SOMMAIRE

Les SÉISMES et MOUVEMENTS de TERRAIN :

TOME 1 : CONCLUSIONS du RAPPORTEUR

TITRE II - Les GLISSEMENTS de TERRAIN et les EBOULEMENTS
1 - Connaissance du phénomène 241

2 - L'inventaire 245
2-1 - Les travaux du Centre Européen sur les risques géomorphologiques 245
2-2 - L'inventaire en France métropolitaine 249
2-3 - L'inventaire dans les DOM-TOM 250

3 - L'évaluation et la cartographie 253

4 - La prévision et la surveillance 257

5 - La prévention et la protection 259

6 - La réglementation 277

7 - L'information 279

8 - L'organisation des secours 279

TITRE II - LES GLISSEMENTS DE TERRAIN
ET LES EBOULEMENTS

Jean-Louis Durville, du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, définit ainsi les mouvements de terrain :

"Le terme de Mouvement de Terrain regroupe des phénomènes très variés, par leur nature (affaissements et effondrements dus aux cavités souterraines ; instabilités de versants : glissements, écroulements, coulées, ...) et par leur dimension (phénomènes significatifs à partir de quelques m3, et pouvant atteindre quelques centaines de millions de m3, voire plus). On inclut parfois également les déformations des sols dues à la sécheresse : retrait-gonflement.

La majorité des départements français est concernée par ce type de risque, avec des fréquences variables. Pourtant les mouvements de terrain ne retiennent guère l'attention des médias et ne frappent donc pas l'opinion. Certes les événements très meurtriers sont heureusement rares dans notre pays : la coulée du Plateau d'Assy, en 1970, qui fit 72 victimes, est le cas le plus dramatique de notre siècle. Mais les coûts engendrés par les mouvements de terrain sont loin d'être négligeables : entre 0,5 et 1 milliard de francs par an, indépendamment de quelques cas exceptionnels (La Clapière dans les Alpes-Maritimes : 250 millions de francs de dépensés, essentiellement de façon préventive, en quelques années).

Aux États-Unis, le coût annuel est estimé à plus de 7 milliards de francs, et une somme du même ordre de grandeur est atteinte au Japon et en Italie ; dans un P.V.D. comme le Costa-Rica par exemple, les mouvements de terrain, y compris ceux causés par les séismes, représentent en moyenne chaque année 1 % du P.I.B. En ce qui concerne le caractère meurtrier, on peut citer quelques exemples récents : 220 morts à Medellin (Colombie, 1987), 66 morts à Catak (Turquie, 1988), 250 morts à Gissal (Tadjikistan, lors du séisme de 1988), 216 morts au Yunnan (Chine, septembre 1991), 50 morts au Sichuan (Chine, août 1992), etc.

Par rapport à d'autres risques naturels, le risque lié aux mouvements de terrain se caractérise par une répartition spatiale et temporelle assez diffuse :

- aspect spatial : régions montagneuses certes, mais aussi régions à relief plus modéré où une formation géologique défavorable est présente, régions à érosion côtière, régions de dissolution karstique, etc. Cette dispersion a deux conséquences : l'information statistique sur les événements est très difficile à collecter ; les dépenses de prévention sont nécessairement à "saupoudrer".

- aspect temporel : périodes de fortes pluies certes, mais également périodes de fonte de neige, contrecoup de séismes, conséquences d'interventions humaines, etc".

1 - CONNAISSANCE DU PHÉNOMÈNE

M. Philippe Masure, directeur au BRGM et l'un des principaux experts que j'ai consulté pour cette étude, donne de la connaissance du phénomène l'appréciation suivante :

Les mouvements de terrain sont très variés en France, par leur nature (glissements de terrains, éboulements rocheux, coulées de boues, effondrements de vides souterrains, affaissements, gonflement ou retrait des sols, ...) et par leur dimension (certains glissements, comme celui de la Clapière dans les Alpes Maritimes, peuvent atteindre plusieurs dizaines de millions de m3).

Leur répartition spatiale est guidée par la topographie et par la géologie (nature et fracturation des formations affleurantes, hydrogéologie) c'est-à-dire par l'environnement physique. Ils concernent non seulement les régions montagneuses et côtières, mais aussi les bassins à forte densité de vides souterrains (naturels ou minés), les sols argileux sensibles aux variations de teneur en eau, ... Leur occurrence est très marquée par les variations climatiques (périodes de fortes pluies, fonte des neiges, sécheresse) mais peut aussi être liée à des secousses sismiques ou encore être induite par les activités humaines.

Objet de développements importants en géotechnique au cours des dernières décennies (mécanique des sols et mécanique des roches), l'analyse des conditions de stabilité de sites localisés et d'ampleur limitée dont le génie civil avait surtout besoin, s'avère insuffisante pour l'appréhension de l'aléa et son zonage.

La communauté scientifique s'accorde aujourd'hui à recommander la mise en oeuvre de programmes ambitieux dans ce sens. Avec un souci de décloisonnements des spécialités concernées (géographes, géologues, géotechniciens), les priorités en phénoménologie devraient porter sur :

- l'inventaire systématique des phénomènes de grande ampleur (historiques et actuels) et les études de cas détaillées (structure, cinétique, mécanique, évolution, ...) ainsi que le développement de banques de données sur les mouvements de terrain,

- l'amélioration des calculs en déplacements,

- le rôle de l'eau dans le déclenchement et l'évolution des mouvements,

- les techniques de reconnaissance et d'observation des mouvements à grande échelle (bassins de risques) par une meilleure exploitation des progrès technologiques : télédétection, géophysique, photogrammétrie, etc.

M. Jean-Louis Durville complète ainsi cet état des lieux :

Dans leur principe, les mouvements de terrain sont bien compris : ils surviennent lorsque la résistance des terrains est inférieure aux efforts moteurs engendrés par la gravité et l'eau souterraine (voire les séismes) ou par les travaux de l'Homme ; leur dynamique répond naturellement aux lois de la mécanique.

Dans la pratique cependant, les choses sont très complexes, du fait des incertitudes :

- sur les conditions initiales, notamment en profondeur,

- sur les propriétés mécaniques des terrains, en général hétérogènes, non linéaires, anisotropes, discontinus, ...

- sur les conditions hydrauliques : position de la nappe, phénomènes se produisant en zone non saturée. L'eau est la cause déclenchante de la plupart des mouvements ; c'est un facteur variable dans le temps.

Deux approches principales sont utilisées pour l'étude de ces instabilités :

- le calcul à la rupture, dans lequel il s'agit simplement de différencier les sites stables et les sites instables, en général au moyen d'un coefficient de sécurité : les compétences actuelles sont satisfaisantes et s'appliquent assez bien lorsqu'il s'agit de dimensionner un talus artificiel ou une confortation d'instabilité ;

- les calculs en déplacement, dans lesquels on cherche à décrire le mouvement des masses instables en fonction du temps : c'est un domaine beaucoup moins avancé actuellement.

Dans le cas des phénomènes à dynamique rapide, des modèles de propagation sont en cours de développement ou d'amélioration : cas des chutes de blocs, des avalanches rocheuses, des laves torrentielles.

Pour ce qui est des phénomènes plus lents, comme les glissements de versants naturels (quelques mm à quelques dm par an en général), on ne dispose guère de modèle décrivant leur cinématique, probablement du fait que leur mouvement se fait à énergie cinétique quasi nulle.

Le cas des instabilités sous séisme est encore mal modélisé, en particulier par suite des changements de résistance au cours des cycles de chargement.

Le séminaire de Nainville-les-Roches en 1992, consacré aux mouvements de grande ampleur, a mis en lumière la connaissance très imparfaite des mécanismes de déformation et de rupture des grands versants : un effet d'échelle existe, mais son analyse reste encore à faire pour l'essentiel.

Pour ce qui est de l'effondrement de carrières souterraines, les principaux types d'instabilité sont identifiés : remontée de toit, effondrement généralisé par rupture de piliers ou par poinçonnement du mur. Mais des observations précises "pré-rupture" et "post-rupture" permettraient de mieux appréhender ces mécanismes.

M. Pierre Antoine, géologue au Laboratoire de Géologie et de Mécanique de l'IRIGM Grenoble pose le problème de manière légèrement différente : Y a-t-il des sols plus propices pour les glissements de terrain ?

Le géologue doit tenir compte de trois situations dans tout recensement :

        . glissements actifs, déclarés, qui déforment chaussées, arbres, maisons ;

        . glissements anciens (10-15 000 ans) qui se sont stabilisés mais peuvent être réactivés par des travaux de l'homme (bulldozer), ces glissements échappent le plus souvent, même à des géologues confirmés ;

        . pentes qui n'ont jamais bougé, pas d'indice, vieillissement du versant montagneux.

Pour comprendre les changements de règles du jeu dans les mouvements de terrain, il faut de très fortes instrumentations. Des investissements, tels ceux de La Clapière et des ruines de Séchilienne, ne sont pas à perdre. Ce sont des champs d'expérimentation ouverts aux Européens. Rappelons simplement quelques coûts :

- Séchilienne, suivi annuel : 500 000 F.

- La Clapière, suivi annuel : 1 500 /1 800 000 F.

Une bonne connaissance du risque "mouvements de terrain" doit permettre de répondre aux 6 questions reproduites ci après :


2 - L'INVENTAIRE

    2-1 - les travaux du Centre Européen sur les risques géomorphologiques

Le Centre Européen sur les risques géomorphologiques a collecté les principaux résultats scientifiques obtenus en ce qui concerne l'âge, la fréquence et les causes de glissements anciens répertoriés, dans plusieurs régions situées en Allemagne, en Angleterre, en Espagne, en France et en Italie, à la suite d'une recherche collective engagée dans le cadre du programme EPOCH de la Communauté Européenne. Ces résultats ont été également utilisés pour examiner l'influence des modifications climatiques prévues pour les prochaines décennies sur l'activité des mouvements de terrain.

Cette recherche a été effectuée dans le cadre du programme EPOCH de la DG XII de la Communauté Européenne, et réalisée par neuf contractants et sous-contractants, appartenant au réseau du Centre Européen sur les Risques Géomorphologiques (CERG) dont le Professeur Jean-Claude Flageollet assure la direction. En comptant les collaborations engagées à cette occasion, elle a été mise en oeuvre par 20 Universités et 63 enseignants-chercheurs, chercheurs, ingénieurs, techniciens, géographes et géologues, de cinq pays d'Europe occidentale. Il m'en a présenté le bilan suivant :

"Tous ces partenaires se sont donnés pour tâche essentielle de faire progresser les méthodes d'études et les connaissances sur une des deux composantes de l'aléa mouvement de terrain, à savoir la composante temporelle, en général moins souvent abordée et moins connue que la composante spatiale. Plus précisément, ils ont cherché à réaliser trois objectifs, à partir de recherches conduites simultanément dans quatre ensembles de régions différentes en Europe, pour en tirer des prévisions à différentes échelles du futur :

- établir la fréquence et la magnitude d'un grand nombre de mouvements de terrain de divers types, en remontant dans le passé.

- évaluer le rôle des facteurs externes susceptibles d'expliquer les variations temporelles mises en évidence dans l'apparition et l'activité des mouvements : les facteurs naturels, mais également les facteurs anthropiques, dont on peut penser qu'ils deviennent ou vont devenir de plus en plus importants compte tenu du développement des activités industrielles, ou, à l'opposé, du déclin des activités agricoles en montagne.

- réaliser la modélisation cinématique et prévisionnelle de différents types de mouvements actuellement actifs.

Le recensement des glissements survenus ou réactivés dans les deux derniers siècles est impressionnant, si on les ramène aux superficies territoriales considérées : 423 dans le dernier siècle sur les 560 km de côte du Kent ; 320 dans le Pays d'Auge, en Normandie, entre 1885 et 1985 ; 750 dans le Rheinhessen dans les 150 dernières années, sur les 1 000 km² étudiés ; 300 mouvements, de types variés, en deux cents ans, sur les 9 000 ha de la commune de Vars dans les Alpes françaises.

La recherche des facteurs déclenchants confirme les coïncidences avec le plus important des paramètres naturels, la pluviométrie, mais permet également de souligner la combinaison des causes complexes, naturelles et humaines, qui conduisent au déclenchement ou à la réactivation.

Sur les côtes du Sud-Ouest anglais, les mouvements se sont accentués partout, en nombre et en étendue, de 1790 à 1989, par périodes de recrudescence de 30 à 50 ans. Les pointes d'activité se situent en 1790, 1830-1850, 1870, 1920, 1960 et 1980. Ces statistiques doivent cependant être considérées avec prudence, étant donné le nombre tout de même relativement limité de mouvements sur lequel elles sont établies. Le rôle des précipitations est attesté par la fréquence saisonnière des mouvements, mais beaucoup d'autres facteurs interviennent, tantôt naturels, comme le soulèvement général du continent et l'érosion marine, tantôt anthropiques, telles les surcharges, vibrations, explosions, excavations, etc.

En Normandie, la juxtaposition des diagrammes de précipitations annuelles, sur deux cents ans, et du nombre de mouvements enregistrés annuellement montre une relation étroite de ces derniers avec les années de fortes précipitations. La meilleure corrélation est obtenue avec la moyenne mobile calculée sur trois années. 76 % des mouvements ont eu lieu entre octobre et mars, dont 19 % en janvier. 60 % se sont produits durant une période humide, et dans 75 % des cas, la pluviométrie du mois précédent était supérieure à la moyenne, dont 20 % avec un total mensuel supérieur à 140 mm. Les structures pluviométriques et leurs combinaisons sont décisives : il faut de fortes ou de très fortes précipitations dans le mois ou les années précédentes. Le mouvement peut se produire même après des mois relativement secs s'ils ont été précédés par une ou plusieurs années de précipitations abondantes. La diversité des correspondances associant un paramètre proche et un facteur pluriannuel rend difficile la définition d'un seuil de rupture qui pourrait constituer la base d'un système d'alerte.

C'est aussi les années de fortes précipitations efficaces que se sont produits la plupart des mouvements inventoriés en Rheinhessen, notamment les 200 qui sont apparus l'hiver 1981-1982.

Dans les Pyrénées orientales espagnoles, les fortes pluies de périodes humides sont responsables du déclenchement des mouvements, et il est estimé que 200 mm en deux jours constitue un seuil, fréquent mais non absolu, pour le déclenchement des coulées de boue.

Dans la vallée du Bachelard, l'intensité moyenne de précipitations déclenchant une coulée de débris a été établie à 42-47 mm/h pendant plus de cinq minutes, expérimentalement, avec un simulateur de pluies. Si le régolithe est très humide, le seuil est abaissé à 3 mm/h. Et en Sicile, des glissements superficiels peuvent se produire après des averses courtes mais intenses qui ne s'infiltrent pas dans le sol.

Dans la commune de Vars, les périodes de forte activité des 150 dernières années se situent entre 1862 et 1890 (40 mouvements de terrain) et entre 1906 et 1946 (30 mouvements). La relative dispersion observée tient au fait que les facteurs de déclenchement sont divers : l'élargissement des routes (30 % des cas), l'abandon et la désorganisation du réseau de drainage (8 %), les aménagements de ski (7 %), et au fait que la plupart des mouvements résultent de causes doubles, ou triples. Environ 88 % des mouvements recensés sont liés directement ou indirectement à l'occupation du sol. Il n'en reste pas moins que l'influence de cette dernière se conjugue avec celle de conditions climatiques favorables. Depuis 1931, trois situations ont été à l'origine de 90 % des 50 mouvements enregistrés : un automne très arrosé suivi d'un hiver peu neigeux et d'un printemps dont au moins un mois reçoit plus de 100 mm ; un hiver et un printemps très arrosés ; un mois de fortes précipitations printanières après un automne et un hiver peu arrosés.

Si le rôle joué par les tremblements de terre dans le déclenchement des mouvements de terrain est démontré dans les Dolomites, il est cependant largement moindre que celui des situations climatiques et des actions de l'homme.

Au cours des cinq ou dix dernières années, plusieurs mouvements de terrain ont fait, dans le cadre de ce programme, et continuent à faire, pour certains, l'objet de mesures des déplacements, en surface et/ou en profondeur, d'analyses de leurs rythmes saisonniers, de mesures piézométriques et hydriques, de tests géomécaniques, dans le but de proposer des modèles hydrologiques et des modèles de prévision.

Les mesures effectuées dans le glissement de Villerville de décembre 1984 à février 1988 et dans le glissement voisin de Graves de février 1988 à septembre 1993 ont montré que la réponse piézométrique aux précipitations effectives était de 4 à 5 jours, mais les déplacements n'étant pas mesurés en continu, il n'est pas possible de fixer le seuil piézométrique et/ou pluviométrique qui permettrait de prévoir le début d'accélérations dangereuses. Les calculs de stabilité y ont été effectués par différentes méthodes, déterministes et probabilistes. Une variation de 1 mètre du niveau piézométrique modifie le coefficient de sécurité de 5 à 6 %, contre seulement 1 à 2 % pour un recul de 10 mètres du pied du versant par érosion marine, laquelle joue donc un rôle dans l'entretien de l'activité, plus que dans la réactivation, avant tout liée à la piézométrie.

Dans les glissements de Staulin, Lacedel et Alvera dans le bassin de Cortina, les déformations en profondeur sont bien corrélées avec le niveau piézométrique, et le temps de réponse des mouvements aux variations de ce dernier est court, un jour. Le grand glissement de Tessina, dans le bassin d'Alpago, a été équipé d'un système d'enregistrement automatique d'élévation du niveau de la masse en glissement et en coulée et de la vitesse de cette dernière, aux fins d'alerte au risque de débordement dans l'agglomération.

Plusieurs glissements des Alpes françaises ont fait l'objet de mesures in situ pour comprendre et modéliser les fluctuations de l'eau dans le sol. Dans le grand glissement de la Valette, près de Barcelonnette, il a été notamment conclu, des observations et mesures, que la langue qui prolonge le glissement en aval est très imperméable et que son déplacement était très improbable. Dans le bassin du Trièves, près du village de Roissard, de nombreux glissements se produisent dans les argiles varvées glacio-lacustres. Le manteau colluvial superficiel perméable est un réservoir qui contrôle la fourniture de l'eau dans les fissures des argiles in situ sous-jacentes. On a mesuré les taux d'infiltration horizontale et de saturation du sol entre les fissures, les glissements superficiels et profonds ne pouvant se produire qu'après complète saturation. Il faut un à plusieurs mois de pluies hebdomadaires continues pour saturer la zone fissurée et faire monter la nappe jusqu'en surface. Mais le drainage est lui aussi très lent, et si les fissures restent à sec pendant plus de 5 jours, la perte volumétrique en eau dans ces argiles varvées ne dépasse pas 10 %. Dans le cas d'un glissement profond comme celui de Lavars où le plan de glissement se trouve à 20 m de profondeur, le comportement visqueux des argiles dans la zone de rupture freine la vitesse du glissement en profondeur, qui ne dépasse pas 3 mm/h quand le niveau de la nappe profonde monte de deux mètres. Dans les Terres Noires de la région de Barcelonnette, les glissements de Super Sauze et de Poche font l'objet de mesures périodiques des déplacements en surface, ceux qui correspondent à la tranche superficielle très fissurée, siège d'une nappe perchée, très directement en relation avec les précipitations.

Certaines perspectives ont pu être envisagées, quant à l'évolution des mouvements de terrain, en nombre et en fréquence de déclenchements ou de réactivation. On ne sera pas surpris de constater que, fonction de l'évolution du milieu naturel, mais aussi anthropique, elles peuvent différer selon la région géographique et selon l'échelle de temps considérées.

Sur les côtes anglaises du Sud, l'activité des mouvements de terrain a augmenté pendant le dernier siècle. Elle a suivi la périodicité des variations climatiques et l'élévation du niveau marin. Cette élévation devrait se poursuivre, atteignant 22 cm en 2050 et avec un taux de 8 mm par an d'ici à 2100, en réponse au réchauffement pronostiqué du climat, dans les cinquante prochaines années. La moyenne annuelle des précipitations devrait elle aussi augmenter dans les 75 prochaines années, et la température également, de telle sorte que les hivers deviendraient légèrement plus humides et les étés un peu plus secs. On peut donc s'attendre à ce que la fréquence des mouvements augmente, atteigne 5 à 10 événements par an, plus que la moyenne actuelle.

Sur les côtes normandes, l'exemple de Villerville tend à nuancer ces perspectives d'accélérations de l'activité des mouvements de terrain le long des côtes de la Manche en relation avec la seule élévation du niveau marin. Entre 1829 et 1987, le recul en face du cirque des Graves a été de 60 à 70 m, soit une moyenne annuelle de 40 cm ; mais il a été calculé qu'un recul de 10 m du pied du glissement abaissait le coefficient de sécurité global de seulement 1 à 2 %.

En Cantabria, il a été montré que les mouvements de masse ont joué un rôle considérable dans l'évolution du relief, du moins dans certains secteurs comme la Magdalena-Pas où plus de 50 % du territoire a été affecté par des glissements, des coulées ou des chutes de blocs. Et pour les 500 dernières années, le taux de mobilisation par les mouvements de masse a dépassé le taux d'érosion, évolution en relation avec le régime des précipitations et les changements dans l'occupation du sol. De sorte que si le climat devient plus chaud, comme plusieurs modèles le prédisent, c'est, ici, à une diminution de la fréquence et de l'intensité des mouvements de terrain que l'on assistera à l'avenir, les conditions se rapprochant de celles qui ont existé à la période Atlantique.

Cet exemple doit nous inciter à approfondir les aspects et conséquences régionales des changements climatiques annoncés, même s'ils le sont à une échelle zonale. Et il ne faut pas perdre de vue que, à côté des facteurs naturels, les changements dans l'occupation du sol peuvent jouer un rôle important, voire prépondérant, pour certains types de mouvements, comme par exemple de petits glissements superficiels, auxquels il est heureusement aujourd'hui assez facile de remédier."

    2-2 - l'inventaire en France métropolitaine

Mis à part la partie française traitée ci-dessus, on ne peut guère être satisfait de l'inventaire métropolitain. Cela est déploré fréquemment mais rien ne suit.

Il est nécessaire de développer de façon coordonnée les bases de données en France : fichiers informatisés des événements, recensement des cartes d'aléa réalisées (savoir trouver l'information sur les zones exposées), zones de carrières souterraines, ...

Effectuer l'inventaire systématique des phénomènes de grande ampleur (> 1 hm3), potentiels, actifs ou historiques, voire préhistoriques ; études légères (géologiques, morphologiques, etc.) de ceux, parmi les actifs ou potentiels, pour lesquels existent des enjeux importants.

M. Pierre Antoine dénonce le rejet par les Universitaires de tout ce qui est pratique, la géologie appliquée n'étant guère enseignée qu'à Besançon.

Qui observe donc les mouvements de terrain et les recense ?

Ce sont essentiellement :

- le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées,

- les Centres d'Etudes Techniques de l'Equipement (CETE),

- le BRGM,

- le CEMAGREF,

- les services RTM (Restauration des Terrains en Montagne).

Les cartes au 1/50 000ème donnent de bonnes informations pour qui sait les lire, mais il n'existe pas de recensement complet concernant cet aléa. Partout où il y a des pentes, il peut y avoir mouvement de terrain.

Dans les années 1970, la direction de la Sécurité civile avait entrepris une cartographie dénommée ZERMOS : 30 cartes ont été faites, mais sans lendemain. Ces documents étaient appropriés pour les dangers et permettaient une ébauche de recensement. Avec ce recensement même simplement dégrossi, lorsqu'il y aurait une démarche de permis de construire, on pourrait mettre en garde les solliciteurs.

    2-3 - l'inventaire dans les DOM-TOM

M. Olivier Sedan, du BRGM Antilles, me faisait remarquer que le problème est plus important en Martinique qu'en Guadeloupe, et qu'à ce jour les grands mouvements de terrains ont eu lieu là où il n'y a personne.

Cependant un recensement a été entrepris dans les Antilles depuis 1989 par l'établissement d'atlas communaux.

En Guadeloupe, l'Etat s'est engagé à partir de 1989 dans une initiative "pilote" de réalisation d'"atlas communaux des risques naturels" destinés à homogénéiser le contenu et la présentation des documents techniques nécessaires à la prise en compte des risques naturels dans les documents d'urbanisme.

Pour chaque commune traitée, l'atlas comporte :

        - une notice d'utilisation générale décrivant chaque phénomène, le type de dégâts qu'il est susceptible d'occasionner, et son mode de représentation cartographique,

        - une série de cartes légendées au 1/25 000 et au 1/10 000, précisant le niveau d'aléa pour des phénomènes donnés.

Il reste que la seule information des communes n'est pas suffisante : la prise en compte des risques naturels nécessite que des dispositions réglementaires soient prises en terme de "constructibilité" et de "normes constructives".

A défaut, et au delà de la responsabilité directe des communes, la responsabilité de l'Etat pourrait être recherchée en cas de catastrophe majeure. Parallèlement à la poursuite des actions d'information engagées, il appartient donc à l'Etat de veiller, en liaison étroite avec les collectivités, à ce que des prescriptions préventives soient édictées et appliquées.

Ces atlas communaux, dont 21 sur les 33 de la Guadeloupe sont réalisés au rythme de 7 par an, comprennent donc 3 parties :

- la démarche suivie et la présentation des aléas,

- les cartes spécifiques à la commune par type d'aléa,

- la synthèse des risques sur la commune.

Afin d'illustrer ces propos, des extraits de l'atlas communal de Bouillante figurent en annexe 3.

Ces travaux cependant ne sont qu'indicatifs et ne sont qu'un porter à connaissance, lors de la révision des POS. A la différence d'un PER qui doit quantifier les effets de site par exemple, l'atlas ne fait que les présenter. Cependant il semblerait judicieux de ne pas perdre le travail effectué et de compléter ces atlas par des quantifications nécessaires et ainsi répondre aux critères des P.P.R.

Il existe d'autre part pour la Guadeloupe la remarquable thèse de doctorat de l'Université Paris VI, soutenue par M. Jean-Marc Mompelat le 25 mars 1994 et qui porte sur les "Unités cartographiques et évaluation de l'aléa mouvements de terrain en Guadeloupe".

Ce travail universitaire, qui a permis depuis à ce jeune chercheur de renforcer l'équipe du BRGM, a le mérite de proposer une nouvelle méthodologie pour la cartographie de l'aléa, mais aussi de définir une méthode d'évaluation quantitative et non plus seulement qualitative. Il y a donc là des bases définies pour réaliser l'inventaire qui fait défaut actuellement.

3 - L'ÉVALUATION ET LA CARTOGRAPHIE

Dans la synthèse que Philippe Masure a effectué pour l'Instance d'évaluation de la politique publique de prévention des risques naturels, il note ceci :

"A l'exception de bases de données locales constituées par quelques organismes spécialisés sous des formes variables, notre pays ne dispose pas d'une information générale permettant des statistiques spatiales, temporelles ou phénoménologiques. Une banque de données nationale sur les mouvements de terrains est en cours d'élaboration (collaboration BRGM, LCPC, Services RTM), ainsi qu'un inventaire relatif aux instabilités des vides souterrains (BRGM). On a une meilleure connaissance des sols sensibles aux variations climatiques (teneur en eau) suite à la sécheresse connue de 1986 à 1991 environ".

L'évaluation de l'aléa "instabilité" reste le plus souvent subjective (présomption d'instabilité par méthode analogique à l'intérieur d'unités physiques homogènes), les moyens de reconnaissances, d'auscultation et de calcul développés pour l'étude de sites circonscrits ne pouvant être mises en oeuvre sur de vastes étendues, pour des questions de coût notamment. L'évolution des moyens informatiques (modèles mécaniques, systèmes d'information géographique, analyses de formes, approches multicritères) devrait permettre de rendre l'évaluation plus objective dans des délais assez proches. Cela n'évitera pourtant pas l'apparition de phénomènes isolés liés à des conditions de sites particulières. Ces cas spécifiques ne peuvent être identifiés de manière totalement fiable avec les techniques d'études et de reconnaissances actuelles. L'incertitude correspondante doit être clairement signalée.

Mis à part de rares exceptions, les mouvements de terrains sont faiblement meurtriers, mais leur variété et leur nombre indique que leur impact économique est élevé. On estime très grossièrement l'impact direct à hauteur de 500 millions à un milliard de francs en moyenne annuelle. Ceci est confirmé par les budgets de réhabilitation ou de renforcement des zones instables qui sont nécessaires de manière quasi permanente et à la charge des collectivités territoriales ou des grands ministères (Equipement notamment). Malgré tout, aucune évaluation économique des dommages directs (destructions), des effets indirects sur les activités et des effets secondaires (financiers) des principaux phénomènes n'a encore été réalisée en France.

Si les enjeux justifient bien souvent les actions préventives (voies de communication, zones urbanisées, ...), il y a bien des cas où les analyses de vulnérabilité pourraient constituer d'utiles références pour la prise de décisions adaptées.

La méthode d'estimation de l'aléa est bien rodée, encore que relativement subjective : recherche des facteurs défavorables (géologiques, morphologiques, etc.) et étalonnage sur les zones à indices de mouvement, pour arriver à une évaluation approchée de l'intensité de l'aléa sur un secteur donné. Quatre sources de données sont utilisées : les informations géologiques de base, les renseignements historiques sur les événements passés, les observations de terrain et les photographies aériennes. L'expérience semble montrer que cette cartographie est globalement d'une bonne fiabilité, mais il peut subsister des erreurs par optimisme (occurrence d'un phénomène hors zone reconnue comme dangereuse) ou par pessimisme (stabilité durable d'une zone identifiée comme instable à terme). Il semble que ces erreurs ne pourraient être supprimées que par des investigations lourdes (sondages, essais mécaniques ou hydrogéologiques), donc à une échelle plus grande, sans que l'on puisse atteindre d'ailleurs la fiabilité parfaite.

Pour les vides souterrains, la cartographie réalisée au moyen des méthodes mentionnées ci-dessus reste très grossière. La première question qui se pose est celle de l'existence ou non de la source de risque, c'est-à-dire du vide souterrain. La photo-interprétation est utile, mais on est toujours à la recherche d'une méthode géophysique efficace et à grand rendement pour détecter et délimiter les cavités.

Même si elle a fait l'objet de programmes cartographiques multiples -mais par à coups-, l'évaluation de l'aléa mouvements de terrain est insuffisante. Elle nécessite notamment de :

        - réaliser un inventaire national des sites instables et développer des banques de données régionales,

        - élaborer de nouveaux instruments et un guide méthodologique pour la cartographie de l'aléa mouvements de terrain s'appuyant sur les outils informatiques actuels (systèmes d'informations géographiques, géostatistique, analyses multicritères) et généraliser les programmes cartographiques,

      - assurer la surveillance continue des sites instables à enjeux élevés,

      - développer de nouvelles techniques de localisation des vides souterrains.

Par ailleurs, des études de vulnérabilité sont indispensables. Une analyse de l'impact économique des mouvements de terrain en zones sensibles doit être entreprise en priorité. De plus, l'effet de l'évolution des activités et des aménagements sur les mouvements de terrain (fermeture des bassins miniers, grands aménagements et infrastructures en montagne, évolution de l'usage des sols, etc.) mériterait d'être analysé.

L'informatique a vu son rôle croître ces dernières années (bases de données, systèmes d'information géographique, cartographie automatique) : c'est surtout un gain dans la présentation, dans le test immédiat de nouvelles hypothèses, dans les actualisations rapides de documents, etc. L'informatique devrait permettre, dans les années qui viennent, d'améliorer le diagnostic, de le rendre plus objectif.

M. Pierre Antoine, en collaboration avec M. Eric Leroi du BRGM, a mis au point une cartographie assistée par ordinateur pour permettre une véritable recherche, notamment sur les pentes qui n'ont jamais bougé.

Sur deux exemples, les résultats ont été très différents. Pour Trièves, les résultats sont proches de la réalité. Par contre pour la Maurienne, cela n'a rien à voir avec la réalité. Il y a un problème de connaissance géologique. L'informatique peut aider à déterminer les stabilités, mais pour l'instant sur des modèles simples.

Les programmes de cartographie de l'aléa mouvements de terrain ont connu des vicissitudes de financements tout au long des vingt-cinq dernières années :

        - cartographie ZERMOS au 25 000ème, dans les années 70 suite à la catastrophe du plateau d'Assy (72 victimes), brutalement interrompue en 1976, à la fin de la phase "expérimentale",

        - cartographie "réglementaire" (périmètres R. 111.3, PER) depuis les années 80. Mais en Isère, 2 PER "glissements de terrain" seulement ont été approuvés.

La cartographie est donc très parcellaire et à différentes échelles : 1/2 000 ou 1/5 000 pour certaines communes, 1/10 000 pour la cartographie des communes de l'Isère (périmètres R. 111.3).

Il en résulte une assez grande diversité de cartes et une dispersion des zones cartographiées qui conduisent à un défaut d'information homogène et continue dans de nombreux bassins de risques.


4 - LA PRÉVISION ET LA SURVEILLANCE

Selon M. Jean-Louis Durville, sur un site instable donné, la prévision commence à acquérir une certaine fiabilité :

        - à très court terme (quelques jours, quelques semaines), lorsque le phénomène est en régime stationnaire : prévision à partir de l'état actuel et des précipitations journalières,

        - en phase d'accélération finale avant rupture, par ajustement empirique de lois simples permettant d'estimer l'instant de la rupture.

Mais la prévision au-delà de quelques semaines, a fortiori à long terme, n'est guère possible, ne serait-ce que par suite de l'imprévisibilité de changements significatifs tels que : extension ou restriction de la zone instable, modification de d'hydraulique souterraine par suite des mouvements, etc.

C'est donc paradoxalement la situation inverse de ce que l'on connaît pour les séismes : ici, la prédiction est possible, on pourra évacuer à temps et épargner les vies humaines, mais on ne peut prévoir à long terme, et donc il n'est pas possible d'avoir une prévention totalement satisfaisante.

Toutefois une double question, d'une grande importance pratique, ne peut guère avoir de réponse satisfaisante aujourd'hui : un phénomène lent actuellement est-il susceptible d'accélérer rapidement, c'est-à-dire de passer d'un régime quasi stationnaire à une vitesse catastrophique accompagnant la rupture définitive, et, si oui, quelle est la date prévisible de rupture ? En particulier, dans les matériaux rocheux à comportement assez fragile, il paraît impossible de fixer un délai précis avant la rupture : écroulements de falaises, carrières souterraines.

Dans le cas des coulées de boue et de débris, phénomènes à caractère répétitif sur un site donné, des seuils de déclenchement fondés sur la pluviosité sont envisageables, à condition de disposer de données météorologiques sur le site.

Il ne faut pas perdre de vue cependant que n'existe nulle part une mission de surveillance des versants instables avec financement à l'appui. Les choses se règlent au coup par coup, parfois difficilement.

La prédiction et l'alerte ne seront pas opérationnelles tant que les efforts de recherche nécessaires (techniques géophysiques notamment) n'auront pas été financés. Le déplacement des populations menacées reste la seule solution préventive si la stabilisation est techniquement ou économiquement irréalisable.

La base d'organisation pour la surveillance des sites instables pourrait, comme pour le suivi de l'évolution des aléas naturels et des risques, être régionale.

Pour M. Pierre Antoine, la prévision est souvent possible ; il faut suivre les déplacements, établir un modèle mathématique et quand la courbe obtenue devient asymptotique, il faut évacuer. Mais le seul problème est que le glissement peut changer de règle du jeu.

Tout ceci repose sur la surveillance. Or, on ne peut pas parler d'observation continue des mouvements de terrain en France, tout au plus peut-on évoquer quelques actions de surveillance.

Il existe peu de sites instrumentés en France de par le coût élevé de mise en oeuvre des techniques d'auscultation traditionnelles (déplacements et pressions hydrauliques en sondages essentiellement). Les plus connus vont donc faire l'objet d'un suivi. Selon les experts de la Direction de la Sécurité civile, 20 sites sont surveillés en permanence par le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées. Mais chaque mouvement est un cas particulier.

Le suivi des déplacements s'est donc quelque peu répandu ces dernières années, grâce en particulier à l'automatisation et à la télétransmission des mesures, ce qui a permis leur multiplication, dans le temps et dans l'espace, malgré un coût certain. Les méthodes spatiales paraissent prometteuses (imagerie spatiale à plusieurs dates, géodésie spatiale), mais il ne faut pas négliger des méthodes plus classiques comme l'inclinométrie (déformation en profondeur), voire rustiques comme la fissurométrie ou l'extensométrie à fil tendu.

Ces mesures, ainsi que celles de type piézométrique ou météorologique, commencent à révéler les mécanismes de variation de cinématique : en particulier, complexité du rôle des nappes souterraines, et donc des précipitations infiltrées.

Lors de mon passage au Japon, M. Kyoji Sassa, Professeur au "Disaster Prevention Research Institute" de l'Université de Kyoto, m'a affirmé qu'au Japon l'on travaille sur une machine qui pourrait prédire les glissements de terrain pensant que si l'on peut prévoir, on peut peut-être empêcher les catastrophes en prenant les mesures appropriées.

Mais pour l'instant, on investit beaucoup dans ces études. Cependant de l'avis de M. Sassa, il vaut mieux construire des bâtiments très résistants ou déterminer les terrains susceptibles de liquéfaction ou d'éboulement.

5 - LA PRÉVENTION ET LA PROTECTION

Les techniques de prévention du risque mouvements de terrain sont basées essentiellement sur le renforcement des zones instables et sur un contrôle de l'occupation des sols.

En matière de protection, les techniques de parade ou de réhabilitation de sites (après rupture) sont nombreuses et généralement efficaces. Les moyens disponibles sont moins adaptés pour les instabilités de très grandes masses.

Les principales techniques se rangent en parades actives et parades passives : soutènement, renforcement, drainage, terrassement. Leur emploi est en général satisfaisant, mais on a besoin d'améliorer la connaissance sur l'efficacité à moyen ou long terme des différentes techniques, et parfois d'optimiser leur dimensionnement.

Ces techniques sont efficaces pour des phénomènes d'ampleur modérée ; pour les mouvements de grande ampleur, seul le drainage peut être envisagé d'après les techniciens français rencontrés.

Pourtant à Kyoto, le Professeur Kyoji Sassa me faisait part de gigantesques travaux consistant à enfoncer 100 piliers de 6 mètres de diamètre enfoncés à 100 mètres de profondeur pour stopper le glissement de terrain, cela pour un coût de 80 milliards de yens.

Il faut noter le vide qui existe en France en matière de compétence administrative dans le domaine des travaux de prévention. Il n'y a pas de maître d'ouvrage désigné :

      - le propriétaire du terrain n'a pas d'obligation d'effectuer les travaux, qui sont bien souvent au-dessus de ses possibilités financières ;

      - la commune n'intervient, au titre de la police administrative, qu'en cas de danger imminent ;

      - le département et la région n'ont pas de compétence spécifique ;

      - l'État n'est concerné que de façon limitée :

        . lutte contre les risques en montagne (crues et laves torrentielles notamment) par les services de la Restauration des Terrains en Montagne,

        . protection des usagers des routes nationales par le ministère de l'Équipement.

Il en résulte que chaque cas doit faire l'objet d'une négociation difficile pour le choix du maître d'ouvrage et le partage des dépenses, sans garantie d'aboutir.

La stratégie de surveillance peut être adoptée lorsque les travaux de prévention sont techniquement ou économiquement irréalistes : elle permet de "vivre avec le risque", dans la mesure où la prévision de la rupture est suffisamment fiable.

Les possibilités de protection du bâti existant sont quelquefois réduites, souvent très coûteuses par rapport à la valeur marchande des ouvrages à protéger. L'expropriation -que nous verrons dans le chapitre suivant sur la réglementation- pourrait alors s'avérer la solution la plus rationnelle lorsque la sécurité des personnes est en cause.

La gestion de l'espace et l'aménagement préventif s'appuient sur des outils réglementaires peu adaptés sur lesquels je reviendrai par la suite.

Les cartes de zonage des aléas mouvements de terrain devraient servir de référence pour les décisions d'occupation des sols négociées. Leur réalisation doit être accélérée dans les bassins de risques concernés : zones de montagne, bassins à forte densité de cavités, falaises côtières et rives escarpées, etc.

La délimitation d'espaces fragiles à protéger, à l'instar de ce que font les services RTM dans les départements de montagne, doit également être poursuivie, pour orienter l'aménagement du territoire.

La prévention du risque mouvements de terrain, qui donne lieu à de multiples actions parallèles, mériterait d'être replacée dans une stratégie globale où le rôle des principaux gestionnaires du risque (Etat, services déconcentrés, départements, municipalités, organismes publics, particuliers) et les moyens mis en oeuvre seraient redéfinis dans un cadre cohérent.

La politique de prévention du risque mouvements de terrain en France devrait inclure également la prise en compte des impacts liés à l'évolution rapide de certains aménagements ou activités en milieux physiques sensibles.

Certaines vallées de montagne (recul des activités hydro-métallurgiques et agricoles, développement des infrastructures touristiques, ...), les grands bassins miniers (arrêt des exploitations minières), les zones de forte densité de carrières souterraines dont la ruine progressive affecte la stabilité des terrains en surface, constituent autant d'espaces physiques sensibles qui doivent faire l'objet d'une politique spécifique de prévention clairement affichée, avec un double objectif de mise en sécurité de l'existant et de prise en compte de la fragilité du milieu dans les futurs aménagements, afin de le protéger.

Votre Rapporteur s'est rendu sur le site dénommé "Les ruines de Séchilienne", près de Grenoble. Un pan de montagne glissera un jour dans la vallée, plusieurs millions de m3 sont en instabilité. Dans cette vallée passait la route nationale et dès les premiers éboulements -il s'en produit de petits presque chaque mois et quelques pierres se sont d'ailleurs détachées pendant ma visite-, des travaux ont été entrepris pour maintenir l'axe de communication.

Le ministère de l'Equipement a agi au mieux dans la gestion de la phase utile. Pendant quinze mois, la circulation a été maintenue sur la route aujourd'hui interdite grâce à une vigie 24 heures sur 24 pour arrêter la circulation.

Des ponts provisoires ont été installés pour permettre actuellement l'utilisation d'une nouvelle chaussée, en principe hors d'atteinte en cas d'éboulement de l'ensemble de la masse instable. Mais cette masse est si importante qu'il est vain d'espérer des travaux de confortement, la surveillance ne permettra que d'évacuer et neutraliser la zone d'éboulis.

Le préavis serait de quelques heures à 24 heures, selon M. J.-M. Pinard de la Direction de la Sécurité civile, le problème en terme de surveillance étant la détermination du point de criticité par l'expert.

Le plus délicat a géré a été le côté psychologique : les mesures préventives efficaces ne se remarquent pas, l'administration a sauvé des vies humaines dans le cas de Séchilienne.

La Séchilienne a coûté de 8 à 10 millions de francs de frais d'instruments de surveillance et environ 1,5 million de francs de fonctionnement par an, ce qui représente 50 à 60 millions de francs de travaux depuis le départ. L'échéance est rappelons le à 15/30 ans.

L'éboulement du 17 octobre 1991 à Bellefontaine en Martinique

Un éboulement tel celui du 17 octobre 1991 à Bellefontaine en Martinique peut être cité en exemple, d'une part de l'impossibilité d'empêcher le déclenchement du mécanisme, et d'autre part de ce qui peut être entrepris en matière de prévention.

J'ai visité le site de l'éboulement en compagnie des principaux acteurs de cette opération : élus locaux, DDE de Martinique, BRGM Antilles.


En Martinique, des mouvements de terrain, d'importance variée, se produisent chaque année durant ou juste après la saison des pluies (d'août à novembre). Parmi ces mouvements, les glissements de terrain sont à la fois les plus fréquents et les plus problématiques vis-à-vis de l'occupation du territoire (cf. le glissement du 20 août 1988, à Fonds-St-Denis). Le long de la côte caraïbe, entre Fort-de-France et Saint-Pierre, de hautes falaises instables représentent une menace constante pour la RN 2 (Allard, 1979) qui risque à tout moment d'être coupée, privant ainsi la zone nord-caraïbe de sa principale voie de communication avec le reste de l'île.

C'est ce qui arriva, le 17 octobre 1991 vers 22 h 00, lorsqu'un éboulement rocheux (estimé à 100 000 m3) se produisit dans la partie Nord de la falaise de Bellefontaine, à 150 mètres à peine du village du même nom.

Cet éboulement recouvrit la route jusqu'à la mer sur environ 200 m de large, mais ne provoqua heureusement aucune victime à cette heure de très faible trafic. Par contre, les travaux de dégagement de la route et les études géologiques et géotechniques nécessaires à la mise en sécurité de cette zone stoppèrent la circulation durant 24 jours (du 18 octobre au 11 novembre 1991) sur cet axe routier économiquement vital pour l'île.

Structure géologique de la falaise de Bellefontaine

Bien que formant la terminaison d'une entité morphologique unique (une butte allongée à sommet plat et pentes raides), la falaise de Bellefontaine (500 m de long pour une hauteur moyenne de 70 m) est constituée de plusieurs unités géologiques superposées et emboîtées. Ces unités, originaires de la zone centrale du massif volcanique des Pitons du Carbet, se sont déposées successivement dans des vallées, plus ou moins encaissées, qu'elles ont partiellement ou totalement comblées.

L'érosion des flancs Sud-Est et Nord-Est a, par la suite, donné sa physionomie actuelle à cet assemblage complexe.

Causes et mécanismes de l'éboulement du 17 octobre 1991

Etant donné la structure géologique complexe de la falaise de Bellefontaine (formations hétérogènes, variations latérales et verticales de la lithologie), il était nécessaire de considérer le comportement à l'érosion et l'aléa "éboulement rocheux" qui en découle, pour chaque zone prise séparément.

Après examen de l'ensemble de la falaise par M. Landry, il apparaît que l'éboulement du 17 octobre 1991 résulte de la combinaison de 4 facteurs d'instabilité existant dans cette zone ; il n'a cependant pas été possible de déterminer lequel de ces facteurs a été le plus déterminant dans le déclenchement du phénomène. Ces facteurs sont :

      - 1. Hauteur et escarpement : la falaise atteint sa hauteur maximum (environ 90 m) dans cette zone, et sa pente est subverticale avec, localement, des surplombs.

      - 2. Lithologie : il existe un contraste lithologique important entre la formation basale très argilisée (dépôts d'avalanche de débris) et les formations supérieures (brèche de nuée ardente et lahar) moins altérées et plus perméables.

      - 3. Eau : plusieurs types de circulation d'eau affectent les formations de la falaise :

        a. infiltration verticale des eaux de pluie à travers les formations supérieures qui présentent une perméabilité à la fois matricielle et de fracture,

        b. infiltration horizontale des eaux souterraines à travers les dépôts (brèche de nuée ardente, dépôts de cendres et ponces) reposant sur la formation basale argilisée,

        c. érosion par les eaux de ruissellement du talus argileux de la base de la falaise, conduisant localement à des sous-cavages.

      - 4. Structure : deux observations permettent d'associer la surface de rupture à une discontinuité structurale préexistante :

        a. une partie de la brèche de nuée ardente, toujours en place et située au Nord de l'éboulement, est très fracturée,

        b. la cicatrice de l'éboulement correspond à une surface de rupture pratiquement plane.

Il est important de noter que l'éboulement en masse ne résulte pas d'un simple effet gravitaire, mais d'un mouvement le long d'une discontinuité structurale, provoqué par un glissement de pied sur la formation basale argilisée dont le toit se prolonge en direction de la mer.

Rappelons ici ce que sont les facteurs d'instabilité identifiés :

1 - déchaussements de blocs : les blocs présents dans la matrice des différentes formations volcaniques peuvent se trouver progressivement déchaussés sous l'effet du ravinement causé par les eaux de ruissellement, et finir par tomber de la falaise. De tels blocs sont extrêmement nombreux dans les falaises, et leur volume est de l'ordre de 0,1 à quelques m3.





2 - desquamation : la plupart des terrains constituant la falaise présentent une certaine cohésion de cimentation et d'imbrication, qui permet d'assurer leur stabilité en talus verticaux sur une certaine hauteur. Lorsque cette cohésion diminue, sous l'effet d'une altération physico-chimique par exemple, notamment le long de plans de fractures, la stabilité n'est plus assurée, des écailles se détachent progressivement de la falaise, et finissent par s'écrouler. On observe de nombreux écaillages de ce type, dont le volume peut être de quelques dizaines de m
3.

3 - basculement ("toppling") : les zones supérieures des falaises sont constituées de terrains relativement raides, qui reposent sur les couches plus "molles" du substratum. Ce dernier a tendance à fluer et tasser sous l'effet de l'érosion et de l'altération en pied de falaise. Il se produit un "défaut de portance" à la base de colonnes subverticales qui tendent alors à basculer, créant des fissures de traction, qui conduisent à des concentrations de contraintes sous l'avant des colonnes, ce qui accentue les phénomènes précédents, et peut conduire au basculement de colonnes. Ce phénomène n'a pas été constaté dans les falaises lors de nos observations, mais il demeure un risque potentiel, dont le volume peut atteindre quelques centaines à quelques milliers de m3.

4 - Glissement en masse : lorsqu'une masse de formations volcaniques de cohésion fragile repose sur un substratum incliné de faibles caractéristiques géotechniques, sa stabilité est assurée lorsque la cohésion de la tranche supérieure est intacte. Par contre, si cette cohésion disparaît (par dessiccation, fissures de retrait, altération), ou si un élément moteur (écoulement sur le substratum, poussée hydrostatique dans des fissures, séisme) vient s'ajouter à l'équilibre des efforts, une colonne de volume pouvant être important vient surcharger le substratum, conduisant à une rupture en masse, qui entraîne la colonne et une masse plus ou moins importante du substratum. Une telle rupture peut être limitée à quelques m3 (certains sont visibles en pied de falaise), mais peut atteindre des volumes beaucoup plus importants, jusqu'à quelques centaines de milliers de m3.

Surveillance de la falaise : assurer la sécurité de la RN 2

Les études géologiques réalisées immédiatement après l'éboulement du 17 octobre ne révélèrent aucun autre signe de mouvement, ni dans la zone de l'éboulement, ni sur le reste de la falaise.

Cependant, des indices d'instabilité (fractures ouvertes, blocs ou masses rocheuses déchaussés, petits chenaux, sous-cavages, surplombs, ...) furent identifiés en plusieurs endroits de la falaise. De même, une corniche surplombant la cicatrice de l'éboulement rocheux fut dynamitée le 6 novembre 1991.

C'est pourquoi, avant que les travaux de stabilisation de la falaise ne commencent, début novembre 1991, les ingénieurs du BRGM gardèrent la falaise sous constante surveillance, dans le but de détecter l'amorce du moindre mouvement de terrain, afin de pouvoir stopper immédiatement la circulation sur la RN 2.

Cette phase d'observation s'est décomposée en deux parties distinctes :

- une surveillance visuelle d'une quarantaine de figures d'instabilité remarquables (blocs déchaussés, fractures, ...) pouvant entraîner des chutes de blocs ou des éboulements, a été réalisée deux fois par jour.

- une surveillance instrumentale continue de plusieurs fractures ouvertes de la façade de la falaise a également été mise en place. Sept capteurs de déplacement, mesurant les mouvements à la fois à petite échelle et à grande échelle, ont été reliés à une station d'acquisition de données installée au sommet de la falaise.

Aucun mouvement n'a été détecté durant cette période de surveillance continue. Les travaux de stabilisation et d'assainissement de la falaise ont conduit à faire ébouler 80 000 m3 de matériaux dans le but d'atténuer le risque d'un éboulement semblable à celui du 17 octobre.

Afin de mettre à l'abri la RN 2 après reprofilage de la falaise, il a été décidé de construire une nouvelle route sur la mer, en utilisant les matériaux issus des éboulements, et d'arrêter tout glissement et éboulement futurs éventuels par la réalisation d'un merlon situé entre la falaise et la voie.

Le projet a donc compris :

        - la création de redans de 10 mètres de profondeur et de 20 mètres de hauteur réalisés à partir de tirs de mines ;

        - la construction d'une nouvelle plate-forme routière décalée de 15 mètres vers la mer, comprenant une chaussée de 7 mètres de large et deux accotements de 4,50 mètres de largeur côté mer et 3,30 mètres de largeur côté merlon de protection ;

        - la réalisation d'un merlon de protection en terre de 4 mètres de hauteur ;

        - la mise en oeuvre d'enrochements lourds de protection contre les effets de houle cyclonique.

L'opération globale avait été estimée à 55 MF et a été financée par la Région.



Toujours lors de ma mission aux Antilles, j'ai pu observer des constructions, ayant apparemment fait l'objet d'un permis de construire et qui sont aujourd'hui fort menacées par des mouvements de terrain.

C'est le cas aussi bien en Guadeloupe qu'en Martinique où, à peine achevées ou en cours d'achèvement, de splendides maisons sont fissurées, lézardées, les murs de clôture disjoints et leurs extensions tennistiques (prévues ou non) transformées en un terrain crevassé. Que des pressions soient exercées par des groupes immobiliers pour construire avec vue sur la mer mais dans des zones instables est parfaitement intolérable. La responsabilité des élus est totale et il est de leur devoir d'empêcher que les règles soient transgressées pour des raisons mercantiles.

6 - LA RÉGLEMENTATION

Lors de ma mission au Japon, j'ai rencontré M. Tomohiro Yoshikawa, Directeur adjoint du "Slope Conservation Division, Erosion and Sediment Control Department, River Bureau".

Les glissements de terrain sont du ressort des ministères de l'Agriculture, des Forêts, et de la Construction. 3 085 zones à risque, soit 106 934 ha, sont gérées par ces ministères en fonction d'un certain nombre de lois. Une loi prévoit des travaux pour prévenir les éboulements de terrain et une surveillance par installation de capteurs.

D'autre part pour les zones à haut risque, le gouvernement conseille aux personnes exposées de partir, le responsable municipal peut donner un ordre d'évacuation.

Une campagne annuelle de sensibilisation a lieu lors du mois de juin, le risque étant le plus fort entre février et avril d'une part, et juin-juillet de l'autre.

En France, jusqu'au début de cette année, les actions possibles l'étaient sur l'occupation du sol : périmètres R 111-3, PER, POS. Ces outils réglementaires ont été diversement utilisés :

- les R 111-3 donnent généralement satisfaction pour les carrières souterraines à Paris. Toutefois leur champ d'application est limité aux constructions avec permis de construire.

- les PER sont jugés lourds à mettre en oeuvre et très difficiles en définitive à imposer aux communes récalcitrantes ; l'utilisation des POS n'est pas suffisamment sûre, ceux-ci pouvant être aisément remis en cause.

Le vote de la loi Barnier du 2 février 1995 en substituant les PPR aux PER va peut-être favoriser le développement de ces plans. L'introduction dans l'article 11 de cette loi 95-101 de la possibilité d'expropriation par l'Etat des biens exposés au risque est un énorme progrès. La détermination du montant des indemnités d'expropriation ne tenant pas compte de l'existence du risque est économiquement la seule solution pour permettre aux victimes de ces aléas naturels de préserver leur patrimoine, en capital tout au moins.

Il faut cependant persévérer dans la réglementation, car il s'agit d'une action efficace à long terme : il s'avère à l'usage que c'est surtout vis-à-vis des constructions et aménagements futurs qu'il est possible d'agir, et le taux de renouvellement du parc construit est très lent (nous l'avons vu précédemment, de l'ordre de 1 % par an).

7 - L'INFORMATION

La simple information des élus, des populations, des administrations (sous une forme la plus adéquate possible) constitue déjà un acte de prévention à ne pas négliger : information sur l'existence de dangers, sur les indices précurseurs, sur la conduite à tenir, etc. Elle peut d'ailleurs contribuer à sensibiliser, donc à faire accepter une réglementation. A la différence des actions réglementaires, son effet est à court terme.

Elle reste encore pour la majeure partie à développer.

En matière de formation, on note que les ingénieurs du Génie civil et les architectes sont en général peu au courant des problèmes de risques de mouvements de terrain et que plus généralement, l'étude des sols est ignorée dans les études d'architecture alors qu'un module devrait l'intégrer.

8 - L'ORGANISATION DES SECOURS

La prévision permet d'éviter la plupart des accidents, l'évacuation étant programmable.

Mais comme le précisaient mes interlocuteurs de la Direction de la Sécurité civile, plus le temps d'alerte est long, moins on tient les populations. Ainsi, lors du glissement italien de la Valteline en 1987, les populations qui avaient été évacuées avaient rejoint leurs habitations au bout de 24 heures, avant le déclenchement de l'éboulement.

Toutefois pour des mouvements non répertoriés, ou dont l'accélération finale a déjoué les observations, l'éboulement peut tout emporter sur son passage.

Les équipes de sauvetage-déblaiement sont parfaitement opérationnelles, et il n'y a pas ici de bouleversement de paysage susceptible d'empêcher la progression des sauveteurs.

Il faut simplement adapter l'importance des moyens de sauvetage et de déblaiement à l'importance de la coulée.

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