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Rapport sur l'aval du cycle nucléaire
Par M. Christian Bataille et Robert Galley
Députés
Tome II : Les coûts de production de l’électricité

Suite et fin du Chapitre II

III. Les differentes filieres de production de l’electricite : reexamen des coûts et perspectives

G. Les énergies nouvelles renouvelables, bientôt compétitives dans certaines niches 111

1. L’éolien 111

2. L’énergie solaire 117

3. La géothermie 120

4. La production d’électricité à partir des déchets 121

H. Vers une production d’électricité mieux répartie ? 125

1. Le rapprochement de la production et de l’utilisateur 125

2. EDF, premier électricien mondial 127

3. Suez-Lyonnaise des Eaux : un groupe de premier plan dans le monde de l’énergie 129

4. Vivendi : un acteur français sur le marché mondial de l’énergie 131

G. Les énergies nouvelles renouvelables, bientôt compétitives dans certaines niches

Ce sont les énergies renouvelables susceptibles d’apporter une contribution notable à la production d’électricité qui sont détaillés dans la suite, à savoir l’éolien, l’énergie solaire, la géothermie et la production d’électricité à partir des déchets.

1. L’éolien

Le parc européen d'éoliennes a plus que triplé entre 1990 et 1996. Il atteint aujourd'hui 5000 MW en puissance cumulée. Les prévisions pour l'Europe en 2002 sont de 12500 MW cumulés.

Selon l'Ademe, le marché mondial de l'éolien devrait présenter une croissance annuelle de l'ordre de 20 % dans les toutes prochaines années et constitue une opportunité majeure de développement économique1.

· Une puissance spécifique faible qui oblige à multiplier le nombre des éoliennes

Les contraintes de fonctionnement des éoliennes sont nombreuses. Leur plage de fonctionnement optimal se situe pour des vents d’une vitesse comprise entre 15 et 25 mètres par seconde (m/s), c’est-à-dire entre force 7 et force 9 sur l’échelle de Beaufort.

La figure suivante détaille à titre d’exemple la courbe de puissance d’une éolienne de 750 kW. Un aérogénérateur de ce type est composé d’un rotor de 43 m de diamètre dont le pivot se situe à 55 mètres de hauteur.

Figure : Courbe de puissance d’une éolienne de 740 kW en fonction de la vitesse du vent (hauteur : 55 m ; diamètre du rotor : 43 m)

La puissance d’une éolienne de ce type est proche de 0 pour une vitesse de 4 m/s. Au-delà de 25 m/s (force 9), cette éolienne doit le plus souvent être arrêtée. Compte tenu de ces caractéristiques, seules les zones côtières présentent un régime des ventes satisfaisants (voir figure ci-après).

On considère généralement qu’un vent d’une vitesse de 5 m/s en moyenne annuelle est nécessaire pour qu’une éolienne puisse fonctionner dans des conditions acceptables en termes de rendements.

Figure : classement des zones géographiques en fonction de la vitesse moyenne du vent

Par ailleurs, les aléas de production ne peuvent être négligés. Ainsi au Danemark la puissance installée en éoliennes représente 7 % de la puissance totale. La production ne dépasse pour autant pas 1,5 % de la production totale d’électricité2. Les aléas de production sont nombreux, dépendant du régime des vents.

Le rendement d’une éolienne varie de 15 à 35 %. Ces facteurs militent en faveur de la construction de fermes d’éoliennes regroupant plusieurs unités sur un même site.

· L’off-shore, nouvelle perspective pour les éoliennes

L'énergie produite et donc le coût du kWh produit par éolienne restent fortement lié à la localisation de l'installation et aux conditions météorologiques du site. C’est pourquoi les projets les plus avancés de développement des éoliennes retiennent actuellement l’éolien off-shore, afin de bénéficier de conditions optimale pour les vents.

Compte tenu des coûts d’infrastructures et des problèmes de corrosion des matériels, il n’est toutefois pas acquis que les coûts de production du kWh diminuent dans une telle configuration.

· Un développement en forte croissance

L’éolien est probablement la forme de production d’électricité qui progresse le plus vite actuellement. La capacité installée dans le monde a en effet doublé entre la fin 1995 et la fin 1998.

Le tableau suivant recense les capacités installées dans la monde et dans différents pays, ainsi que les prévisions pour les prochaines années.

Tableau : Estimations des puissances installées en éoliennes et prévisions et objectifs à moyen terme3

 

capacités installées

MWe

prévisions ou objectifs de capacités cumulées

MWe

Monde fin 1997 : 7 700

mi-1998 : 8 500

fin 1998 : 9 600

2002 : 20 000
Etats-Unis fin 1997 : 1646  
Inde fin 1997 : 870  
Union européenne fin 1997 : 5 000 2002 : 12 500

2010 : 40 000

Danemark fin 1997 : 1135

1998 : 1350

2030 : 4 000
Allemagne fin 1997 : 2 079

mi-1998 : 2 350

fin 1998 : 2 800

 
France fin 1997 : 10 2005 : 250-500
Italie 1998 : 700 2010 : 3 000
Royaume Uni fin 1997 : 333 2010 : 1 200
Espagne fin 1997 : 449

1998 : 850

 
Pays-Bas fin 1997 : 349  
Suède fin 1997 : 123  

La France a pris un retard important par rapport à ses voisins et entreprend de le combler depuis 1996. Le programme Eole 2005 a été lancé à cet effet en 1996 par le ministère de l'Industrie. L’objectif est de disposer en 2005 d'une puissance installée de 250 à 500 MWe.

Un premier appel à propositions a été lancé en octobre 1996. Il s’est traduit par la sélection de 20 projets représentant une puissance de 77 MWe.

Un deuxième appel à propositions a été lancé en mars 1998. L’objectif est l’installation d'éoliennes pour une puissance totale de 100 MWe avec une répartition géographique de 25 MWe en Corse et dans les DOM et de 75 MWe en métropole. Les résultats de ce deuxième appel à propositions devaient être annoncés début 1999.

· Un marché mondial prometteur pour les équipementiers

Le marché mondial des éoliennes est estimé à près de 10 milliards de francs par an, correspondant à environ 1 600 MWe4.

Les leaders mondiaux des éoliennes se trouvent au Danemark, avec Vestas dont le chiffre d’affaires est de l’ordre d’un milliard et demi de francs, Neg-Micon, Nordex et Bonus. Les constructeurs danois auraient fabriqué 63 % du parc installé.

Un autre fabricant est l’américain Zond-Enron. En France, les entreprises présentes sur ce marché sont Jeumont Industries, Alstom et Leroy Somer.

· Le coût du kWh éolien

Au début des années 1980, le coût de production du kWh éolien était de 50 centimes. Il devrait baisser à 35 centimes en 2001 et diminuer jusqu’à 28 centimes en 20055.

Le tableau suivant illustre la baisse des coûts du kWh intervenue depuis 1994.

Tableau : Evolution du coût moyen du kWh éolien

centimes par kWh

1994

1997

France

-

38 – 33,7

Angleterre

43,9

35,5

Ecosse

38,1

27,5

Etats-Unis

42,7

33,9

Les éoliennes ne sont pas directement comparables aux autres moyens de production d’électricité, en ce qu’ils n’offrent pas de puissance garantie. Une comparaison valable nécessiterait un parc important réparti sur le territoire de manière telle que l’on puisse affecter à chacune des éoliennes la moyenne des vents observée sur longue période.

L’étude Digec 1997, moyennant cette précaution méthodologique, s’est attachée à déterminer les coûts de production du kWh par des éoliennes dans l’état actuel de l’art et pour une nouvelle génération d’aérogénérateurs caractérisés par une puissance et un facteur de charge accrus.

Tableau : caractéristiques des aérogénérateurs de l’étude Digec 1997

 

équipements 1997

équipements mis en service industriel en 2005

puissance unitaire

600 kW

1 500 kW

nombre d’éoliennes par site

10

10

hauteur au moyeu – diamètre des pales (m)

40-39

60-66

vitesse moyenne du vent au moyeu (m/s)

7,5

7,5

productible annuel net par éolienne

1 333 kW/an/m2

1341 kW/an/m2

facteur de charge net

30,3 %

34,9 %

durée de vie

15 ans

15 ans

coût d’investissement F / kW

7 000

5 500

charges annuelles d’exploitation en % de l’investissement

3

3

Moyennant les hypothèses ci-dessus, le coût du kWh produit avec une éolienne actuelle ressort à 34,5 centimes. L’extrapolation des évolutions technologiques actuelles permet d’espérer un coût de 23,5 centimes à l’horizon 2005.

Tableau : Coût de production du kWh avec un taux d’actualisation de 5 %

centimes / kWh

équipements 1997

équipements mis en service industriel en 2005

coût actualisé de production

34,5

23,5

Les références les plus récentes concernant la France sont celles retenues à la suite de l'appel à propositions EDF de la deuxième tranche du projet EOLE 2005.

Les critères qui ont prévalu à la sélection des projets sont le prix d'achat du kWh figurant dans l'offre, l'intérêt économique des projets, l'intérêt à terme des solutions techniques retenues, la fiabilité technique et financière, le respect de l'environnement et l'avis des collectivités territoriales.

Compte tenu de ces critères, les projets retenus présentent les meilleurs coûts de production à partir de l'énergie éolienne atteints à ce jour en France.

Le coût moyen des 16 projets retenus en France métropolitaine et dans les DOM (représentant une puissance totale de 37 MW) est de 36,5 cF/kWh. Ce coût est 33.7 cF/kWh pour la seule France métropolitaine - hors Corse. Ces coûts fondés sur des cas réels sont en phase avec les résultats de l’étude Digec.

L'investissement total moyen en France métropolitaine est d'environ 6 800 F par kW de capacité installée. Ce coût qui semble supérieur à celui observé dans d’autres pays - 4 500 à 5 500 francs par kW installé -, devrait baisser à l’avenir.

Les perspectives de développement de l'énergie éolienne sont évidemment de nature à faire baisser sensiblement les coûts de fabrication des machines.

· Les obstacles possibles au développement des aérogénérateurs

Les inconvénients des éoliennes ne peuvent pas être sous-estimés. D’ailleurs, les recours des futurs riverains ont tendance à se multiplier, notamment en Allemagne où, fin décembre 1998, deux cents actions en justice étaient intentées à l’encontre de projets d’installations d’aérogénérateurs. Les principales nuisances invoquées à l’appui des plaintes sont le bruit, l’emprise visuelle et l’alternance d’ombre et de lumière, ainsi que le manque de compétitivité des installations qui requièrent des subventions compensatrices6.

2. L’énergie solaire

Les technologies de l’énergie solaire peuvent être classées en deux catégories principales. Le solaire thermique a pour objectif la conversion en chaleur de la lumière du soleil. Le solaire photovoltaïque a pour objet la transformation directe de l’énergie lumineuse en électricité.

Il s’agit de technologies distinctes dont les degrés de développement et les coûts sont largement différents.

· Le solaire thermique

Les technologies du solaire thermique comprennent d’une part le solaire passif qui capte le soleil comme le font les serres, d’autre part le solaire actif avec des capteurs de chaleur à corps noir et le recours à un fluide caloporteur et enfin les centrales solaires thermodynamiques avec captage du soleil par miroir et réflexion vers un foyer.

En 1995, la capacité thermique installée représentait 1 MWth, avec 40 sites dans l'Aude, 25 dans l'Hérault, 20 dans les Pyrénées orientales. L’application privilégiée du solaire thermique demeure la production d'eau chaude. Dans certaines régions, une part importante des besoins domestiques pourrait être couverte.

Sept millions de m2 de capteurs sont actuellement installés en Europe. Le coût d'installation s’étage de 2 000 à 6 000 francs par m2 pour un système complet. Le rendement d’une installation solaire thermique peut atteindre 35 à 40 %. Un chauffe-eau solaire coûte environ 20 000 francs. L’installation de tels chauffe-eau est de plus en plus répandue dans les départements d’outre-mer.

Les centrales thermodynamiques construites au début des années 80 n’ont pas atteint la compétitivité. La centrale Thémis de 2 MW dans les Pyrénées orientales n’a pas atteint ses objectifs. Toutefois, certaines études montreraient que des centrales d'une puissance accrue de 30 MW pourraient atteindre la compétitivité.

Par extension, l'architecture bioclimatique peut être rangée dans la catégorie du solaire thermique. Cet ensemble de techniques de construction consiste à concevoir des maisons en maximisant les gains énergétiques dus à l'ensoleillement et en minimisant les pertes de chaleur grâce à une bonne isolation.

· Le solaire photovoltaïque à base de semi-conducteurs

Les technologies du photovoltaïque ont pendant longtemps reposé sur l’utilisation du silicium. Elles ont ainsi bénéficié dans une certaine mesure des progrès faits dans la connaissance de ce matériau de base de la microélectronique. Les années récentes voient le développement d’autres technologies plus spécifiques et plus adaptées au problème de la conversion directe de photons en électrons.

La première technologie photovoltaïque recourt au silicium cristallin. On utilise les techniques de la microélectronique : fabrication de cellules de silicium sur des galettes de monocristaux par lithographie traditionnelle ou gravure au laser. Le silicium polycristallin, produit à partir des déchets de l'industrie électronique, assure des rendements relativement faibles. Le silicium monocristallin, actuellement des tranches de 6 pouces de diamètre, permet un meilleur rendement. Avec des rainurages et des concentrateurs, les rendements peuvent même être portés à 20 %. L’inconvénient de cette technologie est son coût de production élevé.

La deuxième technologie fait appel aux couches minces de silicium amorphe. Elle est largement répandue. Mais moins onéreuse, elle a aussi des rendements inférieurs.

Le troisième type de technologie fait appel à d’autres matériaux semi-conducteurs que le silicium, par exemple le tellure de cadmium (CdTe) et le disélénure d'indium et de cuivre (CIS). Le tellure de cadmium permet un rendement de 15 %. Les jonctions cuivre/indium/sélénium se caractérisent par des rendements supérieurs à 15 %, de même que les multijonctions à base d’arséniure de gallium(AsGa). Une voie prometteuse semble être celle des multi-couches, chacune d’entre elles étant sensible à des photons d'énergies différentes. Le rendement anticipé serait de 30 %.

La recherche est en plein développement sur cette troisième voie7. Une triple jonction à base de silicium amorphe a été développée aux Etats-Unis. Les trois couches, de compositions différentes, capturent différentes longueurs d'ondes, ce qui double la limite théorique des jonctions simples.

Une autre équipe du NREL propose un système de stockage de l'énergie pour les besoins nocturnes : la conversion directe de l'énergie solaire en hydrogène; la couche supérieure de phosphure de gallium et d'indium absorbe la lumière visible et produit de l'hydrogène ; la couche inférieure d'arséniure de gallium absorbe le proche infrarouge et produit de l'oxygène ; le rendement global est de 12 % contre 4 ou 6 % pour les systèmes traditionnels

Nonobstant les recherches sur d’autres technologies, le silicium conserve la primauté dans les fabrications, ainsi que l’indique le tableau suivant.

Tableau : Parts de marché des différentes technologies du solaire photovoltaïque

 

1995

1997

silicium cristallin

80,0

83,0

silicium amorphe

17,0

11,8

concentrateur silicium

0,5

0,2

ruban silicium

1,2

3,2

silicium substrat

-

0,4

autres

1,3

1,4

Grâce aux économies d'échelle, chacune de ces technologies devrait pouvoir atteindre rapidement un coût de 6 francs par Watt installé, contre 22 à 34 francs actuellement.

· Un avenir prometteur

Les prévisions d’équipement en panneaux photovoltaïques sont très divergentes, variant de 6 à 17 GW installés dans le monde en 2010.

En réalité, le solaire photovoltaïque permet en premier lieu d'équiper des sites isolés pour la production d'électricité. Mais les capteurs et les panneaux solaires doivent être installés en nombre important.

En France, l’objectif de l'Ademe est d’atteindre 50 MW installés supplémentaires en 2005, pour atteindre une production d’électricité de 0,045 TWh. Le contrat EDF-Ademe de 1993 prévoit d'équiper 2000 sites en France. Moins de cent toitures solaires en France sont reliées au compteur, contre mille au Japon

Le solaire photovoltaïque est pour le moment l’énergie nouvelle renouvelable la plus coûteuse. A titre d’exemple, l’investissement pour une installation domestique complète de 0,4 à 1,2 kW est de 60 000° francs. Le prix du kWh photovoltaïque avoisine les 40 centimes.

En Allemagne, les installations de ce type sont subventionnées aux deux tiers. Grâce à une production plus importante de panneaux solaires. 3 kW photovoltaïques reliés au réseau reviennent à 70 000 francs. Ce chiffre pourrait être atteint sans subvention avant 2005. Une opération d’équipements de mille toits solaires a été lancée en 1990.

A la fin 1997, 2 200 toits avaient été équipés. En outre, le gouvernement allemand compte débloquer 900 millions de marks supplémentaires pour soutenir l'énergie solaire au cours des 6 prochaines années. L'Etat prendrait à sa charge 40 % des frais d'investissements des toits solaires, pour porter leur nombre à 100000 en 2005. Pour financer ce programme, l'Etat compte sur des rentrées de 200 à 300 millions de marks par an grâce à un impôt écologique sur l'électricité à partir des combustibles fossiles

L’Union européenne s’est fixé comme objectif la construction de 500 000 toits solaires en 2010. Aux Etats-Unis, une opération portant sur un million de toits a été lancée en 1998 par l’administration Clinton. Enfin les perspectives d’équipements de toits en solaire dans les pays en développement sont de 500 000 toits en 2010.

· L’industrie investit en masse dans le photovoltaïque

Considérant ces perspectives, les capacités de production annuelles de panneaux pour le solaire photovoltaïque sont en forte croissance et atteignent aujourd’hui 400 MWc8.

Les principaux intervenants du secteur sont aux Etats-Unis : Siemens Solar, Solarex, AstroPower, Solec International ; au Japon : Kyocera, Sharp, Sanyo ; en Europe : BP Solar, Eurosolare, Shell Pilkington.

Grâce aux investissements réalisés, les coûts de production des panneaux solaires baissent de 5 à 10 % par an (films plus minces, remplacement du silicium).

Des niches rentables apparaissent, comme par exemple l'alimentation des équipements de télécommunications isolés ou décentralisés, l'alimentation en électricité d'équipements placés dans des environnements sensibles au feu. Plusieurs compagnies pétrolières, comme BP et Royal Dutch Shell, investissent dans le solaire, au titre de leur diversification dans les énergies renouvelables.

3. La géothermie

Le gisement géothermique en Europe est estimé à 200 TWh. En France, il serait de 69 TWh. Pour autant, la géothermie est peu souvent mise en oeuvre. Ainsi en France, seul 1% du stock est utilisé. L'inconvénient majeur de la géothermie est en effet la faiblesse du flux de chaleur (0,07 watt par m2) 9. Les installations françaises se trouvent dans les bassins sédimentaires parisien et aquitain. Une nouvelle approche consiste à utiliser des anomalies thermiques du sous-sol, en recourant à des forages à grande profondeur. En tout état de cause, la production d’électricité par géothermie ne semble pas envisageable à brève échéance.

Quelques expériences réalisées en France revêtent toutefois un grand intérêt. Ainsi, le plus grand réseau géothermique d'Europe a été créé en 1985 à Chevilly-Larue et l'Haÿ- les-Roses pour assurer le chauffage de 10 000 logements et permet d'économiser 15 000 tep par an.

Un autre site test des applications possibles à grande échelle de la géothermie se trouve au nord de l'Alsace, à Soultz-sous-Forêts. Le projet correspondant est mis en oeuvre depuis 1987, avec le soutien de la France, de la Suisse, de l'Allemagne et de la Commission européenne10. Il cherche à exploiter une anomalie thermique du sous-sol dont la température augmente de 5 à 6 °C tous les 100 m au lieu de 2 à 3 °C habituellement, ce qui signifie qu’à 5 000 °C, on pourrait trouver une eau à 200 °C.

Concrètement, un premier puits a été foré à 3 500 m sous terre où la température dépasse les 160 °C. L'eau injectée dans ce puits se déplace dans les fissures et est récupérée par un deuxième puits quelques centaines de mètres plus loin. L’exploitation de cette installation a permis de produire pendant 4 mois 10 MWth, soit 1 MWe, de quoi chauffer 2 000 personnes.

L'expérience va se poursuivre, avec le creusement de puits de 4500 à 5000 m permettant d'obtenir des températures de 200 °C et de distribuer 5 MWe. L'objectif est d'atteindre des centrales unitaires de 25 MWe couvrant les besoins en électricité de 20 000 habitants. Le projet de Soultz commence à susciter l'intérêt d'EDF, d'Electricité de Strasbourg, de l'ENEL et de RWE

L'intérêt de ce type de réalisation à grande profondeur est de permettre une production locale de chaleur, voire d’électricité. Les autres sites possibles en France pour des applications de ce type, c’est-à-dire présentant des anomalies thermiques favorables, se situeraient dans vallée du Rhin (y compris en Allemagne), en Limagne et dans le sillon rhodanien.

Avant de démontrer la compétitivité de la géothermie, il reste à démontrer la viabilité technique à long terme. En tout état de cause, il semble peu probable que la géothermie débouche à brève échéance sur des réalisations concrètes en matière de production d’électricité.

4. La production d’électricité à partir des déchets

La production d’électricité à partir des déchets peut s’envisager d’une part au niveau des unités d’incinération d’ordures ménagères et d’autre part par l’utilisation du biogaz produit dans les décharges ou par méthanisation.

· La production d’électricité par les unités d’incinération d’ordures ménagères

Sur les 11 millions de tonnes de déchets incinérés chaque année en France, 8 millions font l'objet d’une valorisation énergétique.

Concrètement, dans une unité d’incinération des ordures ménagères produisant de l’électricité, les fumées de l'incinération sont refroidies au contact d'une chaudière qui produit de la vapeur ou de l'eau surchauffée. Cette dernière peut alimenter directement un réseau de chaleur, être transformée en électricité par un turbo-alternateur, ou produire ces deux formes d'énergie de manière combinée.

La CGEA, filiale de Vivendi exploite en France une soixantaine d'unités d'incinération d'ordures ménagères (UIOM) et traite ainsi environ 3 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés.

La puissance totale installée par VIVENDI pour la production d'électricité est d'environ 100 MW, soit 80 MW disponibles pour revente à EDF, l'écart de 20 % correspondant à l'auto-consommation électrique de l'unité d’incinération.

La puissance totale disponible aujourd'hui est de l'ordre de 200 MW.

Par ailleurs, le Ministère de l'aménagement du Territoire et de l'environnement adaptant les exigences de la Loi du 13 juillet 1992 relative à la valorisation des déchets, a rappelé, le 26 août dernier, le caractère incontournable de la valorisation énergétique et en a fixé les limites (50 % des déchets municipaux incinérés ou mis en décharge).

La puissance électrique produite par l'incinération des déchets en France ne devrait pas dépasser 400 MW à terme.

· La valorisation du biogaz

Par un procédé naturel de fermentation, les déchets ménagers, qui contiennent 30 % environ de fraction organique, produisent du biogaz lors de leur stockage en décharge. Ce biogaz contient essentiellement du méthane dont la contribution à l'effet de serre est 25 fois plus importante que celle du CO2.

La captation et le brûlage du biogaz sont désormais requis par la réglementation, mais sa valorisation sous forme d'électricité constitue un bénéfice environnemental certain, à l'instar de ce qui est pratiqué chez nos voisins européens (Grande-Bretagne, RFA, Scandinavie, etc...).

A titre indicatif, la puissance installée par Vivendi est de 22 MW au total. Des installations de valorisation du biogaz ne sont toutefois envisageables que pour une trentaine de décharges en France pour des raisons de taille critique.

On estime aujourd'hui à 60 MW environ la`puissance maximale que l'ensemble des opérateurs pourraient installer en France.

· La méthanisation des déchets

Il s'agit d'un procédé de fermentation analogue à celui d'une décharge, mais mené dans un réacteur industriel. Le procédé n'a été développé pour les déchets ménagers que sur un seul site en France (Amiens). Son application sur les déchets de l'agriculture et de l'industrie agro-alimentaire est certainement plus prometteuse (déchets homogènes ne nécessitant pas de préparation coûteuse).

· L’intérêt environnemental de la valorisation du biogaz

Les déchets représentent un gisement énergétique fatal puisque leur production est inhérente aux modes de production et de consommation. Par ailleurs, les décharges sont responsables du tiers des émissions de méthane en Europe.

Les installations de traitement des déchets présentent donc un double intérêt. Elles permettent de limiter les rejets de polluants dans l’environnement. Elles constituent ausi des sources d'énergie de proximité.

L'électricité produite à partir de déchets devrait donc bénéficier de conditions tarifaires incitatives et pérennes. Les collectivités locales, responsables du service public d'élimination des déchets, ne peuvent prendre de décisions d'investissement qu’avec des garanties de recettes de valorisation sur le long terme, c’est-à-dire à un horizon de 15 à 20 ans.

· Le coût du kWh produit à partir des déchets

Il est difficile d'appréhender en tant que tel le coût de production du kWh électrique produit par une unité d'incinération d'ordures ménagères.

En effet, le service principal est celui du traitement des déchets et ce dernier fait l'objet d'une recette auprès du contribuable (Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères).

Les recettes de valorisation interviennent en déduction du coût du service de traitement. A titre d'exemple, pour une unité type, ces recettes représentent environ 100 francs. par tonne de déchet traité et viennent en déduction d'un prix de traitement de l'ordre de 450 francs. par tonne.

En revanche, il est possible de calculer le coût marginal de production d'un kWh électrique par une usine d’incinération d’ordures ménagères par comparaison avec une unité qui se contenterait de disperser l'énergie qu'elle produit dans l'environnement. Ce coût environnemental évité ressort à 32 centimes par kWh.

S’agissant de la valorisation du biogaz, de nombreux projets sont aujourd'hui à l'étude dans l’industrie. Les coûts de valorisation électrique dépendent beaucoup des solutions techniques adaptables sur chaque site, et notamment des distances de raccordement au réseau EDF.

Sur la base des premières études disponibles, le seuil de rentabilité pourrait être atteint pour des prix d’achat du kWh électrique par EDF de l'ordre de 30 centimes, en tenant compte des aides à l'investissement de 30 % fournies par l’ADEME11.

H. Vers une production d’électricité mieux répartie ?

Dans le débat qui porte sur les moyens de production de l’électricité, nombreuses sont actuellement les références faites à une évolution technologique qui permettrait, selon certains, un nouveau modèle de production et de consommation - en fait une sorte de nouvelle donne du secteur électrique.

Qu’en est-il exactement ? Quels sont les acteurs qui vont bientôt entrer en concurrence ?

1. Le rapprochement de la production et de l’utilisateur

Les partisans du cycle combiné au gaz, une technologie au demeurant très performante, notent que cette technologie peut s’appliquer dans des conditions économiques satisfaisantes à des centrales de tailles très différentes et en particulier à des centrales de faible puissance.

La cogénération, qui est une autre version des technologies du gaz, atteint quant à elles des rendements très élevés pour des installations de taille réduite, permettant de fournir en électricité et en chaleur – voire en froid également avec la trigénération –, des collectivités de taille limitée, comme les hôpitaux, les grands ensembles immobiliers, et bien entendu les installations industrielles.

La pile à combustible, quant à elle, bénéficiera des progrès recherchés par l’industrie automobile et ses moyens immenses et pourrait, si l’on en croit des constructeurs américains, bientôt rejoindre le rayon des machines à laver pour assurer l’approvisionnement en électricité et en chaleur d’un appartement.

Quant aux énergies nouvelles renouvelables, elles bénéficient de progrès de compétitivité sérieux, avec le soutien des pouvoirs publics, comme le programme Eole 2005 pour les aérogénérateurs.

Toutes ces évolutions technologiques ont pour effet de rapprocher potentiellement la production du consommateur.

Est-ce à dire que nous pouvons entrevoir la fin de l’énergie centralisée telle que nous la connaissons ?

Est-ce la fin des centrales de production de grande taille et des réseaux de transport et de distribution quadrillant l’hexagone pour livrer, avec une régularité remarquable, à chaque foyer, où qu’il se trouve, une électricité de qualité identique et à l’industrie, quels que soient ses besoins, l’une des électricités les moins chères du monde ?

Sommes-nous véritablement à la veille de l’apparition de formes d’énergies décentralisées plus proches du consommateur, assurant son autonomie tout en ayant un coût du même ordre de grandeur et un impact sur l’environnement très inférieur ?

A vrai dire, l’appropriation d’un moyen technique par l’utilisateur est une évolution normale et souhaitable qui s’est déjà produite dans l’histoire des technologies. L’évolution de l’informatique est souvent citée comme un précurseur de l’évolution à venir dans le domaine de l’énergie. En réalité, chacun sait que l’informatique répartie ne s’est pas développée au détriment des ordinateurs centraux. L’informatique personnelle a multiplié les besoins de traitement de l’information en masse.

Les énergies réparties, en réalité, ne peuvent s’envisager dans la plupart des cas sans un raccordement par un réseau, d’abord pour évacuer la puissance résiduelle non consommée et accroître la rentabilité de la production.

Mais un raccordement à un ou plusieurs réseaux est souvent indispensable pour assurer l’approvisionnement en gaz, dans le cas de la cogénération ou des piles à combustibles, et pour assurer une alimentation continue, en cas de production nulle pour les éoliennes ou insuffisante pour le solaire thermique ou photovoltaïque.

Par ailleurs, il ne s’agirait pas de déséquilibrer le réseau de transport et de distribution d’électricité en produisant trop près du consommateur. En fait, on perd un utile « effet de foisonnement » en rapprochant la production du consommateur12. Cet effet de foisonnement permet non seulement une sécurité d’approvisionnement mais aussi une gestion équilibrée du réseau.

Enfin, il est possible de se demander si les performances en matière d’environnement et de rejets polluants d’un parc décentralisé ne sont pas fortement inférieures à celles d’un parc centralisé. Dans ce dernier cas, les techniques de dépollution sont probablement plus efficaces et les coûts correspondants plus faciles à assumer car répartis sur des volumes plus importants.

Telle est la réalité de l’évolution technique. Elle ne propose pas des moyens de production concurrents des moyens actuels. Elle offre des moyens de production complémentaires qui viendront compléter le parc en fonctionnement et non pas s’y substituer.

2. EDF, premier électricien mondial

EDF, premier électricien mondial, a réalisé en 1997 un chiffre d’affaires de 186,5 milliards de francs en assurant 94 % de la production et de la distribution d’électricité en France et en tirant parti d’une présence accrue à l’étranger.

En 1997, EDF a produit 457 TWh, dont 82 % d’origine nucléaire, 14 % d’origine hydraulique et 4 % d’origine thermique classique.

La puissance nucléaire installée d’EDF représentait 61 500 MW fin décembre 1997, pour un parc de 34 réacteurs REP de 900 MW, de 20 réacteurs de 1 300 MW et de 3 réacteurs de 1 450 MW. Les autres puissances installées s’élevaient à la même date à 17 700 MWe pour le thermique à flamme et 23 300 MW pour l’hydraulique.

Le parc électronucléaire d’EDF se caractérise par un taux de disponibilité de 82,6 %, avec un faible nombre d’incidents (1,2 par an), une maintenance préventive efficace et une faible exposition à la radioactivité de ses agents (dose individuelle moyenne de 2,7 mSv en 1997 ; 3,7 pour les travailleurs extérieurs).

Les effectifs d’EDF s’élevaient fin 1997 à 116 472 personnes, dont 61 229 appartenant à EDF GDF Services, 42 276 à l’ensemble Production Transport, 4 377 à la Direction de l’Equipement, 2 638 à la Direction des Etudes et Recherches et 5 942 à des organismes fonctionnels.

Le Contrat d’Entreprise 1997-2000 entre l’Etat et EDF constitue le cadre de son activité. Il contient trois objectifs stratégiques, à savoir la baisse et une certaine restructuration des tarifs, la diversification et le développement international.

· La baisse et l’évolution en structure des tarifs

Le premier objectif inscrit dans le contrat concerne les tarifs. Une baisse de 14 % de leur niveau moyen est prévue en 4 ans. En avril 1997, une première baisse de 4,6 % du tarif moyen de l'électricité a été effectuée. En mai 1998, une nouvelle baisse de 2,5 % est intervenue, accompagnée d’une restructuration « hors saisonnière » destinée à refléter l’évolution des coûts relatifs des différentes filières de production. tarifaire pour mieux ajuster les tarifs aux coûts de production de l'entreprise. En 1999 et 2000, l’ajustement tiendra compte de l’ouverture du marché.

Sur l'ensemble de la période, l'économie pour les clients d'EDF devrait être de 56 milliards de francs, dont 20 pour les ménages, 9 pour les artisans commerçants, 20 pour les PMI/PME et 7 milliards pour les grandes industries. Le manque à gagner d’EDF devrait être compensé par le bon fonctionnement des centrales électriques, des gains de productivité, une gestion rigoureuse et une diminution des charges financières sinon des investissements.

Le deuxième objectif stratégique d’EDF est, dans le respect de ses valeurs de service public et de sa politique sociale innovante et solidaire, l’accélération de son développement international et sa préparation à l’ouverture de son marché à la concurrence.

A cet égard, les orientations fixées à l’entreprises dans le document de vision stratégique « Vers le client, le compte à rebours européen » sont d'imposer EDF comme le « premier énergéticien d'Europe ».

· La diversification

En Europe, les concurrents d’EDF ont un chiffre d’affaires environ trois fois plus faible dans l’énergie mais sont souvent intégrés à de grands groupes. Ainsi, le groupe allemand Veba réalise un chiffre d’affaires total de 253 milliards de francs pour 55 seulement dans l’énergie. RWE réalise un chiffre d’affaires total de 245 milliards de francs dont 55 dans l’énergie.

Suez-Lyonnaise des Eaux, troisième groupe européen du secteur des services collectifs, présente un chiffre d’affaires d’environ 200 milliards de francs, dont le tiers dans l’énergie.

EDF fait le constat que l’offre d’un ensemble d’énergies est l’une des conditions du succès commercial dans les années à venir. Il s’agit donc de compléter son offre, pour mieux tirer parti à la fois de ses infrastructures existantes et des synergies entre les énergies, la plus marquante étant à l’heure actuelle celle existant entre l’électricité et le gaz.

· Le développement international

Le solde des échanges d’électricité d’EDF avec ses partenaires européens, positif de 65,3 TWh, contribuait en 1997 pour 15,3 milliards de francs à la balance des échanges de la France et témoignait ainsi de la compétitivité de l’électricité produite par EDF.

Mais la présence d’EDF sur les marchés internationaux ne se résume pas à l’exportation d’électricité. En tant qu’architecte industriel, EDF a participé avec ses partenaires industriels Framatome et Alstom à la construction de centrales nucléaires, en particulier en Chine pour les centrales de Daya Bay et de Ling Ao. EDF est également présent sur d’autres marchés, par exemple celui, nouveau, des centrales à cycle combiné à gaz, au Mexique, sur la base d’un appel d’offres remporté en 1998. De même, EDF est le pivot du projet de construction d’une grande centrale à charbon en Inde.

Les prises de participation ou de contrôle de producteurs et distributeurs étrangers ont par ailleurs connu un moment fort en 1998.

Après avoir notamment pris 21 % du marché brésilien de la distribution de courant pour un montant de 1,39 milliard de livres (plus de 13 milliards de francs), EDF International a racheté 100 % du capital de London Electricity à l'américain Entergy. Cette acquisition correspond à 2 millions de clients dans l'agglomération londonienne, 150 000 clients pour le gaz, une présence dans la cogénération et les services associés, notamment dans les aéroports. EDF attend de cette opération sur London Electricity qu’elle soit un banc d'essai de la déréglementation pour EDF. Avec cette acquisition, 80 % des investissements d’EDF sont réalisés en Europe, contre 60 % auparavant.

Au total, EDF compte désormais 15 millions de clients à l’étranger.

· Le défi des investissements

En 1997, le montant total des investissements d’EDF s’est élevé à 29 milliards de francs. C’est la distribution qui représentait la part la plus importante, avec 13,4 milliards de francs, suivie de la production à hauteur de 6,9 milliards de francs.

En dépit de la pression sur les recettes engendrée par l’ouverture de son marché, l’entreprise devrait conserver une capacité d’autofinancement élevée si la maîtrise des dépenses d’exploitation est sans défaut, ce qu’exige la multiplicité des investissements à pratiquer pour répondre au défi de la concurrence.

3. Suez-Lyonnaise des Eaux : un groupe de premier plan dans le monde de l’énergie

Le groupe Suez-Lyonnaise des Eaux, avec son pôle énergie dont le chiffre d’affaires s’est élevé à 64 milliards en 1997, est le troisième producteur mondial indépendant du secteur et le premier groupe privé européen dans l’électricité13.

Suez-Lyonnaise des Eaux a réalisé 27 % de son résultat courant en 1997 dans le domaine de l'énergie. Ses autres pôles d’activité sont l’eau (29 %), les services financiers (31 %), et la propreté (7 %)14.

· Une expérience de premier plan dans la production d’électricité

Dans le domaine de la production d’électricité, Suez-Lyonnaise possède une capacité totale de production de 37 000 MWe dont 15 000 MWe en Belgique et 5000 MWe additionnels en Europe, dont 300 MWe en France. Suez-Lyonnaise contrôle Tractebel, le troisième producteur européen d'électricité

Le tableau ci-après décrit les principales caractéristiques du parc électronucléaire de Tractebel.

Tableau : Caractéristiques du parc électronucléaire de Tractebel

site

puissance

date de mise en service industriel

technologie et constructeur

Doel 1

393

1975

REP-Acecowen

Doel 2

392

1975

REP-Acecowen

Doel 3

1 006

1982

REP-Framaceco

Doel 4

985

1985

REP-Acecowen

Tihange 1

962

1975

REP-Aceco-Framatome

Tihange 2

960

1983

REP-Framaceco

Tihange 3

1 015

1985

REP-Acecowen

Tractebel bénéficie d'un taux de disponibilité excellent de ses centrales nucléaires, avec des moyennes de 84 à 89 %.

Ces excellentes performances sont principalement dues au bon dimensionnement du parc nucléaire belge, qui permet aux centrales de tourner en continu à pleine puissance. Le parc nucléaire belge, avec une part de 55 % dans la production d’électricité en 1996, est en effet, selon Suez-Lyonnaise15, proche de l’optimum.

Une deuxième raison aux excellentes performances du parc électronucléaire de Tractebel est à trouver dans la bonne maîtrise et la rapidité des arrêts de tranches.

Par ailleurs, Suez-Lyonnaise se développe très vite dans la production d'électricité sur les marchés déréglementés de l'Europe du Nord et de l'Amérique16.

Par ailleurs, Suez-Lyonnaise dispose aussi avec Electrabel, filiale de Tractebel, d'un distributeur d'électricité privé et rentable, qui offre à ses grands clients des prix compétitifs. Electrabel a noué des alliances avec Iberdrola en Espagne et Scottish Power en Ecosse. Electrabel fournit du courant en Hollande et en produit au Luxembourg.

En France, Suez-Lyonnaise est avec Elyo, un opérateur de taille mondiale pour la fourniture de froid et de chaud. Elyo investit par ailleurs dans la cogénération au gaz.

· Un acteur d’importance mondiale dans la chaîne de transport du gaz

Suez-Lyonnaise est aussi implantée dans le transport du gaz. Tractebel contrôle en particulier l'opérateur national gazier belge Distrigaz .

Suez-Lyonnaise gère une capacité de transport de gaz de 110 milliards de m3 par an, répartie dans le monde.

La société possède des positions stratégiques dans ce domaine. En particulier, en Belgique, Suez possède un nœud de communication pour le gaz en provenance de la mer du Nord, des Pays-Bas et de l'Algérie. Suez gère l'ensemble du système gazier du Kazakhstan et gère ou réalise des gazoducs en Amérique latine.

Suez-Lyonnaise apprend enfin actuellement son futur métier de « power marketer » ou de vendeur d'électricité aux Etats-Unis. La société compte être un des fondateurs de la Bourse de l'Electricité qui devrait ouvrir ses portes prochainement à Amsterdam.

La complémentarité gaz-électricité est un des axes fondamentaux de développement de Suez-Lyonnaise des Eaux.

· Les projets de Suez-Lyonnaise des Eaux dans les autres énergies

Suez-Lyonnaise est impliqué à hauteur de 300 MWe dans le développement de la production d’électricité à partir de déchets de bois, de riz et de coton aux Etats-Unis. De même, 300 MWe sont en construction pour l’incinération d’ordures ménagères à hauteur de 4,5 millions de tonnes. Sur certains sites, cette incinération est articulée avec une cogénération de chaleur pour réseaux de chauffage urbain.

Suez-Lyonnaise a dans son parc électrique, 3 MW d’éoliennes, avec un montant équivalent projeté.

Au total, Elyo exploite en France et dans le monde, des centrales produisant 650 MW à partir d’éoliennes, de micro-centrales hydrauliques, de biomasse, de centrales photovoltaïques ou d’unités d’incinération d’ordures ménagères.

4. Vivendi : un acteur français sur le marché mondial de l’énergie

Avec Sithe, producteur d'électricité et Dalkia, opérateur de services, Vivendi Energie dispose de deux pôles de compétences qui comprennent les principaux métiers de l'énergie17.

· Sithe: une position forte dans la production d'électricité indépendante en Amérique du Nord

Créée il y a quatorze ans, la société Sithe est aujourd'hui le leader de la production indépendante d'énergie électrique dans le nord-est des Etats-Unis.

Sithe a notamment réalisé vingt trois centrales en Amérique du Nord, dont une usine de 1 000 MW (Independence) qui alimente la presqu'île de Manhattan dans l'Etat de New York. Depuis 1998, Sithe exploite les usines de production de Boston Edison Company dans le Massachusetts et vient d'acquérir les actifs de production hors nucléaire de General Public Utilities, soit 7 000 MW.

Sithe est également présent en Asie, notamment en Chine (centrale de 600 MW dans la province d'Hubei) et aux Philippines (centrale hydroélectrique de San Roque), ainsi qu'en Australie.

Sithe possède début 1999 un parc mondial de plus de cinquante centrales électriques pour une capacité de production de plus de 11 000 MW (10% de la puissance installée d'EDF). Avec l'ensemble de ses unités de production, Sithe assure la production d'électricité pour 70 millions d'habitants.

· Dalkia : le leader de la gestion déléguée des services dans l'énergie en France et en Europe

Spécialiste de la gestion des installations climatiques, en particulier des réseaux de chaleur, Dalkia est devenu, au fil des années, le leader de cette activité.

Cette activité s'exerce au travers de contrats qui garantissent pour le client final le maintien d'une température fixe à un prix forfaitaire. Il est donc essentiel dans ce métier de pouvoir choisir l'énergie primaire la plus efficace et la plus économique, et d'améliorer les techniques de production ou de transport de chaleur afin d'obtenir, pour le client, le meilleur prix de la température garantie.

La puissance thermique installée de Dalkia en Europe représente plus de 55 000 MW, avec 45 000 installations (industries, logements, bâtiments commerciaux, écoles...) et une consommation d'énergie d'environ 3 millions de tonnes d'équivalent pétrole par an.

En Europe, Dalkia gère plus de 240 réseaux de chaleur. Dalkia est numéro un, en France et en Grande-Bretagne, dans la fourniture à l'industrie de vapeur, d'air comprimé et d'eau chaude. Dalkia assure la gestion de l'énergie pour plus de 30 000 industriels et collectivités et emploie plus de 19 000 personnes.

Pour répondre aux besoins de ses clients, Dalkia a étendu ses activités à la gestion déléguée de moyens de production d'électricité sur site. Avec la cogénération, il produit simultanément et économiquement de la chaleur et de l'électricité à partir d'un seul combustible.

Dalkia est ainsi devenu le premier producteur indépendant d'électricité en France avec une puissance électrique installée d'environ 2000 MW sur environ 500 sites industriels et collectifs.

Outre ces activités, le pôle « propreté » de Vivendi est, avec CGEA, un des leaders mondiaux de la valorisation énergétique des déchets qui le place d'une façon résolue dans la production d'énergie respectueuse de l'environnement Six millions de tonnes par an sont ainsi traités dans 70 usines dans le monde - en France, en Europe, en Amérique du Sud et en AustraLie.

Constatant qu’elle n’est adossée ni à un monopole, ni à un type d'énergie primaire, Vivendi Energie se présente comme un véritable opérateur « indépendant ». Son ambition est de développer des solutions nouvelles, en ayant toujours pour objectif de mieux utiliser l'énergie primaire pour obtenir le meilleur coût et le meilleur service pour ses clients.

· Conclusion

Chaque type de filière de production d’électricité a des caractéristiques intrinsèques particulières. Le nucléaire est fait pour assurer la production d’électricité en base. Ceci veut dire qu’un réacteur nucléaire a vocation à fonctionner en continu, avec le moins possible de variations de puissance. Le nucléaire est incontournable, de par sa compétitivité en base à un risque moindre que le gaz, sa contribution à l’indépendance énergétique et son apport sans égal à la lutte contre l’effet de serre.

Le gaz a une plage d’utilisation optimale appelée la semi-base, c’est-à-dire 4000 à 7000 heures par an au lieu de 8000 pour le nucléaire. Le charbon a à peu près les mêmes caractéristiques.

Par ailleurs, à côté des sources de production d’électricité centralisées, apparaissent les moyens de production décentralisés, comme la cogénération et, bientôt les piles à combustibles, qui peuvent satisfaire des besoins locaux en résolvant par exemple des problèmes de réseau.

Des évaluations crédibles de coût de production de l’électricité existent pour l’avenir, établies par les exploitants mais aussi par l’administration.

Ces études donnent des résultats similaires et mettent toutes en évidence une convergence des performances des différentes filières.

Pour de nouvelles installations, ces évaluations montrent qu’il y a convergence des coûts pour les différentes filières.

La structure des coûts du kWh diffère d’une filière à l’autre. Le coût du combustible ne représente que 20 % environ du coût du kWh nucléaire. La part du combustible s’élève à 60 % au minimum pour le gaz. Le coût du kWh nucléaire présente donc l’avantage d’une plus grande robustesse par rapport aux variations du prix des combustibles.

Mais il y a des problèmes de méthode.

Le calcul des coûts du kWh fait appel à une méthode classique – l’actualisation - qui est en réalité difficile d’application. Le taux d’actualisation sur la durée de vie des installations doit refléter une réalité des marchés de capitaux difficile à anticiper. Les dépenses à très long terme sont elles aussi difficiles à estimer, le choix d’un taux d’actualisation intergénérationnel faisant l’objet de controverses. Par ailleurs, il est difficile de définir des périmètres de charges à imputer à la production d’électricité qui soient homogènes.

L’évaluation des charges du nucléaire à une dimension à la fois politique et technique difficile. Les charges sont-elle bien prises en compte ? La réponse est oui.

En réalité, la question globale qui est posée est celle des externalités.

La démarche de calcul du coût du kWh doit ainsi prendre en compte les externalités dès lors qu’elles sont mesurables.

Il s’agit non seulement de calculer les coûts privés assumés par les exploitants mais aussi d’intégrer les coûts externes. A cet égard, il faut mesurer les effets sur la santé et l’environnement non seulement des radionucléides mais aussi des polluants classiques SO2, NOx, poussières et du CO2.

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Lorsque l'on prend en compte les coûts externes des différentes filières, le nucléaire apparaît comme l'un des moyens de production incontournable pour l'avenir : l'effet de serre et l'estimation de son coût

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1 Enerpresse, 29/10/1998.

2 Source : Bureau national de l’énergie du Danemark.

3 Sources : Systèmes Solaires, n°124, 1998 ; Enerpresse ; l’Usine Nouvelle.

4 A. Jemain, L’Usine Nouvelle, 23/04/1998.

5 A. Jemain, L’Usine Nouvelle, 23/04/1998.

6 Enerpresse, n° 7224, 18/12/98.

7 La Recherche, 01/12/1998.

8 MWc : puissance électrique de crête.

9 Y. Pietrasanta, le Midi Libre, 29/12/1998

10 Enerpresse, 8/10/1998.

11 Source : Vivendi, audition du 14 janvier 1999.

12 P. Torrion, EDF, Colloque IRIS, Paris, 17 décembre 1998.

13 A égalité avec RWE (derrière EDF et le production italien public Enel).

14 G. Mestrallet, La Tribune, 28/9/1998.

15 Source : Suez-Lyonnaise des Eaux, audition du 19 janvier 1999.

16 Le marché de l'énergie aux Etats-Unis est évalué à 300 milliards de dollars.

17 Source : Vivendi, audition du 14 janvier 1999.



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