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N° 2923

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 février 2001.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,

FAMILIALES ET SOCIALES(1)

sur

la sécurité dans les établissements scolaires

et prÉsentÉ

par M. Bruno Bourg-Broc,

Député.

___

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Enseignement.

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; M. Jean-Michel Dubernard, M. Jean-Paul Durieux, M. Maxime Gremetz, M. Édouard Landrain, vice-présidents ; M. André Aschieri, Mme Odette Grzegrzulka, M. Denis Jacquat, M. Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; M. Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, M. Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jean-Pierre Baeumler, M. Pierre-Christophe Baguet, M. Jean Bardet, M. Jean-Claude Bateux, M. Jean-Claude Beauchaud, Mme Huguette Bello, Mme Yvette Benayoun-Nakache, M. Serge Blisko, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. Jean-Claude Boulard, M. Bruno Bourg-Broc, Mme Danielle Bousquet, Mme Christine Boutin, M. Jean-Paul Bret, M. Victor Brial, M. Yves Bur, M. Alain Calmat, M. Pierre Carassus, M. Pierre Cardo, Mme Odette Casanova, M. Laurent Cathala, M. Jean-Charles Cavaillé, M. Bernard Charles, M. Michel Charzat, M. Jean-Marc Chavanne, M. Jean-Pierre Chevènement, M. Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. René Couanau, Mme Martine David, M. Bernard Davoine, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Marcel Dehoux, M. Jean Delobel, M. Jean-Jacques Denis, M. Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, M. Guy Drut, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Yves Durand, M. René Dutin, M. Christian Estrosi, M. Michel Etiévant, M. Claude Evin, M. Jean Falala, M. Jean-Pierre Foucher, M. Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, M. Germain Gengenwin, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Marie Geveaux, M. Jean-Pierre Giran, M. Michel Giraud, M. Gaétan Gorce, M. François Goulard, M. Gérard Grignon, M. Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. Francis Hammel, M. Pierre Hellier, M. Michel Herbillon, M. Guy Hermier, Mme Françoise Imbert, Mme Muguette Jacquaint, M. Serge Janquin, M. Jacky Jaulneau, M. Patrick Jeanne, M. Armand Jung, M. Bertrand Kern, M. Christian Kert, M. Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, M. Jacques Lafleur, M. Robert Lamy, M. Pierre Lasbordes, M. André Lebrun, M. Michel Lefait, M. Maurice Leroy, M. Patrick Leroy, M. Michel Liebgott, M. Gérard Lindeperg, M. Lionnel Luca, M. Patrick Malavieille, M. Alfred Marie-Jeanne, Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, M. Didier Mathus, M. Jean-François Mattei, M. Pierre Menjucq, Mme Hélène Mignon, M. Pierre Morange, M. Hervé Morin, M. Renaud Muselier, M. Philippe Nauche, M. Henri Nayrou, M. Alain Néri, M. Yves Nicolin, M. Bernard Outin, M. Dominique Paillé, M. Michel Pajon, M. Jean-Pierre Pernot, M. Bernard Perrut, M. Pierre Petit, Mme Catherine Picard, M. Jean Pontier, M. Jean-Luc Préel, M. Alfred Recours, M. Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont, M. Yves Rome, M. Joseph Rossignol, M. Jean Rouger, M. Rudy Salles, M. André Schneider, M. Bernard Schreiner, M. Patrick Sève, M. Michel Tamaya, M. Pascal Terrasse, M. Gérard Terrier, Mme Marisol Touraine, M. Anicet Turinay, M. Jean Ueberschlag, M. Jean Valleix, M. Alain Veyret, M. Philippe de Villiers, M. Philippe Vuilque, Mme Marie-Jo Zimmermann.

INTRODUCTION 5

RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR 7

I.- L'ÉVALUATION DE LA SÉCURITÉ À L'ÉCOLE 11

A. LE RÔLE DE L'OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA SÉCURITÉ DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES ET D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR 11

1. La genèse de l'Observatoire 11

2. Un rôle de sensibilisation 12

3. Des limites certaines 13

B. LA REGRETTABLE DISPERSION DES INSTANCES CONCERNÉES 13

C. LA NÉCESSITÉ D'UNE APPROCHE GLOBALE 14

1. Au niveau national 15

2. Au niveau de l'établissement 15

II.- LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS 19

A. LA SÉCURITÉ DES BÂTIMENTS 19

1. Le parc immobilier 19

2. Les efforts financiers en faveur de la sécurité 23

3. Les règles applicables et les contrôles en matière de constructions scolaires 25

4. Le risque incendie 28

Bilan de la tempête de décembre 1999 32

B. LA SÉCURITÉ DES ÉQUIPEMENTS 35

1. Les équipements sportifs 35

2. Les équipements de l'enseignement technologique et professionnel 39

III.- LA SÉCURITÉ DES PERSONNES 45

A. LES ACCIDENTS SCOLAIRES 45

B. LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE 47

1. Les enseignements de la crise de la « vache folle » dans les cantines scolaires 47

2. Les déséquilibres de l'alimentation scolaire 50

C. LA SÉCURITÉ SANITAIRE 53

D. LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES PERSONNELS 56

IV.- LA VIOLENCE À L'ÉCOLE 61

A. QUELLE MESURE DU PHÉNOMÈNE ? 61

1.  L'aggravation récente des faits de violence 61

2. Qui sont les victimes ? 63

3. Des imperfections statistiques 66

4. La montée du sentiment d'insécurité 67

5. Violence et incivilités 68

B.- LES MULTIPLES FACTEURS DE LA VIOLENCE 69

1. Mise en perspective historique 69

2. La violence résultant de l'évolution de la société 71

3. La violence entretenue par le fonctionnement de l'institution 76

C. UNE PRÉOCCUPATION PARTAGÉE À L'ÉCHELLE EUROPÉENNE 80

1. Des phénomènes convergents 81

2. Des approches diversifiées 85

D. LA POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LA VIOLENCE 87

1. Quel consensus sur le diptyque prévention / répression ? 87

2. Les plans de lutte contre la violence scolaire 90

TRAVAUX DE LA COMMISSION 95

ANNEXE 1 : TRAVAUX DE LA MISSION D'INFORMATION 100

ANNEXE 2 : DEUX EXEMPLES DE PARTENARIAT 104

ANNEXE 3 : GRILLE INDICATIVE DES SANCTIONS 105

ANNEXE 4 : CIRCULAIRE DU 9 JUIN 1971 RELATIVE À LA NUTRITION DE L'ÉCOLIER 106

INTRODUCTION

L'école ne constitue plus un « sanctuaire » à l'abri des problèmes sociaux, elle est devenue au contraire une caisse de résonance (violences urbaines, chômage, exclusion, précarité...) et concentre de ce fait toutes les insécurités présentes dans la société, même si la notion d'insécurité relève en partie d'une appréhension objective et en partie d'un sentiment.

L'école n'est plus non plus enfermée dans la tour d'ivoire de la transmission du savoir : son ouverture de plus en plus importante sur la société la place au carrefour de politiques publiques transversales qui dépassent sa mission initiale et auxquelles elle est appelée à contribuer (politique de la ville, politique culturelle, politiques de l'emploi et de la formation professionnelle...). Affectée par les évolutions juridiques et politiques de la société et en particulier par la décentralisation, elle ne peut échapper par conséquent aux nouvelles exigences du corps social (principe de précaution, judiciarisation et pénalisation des conflits, besoin de « réparation »,...) qui expriment bien souvent d'ailleurs une demande de sécurité.

Toutefois étant donné la spécificité de sa mission, éducative et du public qui lui est confié, la banalisation de la violence, principale forme d'insécurité à l'école, n'y est pas admissible. Aussi les pouvoirs publics ont-ils une responsabilité impérative vis à vis de l'école, celle de remédier au développement de la violence et de la délinquance juvénile en vue de sécuriser l'environnement de l'immense majorité des enfants et de préserver l'avenir de l'ensemble de la société.

Préoccupée par l'évolution des phénomènes de violence et attentive aux besoins de sécurité de l'école, des élèves et de leurs éducateurs, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a mis en place en son sein, le 23 février 2000, sur proposition du groupe RPR, une mission d'information sur la sécurité dans les établissements scolaires composée de dix députés, représentant l'ensemble des groupes politiques : M. Bruno Bourg-Broc, président et rapporteur, M. Jean-Pierre Baeumler, M. Serge Blisko, M. Yves Bur, M. Pierre Carassus, M. Yves Durand, M. Patrick Malavieille, M. Bernard Perrut, M. Alfred Recours, M. André Schneider.

Son objectif était, sans se limiter au problème de la violence à l'école, d'examiner l'ensemble des problèmes de sécurité en abordant aussi bien la sécurité des personnels que celle des élèves, mais aussi la sécurité alimentaire et sanitaire, celle des bâtiments comme des équipements, la sécurité juridique et la responsabilité des chefs d'établissement et des enseignants.

De mars à décembre 2000, la mission a procédé à de nombreuses auditions : syndicats d'enseignants, parents d'élèves, universitaires, organismes chargés d'analyser et d'évaluer les questions de sécurité. Elle s'est rendue dans des établissements scolaires afin de rencontrer sur le terrain l'ensemble des acteurs de l'école y compris des élèves, et leurs partenaires.

Elle s'est attachée à passer en revue les problèmes sectoriels afin de dresser un état des lieux général de la sécurité dans les établissements scolaires et d'examiner le phénomène de la violence dans la durée, d'en étudier plus précisément les causes et les manifestations, de s'interroger enfin sur les moyens d'y faire face.

Au cours de ses réflexions, il lui est en particulier apparu indispensable de mettre en _uvre une approche globale de la sécurité, qui requiert, dans les établissements, la mobilisation de tous sans exclusive -élèves, enseignants, personnels administratifs, parents- et au niveau national la réunion de compétences par trop dispersées au sein d'une agence française pour la sécurité dans les établissements scolaires et universitaires. Cette approche globale inspire également nombre de ses quarante-cinq propositions concrètes, présentées au fil du rapport et résumées ci-après.

RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR

Instaurer une culture collective de la sécurité en développant l'éducation et la prévention sanitaires.

- Créer une agence française pour la sécurité dans les établissements scolaires et universitaires, organisme indépendant ayant une compétence globale d'observation, d'évaluation et de proposition en matière de sécurité des établissements et de lutte contre la violence ;

- Instituer un correspondant de cette agence auprès du recteur dans chacune des académies ;

- Mobiliser les établissements sur leur organisation interne afin de promouvoir une culture globale de la sécurité  en associant les parents ;

- Mettre en _uvre une véritable politique de formation professionnelle pour l'ensemble des personnels en matière d'hygiène et de sécurité ;

- Intégrer la problématique de la sécurité et son corollaire, la lutte contre la violence, à la formation initiale dispensée dans les IUFM ;

- Mettre en _uvre une véritable éducation à la sécurité des élèves ;

- Accroître les moyens en personnels médicaux (notamment des pédopsychiatres) et médico-sociaux (infirmières, assistantes sociales, psychologues) non seulement pour rendre effectif l'encadrement sanitaire des élèves mais également pour dépister les conduites à risques ;

- Développer la prévention au titre de la médecine scolaire et instaurer une visite médicale régulière pour les élèves comme pour les personnels ;

- Proposer une alimentation plus équilibrée dans les cantines scolaires, notamment par le recours à des diététiciens ;

- Publier dans les meilleurs délais l'actualisation de la circulaire ministérielle, dite « de l'écolier », relative à l'organisation de la restauration scolaire ;

- Rendre effectif le port des équipements de protection individuelle et celui d'une tenue de travail adapté lors des travaux pratiques ou en ateliers.

Améliorer la sécurité des bâtiments et des équipements

- Intégrer l'obligation de la maintenance préventive dès l'établissement du cahier des charges ;

- Rendre obligatoire un « contrôle technique » périodique :

· de solidité des bâtiments

· de conformité et d'entretien des équipements sportifs, techniques et professionnels ;

- Formaliser par voie de conventions entre collectivités territoriales les conditions d'utilisation des équipements sportifs non intégrés ;

- Prévoir des équipements sportifs intégrés lors de la construction des établissements scolaires ;

- Généraliser l'obligation de créer et de réunir une commission d'hygiène et de sécurité dans les établissements du second degré ;

- Accélérer la mise en conformité des machines-outils dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) ;

- Fermer sans délai les internats installés non seulement dans des bâtiments à structure métallique mais également dans des bâtiments vétustes ;

- Effectuer la mise en sécurité des points de fermetures, en particulier les fenêtres situées dans les étages ;

- Faire procéder aux exercices réglementaires d'alerte préventive dans les internats comme dans les établissements scolaires.

Garantir la sécurité en dehors de l'établissement

- Doter les enseignants d'un téléphone portable pour toute activité extérieure à l'établissement, et tout particulièrement les enseignants d'éducation physique et sportive, amenés à se rendre dans des gymnases ou stades dépourvus de poste fixe, afin d'assurer la rapidité des secours en cas d'accidents ;

- Rendre effective l'obligation de présence d'un maître-nageur sauveteur au cours des séances de piscine.

Adapter la gestion des ressources humaines

- Favoriser la stabilité des personnels enseignants et non enseignants dans les zones sensibles ;

- Transférer au département la médecine scolaire et les assistantes sociales qui y concourent ;

- Transférer l'ensemble des personnels techniciens, ouvriers et agents de service (ATOS) aux régions et départements pour l'exercice de leurs compétences respectives ;

- Clarifier les prérogatives des chefs d'établissement en matière d'autorité vis-à-vis des personnels. L'autorité des enseignants doit être elle-même constamment réaffirmée ;

- Introduire un objectif de parité lors de la composition des équipes pédagogiques dans les établissements considérés comme sensibles

Neutraliser les facteurs de violence

- Promouvoir des collèges à taille humaine ;

- Rétablir une présence adulte en proportion de celle du nombre d'élèves ;

- Favoriser une transition en douceur entre le premier degré et le collège en aménageant les rythmes et les conditions de travail des classes de sixième ;

- Amplifier les opérations de partenariat de proximité avec, d'une part, les services de police et de justice, et d'autre part, les entrepreneurs locaux et le tissu associatif ;

- Créer des lieux de dialogue et de médiation au sein des établissements afin de rompre la loi du silence ;

- Renforcer l'encadrement pour l'assistance aux devoirs et, de manière plus générale, le suivi pédagogique des élèves en situation difficile ;

- Accélérer la construction ou la rénovation d'internats et de structure d'accueil des adolescents en difficulté.

Renforcer la surveillance

- Sécuriser les accès des établissements et systématiser l'installation de dispositifs de vidéo-surveillance dans les établissements à risques d'intrusion ;

- Renforcer la surveillance policière aux abords des établissements ;

- Assurer une surveillance permanente des bâtiments, éventuellement au moyen d'unités mobiles de surveillance, communes à plusieurs établissements, en fin de semaine, afin de prévenir les intrusions destructrices.

Organiser la gestion des crises

- Améliorer le soutien aux victimes et la médiation au sein de l'institution scolaire et des établissements avec, d'une part, les élèves et leurs familles, et d'autre part, les personnels ;

- Refuser l'impunité pour les agresseurs en apportant sans délai une réponse à chaque incident. Aucune agression, aucune incivilité si légère soit-elle, aucun délit ne doit rester sans aucune réponse de l'école et de la société ;

- Instituer des sanctions graduées en distinguant les sanctions pédagogiques de celles qui sont liées à la discipline.

Pour l'école du respect 

- Faire de l'école un lieu d'éducation à la citoyenneté responsable, par l'apprentissage de la règle de droit, un lieu où l'apprentissage de la citoyenneté fait la loi ;

- Généraliser l'adaptation des règlements intérieurs des établissements en établissant le respect des droits de la défense des élèves ;

- Donner des repères en renouant avec l'enseignement et la pratique de notions fondamentales telles que la morale, la politesse, le respect tant de l'altérité que de l'autorité et tout particulièrement celle des enseignants ;

- Former le personnel éducatif à l'éducation civique ;

- Tisser des liens avec les partenaires institutionnels (Parlement des enfants, Conseil général des jeunes, Conseil municipal des enfants, etc.).

I.- L'ÉVALUATION DE LA SÉCURITÉ À L'ÉCOLE

A. LE RÔLE DE L'OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA SÉCURITÉ DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES ET D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

1. La genèse de l'Observatoire

Il convient tout d'abord de souligner que le Parlement a largement contribué à la prise de conscience de la nécessité d'instituer une veille permanente en matière de sécurité des établissements scolaires. En effet, les débats relatifs à la révision de la loi Falloux avaient fait naître des interrogations sur la situation des bâtiments de l'enseignement privé face au risque incendie.

A la fin de l'année 1993, les pouvoirs publics ont ainsi souhaité connaître de façon précise l'état des besoins de sécurité des établissements scolaires publics et privés sous contrat. En janvier 1994, le Premier ministre annonçait la création d'une commission nationale d'évaluation et de proposition pour la sécurité des établissements scolaires. Il en confiait la présidence à M. Jean-Marie Schléret, député, et la mission de rapporteur à M. Adrien Gouteyron, sénateur.

La commission avait pour objectif de définir des critères de sélection des risques permettant d'établir une hiérarchisation des travaux pour améliorer le niveau de sécurité des établissements. Ces critères devaient permettre de dresser un état du patrimoine immobilier et d'évaluer l'ampleur des travaux prévisibles. Son constat était préoccupant : 7 % des établissements publics et 15 % des établissements privés présentaient des risques en matière d'alarmes ou d'évacuation. Il confirmait le rapport Vedel selon lequel près de la moitié des établissements étaient confrontés à des problèmes de sécurité dans le secteur privé.

Le rapport Gouteyron concluait, en outre, à la nécessité d'étudier en permanence l'état du patrimoine immobilier et proposait de pérenniser la commission en la transformant en Observatoire. Cette conclusion, suivie par le Gouvernement, a conduit ce dernier à créer par le décret du 6 mai 1995 l'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires, composé de représentants de l'Etat, de parlementaires, de représentants des collectivités locales, des gestionnaires de l'immobilier scolaire et universitaire, des syndicats de personnels, des fédérations de parents d'élèves, des chefs d'établissement, ainsi que de l'enseignement privé.

2. Un rôle de sensibilisation

Présidé par M. Jean-Marie Schléret, l'Observatoire est chargé d'étudier les conditions d'application des règles de sécurité en ce qui concerne les immeubles et les équipements des établissements scolaires du premier et du second degré, publics et privé sous contrat ainsi que pour les établissements publics d'enseignement supérieur et ceux de l'enseignement agricole. Il dresse chaque année, dans son rapport au ministre de l'éducation nationale, un état du patrimoine.

Dans le respect du droit de propriété, du principe de la libre administration des collectivités locales et de l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur, il peut solliciter tous renseignements et demander à consulter sur place tous documents qu'il estime, en toute indépendance, utiles à sa mission.

Depuis 1995, son travail de recensement et de diagnostic a permis d'engager un descriptif global du niveau de sécurité vis-à-vis du risque incendie des bâtiments, des équipements sportifs, des ateliers et équipements techniques dans le second degré, ainsi qu'en matière d'hygiène, de santé et d'accidents scolaires notamment. Son expertise l'a amené à plusieurs reprises à formuler des constats ou des propositions qui se sont, pour une bonne part, traduits par des modifications réglementaires, des dispositifs d'aide financière ou encore des décisions ministérielles rapides, telle par exemple que la fermeture de certains internats à la suite de la publication du rapport 2000 en décembre dernier.

Ne se limitant pas à émettre des propositions dans ses rapports annuels, il en vérifie à échéance régulière l'application. Les rappels qu'il peut alors formuler concernent aussi bien des aspects législatifs ou réglementaires, des politiques territoriales, des pratiques des maîtres d'ouvrage ou des actions sur le terrain. Il contribue incontestablement à une meilleure prise de conscience, ce qui est fondamental dans un domaine où la prudence de comportement est aussi importante que la réglementation.

On ne peut par conséquent que se féliciter de la notoriété que l'Observatoire a su acquérir grâce à la qualité et à la publicité de ses travaux, bien relayés au demeurant par les médias. Il apporte au surplus un concours précieux à l'amélioration de la sécurité sur le terrain en publiant des fiches pratiques, guides et autres documents concrets à l'intention des chefs d'établissement et des responsables et personnels concernés, dont il perçoit au fil de ses auditions et de ses visites, les attentes et les besoins.

3. Des limites certaines

Au terme de cinq années d'activité, en dépit d'un bilan globalement positif, l'Observatoire rencontre une série de difficultés qui limitent parfois la précision de ses diagnostics et, par voie de conséquence, les améliorations susceptibles d'être apportées en matière de sécurité.

L'insuffisante transparence et le manque de dialogue constituent son principal regret. Il fait ainsi régulièrement état, dans ses rapports annuels, d'une collaboration imparfaite des établissements, administrations et collectivités qu'il est amené à solliciter dans son travail de collecte de l'information qui prend la forme d'enquêtes thématiques et régulières. La coopération de ces instances, qui constituent ses principales sources, repose en réalité sur leur bon vouloir. L'Observatoire ne disposant pas d'un réel pouvoir de contrôle, elles n'ont en effet aucune obligation à répondre à ses demandes d'information. De même, s'il procède régulièrement à des visites sur place, celles-ci ne sont pas destinées à des inspections, mais à des rencontres avec les équipes de terrain. Il souhaite à cet égard pouvoir s'appuyer sur le corps des inspecteurs d'hygiène et de sécurité mis en place dans chaque académie en 1999.

S'agissant de ses moyens, l'Observatoire dépend du ministère de l'éducation nationale, qui met à sa disposition une équipe de cinq personnes chargées d'assurer le secrétariat permanent, des locaux, et qui indemnise les membres pour leurs frais de déplacement. Son coût annuel de fonctionnement peut être évalué à 1,5 million de francs. Ces moyens se révèlent insuffisants lorsque survient un événement particulier, qui requiert un surcroît d'activité de sa part. La tempête de décembre 1999 l'a ainsi conduit à effectuer une étude spécifique durant les six premiers mois de l'année 2000.

Au-delà de ces contraintes de fonctionnement, ne faut-il pas s'interroger sur l'étendue même de son champ de compétences défini en 1995 en fonction de certaines préoccupations précises ? Depuis, le contexte a évolué en faveur d'une demande croissante de sécurité et de précaution de la part des usagers de l'école que sont les familles, ainsi que l'ont montré certaines poussées de fièvre relatives par exemple aux OGM ou à la viande de b_uf. De toute évidence, les frontières d'un organisme tel que l'Observatoire sont amenées à évoluer.

B. LA REGRETTABLE DISPERSION DES INSTANCES CONCERNÉES

La réponse à la demande de sécurité a été effectuée au fur et à mesure de l'évolution de cette demande qui dépasse désormais le strict domaine de la sécurité des bâtiments. Il en résulte un assemblage hétéroclite d'organismes compétents chacun dans une parcelle seulement du vaste ensemble que constitue la sécurité dans les établissements scolaires.

La décentralisation conduit tout d'abord à différencier les centres de décision selon les niveaux d'enseignement, alors même que les problèmes à traiter et les actions à réaliser sont globalement de même nature, tout au moins pour ce qui concerne les établissements du second degré qui se trouvent souvent rassemblés dans un site unique. Par ailleurs, les collectivités locales n'ont reçu de compétences que pour l'investissement et le fonctionnement matériel des établissements. Or, désormais, l'approche des questions de sécurité doit s'affranchir des cloisonnements institutionnels. Aussi doit-on envisager le transfert des personnels techniciens, ouvriers et agents de service (ATOS) aux régions et départements pour l'exercice de leurs compétences respectives, la proximité de l'autorité hiérarchique étant garante d'une meilleure efficacité. L'exemple des agents techniques (ATSEM) employés par les communes dans les écoles primaires ne peut à cet égard que nous y encourager. En outre, la compétence en matière de médecine scolaire et des personnels qui y concourent doit revenir au département, car le niveau départemental est le plus opportun pour une intervention au plus près des besoins.

En parallèle, de nouvelles préoccupations en matière de sécurité sont apparues et ont donné lieu à la création récente d'instances dans des domaines qui ne relèvent pas de celles de l'Observatoire. On retiendra par exemple le rôle de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments instituée en avril 1999, pour ce qui concerne la sécurité alimentaire dans la restauration scolaire, ainsi que celui, depuis octobre 2000, du comité national de lutte contre la violence à l'école.

Liées à des contingences historiques bien précises, cette construction, certes pragmatique, trouve aujourd'hui ses limites dans des contraintes d'efficacité et de prise en compte globale de la gestion de la sécurité.

Transférer l'ensemble des personnels techniciens, ouvriers et agents de service (ATOS) aux régions et départements pour l'exercice de leurs compétences respectives.

C. LA NÉCESSITÉ D'UNE APPROCHE GLOBALE

Répondre à la demande de sécurité nécessite tout d'abord sur le plan institutionnel une mutualisation des compétences et des moyens. Il s'agit de donner un signal fort en direction tant des usagers que des personnels en vue d'instaurer une culture collective de la sécurité et de la prévention, à la fois au niveau national et dans chaque établissement.

1. Au niveau national : créer une agence française pour la sécurité

Afin d'évaluer globalement les besoins et d'aider à la définition des politiques en matière de sécurité à l'école, la création d'un organisme unique s'impose : ce pourrait être l'agence française pour la sécurité dans les établissements scolaires et universitaires (AFSSU). Organisme indépendant doté d'un statut d'établissement public administratif, cette agence doit rassembler les compétences et les capacités d'expertise dont les pouvoirs publics ont besoin pour fonder leur action de prévention des risques en milieu scolaire.

Sécurité des bâtiments, des équipements, sécurité sanitaire et alimentaire, sécurité des élèves et des personnels dans l'établissement, lutte contre les faits de violence, l'agence, qui se substitue aux différents organismes existants, dispose d'une compétence générale d'observation, d'évaluation, de proposition et de coordination des actions menées par les différents partenaires en matière de sécurité. De cette façon pourront être prises en compte de manière cohérente et globale des situations qui, à l'heure actuelle, souffrent de l'absence d'une vision d'ensemble.

L'agence fédère un réseau de correspondants placés dans chacune des académies auprès du recteur. Pour assurer une meilleure efficacité du dispositif, éviter la dispersion des moyens et notamment assurer le lien entre l'aspect prévention, information qui incombe à l'agence, et l'aspect contrôle qui est le seul outil permettant de rendre effective la prise en compte de la sécurité en milieu scolaire, ces correspondants sont constitués d'inspecteurs régionaux, qu'il s'agisse des inspecteurs pédagogiques régionaux « vie scolaire » ou des inspecteurs d'hygiène et de sécurité mis en place en 1999.

Elle valorise et diffuse les initiatives prises à l'échelon local dans les établissements.

Créer une agence française pour la sécurité dans les établissements scolaires et universitaires.

Instituer un correspondant de cette agence auprès du recteur dans chacune des académies.

2. Au niveau de l'établissement : développer la prévention et la culture de sécurité

Au-delà de la mise en place d'un organisme national, jouant un indispensable rôle de veille et d'animation, la politique de sécurité et de prévention doit être déclinée dans chaque établissement, au plus près de l'enfant. Y a-t-il, en effet, meilleur autre vecteur, que les éducateurs pour transmettre, en association avec les parents, l'impératif de la prévention et la culture de sécurité ?

C'est pour cette raison que l'ensemble de la communauté éducative, personnels enseignant et non enseignant, doit être impliqué dans le projet d'établissement, inspiré par la préoccupation de la sécurité et de la prévention. A cette fin, l'information et la formation des personnels figurent au premier plan des actions à entreprendre ou à intensifier.

Il s'agit, d'une part, de la formation initiale dispensée dans les IUFM auprès des futurs enseignants souvent démunis lorsqu'ils se trouvent confrontés aux problèmes de violence. D'autre part, la formation professionnelle de l'ensemble des personnels doit être développée afin d'améliorer le respect des règles élémentaires et les comportements en matière de sécurité. Il faut relever enfin que les actions de formation professionnelle à destination des enseignants et des chefs d'établissement consacrées à la prévention de la violence sont en développement. Il serait légitime d'en faire également bénéficier les autres adultes présents dans l'établissement, y compris les aides-éducateurs.

Par ailleurs, la mobilisation collective autour de la sécurité et de la prévention peut s'exprimer au quotidien de différentes manières, plus ou moins institutionnelles. S'agissant de la lutte contre la violence, l'ouverture d'un lieu de dialogue entre élèves et adultes de nature à briser la loi du silence doit ainsi être encouragée.

Sur le plan de la sécurité matérielle, il convient de mettre en avant le rôle joué par la commission d'hygiène et de sécurité, obligatoire dans les lycées techniques ou professionnels en application du décret du 27 novembre 1991.

Cette commission exerce un pouvoir de proposition « en vue de promouvoir la formation à la sécurité et de contribuer à l'amélioration des conditions d'hygiène et de sécurité dans les établissements, et notamment dans les ateliers ». Elle procède à des visites des locaux de l'établissement, notamment des ateliers, lorsqu'elle le juge utile et au moins une fois par an. Elle se réunit au moins une fois par trimestre à l'initiative du chef d'établissement qui en est le président.

Les résultats d'une enquête menée par l'Observatoire national de la sécurité au début de l'année scolaire 1999-2000 montrent « qu'un travail important de sensibilisation reste à faire », la commission d'hygiène et de sécurité n'étant effectivement en place que dans 60 % des établissements dans lesquels elle est obligatoire. En outre, dans 41 % d'entre eux, elle ne s'est réunie qu'une seule fois au cours de l'année scolaire.

« Convaincu qu'un bon fonctionnement de la commission d'hygiène et de sécurité contribue à une appropriation collective » de ces questions, l'Observatoire préconise dans son rapport 2000 sa généralisation à l'ensemble des établissements du second degré. Le rapporteur ne peut que souscrire à cette proposition, en soulignant la nécessité d'assurer son fonctionnement effectif une fois créée.

Mobiliser les établissements sur leur organisation interne afin de promouvoir une culture globale de la sécurité  en associant les parents.

Mettre en _uvre une véritable politique de formation professionnelle pour l'ensemble des personnels en matière d'hygiène et de sécurité.

Intégrer la problématique de la sécurité et son corollaire, la lutte contre la violence, à la formation initiale dispensée dans les IUFM.

Mettre en _uvre une véritable éducation à la sécurité des élèves.

Créer des lieux de dialogue et de médiation au sein des établissements afin de rompre la loi du silence.

Généraliser l'obligation de créer et de réunir une commission d'hygiène et de sécurité dans les établissements du second degré.

II.- LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS

A. LA SÉCURITÉ DES BÂTIMENTS

1. Le parc immobilier

Avec une superficie d'environ 25 millions de m2 pour les écoles et 65 millions de m2 pour les collèges et lycées, le patrimoine accueillant des établissements d'enseignement présente une variété de bâtiments allant de constructions des siècles précédents jusqu'à ceux mettant en _uvre les partis pris architecturaux les plus audacieux et les technologies les plus modernes.

En ce qui concerne les écoles, leur nombre total est en diminution de plus de 30 % depuis cinquante ans. Cette évolution est cependant très différente selon que l'on considère les écoles maternelles ou primaires : si le nombre d'écoles maternelles a plus que quadruplé, les écoles primaires ont diminué de moitié.

Évolution du nombre d'écoles primaires depuis 1950

France métropolitaine

1950

1951

1960

1961

1970

1971

1980

1981

1990

1991

1998

1999

 

Public

3 788

5 920

9 336

15 721

18 436

18 352

Ecoles maternelles

Privé

198

239

281

359

414

277

 

Sous-total

3 986

6 159

9 617

16 080

18 850

18 629

 

Public

69 970

74 917

56 343

44 981

38 227

34 433

Ecoles élémentaires1

Privé

10 982

9 906

8 592

6 619

5 904

5 429

 

Sous-total

80 952

84 823

64 935

51 600

44 131

39 862

Total écoles primaires

84 938

90 962

74 552

67 680

62 981

58 491

Source : MEN-Direction du développement et de la programmation

Au-delà du nombre d'établissements, on constate une forte concentration des effectifs dans les établissements accueillant entre 50 et 200 élèves.

Répartition des écoles selon le nombre d'élèves

France métropolitaine

Année 1998-1999

Nombre d'élèves

   

1-25

26-50

51-100

101-200

201-400

400 et +

Total

Public

maternelles

1 226

2 306

7 270

6 950

600

0

18 352

 

élémentaires

5 974

5 594

7 551

9 923

5 173

154

34 369

 

spéciales

11

26

18

4

5

0

64

Total public

 

7 211

7 926

14 839

16 877

5778

154

52 785

Privé

maternelles

25

42

112

88

10

0

277

 

élémentaires

307

672

1 235

1 610

1 326

269

5 419

 

spéciales

3

5

2

0

0

0

10

Total privé

335

719

1 349

1 698

1 336

269

5 706

Total public + privé

7 546

8 645

16 188

18 575

7 114

423

58 491

Source : MEN-Direction du développement et de la programmation

S'agissant du second degré, les quelque 11 052 établissements recensés en 1998-1999 (dont 4 947 collèges et 2 545 lycées publics) occupent près de 36 000 bâtiments, soit en moyenne 4,7 bâtiments et 9 000 m2 par établissement et 4 bâtiments et 5 800 m2 pour les seuls collèges.

L'évolution de la construction, qui permet de distinguer globalement trois grandes périodes, avant 1960, de 1961 à 1980 et de 1981 à 1996, reflète à la fois l'évolution démographique, l'allongement de la scolarité et l'augmentation du nombre de lycéens à compter de 1985. En effet, plus de la moitié (57 %, soit 20 676 bâtiments) de l'ensemble du parc immobilier est constituée de constructions réalisées entre 1961 et 1980, contre 17 % (6 079 bâtiments) antérieures à 1 961. Quant à la période 1981-1996, on dénombre la construction de 9 170 bâtiments, soit 26 % du parc.

Évolution du parc immobilier des établissements d'enseignement public du second degré

Nombre de bâtiments construits

Collèges

Lycées

L.E.P.

Cités scolaires

EREA1

ERDP

TOTAL

Avant 1900

850

562

280

352

27

2 071

De 1901 à 1950

622

343

245

270

25

1 505

De 1951 à 1960

866

578

418

610

31

2 503

De 1961 à 1970

5 627

1 457

1 097

2 195

219

10 595

De 1971 à 1980

7 297

722

1 069

810

183

10 081

De 1981 à 1990

2 794

907

672

370

43

4 786

De 1991 à 1994

1 452

896

442

380

43

3 213

En 1995 et 1996

665

227

139

130

10

1 171

Total

20 173

5 692

4 362

5 117

581

35 925

             

Surface développée en m2

29 026 277

15 124 407

8 501 150

14 285 250

755 281

67 692 365

Source : MEN

Sur le plan architectural, les bâtiments traditionnels sont les plus anciens. Ils sont caractérisés par une implantation en centre de commune, une organisation de l'espace très simple, uniforme d'une école à l'autre. Par la suite, l'évolution de la pédagogie dans les années 1960 et 1970 n'a pas manqué d'influer sur l'architecture. Des structures plus souples, susceptibles de varier en fonction de l'importance du groupe d'élèves ont ainsi favorisé une nouvelle répartition des espaces séparés par des cloisons amovibles ou démontables à hautes performances techniques (notamment en ce qui concerne le feu, l'acoustique, la résistance au choc et à l'abrasion) et l'augmentation du nombre de locaux spécialisés (salles audiovisuelles, laboratoires de langues,...), à l'exception des équipements sportifs qui n'ont pas bénéficié des mêmes efforts.

Trois tendances architecturales se dessinent entre 1965 et 1980 :

- une première période avec des bâtiments linéaires de grande longueur à trois ou quatre niveaux ;

- une deuxième période caractérisée par des groupements de bâtiments autour d'un centre de vie plus attractif ;

- enfin des bâtiments de dimensions plus réduites et de hauteurs diversifiées, dotés de patios, aires de jeux...

Nature des constructions réalisées de 1964 à 1981

dans le second degré

Procédés métalliques

871

27 %

Procédés mixtes

(béton + métal)

101

3 %

Procédés béton

2303

70 %

Total

3275

100 %

Source : Observatoire national de la sécurité

Au surplus, sous l'impulsion de la politique des « grands travaux », dans les années 1980, le primat de la qualité architecturale gagne les collectivités publiques, les ministères bâtisseurs étant invités à mettre en chantier des projets exemplaires quant à leur qualité architecturale afin qu'ils puissent servir de référence aux nouveaux maîtres d'ouvrage après la décentralisation. Le ministère de l'éducation nationale a ainsi entrepris la réalisation de vingt projets d'établissements scolaires et universitaires dénommés « opérations exemplaires de qualité architecturale ».

Avec la mise en _uvre de la décentralisation, s'ouvre une nouvelle période sur le plan architectural. En effet, au-delà du transfert des compétences et des financements aux départements et aux régions, on observe la disparition des références techniques et uniformes définies par le ministère de l'éducation nationale, ainsi d'ailleurs que celle de la mémoire centralisée du maître d'ouvrage unique. Les transferts de compétences conduisent alors le maître d'ouvrage à déterminer ce qu'il souhaite pour les établissements qu'il construit ou réhabilite dans le seul respect des normes s'appliquant aux constructions publiques. La diversification de la commande met donc fin aux modèles standards au profit de la créativité des architectes.

Si la créativité de l'architecture scolaire est ainsi devenue plus libre sous l'effet de la décentralisation, elle s'est toutefois trouvée dans le même temps confrontée à une multiplication des contrôles. A tel point que l'on constate depuis quelques années une évolution qui privilégie au contraire la fonctionnalité par rapport à la pure esthétique architecturale.

2. Les efforts financiers en faveur de la sécurité

Avec un montant cumulé respectif de plus de 146 milliards de francs pour les régions et de 91,5 milliards de francs s'agissant des départements, les collectivités locales ont consenti de 1986 à 1998, du fait de la décentralisation, un effort d'investissement considérable tant en matière de construction que de rénovation des établissements scolaires. Cependant, l'ampleur des besoins dans le domaine de la sécurité a conduit, à plusieurs reprises, l'Etat à mettre en place des dispositifs spécifiques d'aide aux collectivités territoriales.

a) 1994-1999 : le plan de mise en sécurité des établissements scolaires

La prise de conscience des pouvoirs publics à la suite du rapport Gouteyron s'est traduite par un programme exceptionnel de rénovation :

· Une enveloppe de prêts bonifiés a été mise à la disposition des collectivités locales par l'Etat, pour un montant de 4 milliards de francs en 1994 et 8 milliards de francs en 1995. Cette politique de bonification visait notamment à accélérer la réalisation des travaux de sécurité dans les établissements scolaires du second degré.

En 1994, le montant des projets présentés par les collectivités locales pour les travaux de sécurité dans les lycées et collèges s'élevait à 7,5 milliards de francs, dont 4,9 milliards de francs pour les bâtiments à ossature métallique. En 1995, les projets des collectivités locales se sont élevés à près de 9 milliards de francs.

· L'Etat a par ailleurs apporté une aide exceptionnelle aux travaux de sécurité dans les établissements d'enseignement du premier degré, à raison de 500 millions de francs par an pendant cinq ans.

Une circulaire du 20 juillet 1994 a fixé les modalités de cette aide budgétaire de l'État. Compte tenu de la diversité des situations et du nombre d'établissements potentiellement concernés, il a été décidé de déconcentrer la procédure auprès des préfets. Ceux-ci se sont ainsi trouvés compétents pour assurer l'expertise des besoins, effectuer l'attribution des crédits et garantir le suivi des opérations.

Il apparaît cependant que le rythme de réalisation des travaux dans les écoles par les collectivités locales est lent, ainsi que le relève le rapporteur spécial des crédits des charges communes de la commission des finances de l'Assemblée nationale : « sur les 2 287 millions de francs d'autorisations de programme et 1 685 millions de francs de crédits de paiement délégués aux préfets par le ministère de l'intérieur au titre des exercices 1994 à 1999, le montant cumulé des paiements s'est élevé à 1 065,6 millions de francs à la clôture de l'exercice 1999, soit un taux de consommation des crédits de 63,2 %».2

Au sein de l'enveloppe totale de 2,5 milliards de francs prévue par l'Etat, un montant de 500 millions de francs a été réservé au titre des travaux de désamiantage des lycées et collèges. En effet, le Gouvernement a décidé, en 1996, d'apporter une aide aux collectivités locales pour financer, dans les établissements du premier et second degré, les travaux rendus obligatoires par le décret n° 96-97 du 7 février 1996 relatif à la protection de la population contre les risques liés à l'amiante. Si l'on ne peut que se réjouir d'une telle initiative, force est de constater que l'enveloppe ainsi prévue ne sera probablement pas suffisante pour éradiquer l'amiante et assurer la protection des élèves, des enseignants et des autres personnels.

b) 1998 : le plan d'urgence en faveur des lycées

A l'automne 1998, à la suite des manifestations de lycéens, a été lancé un plan d'action destiné à permettre la réalisation de travaux de construction ou d'aménagement pour améliorer la vie quotidienne dans les lycées par M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. L'État a décidé d'aider les régions à souscrire une enveloppe de prêts de 4 milliards de francs au total, en ouvrant, dans la loi de finances rectificative pour 1998 et dans la loi de finances initiale pour 1999 des crédits destinés à compenser partiellement le coût de ces emprunts.

Selon les termes de la circulaire interministérielle du 4 juin 1999, publiée au Journal officiel le 23 juin 1999, visant à présenter les objectifs et les procédures du plan d'urgence pour les lycées, « les sommes empruntées par les régions doivent permettre d'aménager des salles polyvalentes, des lieux de rencontres entre lycéens, enseignants et parents d'élèves, des locaux liés à la vie quotidienne des lycées (foyers, cafétérias,...) et d'améliorer les conditions de vie en internat ».

La répartition des 4 milliards de francs entre les régions est effectuée, pour une moitié, sur la base du montant de la dotation régionale d'équipement scolaire versée en 1998 à chaque région, pour l'autre moitié, sur la base des effectifs scolarisés, y compris les apprentis, en lycées à la rentrée scolaire 1998.

Les prêts, qui doivent être souscrits par la région au cours des quatre années allant de 1999 à 2002, pour un montant annuel correspondant au maximum à 25 % de l'enveloppe, viennent à l'appui d'une programmation quadriennale de travaux.

3. Les règles et les contrôles en matière de constructions scolaires

a) Les règles applicables

Les constructions scolaires, comme l'ensemble des contrats passés par les collectivités publiques en vue de réaliser des travaux, sont soumises aux règles des marchés publics pour, à la fois, garantir le meilleur choix possible et traiter les entreprises de manière équitable. Jugées assez souvent comme trop contraignantes voire paralysantes, les règles qui encadrent la passation des marchés publics sont en réalité diversement appréciées, ainsi que le souligne l'Observatoire : « si les maîtres d'ouvrage et maîtres d'_uvre connaissent parfaitement la réglementation, on peut cependant constater chez les utilisateurs des locaux scolaires et chez les parents d'élèves des notions par trop sommaires des règles en vigueur et des missions des administrations. Or, dans le domaine des procédures qui encadrent la réalisation des constructions scolaires, une culture mieux partagée s'impose aussi»1.

S'agissant plus particulièrement de la sécurité, tout établissement, quelle que soit la nature de son exploitation, est un lieu favorable au développement d'un certain nombre de risques dès lors qu'il reçoit du public. Un établissement d'enseignement est un lieu d'autant plus sensible qu'il accueille des enfants ou adolescents, dont la jeunesse peut amplifier les risques en favorisant des comportements inattendus. Le système éducatif doit donc inciter à un comportement civique intégrant l'esprit de sécurité qui permettra aux jeunes d'acquérir des réflexes adaptables en toute circonstance.

Cela justifie le soin qui doit être apporté aux constructions scolaires. En outre, la maintenance à titre préventif tant des bâtiments que des équipements s'impose. A l'heure actuelle, les constructions scolaires ne font pas l'objet de mesures particulières sur le plan technique et sont soumises aux règles générales applicables aux constructions accueillant du public :

- le code de l'urbanisme, le code de la construction et de l'habitation qui fixent les grands principes ;

- les réglementations spécifiques telles que l'accessibilité aux personnes handicapées, la protection de l'environnement, l'élimination des déchets ;

- les règles plus techniques correspondant à certains risques : le règlement de sécurité contre l'incendie, le règlement sanitaire départemental, la réglementation sur la limitation du bruit ;

- les instructions techniques, normes et documents techniques unifiés (DTU).

b) Les contrôles

La loi du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l'assurance dans le domaine de la construction rend obligatoire, au moment de leur réalisation, le contrôle technique des travaux de construction neuve ou de réhabilitation, qui incombe au maître d'ouvrage.

Elle ne prévoit pas pour autant de vérifications périodiques afin d'aider le maître d'ouvrage ou l'exploitant à déceler des anomalies survenant au cours de la vie du bâtiment qui pourraient engendrer un risque pour l'usager. A défaut de réglementation, le maître d'ouvrage peut toutefois décider d'une auscultation périodique dans le cadre d'une démarche de maintenance préalablement déterminée.

A l'issue de travaux, un établissement recevant du public (ERP) ne peut ouvrir qu'après avis de la commission de sécurité compétente. Après la mise en service des locaux, la commission de sécurité formule également des avis à l'occasion de visites périodiques, tandis que le bureau de contrôle procède à la vérification, selon la périodicité réglementaire, du maintien en bon état de fonctionnement des installations techniques (électricité, éclairage, gaz, ascenseurs...). Mais c'est au directeur d'école ou au chef d'établissement qu'il revient alors de veiller au maintien en bon état des équipements et du bâtiment.

Les compétences de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité, fixées par le décret du 8 mars 1995, sont limitées à cinq domaines bien définis :

- les règles de prévention dans les ERP, les immeubles de grande hauteur et, dans certains cas, les lieux de travail ;

- l'accessibilité aux personnes handicapées dans les ERP ;

- l'homologation des enceintes sportives ;

- les prescriptions d'information et d'alerte dans certains campings ;

- les feux de forêt.

Outre le contrôle technique de réalisation des travaux qui incombe au maître d'ouvrage, un contrôle de solidité, confié aux contrôleurs techniques agréés par le ministère de l'équipement, est prévu conformément aux opérations de construction définies par la loi du 4 janvier 1978, pour la réalisation de certains ERP et des immeubles de grande hauteur. Les contrôleurs techniques ont alors pour seule mission de fournir des avis au maître d'ouvrage, sans assurer la vérification des préconisations, dont celui-ci est seul responsable.

En réalité, la commission de sécurité se borne à prendre acte de la réalité de l'intervention de ces contrôles. Le décret du 8 mars 1995 rappelle en effet expressément que la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité n'a pas compétence pour vérifier la solidité d'un ouvrage. Elle ne peut pas davantage apprécier la motivation et la pertinence technique des conclusions des organismes agréés.

S'agissant de l'absence de contrôle périodique de solidité des structures, il convient de rappeler la position prise par l'Observatoire dans son rapport annuel 1999 : « l'actualité a montré aussi que faute de suivi régulier, les bâtiments pouvaient se dégrader au point de mettre en danger la sécurité des personnes ». Prolongeant une réflexion engagée en 1994 dans le cadre de la commission Schléret, l'Observatoire s'interroge sur le contrôle périodique de la solidité des bâtiments pour lequel la commission de sécurité incendie n'est pas compétente et qui, en l'état actuel de la réglementation, n'est pas obligatoire. Le rapporteur soutient pleinement sa conclusion sur la nécessité d'un contrôle plus rigoureux des bâtiments et de tous les équipements ainsi que de leur évolution.

En revanche, le contrôle imposé au titre de la sécurité des personnes contre les risques d'incendie par le code de la construction et de l'habitat est plus étendu. Pour autant, les avis des commissions ne constituent qu'un éclairage technique mis à la disposition de l'autorité investie du pouvoir de police.

Les commissions compétentes examinent donc le contenu des rapports des organismes agréés ou des techniciens qualifiés qui doivent leur être remis avant la visite. L'Observatoire relève à cet égard des difficultés de compréhension et de communication entre les commissions de sécurité et les maîtres d'ouvrage : « les conclusions, avis et prescriptions des commissions de sécurité sont souvent exprimées en termes réglementaires qui pour les situations complexes, apparaissent sur le terrain difficilement traduisibles en termes opérationnels » 3. Il souligne la nécessité d'un dialogue permanent qui ne se borne pas à des prescriptions motivant des avis défavorables.

Rendre obligatoire un « contrôle technique » périodique de solidité des bâtiments, de conformité et d'entretien des équipements.

4. Le risque incendie

a) « Constructions métalliques » et « constructions modulaires »

Le recensement des incendies survenus au cours des trente dernières années révèle qu'en moyenne un incendie par an détruit un bâtiment d'enseignement. Entre le 1er janvier 1971 et le 15 novembre 1999 ont été ainsi dénombrés 33 incendies détruisant en tout ou partie des bâtiments : 5 concernant des écoles, 17 des collèges, 9 des lycées et 2 des universités.

La moitié (16) de ces sinistres étaient d'origine volontaire, 12 d'origine inconnue, et 3 d'origine accidentelle, l'origine des trois plus récents demeurant inconnue. On constate que les sinistres d'origine volontaire ont touché principalement des bâtiments industrialisés à structure métallique. Ce qui pourrait laisser penser que ces bâtiments, appelés abusivement « Pailleron », attirent tout particulièrement les actes de malveillance.

Est-il besoin de rappeler que, depuis le tragique incendie du collège de la rue Edouard Pailleron à Paris en 1973 qui avait causé la mort de 16 élèves et de 4 adultes, les constructions scolaires, réalisées entre 1960 et 1975 à partir des procédés industrialisés métalliques, sont désignées très fréquemment sous l'appellation « Pailleron » ?

Réalisé selon le procédé dit de « constructions modulaires », ce bâtiment présentait les caractéristiques d'un procédé mixte comprenant une structure métallique avec des panneaux de façade en béton, les toitures et les cloisons étant en panneaux de bois.

En réalité, cette appellation désigne à la fois les bâtiments de type « constructions modulaires » et, de manière impropre, l'ensemble des constructions à structure métallique. En effet, le millier d'établissements à structure métallique construit par l'Etat comprenait seulement 57 bâtiments scolaires construits selon le procédé « constructions modulaires. » 33 sont encore en service aujourd'hui après avoir fait l'objet de travaux importants, les autres ayant été détruits ou reconstruits.

Dès lors qu'ils sont utilisés avec un avis favorable des commissions de sécurité, qu'ils sont entretenus correctement, leur réputation dangereuse n'est plus justifiée. Mais la vigilance du propriétaire et le comportement responsable des occupants restent toujours de rigueur comme dans tout autre bâtiment.

En revanche, l'étude des bâtiments à structure métallique, particulièrement exposés au risque incendie, effectuée par l'Observatoire en 19994, donne des résultats mitigés : en effet, si 24 % d'entre d'eux ont été démolis et 50 % rénovés ou réhabilités, 25,8 % n'ont pas fait l'objet de travaux importants signalés et 6 % (30 établissements) continuent de fonctionner en dépit d'un avis défavorable des commissions de sécurité compétentes.

b) Le cas particulier des internats

Dans son rapport annuel pour l'année 2000, l'Observatoire déplore tout particulièrement qu'un service d'internat soit encore en fonctionnement dans 31 bâtiments à structure métallique susceptible de ne pas avoir de stabilité au feu assurée. D'autant plus que dès 1994, la commission d'évaluation et de proposition pour la sécurité des établissements scolaires faisait figurer au premier rang de ses propositions la suppression de tels établissements. En dépit de la baisse régulière des effectifs depuis les années 1970, la question spécifique des internats mérite d'être examinée, au moins pour deux raisons : non seulement ils doivent satisfaire, étant donné leur fonction d'hébergement, à des conditions de sécurité plus exigeantes que des « établissements de jour », mais surtout une vigilance accrue s'impose au moment où se met en place une politique de relance de ce type d'hébergement à visée éducative en direction des adolescents en proie à des difficultés familiales, sociales ou scolaires, dans le cadre de la politique de lutte contre la violence. En 1998-1999, moins de 5 %, soit 273 100 élèves, étaient hébergés dans les établissements du second degré publics et privés, dont 3,79 % d'entre eux dans le secteur public.

Externes, demi-pensionnaires, internes dans les établissements

du second degré en 1998-1999 (France métropolitaine)

 

Lycées + collèges + LP (1)

 
 

1er cycle

(6e à 3e, CPA, CLIPA, UPI, classes-relais)

Second cycle professionnel

Second cycle général et technologique (2)

CGPE

STS

Formations complémentaires

SEGPA + classes ateliers

EREA

Total

(3)

Dont

jeunes filles

Public (nombre) :

Externes libres

Externes surveillés

Demi-pensionnaires

Internes externés

Internes

1 052 714

4 558

1 442 511

173

11 760

207 541

655

269 208

351

75 377

380 405

2 678

713 352

431

74 922

95 903

455

91 095

5 116

17 263

712

-

392

2

44

41 436

251

60 792

-

828

402

17

4 901

-

6 461

1 179 113

8 614

2 582 251

6 073

186 655

915 176

4 389

1 283 156

1 867

76 038

Total

2 511 716

553 132

1 171 788

209 832

1 150

103 307

11 781

4 562 706

2 280 626

Public (%) :

Externes (4)

Demi-pensionnaires

Internes

Privé (nombre) :

Externes libres

Externes surveillés

Demi-pensionnaires

Internes externés

Internes

42,1

57,4

0,5

226 900

18 868

382 342

1 128

27 803

37,6

48,7

13,7

85 151

3 038

50 226

1 221

15 495

32,7

60,9

6,4

142 760

7 287

127 849

1 393

29 610

45,9

43,4

10,7

43 176

1 025

6 921

963

2 263

61,9

34,1

4,0

828

7

304

53

171

40,4

58,8

0,8

754

112

2 433

2

282

3,6

41,6

54,8

-

-

-

-

-

39,2

56,6

4,2

499 569

30 337

570 075

4 760

75 624

40,3

56,3

3,4

273 717

15 899

274 610

1 490

28 621

Total

657 041

155 131

308 899

54 348

1 363

3 583

-

1 180 365

594 337

Privé (%) :

Externes (4)

Demi-pensionnaires

Internes (5)

Public + Privé (%) :

Externes

Demi-pensionnaires

Internes (5)

37,4

58,2

4,4

41,1

57,6

1,3

56,8

32,4

10,8

41,8

45,1

13,1

48,6

41,4

10,0

36,0

56,8

7,2

81,3

12,8

5,9

53,2

37,1

9,7

61,3

22,3

16,4

61,6

27,7

10,7

24,2

67,9

7,9

39,8

59,2

1,0

-

-

-

3,6

41,6

54,8

44,9

48,3

6,8

40,3

54,9

4,8

48,7

46,2

5,1

42,0

54,2

3,8

Source : MEN

(1) Non compris les SEGPA et les groupes de classes-ateliers des collèges.

(2) Y compris préparations diverses.

(3) Y compris les CLIPA, les élèves scolarisés au titre de la loi quinquennale, en unité pédagogique d'intégration (UPI) ou en classes-relais.

(4) Y compris externes surveillés.

(5) Y compris internes « externés ».

Le parc des 2 073 bâtiments d'internats accueillant près de 148 000 internes, étudié par l'Observatoire en 2000, est constitué à 70 % de bâtiments construits avant 1975. Outre leur ancienneté -voire leur vétusté, l'organisation de la sécurité se trouve compliquée par le caractère souvent multifonctionnel des bâtiments dans lesquels ils sont installés, les niveaux réservés au sommeil étant majoritairement aménagés dans les étages les plus élevés.

De fait, en matière de surveillance et de prévention, les travaux de l'Observatoire5 font ressortir « l'insuffisance du respect du dispositif réglementaire dont pourtant la stricte application serait de nature à assurer une meilleure prise en compte des risques. »

Ainsi, la périodicité des exercices d'évacuation est particulièrement préoccupante puisque pour seulement 16 % des bâtiments l'obligation annuelle d'organisation de trois exercices - dont un dans le mois qui suit la rentrée, est respectée. De même se pose le problème du moment des exercices puisque dans 36 % seulement des bâtiments les exercices d'évacuation sont réalisés entre 22 heures et 6 heures dans les conditions réglementaires d'évacuation de nuit.

En outre, 29 % d'entre eux n'ont réalisé aucun exercice d'évacuation depuis trois ans. De même, le système d'alarme est insuffisant : en effet, 7 % des bâtiments ne disposent pas de système de détection automatique et seulement 39 % des chambres en sont pourvues. Au surplus, plus du quart d'entre eux ne disposent pas de déclencheur manuel (bris de glace).

Au total, il est inadmissible que 5 % des internats continuent à fonctionner malgré un avis défavorable de la commission de sécurité.

Face à un tel constat, le ministre de l'éducation ne pouvait faire moins que de se pencher sur la question : de fait, à la fin du mois de décembre 2000, il a demandé aux recteurs concernés d'examiner, avec les collectivités locales, les conditions dans lesquelles les internats situés dans des bâtiments à structure métallique pourront être « rapidement fermés et reconstruits », après avoir souligné que la partie la plus importante des dysfonctionnements « relève de l'exploitation quotidienne de ces structures, c'est à dire de la responsabilité des chefs d'établissement ».

Fermer sans délai les internats installés non seulement dans les bâtiments à structure métallique, mais également dans des bâtiments vétustes.

Accélérer la construction ou la rénovation d'internats et de structures d'accueil des adolescents en difficulté.

Faire procéder aux exercices réglementaires d'alerte préventive.

Bilan de la tempête de décembre 1999

La tempête de 1999 a révélé les efforts à fournir tant en matière de réglementation des constructions que de procédures d'alerte et de comportement.

A la suite de la tempête de décembre 1999, la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire avait demandé à l'Observatoire un recensement avec typologie des types d'établissements et des principaux dommages constatés, assorti de propositions en matière de politique de prévention.

L'enquête, d'une durée de six mois, intègre différents paramètres, tels que la date de construction, la taille de l'établissement, le nombre, la structure, la configuration de bâtiments. Il s'agissait de faire la part entre, d'un côté, les dégâts probablement renforcés par le vieillissement des constructions et l'état de leur maintenance et, de l'autre, ceux ayant affecté les constructions neuves.

L'estimation initiale de quelque mille établissements touchés a été largement dépassée. Au terme de l'enquête, l'observatoire en a dénombré 5 489 : 1 777 écoles publiques (32 % du total), 1 720 collèges (31 %), 1 248 lycées (23 %) ainsi que 578 établissements privés et 166 sites universitaires.

Il faut cependant noter que 65 % des établissements n'ont subi que de faibles dégâts (moins de 5 % de dommages), 26 % des dégâts limités (5 à 30 % de dommages) et 9 % des dégâts étendus (plus de 30 % de dommages) portant essentiellement sur les éléments ajoutés aux toitures (auvents, cheminées, antennes, faîtages) et les parties les plus fragiles comme les vitres. Dans l'ensemble, les structures porteuses ont bien résisté contrairement aux éléments annexes, c'est pourquoi les écoles primaires, généralement petites et de construction simple, ont été les moins touchées.

L'Observatoire a également étudié la typologie des dégâts selon l'âge des établissements. Ils se répartissent de manière assez indistincte, les dommages les plus étendus ayant cependant affecté un tout petit peu plus les bâtiments antérieurs à 1960 et les tout récents, postérieurs à 1990, que les autres.

Il évalue le coût des dégâts, y compris les dégâts indirects comme la chute d'arbres ou les dégradations dues à des projectiles divers, à 600 millions de francs pour les établissements scolaires, répartis dans 69 départements. La région Ile-de-France représente à elle seule, 60 % de ce montant.

La moitié de cette somme concerne 5 % d'établissements durement touchés, du fait de constructions vulnérables et de défauts probables dans la conception ou la réalisation, voire des malfaçons. Le coût moyen des travaux est en effet évalué entre 115 et 125 000 F pour une école ou un collège, 250 000 F pour un lycée professionnel et 400 000 F pour un lycée général. Cette moyenne cache des disparités pouvant aller de quelques dizaines de milliers de francs seulement à 10 ou 15 millions de francs pour un seul établissement.

L'Observatoire estime que la fragilisation de quelques ouvrages, même apparue dans des circonstances exceptionnelles, pose un problème sérieux et souligne les points suivants :

- les éléments éminemment fragiles que constituent certaines excroissances du bâtiment nécessitent une analyse de leur conception et de leur réalisation ainsi qu'une réflexion sur les mesures à prendre en cas de défaillance ;

- les grands éléments de couverture ont également montré à quel point en cas de faiblesse, la rupture en chaîne pouvait entraîner des désordres majeurs ;

- les emplacements des constructions scolaires sont susceptibles d'aggraver la violence des vents sur certains bâtiments.

Son rapport met l'accent sur le bon sens qui devrait présider aux choix des maîtres d'ouvrage : « On n'insistera jamais trop sur quelques facteurs essentiels conditionnant la qualité, la solidité et la pérennité des ouvrages. Tout d'abord le facteur temps indispensable à la réalisation des études sans précipitation préjudiciable dans le démarrage des travaux. La valeur accordée au processus d'exécution et la qualité de la maîtrise d'_uvre. Les dispositions prises dès l'établissement du cahier des charges en matière de maintenance préventive allant jusqu'à prévoir les éléments devant subir par la suite des contrôles réguliers. Toutes ces dispositions conduisant au niveau des procédures à privilégier la notion de mieux disant lors de la passation des marchés publics. Ce qui conduit à reléguer au rang des équations impossibles l'idée de pouvoir construire vite, bien et pas cher. »

Par ailleurs, l'Observatoire met en lumière les faiblesses des dispositifs d'alerte météorologique : « Le dispositif d'alerte nationale qui en la circonstance n'a pas été appliqué, paraît d'autant moins satisfaisant qu'il demeure mal connu de la population et étranger à ses réflexes. Par chance ces phénomènes exceptionnels sont survenus à une période de fermeture des établissements scolaires. Il conviendra donc dorénavant de mieux anticiper les conséquences de ce type de risque majeur en révisant l'ensemble des systèmes d'alerte avec une attention particulière portée à la sécurité des élèves et des personnels.

« Au cas où, en dépit de toutes les mesures de vigilance, des vents d'intensité extrême prendraient au dépourvu des établissements scolaires en activité, le dispositif de protection déclenché par le directeur d'école ou le chef d'établissement ne saurait souffrir d'improvisation. Le projet sécurité de chaque unité scolaire qui ne doit pas se borner au risque incendie devra faire l'objet d'un effort général. Effort des pouvoirs publics permettant la réactualisation des supports nécessaires à une bonne information, rappel à tous les responsables des outils qui sont déjà à leur disposition. Outils qu'il importe non seulement de connaître, mais surtout d'expérimenter par des exercices bien préparés, réalisés dans une logique très différente de l'évacuation et visant dans la plupart des cas une mise à l'abri, soit par confinement, soit par d'autres modes de protection des personnes. La conclusion de ce rapport se doit d'insister sur cet aspect encore trop méconnu de la culture sécurité. C'est tout le sens de la démarche qu'il nous faudra poursuivre ensemble, quelle que soit notre place par rapport à la communauté scolaire dans son environnement local et national. »

Saisi par le rapporteur sur les suites qu'il entendait donner à ce rapport, le ministre de l'éducation nationale a notamment apporté les précisions suivantes :

« S'agissant des procédures de prévention et d'alerte, le ministre a validé les recommandations du rapport Schléret et donné les orientations suivantes aux directions et services académiques :

- remettre à jour des documents et guides utiles destinés aux établissements et équipes éducatives. Dans ce cadre, un travail pédagogique de rappel des préconisations du plan « Sesam » sera effectué.

- réactiver le réseau des coordonnateurs académiques risques majeurs ;

- mobiliser les établissements sur leur organisation interne, afin de promouvoir une culture globale de la sécurité. »

Le ministère rappelle en outre que « l'instance nationale d'évaluation pilotée par François Ulivieri, ingénieur général des Ponts et Chaussées, créée au lendemain de la tempête à la demande du ministre de l'équipement, des transports et du logement, a pour mission d'évaluer l'efficacité du corpus de textes réglementaires au regard des effets du vent dans des conditions extrêmes observées. Des propositions de modifications des règles de construction pourront être faites et bien sûr applicables aux établissements scolaires.

« Les questions liées à la tempête de 1999 ne constituent qu'un aspect d'un problème plus général de sécurité et de conception des établissements. Ainsi dès l'automne 2000, dans un cadre plus global, le ministre de l'éducation nationale a souhaité engager avec les collectivités une réflexion sur l'architecture scolaire, réflexion devant embrasser plusieurs champs : esthétique, fonctionnalité et adaptation à l'évolution des pratiques pédagogiques, et naturellement, sécurité et confort. Les recommandations des rapports Schléret et Ulivieri seront dans ce cadre naturellement prises en compte. »

B. LA SÉCURITÉ DES ÉQUIPEMENTS

1. Les équipements sportifs

L'originalité des équipements sportifs tient à leur utilisation partagée par les établissements scolaires et les clubs sportifs et à la multiplicité des acteurs impliqués du fait notamment de la décentralisation : si la mise en _uvre des activités physiques et sportives dans le cadre scolaires est du ressort de l'Etat, ce dernier sollicite de plus en plus les collectivités locales dont le concours est en outre amené à croître avec la politique d'aménagement des rythmes de l'enfant visant à permettre la pratique d'activités sportives en continuité avec les horaires scolaires.

Malgré la répartition des compétences issue des lois de décentralisation, les équipements sportifs utilisés dans le cadre scolaire indifféremment par les établissements du premier ou du second degré sont à 85 % la propriété des communes. En effet, compte tenu du souci de rationalisation des installations et du coût élevé des investissements, peu de collèges et de lycées disposent en réalité d'infrastructures intégrées pour la pratique de l'EPS.

Or, outre les risques encourus lors du trajet en raison de leur éloignement, le recours aux équipements extérieurs par les établissements scolaires se fait trop souvent de manière « sauvage » en l'absence de base contractuelle solide, permettant d'apporter des réponses aux questions de coûts, d'horaires d'utilisation, de gardiennage et d'entretien notamment.

L'état des lieux des équipements sportifs dressé par l'Observatoire de la sécurité dans son rapport 1999 est inquiétant : « le parc est globalement vieillissant. Souvent construit dans les années 1970, les équipements soumis aux carences de la maintenance se sont progressivement dégradés, ce qui génère des situations à risques :

« - Etat général des locaux : infiltrations d'eau, sols glissants, chute d'éléments, flocages, aires extérieures aux sols déformées, vitrages non protégés, obstacles sur les terrains, vestiaires et sanitaires inadéquats ;

« - Etat du matériel : absence ou insuffisance des fixations des buts, tapis et matelas de réception usés, matériels lourds non rangés, verrouillage des agrès insuffisants ;

« - Piscines : absence ou insuffisance de signalisation des profondeurs, sols glissants, non-transparence de l'eau, grilles de reprise des eaux inadaptées, local technique peu accessible, accès difficile à la coupure d'aspiration, retour des élèves vers le bassin. Absence de maître nageur sauveteur ;

« - Fonctionnement : fils arrachés, dénudés, chauffage et ventilation insuffisants, correction acoustique non maîtrisée, absence de gardiens, de téléphone, d'extincteurs, difficultés d'accès des secours, déplacements des élèves mal organisés ;

« - Comportements : non-respect des consignes et des règles normales de sécurité. »

Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner que 61 % des accidents scolaires se produisent au cours des activités d'éducation physiques et sportive. Consciente de la gravité de cette situation, l'Association des Maires de France souligne que la principale difficulté rencontrée par les communes, confrontées à la nécessité d'entretenir et de rénover les installations, tient aux coûts et aux modalités de financement. Le coût des rénovations à accomplir pour l'ensemble des stades, gymnases et piscines est ainsi estimé à environ 40 milliards de francs, la rénovation et la mise aux normes d'une seule aire de jeux s'élevant, selon l'Observatoire à environ 80 000 francs.

Par ailleurs, les travaux de rénovation sont souvent retardés ou différés à cause de la complexité des financements. Dans leur grande majorité, les maires considèrent que les communes ne peuvent continuer seules à assumer la charge de ces travaux. Ils souhaitent évoluer vers davantage de partenariat financier par voie de conventions avec les collectivités territoriales de rattachement des établissements utilisateurs. De leur côté, tout en étant favorables à la formalisation des relations entre les collectivités, les départements soulignent qu'ils apportent fréquemment des contreparties financières à l'utilisation des équipements par les collèges sous forme de subventions d'investissement.

Il faut se féliciter, à cet égard, de l'intervention récente du législateur dans ce sens. L'article 34 de la loi du 6 juillet 2000, modifiant la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives instaure en effet deux dispositifs très attendus de clarification des conditions d'utilisation des équipements sportifs.

En premier lieu, il est fait obligation de prévoir les équipements nécessaires à la pratique de l'éducation physique et sportive lors de la construction des établissements publics locaux d'enseignement. Ainsi que le soulignait le rapport de notre collègue, M. Patrick Leroy6, « cette disposition traduit de manière concrète le caractère obligatoire de l'éducation physique et sportive dans l'enseignement secondaire en opérant la liaison entre programmes et équipements. L'enseignement primaire dans lequel l'éducation physique et sportive revêt pourtant le même caractère obligatoire n'est pas inclus dans le dispositif puisqu'il n'existe pas de statut juridique propre aux établissement du premier degré et que cette question relève des compétences du conseil municipal. Cette nouvelle obligation ne vaut par ailleurs que pour les créations d'établissement, ce qui laisse entières les carences du parc existant et de manière particulièrement aiguë les conditions de sécurité insuffisantes de nombreuses installations. »

En second lieu, il est prévu la passation de conventions entre les établissements publics locaux d'enseignement, leur collectivité de rattachement et les propriétaires d'équipements sportifs afin de permettre la réalisation des programmes scolaires de l'éducation physique et sportive. Il s'agit donc de formaliser les rapports entre les différentes parties intéressées et de régler notamment les modalités de mise aux normes des équipements. Dans son rapport 1999, l'Observatoire, qui a élaboré un modèle type de convention, appelait de ses v_ux cette disposition, qualifiée « d'indispensable avancée ». Force est néanmoins de constater que plus de six mois après la promulgation de la loi, ces conventions tant attendues par les collectivités propriétaires des équipements ne sont pas encore mises en _uvre.

S'agissant de l'état des équipements, bien qu'il n'existe pas de données statistiques précises sur les accidents dus aux matériels, l'Observatoire a constaté depuis 1996, de nombreuses insuffisances tenant aux conditions d'hygiène et de sécurité. La principale difficulté tient à l'absence à la fois de référence normative (hormis les décrets du 4 juin 1996 et du 18 décembre 1996 relatifs respectivement aux cages de but et aux aires collectives de jeux), et d'instance habilitée à effectuer un contrôle.

Les collectivités propriétaires expriment, en outre, leur impuissance face aux expertises parfois contradictoires des cabinets et laboratoires spécialisés auxquels elles font appel pour assurer la mise en conformité de leurs équipements. L'AMF souligne ainsi que de telles difficultés se sont en particulier présentées lors de la mise en conformité consécutive au décret relatif aux aires de jeux, les communes se trouvant au surplus dans une situation d'inégalité de moyens. En réalité, les élus souhaitent être davantage associés à l'élaboration des normes en amont et disposer ainsi d'un référentiel de contrôle de sécurité, spécifique à chaque équipement, simple et transparent.

C'est la raison pour laquelle on ne peut que se féliciter de la publication en juin 2000 d'un Guide des matériels d'activité physique et sportive utilisés dans un cadre collectif : examen des points essentiels liés à la sécurité, élaboré à l'initiative du Laboratoire national d'essais et du Centre de recherche d'innovation et de transfert de technologie en sport et loisirs (CRITT) Sports-Loisirs de Châtellerault, avec le soutien de partenaires institutionnels, associatifs et professionnel. De fait, l'Observatoire relève que ce référentiel constitue un véritable « outil d'aide à la décision, à la gestion et au contrôle, à destination des propriétaires,...un outil d'information à destination des usagers en matière de maintenance ».

Les dispositions réglementaires existantes contribuent incontestablement à l'amélioration de la sécurité : le décret du 4 juin 1996 précité faisait ainsi obligation de vérifier toutes les installations de cages de but avant le 6 décembre 1996. Un an plus tard, une enquête conduite par l'Observatoire de la sécurité a constaté que seulement 10 % d'entre elles n'avaient pas été vérifiées. Une circulaire d'application de ce décret invite à procéder à une vérification régulière, tous les deux ans.

Toutefois, il faut veiller à conserver un équilibre entre les contraintes de la réglementation et la nécessité d'encourager les initiatives en matière d'activités scolaires ou périscolaires. Le précédent du décret fixant les prescriptions relatives aux aires collectives de jeux doit à cet égard donner à réfléchir. En effet, l'entrée en vigueur de ces prescriptions semble en pratique avoir abouti à la suppression d'un grand nombre d'aires collectives de jeux, parfois par réaction de prudence excessive. Or, on constate que les chocs brutaux entre enfants sont bien plus nombreux sur une aire de jeux sans équipements.

Les lacunes réglementaires en matière de sécurité des équipements sportifs s'accompagnent de l'absence d'instance spécifique habilitée à effectuer des contrôles. L'Observatoire de la sécurité plaide de longue date en faveur de la création de commissions départementales de la sécurité des installations et équipements sportifs relevant du ministère de l'équipement et susceptibles effectuer des contrôles. Cette piste mériterait sans doute une étude plus approfondie.

S'agissant de la sécurité de proximité, la rapidité du secours est un élément déterminant en cas d'accident, l'alerte devant alors pouvoir être immédiatement donnée vers les moyens de secours (pompiers-SAMU). En réalité, il ressort des enquêtes conduites par l'Observatoire de la sécurité que, au mépris des règles élémentaires de sécurité, dans près de 33 % des cas, les gymnases et stades ne sont pas équipés de téléphone. Aussi l'Observatoire recommande-t-il de prévoir de mettre systématiquement des téléphones portables à la disposition des enseignants d'éducation physique et sportive par les chefs d'établissement. Cette dotation leur permettrait sans doute également de faire face à des situations d'insécurité plus générales lorsqu'ils sont confrontés par exemple à des intrusions en l'absence de gardiennage des gymnases.

Formaliser par voie de conventions entre collectivités territoriales les conditions d'utilisation des équipements sportifs non intégrés.

Prévoir des équipements sportifs intégrés lors de la construction des établissements scolaires.

Doter les enseignants d'un téléphone portable pour toute activité extérieure à l'établissement.

2. Les équipements de l'enseignement technologique et professionnel

a) La mise en conformité des machines-outils

Dix ans après la publication de la directive communautaire du 30 novembre 1989 sur la sécurité des équipements de travail instaurant une obligation de mise en conformité de toutes les machines au 1er  janvier 1997, transposée par voie de décret du 11 janvier 1993 modifiant le code du travail, l'Observatoire constate avec satisfaction, dans son rapport 1999, que le parc des machines outils dans les lycées est en grande partie conforme aux dispositions prévues par la réglementation.

Si les interlocuteurs de la mission d'information s'accordent pour reconnaître que la mise en conformité a été accomplie à plus de 90 % dans les lycées du secteur public (à 80 % si l'on considère la conformité des équipements électriques), grâce aux efforts consentis par les régions qui ont élaboré des plans pluriannuels de mise en conformité des équipements, ils ne manquent pas de signaler les disparités existant entre régions -certaines régions telle en particulier que l'Auvergne accusant un réel retard-, parfois au sein d'une même région, et au surplus, selon les filières.

En dépit d'informations lacunaires, la dynamique de mise en conformité semble également à l'_uvre dans l'enseignement privé. Il est tout à fait regrettable, en revanche, que les données relatives à l'enseignement agricole n'aient été communiquées à l'Observatoire. D'autant que l'obligation de mise en conformité concernant les machines fixes ou portatives, étendue par le décret du 2 décembre 1998 aux machines mobiles et appareils de levage7, qui devra être satisfaite avant le 5 décembre 2002, concerne des équipements (tracteurs, engins de levage...) utilisés au premier chef dans les lycées agricoles, aquacoles et maritimes, ainsi que dans certaines filières des lycées techniques (bâtiment, automobile...).

Par ailleurs, il apparaît que la mise en conformité est loin d'être achevée dans les ateliers des collèges et les sections d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA). Les organisations syndicales d'enseignants entendues par la mission ont insisté sur le retard observé dans les SEGPA. L'Observatoire relève, dans son rapport 1999, que les machines dont l'emploi est proscrit par les programmes d'enseignement technique ont été soustraites du matériel des ateliers dans la majeure partie des établissements. Pour autant, leur remplacement ne semble pas avoir été assuré, les départements n'ayant pas fourni de ce point de vue des efforts financiers de même ampleur que les régions.

L'on ne peut que déplorer cette carence préjudiciable aux élèves des collèges et SEGPA. En effet, ces filières représentent l'ultime chance de formation pour des jeunes se trouvant en majorité en situation délicate sur le plan scolaire. Les priver de l'accomplissement, dans des conditions satisfaisantes, d'une formation leur permettant d'accéder à une qualification du niveau du CAP les expose à un risque réel d'exclusion professionnelle.

Taux de mise en conformité des machines-outils

et des équipements

ACADEMIES

Conformité des machines-outils en lycée et lycée professionnel

Conformité des équipements électriques

Conformité des machines-outils et des équipements en SEGPA (collège)

CAEN

95 %

100 %

 

CRETEIL

80 %

pas de réponse

100 %

DIJON

75 %

25 %

50 %

LILLE

90 %

50 %

60 %

LIMOGES

100 %

100 %

sauf physique appliquée

90 %

MONTPELLIER

100 %

50 %

70 %

NANTES

100 %

80 %

 

PARIS

100 %

pas de réponse

100 %

REIMS

100 %

100 %

 

RENNES

70% 

50 %

 

TOULOUSE

95% 

80 %

85 %

Source : enquête de l'Observatoire national de la Sécurité des établissements scolaires et d'enseignement supérieur, rapport 1999.

Une fois la rénovation du parc machines achevée, se pose la question de la maintenance. L'ensemble des interlocuteurs de la mission redoutent ainsi que les efforts de mise en conformité du parc machine restent vains si la maintenance n'est pas organisée. Ils insistent sur le fait que le contrôle et l'entretien régulier des machines sont un facteur de diminution des coûts à moyen et long terme. De fait, certaines régions ont engagé un plan de maintenance préventive. A titre d'exemple, la région Ile-de-France expérimente actuellement dans une douzaine de lycées une politique contractuelle de maintenance préventive. Cette démarche à caractère pédagogique a notamment pour but de sensibiliser les responsables des établissements, les chefs de travaux et les élèves à la sécurité.

En ce qui le concerne, convaincu de l'utilité de la maintenance préventive, le rapporteur préconise de faire figurer l'obligation de la mettre en _uvre dans les cahiers des charges lors de l'acquisition d'équipements ou de la réalisation de travaux.

Accélérer la mise en conformité des machines-outils dans les SEGPA.

Intégrer l'obligation de la maintenance préventive dès l'établissement du cahier des charges.

b) L'accès des mineurs aux machines dangereuses

Au-delà de la mise en conformité des machines, les difficultés liées aux conditions de leur utilisation par des élèves mineurs lorsqu'elles présentent un danger potentiel, ont retenu toute l'attention de la mission. L'Observatoire souligne ainsi dans son rapport 2000 que « même si la quasi-totalité des machines-outils des établissements scolaires est en conformité avec la réglementation en vigueur, le travail des élèves dans le respect de ladite réglementation n'en est pas pour autant acquis. »

Il convient de rappeler que le code du travail permet à l'inspecteur du travail d'autoriser, à titre dérogatoire, un mineur à accéder à des machines dont l'usage leur est proscrit en raison de leur dangerosité, sous réserve du respect d'un certain nombre de conditions : délivrance d'un avis favorable du médecin du travail ou du médecin chargé de la surveillance des élèves, autorisation du professeur ou du moniteur responsable, exercice d'un contrôle effectif par celui-ci. Renouvelable chaque année, cette dérogation à caractère personnel est révocable à tout moment si les conditions cessent d'être remplies.

En réalité, la mise en _uvre de ce dispositif rencontre différents obstacles qui conduisent à priver de nombreux élèves de l'accès aux machines. L'Observatoire recense dans son rapport 2000 une première série de difficultés tenant à la multiplicité des intervenants (médecin, formateur, inspecteur du travail), au nombre de demandes de dérogations découlant du caractère personnel et annuel de celles-ci, au délai nécessaire à leur obtention. Lors de son audition par la mission d'information, le syndicat Force Ouvrière a ainsi souligné que l'effectif insuffisant de médecins scolaires limite les possibilités de visite médicale et de délivrance des certificats d'aptitude. D'autant que l'organisation de la médecine scolaire ne permet pas nécessairement de procéder à la visite médicale au cours du premier trimestre. C'est la raison pour laquelle l'Observatoire s'interroge sur le principe de l'annualité de la dérogation.

En outre, l'application de la réglementation fait l'objet d'importantes disparités d'une direction départementale du travail et de l'emploi à l'autre. Il en va de même de son interprétation -souvent extensive- par les inspecteurs du travail. Au total, il peut arriver que l'application quelque peu erratique de la réglementation entraîne une rupture d'égalité assez incompréhensible, voire injustifiable pour les élèves et les établissements scolaires.

Au surplus, il est tout à fait déplorable que cette réglementation, supposée résoudre la tension entre deux impératifs tout aussi légitimes l'un que l'autre, à savoir l'impératif éducatif en terme d'apprentissage et l'impératif de sécurité des élèves, contribue au contraire à l'accroître au préjudice, en définitive, de ces derniers.

Ce conflit, qui tient également du différend entre deux administrations, ne pourrait-il pas être dépassé par la mise en place d'un dispositif spécifique pour les établissements scolaires (sur le plan réglementaire, en matière de contrôle...) dès lors que les machines y sont utilisées exclusivement comme support aux activités pédagogiques ? Faut-il cependant privilégier la formation sur la sécurité ?

Telle est la question qui se pose avec d'autant plus d'acuité qu'une démarche éducative bien conduite devrait intégrer la formation des jeunes à la sécurité, que la responsabilité pénale de l'enseignant et celle du chef d'établissement seraient engagées en cas d'accident, que ce dernier n'est pas toujours en mesure d'apprécier les risques encourus par les élèves et qu'il n'a pas nécessairement les moyens budgétaires de faire procéder à la vérification par un organisme agréé des machines sur lesquelles pèse un soupçon.

c) Les autres risques

Dans l'enseignement technologique et professionnel, les élèves sont exposés, en parallèle des machines, à d'autres risques non négligeables, tel le risque électrique. De fait, ce dernier est encore mal appréhendé, qu'il s'agisse de la mise en conformité des installations ou de la réglementation applicable aux élèves. Il semblerait en particulier que les chefs d'établissements, de travaux, les enseignants, gestionnaires et collectivités locales ne sachent pas toujours comment appliquer le code du travail dans les ateliers des établissements scolaires sur ce point. Une meilleure formation des enseignants et des élèves à la prévention des risques d'origine électrique s'impose donc.

Par ailleurs, les risques d'une exposition à des produits chimiques nocifs ou au bruit, directement responsables de certaines pathologies, doivent être considérés avec davantage d'attention dans les filières concernées (carrosserie, chaudronnerie, etc). La collecte des déchets toxiques laisse ainsi fréquemment à désirer.

Au surplus, il convient de rendre effectifs le port des équipements de protection individuelle et celui d'une tenue de travail adapté, l'exemple devant être donné par l'enseignant responsable. Enfin, de l'avis général des organisations syndicales entendues par la mission, l'environnement du poste de travail devrait faire l'objet d'une meilleure prise en compte, en particulier en ce qui concerne l'ergonomie. Ces différents éléments pourraient utilement figurer dans le projet d'établissement.

Rendre effectif le port des équipements de protection individuelle et celui d'une tenue de travail adapté lors des travaux pratiques ou en ateliers.

III.- LA SÉCURITÉ DES PERSONNES

A. LES ACCIDENTS SCOLAIRES

Au cours de l'année scolaire 1999-2000, les accidents scolaires8 recensés par l'Observatoire, sur la base d'informations portant sur les deux tiers des élèves de l'enseignement primaire et secondaire, sont au nombre de 8 400 dans l'enseignement primaire et de 10 043 dans l'enseignement secondaire, ce qui représente une fréquence accidentelle (pourcentage d'élèves accidentés pour cent élèves scolarisé) globale de 0,39 %, soit 0,23 % dans l'enseignement primaire et 0,57 % dans l'enseignement secondaire. Si les données disponibles pour l'année 1998-1999 sont tout à fait comparables en ce qui concerne l'enseignement primaire, le nombre d'accidents survenus dans l'enseignement secondaire était en revanche sensiblement supérieur. Dans l'ensemble, 3 % seulement des accidents ont entraîné au cours des deux années considérées une hospitalisation supérieure à 48 heures.

L'analyse qualitative des accidents révèle sans surprise que, sur l'ensemble de la scolarité, les garçons sont en général plus souvent victimes d'accidents que les filles. De manière constante, on observe une évolution inversement proportionnelle de la fréquence des accidents avec la progression en âge dans le primaire (9 % des accidents survenant en petite section de maternelle contre 20 % en CM 2) et dans les collèges (30 % en classe de sixième contre 20 % en troisième). Le nombre d'accidents élevés en classe de sixième peut s'expliquer par le passage, pour des élèves encore jeunes, d'un dispositif très encadré à l'école primaire à un moindre encadrement au collège, en particulier au moment des transferts ou des sorties de salles de classe, et par les difficultés que rencontrent les enfants à s'adapter à des locaux plus vastes. Ce constat plaide d'ailleurs en faveur de l'aménagement de la transition entre le premier et le second degré et de l'adaptation des conditions d'accueil des élèves de sixième que préconise le rapporteur (cf. infra). Au total, le pourcentage (18,4 % pour l'année 1998-1999) des accidents survenus dans les couloirs ou escaliers est globalement élevé, en particulier si on le rapporte au temps de passage dans cette catégorie de locaux.

Dans l'enseignement primaire, cependant, c'est la cour de récréation qui constitue le principal lieu à risque, près des trois quarts des accidents s'étant produits au cours de l'année 1999-2000 durant les récréations, la nature du revêtement de sol constituant un facteur aggravant. On observe à cet égard que tant la cour de récréation que les couloirs représentent également les principaux lieux d'exposition de l'enfant à la violence des autres.

En revanche, dans le second degré, l'éducation physique et sportive concentre la grande majorité des accidents (61 %), en particulier au cours de la pratique des sports collectifs et de la gymnastique. D'une manière générale, les élèves concernés, âgés de moins de 14 ans, sont victimes de leur manque d'expertise dans l'activité. 30 % d'entre eux présentent un retard dans le déroulement de leur scolarité.

L'insuffisante surveillance des équipements extérieurs aux établissements est d'ailleurs déplorée par les enseignants. L'Observatoire insiste à juste titre sur les risques inadmissibles qui en découlent en ce qui concerne particulièrement l'enseignement de la natation : il ressort en effet des enquêtes effectuées en 1999, que dans 40 % des cas dans les départements d'Outre-mer et dans 5,5 % des cas en métropole, l'enseignement de la natation se fait en dehors de la présence pourtant obligatoire d'un maître-nageur sauveteur. Le rapporteur ne peut que souscrire avec force à la recommandation de l'Observatoire afin que des rappels élémentaires soient effectués auprès des inspecteurs régionaux, des chefs d'établissement et des enseignants.

S'agissant des lycées, l'enseignement professionnel présente un niveau de risque plus élevé que l'enseignement général. Un tiers des accidents recensés au cours de l'année 1999-2000 ont concerné des classes de BEP, alors que le nombre d'élèves de BEP ne représente qu'environ 25 % de la population lycéenne. Les deux tiers des victimes sont des garçons et 78 % des accidents surviennent dans les ateliers.

Dans l'ensemble, 27 % des accidents impliquent un tiers, un autre élève le plus souvent, sans pour autant qu'une responsabilité puisse être automatiquement imputée à celui-ci. Relevons enfin qu'un élément matériel entre en jeu dans 12 % des cas d'accidents, qu'il s'agisse d'un élément du bâtiment (vitre) ou d'un autre élément matériel. A cet égard, un dramatique accident a fait prendre conscience au cours du premier trimestre 2000-2001 de la nécessité de vérifier la sécurité les points d'ouverture des bâtiments, et en particulier les fenêtres situées dans des étages élevés.

Au total, il convient de noter que, dans la majorité des cas, le risque est connu, les accidents se produisant essentiellement lorsque le corps est exposé. D'où la nécessité à la fois de renforcer la présence et la surveillance adulte pour en prévenir au maximum la survenance et de transmettre aux élèves les notions fondamentales qui leur permettront de maîtriser leur corps et leur environnement. D'autant plus que les accidents se produisant sur le chemin de l'école sont en proportion plus fréquents et plus graves que les accidents scolaires. La sécurité de l'enfant doit en définitive être assurée de manière continue du domicile à l'école.

Effectuer la mise en sécurité des points de fermetures, et en particulier les fenêtres situées dans les étages.

Rendre effective l'obligation de présence d'un maître-nageur sauveteur au cours des séances de piscine.

B. LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

1. Les enseignements de la crise de la « vache folle » dans les « cantines » scolaires

Un milliard de repas servis chaque année à la cantine, six millions d'élèves concernés de la maternelle à la terminale, soit un sur deux, c'est dire si la notion de sécurité alimentaire peut, à l'école, constituer un enjeu d'une extrême sensibilité : le retrait de la viande de b_uf de nombreuses cantines scolaires à l'occasion de la crise de la « vache folle » en novembre 2000 en fournit l'illustration la plus récente.

Certes, lors du démarrage de cette crise, les fédérations de parents d'élèves se sont montrées mesurées, aucune d'entre elles ne réclamant formellement le retrait de la viande de b_uf. La Fédération des conseils des parents d'élèves (FCPE) déclarait ainsi que « le vrai problème est de pouvoir contrôler les fournisseurs employés par les organismes de restauration, de pouvoir tracer la provenance des aliments. Ce n'est pas en interdisant, pour des raisons essentiellement psychologiques, le b_uf à l'école que sera réglée toute l'affaire de l'hygiène alimentaire au niveau national et international. » La Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) avait souhaité quant à elle que la prévention soit renforcée.

Mais, les responsables locaux, pour les établissements dont ils ont la charge, ont préféré, à juste titre, obéir au principe de précaution maximale pour éviter tout mouvement de panique au sujet des risques de contamination liés à l'ESB.

Certains ont pu faire mine de contester ce réflexe de responsabilité : le ministre de l'agriculture déclarait ainsi le 7 novembre à l'Assemblée nationale, au cours de la séance des questions au gouvernement, que celui-ci « ne conseille pas aux maires qui l'interrogent de prendre des mesures d'interdiction du b_uf dans les cantines scolaires. Cela ne repose sur aucune réalité scientifique, aucune évaluation du risque, aucun nouvel élément qui soit intervenu dans la connaissance de la maladie... ». Il n'en demeure pas moins qu'à la suite de l'annonce de l'interdiction des farines animale, sous l'impulsion du Président de la République, et du renforcement des mesures de précaution, une instruction ministérielle récapitulant la démarche de qualité et de traçabilité que les gestionnaires doivent exiger de leurs fournisseurs, a été adressée, le 15 novembre 2000, à l'ensemble des chefs d'établissement de l'enseignement secondaire.

Il est maintenant établi, par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), que l'agent infectieux n'a été détecté ni dans le lait ni dans le muscle et que la viande de b_uf ne présente donc aucun danger pour la santé, le Premier ministre ayant affirmé, de son côté, sa conviction que « les produits de notre filière bovine ont vocation à être de nouveau proposés et consommés sans crainte dans les cantines ».

Trois mois après la crise, les maires ont entamé la levée des mesures de retrait. Cependant, la confiance des élèves et -peut-être encore davantage- celle des parents est durablement atteinte et il sera certainement très délicat pour les gestionnaires de la restauration scolaire d'effacer cet épisode qui aura illustré l'ensemble des difficultés auxquelles se heurte la sécurité alimentaire à l'école. Et en premier lieu, l'absence de pilotage coordonné liée à l'organisation complexe de la restauration scolaire qui ne favorise pas une surveillance sanitaire efficace.

L'organisation de la restauration scolaire est en effet caractérisée par une grande hétérogénéité doublée d'une réelle atomisation. Dans le secteur public, les cantines des écoles maternelles et primaires sont gérées par chacune des communes, responsables de l'ensemble du dispositif, c'est-à-dire des locaux, du matériel et du fonctionnement des cuisines. A l'inverse, s'agissant des collèges et lycées publics, le ministère de l'éducation nationale est compétent en ce qui concerne le fonctionnement des cuisines, gérées le plus souvent par du personnel d'Etat. La charge des locaux et du matériel de cuisine incombe aux conseils généraux et aux conseils régionaux respectivement pour les collèges et les lycées.

Dans les établissements privés, en revanche, de la maternelle au lycée, les directeurs sont responsables de l'ensemble du dispositif de leur restaurant scolaire.

En cas de recours à une société de restauration collective (29 % de l'ensemble des repas servis en 1998-1999), celle-ci est responsable des repas préparés. Le recours à une telle société, très variable selon le type d'établissement, est estimé à :

- 61 % de l'ensemble des établissements scolaires privés ;

- 51 % de ceux du secteur primaire public ;

- 5 % pour le secondaire public.

Il peut prendre la forme juridique, soit d'un marché public soumis au code des marchés publics, soit d'une délégation de service public.

En ce qui concerne le secteur de l'enseignement secondaire, les personnels chargés de l'intendance (approvisionnement, gestion des cuisines,...) déplorent tout particulièrement l'éclatement et l'insuffisante mise en réseaux de leurs compétences : dépourvu de centrale d'achats dans le secteur alimentaire, le ministère de l'éducation nationale recourt à environ 400 coordonnateurs des groupements d'achats. Mais ces coordonnateurs n'interviennent que pour 30 à 40 % des produits.

Les contrôles relèvent quant à eux de la compétence des services vétérinaires départementaux placés sous l'autorité de la DDASS.

Conséquence de cette organisation complexe, les données statistiques se caractérisent par leur dispersion et leur imprécision, lorsqu'elles existent. Le rapporteur avait ainsi interrogé par voie de question écrite le ministère de l'éducation nationale en ce qui concerne :

- le nombre de restaurants existant dans les établissements scolaires, en distinguant selon qu'ils disposent ou non d'une cuisine sur place et en distinguant les établissements du premier et du second degré ;

- le nombre de repas servis et son évolution au cours des cinq dernières années dans les écoles primaires ;

- la répartition du secteur entre opérateurs publics et privés et la liste, avec leur part de marché, des principaux opérateurs privés ;

- le nombre et la nature des accidents relevés au cours de chacune des cinq dernières années.

La réponse tient essentiellement en ces mots : « le ministère de l'éducation nationale ne dispose d'aucune information concernant les questions autres  que le nombre de repas servis dans les établissements publics et privés du second degré. »9

Evolution sur cinq ans du nombre de repas servis dans les établissements publics et privés du second degré

Elèves internes et demi-pensionnaires en France métropolitaine

Nombre moyen de repas/jour

Rentrée

Public

Privé

Total

1995-1996

2 767 726

671 902

3 439 628

3 731 516

1996-1997

2 736 989

659 253

3 396 242

3 680 921

1997-1998

2 741 118

655 553

3 396 671

3 676 973

1998-1999

2 776 179

651 388

3 427 567

3 702 673

1999-2000

2 790 466

644 047

3 434 513

3 697 701

Source : ministère de l'éducation nationale

En outre, s'agissant de la sécurité alimentaire, le ministère indique qu'il « ne dispose pas, à titre propre, de structures spécifiques chargées de suivre et de résoudre les problèmes ...qui pourraient éventuellement se poser dans les établissements scolaires. Dans ce domaine, lorsqu'un problème de sécurité alimentaire survient dans le cadre de la restauration scolaire, les établissements scolaires ont la possibilité de recourir aux services vétérinaires placés sous l'autorité des directions départementales des affaires sanitaires et sociales. »10

La crise de la « vache folle » doit à tout le moins provoquer à l'échelon du ministère de l'éducation nationale une réflexion approfondie sur la mise en place d'un système d'information fiable qui nécessite d'associer l'ensemble des partenaires concernés par la restauration scolaire.

Tout aussi criante que cette carence d'information aura été l'exigence de transparence exprimée par les parents en proie à de légitimes inquiétudes quant à la sûreté alimentaire qui devrait s'attacher aux repas fournis à leurs enfants. A cet égard, l'instruction ministérielle du 13 janvier 2000 avait constitué un premier pas en matière de traçabilité : la ministre déléguée à l'enseignement scolaire demandait alors que les informations disponibles concernant la provenance et l'origine des produits alimentaires soient mises à la disposition des élèves, de leurs familles et des personnels de l'éducation nationale qui en sont demandeurs et qu'elles soient affichées dans les restaurants scolaires.

Elle invitait en outre, tous les établissements scolaires à « mettre en place une identification et un contrôle de qualité des produits alimentaires afin de connaître plus précisément la traçabilité des denrées et les indications concernant les OGM », ainsi que la composition des produits élaborés afin de prévenir les risques d'allergie. D'une manière générale, il s'agit d'instaurer un changement dans les comportements quotidiens.

2. Les déséquilibres de l'alimentation scolaire

Les véritables difficultés se posent moins en termes de danger alimentaire que de sécurité sanitaire au quotidien. Un sondage téléphonique effectué pour le syndicat de la restauration collective avait ainsi révélé, en 1999, que 70 % des parents d'enfants mangeant à la cantine interrogés s'estimaient préoccupés par la sécurité alimentaire et l'alimentation servie à leurs enfants. Les deux motifs les plus souvent évoqués étaient, en premier lieu, l'équilibre alimentaire des menus et, en second lieu, la qualité et l'hygiène de certaines préparations.

De fait, dans son rapport de juin 2000, « nutrition et restauration scolaire, de la maternelle au lycée : état des lieux », l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments conclut, au déséquilibre nutritionnel des repas proposés dans les cantines depuis la maternelle jusqu'à la terminale : « en termes de nutriments, les apports en lipides sont le plus souvent décrits comme excédentaires, le fer et le calcium la plupart du temps déficitaires, les apports en protides variables... En terme d'aliments, les produits laitiers, les fruits et légumes sont souvent déficitaires. »

Pour autant, l'Agence indique qu'il n'est pas possible d'établir un lien de causalité entre les déséquilibres alimentaires signalés dans la restauration scolaire et la prévalence de l'obésité de l'enfant, en augmentation constante en France, en faisant observer que le nombre de déjeuners scolaires ne représente qu'environ 140 repas, à rapporter aux 3 fois 365 repas de l'année.

En réalité, il n'a pas été remédié à un constat ancien, puisque la circulaire du 9 juin 1971 relative à la nutrition de l'écolier, en cours d'actualisation, évoquait déjà une « insuffisance d'apport calorique, carence en protéines animales, rareté ou absence de produits laitiers ou de crudités.... »

Le Conseil national de l'alimentation a lui aussi rappelé, dans deux avis publiés en 1994 et 1997, l'importance de la diversité alimentaire et le rôle éducatif du repas pris en milieu scolaire. Parmi ses recommandations relatives à la qualité nutritionnelle des repas, figurent notamment :

- l'introduction d'un étiquetage nutritionnel ou d'une fiche technique pour tout produit élaboré par l'industrie agroalimentaire, avec au minimum l'indication par le fournisseur des taux de lipides, protéines, fer (pour les produits à base de viande ou de poisson) et calcium (pour les produits laitiers) ;

- l'encouragement de la distribution de lait à l'ensemble des établissements (avec un apport en matières grasses diminué) ;

- la sélection des produits dans le cadre d'un appel d'offres en fonction non seulement du prix mais encore de la qualité nutritionnelle des produits. De fait, l'AFSSA relève que le déséquilibre alimentaire des cantines tient fréquemment à l'arbitrage qui est fait en faveur du moins-disant : « il existe un coût denrées minimum incompressible de l'ordre de huit francs, en deçà duquel la qualité nutritionnelle des produits est insuffisante. L'exigence actuelle d'amélioration de la qualité renchérit inévitablement ce coût. » Une plus grande transparence des coûts des produits faciliterait néanmoins le choix d'une démarche de qualité ;

- l'aide à la décision des gestionnaires des restaurants scolaires par la définition, par des organismes scientifiques, de la taille minimale des portions ou de la qualité minimale des matières premières ;

- la mise en place d'une commission de restauration scolaire, associant les infirmiers et médecins scolaires, et les associations de parents d'élèves, en charge de la gestion de la restauration dans tous les établissements scolaires. La participation d'un(e) diététicien(ne) y est au demeurant très souhaitable, les communes se privant trop souvent du précieux concours de cette catégorie de professionnels, dont la charge financière peut être mutualisée.

Plus récemment, en 1999, le groupement permanent d'étude des marchés de denrées alimentaires (GPEM/DA) a publié des recommandations relatives à la nutrition à l'intention de toutes les collectivités publiques gérant leur restauration ou faisant appel à une société de restauration collective. Ce document, qu'il appartient aux collectivités publiques d'intégrer dans leur cahier des charges, doit permettre d'améliorer la qualité nutritionnelle des repas servis. Il précise en outre les modalités de vérification du bon déroulement des prestations. Toutefois, l'existence de contradictions entre ces recommandations et les dispositions de la circulaire de 1971 constitue une source de difficultés, signalées à plusieurs reprises devant la mission, pour les acteurs et les responsables de la restauration scolaire, au premier chef desquels figurent les chefs d'établissement et les intendants.

C'est la raison pour laquelle l'actualisation voire la refonte de la circulaire, promise de longue date, suscite une réelle et désormais légitime impatience.

Le second sujet de préoccupation exprimé par les parents d'élèves tient à l'hygiène qui doit s'attacher à la restauration scolaire. Si la réglementation s'appliquant à la restauration collective est très stricte tant en ce qui concerne les approvisionnements que la préparation et le service, la collaboration de personnels vacataires ou remplaçants parfois insuffisamment qualifiés et à tout le moins dépourvus de formation spécifique en matière d'hygiène alimentaire ne permet pas toujours de garantir le niveau minimum d'hygiène que les enfants et leurs familles sont en droit d'exiger.

A cet égard, la mise en place des procédures HACCP (Hazard analysis critical control points, système d'analyse des risques et de maîtrise des points critiques) par voie d'arrêté interministériel du 29 septembre 1997 a mis en lumière, au-delà du défaut de conformité de certains locaux et de l'obligation d'y remédier dans les trois ans, les carences de la formation des personnels et leur nécessaire professionnalisation.

La rigueur et la complexité de ces procédures suscitent néanmoins de fortes inquiétudes parmi les personnels gestionnaires des établissements. Aussi peut-on espérer que la réflexion actuellement conduite par le GPEM/DA à ce sujet débouchera sur un certain nombre de propositions de nature à les aider au quotidien. Le rapporteur insiste sur la nécessité de former les personnels ATOS  à l'hygiène alimentaire, la nutrition et la diététique. Ces personnels doivent pouvoir bénéficier des actions de formation professionnelle dispensées aux personnels académiques.

Proposer une alimentation plus équilibrée dans les cantines scolaires, notamment par le recours à des diététiciens.

Publier dans les meilleurs délais l'actualisation de la circulaire ministérielle, dite « de l'écolier », relative à l'organisation de la restauration.

C. LA SÉCURITÉ SANITAIRE

Dépister les handicaps, assurer la prévention collective, suivre les enfants handicapés ou inadaptés, telles sont les principales missions assignées au « service de promotion de la santé ».

Il est cependant frappant de constater que, cinquante-cinq ans après la mise en place de la médecine scolaire, -chargée lors de sa création en 1945, de dépister la tuberculose et la malnutrition, celle-ci n'est pas en mesure de remplir l'une de ses raisons d'être historiques et fondamentales : la prévention. Cette carence a été en effet récemment soulignée par un cas de tuberculose dans un lycée parisien, qui n'a fait l'objet d'aucune sorte de prise en charge pendant deux ans, au mépris de la santé d'une jeune fille et de l'ensemble des personnes de son entourage, scolaire et familial.

Avec un médecin pour 7 000 élèves, une infirmière pour 2 200 élèves et 2 553 assistantes sociales, le taux d'encadrement demeure incontestablement insuffisant, en dépit des efforts engagés depuis quelques années et de la création de 300 emplois de personnels médico-sociaux par la loi de finances pour 2001 (50 médecins, 150 infirmiers et 100 assistants de service social).

S'agissant des médecins scolaires, leur effectif est de 1 200 titulaires à temps plein et autant de vacataires équivalent à 720 emplois temps plein. Le syndicat des médecins de l'UNSA-Education (SNMSU) estime qu'il manque un bon millier de médecins : « Pour être efficace, on ne devrait pas dépasser 5 000 élèves par médecin, et, dans les zones difficiles, un médecin serait nécessaire pour 2 500 élèves. » De son côté, le syndicat national de l'administration scolaire et universitaire et des bibliothèques (SNASUB-FSU) plaide en faveur de la présence d'un médecin scolaire dans chaque établissement, de la modernisation de leur formation afin notamment d'intégrer la nutrition et la diététique et de mieux prendre ainsi en compte les phénomènes d'obésité en développement parmi les élèves.

De fait, alors que l'école est l'unique lieu qui permette d'évaluer l'état de santé de l'ensemble des élèves tout au long de leur scolarité, un seul examen médical bénéficie de manière obligatoire et systématique à tous les enfants durant leur scolarité : le bilan effectué en grande section de maternelle ou au cours préparatoire par le médecin scolaire en présence des parents en vue de dépister les pathologies à risques, et le cas échéant les problèmes psychologiques ou sociaux. Il est également axé sur la prévention des troubles de l'apprentissage scolaire, en particulier le dépistage de troubles du langage. Effectué en liaison avec les services de protection maternelle et infantile, il peut servir de base à un suivi ultérieur de l'élève en cas de handicap ou difficulté particulière. A cet égard, face au développement de plus en plus précoce de comportements violents, l'accès à des consultations de pédopsychiatrie ferait utilement, dans certains cas, _uvre de prévention.

Le bilan d'orientation en fin de scolarité de collège, qui bénéficie en principe à tous les élèves (en réalité à 72 % d'entre eux), revêt bien évidemment une importance toute particulière pour ceux qui envisagent de s'orienter vers une filière de l'enseignement technique ou professionnel. Aussi conviendrait-il qu'il soit accompli le cas échéant en tenant compte de l'orientation envisagée par l'élève et l'éventualité de son accès à des machines dangereuses (cf supra).

Ainsi que le relève l'Observatoire de la sécurité dans son rapport 2000, la mise en place systématique d'un examen médical à la fin de chaque cycle d'enseignement constituerait une mesure particulièrement souhaitable, à laquelle souscrit pleinement le rapporteur.

Il ne faut pas négliger le fait que la médecine scolaire représente un maillon important du dispositif d'éducation à la santé et de prévention auprès des jeunes, l'infirmière scolaire étant le deuxième praticien consulté après le médecin généraliste.

L'attente des élèves est donc très forte vis-à-vis des quelque 5 527 infirmières considérées comme de véritables conseillères voire médiatrices, en cas de malaise au sein de l'institution scolaire, au-delà des stricts problèmes de santé ou d'accident, par exemple dans les cas de maltraitance ou de violences sexuelles. Cette attente a d'ailleurs été exprimée par des enfants à l'Assemblée nationale en 1997 à l'occasion du Parlement des enfants qui s'est prononcé en faveur d'une proposition de loi tendant à assurer la présence d'un(e) infirmier(e) dans chaque groupe scolaire. En 1998, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les droits de l'enfant en France a souligné qu'il fallait répondre à cette demande des enfants.11

Les assistantes sociales qui n'interviennent pas dans le premier degré exercent également une mission importante en matière d'éducation à la santé et de prévention des conduites à risques ou de dépistage de maltraitance.

Face aux insuffisances de la médecine scolaire, se pose la question de son organisation et de son rattachement administratif. Pour certains, « on a fait une belle erreur en transférant la médecine scolaire au début des année 1990 au ministère de l'éducation nationale. Les médecins y sont précarisés, les élèves défilent sans véritable suivi, les données enregistrées ne sont pas transmises, faute de temps et de moyens. Seul, le charisme ou l'investissement des infirmières, des médecins scolaires ou de quelques médecins inspecteurs dans une académie isolée peuvent permettre une meilleure prévention. »12

La réponse récemment apportée par la publication des trois circulaires du 12 janvier 2001, réorganisant la politique de santé en faveur des élèves, ne constitue pas nécessairement une réponse satisfaisante de la part du ministère de l'éducation nationale. Les syndicats de médecins de l'éducation nationale redoutent en effet que le renforcement de l'autorité hiérarchique tant au niveau académique qu'au sein de l'établissement qu'elles prévoient, mette en cause leur indépendance professionnelle et le travail d'équipe accomplis avec les infirmières. Le SNMSU souligne en particulier que ces circulaires diluent leurs responsabilités au profit d'« une vague mission confiée à l'ensemble des personnels de l'éducation nationale... En l'absence d'équipe et de réel pilotage, » la nouvelle organisation comporte de « graves risques de dysfonctionnements. »

C'est la raison pour laquelle le moment est désormais venu d'envisager la décentralisation de la médecine scolaire auprès de la collectivité compétente en matière sanitaire et sociale, le département. Cela favoriserait sans aucun doute une meilleure prise en compte de l'ensemble des missions qui lui sont assignées, et notamment en matière de prévention.

S'agissant des personnels, la visite médicale prévue tous les cinq ans par le décret du 9 mai 1995 relatif à l'hygiène, la sécurité du travail et la prévention médicale dans la fonction publique n'est en pratique pas systématiquement organisée. Il est tout à fait regrettable à cet égard que l'Etat se dispense de respecter des contraintes qu'il sait si aisément imposer aux organismes privés. Cette visite devrait en pratique intervenir selon un rythme annuel pour certaines catégories de personnels : agents de service, ouvriers professionnels, personnels de restauration et personnels techniques de laboratoire, enseignants en lycée technique et professionnel,....Un suivi régulier compléterait ainsi utilement les actions de formation professionnelle à la prévention.

Accroître les moyens en personnels médicaux (notamment des pédopsychiatres) et médico-sociaux (infirmières, assistantes sociales, psychologues) non seulement pour rendre effectif l'encadrement sanitaire des élèves mais également pour dépister les conduites à risques.

Développer la prévention au titre de la médecine scolaire et instaurer une visite médicale régulière pour les élèves comme pour les personnels.

Transférer aux départements la médecine scolaire et les assistantes sociales qui y concourent.

D. LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DES PERSONNELS

L'école pouvait-elle éviter les phénomènes de « judiciarisation » des rapports sociaux ? Cette question que se posent désormais nombre d'enseignants confrontés à des mises en cause personnelles devant les juridictions pénales appelle sans doute une réponse négative. En effet, placée au c_ur de la relation entre adultes et enfants, enseignants et enseignés, citoyens et institution, l'école ne saurait rester à l'écart de cette évolution majeure de la société contemporaine qui s'illustre par la diffusion de la règle de droit et de sa sanction, tout particulièrement à l'égard de l'Etat et de ses agents dont les éventuels « privilèges de juridiction » sont de plus en plus mal tolérés.

Fréquemment relevé à l'encontre des élus locaux et, plus généralement, des décideurs publics, le recours au juge par les citoyens relève ainsi avant tout des progrès de l'Etat de droit. Pour ce qui concerne plus particulièrement l'école, on ne saurait par exemple contester l'intérêt à agir des parents-usagers qui confient leurs enfants à une institution censée garantir leur sécurité et leur intégrité physique et mentale. Pour autant, faut-il accepter que cette demande légitime du corps social aboutisse à mettre en péril la sécurité juridique dont doivent également bénéficier les personnels d'éducation dans l'accomplissement de leur délicate mission ? Certes, les « risques du métier » sont connus depuis bien longtemps, mais les évolutions récentes sont, sur ce point, préoccupantes.

Comme le souligne la Cour de cassation dans son rapport annuel pour 1998, la mise en cause pénale des « décideurs publics est « la manifestation judiciaire d'un phénomène de société qui, sous l'impulsion des médias et des associations plus que des citoyens, conduit à refuser la fatalité, l'imprévisibilité, le risque inhérent à toute activité humaine et à rechercher, à l'occasion d'un accident, d'une catastrophe ou d'un événement dommageable, un responsable à qui sont demandés des comptes. » Seuls le juge et la sanction pénale sont supposés pouvoir apporter les réponses adéquates, et chacun peut voir la signification profonde de cette évolution : « la pénalisation augmente dans notre société au fur et à mesure que la conscience collective diminue » (François Ewald, « Entretiens de Saintes », 5 février 2000).

Outre le régime général de responsabilité de droit commun de l'Etat en cas mauvais fonctionnement du service public, le législateur avait de longue date, en matière scolaire, pris en compte la nécessité de protéger les enseignants contre une mise en cause extensive de leur responsabilité civile, même en cas de « défaut de surveillance ».

La loi du 5 avril 1937 sur la responsabilité de l'Etat pour dommages causés aux élèves ou par les élèves des écoles publiques et résultant d'un défaut de surveillance du maître, désormais codifiée à l'article L. 911-4 du code de l'éducation, dispose ainsi que :

« ...dans tous les cas où la responsabilité des membres de l'enseignement public se trouve engagée à la suite ou à l'occasion d'un fait dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions, soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l'Etat est substituée à celle desdits membres de l'enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants.

« Il en est ainsi toutes les fois que, pendant la scolarité ou en dehors de la scolarité, dans un but d'enseignement ou d'éducation physique, non interdit par les règlements, les élèves et les étudiants confiés ainsi aux membres de l'enseignement public se trouvent sous la surveillance de ces derniers. »

Ce régime particulier de responsabilité ménage ainsi un délicat équilibre entre, d'une part, le droit des victimes à obtenir la reconnaissance d'une faute et une réparation et, d'autre part, les contraintes inhérentes à l'activité d'enseignement, y compris dans un cadre excédant la stricte enceinte de l'école.

Cependant, à l'occasion d'événements particulièrement graves - des enfants décédés ou gravement blessés dans le cadre scolaire -, la « demande judiciaire » s'est orientée depuis quelques années vers la justice pénale, pour des raisons abondamment analysées par ailleurs : facilité d'accès et relative rapidité par rapport à la complexité et à la longueur des procédures civiles ou administratives, possibilité de constitution de partie civile mettant en mouvement l'action publique, caractère d'exemplarité du procès pénal...

La jurisprudence s'est ainsi développée, sanctionnant pénalement des délits pourtant non intentionnels (homicide ou coups et blessures involontaires) et créant un trouble certain dans la communauté enseignante au fil des condamnations : en 1994, le tribunal correctionnel de Bobigny condamne le proviseur et l'intendant du lycée Paul-Eluard de Saint-Denis à la suite du décès en 1991 d'un élève écrasé par la chute d'un poteau de basket ; en 1997, la cour d'appel d'Amiens condamne le directeur d'une école d'Armentières pour une noyade au cours d'une baignade organisée par l'école.

Certes, ainsi que l'indiquait il y a un an le rapport de notre collègue René Dosière sur la proposition de loi du sénateur Pierre Fauchon tendant à préciser la définition des délits non intentionnels1, « les chiffres ne sont pas négligeables, mais ne sont pas pour autant alarmants. De 1985 à 1996, on relève, dans les établissements d'enseignement public et privé, 25 accidents (dont 16 accidents mortels) ayant donné lieu à des poursuites pénales mettant en cause 45 personnes appartenant à l'éducation nationale (directeurs d'école, instituteurs, proviseurs, professeurs, maîtres auxiliaires, chefs de travaux ou intendants) ; 16 d'entre elles ont été condamnées à des peines de prison, toujours assorties du sursis. » Le même rapport souligne par ailleurs que les agents de l'éducation nationale sont sans doute exposés au quotidien à des risques plus nombreux que la plupart des agents publics. Il y aurait donc un décalage entre la réalité des chiffres et le sentiment d'insécurité juridique qui prédomine aujourd'hui au sein du monde enseignant.

Mais, comme le note quant à lui M. Pierre Fauchon dans son rapport sur sa proposition de loi2 « ce qui importe en la circonstance n'est pas le nombre d'affaires concernées. Certaines mises en examen ou condamnations, peu nombreuses, sont ressenties comme infamantes par les intéressés, qui se voient renvoyés devant le tribunal correctionnel au même titre que les voleurs ou les escrocs. Elles provoquent, pour ceux qui les subissent, un traumatisme profond. »

Un traumatisme : c'est effectivement ainsi qu'a été ressentie par les enseignants la phase judiciaire de l'affaire dite du Drac, qui a ajouté à un drame épouvantable une sanction pénale difficilement compréhensible. Le 4 décembre 1995, au cours d'une classe de découverte, six enfants et leur accompagnatrice sont morts lors d'un lâcher d'eau d'un barrage installé sur cette rivière près de Grenoble. Invoquant des « fautes de négligence ayant contribué à la réalisation du dommage », la cour d'appel a reproché à l'institutrice de n'avoir pas vérifié, au préalable, les conditions de sécurité et l'a condamnée le 12 juin 1998 à deux ans de prison avec sursis et 30 000 francs d'amende. La directrice, relaxée en première instance, a été condamnée en appel à dix-huit mois de prison avec sursis et 10 000 francs d'amende.

A la suite de l'intervention du législateur, cette affaire connaîtra cependant, selon toute probabilité, un épilogue de nature à apaiser les inquiétudes profondes du monde enseignant : le 12 décembre 2000, la Cour de cassation a, en effet, cassé l'arrêt d'appel et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Lyon en application de la loi du 10 juillet 2000 relative aux délits non intentionnels.

Votée par le Parlement grâce à l'opiniâtreté de notre collègue sénateur Pierre Fauchon, qui souhaitait notamment limiter le développement des mises en cause pénales des élus locaux, cette loi a pour objet de modifier les conditions d'appréciation par le juge de la responsabilité pénale en cas où la faute commise n'est qu'indirectement à l'origine du dommage. Il convient en effet de rappeler que le juge pénal a longtemps analysé le délit in abstracto : la loi a été objectivement violée et les obligations méconnues dès lors qu'il y a, même involontairement, homicide ou blessures. Désormais, il faut pouvoir démontrer que la personne qui l'a commise a elle-même créé contribué à créer la situation à l'origine du dommage. Il faut en outre qu'elle n'ait pas pris les mesures permettant de l'éviter, qu'elle ait violé, de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité ou encore qu'elle ait commis une faute caractérisée.

La sécurité juridique des personnels de l'éducation au regard des risques de mise en cause de leur responsabilité pénale pour des délits non intentionnels paraît donc aujourd'hui restaurée. Il faut rappeler qu'elle ne vise pas principalement à procurer du confort personnel aux éducateurs, mais au contraire à leur permettre de reprendre en toute sérénité l'organisation d'activités périscolaires (sorties, classes découverte, voyages, etc.). Ces activités, fort utiles pour l'animation de l'établissement, s'étaient en effet trouvées fréquemment paralysées par les développements juridictionnels et médiatiques consécutifs à l'affaire du DRAC.

Pour autant, cette sécurité ne constitue en rien une exonération a priori de toute forme de responsabilité pénale personnelle. A cet égard, on doit également s'interroger sur l'accroissement récent des procédures engagées à l'encontre d'enseignants accusés de coups et blessures, voire de délits à caractère sexuel sur la personne de leurs élèves. Il est évidemment plus que souhaitable d'améliorer encore la détection, le signalement et les éventuelles suites pénales à apporter à ces actes intolérables. Les dispositions prises en ce sens par les autorités ministérielles (notamment la circulaire d'août 1997 invitant les chefs d'établissement à signaler au procureur de la république tout cas de violence rapporté par des élèves) contribuent efficacement à lever des tabous et à rompre avec une certaine gêne de l'institution qui a sans doute trop longtemps privilégié une forme de « stratégie de l'édredon ».

Parallèlement, il est nécessaire de prendre en compte les risques de dérives qui semblent d'ailleurs attestées dans un certain nombre de cas : les dénonciations peuvent être parfaitement infondées et les enseignants poursuivis de manière abusive. Il faut alors que le soutien de l'administration et de la hiérarchie immédiate soit sans faille, si l'on veut éviter de déstabiliser un corps enseignant rendu parfois perplexe.

Concernés au premier chef, les enseignants d'éducation physique et sportive ont ainsi le sentiment d'avoir longtemps attendu la lettre du ministre de l'éducation nationale, en date du 9 janvier dernier, qui les assure de son soutien face aux risques de dénonciation calomnieuse pour violence et reconnaît les « risques spécifiques » de l'enseignement de l'EPS, notamment les contacts corporels d'aide qui « peuvent donner lieu à interprétation »...

Dans une lettre séparée, adressée aux recteurs, chefs d'établissement, inspecteurs d'académie, le ministre demande par ailleurs de veiller à ce que « toute mise en cause injustifiée d'un enseignant, traduite par un acquittement, une relaxe ou un non lieu, voire dans certains cas, un classement sans suite, soit portée à la connaissance des membres et des partenaires de la communauté éducative ». Une telle mesure est effectivement utile ; elle ne saurait cependant réparer le préjudice initial de la mise en cause sans fondement : c'est pourquoi il faut impérativement faire preuve du plus grand discernement lors de la mise en _uvre de toute procédure.

Améliorer le soutien aux victimes et la médiation au sein de l'institution scolaire et des établissements avec, d'une part les élèves et leurs familles, et d'autre part, les personnels.

IV.- LA VIOLENCE À L'ÉCOLE

A. QUELLE MESURE DU PHÉNOMÈNE ?

1.  L'aggravation récente des faits de violence

Un enseignant de musique poignardé par un collégien de treize ans à Garges-lès-Gonesse, une institutrice jetée au sol, traînée par les cheveux et griffée au visage par une mère de famille à Nanterre, quatre adolescents définitivement exclus d'un lycée professionnel à Toulouse pour « racket, trafic de drogue, bizutage, organisation d'un climat de terreur dans la classe »... Au cours des premières semaines de l'année 2001, la révélation concomitante de plusieurs actes de violence exceptionnellement graves au sein des établissements scolaires a suscité une sincère et légitime émotion dans l'opinion publique, à tel point que certains organes de presse ont pu parler de « semaine noire à l'école. »

De fait, selon les données publiées par le ministère de l'éducation nationale, l'évolution chiffrée des phénomènes de violences en milieu scolaire montre une tendance à l'accroissement des faits qualifiés d'« une particulière gravité. »

Pour l'année scolaire 1999-2000, les établissements du second degré ont ainsi signalé, en moyenne, environ 225 000 déclarations d'« incidents » par trimestre (contre 240 000 l'année précédente, soit un recul de 6,3 %). Dans l'ensemble, ces incidents sont constitués de la manière suivante :

- violences verbales : 50 %

- atteintes physiques aux personnes : 15 %

- dégradations : 15,7 %

- vols ou tentatives et recel : 10,4 %

- intrusions : 4,8 %

- consommation de drogues et trafic : 2,7 %

- port d'armes blanches, de bombes lacrymogènes ou d'autres armes : 0,9 %

- suicides et tentatives : 0,5 %

- port d'armes à feu : 0,01 %.

On observe toutefois que les faits graves au nombre de 6 300 (2,8 % des incidents) sont en augmentation par rapport à l'année 1998-1999 (+ 2,6 %). Parmi ces faits graves, relevons en particulier 900 agressions sur des personnes et 1 600 actes graves portant sur des biens. En outre, la comparaison des données disponibles d'une année à l'autre permet de souligner les points suivants :

- les dégradations, qui représentent le quart des faits graves, ont augmenté de 4,6 % par rapport à l'année précédente ;

- les vols, qui constituent 12,6 % de ces faits graves, ont augmenté de 4 % ;

- la consommation de drogue (3,3 % de ces faits graves) a également augmenté ;

- les signalements de port d'armes blanches et de bombes lacrymogènes (2 % des faits graves) ont doublé.

En revanche, les intrusions extérieures dans les établissements auraient été réduites de moitié, les violences verbales et les atteintes physiques aux personnes seraient en légère baisse, tandis que le port d'armes à feu restait stable.

Tous ces faits graves sont automatiquement signalés au parquet.

Typologie des faits graves

(en %)

 

1998-1999

1999-2000

Violences verbales

40

38

Atteintes physiques aux personnes

16,5

13,8

Dégradations

20,2

24,8

Vols ou tentatives et recels

8,7

12,6

Consommation de drogue et trafic

2,2

3,3

Port d'armes blanches, de bombes lacrymogènes ou d'autres armes

1

2

Port d'armes à feu

0,1

0,1

Intrusions

9,8

4

Suicides et tentatives

1,5

1,4

Source : ministère de l'Éducation nationale

Inégalement présente sur le territoire, la violence est concentrée sur le plan géographique. Dix académies plus particulièrement exposées ont été retenues par le dernier plan de prévention et de lutte contre la violence scolaire : tout d'abord en 1998, Aix-Marseille, Amiens, Créteil, Lille, Lyon, Versailles, puis, en 2000, Montpellier, Rouen, Strasbourg, Toulouse. D'une manière générale, on constate une augmentation particulière de la violence dans les deux académies citées de la région parisienne. Cette concentration se retrouve au niveau des établissements scolaires, 17 % des établissements du second degré déclarant en effet un fait grave par trimestre et 6 % deux faits graves par trimestre. Dans l'ensemble, la violence affecte davantage les collèges que les lycées. Par ailleurs, elle fluctue selon les moments de l'année scolaire, les périodes de conseils de classe ou les longues périodes qui séparent les vacances étant plus propices à l'apparition de faits de violence.

Enfin, on ne peut que s'inquiéter de la tendance au rajeunissement des auteurs de violences, qu'il n'est pas rare de compter parmi les élèves de sixième ou de cinquième, signalée par plusieurs interlocuteurs de la mission. L'école primaire connaît en effet depuis cinq ans une augmentation sensible des phénomènes de violence. L'école maternelle, elle-même, n'est pas non plus épargnée.

2. Qui sont les victimes ?

L'analyse qualitative de la violence montre qu'elle affecte bien évidemment en tout premier lieu les élèves : en effet, en ce qui concerne l'année 1998-1999, tant les victimes (78 %) que les auteurs (86 %) de faits graves étaient des élèves. Figurent également parmi les auteurs de violence des personnes extérieures aux établissements (12 %), des personnels (1,3 %) et des parents (0,7 %).

Si les problèmes causés par des intrus ne doivent pas être négligés, force est de constater que les incidents violents résultent fréquemment d'interactions entre élèves. Les agresseurs, loin d'être principalement extérieurs, sont donc au contraire connus de leurs victimes. En outre, dans la plupart des cas, les intrusions ne sont pas le fait d'éléments totalement étrangers à l'établissement, mais plutôt d'anciens élèves ou de jeunes scolarisés dans des écoles voisines.

Pour autant, les élèves ne sont pas les seules victimes des faits de violence. Les personnels (20 % des victimes) en constituent quant à eux la deuxième cible devant les personnes extérieures (1,6 %) et les parents (0,4 %). A cet égard, préoccupé par la situation des personnels, le rapporteur a interrogé le ministre de l'éducation nationale13 sur le nombre des actes de violence commis au cours des cinq dernières années, à l'intérieur des établissements scolaires, contre les personnels administratifs, les personnels de direction et les enseignants, en distinguant l'origine de la violence, la nature et la gravité des actes ainsi que les types d'établissement. Il a également souhaité connaître la proportion des actes ayant entraîné des poursuites judiciaires.

Notice méthodologique

Recensement des faits de violence signalés par les établissements

« Depuis la rentrée scolaire 19981999, la direction de la programmation et du développement (DPD) est chargée de l'enquête trimestrielle sur les phénomènes d'absentéisme et de violence en milieu scolaire. Par souci de préserver l'esprit de cette enquête, héritée de la direction de l'enseignement scolaire (DESCO), gestionnaire du dossier depuis la rentrée scolaire 1996, et afin de permettre une éventuelle comparaison entre les enquêtes de la DESCO et de la DPD, cette dernière a seulement modifié la méthode de recueil des données. Pourtant, eu égard aux méthodologies différentes adoptées par les deux directions pour l'exploitation statistique des données, cette comparaison n'a pas pu être effectuée. Par conséquent, les chiffres qui vont suivre sont issus des seules analyses de la DPD et ne concernent que les deux dernières années au lieu des cinq requises dans les questions écrites ci-dessus référencées.

« Les établissements sont invités à signaler, entre autres, le nombre d'actes de violence qu'ils ont constatés durant une période bien déterminée dénommée « trimestre » (chaque année scolaire comporte deux « trimestres » d'enquête), ces actes de violence étant déclinés en types d'actes et en degrés de gravité (sur une échelle de 1, le moins grave, à 4, le plus grave). Par ailleurs, on leur demande de préciser les suites données aux actes de violence (passage en conseil de discipline et/ou signalement au parquet), les nombres d'auteurs et de victimes de ces actes (déclinés le cas échéant en établissement, personnels, élèves, parents d'élèves et autres ou inconnus), par type d'actes mais tous degrés de gravité confondus. Les personnels de l'établissement regroupent l'équipe de direction, la vie scolaire (conseiller d'éducation, conseiller principal d'éducation, surveillants), le corps enseignant et les ATOSS. En conséquence, on ne pourra apporter que des réponses partielles aux questions posées ; plus précisément, on rendra compte, « trimestre » par « trimestre » (de l'année scolaire 1998-1999 à l'année scolaire 1999-2000), du nombre de personnels victimes des actes de violence par catégorie d'actes (hors violences verbales), tous degrés de gravité confondus et par type d'établissements. Les interprétations des résultats en termes d'évolution par « trimestre » devront être appréhendées avec précaution, dans la mesure où pour une telle analyse, il aurait fallu considérer la même base d'établissements ayant répondu aux enquêtes des quatre « trimestres » en question.

« En outre, compte tenu de la grille actuelle de recueil des données, il ne sera pas possible de déterminer les suites données aux actes de violence subis par les personnels des établissements. De même, toujours pour la même raison, on ne pourra pas préciser l'origine des actes de violence dont les personnels des établissements sont victimes. Ce défaut d'information est imputable au fait que les établissements répondent à l'enquête en agrégeant leurs informations à plusieurs niveaux. Ainsi, en ce qui concerne les suites données aux actes de violence, il est seulement possible de savoir quel type d'acte a fait l'objet d'une signalement au parquet et/ou d'un passage en conseil de discipline. Mais, on ignore tout du degré de gravité (quoique appréciable), de l'auteur ou de la victime de l'acte de violence en question.

« Au vu de la qualité moyenne de certaines données, il a été jugé plus pertinent de regrouper les différents types d'actes de violence selon la typologie suivante :

- les atteintes physiques aux personnes regroupent les coups et blessures sans arme, les violences physiques avec arme, les violences physiques à caractère sexuel ;

- les vols et recels regroupent les vols avec effraction, les vols avec effraction et le recel ;

- les dégradations et destructions regroupent les détériorations de biens personnels et les dommages aux véhicules ;

- les violences dirigées contre soi-même regroupent les suicides, tentatives de suicides et automutilations. »

Les éléments de réponse, dont le rapporteur déplore qu'ils n'aient pas fait l'objet d'une publication au Journal officiel jusqu'à aujourd'hui sont les suivants :

« On constate que la proportion des personnels d'établissement parmi les victimes tend à augmenter depuis la rentrée scolaire 1998-1999 (2,7 % au « 1er trimestre 1998-1999 » et 3,7 % au « 2ème trimestre 1999-2000 »), et ce, quel que soit le type d'établissement, de même que le nombre moyen par établissement des personnels victimes d'actes de violence (au « 1er trimestre », sur 5 512 établissements ayant répondu à l'enquête14, on recensait 3 454 personnels victimes d'actes de violence, soit 0,6 personne par établissement, contre 5 014 à partir des données de 4 367 établissements ayant participé à l'enquête du « 2ème trimestre 1999-2000 », soit une moyenne par établissement de 1,1 personne).

« Par ailleurs, les personnels sont relativement plus victimes d'atteintes physiques aux personnes, de vols et recels et de dégradations et destructions. Plus précisément, la part des atteintes physiques aux personnes dont ils sont victimes tend à diminuer au cours des « trimestres », au profit de celles des vols et recels, et ce, quel que soit le type d'établissement.

« Les données actuellement disponibles au niveau national ne permettent pas une distinction des atteintes physiques aux personnes par catégorie de personnels.

« La restitution de données plus précises n'est possible qu'à l'aide d'un outil de recensement plus performant que celui qui existe actuellement. D'ailleurs la DPD réfléchit actuellement sur la mise au point d'un tel instrument. »

Nombre de personnels victimes d'actes de violence par catégorie d'actes

tous types d'établissements et tous degrés de gravité confondus

 

1er

« trimestre »

1998-1999

2ème

« trimestre »

1998-1999

1er

« trimestre »

1999-2000

2ème

« trimestre »

1999-2000

Atteintes physiques aux personnes

1 069

1 011

1 281

979

Racket

39

23

63

21

Vols et recels

1 093

1 535

2 408

2 069

Dégradations et destructions

1 220

1 408

1 536

1 487

Consommation et trafic de stupéfiants

14

112

605

375

Violences dirigées contre soi-même

19

62

72

83

Ensemble

3 454

4 151

5 965

5 014

Nombre d'établissements ayant répondu à l'enquête

5 512

4 277

4 291

4 367

Source : ministère de l'éducation nationale

Lecture : au 1er « trimestre » 1998-1999, 1 069 victimes d'atteintes physiques aux personnes, tous degrés de gravité confondus, étaient des personnels parmi ceux de 5 512 établissements ayant répondu à l'enquête

Proportion de chaque catégorie d'actes pour lesquels les personnels ont été identifiés comme victimes, tous types d'établissements et tous degrés de gravité confondus

 

1er

« trimestre »

1998-1999

2ème

« trimestre »

1998-1999

1er

« trimestre »

1999-2000

2ème

« trimestre »

1999-2000

Atteintes physiques aux personnes

30.9 %

24.4 %

21.5 %

19.5 %

Racket

1.1 %

0.6 %

1.1 %

0.4 %

Vols et recels

31.6 %

37.0 %

40.4 %

41.3 %

Dégradations et destructions

35.3 %

33.9 %

25.8 %

29.7 %

Consommation et trafic de stupéfiants

0.4 %

2.7 %

10.1 %

7.5 %

Violences dirigées contre soi-même

0.6 %

1.5 %

1.2 %

1.7 %

Proportion de personnels parmi les victimes

2.7 %

3.1 %

4.6 %

3.7 %

Source : ministère de l'éducation nationale

Lecture : au 1er « trimestre » 1998-1999, 3 454 victimes d'actes, tous types d'actes et de degré de gravité confondus, étaient des personnels. Sur 3 454 victimes, 1 069 étaient victimes d'atteintes physiques aux personnes, soit 30,9 %.

En outre, il est confirmé que le collège représente le maillon le plus sensible en matière de violence : non seulement, les personnels y sont, dans l'ensemble, plus exposés que dans les lycées, mais encore ils se trouvent en particulier davantage exposés au risque d'une agression physique que leurs collègues des lycées d'enseignement général et des lycées professionnels. Les personnel des lycées sont quant à eux en premier lieu victimes de « dégradations et destructions. »

3. Des imperfections statistiques

Etant donné l'extrême sensibilité du sujet, on ne peut que s'étonner de la manière dont le phénomène est appréhendé par le ministère de l'éducation nationale, en particulier en l'absence de statistiques et de recensement au niveau national jusqu'en 1996. Ce n'est que sous l'impulsion de M. François Bayrou que la mesure « d'enquête académique trimestrielle » est mise en _uvre. Cette enquête, dont la fiabilité est désormais mise en question, a néanmoins le mérite d'exister.

Le rapporteur ne peut néanmoins que regretter l'absence ou la nébulosité des réponses qui lui ont été apportées.

Il est cependant souhaitable que soient améliorés le recueil et l'analyse au niveau national des fiches de signalement des faits de violence remplies par les établissements. Le recours aux nouvelles technologies de l'information et de la communication permettrait sans aucun doute de disposer et de traiter en temps réel des données consignées avec soin par les chefs d'établissement afin de procéder à une analyse plus fine des phénomènes observés. Il convient toutefois de relever que la violence ne saurait être mesurée de façon exhaustive, les fiches de signalement ne pouvant être établies que dans la mesure où des faits ont été observés ou révélés. Or, certains actes demeurent occultés par la loi du silence et la peur des représailles (racket) ou par le tabou qui les entoure (violences sexuelles). De fait, plus le crime est déclaré parce qu'il y a une poussée institutionnelle à le faire, plus il existe statistiquement.

4. La montée du sentiment d'insécurité

Au-delà de la stricte mesure statistique du phénomène, l'aggravation des faits de violence s'accompagne de la montée du sentiment d'insécurité. Une enquête menée par une équipe de l'université de Bordeaux II sur un échantillon de 3 134 élèves et 314 adultes, provenant de seize collèges et deux lycées professionnels sensibles des départements de Seine-Saint-Denis, du Val d'Oise, du Nord et de Marseille, a ainsi permis d'établir une comparaison entre 1995 et 1998 : s'agissant des élèves, 24 % d'entre eux considéraient que la violence était très présente dans leur établissement en 1995, contre 41 % en 1998. La progression du sentiment d'insécurité est encore plus accusée parmi les professeurs qui sont 40 % à penser que la violence est très présente dans leur établissement en 1998 contre 13 % seulement en 1995.

Selon les auteurs de l'enquête, cette dégradation de la situation correspond principalement à une évolution des formes de violence :

- on assiste au développement d'une forme de violence anti-scolaire (dégradation des bâtiments, tentatives d'incendie, et surtout agressions plus fréquentes des enseignants dans la classe) ;

- la violence est de plus en plus souvent le fait de groupes contre un élève isolé et le racket en est une des principales manifestations. En outre, le racket se durcit et évolue vers des faits de petite délinquance (extorsion d'habits, d'argent) même si des formes plus anciennes de racket telles que le racket aux devoirs ou au pain au chocolat perdurent.

- un glissement des lieux d'expression de la violence est également signalé, de la cour de récréation et des abords de l'établissement vers les salles de classe et les toilettes notamment ;

- dans l'ensemble, plus que le nombre d'auteurs et de victimes, c'est la gravité des actes qui augmente.

Rien d'étonnant à ce que la suite de l'enquête révèle une dégradation du climat scolaire perceptible dans l'appréciation portée sur les relations entre élèves et enseignants entre 1995 et 1998, tant par les jeunes que par les enseignants : 34 % des élèves et 32 % des enseignants perçoivent en 1998 beaucoup d'agressivité des élèves en direction des professeurs, contre respectivement 24 % et 8 % en 1995.

Ainsi, en l'espace de trois ans, les enseignants considérés se sont sentis de plus en plus menacés.

En ce qui concerne l'école primaire, la perception de la violence connaît une évolution préoccupante : il ressort ainsi d'une enquête plus récente, également menée par l'université de Bordeaux II, qu'un tiers des élèves interrogés ressentent « énormément ou beaucoup de violence dans leur établissement. » Et, dans les établissements les plus difficiles, cette proportion atteint 55 %. En outre, il s'agit de pratiques particulièrement traumatisantes pour l'enfant : racket et bagarres brutales sont parfois monnaie courante. Cette enquête montre également l'augmentation importante du fossé entre les écoles rurales et les écoles urbaines défavorisées.

5. Violence et incivilités

A se concentrer sur les actes les plus graves, les plus spectaculaires, qui font l'objet d'un signalement au parquet, on en vient à oublier qu'ils demeurent minoritaires. Et qu'à l'inverse, de manière beaucoup plus fondamentale, ce sont les petits faits quotidiens, les micro-violences, les incivilités qui finissent par pourrir le climat scolaire et la relation entre les enseignants et les jeunes.

L'émergence, au début des années 1990, du concept d'incivilité a marqué un tournant dans la prise en compte du malaise des personnels enseignants et administratifs. Elle a permis de mieux comprendre le décalage entre l'insécurité objective, plus ou moins bien mesurée par des statistiques, et le sentiment d'insécurité, qui relève du vécu. Expression du « politiquement correct » constituant une forme de violence qui ne porte pas son nom par souci d'en minimiser la portée ou d'un « fantasme d'insécurité » ? Elle n'est pas par elle-même toujours aisée à définir.

Selon M. Eric Debarbieux, « on aura souvent tendance à penser que l'incivilité est une catégorie minorée de la violence. Ce n'est pas complètement faux. Cependant, ce qui est essentiel dans cette idée, c'est que la répétition de micro-violences peut amener des souffrances et des violences plus graves... Il y a incivilité à partir du moment où il y a répétition, et c'est la répétition de ces petits faits qui va amener un sentiment justifié d'insécurité et un repli sur soi justifié parce que l'on aura peur de ces petites choses qui nous arrivent et qui montrent que le monde est mal organisé et que nous ne sommes pas respectés ... Lorsqu'il n'y a pas de réponse du corps social, il y a construction à la fois d'un sentiment d'impunité chez l'agresseur et de repli et de peur chez l'agressé. si bien que les espaces publics deviennent des espaces vides. C'est à ce moment-là que la délinquance peut prendre place. »

Pris isolément, les actes d'incivilité tels que les chahuts, les remarques déplacées, les inscriptions sur les tables, le refus de se conformer à la règle s'apparentent à de l'insolence, à de l'impolitesse, à un manque de respect qui ont toujours existé. Mais le seuil de tolérance des adultes a diminué tandis que le nombre d'incivilités semblait augmenter.

B.- LES MULTIPLES FACTEURS DE LA VIOLENCE

1. Mise en perspective historique

Du point de vue historique, la violence a longtemps, au moins jusqu'à la fin du dix-neuvième siècle en France, été présente dans les institutions scolaires dans la mesure où, pédagogie rimant avec sévérité, le recours aux châtiments corporels était monnaie courante. Il s'agissait alors d'une violence exercée par les adultes sur des enfants entièrement soumis. Quant à la violence entre élèves, non seulement elle a toujours existé, mais encore elle était dans une certaine mesure valorisée : le chahut ou le bizutage ont ainsi longtemps constitué des rites d'intégration importants.

Au cours du vingtième siècle, se sont imposées de nouvelles normes en matière d'éducation. L'enfant est choyé, protégé au sein d'une famille restreinte et l'école prolonge l'action de la famille. L'école a ainsi été voulue comme un sanctuaire de l'apprentissage des savoirs. Aussi l'irruption contemporaine de la violence nous interpelle-t-elle doublement : sur la relation entre l'institution scolaire et la société et, de manière plus générale sur l'éducation.

C'est paradoxalement dans les années 1970, tandis que se répandent les théories pédagogiques, héritées de mai 1968, remettant en question l'ordre établi, que le problème de la violence dans l'école commence à être pris officiellement en considération. Le phénomène serait apparu dans les établissements scolaires à partir de 1975. L'Inspection générale de l'éducation nationale décide, en 1978, d'en faire pour la première fois l'objet d'une étude systématique à partir d'un échantillon de collèges en situation a priori difficiles répartis sur la quasi-totalité du territoire. De fait, si la violence dans les collèges est dès cette période stigmatisée, les conclusions du rapport « la violence dans les établissements scolaires du premier cycle du second degré » 15 se veulent assez rassurantes. :

« - la violence est moins répandue et moins dramatique qu'on a en général tendance à le croire ;

- elle est essentiellement liée à des facteurs extérieurs à l'établissement ;

- à l'intérieur de l'établissement, elle est en général maîtrisée ou contrôlée. »

Certes, la violence s'exprime de manière multiforme. Dans ce rapport, on remarque ainsi que :

- le vol sévit dans tous les établissements ;

- le racket s'exerce dans près de 60 % d'entre eux ;

- presque 70 % des collèges sont concernés par des adolescents fugueurs ;

- près de 50 % par des tentatives de suicide ;

- les agressions physiques graves contre les adultes concernent 25 % d'entre eux.

En revanche, plus de 80 % des collèges se déclarent exempts des problèmes de drogue. Contrairement aux idées reçues, la police intervient alors fréquemment dans le périmètre scolaire du fait des vols.

Face à ce constat, le rapport précise que, dans la plupart des cas, ce sont les élèves de classe pré-professionnelle de niveau (CPPN) ou de section d'éducation spécialisée (SES) qui sont les responsables des actes de violence.

Au total, force est de constater qu'au cours de ces vingt dernières années, les données fondamentales de la violence scolaire sont une constante. En revanche, le problème a pris progressivement une tout autre ampleur.

De fait, parallèlement à la diffusion inexorable de la violence, on peut égrener la liste des documents officiels qui se succèdent à partir des années 1980 : rapport Tallon sur la violence dans les lycées professionnels en 1980, note sur la violence au ministre de l'éducation nationale de M. Rancurel en 1982, qui se penche en particulier sur le rôle des chefs d'établissement et leur autonomie relative, rapport Léon sur la violence et déviances chez les jeunes, problèmes de l'école et problèmes de la cité, 1983, note sur la contribution de l'éducation nationale à la prévention de la violence et de la délinquance de MM. Rancurel et Vandevoorde, 1985, rapport Barret sur les conduites agressives dans les lycées et les collèges, 1993, rapport Fotinos sur la violence à l'école : état de la situation en 1994. Analyse et recommandations.

Mais, selon l'inspecteur général Rancurel, il est demeuré délicat, jusque dans les années 1990 et sa découverte par les médias, de parler de violence à l'école, tant le sujet était perçu par les enseignants comme le signe d'un échec personnel intolérable et culpabilisant. De fait, l'examen des facteurs de la violence anti-scolaire montre que celle-ci trouve sans doute son origine non seulement dans l'évolution de la société et la fracture sociale des vingt dernières années, mais également dans le fonctionnement de l'institution scolaire.

2. La violence résultant de l'évolution de la société

L'école en s'ouvrant au plus grand nombre, notamment dans l'enseignement secondaire, est devenue le reflet de la société tout entière. Il était dès lors inévitable que les phénomènes de déviance sociale, tenus auparavant à l'écart de l'univers scolaire, s'y déploient dans les mêmes proportions. C'est pourquoi il ne faut guère s'étonner de diagnostiquer dans l'école les maux qui affectent l'ensemble du corps social jusqu'à soulever les plus grandes inquiétudes. C'est le cas tout particulièrement du développement de la violence chez les jeunes, que l'on peut relier à certaines caractéristiques de l'évolution des structures socio-économiques et des mentalités collectives durant les dernières décennies : urbanisme, « fracture sociale », perte des références...

a) L'école à l'épreuve de la ségrégation urbaine

Si la violence en milieu scolaire ne peut s'expliquer par le seul contexte géographique ou urbain dans lequel se situe l'établissement, on a néanmoins constaté un développement significatif de celle-ci dans les quartiers dits sensibles des agglomérations urbaines. L'urbanisme désastreux des années 1950 et 1960 a en effet abouti à la construction de grands ensembles à la périphérie des grandes villes, dans lesquels sont enclavés, voire enkystés des bâtiments scolaires, de taille inhumaine qui garantissent un anonymat parfait. L'école devient alors une caisse de résonance des violences du quartier.

Les locaux prématurément vieillis, dégradés et insuffisamment entretenus n'inspirent pas par eux-mêmes le « respect », terme fétiche des jeunes dans les quartiers. Ils invitent au contraire à la poursuite des dégradations encouragées du reste par l'absence de réparation immédiate, selon le phénomène partout observé du « remplacement de la vitre cassée. » Seul le renforcement de la présence adulte permet, à cet égard d'assurer une surveillance des locaux. Sur le fond, il est indispensable de remédier à une situation qui est en soi criminogène en effectuant la partition des collèges de plus de 600 élèves et en construisant des bâtiments de petite taille.

En outre, à la suite du départ des classes moyennes, ces quartiers tendent à devenir des ghettos qui concentrent souvent dans un climat de grande insécurité et de misère économique et sociale, les populations issues de l'immigration. De fait, les habitants, y compris les plus jeunes d'entre eux n'en sortent pratiquement jamais.

Dans ce contexte de forte ségrégation, l'école est parfois le seul service public qui continue de fonctionner. On lui demande d'assurer à la fois la socialisation des enfants, leur éducation, leur intégration sociale et la gestion de leurs problèmes sociaux et familiaux. Il ne faut pas alors s'étonner que des collèges apparaissent « écrasés » par la densité de ces demandes. Symbole de l'ordre social, elle est aussi parfois la dernière à résister à la loi imposée aux habitants du quartier par les bandes rivales constituées de plus en plus souvent de très jeunes adolescents. Un tel contraste avec l'environnement est très propice au développement du conflit et à l'importation de la violence du quartier à l'intérieur de l'établissement scolaire, à commencer par la cour de récréation qui représente le lieu de tous les dangers. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire, dans certains cas, de mettre en place de dispositifs de surveillance adaptés tant au sein de l'établissement qu'à ses abords, notamment par une présence policière renforcée.

Selon M. François Dubet16, on peut ainsi distinguer trois logiques de la violence scolaire à l'_uvre dans les quartiers :

- une délinquance sociale qui, entrant à l'école sans avoir de lien direct avec la situation scolaire -c'est le phénomène des intrusions- pose le problème de sa fermeture et de sa protection contre les éléments étrangers à l'établissement qui utilisent le va-et-vient et le déplacement des élèves pour commettre des délits de droit commun. La lutte contre ce premier phénomène passe sans aucun doute par la généralisation des cartes d'identité scolaire, un contrôle régulier à l'entrée des établissements, une protection accrue des locaux, à l'instar des autres équipements collectifs ou commerciaux et un renforcement de la présence policière aux abords des établissements ;

- des conduites a-scolaires d'adolescents et de jeunes trop éloignés des normes implicites de l'école - désignées sous le terme d'incivilités.  Ces nouveaux élèves apportent à l'école les conduites de leur vie « normale. » Il s'agit notamment des bagarres entre garçons, des chapardages permanents et d'une certaine difficulté à accepter le contrôle social scolaire.

« Ici, le chahut n'est pas traditionnel, mais anomique ; il se manifeste par cette agitation constante à travers les élèves qui résistent à l'école et manifestent leur indifférence. Ces nouveaux élèves sont loin de la culture scolaire : ils se déplacent bruyamment, s'interpellent dans la classe, parlent fort, se lèvent, se battent comme ils le feraient dans la rue. En recevant ces nouveaux élèves, l'école accueille aussi les conduites de « galère » de bien des jeunes des quartiers en difficulté. Les dégradations, les petits vols, les querelles d'honneur qui ponctuent la vie du quartier se poursuivent à l'école » ;

- enfin des violences anti-scolaires engendrées par la situation scolaire elle-même et construites contre l'école, à savoir l'établissement, les enseignants, les élèves qui « collaborent. ». « Parce qu'ils sont en échec et se sentent « humiliés » par l'école qui ne peut que leur donner une image dévalorisante d'eux-mêmes, les élèves choisissent de défendre leur dignité en créant, dans la communauté des garçons en particulier, une hiérarchie de valeurs qui renverse celle de l'école. ...Le « leader » du groupe de jeunes est alors celui qui ne se compromet pas avec les enseignants, celui qui ne se laisse pas faire, ni impressionner par les punitions, celui qui peut devenir violent et régler ses comptes lui-même contre un enseignant qui l'aurait humilié devant la classe. »

Promouvoir des collèges à taille humaine.

Rétablir une présence adulte en proportion de celle du nombre d'élèves.

Sécuriser les accès des établissements et systématiser l'installation de dispositifs de vidéo-surveillance dans les établissements à risques d'intrusion.

Renforcer la surveillance policière aux abords des établissements.

Assurer une surveillance permanente des bâtiments, éventuellement au moyen d'unités mobiles de surveillance, communes à plusieurs établissements, en fin de semaine, afin de prévenir les intrusions destructrices.

b) Les prolongements à l'école de la « fracture sociale »

Chômage depuis plusieurs générations, RMI, familles monoparentales, constituent autant de facteurs cumulatifs de l'échec scolaire et de la violence. De fait, selon l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, les quelque 100 000 élèves sortant chaque année du système éducatif sans qualification proviennent en majorité de familles nombreuses, souvent issues de l'immigration et de milieu ouvrier non qualifié. Bien évidemment, ils ne profitent pas de la récente embellie de l'emploi des jeunes.

Comment, dans un tel contexte d'exclusion durable, face à l'absence de perspectives d'insertion professionnelle et d'intégration sociale, pourraient-ils avoir une vision positive de l'école ? La fracture sociale, qui reproduit ainsi les handicaps de génération en génération, nourrit parmi les plus jeunes, qui sont donc à ce stade victimes avant d'être fauteurs de troubles, un sentiment d'inutilité de l'école. La panne de l'« ascenseur social » conduit non seulement à refuser l'école comme lieu légitime des apprentissages ouvrant la voie à l'insertion, mais elle engendre également une réaction de rejet global de l'institution scolaire à laquelle il n'est plus nécessaire de se soumettre, puisque l'école ne remplit plus sa fonction. L'intériorisation de l'échec scolaire conduit ainsi au conflit avec les personnes, insérées, qui symbolisent l'institution scolaire.

c) L'école face à la perte des repères et des valeurs

Sous l'effet de l'évolution des mentalités, de la culture véhiculée par les médias, des rêves engendrés par la société de consommation, on constate depuis quelques années l'effondrement des valeurs traditionnelles, structurantes pour la construction de la personnalité que représentaient la famille, l'école, et le travail notamment.

La recherche de l'argent facile résultant du développement de l'économie informelle et de différents trafics présents dans les banlieues (drogue, armes, ...etc.) achève de disqualifier la valeur du travail et de l'effort scolaire déjà fortement érodée par le taux de chômage qui touche prioritairement les jeunes depuis vingt-cinq ans.

Les évolutions qui affectent la famille se répercutent nécessairement sur les comportements de l'enfant. Si la famille demeure un support affectif, elle n'est plus toujours suffisamment forte pour soutenir le développement personnel de l'enfant, ni a fortiori pour construire un projet éducatif cohérent pour l'adolescent. Dans certaines familles socialement défavorisées, le père, au chômage, ne renvoie plus une image positive du travail et perd de ce fait toute autorité. Les revenus, de moins en moins liés à l'emploi, dépendent le plus souvent de la solidarité nationale. En outre, la dislocation de nombreuses familles contribue également à brouiller les repères de l'enfant, en particulier en l'absence trop fréquente de père, qui représente traditionnellement le symbole de l'autorité. Enfin, il ne faut pas négliger le fait que dans la plupart des cas, avant d'être infligée, une violence est d'abord subie et que les comportements violents à l'adolescence trouvent souvent leur origine dans une souffrance ou une maltraitance au cours de la petite enfance.

A l'instar de ce qui s'est passé aux Etats-Unis il y a une vingtaine d'années, on observe en outre, en France, la constitution, dans les banlieues, d'une sorte de contre-culture ethnique, notamment autour du rap, qui valorise fortement la violence et la rupture avec l'ordre établi, accompagnant des phénomènes de bandes organisées autour d'un caïd, de lutte de territoires, de règlements de compte, ainsi que l'ont montré en janvier 2001 les affrontements entre deux bandes rivales des Yvelines dans un centre commercial de la Défense. Plusieurs interlocuteurs de la mission ont, à cet égard, exprimé leur inquiétude relative à la progression du trafic d'armes dans les cités et leur pénétration dans l'enceinte scolaire.

En réalité, ces phénomènes qui reposent avant tout sur l'agressivité et sur le rapport de forces sont redoutés par les plus jeunes et les plus vulnérables, contraints à la loi du silence. Si l'établissement du dialogue peut encourager les élèves à briser cette logique de la terreur, l'école ne peut en revanche laisser une fraction d'élèves, généralement estimée à 5 % d'entre eux, s'installer dans la délinquance en toute impunité et pourrir tant les conditions de travail de la majorité que l'ambiance de l'établissement. Aussi convient-il de réagir fermement contre ce qui n'est pas tolérable, d'une part, en apportant sans délai une réponse à chaque incident par une sanction appropriée et, d'autre part, en éloignant temporairement les éléments les plus difficiles. L'orientation de ces adolescents vers des structures spécifiques, parfois appelées internats éducatifs, doit être privilégiée. Il est souhaitable à cet égard d'accélérer la rénovation de certains internats et d'engager la construction de nouveaux établissements d'accueil, afin que le lancement de chantiers-pilotes d'internats éducatifs destinés précisément à accueillir des jeunes en rupture familiale ou scolaire, annoncé en juillet 2000 par le ministre de l'éducation nationale, ne reste pas lettre morte17.

On assiste ainsi à une perte de repères que l'école ne peut certes seule enrayer. Elle doit néanmoins s'efforcer d'y remédier en mettant en _uvre l'apprentissage pratique du respect, qu'il s'agisse des règles de vie en société ou de la discipline. Pour qu'elle soit acceptée, la définition de la faute et la sanction applicable, graduée, doivent être clairement exposées dans le règlement intérieur de l'établissement. Les procédures disciplinaires doivent respecter, conformément au décret du 7 juillet 2000, le principe des droits de la défense, quelle que soit la gravité de la faute commise. La sanction à finalité de réparation, telle que les travaux d'intérêt général dans l'établissement, est sans conteste plus éducative que les punitions à caractère strictement scolaire. Elle répond en outre parfaitement aux actes de dégradation. L'école doit ainsi redevenir un lieu d'éducation à la citoyenneté responsable, un lieu où l'apprentissage de la citoyenneté fait la loi, comme elle l'était sous la IIIème République. Le devoir de respect s'est fragilisé. Or, cette notion est indispensable à la transmission du savoir qui est la mission essentielle de l'école.

L'école du « respect », qui est une notion en vogue parmi les adolescents, implique que l'école renoue avec l'enseignement d'un certain nombre de valeurs fondamentales telles que la politesse, le respect tant de l'altérité que de l'autorité -et tout particulièrement celle des enseignants, ainsi que les données fondamentales de la morale.

Refuser l'impunité pour les agresseurs en apportant sans délai une réponse à un incident. Aucune agression, aucune incivilité si légère soit-elle, aucun délit ne doit rester sans réponse, sans aucune réponse de l'école et de la société.

Instituer des sanctions graduées en distinguant les sanctions pédagogiques de celles qui sont liées à la discipline.

Faire de l'école un lieu d'éducation à la citoyenneté responsable, par l'apprentissage de la règle de droit, un lieu où l'apprentissage de la citoyenneté fait la loi.

Généraliser l'adaptation des règlements intérieurs des établissements en établissant le respect des droits de la défense des élèves.

Donner des repères en renouant avec l'enseignement et la pratique de notions fondamentales telles que la morale, la politesse, le respect tant de l'altérité que de l'autorité et tout particulièrement celle des enseignants.

Former le personnel éducatif à l'éducation civique.

3. La violence entretenue par le fonctionnement de l'institution

a) L'échec scolaire, facteur de violence

La « massification » du recrutement scolaire résultant de l'allongement de la durée de la scolarité obligatoire et de son ouverture à tous, accrue à partir de 1985 par la généralisation de l'accès au lycée, a aggravé les difficultés liées aux phénomènes d'échec. Comme quoi la démocratisation du recrutement scolaire n'ouvre pas nécessairement la voie à une véritable démocratisation de l'école. L'intégration au système pédagogique classique, en dépit de ses indéniables évolutions, est ainsi difficile pour les nouveaux publics, l'école mettant à jour des inégalités -qu'elle renforce même parfois, entre ceux qu'elle accueille. Il convient ainsi de rappeler que 15 % des élèves ne maîtrisent pas la lecture à l'entrée en sixième et qu'un élève sur six est en situation d'échec scolaire, tous niveaux confondus.

Au surplus, les résultats scolaires attestent des difficultés rencontrées en particulier dans les ZEP dès l'enseignement primaire : en dépit d'une scolarisation souvent précoce, les élèves de CM2 y ont presque deux fois plus fréquemment un an de retard que dans les autres secteurs.

Dès 1972, le psychologue Jacques Sélosse18 posait ainsi la question de savoir si les élèves étaient inadaptés ou bien si au contraire, les structures d'enseignement ne répondaient pas aux objectifs : « les enfants issus de milieux défavorisés ont plus de mal, malgré leurs aptitudes intellectuelles à s'adapter à l'enseignement de type traditionnel, pour des raisons à la fois pédagogiques (faible soutien familial), psychologiques (difficultés de se conformer à des normes de références très différentes des leurs) et culturelles (intérêts et aspirations d'une autre nature.) » La différence de langage utilisé et le fossé qui en résulte en matière de communication entre les adultes et les jeunes devient une source de préoccupation de plus importante chez les éducateurs.

Face à l'échec scolaire, les attentes et les espoirs placés dans l'institution par les milieux défavorisés sont souvent source de frustration et de « désenchantement », créant un ressentiment chez le jeune qui ne voit aucune porte de sortie à sa situation précaire. Un enchaînement de comportements allant du refus de l'institution qui se manifeste par des actes de dégradation et autres incivilités à l'absentéisme scolaire peut rapidement s'enclencher. Cette situation peut être enrayée par le renforcement de l'aide scolaire et pédagogique apportée aux élèves en difficulté.

Renforcer l'encadrement pour l'assistance aux devoirs et, de manière plus générale, le suivi pédagogique des élèves en situation difficile.

b) Un monde enseignant « désajusté »

La massification scolaire a profondément transformé les conditions d'enseignement. Or, les enseignants, souvent d'anciens bons élèves, se trouvent dans un tel décalage avec certains élèves tant sur le plan culturel qu'en ce qui concerne les comportements, que l'incompréhension est totale.

Il faut souligner que la formation initiale des futurs enseignants porte exclusivement sur les contenus et les savoirs. Elle ne les prépare guère à affronter des adolescents en situation difficile, ni à animer des groupes, ni à gérer des conflits non plus qu'à se positionner en tant qu'adulte investi d'une certaine fonction d'autorité, au-delà de la transmission du savoir. Elle ne les prépare pas davantage à enseigner une méthode d'apprentissage aux élèves. Du reste, la formation continue ne le fait pas non plus. Or, les enseignants débutants se trouvent fréquemment affectés pour un premier poste dans des établissements sensibles, où leur manque d'expérience les rend à la fois vulnérables et démunis face aux situations de violence.

La question de l'autorité et la difficulté de faire régner un minimum d'ordre dans la classe figurent bien évidemment parmi les préoccupations des enseignants. Si l'inquiétude de certains, à l'idée de devoir tourner le dos pour écrire au tableau, a été expressément exprimée devant la mission, la situation parfois délicate des enseignantes a également été évoquée. Et l'on peut se demander si, en dépit d'une profession composée de femmes pour les deux tiers, la constitution des équipes pédagogiques ne mériterait pas d'être effectuée avec plus de doigté, afin de privilégier autant que faire se peut l'affectation, dans les établissements difficiles, d'enseignants de sexe masculin.

Introduire un objectif de parité lors de la composition des équipes pédagogiques dans les établissements considérés comme sensibles.

c) « L'effet établissement »

En matière de violence, la dynamique du projet d'établissement est essentielle. On observe à cet égard que la notion de communauté éducative n'est guère développée en France par comparaison à certains pays européens : d'une part, l'enseignant se consacre exclusivement à des taches d'enseignement alors que, par exemple, en Angleterre, il assure également des fonctions de tutorat, de médiation, d'animation ; d'autre part, les disciplines demeurent encore excessivement cloisonnées.

En réalité, les établissements scolaires les plus fragiles au regard de la violence sont ceux où il n'y a pas de véritable équipe pédagogique. Dans les zones sensibles, en dépit des mesures prises pour encourager la stabilité des personnels, on observe une rotation élevée (près de 80 % de changement annuel dans certains établissements de la région parisienne) des enseignants comme des personnels d'encadrement, affectés par le hasard du mouvement dans des postes difficiles. Cette rotation renforce l'anonymat, alors que tout devrait au contraire concourir à favoriser l'implantation ou le recrutement local de personnels plus proches des réalités quotidiennes du quartier.

Le rôle de cohésion et d'animation joué par le chef d'établissement est très important pour la mobilisation de l'équipe éducative. Or il apparaît que les postes de chef d'établissement peinent fréquemment à être pourvus dans les zones sensibles. Leur fonction, difficile, est souvent considérée par les élèves sous l'angle de la seule répression. Elle n'est pas davantage appréciée des enseignants qui déclarent, pour 40 % d'entre eux, avoir de mauvaises relations avec le chef d'établissement alors même qu'il ne dispose que d'un pouvoir « résiduel » sur l'évolution de leur carrière. Il est souhaitable de ce point de vue d'engager une réflexion en vue de clarifier les prérogatives des chefs d'établissement en matière d'autorité sur les personnels.

La ségrégation au sein de l'établissement semble constituer un facteur d'aggravation de la violence. Ainsi que le montre une étude récente19, la constitution de classes de niveau, officiellement prohibées depuis la réforme Haby de 1975, alimente durablement la violence dans les collèges. Dans les classes dites « mauvaises », parfaitement identifiées par l'ensemble des élèves, « on retrouve ...des élèves qui ont un niveau scolaire moyen voire bon mais qui ont un comportement agité et des attitudes anti-scolaires. » Généralement ces classes regroupent un nombre élevé de redoublants et d'élèves en difficulté, mais aussi une plus grande proportion de jeunes d'origine maghrébine et de garçons. Les professeurs sont contraints de se concentrer sur la discipline et les élèves en ressentent un fort sentiment d'injustice notamment en raison du nombre important de punitions collectives, qui renforce la perturbation et entraîne la classe dans « le cercle vicieux de la déviance. » En outre, les relations entre élèves jouent également « un rôle important dans l'émergence des perturbations » : la loi du groupe prenant facilement le dessus, les dynamiques « anti-écoles » finissent par l'emporter et de nombreux élèves « glissent vers un parcours d'échec scolaire. L'état d'irresponsabilité qui s'instaure parmi les élèves favorise le développement d'une orientation fataliste concernant non seulement les études mais aussi la vie en général et peut, à son tour, conduire une fraction d'élèves dans l'engrenage d'activité véritablement délinquantes. »

Le rajeunissement des auteurs de faits violents, dès les classes de cinquième, voire sixième, met l'accent sur les perturbations engendrées par la rupture entre l'enseignement primaire et secondaire. De fait plusieurs interlocuteurs de la mission ont fait état des difficultés particulières d'adaptation de certains élèves au collège lors de l'arrivée en sixième, du fait du morcellement des apprentissages, de la multiplicité des intervenants adultes, du changement permanent de salle de classe, de la confrontation avec les « grands ».

Les relations traditionnellement établies entre l'école et ses divers partenaires contribuent à l'isoler, alors même qu'elle subit de plein fouet des problèmes qui, dans la mesure où ils concernent l'ensemble de la société, appellent une mobilisation collective. Ainsi l'institution scolaire ne peut continuer à fonctionner repliée sur elle-même en tenant les parents d'élèves -surtout ceux dont les enfants sont en difficulté- en lisière. Elle doit en outre s'ouvrir aux acteurs locaux de la prévention de la violence dans les quartiers et développer le partenariat avec les acteurs institutionnels de proximité tels que la police, la justice et les collectivités locales.

Favoriser la stabilité des personnels enseignants et non enseignants dans les zones sensibles.

Clarifier les prérogatives des chefs d'établissement en matière d'autorité vis-à-vis des personnels. L'autorité des enseignants doit être elle-même constamment réaffirmée.

Favoriser une transition en douceur entre le premier degré et le collège en aménageant les rythmes et les conditions de travail des classes de sixième.

Amplifier les opérations de partenariat de proximité avec, d'une part les services de police et de justice, et d'autre part, les entrepreneurs locaux et le tissus associatif.

Tisser des liens avec les partenaires institutionnels (Parlement des enfants, Conseil général des jeunes, Conseil municipal des enfants).

C. UNE PRÉOCCUPATION PARTAGÉE À L'ÉCHELLE EUROPÉENNE

Les phénomènes de violence scolaire ne sont pas une spécificité française. Depuis une dizaine d'années, plusieurs pays européens, confrontés à des problèmes similaires : violence, culture anti-scolaire, sentiment d'insécurité, racisme, exclusion, crise identitaire des acteurs de l'éducation, éprouvent la même inquiétude sur l'évolution des phénomènes constatés et les moyens d'y remédier.

Aussi, un Observatoire européen de la violence scolaire, ayant pour objet l'étude et la recherche universitaire en matière de violences scolaire et urbaine a-t-il été créé en 1998. Il a publié en 2000 une étude portant sur l'Allemagne, la Belgique francophone, l'Angleterre et l'Espagne, qui s'inscrit dans une démarche comparative, à la réserve près que la méthode de recensement des faits, la terminologie et la perception de ce que l'on peut qualifier de violence à l'école, peuvent varier d'un pays à l'autre. Notons que, eu égard à l'organisation du système éducatif, très peu de pays disposent d'un outil statistique centralisé sur le plan national.

Selon cet Observatoire européen, l'observation de faits de violence semblables est partagée par plusieurs pays européens. En revanche tant la perception de ces phénomènes que la manière d'y remédier, peuvent varier d'un pays à l'autre.

1. Des phénomènes convergents

a) Angleterre

C'est sans doute en Angleterre que la situation est la plus comparable avec la France. La prise en compte de la violence en milieu scolaire, communément appelée bullying20, est devenue une des préoccupations majeures des acteurs du système éducatif et du gouvernement après la publication du « rapport Elton » sur la discipline scolaire en 1989. Ce rapport avait été réalisé à la demande du DfEE (Department for Education and Employment) en raisons de plaintes de plus en plus fréquentes des enseignants quant aux comportements perturbateurs et aux problèmes de violence dans les écoles. Selon ce rapport, qui résultait d'un travail d'enquête, mené au niveau national dans les écoles d'enseignement secondaire avec la participation de quatre des syndicats nationaux, les enseignants ne considéraient pas les agressions physiques comme le principal problème. En revanche, leur inquiétude portait sur l'effet cumulatif des comportements perturbateurs dans la classe.

Une enquête dirigée par le Syndicat national des enseignants (National Union of Teachers) auprès de 2 000 écoles, en 1996, a montré qu'un enseignant sur dix avait été agressé par des intrus sur son lieu de travail. Dans plus d'une école sur vingt, l'enseignant avait été agressé en dehors de ses heures de travail. La question de l'intrusion dans les établissements scolaires constitue donc une autre source de préoccupation. Cependant, de même qu'en France, bien souvent les intrus ne sont pas totalement étrangers. Une enquête nationale a ainsi révélé en 1997 que les principales agressions à l'encontre des enseignants consistaient en insultes de la part de parents. Une école sur six a rapporté qu'un élève avait été agressé par un membre extérieur, bien souvent élève d'une école voisine ou un ancien élève. Plus d'un tiers des écoles auraient été victimes de vol ou de vandalisme en 1996 mais les agressions physiques représenteraient seulement 1,9 % des incidents rapportés. Toutefois, la majorité des personnes interrogées (70 %) estimaient que la violence était exagérée par les médias et se déclaraient défavorables à la transformation de l'école en « forteresse. »

L'Observatoire européen a procédé à une étude comparative des problèmes de violence en milieu scolaire dans des établissements d'enseignement secondaire d'enseignement général publics dits « sensibles » en France et en Angleterre. Les résultats sont surprenants : en effet, si les caractéristiques des problèmes (forte violence verbale, tensions élèves / enseignants, bagarres et bousculades dans les cours de récréation et lieux communs, racket, vandalisme, stigmatisation des parents et des enseignants, niveau qui baisserait...) rencontrés dans les deux pays sont similaires, l'état général du climat scolaire semble bien meilleur en Angleterre qu'en France : 47,3 % des élèves interrogés sont satisfaits, en Angleterre, de leur école, 11,6 % s'en estimant très satisfaits, alors qu'ils sont respectivement 16,4 et 4,7 % en France. Quant aux adultes, ils sont 5,5 % à penser que la vie dans leur école est très difficile et 22 % à être très satisfaits comparés à 8,9 et 17 % en France.

Le sentiment d'insécurité est ainsi deux fois moindre en Angleterre qu'en France : 19 % des élèves anglais estiment qu'il règne une forte violence dans leur établissement, contre 40 % en France. La différence de perception entre les enseignants est aussi importante, 28,7 % opinant pour un fort taux de violence contre 40 % en France. L'Observatoire européen avance quatre motifs principaux d'explication de ces divergences : les relations avec les enseignants, une répartition de l'autorité et une gestion de la discipline différentes, une plus grande ouverture de l'école sur la communauté extérieure.

b) Espagne

Les formes de comportement perturbateur les plus fréquemment relevées en Espagne sont le chahut en dehors de la classe, les agressions verbales entre pairs, l'absentéisme, les agressions physiques, le vol et le vandalisme à l'encontre de biens personnels.

Les faits de violence se produisent entre élèves, mais aussi envers le personnel enseignant atteint d'une crise identitaire que traduisent des taux d'absentéisme et de démissions élevés. L'indiscipline et les comportements perturbateurs sont des attitudes qui gênent le bon fonctionnement de l'institution scolaire mais qui ne sont pas toujours recensés comme de réels problèmes de violence. Ils diffèrent en cela des approches allemande, britannique et française qui considèrent le chahut et les comportements perturbateurs comme violents car pouvant être vécus comme tels par les pairs, pour qui le processus d'apprentissage est perturbé, mais aussi par les enseignants qui peuvent le vivre comme une agression personnelle, un manque de respect et dont l'effet cumulatif est source de stress.

Il semble que les agressions physiques sont peu fréquentes et ont un caractère épisodique et isolé. Toutefois, l'Observatoire européen s'interroge, comme pour les autres pays, sur l'existence d'un « chiffre noir » alimenté par l'absence de déclarations ou de plaintes afin de ne pas nuire à la réputation de l'établissement ou, dans le cas des enseignants, d'éviter de remettre en cause leurs compétences.

S'agissant de la perception de la violence, les élèves affirment majoritairement en Espagne que les agressions sont en baisse tandis que les équipes pédagogiques font état d'une augmentation. Les autorités municipales représentées dans les établissements pensent que les taux sont plus ou moins stables.

Les lieux recensés comme étant les plus propices à la violence sont, par ordre décroissant, la salle de classe, la cour de récréation, les couloirs et enfin les autres lieux.

Victimes et agresseurs font partie de la même classe dans 41 % des cas. Que la classe soit un lieu de violence peut de prime abord paraître étonnant puisque c'est un lieu censé être sous la surveillance de l'enseignant. Il est cependant important de considérer qu'il s'agit d'un lieu particulièrement clos, où la promiscuité inévitable avec des pairs, et ceci à longueur de journée, peut être un des facteurs générateurs d'incivilités et parfois de violence (essentiellement verbale). On assiste donc en Espagne, comme en France, à un accroissement de la perception de la classe comme lieu de violence. Il convient à cet égard de souligner que la notion de classe est spécifique aux systèmes espagnol et français car en Allemagne comme en Angleterre, où l'enseignement par matières optionnelles prédomine, la classe n'existe pas de manière aussi rigide dans l'enseignement secondaire.

En revanche, les intercours, les moments non surveillés par les enseignants ne sont pas vécus comme des moments susceptibles d'être violents, contrairement à la France ou à l'Angleterre où les moments de repas ont été réduits dans certains établissements.

Un des motifs de préoccupation de l'Espagne tient aux difficultés d'intégration scolaire des enfants issus de l'immigration marocaine et des risques de violence qui peuvent en résulter. L'étude révèle une préoccupation similaire en Allemagne, qui résulte des mouvements migratoires importants en provenance des pays d'Europe centrale depuis la réunification et de la montée de la xénophobie.

D'un point de vue qualitatif, il ressort des travaux de l'Observatoire européen que le climat dans les établissements scolaires est, en Espagne, globalement positif, mais que la situation pourrait devenir préoccupante en raison de la fréquence accrue des agressions physiques et des violences verbales et ce, plus particulièrement dans les établissements publics. De plus, l'incompréhension entre les parents et l'école semble s'accroître et le fossé se creuser entre les aspirations de jeunes scolarisés de plus en plus longtemps et ce que leur propose le système scolaire. Les revendications du côté parental sont de plus en plus exigeantes et les enseignants se plaignent de difficultés croissantes qui résultent de l'extension de l'obligation scolaire de 14 à 16 ans. La massification de l'enseignement ne se fait donc pas non plus aisément en Espagne, surtout pour des jeunes dont les familles préféreraient, du fait de leurs difficultés économiques, que leurs enfants se mettent au travail sans percevoir quelle pourrait être la plus-value d'un séjour prolongé à l'école.

c) Allemagne

En Allemagne, la gestion du système éducatif relève de la compétence de chaque Land et de son ministre de l'éducation. La première étude scientifique, menée dans les années 1990 par une commission pour la prévention et le contrôle de la violence, indépendante du Gouvernement, concluait qu'il n'y avait pas de manifestation d'une augmentation régulière des comportements agressifs chez les élèves scolarisés, malgré les discours contraires des enseignants et des médias et l'augmentation d'un sentiment d'insécurité.

Les faits violents les plus souvent répertoriés en milieu scolaire sont constitués de la violence verbale, suivie du vandalisme, des bagarres et agressions physiques entre pairs, des menaces avec armes ou harcèlement sexuel. 57,7 % des garçons et 45,4 % des filles interrogés ont reconnu avoir commis des actes de vandalisme. Ces derniers chiffres conduisent l'Observatoire européen à penser que la culture anti-scolaire est, en Allemagne comme en France, en augmentation.

Le port d'armes semble être une des préoccupations majeures des autorités allemandes. A Nuremberg, 15 % des élèves ont admis introduire des armes dans l'enceinte de leur école ; à Berlin, ils sont 26 % à déclarer être armés, tandis qu'en Bavière, lors d'une enquête effectuée en 1995, 30 % des élèves ont reconnu être en possession d'une arme quelconque. L'Observatoire européen souligne cependant que très peu d'incidents dus à l'usage d'armes ont été signalés.

S'agissant des causes de la violence, 66,5 % des filles et 63,5 % des garçons expliquent que c'est un moyen d'attirer l'attention, un moyen d'intégration dans les groupes de pairs. En revanche, les filles ont une vision plus critique que les garçons sur les facteurs sociaux susceptibles d'engendrer un comportement violent, ces derniers citant plus souvent des facteurs individuels tel que l'ennui.

En dépit de la réunification, de la vague d'immigration qui s'en est suivie et du sentiment d'insécurité qui a pu se développer, l'Observatoire européen souligne qu'il n'existe pas de différence notable dans les comportements agressifs et asociaux entre les Länder de l'ouest et de l'est et qu'il n'y a pas davantage d'écart notable entre le comportement des enfants allemands et celui des enfants étrangers. En réalité, la vie scolaire est plus affectée par les problèmes de violence dans les écoles à l'ouest que dans celles de l'est, bien que, dans l'ensemble, la plupart des écoles ne se sentent pas ou peu touchées par la violence.

2. Des approches diversifiées

a) Angleterre

L'approche britannique, essentiellement comportementaliste et psychologique, s'attache à la prévention des comportements violents, à partir de techniques de médiation et de communication qui ont largement été exportées et adaptées dans d'autres pays européens tels que l'Espagne, l'Italie, la Belgique ou l'Allemagne. Elle privilégie en particulier la création d'unités d'accueil temporaires pour les élèves perturbateurs qui peuvent s'apparenter aux classes relais.

Selon M. Eric Debarbieux,21 le traitement des incivilités repose en outre sur un encadrement différent du système français : « Bien des établissements s'en tirent mieux en Angleterre qu'en France, mais c'est parce que les profs y font vingt heures de cours et dix heures de tutorat ou de vie scolaire. Il n'y a pas de CPE en Angleterre, pas de surveillants. C'est la communauté même qui prend en charge la civilité. Mais il y a des choses que la France traite mieux, comme la violence dure. »

b) Espagne

Différentes actions s'attachent à promouvoir, en Espagne, la tolérance au sein des établissements scolaires. Certaines de ces actions sont menées à un niveau national, d'autres sont décentralisées au niveau des provinces.

La nouvelle loi d'orientation scolaire (LOGSE) insiste par exemple sur la nécessité de faciliter l'intégration des enfants étrangers ; elle reconnaît la diversité des nationalités, cultures et ethnies dans les salles de cours. Plus généralement, elle prévoit la diminution du nombre d'élèves par classe, l'aménagement des programmes, l'éducation au civisme et à la démocratie, la possibilité d'adapter le programme général aux particularités de chaque école, la formation continue des enseignants afin de les préparer à affronter personnellement les situations de violence et à les traiter de manière éducative. L'accent est mis sur la gestion du comportement, les techniques de résolution de conflit, la formation à la médiation, le rôle de tutorat des professeurs et des structures de conseil et d'orientation au niveau de toutes les écoles secondaires.

c) Allemagne

A l'instar de la Grande-Bretagne, les mesures de lutte contre la violence s'inspirent, d'une approche psychologique et le traitement est plus individuel que social. Les programmes anti-violence sont fondés sur les techniques de médiation entre élèves, le tutorat et l'aide psychologique.

Cependant, l'implication de l'établissement, les notions de respect des règles de vie et des individus nécessitent le développement d'un projet institutionnel qui se traduit par l'importance accordée au règlement de l'établissement auquel il est systématiquement fait référence en cas de problème. On note une volonté accrue de travail en partenariat avec les familles et les autres institutions.

Les pratiques pédagogiques, basées sur des méthodes de travail en petits groupes, tendent à éviter toute pédagogie frontale afin de favoriser la communication entre les élèves et les enseignants. Les élèves en échec scolaire bénéficient d'une aide individualisée ou sont réorientés vers une autre filière afin de favoriser leur développement individuel.

En matière de prévention, le gouvernement fédéral encourage le tutorat, l'assistance de psychologues en milieu scolaire, l'ouverture des écoles sur le quartier, ainsi que la formation continue des enseignants à la gestion des conflits et à la médiation.

Un partenariat a été ainsi instauré entre les autorités éducatives et la ville de Francfort afin de discuter des problèmes rencontrés et des mesures à prendre. Des réunions rassemblent ainsi non seulement les responsables de la politique éducative du Land, mais aussi les élus locaux et les commerçants de la ville. Selon les initiateurs de ce programme et les différents participants, le travail mené dans le cadre de ce projet a significativement changé le comportement des jeunes concernés et ils enregistrent une baisse significative des cas de violence.

d) Belgique francophone

C'est surtout depuis la fin des années 1980, que la violence fait partie des préoccupations d'un certain nombre d'établissements de la Communauté française de Belgique, notamment sous l'angle des difficultés résultant des conditions de scolarisation des jeunes issus de l'immigration.

Le gouvernement belge a mis en place une politique de discrimination positive en 1989 avec la création de huit ZEP et de ZAP (zones d'action prioritaire) afin de développer des actions éducatives spécifiques pour l'intégration des enfants immigrés dont la langue maternelle n'est pas le français. La Communauté française de Belgique s'attache, quant à elle, à faire disparaître les préjugés et les comportements racistes, par la formation des enseignants.

En 1993, a été instauré un service de médiation scolaire dans la région Bruxelles-Capitale, impliquant l'emploi de 28 médiateurs répartis dans 22 écoles afin de lutter contre le décrochage scolaire et la violence dans les écoles. Cette fonction, qui consiste faire le lien entre les familles, l'école, les jeunes mais aussi le quartier et les autres partenaires sociaux, est appréciée des chefs d'établissements : « dans le cadre de la politique de discrimination positive, la médiation scolaire s'avère être la mesure originale la plus efficace parmi les propositions récentes et dont les effets se feront sentir à long terme . »

A l'instar des autres pays européens, l'éducation à la citoyenneté fait partie des priorités et des conseils d'élèves sont créés en vue de favoriser l'apprentissage des droits et devoirs par les élèves et de développer une culture du dialogue et de la médiation. L'Université Libre de Bruxelles forme enseignants et élèves aux techniques d'écoute et de médiation afin de réguler et assurer la gestion des conflits dans leur établissement.

D. LA POLITIQUE DE LUTTE CONTRE LA VIOLENCE

L'éducation est bafouée lorsque la violence n'est ni combattue, ni sanctionnée, ni prévenue. La lutte contre celle-ci est donc un enjeu de société qui requiert à la fois une forte impulsion politique et la mobilisation de tous les acteurs sur le terrain.

1. Quel consensus sur le diptyque prévention / répression ?

Au cours des auditions et visites d'établissements, les nombreux interlocuteurs de la mission ont formulé un certain nombre d'observations ou témoignages relatifs aux moyens de remédier à la violence en milieu scolaire. Ces observations, d'autant plus pertinentes qu'elles sont fondées sur une présence quotidienne au sein de l'école et donc une connaissance concrète du terrain, ont retenu toute l'attention du rapporteur. Par-delà leur diversité, elles mettent l'accent sur les bienfaits des actions de prévention s'inscrivant dans la durée et sur la nécessité d'apporter une réponse ferme et rapide à toute manifestation de violence.

a) De l'importance d'apporter une réponse ferme et rapide

L'instauration dans les établissements scolaires d'un climat de sécurité propice au travail passe par un traitement en temps réel des incidents, ainsi que le montre l'expérience du collège République de Bobigny dans la Seine-Saint-Denis, dans lequel tout incident est examiné dans la journée. Le respect de l'autorité des enseignants en est l'enjeu.

La gestion des situations de crise requiert cependant, de l'avis général, un effort de communication et de médiation de la part de l'ensemble de l'institution scolaire (établissement, inspection académique, rectorat, ..etc), en direction tant des élèves et des parents que des personnels.

En matière de procédures disciplinaires et de sanctions, le SGEN-CFDT, favorable à la mise en place de commissions de médiation au sein des établissements, souligne la nécessité de prévoir une graduation des sanctions. Force Ouvrière met l'accent sur les inconvénients de la circulaire du 11 juillet 2000 relative à l'organisation des procédures disciplinaires qui demande aux enseignants de distinguer les punitions scolaires des sanctions disciplinaires. Cette mesure qui a pour conséquence de les faire renoncer à certaines punitions telles que la note zéro ou les lignes porterait atteinte à leur autorité. La FCPE estime que la convocation des conseils de discipline est parfois injustifiée, tandis que le SPDEN souligne que la délocalisation des conseils de discipline décidée par le plan Allègre risque de déresponsabiliser les établissements.

S'agissant des exclusions prononcées à l'encontre des élèves, FO relève les difficultés résultant, pour les établissements, de l'obligation de trouver un établissement d'accueil à un élève exclu pour un motif disciplinaire. En pratique, en l'absence de solution alternative d'accueil, il arrive que l'élève reste en définitive dans son établissement, ce qui lui procure un sentiment d'impunité tout à fait préjudiciable au respect de la discipline et de la valeur d'exemple de cette grave sanction. Le SGEN-CFDT insiste pour sa part sur la nécessité d'organiser à titre préventif une procédure de « réinstallation » de l'élève exclu à titre temporaire.

En ce qui concerne la présence de la police dans les établissements, selon une enquête réalisée par la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) auprès de ses adhérents, 40 % des parents y seraient favorables, en particulier dans les régions les plus exposées (région parisienne, Nord). Les enseignants, réputés plus réservés, ne la rejettent pas de manière systématique : ainsi, pour le SGEN-CFDT, « la loi doit s'appliquer aussi à l'intérieur de l'école sans exception, il ne faut donc pas exclure l'intervention de la police si nécessaire. » C'est également sous l'angle de la prévention que sont abordées les relations entre l'école et la police.

b) La nécessité de mettre en _uvre une politique de prévention durable

Tant la FEN que le SNES et la PEEP plaident en faveur du renforcement des actions de partenariat entre l'école, la justice, la police et les travailleurs sociaux impliqués au niveau local. Le témoignage recueilli par la mission au collège République de Bobigny montre que le succès d'un tel partenariat s'inscrit dans la durée nécessaire à l'instauration d'un climat de confiance mutuelle entre deux univers a priori peu familiers.

L'éducation à la prévention fait l'objet d'un large accord, la FCPE exprimant en particulier sa satisfaction relative à la mise en place de comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC) au sein des établissements du second degré. Ces comités concourent notamment à prévenir et le cas échéant repérer les comportements à risque parmi les adolescents. Elle insiste par ailleurs sur la nécessité d'engager un dialogue sur la violence dès la maternelle et de sensibiliser ainsi les tout petits. Soulignant que l'école doit prendre en compte les difficultés psychologiques de certains élèves, le SNPDEN appelle de ses v_ux la création de postes de psychologues directement placés sous l'autorité des chefs d'établissement. De l'avis général, les moyens en personnels médicaux et médico-sociaux demeurent largement insuffisants.

L'accent est également mis sur l'éducation à la citoyenneté, la PEEP relevant en particulier que l'exemplarité des adultes représente en la matière un facteur essentiel de lutte contre la violence. La FCPE souligne la nécessité de valoriser l'apprentissage de la règle de droit, qui doit s'imposer à tous et le rôle des délégués des élèves.

Face au défi que représentent les incivilités pour les enseignants, la FCPE insiste sur la nécessité de leur dispenser dans les IUFM une formation à la pédagogie et à la gestion des groupes. Si la stabilité des enseignants dans les zones sensibles mérite sans aucun doute d'être encouragée, leur rotation rapide semble assez inévitable compte tenu d'une part de l'usure rapide résultant de l'exposition aux incivilités et à la violence et, d'autre part, aux conditions de déroulement des carrières. Les conditions d'affectation pourraient néanmoins être révisées.

S'agissant de l'équipe de direction, dont tous les interlocuteurs s'accordent à reconnaître l'importance, le SGEN-CFDT souhaite qu'elle soit systématiquement composée de deux personnes et qu'elle intègre en outre du personnel plus spécialement chargé de l'animation et de la coordination au sein de l'établissement. Le SPDEN insiste quant à lui sur les réelles insuffisances de la formation des chefs d'établissement par rapport aux difficultés croissantes de la fonction et sur l'absence totale de perspective de reconversion vers d'autres professions de la fonction publique. La prévention de la violence requérant toutefois l'implication de tous les personnels, l'importance de la notion d'équipe éducative est soulignée à la fois par la FEN et la FCPE.

Si les interlocuteurs de la mission reconnaissent que l'augmentation des moyens ne saurait à elle seule constituer un remède miracle, le renforcement des moyens en matière de surveillance suscite néanmoins une attente générale, qu'il s'agisse de la surveillance préventive des bâtiments contre les intrusions (FO) ou du besoin d'une présence adulte en plus grande proportion à l'intérieur des établissements (FO, FEN-UNSA, SPDEN, PEEP). En outre, les élèves, premières victimes de la violence semblent eux-mêmes réclamer davantage de surveillants, ce qui constitue une demande de protection bien légitime. 

Enfin, en ce qui concerne la relation avec les parents, tant La FCPE que la PEEP regrettent le manque de concertation entre certains enseignants et les parents d'élèves ou leurs délégués et l'insuffisante implication des familles dans le fonctionnement de l'école. Elles soulignent les services que pourraient rendre les parents dans bien des circonstances, au-delà des seuls conseils de classe. Selon la FCPE, « il n'est pas sain que les parents ne viennent à l'école seulement quand quelque chose ne va pas. Certains parents n'osent pas venir parce que leurs enfants sont en échec scolaire et qu'eux-mêmes l'avaient été. » Le SGEN-CFDT reconnaît qu'« il faut des associer au maximum les parents à la vie de l'école, les informer. Les parents peuvent rendre certains services dans la mise en _uvre de projets pilotés par les enseignants. » En outre, tant le SNES que la FCPE recommandent de ne pas stigmatiser l'attitude de parents démissionnaires, tandis que ces derniers éprouvent des difficultés à remplir leur rôle.

2. Les plans de lutte contre la violence scolaire 

Les plans de lutte contre la violence à l'école se sont succédé depuis le début de la dernière décennie. Sans faire preuve d'un excès de fatalisme, on ne peut que constater le caractère très relatif de leur efficacité.

a) Un exercice obligé pour les ministres de l'éducation nationale ?

On dénombre pas moins six plans de lutte contre les violences scolaires mis en _uvre au cours des années 1990 :

mai 1992 : le plan Lang prévoit des créations d'emplois administratifs et une priorité de mutation pour les enseignants des établissements sensibles ;

mars 1995 : le premier plan Bayrou présente 12 mesures tendant notamment à renforcer la collaboration entre police, justice et école, à créer un numéro d'appel téléphonique spécifique et à développer l'éducation civique ;

mars 1996 : le second plan Bayrou est constitué de 19 mesures ordonnées autour de trois orientations : le renforcement de l'encadrement, les relations élèves-parents, les établissements et leur environnement ;

novembre 1997 : la première phase du plan Allègre, mise en _uvre au début de l'année 1998 concentre des moyens supplémentaires dans dix sites expérimentaux répartis sur les six académies les plus touchées (Aix-Marseille, Amiens, Créteil, Lille, Lyon, Versailles).

Ce plan concernait 411 collèges et lycées regroupant 270 000 élèves. Autour de ces établissements ont été réunies, selon une logique de réseau, les 1 742 écoles de leur secteur accueillant 330 000 élèves.

En 1998 et 1999, ces écoles et établissements ont bénéficié de 485 emplois d'infirmières et assistantes sociales, de 100 postes équivalents temps plein de médecins scolaires, de 400 emplois ATOS, de 100 emplois d'encadrement et de direction et de 4 728 aides-éducateurs.

Ce plan a été complété par trois mesures : il s'agit, d'une part, de dispositions permettant de réagir immédiatement aux actes de violence, ce qui suppose à la fois de refuser l'impunité aux agresseurs et de soutenir les victimes : la mise en _uvre de la loi du 17 juin 1998 qui aggrave les sanctions pénales encourues pour des faits de violence commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou à ses abords, la signature en mars 1999 dans 14 départements d'une convention avec l'Institut national d'aide aux victimes et de médiation (INAVEM), la création d'une cellule « SOS violences » dotée d'un numéro azur (08 01 55 55 00). En matière de prévention, ce plan a permis d'engager un programme de partition des plus gros collèges, car il est avéré que la taille excessive de certains établissements, spécialement en Ile-de-France, aggrave la violence ;

- janvier 2000 : la seconde phase du plan Allègre tend à étendre le dispositif initial à dix académies et vingt sites, soit 506 collèges et lycées et 2 338 écoles. Les moyens supplémentaires prévus consistent en 181 emplois d'infirmière, 107 emplois d'assistant de services sociaux, 18 emplois de médecin scolaire, 100 emplois de conseilleur principal d'éducation ; 400 emplois de surveillant, 2 005 aides éducateurs et 1 028 aides au cadre de vie.

D'autres mesures tendent à renforcer les équipes de terrain, les équipes de direction des établissements et à mobiliser tous les services de l'Etat (gendarmerie, police, justice ...) afin de développer les procédures rapides d'intervention en cas d'incidents. Les observatoires départementaux des phénomènes de violence sont chargés d'établir des diagnostics communs.

Par ailleurs, l'aide aux victimes est développée : cellules d'aide, de soutien et d'écoute, présence de représentants de l'éducation nationale aux côtés des victimes au cours des procès.

Enfin des recommandations aux chefs d'établissement ont été données sur la conduite à tenir face aux principales situations de violence, à l'égard de la victime et de l'auteur, et sur les mesures à prendre dans le cadre de la vie scolaire.

Ce dispositif a été complété par une série de mesures de préventions :

· suivi spécifique des élèves en difficulté grâce au tutorat, aux classes relais et aux contrats de réussite scolaire ;

· augmentation du nombre de classes et d'internats-relais (250) permettant d'accueillir temporairement près de 5 500 collégiens en risque de marginalisation scolaire ;

· mise en place de structures de prévention : comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté, lieux d'écoute pour les élèves et de communication avec les familles, lancement de l'opération « Ecole ouverte » ;

- juillet 2000 : annonce par M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale d'une série de mesures destinées à limiter la violence scolaire à la rentrée 2000 :

· publication de deux décrets du 5 et du 6 juillet 2000 relatifs, le premier au règlement intérieur des établissements scolaires et le second aux procédures disciplinaires ;

· lancement d'une dizaine de chantiers-pilotes d'internats éducatifs destinés à accueillir les jeunes en rupture familiale ou scolaire ;

· inscription de 50 millions de francs dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000 pour la réfection d'écoles primaires ;

· attribution de 5 000 bourses de mérite pour des lycéens en ZEP ;

· création de 1 000 emplois « d'adultes-relais » qui sont des collaborateurs recrutés à partir d'une aide forfaitaire de l'Etat dans le cadre de la politique de la ville pour faciliter les relations entre l'école et les quartiers ;

· relance des contrats éducatifs locaux afin de prendre en charge les élèves hors du temps scolaire ;

octobre 2000 : création d'un Comité national de lutte contre la violence à l'école, placé auprès du ministre, présidé par Mme Sonia Henrich, inspectrice générale de l'éducation nationale, et composé notamment de magistrats, de policiers, de représentants des parents d'élèves, des élèves, et, pour la première fois, des élus locaux : ce Comité a pour mission d'identifier et d'analyser l'évolution des violences scolaires et de faire des propositions au ministre.

b) Des résultats décevants

Force est de constater que les résultats enregistrés par ces plans successifs ont été décevants.

Le plan lancé en 1998 a certes permis de diminuer la violence dans certains établissements, mais la dégradation de la situation s'est poursuivie dans d'autres. Toutefois, des disparités importantes s'observent selon le type d'établissement, les collèges obtenant de meilleurs résultats que les lycées professionnels et surtout les lycées, et selon les départements.

Ainsi, la violence a-t-elle baissé de 40 % dans les établissements expérimentaux de l'Oise, concernés par le plan, alors qu'elle n'a fait que se stabiliser dans le reste du département.

Dans les Bouches-du-Rhône, les faits graves ont baissé de 27 % en deux ans dans les lycées et collèges concernés, contre 15 % dans l'ensemble du département.

Dans le Vaucluse, la baisse est de 40 % sur les sites expérimentaux contre 27 % dans le reste du département.

En revanche, la situation a continué à se dégrader sérieusement à Paris et dans sa banlieue : si la baisse des violences a été estimée à 5 % en Seine-Saint-Denis, les faits graves ont augmenté et les agresseurs sont de plus en plus jeunes.

Sur un plan général, les statistiques de la dernière année scolaire révèlent une augmentation de la violence pour certains faits graves (cf supra).

Au surplus, le bilan qualitatif pourrait sans doute être également amélioré. Ainsi, une enquête du ministère de l'éducation nationale montre que les établissements associant les personnels, aides-éducateurs y compris, les parents d'élèves et les délégués des élèves, ont obtenu les meilleurs résultats. Si la présence d'aides-éducateurs a contribué à un changement de climat dans de nombreux établissements, leur rôle, trop souvent conçu de manière restrictive, s'est borné à la « pacification » des cours de récréation et des couloirs, et leur manque de formation s'est parfois révélé être contre-productif : il a pu nuire à leur intégration au sein de l'équipe éducative sans leur permettre d'affirmer leur autorité vis-à-vis des élèves. Plusieurs interlocuteurs de la mission ont souligné le besoin de véritables adultes capables d'imposer une distance aux adolescents, au-delà de la compassion que peuvent ressentir les « grands frères » La formation et la préparation des aides-éducateurs à des tâches parfois délicates doivent donc constituer une priorité. Dans cette perspective, on pourrait examiner si, dans une certaine mesure, leur présence dans la classe en qualité d'assistant d'enseignement ne serait pas de nature à aider les enseignants dans la gestion des groupes difficiles.

D'une manière générale, on ne peut que regretter que les politiques de lutte contre la violence n'aient fait l'objet à ce jour d'aucune évaluation sérieuse, malgré l'ampleur des moyens engagés. De nombreux plans se sont succédé, cette succession et leur nombre étant le symbole de leur échec. L'évaluation de ces politiques serait pourtant indispensable pour identifier et promouvoir les pratiques les meilleures. La restauration d'un climat scolaire serein ne tiendrait-elle pas autant à l'implication quotidienne de chacun, élève, enseignant, surveillant, chef d'établissement au sein de l'école et au niveau local, notamment dans le cadre des partenariats avec la police, la justice, les élus locaux, les associations de quartiers, qu'aux effets d'annonce des plans nationaux ?

Outre ce travail de partenariat et de prévention, outre la stabilisation des personnels dans les établissements difficiles et une présence masculine accrue (ce qui suppose la multiplication des postes à profil), outre la restauration de l'autorité des adultes, le respect de l'altérité et de l'autorité, outre l'enseignement de notions simples de morale, il faut également dissuader : Pourquoi ne pas systématiser la vidéosurveillance aux abords des établissements ? Pourquoi ne pas contrôler plus souvent (cela se pratique parfois) l'identité et aussi le contenu des sacs et cartables ?

Il faut enfin savoir punir quand c'est nécessaire. Ne jamais laisser un acte d'incivilité et de violence, quelle qu'en soit la nature, sans réponse devrait être la règle d'or. La faiblesse engendre la faiblesse.

Des visites dans des établissements « à problèmes » ont persuadé les membres de la mission qu'une graduation intelligente des sanctions, le concours actif des parents (ce qui n'est pas toujours facile à réaliser), celui des élèves eux-mêmes, donnent des résultats positifs.

Certes l'école n'est que le reflet et la caisse de résonance de la société. C'est une raison supplémentaire pour essayer d'y éradiquer la violence sans oublier de la combattre par ailleurs. C'est une affaire de moyens parfois, d'usage de ces moyens souvent, de volonté toujours.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport d'information au cours de sa séance du mercredi 7 février 2001.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Le président Jean le Garrec a tout d'abord pleinement souscrit à la remarque selon laquelle l'école constituait une caisse de résonance de la société. Il a ensuite formulé les observations suivantes :

- Les collectivités territoriales ont accompli en matière de sécurité des bâtiments un effort considérable dont on peut penser qu'il aurait demandé quarante ans à l'Etat. L'ampleur du transfert de charges opéré par la décentralisation provoque désormais une très grande méfiance des collectivités territoriales à l'égard de nouveaux transferts de compétences même si ceux-ci sembleraient logiques s'agissant des ATOS ou de la médecine scolaire.

- On ne peut qu'approuver la recommandation relative à la nécessaire prise en compte de la maintenance préventive dans les opérations de construction. Elle est parfois mise en _uvre grâce à une certaine déconcentration de moyens au profit des établissements  dont on peut se demander s'il s'agit d'une pratique générale : par ailleurs on ne peut que partager le constat fait par le rapporteur relatif au retard de mise en conformité des machines-outils dans les SEGPA.

- En ce qui concerne la violence dans les établissements scolaires, on ne peut qu'être favorable aux propositions formulées sur la médiation, la formation au sein des IUFM et l'importance de la permanence de l'équipe éducative et du partenariat. La recommandation relative à l'augmentation de la présence masculine dans certains établissements est compréhensible. Ses modalités de mise en _uvre pourraient cependant difficilement se traduire par un quota et elles doivent faire l'objet d'une réflexion plus approfondie.

M. Jean-Pierre Baeumler, membre de la mission d'information, a souligné la qualité de l'exposé du rapporteur ainsi que celle des travaux accomplis sur de nombreux sujets : la sécurité alimentaire, la sécurité des équipements, la responsabilité des chefs d'établissements et la violence scolaire. La hausse des faits graves constatés en la matière constitue un signal d'alerte face à une situation qui n'est pas nouvelle mais sur laquelle a longtemps été jeté un voile pudique. La lutte contre cette violence est une priorité absolue.

Sur tous ces sujets, les pouvoirs publics ne sont pas restés inertes : la loi du 17 juin 1998 a ainsi aggravé les sanctions pénales applicables aux délits commis dans les établissements scolaires ou à leurs abords ; de même plusieurs plans ont été mis en _uvre par les gouvernements successifs. Les propositions formulées dans le rapport s'inscrivent dans le droit fil de ces politiques, ce qui montre bien la difficulté qu'il y a à faire des propositions alternatives.

Le Gouvernement actuel participe de cet effort en faveur de la sécurité dans les établissements scolaires et consacre d'importants moyens en faveur des établissements les plus sensibles : présence des aide-éducateurs (au nombre de 63 000) dans ces établissements, recrutement, depuis 1998, de 1 500 infirmières scolaires soit plus que dans les dix années précédentes, enveloppe de 100 millions de francs destinée à la mise en place de collèges à taille humaine prévue par le « plan Royal » de 1999, développement de la coopération entre l'éducation nationale, la justice et la police notamment par le biais des contrats locaux de sécurité. En outre, le Gouvernement accorde une place croissante à la sécurité au sein des projets éducatifs en associant les parents d'élèves de manière accrue à ces actions, en développant le soutien aux victimes et enfin en réhabilitant le rôle des internats.

On peut distinguer dans le rapport trois types de propositions :

- Certaines ne sont que le rappel nécessaire de mesures réglementaires existantes mais insuffisamment, voire pas du tout appliquées. Tel est le cas de la circulaire relative à la restauration scolaire, en cours de modification.

- D'autres, nouvelles, paraissent intéressantes mais mériteraient une étude et un chiffrage complémentaires, par exemple la mise à disposition d'un téléphone portable pour les enseignants, la surveillance permanente des bâtiments, l'obligation d'une maintenance préventive et la stabilisation des équipes enseignantes.

- Par ailleurs, certaines propositions peuvent difficilement recueillir une adhésion : il en va ainsi des nouveaux transferts de compétence qui doivent s'inscrire dans une réflexion globale sur la décentralisation, de la création d'une Agence française pour la sécurité qui constituerait un doublon avec des structures existantes telles l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) ou le Comité national de lutte contre la violence à l'école.

En bref, même si une approche globale représente une tâche difficile, ce rapport constitue un travail utile, qui conforte, en outre, la politique mise en _uvre par le Gouvernement.

M. André Schneider, membre de la mission d'information, a souligné le grand intérêt du travail réalisé. En matière de sécurité des établissements scolaires, tout le monde peut procéder à un diagnostic. La difficulté réside, en revanche, dans la rédaction d'une ordonnance commune. L'approche de ces questions est souvent trop parcellaire. C'est la raison pour laquelle la création d'une agence permettrait d'avoir une vision globale. On ne peut enfin que souligner l'existence d'un objectif partagé, celui de donner une meilleure tonalité à cette caisse de résonance de la société qu'est l'école afin de ramener celle-ci à sa mission fondamentale : l'instruction des enfants. Le souhait est unanime de parvenir ainsi à une école la meilleure possible pour l'éducation du futur citoyen.

M. Bernard Perrut, membre de la mission d'information, a souligné l'objectivité de ce rapport qui aborde les problèmes de la sécurité dans les établissements scolaires dans leur ensemble et a fait les remarques suivantes :

- La décentralisation a eu des effets positifs sur les équipements scolaires, mais il faut sans doute aller plus loin en termes d'initiatives et d'expérimentations.

- L'homogénéité de certaines classes en zones d'éducation prioritaire peut renforcer les risques de violences et d'insécurité.

- La drogue à proximité des écoles engendre également violences et décès parmi les jeunes.

- Les enseignants ont parfois peur d'enseigner dans certaines zones car leur rôle se réduit alors à faire la police en classe. Pour remédier à cet état de fait, il faudrait à la fois définir des postes à profil et faire évoluer la formation dans les IUFM afin de favoriser l'adaptation des enseignants inexpérimentés.

- Le rapport ne doit pas être considéré comme un catalogue de mesures mais comme une incitation à mettre en _uvre des actions concrètes sur le terrain.

M. Patrice Martin-Lalande, après avoir insisté sur la nécessité d'organiser un suivi de l'application des recommandations de la mission, a évoqué les points suivants :

- Il est tout à fait logique que le transfert de compétences en matière d'équipements scolaires soit aujourd'hui complété par l'attribution aux départements de missions en ce qui concerne la médecine scolaire et l'assistance sociale. Il y a également lieu de réfléchir au transfert de compétences sur les personnels ATOS, sans occulter les difficultés de moyens que cela soulèverait.

- La médiation doit être encouragée afin de multiplier les occasions de dialogue avec les élèves victimes de violence.

- Il est important d'instaurer un contrat de citoyenneté pour responsabiliser les élèves dans l'école assorti, le cas échéant, de sanctions proportionnées. Cela permettra de revenir sur le sentiment d'impunité qui existe trop souvent.

M. Alain Néri a fait les remarques suivantes :

- Il est préférable de parler d'« éducation » plutôt que d'« instruction » des élèves car les enseignants ont une large mission et, par ailleurs, de « restaurant scolaire » plutôt que de « cantine ».

- La décentralisation des équipements ne doit pas remettre en cause l'unité des personnels de l'éducation, tant enseignants que non enseignants. Il faut conserver la cohérence de l'ensemble de l'équipe éducative.

- La formation dans les IUFM doit être plus concrète, avec notamment une spécialisation permettant d'aider les futurs enseignants à faire face aux difficultés particulières d'intégration de certains élèves.

- Pour concilier des établissements à taille réduite, assortis de faibles effectifs dans les classes, et la diversification de l'offre de formation, il est nécessaire de développer le travail éducatif en réseaux.

- L'école de la République, qui est l'école de la citoyenneté, garantit le droit au respect à la fois pour les enfants et pour les adultes.

M. Bernard Schreiner a formulé les observations suivantes :

- Les transferts de compétences proposées par le rapporteur doivent s'accompagner d'une compensation financière par l'Etat.

- Les normes de construction, d'entretien et de sécurité dans les bâtiments scolaires ne doivent pas changer trop souvent au gré du bon vouloir des administrations.

- Il faut éviter d'envoyer systématiquement les jeunes enseignants dans les établissements sensibles et les élèves en difficulté dans des classes de niveau faible car cela risque de faire perdre l'envie aux uns et aux autres d'aller travailler à l'école.

M. Jean Delobel, après avoir insisté sur l'unité de l'équipe pédagogique, des cuisiniers et surveillants aux enseignants, les professeurs devant ainsi prendre leur part à la garantie de la sécurité et de la propreté dans les établissements, a estimé que les problèmes de drogue chez les élèves étaient sans aucun doute liés à l'amplitude des plages horaires laissées libres par les trous dans les emplois du temps et par l'attente des transports scolaires. C'est pourquoi il faut réaffirmer que les bus scolaires doivent avoir des horaires adaptés aux emplois du temps et que les emplois du temps doivent être faits pour les élèves et non pour les professeurs.

M. Jean-Claude Bateux a considéré que la construction d'équipements sportifs intégrés aux collèges devait être une obligation impérative pour les conseils généraux.

La commission a décidé, en application de l'article 145 du Règlement, le dépôt du présent rapport d'information en vue de sa publication.

ANNEXE 1

TRAVAUX DE LA MISSION D'INFORMATION

28 mars 2000

· Audition de M. Jean-Marie Schléret, président de l'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et d'enseignement supérieur, et de Mme Annick Dessagnes, secrétaire générale.

25 avril 2000

· Table ronde sur l'action des collectivités territoriales :

- Association des maires de France

Mme Odette Mader, maire de Saint-Maurice de Beynost (Ain)

M. Raymond Laffolley, maire de Villembray (Oise)

M. Jean-Marc Gilonne, responsable de l'action sociale, éducative, sportive et culturelle au département des études

Mme Kreps-Sellam, chargée d'études.

- Association des régions de France

M. Gérard Pourchet, vice-président de la région.

- Association des départements de France

Mme Odile Chérel, conseillère technique

M. Pierre-Olivier Philipi, conseiller technique

Mme Marylène Jouvien, attachée parlementaire.

20 mai 2000

· Audition de M. Georges Fotinos, inspecteur d'académie, et M. Jacques Fortin, professeur en sciences de l'éducation à l'université de Lille II .

6 juin 2000

· Audition de M. Jean-Pierre Riquois, trésorier général de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP).

· Audition de M. Eric Debarbieux, professeur à l'université de Bordeaux II, et de Mme Catherine Debarbieux, secrétaire générale de l'Observatoire européen de la violence scolaire.

21 juin 2000

· Audition de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) : Mme Martine Deldem, secrétaire générale adjointe, M. Jean-Paul Chambat, Mme Michèle Deroche.

· Audition de la Fédération des syndicats généraux de l'éducation nationale (SGEN-CFDT ) : M. Biger, secrétaire national, M. Mansoz.

4 juillet 2000

· Table ronde sur la sécurité alimentaire  :

- Syndicat national de la restauration collective (SNRC) :

M. Dominique Benezet, délégué général,

M. Laurent Rault, directeur de la qualité à la SOGERES.

- Comité de coordination des collectivités :

M. Jean-Loup Germain.

- Association des maires de France :

M. Bernard Chardon, maire de Vézelay.

- Syndicat national de l'administration scolaire et universitaire et des bibliothèques (SNASUB - FSU) :

Mme Michelle Hazard, secrétaire générale.

- Syndicat administration et intendance FEN - UNSA :

M. Jean-Yves Rocca, secrétaire général,

MM. Daniel Maslanka et Marc Fischer.

12 juillet 2000

· Audition du syndicat national des enseignements du second degré (SNES) : M. Robin et M. Berguin.

· Audition du syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN) : M. Jean-Jacques Romero, secrétaire national, Mme Françoise Charillon.

· Audition de la Fédération de l'éducation nationale FEN-UNSA :

- Mme Françoise Zumbiehl, conseillère fédérale ;

- M. Jean-Pierre Rulié, conseiller fédéral ;

- M. Jean-Yves Vayssières, conseiller fédéral ;

- Mme Christine Azaïs, secrétaire nationale du syndicat national des agents de l'éducation nationale (SNAEN-FEN) ;

- M. Daniel Moquet, secrétaire national du syndicat national du personnel technique de l'enseignement supérieur et de la recherche (SNPTES-FEN) ;

- M. Marc Fischer, syndicat administration et intendance (SAI-FEN).

28 novembre 2000

· Audition de la Fédération nationale de l'enseignement, de la culture et de la formation professionnelle de la Confédération générale du travail Force ouvrière (FNEC, CGT-FO) : M. Patrice Hamon, secrétaire fédéral chargé de l'hygiène et de la sécurité, M. Jean-Pierre Zalewski, enseignant.

· Audition de M. Martin Hirsch, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de M. Ambroise Martin, directeur de l'évaluation des risques de l'AFSSA.

29 novembre 2000

· Table ronde sur la sécurité des équipements sportifs :

-  M. Patrice Hamon (FNEC-FO) ;

-  M. Jean-Paul Tournaire et Mme Danièle Lenflé, syndicat national d'éducation physique (SNEP-FSU) ;

-  M. Jean-Jacques Biger, secrétaire national (SGEN-CFDT) ;

-  M. Jean-Marc Gilonne, responsable du service action sociale éducative, sportive et culturelle, Association des maires de France.

5 décembre 2000

· Audition de Mme Sonia Henrich, présidente du comité national de lutte contre la violence à l'école.

12 décembre 2000

· Table ronde sur la sécurité des ateliers et des équipements

dans l'enseignement technique et professionnel :

-  MM. Christian Guérin et Joël Dufour, Syndicat National de l'Enseignement Technique, Action, Autonome (SNETAA-FSU) ;

-  MM. Patrice Hamon et Marc Verschueren (FNEC-FO) ;

-  MM. Bernard Joly et Richard Béraud, Fédération de l'éducation nationale de la CGT (FERC-CGT) ;

-  M. Jean-Jacques Biger, (SGEN-CFDT) ;

-  M. Jacques Foucher, directeur-adjoint, chargé de la programmation et des actions éducatives, Direction des affaires scolaires et de l'enseignement supérieur, Conseil régional d'Ile de France.

14 décembre 2000

· Déplacement en Seine-Saint-Denis

- Visite du collège « République », Bobigny, sur le thème du partenariat Education-Justice-Police :

M. Jean-Paul Delahaye, inspecteur académique

M. Gilles Almosnino, proviseur « vie scolaire »

M. Pierre Guillerm, principal du collège

M. Lemoine, chargé de mission à l'Inspection académique

Mme Solabarieta, chargée de mission à l'Inspection académique

M. Lucien Perret, directeur départemental de la sécurité publique

M. Kross, premier substitut du Procureur

- Visite du collège « Jean Jaurès », Pantin ; rencontre avec M. Wilemme, principal, et l'équipe pédagogique du collège.

ANNEXE 2

DEUX EXEMPLES DE PARTENARIAT

Collège République - Bobigny - Seine-Saint-Denis

I) Partenariat éducation nationale-police-justice : lutte contre le port et l'usage de bombes lacrymogènes

Constat : Mi-octobre, par deux fois dans le collège et une fois à l'extérieur, usage de bombe lacrymogène.

Mesures internes : Rappel à la règle dans les classes repérées, sanctions pour non assistance, contrôle des cartables et poches pour les classes repérées.

Actions en partenariat  _ Intervention de la police sur le port d'armes,

_ Action de bailleur du quartier repéré (visite de cave et débat avec les délégués d'escaliers)

_ Lettre aux familles soulignant le rôle primordial des parents et rappelant la loi, cosignées par le Procureur, le commissaire, le principal

_ Contrôle aux abords du collège sur demande du Procureur de la République

II) Partenariat Education nationale-ville - RATP : Formation des délégués

Former des délégués de classe pour leur permettre de jouer leur rôle de représentant et de porte parole.

1) Mise au point du programme lors d'une première réunion avec des animateurs, deux CPE, deux enseignants, deux animateurs SMJ, deux chauffeurs RATP, un parent d'élèves.

2) Transport aller-retour assuré par la RATP.

3) Hébergement assuré par la municipalité.

4) Nourriture assurée par le collège.

5) Formation par les intervenants mentionnés.

6) Bilan au retour.

7) Compte-rendu à la communauté scolaire et aux partenaires.

ANNEXE 3

GRILLE INDICATIVE DES SANCTIONS
ANNÉE SCOLAIRE 2000-2001

Collège République - Bobigny - Seine-Saint-Denis

Catégorie 1 : DEVOIR SUPPLEMENTAIRE signé par les parents.

(Bavardages - Travail non fait ...)

Catégorie 2 : COLLE : Professeurs / Vie scolaire.

(Refus de travailler - Refus d'obtempérer - Agressivité verbale envers un élève...)

Catégorie 3 : COLLE  par l'équipe de la Vie scolaire le mercredi après-midi avec travail (devoir ou travaux d'utilité collective).

(graffitis - crachats - lancer de projectiles)

Catégorie 4 : AVERTISSEMENT avant exclusion (envoi par la poste) avec convocation de l'élève pour dialogue avec le C.P.E.

(Entrée et sortie en force de l'établissement ou de la classe - Incorrection - Grossièreté - Interruption du cours - Agressivité physique envers un élève - Cigarettes - Faux et usages de faux, falsification du carnet de correspondance)

Catégorie 5 : EXCLUSION de 1 à 8 jours (Accompagnée obligatoirement d'un travail récupéré par l'élève chaque matin et ramené le soir).

5 a (1 à 3 jours)

5 b (3 à 5 jours)

5 c (5 à 8 jours)

· Au 2ème avertissement
EXCLUSION

· Agression physique envers un élève

· Insolences répétées

· Dégradation du matériel scolaire volontaire avec réparation (Travaux d'utilité collective voire remboursement)

· Insultes envers un adulte

· Racket, vol

· Menaces directes à un adulte

· Port d'armes (toutes choses dangereuses + bombe)

· Exhibitionnisme dans l'établissement

Catégorie 6 : CONSEIL DE DISCIPLINE

Violence physique (agressions envers un adulte de l'établissement)

Violence à caractère sexuel

Coups et blessures graves ou récidives

Utilisation d'une arme ou d'une bombe lacrymogène

Les récidives seront sanctionnées plus sévèrement pour une faute équivalente

Le document ci-dessus peut servir de repère mais n'est pas un code pénal.

Le principal

ANNEXE 4

Circulaire du ministère de la santé publique et de la sécurité sociale

du 9 juin 1971 relative à la nutrition de l'écolier

2923 - Rapport d'information de M. Bruno Bourg-Broc sur la sécurité dans les établissements scolaires (commission des affaires culturelles)

1 Établissement régional d'enseignement adapté

2 Rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2001 de M. Thierry Carcenac , n° 2624, Annexe 11

3 Rapport annuel 1998

4 sur un échantillon de 495 établissements représentant environ 50 % du parc

5 Rapport annuel 2000

6 Rapport Assemblée nationale n° 2115

7 Ce décret transpose en droit interne la directive européenne n°95/63/CE du 5 décembre 1995 modifiant la directive de 1989.

8 Sont comptabilisés par les inspections académiques les accidents ayant engendré des dommages corporels nécessitant l'hospitalisation de l'élève blessé.

9 Journal officiel, Questions, 25 septembre 2000

10 Journal officiel, Questions, 9 octobre 2000

11 Rapport Assemblée nationale n° 871.

12 Gérard Salem, le Monde de l'éducation, janvier 2001

13 Journal officiel, Questions, 24 juillet 2000

14 trimestrielle du ministère qui consiste en une agrégation trimestrielle des faits de violence signalés par les établissements aux inspections académiques

15 Georges Tallon, Inspection générale de la vie scolaire, juillet 1979

16 Les cahiers de la sécurité intérieure, n° 15, 1994

17 Par ailleurs 30 centres de placement immédiat et 37 centres éducatifs renforcés, qui relèvent de la protection judiciaire de la jeunesse, accueillent à l'heure actuelle les mineurs délinquants.

18 Rapport au Conseil de l'Europe : « Le rôle de l'école dans la prévention de la délinquance juvénile », 1972

19 « Le quartier ou l'école ? déviance et sociabilité adolescente dans un collège de banlieue », étude de Agnès Van Zanten, publiée dans la revue Déviance et société, CNRS, 2000

20 Depuis la fin des années 1970, les pays scandinaves et l'Angleterre se sont particulièrement intéressés au phénomène de « Bullying », qui consiste en une violence à long terme, physique ou psychologique, perpétrée par un ou plusieurs agresseurs (bully) à l'encontre d'une victime (bullied) en position de faiblesse. Cette approche ne prend pas en compte la violence des adultes contre les élèves ni les violences anti-institutionnelles qui se traduisent par une augmentation des déprédations des locaux ou des agressions (verbales le plus souvent) à l'encontre des enseignants, représentants de l'institution. En outre, la manière d'aborder les phénomènes de violence ou de « comportements antisociaux » selon l'expression consacrée de certains pays d'Europe du Nord diffère d'un pays à l'autre : en effet, si en Angleterre ou aux Pays-Bas on les considère dans une perspective psychologique, en Espagne ou en France, les approches sont davantage criminologiques ou sociologiques.

21 entretien, Le Monde de l'éducation, janvier 2001