- - Rapport sur l'aval du cycle nucléaire Chapitre I (suite de la partie I) I.. Le parc français de centrales nucleaires, un patrimoine industriel concurrentiel B. Un effort dinvestissement de 455 milliards de francs permettant de maîtriser la totalité de la filière 1 1. La programmation et le montant de linvestissement 1 2. Un investissement de 281 milliards de francs dans les réacteurs à eau pressurisée 3 3. Un parc dune homogénéité exceptionnelle 7 4. Une sûreté et des taux de disponibilité satisfaisants 9 5. Un investissement dans le cycle du combustible de 112 milliards de francs pris en charge pour moitié par les clients étrangers de Cogema 12 6. La question du suréquipement 13 B. Un effort dinvestissement de 455 milliards de francs permettant de maîtriser la totalité de la filière Le nombre de réacteurs nucléaires à construire a été déterminé par les gouvernements successifs, en fonction des prévisions dévolution de la consommation délectricité. Celles-ci se sont avérées difficiles à établir, ce qui a pu entraîner des incertitudes sur les besoins déquipements. 1. La programmation et le montant de linvestissement Le ralentissement de la croissance économique et lamélioration de lintensité énergétique ont régulièrement démenti les prévisions de consommation délectricité. Le graphique ci-après le montre clairement. Figure : Comparaison de la consommation intérieure délectricité réalisée et des différentes prévisions effectuées en 1974, 1980, 1983 et 19951 En conséquence, le programme déquipement en centrales nucléaires dEDF a été décéléré. La première réorientation du programme électronucléaire date doctobre 1981, à lissue du débat sur le plan dindépendance énergétique. Les conditions de poursuite du programme sont adaptées à la forte baisse anticipée de la consommation délectricité. Ultérieurement aux orientations arrêtées par le Conseil des ministres en 1984, le gouvernement autorise les engagements suivant le tableau ci-après. Tableau : dates des derniers décisions de construction de réacteurs nucléaires
Le tableau suivant rappelle le calendrier de couplage des tranches nucléaires du parc dEDF. Tableau : calendrier de couplage des tranches nucléaires (REP)
2. Un investissement de 281 milliards de francs dans les réacteurs à eau pressurisée Léquipement de la France en réacteurs à eau pressurisée sest réalisé en trois périodes. La décision de construction des réacteurs de Fessenheim et de Bugey intervient avant le premier choc pétrolier. La deuxième vague de décision correspond au Plan Messmer, avec une accélération forte rendue nécessaire par lalourdissement de la facture énergétique. La troisième phase correspond à une décélération progressive nécessitée par le ralentissement de la croissance économique et une augmentation plus faible que prévue de la consommation délectricité. On trouvera ci-dessous la chronique de la mise en service industriel du parc nucléaire. Figure : Chronique de la mise en service industriel des réacteurs à eau pressurisée du parc dEDF Figure : Chronique en termes de puissances installées de la mise en service industriel des réacteurs à eau pressurisée du parc dEDF Tableau : Caractéristiques principales du parc électronucléaire d EDF
Linvestissement nucléaire dEDF sélève au total à 281 milliards de francs. Cet investissement a été financé principalement par lendettement externe. Le graphique et le tableau suivants présentent les chiffres annuels dinvestissement nucléaire et le montant de lendettement dEDF. Figure : Investissements dans le nucléaire et endettement à moyen et long terme dEDF Les chiffres correspondant au graphique se trouvent ci-dessous. Tableau : Investissements dEDF dans le nucléaire et endettement à long et moyen terme
Une remarque simpose. Une part importante de cet investissement a été financée par lendettement. Or la hausse des prix à la consommation tout au long des années 1970 et 1980 atteignait un niveau tel que les taux dintérêt réels ont été négatifs pendant de nombreuses années. Figure : Evolution de la hausse des prix à la consommation sur la période 1950-1998 La charge réelle de remboursement de la dette a été très inférieure à ce quelle serait aujourdhui si un tel effort dinvestissement devait être engagé. 3. Un parc dune homogénéité exceptionnelle Le tableau suivant donne la répartition du nombre de réacteurs par paliers. Tableau : Répartition du parc EDF par palier
La standardisation du parc nucléaire français est une des causes fondamentales de sa réussite. Elle a été décidée dès le départ par la Commission Peon. Comme prévu, des réductions de coûts ont été obtenues grâce à la courbe dexpérience et à leffet de série. · Les difficultés du palier N4 ou le coût des écarts par rapport à la standardisation Le palier N4 connaît des difficultés de mise en route qui contrastent avec la facilité avec laquelle le programme P4-P4 sest déroulé. Les deux premières réacteurs 1455 MWe de Chooz B1 et B2 ont été couplés au réseau respectivement à la mi 1996 et à la mi 1997. La tranche 1 de Civaux a été couplée au réseau fin 1997. Depuis lors, plusieurs difficultés sont apparues. En mai 1998, ce même réacteur a été arrêté en raison d'une fuite d'eau dans le circuit de refroidissement à larrêt (RRA), suivant un incident classé au niveau 1 puis réévalué au niveau 2. En tant que défaut pouvant être générique, les tranches de Chooz B1 et B2 ont été également arrêtées, le combustible de lensemble des réacteurs N4 devant être déchargé. Il semble quun défaut de conception du tracé du circuit soit en cause, avec la succession répétée de projections de fluide froid (40°C) et de fluide chaud (180°C) sur un coude du circuit. Par ailleurs, de nouveaux problèmes métallurgiques sont apparus fin décembre 1998 avec la détection de micro fissures autour de soudures du même circuit. Enfin, suite à laugmentation de puissance de 10 % du palier N4 par rapport au palier P4-P4, il semble que certaines pièces déjà installées sur les corps haute et moyenne pression de la turbine doivent être renforcées. Dans une certaine mesure, ces difficultés apportent une démonstration supplémentaire cette fois par labsurde, des vertus de la standardisation. 4. Une sûreté et des taux de disponibilité satisfaisants La sûreté dexploitation du parc dEDF est satisfaisante, à la fois selon les termes de lAutorité de sûreté et selon ceux de linspection générale de la sûreté à EDF. On peut constater sur la figure ci-après une diminution, au cours des trois dernières années, du nombre dincidents pour chacun des niveaux 0,1 et 2 admissibles. Figure : nombre dincidents annuels dans le parc électronucléaire dEDF, en référence à léchelle de gravité INES5 On trouvera ci-après, à titre de référence, la définition de léchelle de gravité INES utilisée pour classer et expliquer les incidents concernant la sûreté des réacteurs nucléaires. Tableau : Structure fondamentale de léchelle INES (International Nuclear Event Scale)
Un autre paramètre clé de la compétitivité du parc est la disponibilité des réacteurs. Sur les quatre dernières années, on constate que la disponibilité du palier REP 1300 augmente, grâce à lélimination des défauts de démarrage de ce palier à laugmentation du temps de séjour en réacteur du combustible. En revanche, la disponibilité du palier REP 900 a plutôt tendance à stagner. En 1997 lindisponibilité de 17,4 % se décomposait en 12,3 % liés aux arrêts programmés pour renouvellement du combustible et travaux de maintenance effectués dans le cadre normal de lexploitation et 5,1 % liés aux problèmes survenus sur les matériels ou aux retards dans les arrêts programmés6. Figure : Taux de disponibilité des réacteurs nucléaires dEDF On trouvera ci-après la comparaison des taux de disponibilité des réacteurs français comparés en 1997 avec ceux des réacteurs étrangers. La France se situe à cet égard dans la moyenne. Figure : Taux de disponibilité des centrales nucléaires en 19977 Le taux de disponibilité dun parc électronucléaire est fonction de plusieurs facteurs. Le premier facteur est le mode de fonctionnement des réacteurs. La plupart des centrales dEDF fonctionnent en suivi de charge, cest-à-dire que des variations à la marge de la puissance sont imposées aux réacteurs, en fonction des besoins du réseau. Cette situation génère davantage de problèmes - au demeurant mineurs - quun fonctionnement continu à pleine puissance. Le suivi de charge génère également des volumes deffluents supérieurs et probablement aussi un vieillissement plus rapide de certains composants. Le deuxième facteur influant fortement sur la disponibilité est la politique de maintenance. A cet égard, des arrêts de maintenance courts et fréquents sont plus favorables à la disponibilité mais sont plus coûteux. Lallongement de la durée des campagnes des combustibles pour le palier REP 1300 devrait produire des effets positifs sur la disponibilité. Le taux de disponibilité étant un paramètre clé de la compétitivité, un objectif de 90 % est assigné au réacteur du futur EPR. 5. Un investissement dans le cycle du combustible de 112 milliards de francs pris en charge pour moitié par les clients étrangers de Cogema Les investissements déjà réalisés dans le cycle du combustible comportent deux catégories principales : lenrichissement et le retraitement. Selon les indications données par Cogema8, linvestissement réalisé dans Eurodif sélève à 19 milliards de francs courants. Il est à noter à cet égard, que trois des quatre tranches de Tricastin sont dédiées à lapprovisionnement en courant électrique de lusine Eurodif. Linvestissement dans ces réacteurs ne doit toutefois pas être rajouté à linvestissement dEurodif, dans la mesure où le coût des 3 réacteurs est compté dans les investissements dEDF. Lensemble des installations de La Hague représente un montant de 60 milliards de francs, valeur de la fin des années 1980 - début des années 1990. Au total, lon arrive à un montant dinvestissements en francs courants pour la période 1976-1997 de 112 milliards de francs courants. Cet investissement correspond aux capacités denrichissement et de retraitement correspondant à un parc deux fois plus important celui dEDF. Tableau : Investissements du groupe Cogema dont Eurodif en francs constants9
Cogema indique que cet investissement a été cofinancé à hauteur de la moitié par ses clients étrangers. Au total, lon arrive donc pour la France, à un investissement total de 455 milliards de francs pour la R & D, les réacteurs et le cycle du combustible. 6. La question du suréquipement La question du suréquipement de la France en réacteurs nucléaires est une thèse fréquemment soutenue. Elle est notamment évoquée dans le rapport Energie 2010-2020 du Commissariat Général du Plan10. Cette thèse suppose que lélectricité nest pas une énergie comme une autre qui ne pourrait donc sexporter ou simporter. En réalité, lélectricité sexporte et simporte. Les chiffres des exportations dEDF figurent dans la partie suivante du présent rapport. LUnion européenne soriente dailleurs vers la libéralisation des marchés de lélectricité qui comprend bien entendu une dimension essentielle déchanges entre les pays. En fait, la capacité dexportation de la France est limitée par deux phénomènes. Le premier est que les parcs électriques des autres pays de lUnion européenne sont pour certains surcapacitaires. Mais rien ne dit quils le demeureront, à la suite des projets de réaménagements des capacités de production en Allemagne ou en Suède. Une marche forcée par ailleurs vers le respect du protocole de Kyoto pourrait tout aussi bien déclasser plus rapidement que prévu certaines centrales obsolètes. Le deuxième obstacle aux exportations délectricité est représenté par le nombre insuffisant de lignes à très haute tension reliant la France à létranger. Les capacités de ces lignes ne sont pas figées à jamais. Le progrès technique pourrait accroître les capacités de transport. La position de la DGEMP, exposée à vos Rapporteurs, mérite à cet égard dêtre présentée in extenso. A la question : « la DGEMP considère-t-elle que le parc électronucléaire est actuellement surdimensionné ? », la DGEMP répond de la manière suivante : « Des prévisions optimistes sur l'évolution de la consommation d'électricité en France et une meilleure disponibilité du parc ont conduit au cours de la décennie précédente à l'engagement anticipé de tranches nucléaires. « La surcapacité du parc nucléaire par rapport à la consommation intérieure française est de l'ordre de 5 à 6 GW, c'est-à-dire environ 4 tranches de 1400 MW. « Néanmoins, le système électrique français n'est pas isolé: le continent européen est déjà le champ d'échanges importants d'énergie électrique au travers des réseaux interconnectés. Ainsi, EDF exporte chaque année environ 15 % de sa production d'électricité, et en importe également, avec un résultat excédentaire qui conforte la balance extérieure de la France. « Le parc électrique français permet donc aujourd'hui de répondre à nos besoins, compte tenu notamment de l'évolution nucléaire de la consommation d'électricité dans notre pays. « Le développement des autres producteurs (notamment dans le domaine de la cogénération et des énergies renouvelables) qui peut résulter de l'ouverture de la production prévue par la loi sur le développement et la modernisation du service public de l'électricité pourrait, à l'avenir modifier cet équilibre. « L'évolution des besoins futurs en électricité en France et chez nos partenaires européens, mais également l'évolution de l'offre (marché, concurrence, modes de production alternatifs) et le prix des autres énergies peuvent en effet influer dans un sens ou dans l'autre sur cet équilibre. « Afin de maîtriser ces évolutions, le projet de loi sur la modernisation et le service public de l'électricité en cours d'examen propose de mettre en place des outils nécessaires à la mise en uvre de la politique énergétique dans le domaine de l'électricité. » Cliquer ici pour accéder à la partie II du chapitre I: Cliquer ici pour retourner au sommaire général: 1 Source : EDF-DPS Faits marquants 1995 2 A ce total, il faut ajouter les 1200 MWe de Superphénix. 3 Il sagit de la tranche de Civaux 2. 5 Sources : 1996 et 1997 : Rapport annuel dactivité de la DSIN, Secrétariat dEtat à lindustrie, Paris, 1998 ; 1998 : Jean-Paul Croizé, Le Figaro, 16/12/98 6 Source : DGEMP, audition du 21 janvier 1999. 7 Source : Wano, cité par la DGEMP, audition du 21 janvier 1999. 8 Audition de M. JL Ricaud, directeur de la branche combustibles et recyclage, Cogema, 7 janvier 1999. 9 Source : Cogema, audition du 7 janvier 1999. 10 Rapport de lAtelier Quelle politique pour la France ? Energie 2010-2020, Commissariat Général du Plan, septembre 1998.
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