commission européenne joue un rôle d'instruction des dossiers et d'application des décisions. Par ailleurs, s'est constitué le Groupe des hauts fonctionnaires qui assure le suivi du volet politique.

La déclaration de Barcelone prévoit également un suivi parlementaire associant le Parlement européen et les parlements nationaux. Le 1er juin 1998, le Parlement européen a pris l'initiative de créer un Forum euroméditerranéen. Cette initiative entre en concurrence avec deux autres conférences : la conférence des Présidents des Parlements des pays méditerranéens et la Conférence pour la sécurité et la coopération en Méditerranée (CSCM), initiée il y a huit ans au sein de l'Union interparlementaire et qui regroupe les Parlements des pays riverains ainsi qu'un certain nombre de Parlements associés.

Par ailleurs, en marge du processus de Barcelone, le Forum méditerranéen, créé en 1994 à l'initiative de la France et de l'Egypte, est un cadre d'échanges informel regroupant les 5 Etats méditerranéens de l'Union européenne (Espagne, Portugal, France, Italie et Grèce) et, au Sud, les Etats du Maghreb (Maroc, Algérie et Tunisie), l'Egypte, la Turquie et Malte. Les ministres des Affaires étrangères sont convenus, à l'issue de leur réunion de juillet 1997 à Alger, d'en faire désormais essentiellement une structure d'appui et de réflexion pour l'avancement du processus de Barcelone.

Pour la préparation de ce rapport, votre Rapporteur a effectué trois missions : l'une, en Tunisie, du 2 au 4 décembre 1998 ; la deuxième au Maroc, du 8 au 10 janvier 1999 ; la troisième à Bruxelles, les 21 et 22 janvier 1999. Il a bénéficié de l'assistance technique des services du Quai d'Orsay et, en particulier, de celle de M. Jean-Pierre Courtois, Ambassadeur de France et Haut Fonctionnaire coordonnateur. Il a également fait partie, en qualité de parlementaire, de la délégation française aux conférences de Palerme et de Stuttgart.

Les travaux de l'Institut de la Méditerranée, qui a publié un rapport sur le processus de Barcelone en octobre 1998, lui ont été très utiles.

Ce rapport examinera successivement :

- les résultats des conférences euro-méditerranéennes, en particulier ceux de la conférence de Stuttgart qui s'est tenue les 16 et 17 avril 1999 ;

- le bilan des accords euro-méditerranéens ;

- le bilan du programme MEDA ;

- le bilan du volet politique et de sécurité.

Il se terminera par un exposé sur la situation économique des pays partenaires et sur les risques du libre-échange.

I -UN SUCCÈS DIPLOMATIQUE

Les conférences euro-méditerranéennes se réunissent tous les deux ans au niveau des ministres des Affaires étrangères des quinze membres de l'Union européenne et des douze partenaires. Leur présidence est assurée par la Présidence de l'Union européenne. Elles comprennent également des invités spéciaux : la Mauritanie, les secrétaires généraux de la Ligue arabe et de l'Union du Maghreb arabe et, depuis la conférence de Stuttgart, la Libye, en raison de la suspension des sanctions à son égard.

Depuis la conférence fondatrice, deux conférences plénières se sont réunies : à Malte, en avril 1997, et, tout récemment, à Stuttgart, les 16 et 17 avril 1999.

Par ailleurs, de nombreuses conférences ministérielles thématiques se sont tenues afin de promouvoir la coopération dans des secteurs jugés prioritaires. La liste de ces conférences fait l'objet d'une annexe à ce rapport.

Ces réunions sont l'occasion de mesurer l'intérêt des Etats pour le processus de Barcelone, intérêt qui ne s'est jamais démenti et qui a été largement vérifié lors de la conférence de Stuttgart.

A - Les attentes des partenaires de l'Union européenne

Parmi les pays tiers, trois tendances générales se dégagent.

Une majorité de pays est très favorable au développement du processus mais expriment leur déception en raison des lenteurs dans la mise en _uvre des mécanismes de coopération et certaines craintes à propos du libre-échange industriel, insuffisamment compensé par les ouvertures de l'Union dans le domaine agricole. Dans cette catégorie, on peut ranger la Tunisie, le Maroc, l'Algérie, l'Egypte, la Jordanie, Malte et l'Autorité palestinienne. Parmi ces pays, le Maroc et la Tunisie manifestent un souci : celui que les relations multilatérales ne noient pas la spécificité de leurs relations bilatérales avec l'Europe.

D'autres Etats ont pris dès l'origine leurs distances à l'égard du processus essentiellement parce qu'ils sont eux-mêmes engagés sur la voie de l'adhésion à l'Union européenne. Il s'agit de la Turquie et de Chypre.

Enfin, trois Etats manifestent un intérêt réel pour le processus tout en manifestant des réticences de nature politique : Israël, la Syrie et le Liban.

. La Tunisie

La Tunisie est traditionnellement très impliquée dans les développements en Méditerranée, autour desquels s'ordonne sa politique extérieure. Elle a, dès l'origine, accueilli sans réserve le lancement du partenariat ; elle est également le premier partenaire avec lequel un accord d'association est entré en vigueur. Aussi joue-t-elle un rôle constructif et modérateur dans les discussions entre les 27, notamment au sein du "groupe arabe".

Elle est surtout préoccupée par les lenteurs de la mise en _uvre de la coopération. Le principal grief de la Tunisie porte sur le programme MEDA. Elle estime son enveloppe insuffisante et plaide pour un assouplissement des procédures d'engagement des crédits.

. Le Maroc

Très attentif aux développements en Méditerranée, mais préoccupé par le risque d'une dilution de la spécificité de la relation euro-marocaine et euro-maghrébine dans le cadre de Barcelone, le Maroc y a exercé jusqu'à présent une présence relativement discrète. Son intérêt reste essentiellement axé sur ses relations bilatérales avec l'Union envers laquelle il ne ménage pas ses critiques.

Les griefs du Maroc portent toujours sur la longueur des procédures de ratification de l'accord d'association par les Quinze et le caractère inégal des concessions demandées au Maroc (libre-échange industriel très intéressant pour l'Union européenne et sans contrepartie significative en matière agricole). Dès son entrée en vigueur, le Maroc devrait faire du réexamen du volet agricole sa priorité.

Il s'est fait, par ailleurs, régulièrement l'avocat de l'admission de la Libye dans le cadre de Barcelone.

. L'Algérie.

En dépit de son isolement dû à sa situation intérieure, l'Algérie s'efforce de participer activement au partenariat ; son statut de porte-parole du groupe arabe (jusqu'en mai 1998) a contribué à l'y impliquer davantage.

L'Algérie met l'accent sur les sujets qui lui tiennent à c_ur, tels la lutte contre le terrorisme et le thème de l'immigration. Elle attend de la négociation de l'accord d'association une reconnaissance politique de sa place dans l'espace euro-méditerranéen. Elle en redoute cependant le coût économique et social, sauf à bénéficier d'une aide financière complémentaire. Contrairement à d'autres pays méditerranéens, l'Algérie ne conteste pas, a priori, la clause "droits de l'Homme" de l'accord. Elle souhaiterait en revanche inclure des dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme et la libre circulation des personnes.

. L'Egypte

L'Egypte est très favorable au processus lancé à Barcelone, dans lequel elle voit probablement l'occasion de rééquilibrer, en direction de l'Europe, une politique étrangère dominée jusqu'alors par les Etats-Unis. Le Caire joue un rôle modérateur appréciable au sein du camp arabe. Elle montre par ailleurs un réel intérêt pour l'idée française de Charte de stabilité tout en souhaitant un élargissement du contenu du premier volet à des thèmes qui lui sont chers (désarmement nucléaire, terrorisme).

L'Egypte estime que l'enveloppe MEDA est insuffisante, compte tenu de l'ampleur des réformes qu'elle devra mettre en _uvre. Au-delà du volume de l'aide, c'est davantage la lenteur des engagements qui nourrit les critiques de ce pays envers MEDA.

Pour l'Egypte, le principal enjeu réside aujourd'hui dans la conclusion de son accord d'association. Après la Conférence de Malte en 1997, le Président Moubarak avait encouragé les négociateurs égyptiens à poursuivre leurs efforts. Après des négociations difficiles, un texte devrait être signé prochainement. Comme les autres pays de la région, l'Egypte estime que les concessions agricoles consenties par l'Union sont trop limitées et, surtout, déséquilibrées par rapport aux efforts de libéralisation qui lui sont demandés en matière industrielle.

. La Jordanie.

Parmi les pays arabes du Proche-Orient, la Jordanie est l'un des plus attachés au processus de Barcelone, et elle compte s'y impliquer davantage. Elle appuie l'idée de Charte de stabilité.

Elle participe à de nombreuses initiatives régionales. Elle marque également un intérêt particulier pour le dialogue interculturel et interreligieux.

A l'instar des autres Etats de la région, elle juge insuffisants les montants octroyés au titre de MEDA. Elle avait initialement demandé à bénéficier d'un prêt macro-financier, auquel elle n'était pas éligible ; elle n'a pas renoncé à cette demande. Elle bénéficie néanmoins d'une aide considérable de l'Union européenne et se place au quatrième rang des bénéficiaires de MEDA per capita (29 écus par habitant, la moyenne de la zone MEDA se situant à 13,2 écus).

. Malte.

La Méditerranée est traditionnellement une dimension primordiale de la politique étrangère de Malte, qui participe en effet activement aux activités du processus de Barcelone. Malte souhaite apparaître comme un trait d'union entre la rive sud de la Méditerranée et l'Union.

. L'Autorité palestinienne.

Les Palestiniens ont, dès l'origine, été favorables au processus de Barcelone en tant que cadre favorisant la stabilité et la coopération ainsi qu'une plus grande influence de l'Europe dans la région. Ils ont à c_ur de se concerter avec la France, dont ils apprécient les positions, et se montrent soucieux de l'appuyer.

Absorbée par les vicissitudes du processus de paix, l'Autorité palestinienne ne peut s'impliquer dans le suivi de Barcelone autant qu'elle le souhaiterait. Sa volonté d'y participer est cependant bien réelle et elle ne ménage pas ses efforts pour renforcer le partenariat, comme en témoigne la conclusion de l'accord d'association intérimaire avec l'Union européenne, entré en vigueur le 1er juillet 1997. Ce dernier demeure peu appliqué, en raison des entraves mises par Israël au commerce palestinien.

. La Turquie.

Tout en étant intéressée par le processus de Barcelone, la Turquie est restée jusqu'alors relativement en retrait. Son contentieux avec la Grèce et ses déceptions vis-à-vis de l'Union sont autant de facteurs limitatifs de sa participation.

. Chypre.

De même que la Turquie, Chypre est davantage préoccupée de sa relation avec l'Union et des actuelles négociations d'adhésion. Elle est certes intéressée par le développement et les échanges en Méditerranée mais sa participation au partenariat euro-méditerranéen est jusqu'alors demeurée discrète.

. Israël.

Israël manifeste un intérêt réel, mais nuancé, pour le processus de Barcelone. Celui-ci lui permet d'afficher une volonté de dialogue et de coopération avec ses partenaires de la région, qui a été très utile dans le contexte de gel du processus de paix. Sur le fond, il fait preuve d'une grande prudence et veille à ce qui reste la condition essentielle de sa participation, à savoir que le partenariat euro-méditerranéen n'empiète en aucun cas sur le processus de paix et, tout autant, ne compromette pas sa relation privilégiée avec les Etats-Unis.

Ses relations avec l'Union sont ombrageuses : si Israël est conscient de l'intérêt de renforcer ses liens avec les Quinze, il ne manifeste pas moins sa mauvaise humeur en ce qui concerne les positions de l'Union sur le processus de paix, l'accord CE-OLP ou le retard pris dans la ratification de l'accord d'association. Aussi les contentieux commerciaux euro-israéliens n'ont-ils toujours pas trouvé de solution.

Toutefois, le résultat des dernières élections israéliennes ouvre une réelle perspective pour l'amélioration de ces relations.

. Le Liban.

Le Liban a été à l'origine réticent à l'idée de s'engager durablement dans le processus, dans la mesure où il n'a pas conclu d'accord de paix avec Israël. Il semble aujourd'hui plus ouvert au partenariat euro-méditerranéen, comme le confirment les négociations en cours pour conclure un accord d'association avec l'Union. Le Liban éprouve toutefois des difficultés à dissocier le cadre de Barcelone des évolutions du processus de paix, qui demeurent sa préoccupation principale.

S'agissant des négociations de l'accord d'association, le Liban ne semble guère pressé d'aboutir, compte tenu des conséquences de l'accord pour son économie. Il craint en effet que le déficit commercial structurel dans ses échanges avec l'Union ne se creuse davantage. Le secteur privé libanais, qui redoute un affaiblissement de ses entreprises, partage la position du gouvernement.

. La Syrie.

Comme le Liban, la Syrie n'a accepté, au départ, qu'avec réticence de s'engager dans le processus de Barcelone, dans la mesure où elle n'a pas conclu d'accord de paix avec Israël et où elle craint qu'une implication trop forte de sa part dans le cadre de coopération euro-méditerranéenne n'affaiblisse sa position vis-à-vis de ce pays.

Le gel du processus de paix l'a ensuite confirmée dans cette attitude et l'a conduite à s'opposer à l'adoption de toute mesure de confiance pouvant avoir une connotation sécuritaire. De même est-ce à son initiative que les pays arabes ont insisté pour que le volet politique ne soit pas négligé, de manière à pouvoir évoquer les difficultés du processus de paix. Son attitude y a été relativement constructive, compte tenu des efforts faits par l'Union pour prendre en compte ses préoccupations et de sa volonté de la ménager.

Suite au resserrement de nos relations bilatérales, la Syrie a accepté de prendre part à l'exercice de préparation d'un projet de Charte, conformément à l'engagement pris par les pays arabes à Malte, même si elle exclut son adoption dans le contexte actuel.

La Syrie porte cependant à son rapprochement avec l'Union européenne un intérêt croissant, motivé par des considérations politiques aussi bien qu'économiques. Elle a longtemps été le plus réticent de nos douze partenaires de Barcelone à s'engager dans le libre-échange. Les négociations, engagées en mai 1998, risquent toutefois d'être longues.

De ce tour d'horizon, il ressort deux préoccupations constantes : lenteur du programme MEDA et inquiétudes soulevées par la perspective du libre-échange industriel. L'on verra, au fil de ce rapport, que ces reproches sont largement justifiés.

Mais la question essentielle demeure celle du processus de paix au Proche-Orient. C'est elle qui détermine la ligne de clivage entre les Etats les plus favorables au processus et ceux qui s'en défient. C'est elle qui détermine le climat dans lequel se déroulent les conférences ministérielles.

Le processus de Barcelone s'est défini, dès l'origine, comme un processus complémentaire au processus d'Oslo. Cela ressort clairement d'un des attendus de la déclaration de Barcelone : "Cette initiative euro-méditerranéenne n'a pas vocation à se substituer aux autres actions et initiatives entreprises en faveur de la paix, de la stabilité et du développement de la région, mais elle contribuera à favoriser leur succès. Les participants appuient la réalisation d'un règlement de paix juste, global et durable au Moyen-Orient, basé sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies et les principes mentionnés dans la lettre d'invitation à la Conférence de Madrid sur la paix au Moyen-Orient".

Lorsque le processus de paix progresse, le dialogue euro-méditerranéen n'a aucune peine à se développer. Mais, dans le cas inverse, ce dialogue ne pouvant prétendre pallier le manque de dynamisme d'Oslo, les partenaires doivent éviter que cette question ne perturbe le déroulement du dialogue.

Or, comme chacun sait, le processus d'Oslo a été gravement enrayé à partir de l'année 1997. L'accord conclu le 23 octobre 1998 entre MM. Benyamin Netanyahou et Yasser Arafat a permis de relancer le processus après 19 mois d'impasse. Mais, après avoir consenti à mettre en _uvre ses premières dispositions, le gouvernement israélien a décidé, le 2 décembre 1998, de suspendre son application, puis, le 20 décembre 1998, de soumettre celle-ci à cinq conditions à remplir par les Palestiniens, conditions que ces derniers ont rejetées. Les Etats-Unis ont considéré comme inacceptables ces conditions unilatérales sans réussir à convaincre M. Netanyahou de revenir sur sa décision. Celui-ci a décidé, le 22 décembre, de convoquer des élections anticipées pour le 17 mai et le 1er juin 1999. Parallèlement, les Palestiniens ont déclaré leur intention de proclamer un Etat palestinien le 4 mai 1999.

B - De Barcelone à Stuttgart

Réunie les 15 et 16 avril 1999, la conférence de Stuttgart a su éviter les écueils d'un contexte politique difficile.

Elle s'est déroulée alors que le processus de paix était pratiquement gelé du fait de la campagne électorale en Israël et alors que les Palestiniens n'avaient pas encore renoncé à proclamer unilatéralement un Etat palestinien dès le 4 mai 1999. Le risque était grand que le sommet devienne une arène où se seraient affrontés les protagonistes du processus de paix ou bien qu'Israël décide de ne pas être représenté.

Le précédent de Malte constituait l'exemple de ce qu'il ne fallait pas reproduire.

En dépit des allégations officielles, on peut considérer en effet que la deuxième conférence euro-méditerranéenne qui s'est tenue les 15 et 16 avril 1997 à Malte a été un échec. Cette conférence a dû se dérouler à Malte en raison du veto syrien et libanais contre la venue d'une délégation israélienne sur le sol arabe. Par ailleurs, elle s'est tenue au niveau ministériel alors qu'il avait été envisagé qu'elle réunisse les chefs d'Etat. Les pays arabes ont tenté de saisir cette occasion pour obtenir une condamnation explicite de la politique israélienne. Les Européens se sont opposés à cette démarche au nom du principe d'indépendance du dialogue par rapport au processus de paix. En revanche, la présidence néerlandaise a obtenu que le ministre israélien des Affaires étrangères et Yasser Arafat se rencontrent. Cette rencontre purement formelle n'a été acceptée qu'à contrecoeur et in extremis par Yasser Arafat, car le dialogue israélo-palestinien était interrompu depuis la crise ouverte par la décision de créer une colonie à Har Homa.

Ces péripéties ont démontré les risques que comportait toute tentative de faire jouer à ce forum un rôle actif dans le processus de paix. Néanmoins, à Malte, le pire avait été évité en raison de l'attachement des pays arabes à la poursuite du processus.

Les résultats de la conférence de Malte sur le volet politique et de sécurité ont été extrêmement modestes.

La conférence a constaté que les réunions de hauts fonctionnaires avaient permis des échanges d'informations sur l'adhésion des Etats aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, au désarmement et à la lutte contre le terrorisme.

L'idée d'une charte européenne de sécurité a un peu progressé. A Malte, les participants ont simplement invité les hauts fonctionnaires à poursuivre leurs efforts pour élaborer une charte de stabilité en Méditerranée. Aucun calendrier n'a été arrêté ; il a été précisé que le projet serait soumis à une prochaine conférence "lorsque les circonstances politiques le permettront". Il s'agissait d'une avancée dans la mesure où la déclaration de Barcelone n'évoquait que la possibilité d'un pacte mais la perspective d'adoption d'un acte équivalent à celui de l'acte d'Helsinki était très lointaine.

La conférence de Palerme, en juin 1998, a permis de vérifier que la volonté de dialogue avait survécu à la crise profonde du processus de paix.

La France et l'Italie ont pris l'initiative de proposer cette conférence de mi-parcours afin de maintenir l'élan du processus. Tenue à Palerme, les 3 et 4 juin 1998, elle a permis, tout en mettant l'accent sur la coopération, de débattre des trois volets afin de répondre aux attentes des pays arabes qui ne souhaitaient pas que les aspects politiques soient négligés. Cette heureuse initiative a donc contribué à assurer le succès de la conférence de Stuttgart.

A Stuttgart, la question du processus de paix n'a pas été occultée mais tous les participants sont convenus que leurs différends sur cette question ne devaient pas perturber les autres dimensions du dialogue.

Après avoir laissé planer le doute sur ses intentions, le ministre des Affaires étrangères israélien, M. Ariel Sharon, s'est rendu à Stuttgart. Outre l'intérêt objectif de son pays dans ce processus, le ministre a sans doute pris en considération le fait que l'opposition israélienne et une partie de l'opinion auraient vu dans son absence une nouvelle preuve de l'isolement diplomatique d'Israël. Par ailleurs, les participants arabes ont adopté un profil bas. Le sommet n'a été marqué que par un seul incident : la conférence de presse clôturant le sommet n'a pu avoir lieu car le représentant israélien exigeait d'être présent à la table présidentielle où siégeait le représentant de la Syrie, en tant que président du groupe arabe.

La modération des représentants arabes s'explique sans doute par le fait que l'Union européenne a su, avant la conférence, prendre des positions claires sur le processus de paix.

Tout d'abord, l'Union européenne a multiplié les initiatives pour soutenir le processus. Elle est le principal bailleur de fonds à l'Autorité palestinienne. Elle a désigné en 1996 un représentant spécial, M. Moratinos, qui s'implique dans les discussions et anime divers groupes de travail. La Commission européenne s'est engagée résolument pour obtenir d'Israël une application correcte des accords d'association.

Mais, surtout, l'Union a fait un pas important vers la reconnaissance d'un État palestinien.

En effet, la déclaration adoptée par le Conseil européen de Berlin, le 26 mars 1999 précise : "L'Union européenne réaffirme le droit permanent et sans restrictions des Palestiniens à l'autodétermination, incluant l'option d'un État ; souhaite l'accomplissement prompt de ce droit ; appelle les parties à s'efforcer de bonne foi à une solution négociée sur la base des accords existants sans préjudice de ce droit, qui n'est soumis à aucun veto ; exprime sa conviction que la création d'un État palestinien démocratique, viable et pacifique sur la base des accords existants et à travers des négociations serait la meilleure garantie de la sécurité d'Israël et de l'acceptation d'Israël comme un partenaire égal dans la région ; déclare sa disposition à considérer la reconnaissance d'un État palestinien le moment venu en accord avec les principes de base cités ci-dessus".

Sans doute, la même déclaration invitait les parties à prolonger la période intérimaire des accords d'Oslo et l'Union a demandé à Yasser Arafat de repousser la proclamation de l'Etat palestinien.

Mais, pour la première fois, l'Union a reconnu les droits des Palestiniens à l'autodétermination sans aucune restriction, notamment sans que ce droit soit subordonné à un veto israélien. Tout en exprimant sa préférence pour que la création de cet État soit le résultat de la négociation israélo-palestinienne, l'Union est disposée à reconnaître cet État à tout moment.

Cette déclaration a été rejetée par M. Nétanyahou mais elle a été particulièrement bien accueillie par les pays arabes qui y ont vu, à juste titre, le fruit de la politique de la France auprès de ses partenaires européens.

Elle a permis de désamorcer le risque que la question palestinienne soit au centre des débats de la conférence de Stuttgart.

Les conclusions de la conférence se bornent à rappeler que le processus de Barcelone ne vise pas à remplacer les initiatives pour la paix et la stabilité dans la région mais à contribuer à leur succès. Les ministres ont appelé à la reprise des négociations de paix au Proche-Orient et à une application immédiate de la résolution 425 de l'ONU.

Par ailleurs, les ministres ont retenu plusieurs orientations :

- élaboration d'une "charte euro-méditerranéenne pour la paix et la stabilité", dont les lignes directrices ont été annexées aux conclusions comme document de travail informel et qui sera adopté formellement "aussitôt que les circonstances politiques le permettront" (1) ;

- confirmation que le programme MEDA-II, couvrant la période 2000-2006 reflétera "la grande priorité" du partenariat ;

- confirmation de la volonté d'établir une zone de libre-échange d'ici à 2010 et de conclure des accords d'association entre l'Union et tous les partenaires ;

- décision que la Libye deviendra membre à part entière du partenariat lorsque les sanctions de l'ONU auront été levées et une fois que ce pays aura accepté l'acquis de Barcelone ;

- décision de tenir la quatrième conférence sous la présidence française de l'Union au second semestre 2000.

Sans doute, ces orientations ne font que confirmer celles qui avaient été retenues à Barcelone. Cependant, on peut considérer que cette confirmation est une consécration. L'intérêt des pays tiers pour Barcelone a résisté aux vents contraires, notamment à la crise du processus de paix. Les pays européens dans leur ensemble, notamment les plus éloignés géographiquement de la Méditerranée, admettent désormais que la politique méditerranéenne est une dimension essentielle de la politique extérieure de l'Union.

Cette consécration est d'autant plus remarquable que les réalisations concrètes du processus sont encore rares et peu convaincantes.

II - UNE POLITIQUE EN CHANTIER

Le partenariat peut être considéré comme un succès diplomatique mais ce succès n'aurait que peu d'importance s'il ne permettait à l'Europe d'entraîner réellement ses partenaires dans sa sphère de paix et de prospérité.

A cet effet, le partenariat vise à mettre en place divers mécanismes. Un seul mot pourrait caractériser leur mise en _uvre : lenteur... Lenteur de la mise en place des accords euro-méditerranéens, lenteur de la mise en _uvre du programme MEDA, lenteur de la coopération politique.

A - Les accords euro-méditerranéens

La négociation d'accords d'association a constitué un élément central de la relance de la politique méditerranéenne. Ces accords et leur accompagnement financier forment depuis lors le fondement même du processus de Barcelone.

Ces accords sont destinés à remplacer les accords de coopération conclus dans les années 70 avec les Etats de la rive sud de la Méditerranée. Ces derniers, bien qu'offrant aux produits méditerranéens un accès privilégié - sans obligation de réciprocité - au marché communautaire (libre-accès pour les produits industriels, contingents pour les produits agricoles), étaient cependant limités aux dispositions économiques et commerciales et à l'assistance financière (sous forme de quatre protocoles financiers successifs).

Par ailleurs, il est apparu indispensable d'adapter les relations contractuelles euro-méditerranéennes aux évolutions des règles commerciales multilatérales issues de l'Uruguay Round (réciprocité des concessions, prise en compte du secteur des services) et au développement d'une Europe politique.

Cette nouvelle donne concerne neuf des douze partenaires méditerranéens. Parmi ces neuf, Israël et l'OLP constituent deux cas particuliers.

Par ailleurs, la Turquie, Chypre et Malte ont conclu, dès les années 60 et 70, des accords d'association prévoyant la mise en place d'unions douanières.

1) Les nouveaux accords d'association

Les accords euro-méditerranéens, conclus entre l'Union et chaque partenaire, ont pour principaux objectifs la mise en _uvre d'un dialogue politique et la création d'une zone de libre-échange à l'horizon 2010. Ils doivent également instituer une coopération très large, financée par le programme MEDA.

Ces accords constituent le moteur du dialogue euro-méditerranéen. A travers eux, c'est l'ensemble de la politique communautaire qui doit s'articuler qu'il s'agisse du dialogue politique, du libre-échange ou de la coopération. Ils constituent aussi un élément de souplesse car chaque partenaire a la possibilité de progresser à son rythme et de préserver la qualité de ses relations bilatérales avec l'Europe.

Aussi, l'on doit regretter que le bilan des ratifications et des négociations en cours soit aussi pauvre. Sur les 7 accords prévus, un seul est entré en vigueur, deux ont été signés et quatre sont encore en négociation.

a) Contenu des accords

· La dimension politique.

Un cadre de dialogue politique est mis en place ; celui-ci se déroule essentiellement dans le cadre du Conseil d'association, qui se tient au moins une fois par an au niveau des Ministres des Affaires étrangères.

Chaque accord comporte également une clause suspensive disposant que le respect des droits de l'Homme et des principes démocratiques constituent un "élément essentiel". La violation de cette clause pourrait donc entraîner la suspension de l'accord.

· Un volet commercial orienté vers la perspective de libre-échange à l'horizon 2010.

Ce volet est en fait inégal puisque les partenaires devront s'ouvrir à la concurrence européenne dans le domaine industriel alors qu'ils sont jusqu'à présent protégés par des barrières douanières. Les compensations européennes sont faibles car l'Union est déjà ouverte dans le domaine industriel et n'entend pas démanteler ses protections dans le secteur agricole.

Par rapport aux accords antérieurs, les concessions deviennent réciproques pour les produits industriels : le libre-échange est instauré progressivement au terme d'une période transitoire de 12 ans (délai maximal autorisé dans le cadre de l'OMC). Des phases de transition, des clauses de protection et de sauvegarde ainsi que des mesures d'accompagnement sont prévues.

Pour les produits agricoles, le mécanisme des contingents demeure. Une clause évolutive prévoit néanmoins que les parties examineront la situation en vue de fixer des mesures de libéralisation applicables au 1er janvier 2001. Par ailleurs, les parties peuvent également s'entendre au sein du Conseil d'association sur de nouvelles concessions réciproques au cas par cas.

Le secteur des services est inclus, dans cette libéralisation, conformément aux règles de l'OMC. Les parties conviennent d'élargir le champ d'application de l'accord au droit d'établissement de leurs sociétés et à la libéralisation de la fourniture des services. La mise en _uvre de cet objectif fera l'objet d'un bilan, au plus tard cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord.

· L'encouragement des investissements.

Les parties réalisent tous les paiements courants dans une monnaie librement convertible.

La libre circulation des capitaux relatifs aux investissements directs dans le pays partenaire est assurée de même que la liquidation et le rapatriement des bénéfices, l'objectif étant de parvenir à une libéralisation intégrale.

· Les règles de la libre-concurrence s'imposent et les parties s'engagent à respecter les droits de propriété intellectuelle ; l'utilisation des normes et des procédures de certification européennes est encouragée.

· Les parties libéralisent progressivement les marchés publics.

· Les accords prévoient de vastes domaines de coopération, y compris à l'échelon régional.

En matière économique : éducation et formation, environnement, coopération industrielle, promotion et protection des investissements, normalisation, rapprochement des législations, services financiers, agriculture, transports, télécommunications, énergie, tourisme, douanes, blanchiment d'argent, drogue, statistique.

En matière sociale et culturelle : régime relatif aux travailleurs (égalité de traitement), dialogue social (recherche des progrès à réaliser pour la circulation des travailleurs, l'égalité de traitement et l'intégration sociale des ressortissants des deux parties), coopération sociale (réduction de la pression migratoire, réinsertion des rapatriés, rôle de la femme, législation sociale...), coopération culturelle.

En matière financière, la coopération est destinée plus particulièrement aux réformes de modernisation de l'économie, la mise à niveau des infrastructures économiques, la promotion de l'investissement et les conséquences sur l'économie et la mise en _uvre d'une zone de libre-échange, la transition sociale.

· Le volet institutionnel est articulé autour de deux instances :

- le Conseil d'association qui se réunit une fois par an au niveau ministériel, est chargé des questions les plus importantes et doté d'un pouvoir de décision,

- le Comité d'association, au niveau des fonctionnaires, chargé du suivi de l'accord.

· Des annexes, comprenant notamment des protocoles relatifs à la définition des produits originaires et à la coopération administrative, à l'assistance mutuelle en matière douanière et au régime commercial applicable à certains produits.

c) Etat des ratifications et des négociations en cours

Seul l'accord signé avec la Tunisie, le 17 juillet 1995, est entré en vigueur le 1er mars 1998. La Tunisie a d'ailleurs procédé, dès 1995, à une mise en _uvre anticipée du calendrier de démantèlement tarifaire prévu par cet accord.

L'accord prévoit plusieurs clauses de rendez-vous. Un certain nombre de dispositions législatives tunisiennes doivent en effet être mises en conformité avec les normes européennes dans un délai inférieur à cinq ans. Par ailleurs, le régime des produits agricoles devra faire l'objet de négociations à partir du 1er janvier 2000, pour une application prévue un an plus tard. Les négociations concernant les services devront être abordées à compter de mars 2003 au plus tard. Les Tunisiens souhaitent pouvoir discuter avec la France du volet social et culturel de l'accord pour lequel des négociations doivent s'ouvrir en 1999.

Cette démarche volontariste est aujourd'hui teintée de scepticisme. La Tunisie dispose d'atouts dans le domaine textile mais l'accord se traduit surtout par l'ouverture du marché tunisien aux produits européens, ce qui exige un important effort d'adaptation. Les recettes douanières, vouées à disparaître pour les produits européens, constituent une part importante des recettes budgétaires. Les concessions européennes dans le secteur agricole sont faibles. L'accord ouvre des contingents pour les fleurs coupées et les mélanges de fruits et élargit le champ des concessions aux légumes qui font l'objet de flux très faibles. Le régime applicable à l'huile d'olive - en concurrence directe avec l'huile italienne - a été reconduit pour quatre ans. En conséquence, la Tunisie demande des compensations financières importantes.

Cette avance de la Tunisie a probablement une conséquence : les autres partenaires ont peut-être tendance à attendre les résultats concrets de l'application du libre-échange avant de s'engager sur la même voie. Mais ça n'est pas la seule raison du retard que l'on constate.

L'accord avec le Maroc signé le 26 février 1996 doit encore être ratifié par l'Italie. Ce dernier obstacle est dû aux pressions des producteurs d'agrumes de Sicile ; toutefois, il devrait être levé prochainement.

Avec la Jordanie, l'accord signé le 24 novembre 1997 est toujours en instance de ratification.

Avec les autres partenaires méditerranéens, les négociations sont en cours, mais à des degrés d'avancement divers.

Avec le Liban, les négociations sont en phase finale mais stagnent depuis la dernière session de négociations d'avril 1998 (le mandat date du 2 octobre 1995) en raison des réticences de Beyrouth à engager, sans compensations financières spécifiques et dans un climat économique fragile, le processus de démantèlement tarifaire induisant des pertes importantes de recettes douanières.

Avec l'Egypte, les négociations ont longtemps buté sur trois questions sensibles qui ont empêché que l'accord soit signé avant Stuttgart :

- la "clause suspensive droits de l'Homme" : point dur pour l'Egypte qui souhaiterait faire référence à ses spécificités culturelles ; en outre, elle ne peut admettre une clause différente de celle applicable à Israël ;

- la question de la réadmission : certains Etats membres (Allemagne, Pays-Bas, Italie) sont très attachés à l'insertion de deux dispositions, l'une relative à la réadmission des ressortissants égyptiens, l'autre à celle des ressortissants d'Etats tiers. Ce dispositif a été accepté par la Jordanie. L'Egypte ne peut accepter de réadmettre des ressortissants tiers (problème des réfugiés notamment) ;

- les contingents agricoles, pour quatre produits en particulier : oranges, riz, pommes de terre, fleurs coupées. Il s'agit d'une question sensible pour les pays méditerranéens de l'Union (mais les fleurs coupées posent des difficultés à l'Allemagne). Pour la France, c'est le contingent pommes de terre qui peut constituer un élément de difficulté (l'Egypte demande 300.000 tonnes, nous en avons proposé 200.000).

Tout dernièrement, le 22 juin 1999, un texte a été finalisé ; il devrait être signé dans les prochains mois.

Avec l'Algérie, les négociations sont au point mort depuis deux ans (le mandat a été adopté en juin 1996). Outre les difficultés internes à ce pays, c'est la philosophie générale de l'accord que conteste l'Algérie. Elle l'estime inadapté à sa structure économique, dont le tissu industriel, affaibli par la politique agréée par le FMI, risque d'être fragilisé par l'ouverture à la concurrence extérieure. Afin de compenser le coût économique et social de la mise à niveau, l'Algérie a demandé un soutien financier de l'ordre de 3 milliards de dollars sur 10 ans.

Avec la Syrie, les négociations ont débuté récemment, en mai 1998, après l'adoption du mandat par le Conseil le 18 décembre 1997. Ces négociations devraient être longues.

Deux raisons essentielles expliquent la lenteur du processus :

- du côté européen, le processus de ratification est lent, soit pour des raisons techniques (la nécessité de réunir un nombre élevé d'autorisations parlementaires), soit pour des raisons politiques, comme l'intervention en dernière minute de tel ou tel groupe de pression européen ;

- du côté des pays partenaires, il est évident que le processus du libre-échange suscite une forte et légitime appréhension.

2) Les cas particuliers d'Israël et de l'Autorité palestinienne

Dans le cas de ces deux partenaires, les accords ont été conclus mais ne sont entrés que partiellement en vigueur pour des raisons politiques.

L'accord avec Israël, signé le 20 novembre 1995, a été ratifié par tous les Etats membres de l'Union européenne, à l'exception de la France et de la Belgique. Ce blocage s'explique par le souhait des parlementaires français et belges de subordonner leur accord à des progrès dans le processus de paix.

Cette non-ratification ne fait pas obstacle à l'application des dispositions techniques, notamment commerciales, de l'accord d'association car celles-ci ont été mises en vigueur par anticipation à travers un accord intérimaire. En revanche, elle empêche la mise en _uvre du dialogue politique entre l'Union et Israël.

Par ailleurs, les relations entre Israël et l'Union sont d'ores et déjà fondées sur le libre-échange. Le marché israélien est plus ouvert que le marché européen. Israël a un niveau de vie comparable à celui de l'Espagne.

L'application de l'accord intérimaire donne lieu à deux difficultés.

La première est assez banale dans le fonctionnement d'un traité de libre-échange et n'a pas de dimension politique. Il s'agit d'un contentieux portant sur des jus d'orange importés par Israël et réexportés vers l'Europe sous certificat israélien, ce qui est contraire aux règles d'origine fixées par l'accord.

La seconde place ces mêmes règles d'origine au c_ur d'un problème éminemment politique. En effet, Israël exporte sous son label des produits originaires de Jérusalem, des colonies et des Territoires autonomes palestiniens. Ces trois lieux de provenance ne faisant pas partie aux yeux des Européens du territoire d'Israël, l'Union conteste cette pratique.

Compte tenu de la nature juridique particulière de l'Autorité palestinienne, il n'était pas possible de conclure avec elle d'accord d'association. Toutefois, un accord intérimaire d'association a été signé le 24 février 1997 entre l'Union européenne et l'OLP mais son application effective est empêchée par Israël.

Cet accord établit progressivement une zone de libre-échange entre l'Union et les Territoires et libéralise les échanges agricoles. Cependant, Israël ne reconnaît pas les certificats d'origine émis par l'Autorité palestinienne et leur substitue des certificats israéliens.

Israël, en effet, ne reconnaît pas la validité juridique de l'accord intérimaire entre la Communauté et l'OLP. Pourtant, les accords d'Oslo ont reconnu à l'OLP la capacité de signer des accords de commerce. Israël considère que les Territoires font partie, non de son territoire national, mais de son territoire douanier.

Ce contentieux n'a pas de grande portée pratique puisque les flux commerciaux sont faibles. Il pourrait trouver une solution technique : le cumul des règles d'origine qui est souvent adopté dans le cadre des zones de libre-échange.

Mais il a une portée symbolique et politique évidente et il s'inscrit dans un contexte marqué par les nombreux obstacles mis par Israël au développement du commerce palestinien.

De ce dernier point de vue, il est un exemple que les mécanismes du processus de Barcelone peuvent dépendre étroitement du processus de paix. Les premières mesures d'application de l'accord de Wye Plantation ont permis une certaine reprise du dialogue économique israélo-palestinien : ouverture de l'aéroport de Gaza, meilleure circulation des personnes et des marchandises... Le groupe de travail euro-israélien sur l'économie palestinienne est parvenu à de bons résultats. Mais les contentieux de principe ne sont pas réglés.

3) Les régimes spéciaux de la Turquie, Malte et Chypre

Ces trois Etats ont conclu des accords d'association avec la Communauté longtemps avant la conférence de Barcelone et des accords prévoient la mise en place d'unions douanières 1.

Ils sont engagés dans un processus d'adhésion à l'Union européenne et ont atteint un niveau de développement proche de celui des pays de l'Union les plus pauvres.

Cependant, à des titres divers, leur rapprochement avec l'Union pose de nombreux problèmes.

La candidature de Malte à l'Union européenne, déposée en 1990, avait reçu un avis favorable de la Commission en 1993 et la vocation de Malte à faire partie de l'Union européenne avait été reconnue par le Conseil européen en 1995.

Ce processus a été interrompu par la victoire du parti travailliste aux élections d'octobre 1996 qui a "gelé" la candidature maltaise. Ce parti a toutefois souhaité renforcer sa coopération avec l'Union européenne, tant au plan économique qu'au plan politique dans le cadre de l'accord d'association conclu en 1970 entre Malte et l'Union européenne.

A la suite des élections législatives anticipées du 5 septembre 1998, les nationalistes de retour au pouvoir ont immédiatement demandé la réactivation de la candidature maltaise à l'Union. Celle-ci devrait être examinée lors d'un prochain Conseil européen après actualisation de l'avis de la Commission.

Malte a vocation à devenir membre de l'Union. Néanmoins, le "gel" de la candidature maltaise a remis en cause le calendrier arrêté et interrompu les réformes mises en _uvre par Malte dans le cadre de la stratégie de pré-adhésion. La candidature de Malte n'ira pas sans poser certaines difficultés pour la reprise de l'acquis, non seulement en matière de législation économique, commerciale et financière (fiscalité, importance de "l'offshore"), mais également en matière de PESC (politique de neutralité, relations avec la Libye) et de IIIème Pilier (blanchiment d'argent, drogue), difficultés déjà mises en lumière en 1993.

Chypre est liée à l'Union européenne par un accord d'association signé en 1972 et par un accord d'union douanière conclu en 1987.

En 1993, la Commission a rendu un avis favorable à l'adhésion de Chypre à l'Union européenne. Au Conseil Européen de Luxembourg de décembre 1997, les Quinze ont décidé d'ouvrir les négociations d'adhésion avec Chypre en mars 1998. Dans sa déclaration d'ouverture des négociations, l'Union a rappelé que l'adhésion "devrait bénéficier à toutes les communautés, y compris la communauté chypriote turque, et concourir à la paix civile et à la réconciliation dans l'île". Enfin, l'Union européenne a décidé d'engager des négociations sur sept chapitres constituant l'acquis communautaire.

Aux yeux des Européens, les négociations d'adhésion apparaissaient comme un "levier" permettant d'obtenir à terme un règlement politique. En l'absence de ce règlement, l'Union européenne se verrait obligée, soit de refuser l'adhésion de Chypre (ouvrant ainsi une crise avec Athènes, qui pourrait bloquer l'ensemble du processus d'élargissement), soit d'accepter l'entrée de la seule partie méridionale de l'île (ce qui signifierait non seulement un échec mais mettrait également en péril les relations euro-turques).

Or, force est de constater que, à ce jour, cet effet de levier n'a pas joué, notamment à cause du refus persistant de M. Denktash de répondre à l'offre de M. Clérides d'inclure des représentants de la communauté chypriote turque au sein de la délégation participant aux négociations avec l'Union. C'est le sens de la déclaration que la France a co-signée avec l'Allemagne, l'Italie et les Pays-Bas, le 9 novembre dernier, où l'attention était particulièrement attirée sur les incidences de la partition de l'île sur le fonctionnement et la cohérence de la PESC.

L'objectif de la France est l'adhésion d'une île réunifiée. Nous sommes soucieux de ce que les négociations qui sont sur le point de s'ouvrir ne favorisent pas une partition de fait de l'île.

Compte tenu de son potentiel, de ses ambitions, de l'orientation de ses échanges, de l'instabilité environnante enfin, la Turquie a vu son avenir dans une association aussi étroite que possible avec l'Europe. L'accord d'union douanière, conclue sous présidence française, le 6 mars 1995, et entré en vigueur le 1er janvier 1996, en constitue une étape essentielle.

Cependant, l'élargissement de l'Union à la Turquie demeure une perspective encore lointaine.

Le Conseil européen de Cardiff (juin 1998) a entériné les conclusions de Luxembourg, selon lesquelles la Turquie faisait partie intégrante du processus d'élargissement.

La Commission européenne a proposé « une stratégie européenne », notamment un approfondissement de l'union douanière, un rapprochement plus poussé des législations, une association de la Turquie à certains programmes et comités techniques communautaires.

A Cardiff, le Conseil a également pris acte de l'intention de la Commission de réfléchir aux modalités d'un accompagnement financier. La Commission a ainsi transmis au Conseil une double proposition d'aide financière : l'une porte sur 15 millions d'écus sur trois ans et doit être adoptée à l'unanimité ; l'autre, d'un montant de 135 millions d'écus pour trois ans requiert la majorité qualifiée. La Grèce a immédiatement réagi, indiquant qu'elle voterait contre ces propositions et qu'elle saisirait la CJCE. Cependant, elle n'a pas jusqu'à présent brandi la menace de recourir au compromis de Luxembourg.

Le Conseil européen de Vienne (11-12 décembre 1998) a rappelé l'importance qu'il attachait à la poursuite des relations UE-Turquie et à la stratégie européenne "visant à préparer la Turquie à l'adhésion". Il a également pris note du premier rapport périodique de la Commission sur les progrès réalisés par les pays candidats, dont la Turquie, dans le cadre de l'élargissement. Tout en soulignant les progrès de ce rapprochement, le rapport insiste sur les efforts que doit encore accomplir la Turquie en matière de démocratie et de droits de l'Homme.

Après sa réaction de vif mécontentement aux conclusions de Luxembourg (décembre 1997), la Turquie avait réagi avec une satisfaction mesurée aux conclusions de Cardiff. La publication du premier rapport de la Commission sur la Turquie a permis à Ankara de faire un pas de plus en direction de l'Union. Mais elle attendait du Conseil européen de Vienne une déclaration explicite lui reconnaissant officiellement le statut de "12ème candidat". De nouveau déçue, elle a immédiatement annoncé qu'elle refusait de reprendre le dialogue politique.

La Turquie participe, bien que discrètement, au processus de Barcelone. En tant que partenaire méditerranéen, elle est éligible au programme MEDA : son enveloppe 1996-99 s'élève à 375 Mécus et de nombreux projets ont été approuvés en dépit des conditions strictes mises par le Parlement européen à l'emploi de ces fonds (limité aux projets relatifs à la démocratie, aux droits de l'Homme et au développement du sud-est ; arrangement institutionnel entre la Commission et le Parlement permettant à ce dernier de "filtrer" les propositions de financement en amont des comités de gestion).

Ankara souhaite être associée plus étroitement à la politique étrangère et de sécurité commune, sur le modèle du dialogue structuré dont bénéficient les pays d'Europe centrale et orientale ainsi que Chypre.

B - Les engagements financiers de l'Union

Lors du sommet de Cannes, en juin 1995, l'Union européenne a décidé une forte augmentation de l'aide communautaire. Il a été décidé également que ce soutien devait davantage accompagner et stimuler les réformes économiques dans les pays tiers.

1) Présentation

· Des crédits élevés

A Cannes, l'enveloppe financière pour la Méditerranée a été fixée à 4,685 milliards d'écus. Ce montant, qui a vocation à être doublé par des prêts de la BEI (3,9 milliards d'écus pour 1995/99), représente non seulement une forte augmentation par rapport à la période précédente, mais marque également un net rééquilibrage par rapport aux pays d'Europe centrale et orientale, l'enveloppe MED atteignant 70 % de l'enveloppe réservée aux PECO.

Engagements de Cannes (en Mécus)

 

MED

PECO

1995

  550

1 154

1996

  900

1 235

1997

1 000

1 273

1998

1 092

1 397

1999

1 143

1 634

TOTAL

4 685

6 693

· De nouvelles règles d'engagement

Adopté par le Conseil des Ministres en juillet 1996 après plusieurs mois de blocage politique de la Grèce du fait de son contentieux avec la Turquie, le règlement financier porte sur une enveloppe de 3,4245 milliards d'écus, soit le montant décidé à Cannes (4,685 milliards) diminué des protocoles bilatéraux restant à engager, de l'action spéciale pour la Turquie, de l'aide aux Palestiniens et des protocoles affectés à Chypre et Malte. Les prêts de la BEI peuvent eux-mêmes bénéficier d'une bonification de 3 % financée par MEDA, dès lors qu'ils concernent des projets environnementaux.

Le principal changement introduit par le règlement MEDA est l'abandon des protocoles bilatéraux par pays (4 générations de protocoles se sont succédé entre 1978 et 1995). Ceux-ci, autrefois négociés et conclus sur une base pluriannuelle, constituaient des montants garantis pour les bénéficiaires, quelle que soit leur capacité à les dépenser. Le règlement MEDA leur substitue une enveloppe globale, assortie d'indications par pays et soumise à conditionnalités (dont la clause droits de l'Homme du règlement MEDA). Les projets font l'objet d'appels d'offres.

Les crédits MEDA appuient à la fois des projets à caractère national et des projets régionaux (10 % de l'enveloppe MEDA pour ces derniers), conformément aux orientations définies dans des programmes indicatifs nationaux et régionaux trisannuels et adoptées par le Conseil à la majorité qualifiée. La composante régionale de MEDA, en principe 10 % de l'enveloppe, s'élève à 275 millions d'écus pour 1997/99 ; elle couvre les projets régionaux, les activités spécifiques liées au processus de Barcelone et la coopération décentralisée (MED URBS, MED CAMPUS et MED MEDIA).

Les projets recouvrent une vaste palette qui va de l'aide à l'ajustement structurel à l'aide au développement rural en passant par le soutien aux privatisations et aux réformes économiques. 116 programmes ont ainsi été définis.

La Commission a proposé une répartition indicative, qui n'a pas valeur d'engagement ferme, de l'enveloppe par pays pour 1996-1999.

Pays

1996-1999

(Mécus)

1996-1998

(Mécus)

Égypte

780

500

Maroc

580

450

Turquie

375

239

Tunisie

330

290

Algérie

280

191

Syrie

160

120

Jordanie

158

118

Cisjordanie et Gaza

124

69

Liban

123

106

TOTAL

   2910 (*)

2083

(*) La différence entre ce montant et les 3,425 milliards programmés s'explique par la non-prise en compte dans ce tableau du programme régional de Méda (275 Mécus), de l'appui technique (Méda Teams : 70 Mécus), d'une réserve de 11 Mécus et des 172,5 Mécus engagés au titre de 1995.

Calculé en écus par habitants, le classement des pays bénéficiaires est sensiblement différent.

Pays

% de l'enveloppe

Méda par pays

écus par

habitant

Cisjordanie &Gaza

 4%

69

Tunisie

11%

38

Liban

 4%

30

Jordanie

 5%

29

Maroc

20%

  21,5

Égypte

26%

  12,5

Syrie

 6%

11

Algérie

10%

10

Turquie

13%

6

Le Maghreb représente 41% de l'enveloppe bilatérale de Méda

(soit 1190 Mécus sur 2910 Mécus).

Le programme Méda a théoriquement vocation à intervenir dans quatre grands domaines.

· L'appui à l'ajustement structurel :

Il s'agit d'un soutien budgétaire aux réformes économiques et plus particulièrement celles engagées avec les institutions de Bretton Woods et de l'Union européenne.

Pour 1995-1997, cet appui a représenté 13 % des engagements concentrés sur quatre pays : l'Algérie (30 Mécus), la Jordanie (100 Mécus), le Maroc (120 Mécus) et la Tunisie (100 Mécus). Soit au total 350 Mécus.

· L'aide à la transition économique

Il s'agit d'encourager l'instauration d'un environnement de politique économique favorable au développement du secteur privé : appui aux techniques de privatisation, réforme des secteurs bancaires et financiers, amélioration de la formation professionnelle, création de centres de conseil aux entreprises.

Dans cet appui à la transition économique, l'action de la Banque européenne d'investissement représente près de 40 % des décisions d'investissement. L'essentiel de l'action de la BEI est constitué par des opérations de capitaux à risques, notamment pour l'industrie et pour appuyer les processus de privatisation.

Par ailleurs, le programme soutient les réformes administratives et finance les "Méda-teams", équipes d'experts qui assistent les services de la Commission et chacun des pays tiers méditerranéens.

L'aide à la transition économique représente 27 % des engagements pour la période 1995-1997.

· L'appui à un meilleur équilibre socio-économique

Dans ce cadre, les projets ont pour objectif d'atténuer les effets de la transition économique et de la création d'une zone de libre-échange. Ils sont consacrés à l'éducation et à la formation, au développement rural, à l'environnement et à la gestion des ressources naturelles (l'eau en particulier), au développement social.

Cet appui absorbe 46 % des engagements pour la période 1995-1997.

· L'appui à la coopération régionale

Il s'agit de soutenir les efforts de coopération entre les États du Sud dont les économies sont aujourd'hui faiblement intégrées. C'est dans ce cadre également qu'intervient le soutien à la coopération décentralisée et au renforcement de la société civile. Cet appui absorbe 14 % des engagements pour la période 1995-1997.

2) Le bilan

Barcelone a incontestablement permis à l'Union et à ses membres de devenir les principaux contributeurs d'aide aux pays méditerranéens.

Les pays de l'Union membres du Comité d'Aide au Développement de l'OCDE fournissent, à titre bilatéral, plus de 40 % de l'aide publique totale reçue par les partenaires méditerranéens. Si l'on y ajoute la part communautaire, à travers la contribution des Etats membres au budget communautaire, la part des pays de l'Union s'établit à plus de 60 %.


Pays (*)et CE.


Aide bilatérale (1997)
Millions de $

% de l'aide totale reçue
par les PTM (3 996 millions $)

France

 732

 

Allemagne

 542

 

Espagne

  96

 

Italie

  66

 

Pays-Bas

  63

 

Autriche

  36

 

Danemark

  36

 

Royaume-Uni

  33

 

Suède

  30

 

Belgique

  23

 

Luxembourg

  6

 

Finlande

  4

 

Irlande

  2

 

Portugal

    0,1

 

TOTAL

1669,1

  41,7 %

CE

 898,9

 

CE + Etats membres

2568

64 %

L'aide communautaire est répartie de manière plus équilibrée que l'aide bilatérale. Ceci, à la fois du point de vue de la répartition de la charge entre les contributeurs et du point de vue des bénéficiaires.

Ainsi, la France est, de loin, le premier contributeur au titre de l'aide bilatérale, 44 % de l'ensemble, grâce à l'aide qu'elle apporte aux pays du nord de l'Afrique : plus de 630 millions de dollars, répartis entre l'Algérie (136), le Maroc (154), la Tunisie (60) et l'Égypte (283).

L'Égypte est, de loin, le premier bénéficiaire de l'aide bilatérale des États membres (près de 80 millions de dollars). La France lui consacre 283 millions de dollars, l'Allemagne 397. Elle est suivie du Maroc (242) et des Territoires palestiniens (150).

L'aide communautaire, en tous cas les crédits du programme Méda, souffre d'une grave carence : celle de ne pas être versée à ses bénéficiaires...

L'échéancier prévu à Cannes n'a pas été totalement respecté, puisque dès 1996, 700 millions d'écus au lieu de 900 ont été engagés (le Parlement européen ayant annulé une réserve de 200 Mécus, principalement pour manifester son mécontentement à l'égard de la Turquie). Par ailleurs, la période d'adaptation aux nouvelles procédures induites par le règlement MEDA ont occasionné certains retards dans les engagements et les décaissements de crédits.

En 1998, l'engagement des crédits s'est amélioré mais les taux de paiement sont encore faibles. Les engagements financiers de l'Union au titre de MEDA ont atteint 2,4 milliards d'écus, soit 100 % des crédits, mais les paiements s'élèvent seulement à 596,8 millions d'écus, soit 17 % des crédits engagés.

Après une longue phase de négociation, tous les pays tiers à l'exception de la Turquie ont conclu un accord-cadre avec la Communauté ce qui a permis d'accélérer le rythme des engagements.

On trouvera en annexe de ce rapport un tableau retraçant, pays par pays l'utilisation de ces crédits.

Plus de la moitié des paiements (300 millions pour l'Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Jordanie) ont été réalisés au titre de l'appui à l'ajustement structurel qui ne demande pas de procédure compliquée. L'aide à l'Autorité palestinienne est également satisfaisante en termes de paiements (31 millions). En revanche, les paiements sont beaucoup plus rares pour les autres projets, en particulier ceux à vocation sociale. Certains projets de bonifications d'intérêt par la BEI ont donné lieu à des paiements. L'Égypte se distingue par des projets qui ont donné lieu à des paiements à hauteur de 89,5 millions d'écus au profit de la modernisation industrielle, de l'action sociale et de l'éducation. Au total, sur 116 programmes, seule une vingtaine ont donné lieu à des paiements.

Pour quelles raisons ?

· La faiblesse des montants effectivement versés s'explique, dans une large mesure, par le retard pris dans l'adoption du règlement Méda et par la lenteur des négociations des conventions-cadres. Ces accords fixent les modalités de gestion relatives aux projets financés par la Communauté et la BEI, en vertu du règlement Méda. Des divergences sont apparues notamment sur les appels d'offre que la Commission souhaitait contrôler depuis Bruxelles, alors que, dans l'ancien système, les pays bénéficiaires disposaient d'une totale liberté de man_uvre.

A ce jour, les accords-cadres sont tous paraphés (à l'exception de celui avec la Turquie) mais seules quelques conventions de financement ont été signées ce qui empêche les paiements. La Commission et les pays tiers se renvoient la responsabilité de cette lenteur.

· Au-delà de la difficulté qu'éprouvent les pays bénéficiaires à passer du mécanisme des protocoles à celui du règlement Méda, les lenteurs de la mise en _uvre du programme sont imputables à l'extrême lourdeur des procédures. Tout projet bilatéral passe par plusieurs étapes successives :

- il doit d'abord être conforme aux priorités négociées avec le bénéficiaire et approuvées par le Conseil dans le cadre des programmes indicatifs nationaux ; dans le cas du Maroc, les changements radicaux apportés au PIN en 1997 ont nécessité une refonte du programme et des retards dans sa mise en _uvre ;

- une fois le principe du projet accepté par le bénéficiaire, il fait l'objet de missions d'identification permettant à la Commission de déterminer les conditions de sa mise en _uvre, son coût et les organismes bénéficiaires ; il doit également être compatible avec l'enveloppe budgétaire programmée pour l'année donnée ;

- une fois finalisée, cette proposition de projet est soumise pour approbation au Comité MED, permettant ensuite à la Commission d'engager les crédits, de lancer les procédures d'appels d'offre, de conclure une convention de financement avec le bénéficiaire et, in fine, décaisser les fonds.

Les projets régionaux, proposés conformément au Programme indicatif régional (PIR), font l'objet d'une procédure spécifique : ils sont lancés sur l'initiative de la Commission ou des 27 partenaires ; le principe doit en être accepté successivement par les Quinze, puis les 27 hauts-fonctionnaires dans le cadre du comité euro-méditerranéen, avant d'être adopté par la Commission qui finalise ensuite le projet en association avec les auteurs du projet. Une fois élaboré, la proposition de financement est soumise au comité MED.

· La coopération décentralisée a été tout bonnement torpillée par les irrégularités de gestion révélées par la Cour des comptes européenne.

Cette coopération comprend - ou comprenait - cinq programmes : Med URBS (collectivités territoriales), Med CAMPUS (universités), Med INVEST (entreprises), Med AVICENNE (centres de recherche) et Med MEDIA (professionnels des média). Son enveloppe pluriannuelle s'élevait pour la période 1992-1996 à 116,6 millions d'écus dont 78 avaient été engagés au moment de la suspension décidée en octobre 1995.

La Cour des comptes a dénoncé en particulier le recours à une association (ARTM) qui s'est vue déléguer la gestion de Med URBS et Med CAMPUS dans des conditions irrégulières. La Cour a estimé notamment qu'une telle délégation aurait du faire l'objet d'une décision de principe du collège des Commissaires.

Le 30 mai 1996, le rapport de la Cour des Comptes considérait "compte tenu de la nature et de l'étendue des pouvoirs conférés à l'ARTM, on se trouve en présence d'une véritable délégation de facto des compétences de la Commission à un organisme tiers et non de simples contrats de prestation de services" et constatait également que "de graves confusions d'intérêts sont apparues dans la mise en _uvre des programmes MED, confusions auxquelles la Commission n'a pas été en mesure de mettre un terme en temps opportun. Le risque que de telles situations se produisent était évident dès le départ et aurait dû amener la Commission à remettre en question le système lui-même... Il y a eu un recours excessif aux contrats conclu de gré à gré, sans véritable appel à la concurrence. L'attribution de contrats de gré à gré a imprégné toute la structure des programmes MED, et c'est l'un des éléments à l'origine des conflits d'intérêts susmentionnés".

Par la suite, le Comité des Sages a étudié ce dossier et a, à son tour, stigmatisé les manquements de la Commission. Reprenant les conclusions de la Cour des Comptes, le Comité a relevé également que les enquêtes demandées par le commissaire à la suite du rapport de la Cour avaient été insuffisantes. Surtout, le Comité a souligné la responsabilité du collège des commissaires.

"La Commission s'est trouvée, en 1992, confrontée à un problème créé par l'insuffisance des moyens en personnel. La Commission pouvait peut-être mieux déployer son personnel. Une toute nouvelle politique communautaire, bénéficiant d'une enveloppe budgétaire considérable, et déléguant au secteur privé des tâches essentielles de la fonction publique sans que la Commission en garde une maîtrise suffisante, a pu être mise en place alors que le collège des commissaires n'en avait pas explicitement conscience et n'en avait pas effectivement débattu.

"Comme le rappelle le Rapport de la Cour des comptes n°1/96, tout a démarré sans attendre aucune décision de principe de la Commission, et sans attendre ou suivre les avis des services techniques pertinents (juridique et financier), d'autant plus importants lors d'un tournant, comme c'était bien le cas, de la politique communautaire.

"L'improvisation, la précipitation, voire l'incompétence, ont donc marqué la mise en place et l'exécution des programmes MED avec des conséquences très graves : délégation irrégulière des compétences, non suivie des règles en matière d'appel à la concurrence et, surtout, conflits d'intérêts évidents provoqués par les services de la Commission eux-mêmes."

La publication du rapport du Comité des Sages a provoqué la démission de la Commission. Depuis, la coopération décentralisée est au point mort.

La Commission est sans nul doute consciente du préjudice que le gel de la politique décentralisée depuis plus de 2 ans a ainsi porté à la politique méditerranéenne de l'Union. Malgré le montant limité des crédits en cause, un grand nombre d'acteurs (plus de 20 000) était en effet impliqué dans ces programmes.

Sans doute conviendra-t-il d'attendre la mise en place de la nouvelle Commission avant que cette coopération puisse reprendre.

· La coopération régionale a été longue à se mettre en place et de nombreux progrès restent à faire.

Cette coopération est une composante essentielle du programme MEDA. Elle couvre les trois volets du processus de Barcelone, même si la plupart des initiatives engagées à ce jour relèvent des 2ème et 3ème volets.

Ce volet régional est, dans le cadre de l'actuel règlement financier, limité à 10 % de l'enveloppe totale de MEDA. Dans les faits, avec 275 millions d'euros programmés pour 1996-99, cette part ne dépasse pas 8 %.

A ce jour 242 millions d'euros ont été engagés. Parmi les projets les plus importants figurent EUMEDIS - société de l'information (45 millions), MEDSTAT - coopération statistique (20 millions d'euros), les programmes "patrimoine culturel" (17 millions d'euros) et "énergie" (12 millions d'euros). Outre les réunions ministérielles, plus de 130 réunions et séminaires se sont tenus depuis le lancement du partenariat euro-méditerranéen ; la contribution de MEDA à ces rencontres s'est élevée à quelques 6 millions d'euro).

Il convient de noter, outre MEDA, la contribution de la BEI au développement des infrastructures régionales (4,5 milliards d'Euros engagés depuis 6 ans, dont 40 % pour des projets régionaux ; 2,3 milliards pour la période 1997-99, dont 70 % consommés).

Organisée à Valence les 28-29 janvier dernier, au niveau des Secrétaires d'Etat, cette conférence a permis de souligner la nécessité de renforcer la dimension régionale du processus et la coopération sud-sud, qui sont toutes deux indispensables à la crédibilité et à la réussite du partenariat euro-méditerranéen (à la fois sur le plan politique et pour la réalisation de la zone de libre échange).

Co-organisateur de la conférence, le Maroc a mis l'accent, au nom des pays méditerranéens, sur les enjeux de la coopération régionale pour ceux-ci et leurs souhaits : développement des flux d'investissements et des échanges, nécessité d'un soutien financier accru de l'Union (notamment en raison de la charge de la dette), utilité d'un dialogue sur les questions économiques et commerciales. A la demande de la Commission européenne, un débat s'est ensuite engagé sur la base d'un document présenté par celle-ci sur le "partenariat euro-méditerranéen et marché unique", qui visait à définir les priorités de la coopération régionale dans la perspective de la création de la zone de libre échange, en s'inspirant de la construction du marché unique européen.

L'ensemble des partenaires méditerranéens ont réaffirmé leur engagement à faire de la Méditerranée une "zone de prospérité partagée", à travers la mise en place des accords d'association et de la future zone de libre-échange. La faiblesse des échanges sud-sud a toutefois été relevée par tous les participants. Saluant les efforts de la Tunisie, du Maroc, de l'Egypte et de la Jordanie pour construire entre eux une zone de libre-échange, ils ont reconnu le caractère prioritaire de la coopération sud-sud et sont convenus de la nécessité de concentrer davantage la coopération euro-méditerranéenne sur quelques domaines (questions douanières, harmonisation des normes, mise en place d'un cumul d'origine, respect des règles de concurrence et de propriété intellectuelle).

Un consensus s'est enfin dégagé sur la nécessité d'améliorer le programme MEDA par un allégement de ses procédures, par une définition plus précise de ses priorités, et par une articulation plus étroite de celles-ci avec les actions menées au titre des programmes nationaux.

La France souhaite renforcer cette coopération et la recentrer sur quelques domaines prioritaires. En particulier, il conviendrait de mettre l'accent sur la coopération sud-sud (questions douanières, normes...) et quelques domaines prioritaires (eau, environnement, tourisme) et prendre en compte la question des investissements et des infrastructures régionales.

C - Le volet politique et de sécurité du processus de Barcelone

La création d'un partenariat politique et de sécurité entre les 15 Etats membres de l'Union Européenne et leurs 12 partenaires a constitué l'une des innovations les plus importantes du processus lancé à Barcelone en novembre 1995. Celui-ci a en effet pour ambition de faire de cette région un "espace commun de paix et de stabilité", grâce à l'instauration d'un dialogue politique ainsi que par l'adoption de mesures de confiance et de sécurité. A la demande de la France, la Déclaration de Barcelone a également mentionné la possibilité "à terme" de la conclusion d'un pacte euro-méditerranéen de stabilité.

Avec l'objectif de réalisation d'une zone de libre échange à l'horizon de 2010, le volet politique et de sécurité est, de ce fait, l'un des deux principaux enjeux du processus. Dans l'esprit de la France, il doit également permettre à l'Europe d'exercer, à l'avenir, une influence politique dans la Méditerranée qui soit davantage à la mesure de l'aide qu'elle accorde à cette zone et des intérêts qu'elle y possède.

1) Le bilan avant Stuttgart.

Il est modeste. Cela s'explique, outre le gel du processus de paix, par le nombre et l'hétérogénéité des partenaires méditerranéens qu'opposent, aujourd'hui encore, de nombreuses tensions ou conflits, et dont les pays arabes constituent la très grande majorité face à Israël et à la Turquie.

Par ailleurs, force est de l'admettre, par la position souvent hésitante, sur le fond, de la plupart de nos partenaires européens, en raison de leur manque d'intérêt véritable pour la dimension politique du partenariat et de leurs appréhensions face à l'attitude méfiante de Washington.

De fait, les Hauts Fonctionnaires chargés du volet politique n'ont pu adopter qu'une première série de mesures de confiance de portée limitée (et inspirées, pour la plupart, du précédent de la CSCE). Elles ont porté sur :

- les échanges d'informations entre les partenaires sur leur adhésion aux conventions internationales en matière de droits de l'homme, de désarmement et de lutte contre le terrorisme ;

- la constitution du Groupe des Hauts Fonctionnaires en réseau de points de contacts dans le domaine politique et de la sécurité ;

- la création d'un réseau des instituts de politique étrangère (Euromesco) ;

- l'organisation de séminaires communs de jeunes diplomates ;

- la création d'un registre des accords ;

- la prévention et le traitement des catastrophes naturelles.

Ces mesures ont été décidées, pour la plupart, en 1996, pendant la première année du processus. Ultérieurement, à cause du blocage du processus de paix, les pays arabes se sont montrés, à l'instigation de la Syrie et du Liban, de plus en plus réticents à en accepter de nouvelles - pour lesquelles le terme de "mesures de confiance" a été abandonné au profit de celui de "mesures de partenariat" -, y compris lorsqu'elles ne touchaient pas directement au domaine militaire et à la sécurité (*). Cette même attitude les a également conduits à s'opposer également à la tenue de conférences ou de réunions euro-méditerranéennes sur leur territoire, fût-ce au simple niveau des experts.

2) L'évolution récente

En dépit de l'aggravation de la situation au Proche Orient, l'on a assisté, au cours de ces derniers mois, à une indéniable consolidation du volet politique du partenariat euro-méditerranéen, même si les progrès demeurent limités. Ceci a été surtout visible dans deux domaines.

Le dialogue politique a été étendu à des thèmes sensibles auxquels nos partenaires du Sud -notamment ceux du Maghreb - attachent une importance particulière, mais qui n'avaient pas été abordés jusqu'à présent. C'est le cas notamment du terrorisme et de l'immigration, qui ont fait l'objet respectivement d'une réunion ad hoc à Bruxelles le 23 novembre 1998 et d'un séminaire à La Haye les 1er et 2 mars 1999.

Sur un autre plan, le fait qu'à Stuttgart, le problème du processus de paix - mais non sa négociation - a pu normalement être évoqué pendant le débat général sur la stabilité sans susciter de blocage de la part d'Israël a également constitué une avancée pour le dialogue politique.

Surtout, la préparation du projet de Charte de stabilité a un peu progressé à Stuttgart.

Proposée par la France dès la conférence de Barcelone, l'idée de conclure une charte (plutôt qu'un pacte) avait été approuvée, à notre demande, à la Conférence de Malte (1). Les Ministres y avaient en effet donné mandat aux Hauts Fonctionnaires de préparer un projet, étant entendu qu'il ne pourrait être adopté par une "future réunion ministérielle" que "lorsque les circonstances politiques le permettront". Néanmoins, en raison des hésitations de nos partenaires, ce n'est qu'en novembre dernier, lors d'une réunion ad hoc, que la discussion sur cette question a pu réellement s'engager entre les 27, favorisée par l'élargissement du dialogue politique.

Le consensus qui a commencé de se dégager sur le projet porte, suivant les suggestions de la France, sur un dispositif évolutif et relativement modeste, à caractère juridiquement non contraignant, qui reposerait essentiellement, au départ, sur l'instauration d'un dialogue politique régulier et à haut niveau (entre les Ministres des Affaires étrangères) comme cadre de prévention et de maintien de la stabilité. Compte tenu des limitations très fortes qu'impose le contexte actuel de la région en matière d'engagements de sécurité, les mesures de confiance et instruments de diplomatie préventive (code de conduite, règlement pacifique des différends etc.) n'y figureraient qu'en tant qu'objectifs à adopter et à mettre en _uvre progressivement.

Conformément à notre proposition, l'objectif fixé pour Stuttgart a été atteint, à défaut de pouvoir envisager l'adoption d'une charte dans les circonstances présentes : l'adoption d'un "document-cadre" intermédiaire, qui définirait des orientations pour la structure et le contenu du projet et permettrait, par là-même, d'entreprendre enfin sa préparation. Ce document a été annexé aux conclusions de la Conférence établies par la Présidence allemande, et, à la différence de celles-ci, formellement approuvé par les Ministres (1).

L'adoption de la Charte de stabilité revêt une importance primordiale pour la réalisation de l'ambition politique que représente le processus de Barcelone et en tant que dimension complémentaire essentielle du processus de paix pour la stabilité dans la Méditerranée. Face aux difficultés - au demeurant prévisibles - auxquelles se heurte ce projet, il est essentiel, si nous voulons qu'il réussisse, que nous maintenions la concertation étroite que nous avons commencé d'établir à son sujet, tant avec l'Allemagne qu'avec ceux de nos partenaires qui lui sont les plus favorables soit, du côté européen, l'Italie et l'Espagne et, du côté méditerranéen, l'Égypte et l'Algérie.

III - REFLEXIONS SUR LE LIBRE-ECHANGE

Dans cette dernière partie, votre Rapporteur souhaiterait aller au-delà d'un simple bilan diplomatique et technique du processus de Barcelone. Celui-ci, on l'a vu, rencontre un certain nombre d'obstacles à l'origine de la lenteur de la mise en place des mécanismes de coopération. Mais, au-delà de ces difficultés, il est clair que le processus suscite de fortes inquiétudes chez les pays méditerranéens.

La création d'une zone de libre-échange industrielle est un pari qui risque de remettre en cause les acquis des dix dernières années.

A - La situation économique des pays méditerranéens.

Les pays partenaires sont à des niveaux de développement très inégaux.

Trois d'entre eux ont des économies comparables à celles des pays de l'Union européenne : Israël, avec un PNB par habitant de 17 000 dollars, est une puissance totalement intégrée à l'économie mondiale ; Chypre (13 000 dollars par habitants), du moins dans sa partie sud, est également très dynamique ; Malte (9 100 dollars par habitants) est au même niveau que la Grèce ou le Portugal. Ce sont en outre trois économies qui ont dores et déjà libéralisé leurs échanges avec l'Union européenne.

Les autres partenaires sont dans des situations tout à fait différentes comme l'illustre le tableau ci-dessous.

 

Population (1)

Démographie(2)

PIB(3)

PIB/habitants(4)

LIBAN

5,7

1,8

16,5

3700

TURQUIE

64

1,5

191

3000

TUNISIE

9,3

1,6

20

2100

ALGERIE

29,3

2,15

47,7

1644

JORDANIE

4,5

3,3

7,9

1530

MAROC

28,5

1,93

36,82

1360

EGYPTE

61,5

2,1

70,6

1130

TERR PAL

3,5

5

3,5

1200

SYRIE

16

3,5

15,6

1000

Comme le souligne l'Institut de la Méditerranée dans son rapport sur le dialogue euro-méditerranéen, tous les pays de la Méditerranée ont mis au point depuis le début des années 80 des programmes d'ajustement structurel qui ont porté leurs fruits. A l'exception de l'Algérie et de la Turquie, l'inflation est aujourd'hui sous la barre de 10%. L'assainissement financier a permis de stabiliser les taux d'intérêt réels, de réduire les déficits budgétaires et les services de la dette. Cependant, les économies sont encore extrêmement fragiles et sont confrontées à une croissance démographique et des contraintes sociales qui posent de redoutables problèmes.

Certaines de ces économies traversent une crise aiguë en raison des événements politiques de la région.

Les Territoires palestiniens ont connu une baisse constante de leurs revenus depuis les accords d'Oslo. Le quart de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté, le chômage atteint 30% de la population active et le déficit commercial représente 30% du PIB. Seule l'importante aide internationale permet de maintenir les finances de l'Autorité palestinienne à flot. Entre 1993 et 1997, 1,8 milliard de dollars ont été décaissés par les bailleurs de fonds internationaux ; 750 millions ont été promis pour 1998 et 3 milliards supplémentaires pour 1999 et au-delà.

La situation de la Jordanie n'est guère plus reluisante. La Jordanie a surmonté les effets de la guerre du Golfe en acceptant un plan d'ajustement structurel sévère. Mais le gouvernement doit aujourd'hui faire face à la plus sérieuse crise économique depuis dix ans. La signature de l'accord de paix avec Israël ne s'est pas traduit par un développement des échanges régionaux et la poursuite de l'embargo contre l'Irak se répercute négativement sur la production industrielle et le tourisme. La classe moyenne se paupérise et 25% de la population active est au chômage. Le gouvernement demande au FMI une reconduction du plan d'ajustement structurel et souhaite solliciter un nouveau rééchelonnement de sa dette publique. Il doit également mettre en place un programme d'accompagnement social.

Le Liban est également dans une situation très précaire. A partir de 1992, il s'est engagé dans une politique de reconstruction de ses infrastructures qui vise à le rétablir dans son rôle de prestataire de services et de plaque tournante économique et financière régionale. Cette politique a donné de bons résultats - le PIB a quadruplé en six ans - mais a accru les déséquilibres financiers. Le déficit budgétaire a atteint 23% du PIB en 1997 et le poids de la dette externe est énorme. Par ailleurs, les secteurs social et éducatif ont été négligés ce qui est une source d'instabilité politique dans un pays où la tradition syndicale est forte.

La Turquie est également dans une position particulière du fait de son niveau de développement, qui la place au rang des pays émergents, et de ses relations économiques anciennes avec la Communauté européenne. Par ailleurs, la Turquie connaît des déséquilibres financiers importants. Après avoir redémarré en 1995, l'économie turque a connu quelques difficultés en 1997 : dérapage de l'inflation (près de 100%) et déficit budgétaire accru (9% du PNB). Le début de l'année 1998 a été marqué par un ralentissement de l'inflation mais l'impact des crises asiatique et russe pour 1999 reste incertain.

La situation financière de l'Algérie s'était sensiblement améliorée au cours des dernières années : inflation maîtrisée, assainissement des finances publiques, reconstitution des réserves de change. La chute du cours du baril la fragilise à nouveau car les hydrocarbures représentent 97% des recettes d'exportation et 62% des ressources budgétaires. Le gouvernement a adopté un plan de stabilisation réduisant de 20 à 30% les dépenses budgétaires. Les réformes structurelles n'ont pas été véritablement lancées. Le chômage - 30% de la population active - demeure le principal facteur de tension sociale.

Depuis la fin des années 1980, la Syrie s'est engagée sur la voie d'une ouverture économique prudente et originale. Le secteur public a été libéralisé dans son fonctionnement et un secteur privé dynamique est apparu. La baisse des financements provenant des pays du Golfe et le tassement de la rente pétrolière l'ont contrainte à normaliser ses relations financières avec la France et la Banque mondiale. Pour ce pays, la négociation de l'accord d'association avec l'Union européenne est un choix stratégique qui implique une profonde transformation pour une économie qui reste encore largement administrée. Jusqu'à présent, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Depuis 1995, la Syrie est dans une phase de stagnation économique.

L'Egypte a rétabli ses équilibres macro-économiques alors qu'en 1991 sa situation paraissait catastrophique. La croissance a été de 5% en 1997, l'inflation de 4,6% et le déficit budgétaire de 0,9% du PIB. Ses réserves en devises se sont reconstituées, son endettement est maîtrisé et la livre égyptienne est restée stable par rapport au dollar depuis quatre ans et demi. Elle doit encore réaliser un profond effort d'adaptation structurelle : réduction des barrières douanières, suppression progressive des prix subventionnés, privatisations. Elle est soumise à des contraintes sociales fortes : système éducatif et de santé délabrés, analphabétisme de 40%, taux de chômage atteignant 20%, absence d'un véritable système d'assurances sociales. Etant donné sa croissance démographique, le pays a besoin pour se développer d'un taux de croissance économique de 7% par an, au minimum.

Le Maroc est également engagé dans un mouvement de libéralisation générale de son économie et sa politique économique est caractérisée par une très grande orthodoxie budgétaire liée aux engagements pris dans le cadre des cycles de rééchelonnement de la dette. En 1998, la croissance a été de 6,6% et les grands équilibres ont été maîtrisés. Mais l'économie reste tributaire des aléas climatiques, décisifs pour la production agricole qui représente encore 20% de la production. Le taux moyen de croissance des six dernières années n'est que de 2%, insuffisant compte tenu de la croissance démographique. Le taux de chômage est élevé et le sous-équipement rural et l'analphabétisme (55% des hommes et 90% des femmes) sont parmi les plus importants de la région. L'économie est confrontée à des défis immenses : infrastructures, système éducatif... La résorption des déséquilibres régionaux est une préoccupation majeure des autorités, le pays étant à la fois un pays émergent sur son littoral atlantique et peu avancé sur la majeure partie de son territoire.

La Tunisie a le niveau de développement le plus élevé du Maghreb. Le plan d'ajustement structurel engagé dès 1987 s'est accompagné de réformes qui ont contribué à stimuler l'activité économique (4% de croissance annuelle de 1987 à 1997), améliorer les comptes extérieurs, réduire l'inflation (3,8% en 1998), contenir le déficit budgétaire (3% en 1998) et diminuer les ratios d'endettement, qui sont passés de 55,9% du PIB en 1987 à 48,9% en 1998. Cette politique a su également préserver la cohésion sociale et limiter la grande pauvreté mais le taux de chômage est élevé.

B - Le libre-échange est-il la panacée ?

Aux difficultés que rencontrent les pays en développement, les organisations internationales proposent toujours les mêmes remèdes : ajustement structurel et libre-échange.

Ces solutions sont sans doute inévitables. Il n'y a pas de développement durable sans équilibre financier et les pays méditerranéens ne peuvent échapper à la mondialisation. En particulier, du fait des accords de l'OMC, la Communauté ne peut maintenir indéfiniment les régimes préférentiels qu'elle leur avait accordés.

Cependant, pour les pays tiers méditerranéens, la création d'une zone de libre-échange avec la Communauté comporte des inconvénients certains et des avantages aléatoires.

1) Les échanges euro-méditerranéens

Les partenaires méditerranéens ont un déficit commercial de 45,5 milliards de dollars vis-à-vis du reste du monde. Ces pays réalisent plus de la moitié de leurs échanges avec l'Union et leur déficit commercial avec les Quinze s'élève à 29 milliards de dollars en 1997, contre 14 milliards en 1992.

Echanges des pays méditerranéens avec le monde

soldes en

millions $

1981

1992

1996

1997

Algérie

1995

4813

6281

6587

Tunisie

- 1263

- 2386

- 2163

- 2388

Maroc

- 2031

- 3378

- 3513

- 709

Egypte

- 5211

- 5028

- 9485

- 9261

Liban

- 2807

- 2419

- 4735

- 4568

Syrie

- 2937

- 328

- 284

337

Jordanie

- 2630

- 1817

- 2331

- 2059

Israël

- 2198

- 5320

- 8895

- 6294

Turquie

- 2400

- 8156

- 19552

- 22340

Chypre

- 544

- 2757

- 3468

- 3273

Malte

- 572

- 1101

- 1244

- 1513

TOTAL

- 20598

- 27878

- 49429

- 45480

Echanges des pays méditerranéens avec l'Union européenne

soldes en

millions $

1981

1992

1996

1997

Algérie

- 579

3859

3548

3370

Tunisie

- 943

- 1546

- 1151

- 1437

Maroc

- 818

- 1594

- 1552

- 252

Égypte

- 2623

- 2201

- 3098

- 3409

Liban

- 1915

- 1610

- 3084

- 3137

Syrie

- 466

572

685

643

Jordanie

- 1158

- 964

- 1266

- 1064

Israël

- 793

- 5116

- 8651

- 8003

Turquie

- 999

- 2722

- 11056

- 12622

Chypre

- 436

- 1509

- 1638

- 1549

Malte

- 454

- 863

- 1308

- 1389

TOTAL

- 11184

- 13695

- 28571

- 28849

Echanges par produits

soldes en

millions $

1981

1992

1996

1997

Alimentation et animaux vivants

- 17 949

- 696

- 876

- 716

Boissons et tabac

- 13

3857

3 923

4 642

Huiles et graisses animales et végétales


- 335


- 186


- 15


- 79

Matières premières brutes

770

9749

8 663

7 511

Combustibles minéraux

8959

- 125

- 188

- 86

Produits

chimiques

- 2 679

- 14 029

- 22 216

- 23 374

Produits manufacturés

- 5 899

- 652

- 1 593

- 1 313

Machines et matériel de transport


- 9 822


- 4 607


- 6 969


- 7 127

Articles manufacturés

- 372

- 7 928

- 10 634

- 9 912

Non classés

 

922

1 336

1 605

TOTAL

- 11 184

- 13 695

- 28 571

- 28 849

Part de l'Union européenne dans le commerce extérieur

des pays méditerranéens

%

Importations

Exportations

 

1981

1992

1996

1997

Algérie

62,5

55,8

58,7

61,5

Tunisie

72,3

72,9

80

78,3

Maroc

54,1

52,1

61,4

60,7

Egypte

36,2

38,2

45,6

40,3

Liban

49,9

42,5

16,2

21,9

Syrie

33

33

62

55

Jordanie

31,7

 

8,3

 

Israël

51,6

51

32

30,1

Turquie

53

51,2

49,7

46,7

Chypre

48,6

47,6

28,4

27,1

Malte

68,6

71,3

56,9

54,1

Palestine *

5,9

 

0,5

 

* données provisoires

L'Europe est donc déjà un partenaire commercial essentiel des pays partenaires. Comme le fait observer l'Institut de la Méditerranée, au cours des dernières années, le contenu des exportations des pays du sud a considérablement évolué. Ces exportations se sont diversifiées au profit des productions manufacturières qui sont passées de 45% en 1991 à 58% en 1996 des importations de l'Union en provenance de ces pays. Les points forts des pays tiers sont essentiellement le textile et les produits agricoles. Cependant, les échanges sont encore marqués par des complémentarités traditionnelles « Nord-Sud » et le solde commercial reste en faveur de l'Union.

Par ailleurs, les échanges sud-sud demeurent très faibles : moins de 5% de leur commerce total. Le Mercosur se caractérise par un commerce intra-zone beaucoup plus élevé (20%). Il est essentiel que ce type d'échanges se développe dans les prochaines années. En effet, pour les investisseurs étrangers, une implantation dans un pays est d'autant plus intéressante lorsqu'elle permet d'accéder facilement aux marchés voisins.

L'Institut de la Méditerranée conclut, à juste titre, que la réussite de la zone de libre-échange comporte deux enjeux : l'industrialisation et la diversification des exportations des pays du sud, d'une part, et le développement d'un cadre favorable au développement des échanges sud-sud.

D'autres observateurs soulignent que l'économie mondiale s'organise autour de régimes régionaux qui seront des systèmes ouverts et interdépendants. Or, les pays du sud ne répondent pas encore à cette nécessité. Agnès Chevalier (1) par exemple, estime que ces pays souffrent de quatre handicaps : ils sont situés dans une zone de turbulences politiques ; leur taille est modeste (5% du PIB européen) et leur capacité de production peu compétitive ; ils sont émiettés entre de petits et de grands pays avec de fortes différences de richesse ; ils n'ont pas réussi à s'intégrer régionalement.

Par ailleurs, la mort du régime privilégié douanier dont ils bénéficient est programmée. Du fait du dernier Uruguay Round, le tarif extérieur commun a fortement diminué ce qui favorise la compétitivité des autres partenaires commerciaux de la Communauté, au détriment des pays tiers méditerranéens. Le démantèlement des accords multifibres devrait également stimuler la concurrence des pays asiatiques sur les marchés européens dans un créneau où les pays méditerranéens avaient réussi à obtenir de bons résultats.

2) Le pari du libre-échange

Les pays du sud ont tous compris qu'une certaine forme de développement était condamnée. Ceux qui bénéficiaient de la rente pétrolière ont du réviser leurs espérances. L'industrialisation impulsée par l'Etat n'est plus d'actualité, ni le régime de préférence commerciale instauré par la Communauté européenne.

Cependant, beaucoup hésitent encore à franchir le pas en adhérant à la logique du libre-échange.

La création de la zone de libre-échange a pour finalité d'intégrer encore davantage les économies méditerranéennes aux économies européennes et de faire des pays du sud de la Méditerranée une région émergente capable d'affronter la concurrence mondiale et d'attirer les investisseurs étrangers.

Parmi les risques certains que comporte ce projet, il convient de citer en premier lieu la concurrence accrue que devront supporter les entreprises locales qui vivent jusqu'à présent à l'abri de barrières douanières élevées. Selon de nombreux économistes, ces entreprises, souvent des PME, auront les plus grandes difficultés à survivre, à moins d'une reconversion rapide.

Par ailleurs, la baisse des droits de douane sur les produits communautaires se traduira par d'importantes pertes de recettes budgétaires alors que ces pays connaissent déjà de grandes difficultés financières et sociales.

Leurs produits industriels sont dores et déjà exonérés de droits de douane. Les accords euro-méditerranéens ne leur apporteront aucun avantage nouveau.

La conjugaison de ces trois facteurs pourrait donc se traduire par un scénario très préoccupant pour les économies du sud qui verraient leur tissu industriel se défaire, avec de fortes conséquences sur l'emploi, et leurs comptes extérieurs et leurs finances publiques se dégrader.

Les avantages attendus du libre-échange industriel, en revanche, sont beaucoup plus incertains.

On en attend, en premier lieu, une baisse mécanique des prix intérieurs induit par la baisse des droits de douane ce qui aura des effets positifs sur le pouvoir d'achat et la compétitivité globale.

Mais, surtout, on espère que l'ouverture et l'intégration de ces économies incitera les entreprises locales à se moderniser et les investisseurs étrangers à augmenter leurs apports dans ces pays. Actuellement, ils n'attirent qu'une faible partie des investissements directs étrangers. 97% des investissements directs mondiaux proviennent d'Amérique du Nord, d'Europe ou du Japon et sont pour les trois quarts dirigés vers ces mêmes régions. 80% des investissements réalisés hors de ces régions sont orientés vers dix pays. Parmi les pays du sud de la Méditerranée, seule la Turquie appartient à cette liste d'élus.

Or les facteurs qui conditionnent ces investissements ne sont plus seulement d'ordre douanier, fiscal ou salarial. Les investisseurs s'intéressent à tel ou tel pays en fonction de la taille de son marché, de son insertion dans un ensemble régional, du niveau de formation de la main d'_uvre, de la qualité de ses infrastructures de communication...

En d'autres termes, l'application des accords euro-méditerranéens constituera une épreuve sérieuse pour ces économies. Le libre-échange industriel est un pari risqué.

La Tunisie en est déjà à sa quatrième année de mise en _uvre de l'accord d'association. Beaucoup d'Etats ont les yeux fixés sur les résultats qu'elle a enregistrés avant de suivre son exemple.

Structurellement déficitaire, la balance commerciale tunisienne connaît depuis deux ans une dégradation qui est directement liée à l'ouverture de ses frontières et à une très forte montée des achats à l'extérieur. Cette poussée des importations a, certes, un côté vertueux car elle est très largement due à l'effort d'équipement des entreprises. Mais le déficit commercial s'aggrave alors que l'importation de produits essentiels est encore découragée par des mesures non-tarifaires officieuses, peu compatibles avec l'accord d'association. Avec la poursuite du démantèlement tarifaire, il sera de plus en plus difficile pour le pays de se protéger par des mesures adminsitratives.

Le redressement de sa situation économique lui a permis de s'adresser dans de bonnes conditions aux marchés financiers internationaux. Mais la tourmente financière asiatique a profondément modifié la situation. Il est devenu quasiment impossible à un pays émergent solvable d'emprunter sur ces marchés, sauf à des conditions très onéreuses.

La Tunisie est donc condamnée à poursuivre un processus global de réformes si elle veut réussir le pari de l'ouverture et s'approcher de l'objectif de croissance moyen de 6% prévu par le IXème plan. Le secteur industriel, fortement ébranlé par le libre-échange, bénéficie d'un programme de mise à niveau destiné à améliorer la productivité et la gestion des entreprises et à favoriser l'introduction de technologies nouvelles. Le secteur touristique doit également réformer pour conserver sa compétitivité. Le secteur financier exige des réformes profondes.

L'accord d'association qui force les autorités à avancer lui fournit également, d'une certaine manière, une justification pour surmonter certaines résistances internes.

Les autres pays méditerranéens connaîtront des difficultés semblables. La politique euro-méditerranéenne a prévu une longue période de transition pour la mise en _uvre du libre-échange et a orienté le programme Meda vers l'aide à la modernisation économique. Mais, ces options ne seront sans doute pas suffisantes pour garantir le succès.

En particulier, l'Union devrait veiller à ce que sa politique de change ne lèse pas les intérêts de ces pays. Pour ces derniers, la création de l'euro est a priori une bonne chose dans la mesure où elle sécurise les transactions. Mais ces pays ont intérêt à ce que la parité euro-dollar soit raisonnable, c'est à dire que l'euro ne soit pas trop fort. Or, dans ce domaine, beaucoup dépendra de la Banque centrale européenne et de l'Allemagne.

L'Union devrait aussi faire preuve de compréhension à l'égard de la politique budgétaire que ces pays devront adopter face à la baisse de leurs recettes douanières. Il serait désastreux qu'ils soient condamnés à une politique récessive pour maintenir leurs équilibres budgétaires.

Enfin, la question agricole devrait être réexaminée. Les accords euro-méditerranéens ne comportent que de timides concessions aux exportations des pays tiers. Cette timidité tranche avec l'audace de l'accord ALENA qui prévoit la levée complète des obstacles aux échanges pour les produits agricoles de base.

Certes, il ne saurait être question de suivre ce dernier exemple dans ce secteur sensible. Les producteurs agricoles du sud de la Communauté n'y survivraient pas, pas plus que les producteurs céréaliers des pays tiers.

Mais, lorsque la Communauté aura révisé sa propre politique agricole commune, il conviendra de réfléchir à une organisation des échanges qui favorise une plus grande complémentarité entre les deux rives de la Méditerranée.

CONCLUSION

Quatre ans après la conférence de Barcelone, peut-on considérer que le dialogue euro-méditerranéen est sur la bonne voie ?

Sur le plan diplomatique, le dialogue est un succès. La conférence de Stuttgart a confirmé que les pays tiers étaient attachés au dialogue multilatéral avec l'Union. Les pays du nord de l'Europe ont découvert l'importance de ce partenariat.

Les vicissitudes du processus de paix au Proche-Orient ont hypothéqué le développement du dialogue politique. Cependant, ce dernier ayant résisté à une administration israélienne particulièrement retorse, on peut espérer qu'il résistera aux péripéties futures.

Par ailleurs, le résultat des dernières élections israéliennes permet d'espérer raisonnablement une relance des négociations israélo-palestiniennes et le règlement des contentieux entre Israël et l'Union européenne.

Ces élections se sont traduites par un net désaveu de M. Netanyahou qui portait la responsabilité principale du blocage du processus de paix. Sa majorité, qui ne s'était ralliée que du bout des lèvres et in extremis au principe de l'échange de la paix contre les territoires, a subi un grave revers. La moitié des élus qui étaient les plus proches des colons dans l'ancienne Knesset ont été battus.

M. Ehud Barak dispose d'une majorité à la Knesset et du soutien de plus de 56% des électeurs israéliens. Il se réclame de l'héritage de Ytzhak Rabin et a annoncé son intention de relancer le processus de paix.

Cette perspective est très prometteuse pour le partenariat euro-méditerranéen.

Tout d'abord, le partenariat bénéficiera de l'amélioration des relations entre Israël, le Liban et la Syrie. Jusqu'à présent, ce dernier Etat est le plus réservé à l'égard du processus de Barcelone. Or, Ehud Barak a déclaré vouloir retirer l'armée israélienne du sud-Liban et reprendre les négociations sur le Golan.

Mais le partenariat a surtout tout à gagner à une pleine insertion d'Israël dans le processus d'intégration économique régional. Israël est l'économie la plus performante de la région. Le blocage du processus de paix a des conséquences économiques graves sur les échanges et paralyse la coopération sur des aspects aussi importants que la gestion de l'eau. Sa pleine association à la création de la zone de libre-échange serait un facteur qui permettrait de surmonter bien des obstacles.

Quelles que soient en effet les difficultés objectives de ce projet économique, son succès dépend en dernière analyse de la volonté politique des partenaires.

Compte tenu des ces éléments, on peut donc considérer que la prochaine conférence euro-méditerranéenne se présente sous les meilleures auspices.

Pour la France, qui assurera la présidence de cette conférence qui doit se tenir au second semestre 2000, il s'agira de confirmer son influence déterminante dans ce processus.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent rapport d'information au cours de sa réunion du mercredi 23 juin 1999.

Après l'exposé de M. Michel Vauzelle, rapporteur, le Président Jack Lang a considéré que ce rapport constituait un document riche et original, donnant un aperçu complet de l'évolution des relations entre l'Union européenne et les pays de la rive sud de la Méditerranée.

Il a évoqué la question de la démocratie dans les pays du pourtour sud de la Méditerranée. Autant l'évolution du Maroc est positive, autant celle de l'Algérie suscite des interrogations. Par ailleurs, la situation politique en Tunisie est totalement injustifiée. Le cas de la Turquie est particulièrement préoccupant, comme le montrent les conditions dans lesquelles se déroule le procès Öcalan. Il est nécessaire que la France contribue à associer davantage l'aide économique avec le développement démocratique. Le Président Jack Lang a ensuite proposé à M. Michel Vauzelle de poursuivre sa tâche d'observateur du partenariat euro-méditerranéen.

Mme Louise Moreau a demandé si la quatrième conférence euro-méditerranéenne, qui aura lieu sous la présidence française de l'Union au second semestre 2000, pourrait se dérouler à Marseille plutôt qu'à Barcelone. La tenue de la conférence à Marseille constituerait une occasion de souligner la vocation méditerranéenne de cette ville qui fête ses 2600 ans d'existence. Elle refléterait également l'importance de l'engagement de la France dans le processus commencé en 1995. Mme Louise Moreau a ensuite souligné que son intérêt pour les relations euro-méditerranéennes était ancien. Elle a contribué à la mise en place, en 1954, de l'Association interparlementaire France-Afrique. Elle a souhaité savoir si cette association était encore active.

En outre, elle a souhaité qu'un observateur, membre de la Commission des Affaires étrangères, soit présent à la conférence qui se tiendra en l'an 2000 et a rappelé qu'elle avait déjà fait cette proposition à M. Hervé de Charette, alors ministre des Affaires étrangères, lors de la préparation de la Conférence de Barcelone de 1995. Enfin, Mme Moreau s'est interrogée sur l'état d'avancement des négociations concernant les accords d'association avec l'Egypte, le Liban et la Syrie.

M. Michel Vauzelle a estimé qu'il serait en effet tout à fait souhaitable que la prochaine conférence euro-méditerranéenne se tienne à Marseille et que des parlementaires y soient présents en observateurs. D'ailleurs, le Ministre des Affaires étrangères a invité M. Vauzelle à la conférence de Palerme, en juin 1998, et à la conférence de Stuttgart, ce qui témoigne de la volonté du gouvernement d'associer le Parlement au processus de Barcelone.

L'accord d'association avec l'Egypte devrait être signé cet été. Les négociations avec le Liban sont lentes en raison des réticences de Beyrouth à engager, sans compensations financières spécifiques et dans un climat économique fragile, le processus de démantèlement tarifaire induisant des pertes importantes de recettes douanières. La Syrie a engagé tardivement les négociations en raison de ses mauvaises relations avec Israël.

M. Michel Vauzelle a souhaité pouvoir poursuivre sa mission d'information sur un processus qui devrait connaître des évolutions positives. Il paraît nécessaire en effet que la Commission des Affaires étrangères contribue à l'effort pédagogique en faveur des pays de la Méditerranée qui souffrent souvent d'une mauvaise image dans les médias en raison de leur situation intérieure.

En application de l'article 145 du Règlement, la Commission a décidé la publication du présent rapport d'information.

ANNEXE I

DÉCLARATION DE BARCELONE ADOPTÉE
LORS DE LA CONFÉRENCE EURO-MÉDITERRANÉENNE

(Barcelone, 28 novembre 1995)

Le Conseil de l'Union européenne, la Commission européenne, l'Allemagne, l'Algérie, l'Autriche, la Belgique, Chypre, le Danemark, l'Egypte, l'Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l'Irlande, Israël, l'Italie, la Jordanie, le Liban, le Luxembourg, Malte, le Maroc, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni, la Syrie, la Suède, la Tunisie, la Turquie, l'Autorité palestinienne,

participant à la Conférence euro-méditerranéenne de Barcelone :

- soulignant l'importance stratégique de la Méditerranée et animés par la volonté de donner à leurs relations futures une dimension nouvelle, fondée sur une coopération globale et solidaire, qui soit à la hauteur de la nature privilégiée des liens forgés par le voisinage et l'histoire ;

- conscients que les nouveaux enjeux politiques, économiques et sociaux de part et d'autre de la Méditerranée constituent des défis communs qui appellent une approche globale et coordonnée ;

- décidés de créer à cet effet, pour leurs relations, un cadre multilatéral et durable, fondé sur un esprit de partenariat, dans le respect des caractéristiques, des valeurs et des spécificités propres à chacun des participants ;

- considérant que ce cadre multilatéral est complémentaire d'un renforcement des relations bilatérales, qu'il est important de sauvegarder en accentuant leur spécificité ;

- soulignant que cette initiative euro-méditerranéenne n'a pas vocation à se substituer aux autres actions et initiatives entreprises en faveur de la paix, de la stabilité et du développement de la région, mais qu'elle contribuera à favoriser leur succès. Les participants appuient la réalisation d'un règlement de paix juste, global et durable au Moyen-Orient, basé sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies et les principes mentionnés dans la lettre d'invitation à la Conférence de Madrid sur la paix au Moyen-Orient ;

- convaincus que l'objectif général consistant à faire du bassin méditerranéen une zone de dialogue, d'échanges et de coopération qui garantisse la paix, la stabilité et la prospérité exige le renforcement de la démocratie et le respect des droits de l'homme, un développement économique et social durable et équilibré, la lutte contre la pauvreté et la promotion d'une meilleure compréhension entre les cultures, autant d'éléments essentiels du partenariat ;

Conviennent d'établir entre les participants un partenariat global - partenariat euro-méditerranéen - à travers un dialogue politique renforcé et régulier, un développement de la coopération économique et financière et une valorisation accrue de la dimension sociale, culturelle et humaine, ces trois axes constituant les trois volets du partenariat euro-méditerranéen.

PARTENARIAT POLITIQUE ET DE SÉCURITÉ : DÉFINIR UN ESPACE COMMUN DE PAIX ET DE STABILITÉ

Les participants expriment leur conviction que la paix, la stabilité et la sécurité de la région méditerranéenne sont un bien commun qu'ils s'engagent à promouvoir et à renforcer par tous les moyens dont ils disposent. A cet effet, ils conviennent de mener un dialogue politique renforcé et régulier, fondé sur le respect des principes essentiels du droit international et réaffirment un certain nombre d'objectifs communs en matière de stabilité interne et externe.

Dans cet esprit, ils s'engagent, par la déclaration de principe suivante, à :

- agir conformément à la Charte des Nations unies et à la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, ainsi qu'aux autres obligations résultant du droit international, notamment celles qui découlent des instruments régionaux et internationaux auxquels ils sont parties ;

- développer l'Etat de droit et la démocratie dans leur système politique tout en reconnaissant dans ce cadre le droit de chacun d'entre eux de choisir et de développer librement son système politique, socioculturel, économique et judiciaire ;

- respecter les droits de l'Homme et les libertés fondamentales, ainsi que garantir l'exercice effectif et légitime de ces droits et libertés, y compris la liberté d'expression, la liberté d'association à des fins pacifiques et la liberté de pensée, de conscience et de religion, individuellement ainsi qu'en commun avec d'autres membres du même groupe, sans aucune discrimination exercée en raison de la race, la nationalité, la langue, la religion et le sexe ;

- considérer favorablement, à travers le dialogue entre les parties, les échanges d'informations sur les questions relatives aux droits de l'Homme, aux libertés fondamentales, au racisme et à la xénophobie ;

- respecter et faire respecter la diversité et le pluralisme dans leur société et promouvoir la tolérance entre ses différents groupes et lutter contre les manifestations d'intolérance, le racisme et la xénophobie. Les participants soulignent l'importance d'une formation adéquate en matière de droits de l'Homme et de libertés fondamentales ;

- respecter leur égalité souveraine ainsi que tous les droits inhérents à leur souveraineté et exécuter de bonne foi leurs obligations assumées, conformément au droit international ;

- respecter l'égalité de droits des peuples et leur droit à disposer d'eux-mêmes, en agissant à tout moment conformément aux buts et aux principes de la Charte des Nations unies et aux normes pertinentes du droit international, y compris celles qui ont trait à l'intégrité territoriale des Etats (texte repris de l'acte final d'Helsinki) ;

- continuer à réaffirmer le droit de tous les peuples à disposer d'eux-mêmes, en tenant compte de la situation particulière des peuples soumis à la domination coloniale ou à d'autres formes de domination ou d'occupations étrangères, et reconnaître le droit des peuples à prendre des mesures légitimes conformément à la Charte des Nations unies pour réaliser leur droit inaliénable à l'autodétermination (texte repris de la déclaration de l'Assemblée générale des Nations unies à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'ONU) ;

- s'abstenir en conformité avec les normes du droit international, de toute intervention directe ou indirecte dans les affaires intérieures d'un autre partenaire ;

- respecter l'intégrité territoriale et l'unité de chacun des autres partenaires ;

- renoncer à la menace ou à l'emploi de la force contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre partenaire, ou à tout autre moyen incompatible avec les buts des Nations unies, (y compris l'acquisition de territoires par la force) et à régler leurs différends par des moyens pacifiques ;

- renforcer leur coopération pour prévenir et combattre le terrorisme notamment par la ratification et l'application d'instruments internationaux auxquels ils ont souscrit, par l'adhésion à de tels instruments ainsi que par toute autre mesure appropriée ;

- lutter ensemble contre l'expansion et la diversification de la criminalité organisée et combattre le fléau de la drogue dans tous ses aspect;

- _uvrer en faveur de la non-prolifération chimique, biologique et nucléaire, en engageant tous les partenaires à adhérer au traité de non-prolifération nucléaire, à la convention sur l'interdiction des armes chimiques et à la convention sur l'interdiction des armes biologiques, à exécuter de bonne foi les engagements dans le cadre des conventions auxquelles ils sont parties en matière de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération (nouveau texte à venir) ;

- ne pas se doter de capacités militaires au-delà de leurs besoins légitimes de défense, réaffirmant en même temps leur volonté d'atteindre le même degré de sécurité et de confiance mutuelle aux niveaux les plus bas possibles de forces et d'armements ;

- promouvoir les conditions susceptibles de développer entre eux des relations de bon voisinage et soutenir les processus qui visent la stabilité, la sécurité, la prospérité, et la coopération régionale et subrégionale ;

- étudier les mesures de confiance et de sécurité qu'il conviendrait d'adopter en commun entre les participants en vue de la consolidation d'un "espace de paix et de stabilité en Méditerranée", y compris la possibilité à terme de mettre en oeuvre à cet effet un pacte euro-méditerranéen.

PARTENARIAT ÉCONOMIQUE ET FINANCIER : CONSTRUIRE UNE ZONE DE PROSPÉRITÉ PARTAGÉE

Les participants soulignent l'importance qu'ils attachent au développement économique et social durable et équilibré dans la perspective de réaliser leur objectif de construire une zone de prospérité partagée.

Les partenaires reconnaissent les difficultés que la question de la dette peut entraîner pour le développement économique des pays de la région méditerranéenne. Ils conviennent, compte tenu de l'importance de leurs relations, de poursuivre le dialogue afin de parvenir à des progrès dans les enceintes compétentes.

Constatant que les partenaires ont à relever des défis communs, bien que se présentant à des degrés différents les participants se fixent les objectifs à long terme suivants :

- accélérer le rythme d'un développement socio-économique durable

- améliorer les conditions de vie des populations, augmenter le niveau d'emploi et réduire les écarts de développement dans la région euroméditerranéenne ;

- promouvoir la coopération et l'intégration régionale.

En vue d'atteindre ces objectifs, les participants conviennent d'établir un partenariat économique et financier qui, en tenant compte des différents degrés de développement, sera fondé sur :

- l'instauration progressive d'une zone de libre-échange ;

- la mise en _uvre d'une coopération et d'une concertation économiques appropriées dans les domaines concernés ;

- l'augmentation substantielle de l'assistance financière de l'Union à ses partenaires.

a) Zone de libre-échange

La zone de libre-échange sera réalisée à travers les nouveaux accords euroméditerranéens et des accords de libre-échange entre les partenaires de l'Union européenne. Les participants ont retenu l'année 2010 comme date objectif pour instaurer progressivement cette zone qui couvrira l'essentiel des échanges dans le respect des obligations découlant de l'OMC.

En vue de développer le libre échange graduel dans cette zone, les obstacles tarifaires et non tarifaires aux échanges des produits manufacturés seront progressivement éliminés selon des calendriers à négocier entre les partenaires en partant des flux traditionnels et dans la mesure permise par les différentes politiques agricoles en respectant dûment les résultats atteints dans le cadre des négociations du GATT, le commerce des produits agricoles sera progressivement libéralisé par l'accès préférentiel et réciproque entre les parties. Les échanges de services y compris le droit d'établissement seront progressivement libéralisés en tenant dûment compte de l'accord GATT.

Les participants décident de faciliter l'établissement progressif de cette zone de libre-échange en :

- adoptant des dispositions adéquates en matière de règles d'origine, de certification, de protection des droits de propriété intellectuelle et industrielle et de concurrence ;

- poursuivant et développant des politiques fondées sur les principes de l'économie de marché et de l'intégration de leurs économies en tenant compte de leurs besoins et niveaux de développement respectifs ;

- procédant à l'ajustement et à la modernisation des structures économiques et sociales, la priorité étant accordée à la promotion et au développement du secteur privé, à la mise à niveau du secteur productif et à la mise en place d'un cadre institutionnel et réglementaire approprié pour une économie de marché. De même, ils s'efforceront d'atténuer les conséquences négatives qui peuvent résulter de cet ajustement au plan social en encourageant des programmes en faveur des populations les plus démunies ;

- promouvant les mécanismes visant à développer les transferts de technologie.

b) Coopération et concertation économiques

La coopération sera développée en particulier dans les domaines énumérés ci-dessous et à cet égard les participants :

- reconnaissent que le développement économique doit être soutenu à la fois par l'épargne interne, base de l'investissement, et par des investissements étrangers directs. Ils soulignent qu'il importe d'instaurer un environnement qui leur soit propice notamment par l'élimination progressive des obstacles à ces investissements ce qui pourrait conduire aux transferts de technologies et augmenter la production et les exportations ;

- affirment que la coopération régionale, réalisée sur une base volontaire, notamment en vue de développer les échanges entre les partenaires eux-mêmes, constitue un facteur clé pour favoriser l'instauration d'une zone de libre-échange ;

- encouragent les entreprises à conclure des accords entre elles et s'engagent à favoriser cette coopération et la modernisation industrielle, en offrant un environnement et un cadre réglementaire favorable. Ils considèrent nécessaire l'adoption et la mise en oeuvre d'un programme d'appui technique aux PME ;

- soulignent leur interdépendance en matière d'environnement, qui impose une approche régionale et une coopération renforcée, ainsi qu'une meilleure coordination des programmes multilatéraux existants, en confirmant leur attachement à la Convention de Barcelone et au PAM. Ils reconnaissent qu'il importe de concilier le développement économique avec la protection de l'environnement, d'intégrer les préoccupations environnementales dans les aspects pertinents de la politique économique et d'atténuer les conséquences négatives qui pourraient résulter du développement sur le plan de l'environnement. Ils s'engagent à établir un programme d'actions prioritaires à court et à moyen terme, y compris en matière de lutte contre la désertification, et à concentrer des appuis techniques et financiers appropriés sur ces actions ;

- reconnaissent le rôle clé des femmes dans le développement et s'engagent à promouvoir la participation active des femmes dans la vie économique et sociale et dans la création d'emplois ;

- soulignent l'importance de la conservation et de la gestion rationnelle des ressources halieutiques et de l'amélioration de la coopération dans le domaine de la recherche sur les ressources, y compris l'aquaculture, et s'engagent à faciliter la formation et la recherche scientifiques et à envisager la création d'instruments communs ;

- reconnaissent le rôle structurant du secteur de l'énergie dans le partenariat économique euro-méditerranéen et décident de renforcer la coopération et d'approfondir le dialogue dans le domaine des politiques énergétiques. Décident de créer les conditions-cadres adéquates pour les investissements et les activités des compagnies d'énergie, en coopérant pour créer les conditions permettant à ces compagnies d'étendre les réseaux énergétiques et de promouvoir les interconnexions ;

- reconnaissent que l'approvisionnement en eau ainsi qu'une gestion appropriée et un développement des ressources constituent une question prioritaire pour tous les partenaires méditerranéens et qu'il importe de développer la coopération en ces domaines ;

- conviennent de coopérer en vue de moderniser et de restructurer l'agriculture et de favoriser le développement rural intégré. Cette coopération sera axée notamment sur l'assistance technique et la formation, sur le soutien aux politiques mises en _uvre par les partenaires pour diversifier la production, sur la réduction de la dépendance alimentaire et sur la promotion d'une agriculture respectueuse de l'environnement. Conviennent également de coopérer en vue de l'éradication de cultures illicites et pour le développement des régions éventuellement affectées.

Les participants conviennent également de coopérer dans d'autres domaines et, à cet égard :

- soulignent l'importance d'un développement et d'une amélioration des infrastructures, y compris par la création d'un système efficace de transport, le développement des technologies de l'information et la modernisation des télécommunications. A cet effet, ils conviennent d'élaborer un programme de priorités.

- s'engagent à respecter les principes du droit maritime international et en particulier la libre prestation de services dans le domaine du transport international et le libre accès aux cargaisons internationales. Les résultats des négociations commerciales multilatérales sur les services de transport maritime menées actuellement dans le cadre de l'OMC seront pris en compte une fois convenus ;

- s'engagent à encourager la coopération entre les collectivités locales et en faveur de l'aménagement du territoire ;

- reconnaissant que la science et la technologie ont une influence significative sur le développement socio-économique, conviennent de renforcer les capacités propres de recherche scientifique et développement, de contribuer à la formation du personnel scientifique et technique, de promouvoir la participation à des projets de recherche conjoints à partir de la création de réseaux scientifiques ;

- conviennent de promouvoir la coopération dans le domaine statistique afin d'harmoniser les méthodes et d'échanger des données.

c) Coopération financière

Les participants considèrent que la réalisation d'une zone de libre-échange et le succès du partenariat euro-méditerranéen reposent sur un accroissement substantiel de l'assistance financière qui doit favoriser avant tout un développement endogène et durable et la mobilisation des acteurs économiques locaux. Ils constatent à cet égard :

- que le Conseil européen de Cannes est convenu de prévoir pour cette assistance financière des crédits d'un montant de 4.685 millions d'écus pour la période 1995-1999, sous forme de fonds budgétaires communautaires disponibles. A cela s'ajoutera l'intervention de la BEI sous forme de prêts d'un montant accru, ainsi que les contributions financières bilatérales des Etats membres ;

- qu'une coopération financière efficace, gérée dans le cadre d'une programmation pluriannuelle tenant compte des spécificités de chacun des partenaires est nécessaire ;

- qu'une gestion macro-économique saine revêt une importance fondamentale pour assurer le succès de leur partenariat. A cette fin, ils conviennent de favoriser le dialogue sur leurs politiques économiques respectives et sur la manière d'optimiser la coopération financière.

PARTENARIAT DANS LES DOMAINES SOCIAL, CULTUREL ET HUMAIN : DÉVELOPPER LES RESSOURCES HUMAINES, FAVORISER LA COMPRÉHENSION ENTRE LES CULTURES ET LES ÉCHANGES ENTRE LES SOCIÉTÉS CIVILES

Les participants reconnaissent que les traditions de culture et de civilisation de part et d'autre de la Méditerranée, le dialogue entre ces cultures et les échanges humains, scientifiques et technologiques sont une composante essentielle du rapprochement et de la compréhension entre leurs peuples et d'amélioration de la perception mutuelle.

Dans cet esprit, les participants conviennent de créer un partenariat dans les domaines social, culturel et humain. A cet effet :

- ils réaffirment que le dialogue et le respect entre les cultures et les religions sont une condition nécessaire au rapprochement des peuples. A cet égard, ils soulignent l'importance du rôle que peuvent jouer les médias dans la connaissance et la compréhension réciproques des cultures, en tant que source d'enrichissement mutuel ;

- ils insistent sur le caractère essentiel du développement des ressources humaines, tant en ce qui concerne l'éducation et la formation notamment des jeunes que dans le domaine de la culture. Ils manifestent leur volonté de promouvoir les échanges culturels et la connaissance d'autres langues, respectant l'identité culturelle de chaque partenaire, et de mettre en oeuvre une politique durable de programmes éducatifs et culturels ; dans ce contexte les partenaires s'engagent à prendre les mesures susceptibles de faciliter les échanges humains, notamment par l'amélioration des procédures administratives ;

- ils soulignent l'importance du secteur de la santé pour un développement durable et manifestent leur volonté d'encourager la participation effective de la collectivité aux actions de promotion de la santé et du bien-être de la population ;

- ils reconnaissent l'importance du développement social qui, à leur avis, doit aller de pair avec tout développement économique. Ils attachent une priorité particulière au respect des droits sociaux fondamentaux, y compris le droit au développement ;

- ils reconnaissent la contribution essentielle que peut apporter la société civile dans le processus de développement du partenariat euro-méditerranéen et en tant que facteur essentiel d'une meilleure compréhension et d'un rapprochement entre les peuples ;

- en conséquence ils conviennent de renforcer et/ou mettre en place les instruments nécessaires à une coopération décentralisée pour favoriser les échanges entre les acteurs du développement dans le cadre des législations nationales : responsables de la société politique et civile, du monde culturel et religieux, des universités, de la recherche, des médias, des associations, les syndicats et les entreprises privées et publiques ;

- sur cette base, ils reconnaissent qu'il importe de promouvoir les contacts et les échanges entre les jeunes dans le cadre de programmes de coopération décentralisée ;

- ils encourageront les actions de soutien en faveur des institutions démocratiques et du renforcement de l'Etat de droit et de la société civile ;

- ils reconnaissent que l'évolution démographique actuelle représente un défi prioritaire auquel il convient de faire face par des politiques appropriées pour accélérer le décollage économique ;

- ils reconnaissent le rôle important que jouent les migrations dans leurs relations. Ils conviennent d'accroître leur coopération pour réduire les pressions migratoires au moyen, entre autres, de programmes de formation professionnelle et d'assistance à la création d'emplois. Ils s'engagent à garantir la protection de l'ensemble des droits reconnus par la législation existante des migrants légalement installés sur leurs territoires respectifs ;

- dans le domaine de l'immigration clandestine, ils décident d'établir une coopération plus étroite. Dans ce contexte, les partenaires, conscients de leur responsabilité pour la réadmission, conviennent d'adopter par la voie d'accords ou arrangements bilatéraux les dispositions et les mesures appropriées pour la réadmission de leurs ressortissants en situation illégale. A cet effet, pour les Etats membres de l'Union européenne, seront considérés ressortissants les nationaux des Etats membres tels que définis aux fins communautaires ;

- ils conviennent de renforcer la coopération par diverses mesures visant à prévenir et à combattre ensemble de façon plus efficace le terrorisme ;

- de même, ils estiment nécessaire de lutter ensemble et efficacement contre le trafic de drogues, la criminalité internationale et la corruption ;

- ils soulignent l'importance de lutter résolument contre les phénomènes racistes et xénophobes et contre l'intolérance et conviennent de coopérer à cette fin.

SUIVI DE LA CONFÉRENCE

Les participants

- considérant que la Conférence de Barcelone jette les bases d'un processus ouvert et appelé à se développer ;

- réaffirmant leur volonté d'établir un partenariat basé sur les principes et objectifs définis par la présente déclaration ;

- résolus à donner une expression concrète à ce partenariat euro-méditerranéen

- convaincus que, pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de poursuivre le dialogue global engagé et de réaliser une série d'actions concrètes,

adoptent le programme de travail ci-joint.

Les ministres des Affaires étrangères se réuniront périodiquement afin d'assurer le suivi de l'application de la présente déclaration et de définir les actions propres à permettre la réalisation des objectifs du partenariat.

Les diverses actions feront l'objet d'un suivi sous forme de réunions thématiques ad hoc de ministres, de hauts fonctionnaires et d'experts, d'échanges d'expériences et d'informations, de contacts entre les participants de la société civile, ou par tout autre moyen approprié.

Les contacts au niveau des parlementaires, des autorités régionales, des collectivités locales et des partenaires sociaux seront encouragés.

Un "Comité euro-méditerranéen du processus de Barcelone", au niveau de Hauts Fonctionnaires, composé de la Troïka de l'Union européenne et d'un représentant de chaque partenaire méditerranéen, tiendra des réunions périodiques pour préparer la réunion des ministres des Affaires étrangères, faire le point et évaluer le suivi du processus de Barcelone dans toutes ses composantes et pour mettre à jour le programme de travail.

Le travail approprié de préparation et de suivi des réunions résultant du programme de travail de Barcelone et des conclusions du "Comité euro-méditerranéen du processus de Barcelone" sera assumé par les services de la Commission.

ANNEXE II

Engagement et paiement des crédits MEDA

ANNEXE III

Les Conférences ministérielles thématiques

Conférences sur le 2ème volet

· Conférences des Ministres de l'Industrie (mai 1996 et octobre 1998)

Les ministres de l'Industrie ont tenu deux conférences :

- la première, qui a eu lieu à Bruxelles les 20-21 mai 1996, a adopté un programme de travail dont la mise en _uvre a été confiée à deux groupes de travail : l'un sur le "développement du tissu industriel et entrepreneurial", l'autre sur le "cadre juridique et administratif" nécessaire à la modernisation et à l'harmonisation des normes en matière industrielle ;

- la seconde s'est déroulée à Klagenfurt, les 3 et 4 octobre 1998. Elle a été l'occasion pour l'Union Européenne de souligner auprès de ses partenaires méditerranéens la nécessité d'accélérer l'adaptation des règles et normes de leurs économies aux exigences de la création de la zone de libre échange. Tout en confirmant leur engagement en ce sens, les pays méditerranéens ont tenu, pour leur part, à rappeler leurs préoccupations devant la faiblesse persistante des investissements dans la région méditerranéenne, dans la mesure où ils conditionnent largement la réussite du processus, ainsi que leurs souhaits de pouvoir bénéficier d'un appui, à cet égard, de la part des Quinze.

Parallèlement, de nombreuses rencontres ont été organisées entre les Associations industrielles, les Chambres de commerce et d'Industrie, les Fédérations industrielles, ainsi qu'au niveau des experts et des organismes de promotion du commerce international.

· Conférences ministérielles sur l'énergie (juin 1996 et mai 1998)

Deux conférences ont été réunies sur ce thème :

- l'une, sur l'initiative de l'Italie, à Trieste les 7-9 juin 1996, a créé un Forum euro-méditerranéen de l'énergie, chargé de définir des orientations stratégiques pour la coopération dans ce domaine ;

- l'autre, à Bruxelles le 11 mai 1998, a approuvé un Plan d'action, devant se traduire par des projets concrets de coopération à l'échelon régional.

· Conférence ministérielle sur la société de l'information (mai 1996)

Cette question a été examinée lors d'une conférence ministérielle à Rome les 30-31 mai 1996. Une série de séminaires se sont également tenus, dans ce cadre, sur des sujets plus spécialisés, notamment sur la recherche (Sophia-Antipolis, avril 1996), l'éducation et la formation (Bruxelles, mai 1996), le cadre réglementaire (Palerme, mai 1996), l'information maritime (Malte, juin 1996) et l'utilisation d'Internet (Chypre, février 1998).

La Commission a engagé, pour sa part, au nom de l'Union, un important programme de coopération régionale ("Euromediterranean Information Society" - FUMEDI - de 45 Mécus), dont l'objet est "d'accompagner les Etats dans la restructuration du domaine des télécommunications et de permettre en particulier d'associer le secteur privé au développement des infrastructures nécessaires".

· Conférence des Ministres du Tourisme (mai 1996)

Une Conférence ministérielle sur ce thème a été organisée à Naples, les 10-11 mai 1996, mais, faute de préparation suffisante, n'a pas débouché sur des résultats concrets. Aussi la France a-t-elle pris l'initiative de proposer, en 1998, l'adoption d'un programme de coopération régionale consacré au Tourisme, qui doit faire l'objet d'un séminaire d'experts à Nice en mai 1999.

· Conférences des Ministres de l'Environnement (novembre 1996 et novembre 1997).

Une première Conférence, réunie à Marseille à l'initiative de la France les 25-26 novembre 1996, a porté sur la gestion locale de l'eau. Elle a adopté une Déclaration sur les principes applicables en la matière et a créé un réseau euroméditerranéen d'information et d'échanges sur les savoir-faire dans le domaine de l'eau (SEMIDE en cours d'installation à Sophia-Antipolis).

Il est à noter que l'Italie vient de proposer la tenue d'une nouvelle Conférence ministérielle de suivi sur ce thème pendant le second semestre 1999. Il a été convenu qu'elle aurait pour objectif principal de créer un réseau euro-méditerranéen des Directeurs de l'eau.

A l'invitation de la Finlande, une deuxième Conférence ministérielle, traitant de l'ensemble des problèmes de l'environnement, s'est tenue à Helsinki les 27 et 28 novembre 1997. Elle a approuvé un "plan d'action à court et moyen terme" (SMAP) et constitué un réseau euro-méditerranéen de correspondants gouvernementaux. Une première réunion de ce réseau a eu lieu à Bruxelles en novembre 1998 et a permis de sélectionner une première série de projets susceptibles de bénéficier des crédits MEDA.

Conférences sur le 3ème volet

· Conférences des Ministres de la Culture (avril 1996 et septembre 1998)

- La première, à Bologne les 22-23 avril 1996, a mis l'accent sur la coopération dans le domaine du patrimoine culturel ;

- La seconde - qui avait été préparée par un atelier sur le "dialogue entre les cultures et les civilisations" à Stockholm en avril 1998 - s'est tenue à Rhodes les 25-26 septembre dernier et a permis de regrouper les différentes actions de coopération autour de plusieurs "piliers" prioritaires : le patrimoine culturel, l'audiovisuel et les sciences humaines (à compléter ultérieurement par les échanges culturels et artistiques).

Il convient de noter que, témoignant de l'intérêt des partenaires, de nombreux séminaires et ateliers se sont déroulés dans l'intervalle de ces conférences, notamment sur le thème du dialogue interculturel et interreligieux. D'autre part, la coopération en matière d'audiovisuel a fait l'objet d'une réunion à haut niveau à Thessalonique, les 14-16 novembre 1997. A la suite de celle-ci, des appels à propositions ont été lancés pour un certain nombre de projets dans les domaines de la radio, de la télévision et du cinéma.

· Projet français de Conférence des Ministres de la Santé

A l'initiative de la France, une réunion des ministres de la Santé se réunira, pour la première fois, en décembre prochain dans le cadre euro-méditerranéen à Montpellier. Prolongeant des réunions d'experts sur la santé et la protection sociale tenues en 1997 et 1998 en Hollande, cette Conférence qui suscite un vif intérêt auprès des pays méditerranéens, sera consacrée notamment à la coopération en matière de lutte contre les maladies infectieuses.

Il convient de noter qu'à côté des conférences ministérielles et des réunions d'experts gouvernementaux, le processus euro-méditerranéen comporte également, de nombreuses rencontres ou séminaires associant des institutions et des experts indépendants. Ceux-ci n'apportent pas seulement une contribution utile à l'étude des problèmes, mais permettent aussi d'éviter les obstacles d'ordre politique qui entravent la coopération entre certains de nos partenaires du sud.

ANNEXE IV

Lignes directrices relatives à l'élaboration d'une charte
euro-méditerranéenne pour la paix et la stabilité

I - DISPOSITIONS GÉNÉRALES

. La Charte sera un document politiquement, mais non juridiquement, contraignant.

. Elle sera adoptée par une réunion ministérielle lorsque les circonstances politiques le permettront.

. Elle peut prévoir la mise en _uvre progressive et évolutive de certaines clauses par voie d'accord.

. La règle du consensus sera applicable à toutes les décisions, actions communes, mesures et mécanismes contenus dans la Charte.

II - ÉLÉMENTS

PRÉAMBULE

. Réaffirmation de la Déclaration de Barcelone de 1995 en tant que base du partenariat euro-méditerranéen

PRINCIPES ET ENGAGEMENTS

. Respect des buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies

. Reconnaissance de l'indivisibilité de la sécurité dans l'espace euro-méditerranéen et au-delà

. Reconnaissance du concept de sécurité globale

. Recours aux instruments de sécurité coopérative

. Non-ingérence dans le règlement des conflits actuels

. Approche commune et équilibrée de la question de la stabilité dans le Bassin méditerranéen

PORTÉE

. Fondée sur le concept de sécurité globale, la Charte portera essentiellement sur les questions politiques et de sécurité qui se posent dans ce contexte et abordera, sans préjudice des procédures de décision existantes, les aspects économiques, sociaux, culturels et humains dans la mesure où ils affectent et déterminent la paix et la stabilité.

OBJECTIFS

a) La Charte servira d'instrument fonctionnel pour la mise en _uvre des principes de la Déclaration de Barcelone. En particulier, elle contribuera, par une approche globale et équilibrée, au renforcement de la paix et de la stabilité. L'établissement d'un dialogue politique renforcé, dans le cadre institutionnel approprié et aux niveaux adéquats, sera prioritaire. Les dispositions concernant les mesures de partenariat, les relations de bon voisinage, la coopération sous-régionale et la diplomatie préventive seront développées de manière évolutive et progressivement renforcées.

b) Plus particulièrement, la Charte visera à :

. contribuer à une approche cohérente de la mise en _uvre des principaux objectifs de la Déclaration de Barcelone, à savoir l'établissement d'un espace commun de paix et de stabilité, de prospérité partagée et de développement socio-culturel dans le Bassin méditerranéen ;

. promouvoir des valeurs et des principes communs : le respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, la promotion de la compréhension, de la transparence et de la prévisibilité, le renforcement de la démocratie, de la solidarité et de la tolérance ;

. promouvoir une meilleure compréhension et acceptation mutuelle des cultures, religions et civilisations des peuples de la région euro-méditerranéenne ;

. relever les défis mondiaux en matière de sécurité (terrorisme, criminalité organisée, trafic de drogue, prolifération d'armes de destruction massive et de leurs systèmes de lancement, dégradation de l'environnement naturel, xénophobie, immigration clandestine et traite des êtres humains) ;

. s'occuper des conditions sociales et économiques qui menacent la stabilité dans la région ;

. promouvoir, au moment opportun, les exigences du partenariat en matière de sécurité, y compris les mesures de confiance et de sécurité (MDCS), les zones exemptes d'armes de destruction massive, le désarmement, les engagements en matière de maîtrise des armements, les conventions de non-prolifération, etc...

MOYENS ET MÉCANISMES

Dialogue politique renforcé

Principale fonction :

. prévenir les tensions et les crises, maintenir la paix et la stabilité dans la région et assurer l'application de la Charte ;

. contribuer au renforcement de la stabilité grâce à une sécurité coopérative à adopter par consensus.

Contenu :

. aborder des questions liées aux diverses dimensions de la stabilité ;

. à cette fin, le dialogue doit viser en priorité :

- l'élaboration de mesures de partenariat (destinées à accroître la transparence et la confiance),

- l'exploration et l'établissement d'arrangements visant à assurer la prévention des conflits, la gestion des crises et le relèvement après les conflits,

- la coopération face aux défis mondiaux en matière de sécurité (terrorisme, criminalité organisée, etc..)

- les différents aspects de la dimension humaine du partenariat (droits de l'Homme, Etat de droit, démocratisation, migration, etc..) ;

. échanger des informations sur des questions spécifiques intéressant l'ensemble des partenaires ;

. définir les moyens de contribuer au succès des initiatives prises dans l'intérêt de la paix et de la stabilité dans la région.

Cadre :

. réunions périodiques et ad hoc aux niveaux des ministres et des administrateurs (Hauts fonctionnaires) ;

. des groupes ad hoc pourraient être créés pour des tâches spécifiques ;

. le cadre institutionnel approprié doit encore être approfondi et mis au point.

Mesures de partenariat

(voir les travaux accomplis ou devant encore être accomplis par les hauts fonctionnaires en liaison avec la première partie de la Déclaration de Barcelone)

. Les mesures de partenariat pourraient comprendre des éléments des trois chapitres de la Déclaration de Barcelone, dans la mesure où ils ont trait à la paix et à la stabilité.

. Les mesures de partenariat adoptées feront l'objet d'une annexe distincte de la Charte

. Cette annexe sera réexaminée périodiquement

Mesures visant à améliorer les relations de bon voisinage et la coopération régionale

. Coopération politique et dialogue sur la sécurité (tables rondes pour permettre un travail d'analyse et dégager des recommandations destinées aux Hauts fonctionnaires)

. Mise en place progressive d'un réseau d'accords de coopération sous-régionale en vue de créer un espace commun de sécurité

. Projet transfrontières

. Etablissement de réseaux au niveau régional par la conclusion d'accords bilatéraux, l'objectif étant de mieux lutter contre les phénomènes qui entravent actuellement le développement national et régional ou compromettant la bonne gestion des affaires publiques

. Promotion du dialogue entre les cultures et les religions et encouragement des relations humaines

Diplomatie préventive, mesures de gestion des crises et relèvement après les conflits (à établir sur une base strictement volontaire et consensuelle dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen sans empiéter sur les travaux d'autres institutions ni sur les efforts déployés au niveau bilatéral)

. Consultations entre pays pour créer les structures nécessaires à la tenue de réunions consacrées à la prévention des crises

. Mettre au point des procédures de clarification, de médiation et de conciliation pour que les parties puissent régler leurs différends par des moyens pacifiques de leur choix

. Encourager le règlement judiciaire des différends et des conflits

. Adhésion aux conventions internationales pertinentes et respect de celles-ci

. Etablissement d'un mécanisme euro-méditerranéen de diplomatie préventive et de gestion des crises

. Coopération euro-méditerranéenne en matière de maintien de la paix

. Ateliers (détection des causes profondes d'instabilité et de tension).

Modalités de l'action commune (à mettre au point à un stade ultérieur)

DISPOSITIONS INSTITUTIONNELLES

(cf. dialogue politique renforcé)

. Les ministres des Affaires étrangères se réuniront périodiquement ou chaque fois que des situations ou des événements particuliers l'exigent afin de se concerter et de prendre des décisions visant à promouvoir le partenariat. La mise en _uvre des décisions et des lignes directrices s'effectuera conformément aux réglementations et règles de procédure applicables.

. Les hauts fonctionnaires seront chargés de préparer et d'assurer le suivi des réunions ministérielles

. Les hauts fonctionnaires tiendront des réunions périodiques et des réunions ad hoc pour examiner des questions d'actualité et adresser des recommandations aux ministres

. Le fonctionnement de la Charte sera réexaminé par les ministres des Affaires étrangères lors de leurs réunions ordinaires

DISPOSITIONS FINANCIÈRES

RELATIONS DU PARTENARIAT EURO-MÉDITERRANÉEN AVEC LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET RÉGIONALES

. Coopération et consultations au niveau régional ou sous-régional, y compris une coordination et des propositions communes sur des questions ayant une dimension régionale particulière au sein des organisations et instances internationales en vue de renforcer la présence du partenariat sur la scène internationale.

. Si les participants sont d'accord, d'autres pays ou organisations pourraient être associés aux activités prévues par la Charte

AUTRES DISPOSITIONS

. Clause spécifique relative à l'application de la Charte pour les parties à des conflits de longue date

III. ORGANISATION DES TRAVAUX

. L'élaboration de la Charte sera inscrite à l'ordre du jour de chaque réunion du Groupe des hauts fonctionnaires

. Des réunions ad hoc supplémentaires pourraient être convoquées sous chaque présidence de l'Union européenne

. La mise en place de task forces, de groupes de travail et de tables rondes pour des thèmes particuliers pourrait être prévue. Toutes les parties intéressées pourraient y participer, et ce sur une base volontaire.

. Des documents de réflexion et d'autres contributions pourraient être fournis par tel ou tel partenaire (système du chef de file).

. Un comité spécial de rédaction de la Charte sera créé au moment opportun

IV. CALENDRIER DES TRAVAUX

. L'élaboration de la Charte devrait être achevée d'ici la prochaine réunion ministérielle formelle du processus de Barcelone

. La convocation des réunions et la mise en place des comités spéciaux seront programmées en conséquence.

. Un calendrier global sera établi par le Groupe des hauts fonctionnaires.

________

N° 1737.- Rapport d'information de M. Michel Vauzelle, déposé en application de l'article 145 du Règlement par la commission des affaires étrangères, sur le partenariat euro-méditerranéen.

1 Turquie : accord signé en 1963, union douanière en vigueur depuis le 1er janvier 1996. Chypre : accord signé en 1972 ; phase finale de l'union douanière entrée en vigueur le 1er janvier 1998. Malte : accord de 1970, première phase de l'union douanière en vigueur depuis 1977.