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N° 1585

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 mai 1999.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION n° 1526 de MM. DIDIER MIGAUD, AUGUSTIN BONREPAUX, ALAIN BARRAU, JEAN-LOUIS IDIART et les membres du groupe socialiste et apparentés sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final/n° E 1236),

PAR M. DIDIER MIGAUD

Rapporteur général,

Député,

et

ANNEXE

OBSERVATIONS ET AMENDEMENTS PRÉSENTÉS AU NOM DE LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE

PAR M. ALAIN BARRAU

Député.

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

TVA.

La commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de :

M. Augustin Bonrepaux, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Jean-Pierre Brard, Arthur Dehaine, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jegou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Eric Besson, Jean-Michel Boucheron, Michel Bouvard, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Yves Cochet, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Jean Rigal, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Jean-Pierre Soisson, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

SOMMAIRE

____

Pages

___

INTRODUCTION 5

I.-  LE DROIT COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE TVA : UNE CONTRAINTE FORTE AU NOM DE L'HARMONISATION FISCALE 7

1.- Un encadrement strict des taux de TVA 7

2.- Une évolution dominée par les nécessités de l'harmonisation fiscale 10

II.-  1997-1999 : UN PLAIDOYER FRANÇAIS POUR UNE INTÉGRATION DES PRÉOCCUPATIONS RELATIVES À L'EMPLOI DANS LA DÉFINITION DU RÉGIME COMMUN DE TVA 13

1.- La baisse de la TVA, une mesure favorable à l'équité fiscale, à l'emploi et à la croissance 13

2.- La France, l'Europe, la TVA et les services à forte intensité de main d'_uvre 16

a) Novembre 1997 : le tournant du Conseil européen de Luxembourg 16

b) Octobre 1998 : le soutien de l'Assemblée nationale à la démarche engagée par le Gouvernement français 18

c) Février 1999 : une proposition de directive très attendue 19

III.-  UNE ÉVOLUTION QUI REND POSSIBLE LA MISE EN _UVRE DE MESURES FORTES EN MATIÈRE DE TVA : VERS UN ASSUJETTISSEMENT AU TAUX RÉDUIT DES TRAVAUX DANS L'HABITAT 21

1.- La proposition de directive sur les services à forte intensité de main d'_uvre : des ajustements techniques limités, mais souhaitables 21

2.- Les secteurs éligibles : des choix difficiles, mais nécessaires 22

a) Le cas particulier de la restauration : une issue difficile en matière de TVA 23

b) Les services de proximité et d'aide à la personne rendus à domicile : une mesure qui semble opportune sous réserve d'une expertise préalable approfondie 27

c) Les travaux dans l'habitat : un dossier prioritaire 29

EXAMEN EN COMMISSION 37

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 45

TABLEAU COMPARATIF 49

AMENDEMENTS SOUMIS À LA COMMISSION ET NON ADOPTÉS 53

ANNEXE : OBSERVATIONS ET AMENDEMENTS PRÉSENTÉS AU NOM DE LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE 55

Mesdames, Messieurs,

La Commission européenne a présenté, le 17 février 1999, une proposition de directive tendant à permettre aux Etats membres qui le souhaitent d'appliquer un taux réduit de TVA à certains services à forte intensité de main d'_uvre, afin de mesurer, sur une période de trois ans, les effets sur l'emploi de telles mesures. Le Gouvernement l'a soumise au Parlement, en application de l'article 88-4 de la Constitution (document E 1236).

Ce texte est très important.

En effet, le Gouvernement français, et sa majorité, ont la volonté de réduire le niveau, maintenant stabilisé mais qui reste trop élevé, de nos prélèvements obligatoires, et de la TVA en particulier, pour des raisons d'équité fiscale et de soutien de la croissance et de l'emploi. Mais la mise en _uvre de cet objectif éminemment politique s'est largement heurté au droit communautaire. Au nom de la nécessaire harmonisation fiscale, une liste de biens et services pouvant être soumis au taux réduit a été définie, ce qui limite considérablement la possibilité pour les Etats membres de procéder à des « baisses ciblées » de TVA.

Parallèlement, la France a _uvré, depuis dix-huit mois, pour que la lutte contre le chômage devienne concrètement une priorité pour l'Union européenne. La proposition de directive précitée est, en matière fiscale, un premier fruit de ces initiatives.

Sous réserve que cette proposition de directive soit effectivement adoptée par le Conseil de l'Union européenne, la France devra indiquer, avant le 1er septembre prochain, à la Commission européenne, si elle souhaite participer à cette expérimentation, et quels services elle entend assujettir au taux réduit.

La présente proposition de résolution a pour objet d'indiquer au Gouvernement les attentes de la représentation nationale. Elle lui demande d'_uvrer pour l'adoption rapide de cette proposition de directive, d'utiliser les opportunités ainsi offertes en matière de TVA, et indique quel est, selon elle, le meilleur champ d'application.

Bien sûr, la liste est longue des activités qui mériteraient d'être assujetties au taux réduit, et qui pourraient créer de nombreux emplois grâce à cet abaissement du taux de l'impôt. On pensera, en particulier, à la restauration. Mais gouverner, c'est choisir. Pour des raisons économiques, juridiques et budgétaires, le choix prioritaire s'est porté sur les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat. Si les marges de man_uvre le permettent, la baisse de la TVA sur ces prestations pourrait constituer la grande mesure fiscale du projet de loi de finances pour 2000.

I.- LE DROIT COMMUNAUTAIRE EN MATIÈRE DE TVA :
UNE CONTRAINTE FORTE AU NOM DE L'HARMONISATION FISCALE

Le régime de TVA des Etats membres de l'Union européenne est régi par les dispositions de la directive n° 77/388 CEE du 17 mai 1977 modifiée, dite sixième directive, qui fixe des règles communes notamment en matière de territorialité, de champ d'application ou de droit à déduction. S'agissant des taux, les normes qui prévalent aujourd'hui résultent de la directive n° 92/77/CEE du 19 octobre 1992 : l'encadrement des taux répond à un objectif souhaitable d'harmonisation fiscale, mais ses modalités sont aujourd'hui devenues un obstacle pour la mise en _uvre de mesures tout aussi nécessaires, notamment dans la perspective du développement de l'emploi.

1.- Un encadrement strict des taux de TVA

Dès 1987 et la publication de son « livre blanc », la Commission européenne a défendu l'idée d'une abolition, au 1er janvier 1993, des frontières fiscales entre les Etats membres, et de la mise en _uvre d'un système de taxation des échanges intracommunautaires dans le pays d'origine afin d'achever la réalisation du marché intérieur.

Ce projet reposait sur trois grands principes :

- la suppression du système de taxation à l'importation et de restitution de la taxe à l'exportation pour les transactions intracommunautaires, la TVA devant être perçue dans l'Etat d'origine ;

- la mise en place d'un système de compensation entre les Etats membres afin de réallouer les recettes budgétaires qui reviennent à chacun, la TVA restant un impôt sur la consommation ;

- une forte harmonisation des taux afin d'éviter toute délocalisation des opérations liée au calcul de la TVA au taux du pays d'origine. Il était proposé que les Etats ne puissent plus appliquer que deux taux de TVA (un taux réduit entre 4% et 9% et un taux normal entre 14% et 20%) et qu'une liste de biens et de services pouvant être soumis au taux réduit soit établie.

Les fortes réticences de la majorité des Etats membres à l'égard d'un projet qui soulevait des problèmes non seulement techniques, mais également politiques, ont conduit assez rapidement à envisager de découpler l'abolition des contrôles aux frontières et la perception de la TVA dans l'Etat d'origine. C'est donc finalement une solution de compromis qui a été approuvée par les Etats membres et qui est entré en vigueur le 1er janvier 1993 sur le territoire de la Communauté européenne :

- les contrôles et les formalités fiscales lors du franchissement des frontières intracommunautaires sont abolis ;

- les notions d'importation et d'exportation sont supprimées dans les échanges intracommunautaires : il n'est plus question que de livraison et d'acquisition intracommunautaire dans un grand marché unifié ;

- les achats personnels des particuliers sont soumis à la TVA de l'Etat membre d'origine. Deux exceptions sont néanmoins prévues, en ce qui concerne les automobiles et les ventes par correspondance ;

- l'ancien système de livraison en franchise d'un pays à l'autre et d'acquittement de la taxe dans le pays de destination est maintenu pour les assujettis, mais de nouvelles obligations déclaratives sont mises en place ;

- s'agissant des assujettis exonérés, des forfaitaires agricoles et des personnes morales non assujetties, le régime applicable est celui des particuliers en-dessous d'un certain seuil d'achats intracommunautaires (70.000 francs en France) et à celui des assujettis au-dessus.

Dès l'origine, ce dispositif a été présenté comme une solution transitoire : à l'issue d'une période de quatre années, il devait être remplacé par « un régime définitif de taxation des échanges entre les Etats membres reposant, en principe, sur la base de leur imposition dans l'Etat membre d'origine des biens livrés et des services rendus ». Toutefois, il était admis qu'en l'absence de décision sur ce régime définitif, la période transitoire serait automatiquement prolongée, ce qui s'est effectivement produit.

Or, dans le cadre de ce régime transitoire, les Etats membres ont considéré que les risques de distorsion de concurrence induits par les écarts de taxation seraient assez limités, et que l'harmonisation des taux ne supposait pas la mise en _uvre de mesures aussi radicales que celles suggérées à l'origine par la Commission. La directive n° 92/77/CEE du 19 octobre 1992 n'en a pas moins fixé des règles relativement contraignantes :

- les Etats sont autorisés à appliquer un ou deux taux réduits supérieurs ou égaux à 5%. Les biens et services susceptibles d'en bénéficier sont énumérés de manière limitative dans l'annexe H à la sixième directive, dont le texte est reproduit ci-après. Toutefois, les Etat membres qui, au 1er janvier 1991, appliquaient des taux inférieurs à 5%, ont été autorisés à les maintenir pour la durée du régime transitoire. Par ailleurs, il a été admis que ceux qui devaient modifier leurs structures de taux en reclassant au taux normal des produits et services précédemment soumis au taux réduit pourront appliquer à ces derniers un taux intermédiaire ;

LISTE DES LIVRAISONS DE BIENS ET DES PRESTATIONS DE SERVICES

POUVANT FAIRE L'OBJET DE TAUX RÉDUITS DE TVA (ANNEXE H)

Catégorie

Description

1

Les denrées alimentaires (y compris les boissons, à l'exclusion, toutefois, des boissons alcooliques) destinées à la consommation humaine et animale ; les animaux vivants, les graines, les plantes et les ingrédients normalement destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ; les produits normalement utilisés pour compléter ou remplacer des denrées alimentaires.

2

La distribution d'eau.

3

Les produits pharmaceutiques normalement utilisés pour les soins de santé, la prévention de maladies et le traitement à des fins médicales et vétérinaires, y compris les produits utilisés à des fins de contraception et de protection hygiénique féminine.

4

Les équipements médicaux, le matériel auxiliaire et les autres appareils normalement destinés à soulager ou traiter des handicaps, à l'usage personnel et exclusif des handicapés, y compris la réparation de ces biens, ainsi que les sièges d'enfant pour voitures automobiles.

5

Le transport des personnes et des bagages qui les accompagnent.

6

La fourniture de livres, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l'exclusion du matériel consacré entièrement ou d'une manière prédominante à la publicité.

7

Le droit d'admission aux spectacles, théâtres, cirques, foires, parcs d'attraction, concerts, musées, zoos, cinémas, expositions et manifestations et établissements culturels similaires.

La réception de services de radiodiffusion et de télévision.

8

Les services fournis par les écrivains, compositeurs et interprètes et les droits d'auteur qui leur sont dus.

9

La livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale.

10

Les livraisons de biens et prestations de services d'un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole, à l'exclusion, toutefois, des biens d'équipement, tels que les machines ou les bâtiments.

11

L'hébergement fourni dans des hôtels et établissements similaires, y compris la fourniture d'hébergement de vacances et la location d'emplacements de camping et d'emplacements pour caravanes.

12

Le droit d'admission aux manifestations sportives.

13

Le droit d'utilisation d'installations sportives.

14

La prestation de services et la livraison de biens par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les Etats membres et engagés dans des _uvres d'aide et de sécurité sociales, dans la mesure où ces prestations et services ne sont pas exonérés en vertu de l'article 13.

15

Les services fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation ainsi que la livraison de biens qui s'y rapportent.

16

La fourniture de soins médicaux et dentaires ainsi que les cures thermales, dans la mesure où ces prestations ne sont pas exonérées en vertu de l'article 13.

17

Les services fournis dans le cadre du nettoyage des voies publiques, de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets, autres que les services fournis par les organismes visés à l'article 4 paragraphe 5.

- les Etats membres ne peuvent avoir qu'un seul taux normal, qui doit être supérieur ou égal à 15%.

TAUX DE TVA EN VIGUEUR DANS L'UNION EUROPÉENNE AU 1ER AVRIL 1998

Taux

Pays

Taux zéro

Taux super réduit

Taux réduit

Taux intermédiaire

Taux normal

Allemagne

-

-

7

-

16

Autriche

-

-

10

12-16

20

Belgique

oui

1

6

12

21

Danemark

oui

-

-

-

25

Espagne

-

4

7

-

16

Finlande

oui

-

8

17

22

France

-

(1)

5,5

-

20,6

Grèce (2)

-

4

8

-

18

Irlande

oui

3,6

12,5

-

21

Italie

-

4

10

-

20

Luxembourg

-

3

6

12

15

Pays-Bas

-

-

6

-

17,5

Portugal

(3)

-

5 (4)

12 (5)

17 (6)

Royaume-Uni

oui

-

5 (7)

-

17,5

Suède

oui

6

12

-

25

Moy. : 7,7%

Moy. : 19,4

(1) Existence de taux spéciaux, notamment 2,1% en matière de presse et pour certains médicaments.

(2) Taux réduits du quart dans les îles du Dodécanèse (c'est-à-dire 3%, 6% et 13%).

(3) Maintien du taux zéro uniquement pour les prestations de services et les livraisons de biens entre la métropole et les archipels de Madère et des Açores.

(4) Ou 4% dans les régions autonomes.

(5) Ou 8% dans les régions autonomes.

(6) Ou 13% dans les régions autonomes.

(7) Pour fourniture d'énergie à usage domestique.

2.- Une évolution dominée par les nécessités
de l'harmonisation fiscale

Le régime communautaire en matière de taux de TVA a donc été conçu à des fins d'harmonisation fiscale. Il s'agissait, pour l'essentiel, de geler les écarts de taxation, de rapprocher les champs d'application et de préparer le passage au régime définitif. Depuis 1993, les initiatives de la Commission ont d'ailleurs été centrées autour de ces objectifs.

· La Commission a toujours apprécié les règles de taux au regard du fonctionnement du marché intérieur, indépendamment de toute autre considération telle que le contenu en emploi des différentes activités.

Ainsi, la fixation d'un plancher pour le niveau du taux normal était destinée à éviter toute tentation de « dumping fiscal ».

Le champ de l'annexe H précitée a été déterminé, quant à lui, en fonction, essentiellement, de la pratique des Etats membres en 1993, afin d'harmoniser les champs d'application.

En fait, le seul facteur qui aurait pu justifier une modification des règles de taux aurait été un mauvais fonctionnement du régime transitoire. Dès lors que la Commission jugeait ce fonctionnement satisfaisant, les taux de TVA n'ayant pas induit de distorsions de concurrence significative, il ne lui a pas semblé justifié de prévoir des modifications majeures portant sur les éléments essentiels du nouveau système de taux ou sur le champ d'application du taux réduit (1).

· La Commission n'a finalement proposé des modifications des règles de taux que dans la perspective d'un passage au régime définitif de TVA.

En effet, en dépit des réserves déjà exprimées par la plupart des Etats membres, la Commission continue à défendre son projet de mise en place d'un régime définitif de taxation des échanges intracommunautaires dans le pays d'origine. Certes, elle admet, comme on l'a vu, que le régime transitoire fonctionne de façon globalement satisfaisante. Mais il présente tout de même, selon elle, des imperfections, et fait peser sur les opérateurs des contraintes « difficilement compatibles avec le bon fonctionnement du marché intérieur ». Dès lors, un marché unique pleinement opérationnel supposerait que soit appliqué aux transactions intracommunautaires le même régime qu'aux transactions intérieures, ce qui réduirait la charge de travail administratif supportée par les opérateurs et limiterait les possibilités de fraude. La Commission estime que, dans ce nouveau régime, les dispositions actuellement en vigueur en matière de taux devront être remplacées par des normes strictes permettant d'assurer une harmonisation encore plus complète au sein de l'Union européenne.

C'est bien dans cette perspective que se sont inscrits les seuls projets de modification du régime des taux présentés, jusqu'à présent, par la Commission européenne. Ainsi, à travers la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE relative au système commun de TVA du 20 décembre 1995, qui visait à encadrer le niveau du taux normal entre un taux plancher de 15% et un taux plafond de 25%, la Commission cherchait surtout à consolider le fonctionnement du marché intérieur et à créer les conditions d'un rapprochement progressif des niveaux de taxation (2). A l'époque, votre Commission des finances avait d'ailleurs adopté une résolution demandant au Gouvernement français de s'opposer à ce projet, ce qui s'était effectivement produit, en considérant que la fixation d'un taux plafond était une mesure techniquement imparfaite, insuffisante et prématurée (3). De nouveau, le 30 novembre 1998, la Commission européenne a présenté une proposition de directive du Conseil visant à plafonner le niveau du taux normal à 25%, en considérant que l'introduction de la monnaie unique risquait d'accentuer l'impact des distorsions existantes. Les Etats étant toujours opposés à la fixation de ce taux plafond, seul le taux plancher (15%) sera reconduit.

De fait, plusieurs arguments militaient contre l'adoption de cette proposition : le système commun de TVA est déjà très encadré, l'absence de taux plafond n'est pas à l'origine de distorsions de concurrence significative à l'échelle communautaire (les Gouvernements s'étaient d'ailleurs déjà engagés, politiquement, au sein du Conseil, à ne pas accroître les écarts de taux normal de plus de dix points au-delà du taux normal le plus faible, et cet engagement a été respecté sans qu'aucune norme juridique contraignante ne soit nécessaire), et la perspective du passage au régime définitif reste très aléatoire. Au demeurant, sa mise en _uvre ne suppose pas seulement un encadrement des taux, mais une véritable harmonisation des systèmes de TVA, en termes de structure, de champ d'application et de droit à déduction, ainsi qu'un examen des conséquences institutionnelles de ce régime.

En outre, on était en droit de considérer qu'une « remise à plat » du champ autorisé du taux réduit, en particulier en vue de permettre aux Etats de mettre en _uvre des mesures fiscales destinées à soutenir l'emploi, devait précéder une éventuelle réflexion à propos du niveau du taux normal. C'est précisément dans cette perspective que la proposition de directive du 17 février 1999 sur les services à forte intensité de main d'_uvre revêt une importance particulière.

II.- 1997-1999 : UN PLAIDOYER FRANÇAIS POUR UNE INTÉGRATION DES PRÉOCCUPATIONS RELATIVES À L'EMPLOI DANS LA DÉFINITION DU RÉGIME COMMUN DE TVA

1.- La baisse de la TVA, une mesure favorable à l'équité fiscale,

à l'emploi et à la croissance

Les prélèvements sociaux et fiscaux ont très fortement progressé, en France, entre 1993 et 1997, passant de 43,9% à 46,1% du PIB, pour se stabiliser en 1998. Au cours de la même période, les mesures fiscales mises en _uvre par la précédente majorité (forte hausse de la TVA et baisse, plus limitée, de l'impôt sur le revenu) ont encore accentué le caractère injuste de notre système fiscal par rapport à la pratique de nos partenaires, en alourdissant le poids, déjà important, des prélèvements sur les ménages et de la fiscalité indirecte.

Malgré la stabilisation constatée en 1998, le niveau des prélèvements obligatoires demeure excessif. De ce point de vue, le Gouvernement et sa majorité se sont clairement prononcés en faveur d'une baisse des prélèvements obligatoires qui tienne compte, bien entendu, des marges de man_uvre budgétaires, elles-mêmes liées à l'évolution de la conjoncture.

Dans cette perspective, la priorité doit aller à la baisse de la fiscalité qui pèse sur les ménages, afin de soutenir la consommation et donc la croissance. A cet égard, le choix se pose essentiellement entre l'impôt sur le revenu et la TVA. Or, au nom de l'équité fiscale, c'est le niveau de cette dernière qui doit être progressivement diminué.

En effet, de façon générale, le prélèvement fiscal total (environ 18% du revenu disponible des ménages avant impôt) est modérément progressif dans notre pays. Mais, comme l'a rappelé l'INSEE dans une étude publiée en 1997 sur les revenus et le patrimoine des ménages, cette caractéristique est elle-même la résultante de deux tendances opposées : « la nette progressivité de l'impôt sur le revenu compense la dégressivité des prélèvements indirects, la fiscalité locale, très uniforme, ne jouant ici aucun rôle » (4).

· L'impôt sur le revenu est fortement progressif : il participe donc de la nécessaire redistribution vers les ménages les plus modestes. La baisse de son niveau favorise les catégories les plus aisées de la population et, par définition, ne bénéficie qu'aux contribuables imposables, soit la moitié seulement des foyers fiscaux.

· A l'inverse, les prélèvements sur la consommation, dont la TVA représente les trois quarts environ, sont nettement dégressifs (entre 13% pour les ménages les plus modestes et 7% pour les plus hauts niveaux de vie selon l'INSEE).

Cette dégressivité tient en partie aux variations de la structure de consommation selon le niveau de vie. Certes, les taux sont souvent plus bas pour les produits dits de première nécessité, qui constituent une part d'autant plus importante de la consommation que le ménage a un faible niveau de vie. Mais l'INSEE indique, dans l'étude précitée, que cet effet est compensé par des phénomènes affectant les produits de culture et de loisirs : les ménages les plus modestes consomment, dans cette catégorie, avant tout des biens fortement taxés (audiovisuel, tabac, etc.), à l'inverse des ménages plus aisés (livres, presse, spectacles, etc.).

Néanmoins, cette dégressivité est d'abord liée aux comportements d'épargne. En effet, la consommation représentant une part décroissante du revenu disponible des ménages, à l'inverse de l'épargne, le poids des prélèvements assis sur la consommation est également décroissant, bien entendu, en fonction du revenu.

Ainsi, la réduction de la TVA doit être privilégiée : ce choix s'impose en termes d'équité, compte tenu de la dégressivité de cet impôt et du fait que son allégement profiterait à l'ensemble des ménages, et en termes d'efficacité, car les gains de pouvoir d'achat induits par les baisses de TVA sont de nature à soutenir l'activité. En outre, dans certains cas, les baisses de TVA sont susceptibles de s'accompagner de la suppression corrélative de certains avantages fiscaux, en matière d'impôt sur le revenu notamment, et peuvent ainsi constituer des mesures de simplification appréciables pour les redevables.

On peut considérer, néanmoins, que ces objectifs d'équité fiscale et de soutien de l'activité ne pourraient être atteints, dans l'immédiat, en revenant sur la hausse de deux points du taux normal décidée, en 1995, par le précédent Gouvernement, en raison du coût budgétaire d'une telle mesure et du caractère hypothétique de la répercussion de cette baisse du taux de l'impôt sur les prix et, partant, sur le pouvoir d'achat des ménages.

Dès lors, la mise en _uvre de baisses ciblées apparaît préférable et depuis dix-huit mois, le Gouvernement a d'ailleurs déjà consenti des efforts importants ; on rappellera ci-après les principales mesures, ainsi que les pertes annuelles de recettes qui en résultent :

- baisse de la TVA sur les travaux de réhabilitation sur les logements sociaux locatifs (article 14 de la loi de finances pour 1998, 2.350 millions de francs) ;

- baisse de la TVA sur les médicaments soumis à autorisation temporaire d'utilisation (article 34 de la loi de finances rectificative pour 1997, 70 millions de francs) ;

- baisse de la TVA sur la construction et les travaux sur les logements foyers (article 15 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, 550 millions de francs) ;

- baisse de la TVA sur les abonnements souscrits pour la fourniture de gaz et d'électricité (article 29 de la loi de finances pour 1999, 4.000 millions de francs) ;

- baisse de la TVA sur les appareillages destinés aux diabétiques et à certains handicapés (article 30 de la loi de finances pour 1999, 200 millions de francs) ;

- baisse de la TVA sur les opérations de collecte et de tri sélectif des déchets ménagers, ainsi que le traitement de ces déchets (article 31 de la loi de finances pour 1999, 400 millions de francs) ;

- exonération de TVA des acquisitions de terrains à bâtir par des particuliers, avec assujettissement corrélatif aux droits de mutation (article 40 de la loi de finances pour 1999, 800 millions de francs).

Deux mesures doivent également être prises en compte :

- les travaux d'amélioration réalisés par les bailleurs privés de logements sociaux bénéficiant d'une subvention de l'ANAH ouvrent droit à un remboursement égal à la différence entre la TVA qui a grevé le montant des travaux subventionnables et la TVA calculée sur ce même montant au taux réduit (article 32 de la loi de finances pour 1999, 240 millions de francs). Cette mesure équivaut à une baisse de la TVA ;

- mise en place d'un crédit d'impôt pour les dépenses d'entretien de l'habitation principale (article 74 de la loi de finances pour 1998, 1.400 millions de francs), et augmentation du taux de remboursement et doublement du plafond de dépenses prises en compte (article 33 de la loi de finances pour 1999, 2.500 millions de francs supplémentaires). Cette mesure était pour partie destinée à contourner l'impossibilité, au regard du droit communautaire, de baisser la TVA sur ces prestations.

Au total, ce sont donc près de 13 milliards de francs qui ont été consacrés, sur la période considérée, à des baisses de TVA ou à des mesures équivalentes.

Le champ des baisses de TVA qu'il serait possible de mettre en _uvre dès aujourd'hui dans le respect du droit communautaire n'est pas épuisé pour autant. Mais il est clair, cependant, que la France a déjà largement exploité les possibilités offertes par l'annexe H à la sixième directive précitée, et qu'il lui était devenu difficile de promouvoir l'emploi au moyen d'une réduction de la fiscalité indirecte sans _uvrer, en parallèle, pour un assouplissement de ces contraintes communautaires.

2.- La France, l'Europe, la TVA et les services à forte intensité de main d'_uvre

a) Novembre 1997 : le tournant du Conseil européen de Luxembourg

Dès le mois de juin 1997, la France a invité ses partenaires de l'Union européenne à s'engager dans une démarche tendant à réorienter la politique communautaire, qui n'intégrait pas assez la lutte contre le chômage parmi ses priorités. Cette volonté s'est clairement manifestée lors du Conseil européen extraordinaire pour l'emploi qui s'est tenu à Luxembourg en novembre 1997. La dimension fiscale de cette réorientation n'a pas été ignorée : à l'occasion de ce Conseil, la Commission a ainsi présenté, le 12 novembre, une communication qui envisageait la possibilité d'autoriser les Etats membres à appliquer le taux réduit de la TVA sur des services à forte intensité de main d'_uvre, à titre expérimental et sur une base optionnelle.

Dans ce document, la Commission récusait la perspective d'une évolution de grande ampleur en matière de TVA, et recommandait « la plus extrême prudence par rapport à toute mesure qui puisse avoir un impact significatif sur la perception des recettes ». En effet, elle considérait, notamment, qu'« une réduction ciblée des cotisations de sécurité sociale est probablement un instrument plus efficace pour la création d'emplois qu'une réduction des taux de TVA », et que « les effets d'un allégement de la TVA sur la création d'emplois ne sont pas incontestés ». Néanmoins, elle reconnaissait que « le problème du chômage revêt une telle importance qu'il vaut la peine de tester le fonctionnement d'un allégement de la TVA ciblé sur les services à forte intensité de main d'_uvre ».

Le raisonnement à la base de cette initiative était double :

- « Premièrement, un taux de TVA réduit fera baisser les prix à la consommation et donc stimulera la demande de services employant de la main d'_uvre peu qualifiée. On tirerait ainsi parti du fort potentiel de création d'emplois dans ces entreprises qui, typiquement, travaillent sur le plan local seulement » ;

- « Deuxièmement, le mécanisme de la TVA ne fonctionne pas particulièrement bien dans les secteurs où il y a peu de TVA déductible et où la plupart des consommateurs sont des particuliers. Dans ce cas, la TVA fait partie du prix et le consommateur peut aisément s'entendre avec le prestataire de service pour éviter de la payer. De ce point de vue, l'adoption d'un taux réduit de TVA réduirait l'incitation à rejoindre (ou à rester) dans l'économie souterraine ».

L'évolution envisagée devait alors, pour la Commission, être strictement encadrée :

- il devra s'agir de services à haute intensité de main d'_uvre (peu qualifiée), fournis directement aux consommateurs finals. Un lien fort devra exister entre réduction des prix, d'une part, et augmentation de la demande et de l'emploi, d'autre part. Ces services devront être à prédominance locale et l'application du taux réduit ne devra pas entraîner de distorsion de concurrence ;

- la mesure devra avoir un impact budgétaire « très bas » : les recettes correspondant à un point de taux normal de TVA sont citées comme une limite supérieure envisageable (5) ;

- l'application ou non du taux réduit devra être optionnelle pour les Etats ;

- l'expérience aura une durée limitée à trois ans.

Compte tenu de ces contraintes, la Commission proposait que les Etats choisissent parmi les catégories suivantes :

- les services de réparation de biens meubles corporels (y compris les bicyclettes, mais à l'exception des autres moyens de transport) ;

- la rénovation et la réparation de logements (constructions neuves exceptées) ;

- les parcs de loisirs, les services de nettoyage et de blanchisserie et les services de proximité tels que l'aide à domicile, les soins à la jeunesse, aux handicapés ou aux personnes âgées.

b) Octobre 1998 : le soutien de l'Assemblée nationale à la démarche engagée par le Gouvernement français

Cette communication de la Commission au Conseil a été longuement évoquée, à l'Assemblée nationale, au cours du dernier débat budgétaire (6). De nombreux parlementaires sont intervenus sur ce sujet, souvent pour défendre l'éligibilité à la baisse de la TVA de tel ou tel secteur, qu'il s'agisse du bâtiment ou de la restauration, mais plus généralement pour inciter le Gouvernement à _uvrer, dans les négociations européennes, en faveur de l'adoption d'une proposition de directive qui permette aux Etats de mettre en _uvre effectivement des baisses de TVA.

Ainsi, votre Rapporteur général a qualifié la communication de la Commission du 12 novembre 1997 de « chance à saisir », a considéré que la réglementation européenne en matière de TVA traversait « une période décisive », et a souhaité que le Gouvernement fasse preuve de « conviction » et d'« énergie ». Notre collègue, M. Alain Barrau, est également longuement intervenu, saluant cette « réorientation de la politique européenne ».

La position unanime de la représentation nationale a sans aucun doute contribué à renforcer la détermination du Gouvernement qui, à l'occasion de ce même débat budgétaire, s'est engagé, par la voix du secrétaire d'Etat au budget, M. Christian Sautter, à être « à la pointe de la revendication ». Fort de ce soutien, le Gouvernement français n'a effectivement pas ménagé ses efforts pour que la démarche engagée à l'occasion du Conseil européen de Luxembourg aboutisse. De nouveau, à l'occasion du Conseil européen de Vienne en décembre 1998, il a manifesté son intérêt pour ce projet, qui s'est concrétisé à travers la proposition de directive présentée par la Commission européenne le 17 février dernier.

c) Février 1999 : une proposition de directive très attendue

La proposition de directive du 17 février 1999 sur les services à forte intensité de main d'_uvre reprend, dans ses grandes lignes, les orientations suggérées dans la communication précitée. Elle prévoit que le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, pourra autoriser les Etats membres de l'Union européenne à appliquer le taux réduit de la TVA à certains services, sous réserve qu'ils remplissent les conditions suivantes :

- être à haute intensité de main d'_uvre ;

- être fournis directement aux consommateurs finaux ;

- être principalement locaux et non susceptibles de créer des distorsions de concurrence ;

ne pas mettre en péril, en étant assujettis au taux réduit de la TVA, le bon fonctionnement du marché intérieur.

Sans préjudice de l'examen au cas par cas lié à la procédure prévue d'autorisation par le Conseil, et bien qu'aucune liste des services potentiellement éligibles au taux réduit ne soit proposée, la proposition de directive précise, dans son préambule, que les activités susceptibles de répondre à ces conditions et d'offrir les meilleures opportunités de création d'emploi pourraient être, à titre d'exemple, certains services de réparation de biens meubles corporels, certains services écologiques, des prestations de services de proximité (services rendus à la personne sous forme d'aide à domicile, à la jeunesse, aux personnes âgées ou handicapées) ou des prestations de réparation et de rénovation, soit d'immeubles anciens à usage d'habitation, soit de bâtiments historiques classés. Ce champ est plus large que celui envisagé dans la communication précitée du 12 novembre 1997.

La mesure serait effectivement optionnelle, les Etats membres n'étant pas tenus de participer à l'expérience proposée par la Commission, et expérimentale :

- tout Etat membre souhaitant introduire une telle mesure devra en informer la Commission avant le 1er septembre 1999 et lui communiquer, avant cette même date, le champ des services visés ainsi que le coût et les effets attendus de la mesure ;

- en cas d'autorisation, le taux réduit devra être appliqué, obligatoirement, durant toute la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 (7) ;

- avant le 1er octobre 2002, les Etats membres devront établir un rapport détaillé contenant une évaluation de l'efficacité de la mesure en termes de création d'emploi et d'efficience.

La France a donc désormais une opportunité significative à saisir. Il reste à définir le champ des propositions qu'elle devra adresser à la Commission européenne pour que des mesures fortes puissent effectivement être mises en _uvre dans la prochaine loi de finances.

III.- UNE ÉVOLUTION QUI REND POSSIBLE LA MISE EN _UVRE DE MESURES FORTES EN MATIÈRE DE TVA : VERS UN ASSUJETTISSEMENT AU TAUX RÉDUIT DES TRAVAUX DANS L'HABITAT

1.- La proposition de directive sur les services à forte intensité de main d'_uvre : des ajustements techniques limités,
mais souhaitables

La proposition de directive du 17 février dernier est un texte de compromis. Sa forme n'est sans doute pas totalement satisfaisante, mais pour des raisons d'efficacité, il est préférable de l'accepter en l'état. Toutefois, deux ajustements semblent nécessaires :

- en premier lieu, on peut s'étonner que l'autorisation d'appliquer le taux réduit de la TVA à un service à forte intensité de main d'_uvre soit subordonnée à une décision unanime du Conseil. On peut comprendre, bien sûr, le souci de la Commission de laisser à chacun des Etats membres la possibilité de s'opposer à la mise en _uvre, par un autre Etat membre, d'une mesure qui serait susceptible d'induire des distorsions de concurrence au détriment de ses propres opérateurs. Le même raisonnement l'a d'ailleurs conduite à ne prévoir qu'une majorité qualifiée pour la sortie du dispositif, afin que l'Etat bénéficiaire de la mesure ne puisse pas s'opposer, seul, à sa suppression, dès lors qu'elle aurait induit une distorsion de concurrence au détriment de l'un de ses partenaires : lorsque la Commission constate que les mesures introduites par un Etat membre ne peuvent plus être maintenues pour des raisons de distorsions de concurrence, le Conseil peut être appelé à prendre des mesures appropriées à la majorité qualifiée. Toutefois, au stade de l'application par les Etats membres d'un texte lui-même adopté à l'unanimité, c'est à dire pour leur permettre d'appliquer le taux réduit à telle ou telle catégorie de services, dans un cadre optionnel et expérimental, l'exigence d'une décision unanime pourrait être de nature à bloquer le processus de décision. Aussi, paraît-il préférable de respecter un certain parallélisme des formes en généralisant la procédure de la majorité qualifiée, aussi bien pour l'entrée en application que pour la sortie du dispositif ;

- en second lieu, il apparaît qu'un Etat qui aurait été autorisé à soumettre au taux réduit de la TVA, à compter du 1er janvier 2000, un service à forte intensité de main d'_uvre, ne pourrait pas remettre en cause cette décision avant l'expiration du délai de trois ans prévu pour l'expérimentation. Encore une fois, on peut comprendre le souci de la Commission de s'assurer que les mesures mises en _uvre bénéficieront d'une certaine durée, puisqu'il s'agit d'observer leurs effets sur l'emploi. Mais il s'agirait d'une atteinte excessive à la liberté fiscale des Etats, d'autant qu'un Gouvernement pourrait ainsi être contraint d'appliquer une mesure décidée par une majorité précédente et qu'il n'approuverait pas sur le fond. D'ailleurs, on note que la Commission, elle, pourra demander à tout moment aux Etats de mettre fin à l'application de la mesure, y compris à l'intérieur du délai de trois ans, si elle constate une distorsion de concurrence.

2.- Les secteurs éligibles : des choix difficiles, mais nécessaires

En matière de TVA, les demandes sont multiples : l'écart, particulièrement important en France, entre le niveau du taux normal et celui du taux réduit, accroît le bénéfice d'un passage du premier au second et favorise le développement des revendications sectorielles.

A cet égard, certains secteurs, qui figurent à l'annexe H de la sixième directive précitée, pourraient bénéficier d'une baisse de TVA sans qu'il soit nécessaire de modifier préalablement le droit communautaire. On pensera, notamment, à des sujets souvent évoqués : les produits alimentaires tels que « la confiserie et la chocolaterie » qui sont encore soumis au taux normal (8), le « droit d'utilisation des installations sportives » (9), et les « protections pour incontinence adulte » (10). Jusqu'à présent, ces baisses de TVA, en faveur desquelles les arguments ne manquent pas, ont été repoussées, essentiellement pour des raisons budgétaires.

D'autres mesures seraient justifiées et pourraient trouver une solution, le cas échéant, dans le cadre de la présente proposition de directive. On pensera, en particulier, au bois de chauffage utilisé comme combustible pour des usages autres que domestiques (chaufferies collectives et réseaux de chaleur) (11), et aux abonnements d'énergie calorifique qui subissent, en outre, une distorsion de concurrence depuis que les abonnements relatifs aux livraisons d'électricité et de gaz combustible bénéficient du taux réduit (article 29 de la loi de finances pour 1999) (12) : on observera, en effet, que l'exposé des motifs de la proposition de directive cite, parmi les services qui pourraient bénéficier d'un assujettissement au taux réduit de la TVA, « certains services écologiques ».

Dans le cadre du présent rapport, on examinera néanmoins, plus particulièrement, les dossiers prioritaires, qui rentrent avec certitude dans le champ de la directive sur les services à forte intensité de main d'_uvre, à savoir les aides à la personne et, surtout, les travaux dans le bâtiment. Le cas de la restauration est particulier et mérite quelques éclaircissements liminaires.

a) Le cas particulier de la restauration :
une issue difficile en matière de TVA

De longue date, le secteur de la restauration traditionnelle demande une baisse de la TVA sur ses activités, en faisant valoir, notamment, que la fiscalité est à l'origine de distorsions de concurrence à son détriment.

De fait, la restauration est soumise, selon les cas, au taux réduit (5,5%) ou au taux normal (20,6%) de la TVA.

La restauration traditionnelle (qui se caractérise par une prestation complète recouvrant à la fois la mise à disposition du couvert et d'un local aménagé pour la consommation sur place d'un repas), ainsi que la restauration en libre-service, sont assujetties au taux normal.

La restauration rapide (hamburgers, viennoiseries, sandwichs, etc.) relève en partie du taux réduit : la règle est que les ventes à consommer sur place sont imposables à 20,6%, comme pour la restauration traditionnelle, alors que les ventes à emporter sont soumises au taux de 5,5%. Par mesure de simplification, les établissements concernés peuvent néanmoins opter pour une imposition forfaitaire : dans cette hypothèse, on admet que 30% de leur chiffre d'affaires correspond à des ventes à emporter lorsque la surface mise à la disposition de la clientèle n'excède pas 200 m2, et 20% si cette surface est supérieure (13). La restauration collective à vocation « sociale » (cantines et restaurants scolaires, universitaires et d'entreprises, restauration dans le domaine de la santé, du social et des loisirs) relève soit d'une exemption totale, soit du taux réduit, selon, pour l'essentiel, que le mode de gestion est direct ou indirect (14).

L'existence d'une distorsion de concurrence au détriment de la restauration traditionnelle est donc incontestable et ce n'est pas sans argument qu'il est affirmé que la fiscalité explique sans doute pour une part la forte croissance du secteur de la vente à emporter, bien que l'explication de ce phénomène tienne aussi à une modification de fond des modes de consommation. Cette distorsion avait d'ailleurs été confirmée dans le rapport remis, en 1996, par M. Édouard Salustro, au précédent ministre de l'économie et des finances.

La demande d'harmonisation des règles applicables en matière de TVA aux deux modes de restauration a fait l'objet, depuis lors, de nombreux débats, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Mais elle se heurte à de réels obstacles.

Une application du taux normal au secteur de la restauration dans son ensemble a parfois été évoquée. Cette orientation ne paraît pas souhaitable. Elle représenterait un alourdissement de la fiscalité indirecte qui pèse sur les ménages, alors que celle-ci doit au contraire diminuer, et se traduirait par une hausse de prix sur certaines prestations qui toucherait d'abord une clientèle souvent jeune, parfois modeste. Elle n'épargnerait pas certains segments de la restauration collective, comme les cantines scolaires gérées de façon indirecte par exemple.

L'application d'un taux intermédiaire spécifique à la restauration (14% par exemple), qui est fréquemment évoquée, se heurte également à des difficultés réelles. Certes, l'article 12, paragraphe 3, de la sixième directive, dispose, comme on l'a vu, que les États membres peuvent appliquer « soit un, soit deux taux réduits », compris entre 5% et 15%. Mais, dans l'hypothèse où il serait créé, ce nouveau taux (réduit) ne pourrait s'appliquer qu'à des prestations visées à l'annexe H, c'est-à-dire celles qui sont aujourd'hui taxés, en France, à 5,5% (restauration rapide à emporter) : une généralisation de ce taux à l'ensemble de la restauration exposerait la France à un probable contentieux communautaire. En toute hypothèse, cette mesure se traduirait par une hausse de taux pour une partie du secteur de la restauration et toutes les objections d'opportunité déjà évoquées à ce sujet garderaient une portée difficile à minimiser. On ajoutera, de façon plus générale, que la création d'un taux spécifique pour un secteur d'activité précis n'est pas forcément souhaitable.

L'application du taux réduit au secteur de la restauration dans son ensemble soulève, quant à elle, des difficultés juridiques et budgétaires.

Certes, cette généralisation du taux réduit mettrait fin aux distorsions de concurrence entre la restauration rapide et la restauration traditionnelle.

En outre, elle égaliserait les conditions de concurrence à l'intérieur de l'Union européenne : l'Espagne, la Grèce, l'Irlande, l'Italie, le Portugal et le Luxembourg appliquent, en effet, à la restauration, un taux réduit, et il est significatif de constater que, dans cette liste, figurent les principaux concurrents de la France dans le secteur du tourisme.

Enfin, il n'est pas douteux qu'elle serait susceptible d'exercer des effets significatifs en termes de croissance et d'emploi.

Toutefois, cette mesure se heurte d'abord à des objections juridiques.

En effet, la restauration ne figure pas, comme on l'a vu, dans la liste des biens et services qui peuvent être soumis au taux réduit de la TVA (annexe H de la sixième directive). Les Etats membres qui appliquent un taux réduit à la restauration semblent avoir mis à profit, dans l'ensemble, l'article 28.2.d de la sixième directive autorisant ceux qui, au 1er janvier 1991, appliquaient à la restauration un taux réduit, à le maintenir pendant la durée du régime dit transitoire (c'est-à-dire jusqu'à la mise en place d'un régime fondé sur la taxation dans le pays d'origine, ce qui ne semble pas devoir intervenir à court ou moyen terme). En toute hypothèse, on observera malgré tout qu'il n'existe pas d'exception française dans ce domaine : huit autres Etats membres soumettent, en effet, leurs opérations de ventes à consommer sur place à des taux de TVA compris entre 15% et 25%.

Cette interprétation a malheureusement été confirmée par le commissaire européen M. Mario Monti dans une lettre adressée, le 17 juillet 1998, au ministre français de l'économie, des finances et de l'industrie, et au secrétaire d'Etat au budget : « La législation actuelle applicable en matière de TVA ne permet pas d'appliquer un taux réduit de TVA aux biens et services, autres que ceux visés à l'annexe H de la sixième directive TVA, qui n'en bénéficiaient pas au 1er janvier 1991. La France ne peut donc pas appliquer un taux réduit de TVA au secteur de la restauration dans le cadre de la législation communautaire actuelle ».

Bien sûr, on pourrait considérer que la baisse de la TVA sur la restauration pourrait s'inscrire dans le cadre de l'expérimentation sur les services à forte intensité de main d'_uvre qui constitue l'objet de la proposition de directive du 17 février 1999. Cette interprétation est cependant fragile : il n'est pas certain que la restauration puisse bénéficier, même dans ce cadre, d'une baisse de taux. Le Commissaire européen Mario Monti avait d'ailleurs été clair sur ce point dans sa lettre précitée du 17 juillet 1998 : « La Commission, dans sa communication du 12 novembre dernier sur la possibilité d'appliquer un taux réduit de TVA sur les services à forte intensité de main d'_uvre à titre expérimental et sur base optionnelle par chaque Etat membre, a posé un certain nombre de critères permettant de déterminer les activités concernées. Il appartient bien entendu au Conseil, comme la Commission l'y a invité, de définir le champ d'application qu'il souhaite pour cette mesure. J'estime, toutefois, que le secteur de la restauration ne pourrait pas en faire partie compte tenu des orientations proposées ». On rappellera, à cet égard, que la proposition de directive prévoit que, pour bénéficier du taux réduit de la TVA, les services concernés doivent être « non susceptibles de créer des distorsions de concurrence », et que dans l'état actuel du texte, la décision sera prise par le Conseil statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission. On peut craindre que certains Etats membres ne s'opposent à une demande française concernant la restauration, d'autant qu'elle émanerait d'un pays qui est déjà la première destination touristique en Europe.

D'autre part, d'un point de vue budgétaire, le coût de la généralisation du taux réduit à l'ensemble du secteur de restauration est très important : il est évalué à 22 milliards de francs (15).

C'est pourquoi, bien que cette demande de baisse de TVA ne soit pas dénuée de fondement, car le secteur en cause a besoin et mérite d'être soutenu, elle ne paraît guère susceptible d'aboutir. Il semble donc nécessaire de réfléchir aux autres mesures qui pourraient soutenir également ce secteur d'activité. La suppression progressive de la part salariale de la taxe professionnelle, décidée dans le cadre de la loi de finances pour 1999, ne manquera pas de produire des effets favorables pour les entreprises de restauration. Cette action doit être prolongée : la réflexion en cours sur une modification de l'assiette des cotisations patronales dans un sens plus favorable aux services à forte intensité de main-d'_uvre est également susceptible de permettre l'élaboration de mécanismes répondant en partie aux préoccupations exprimées.

Sans doute, les discussions doivent se poursuivre au niveau communautaire et la restauration demeure une priorité, à moyen terme, dans le cadre d'une politique d'atténuation du poids de la TVA. Mais, dans l'immédiat, il convient de se prononcer pour des mesures incontestables sur le plan juridique, ayant également un fort impact sur l'emploi, et représentant un coût budgétaire net moins important.

b) Les services de proximité et d'aide à la personne rendus à domicile :
une mesure qui semble opportune,
sous réserve d'une expertise préalable approfondie

L'assujettissement au taux réduit de la TVA des services rendus aux personnes sous forme d'aide à domicile est souvent évoqué, d'autant que ces activités rentrent incontestablement dans le champ de la proposition de directive sur les services à forte intensité de main d'_uvre. Le commissaire européen M. Mario Monti l'a précisé sans ambiguïté dans sa lettre précitée du 17 juillet 1998 : « En revanche, et contrairement au secteur de la restauration, les caractéristiques de ces services [d'aide à la personne rendus à domicile] devraient permettre de les inclure dans la liste des activités à forte intensité de main d'_uvre ». Ils sont d'ailleurs explicitement cités dans l'exposé des motifs de la proposition de directive.

Le Gouvernement français soutient cette mesure qui figure dans le « Plan national d'action pour l'emploi » qu'il a présenté, en 1998, dans le cadre de la procédure arrêtée par le Conseil européen de Luxembourg.

La notion de « services à la personne » doit encore être précisée et encadrée : il peut s'agir, d'une part, de services que le développement du travail féminin rend toujours plus nécessaires (accomplissement de certaines tâches domestiques, garde des enfants, soutien scolaire, etc), et, d'autre part, de prestations liées au maintien à domicile des personnes âgées, dépendantes ou handicapées (préparation des repas, toilette, etc). On les qualifie parfois de « services de proximité », d'« emplois familiaux », de « services aux particuliers » ou de « services à domicile ». En tout état de cause, il est important de souligner que l'assujettissement de ces services au taux réduit de la TVA ne devra pas être de nature à créer des distorsions de concurrence entre des opérations identiques, selon qu'elles sont rendues à domicile ou non.

Le but d'une baisse de la TVA sur ces activités serait clairement de favoriser des créations d'emploi dans un secteur souvent cité comme un « gisement » potentiellement important, et offrant de réelles perspectives de développement. Elle inciterait les entreprises à s'investir sur un marché où elles sont aujourd'hui très peu présentes.

En effet, certains considèrent que la relative absence des entreprises sur le secteur des aides à domicile résulte d'un manque de rentabilité dont les causes sont en grande partie d'origine fiscale : elles supportent une TVA au taux de 20,6%, ce qui rend plus onéreuses leurs prestations par rapport aux associations soumises à la taxe sur les salaires, et, plus encore, par rapport aux particuliers-employeurs qui ne sont assujettis ni à la TVA ni à la taxe sur les salaires.

Selon le syndicat des entreprises de services à la personne (SESP), la baisse de la TVA solvabiliserait une offre particulièrement sensible au niveau des prix (16) et correspondant à un marché et à des emplois nouveaux, sans transfert significatif au détriment du secteur associatif. Il considère que, dans ce domaine, il existe une demande importante, mais non satisfaite, émanant de foyers dont les revenus mensuels sont compris, dans l'ensemble, entre 12.000 et 30.000 francs, et qui souhaitent recourir à des entreprises pour des raisons de compétence et de professionnalisme.

Au demeurant, le coût d'une telle mesure serait pratiquement nul pour les finances publiques : ainsi, des chiffres allant de 10 à 50 millions de francs ont parfois été avancés. En effet, l'actuelle fiscalité inhibant le développement de ces activités, sa réduction ne peut qu'avoir des effets favorables sur les recettes de l'Etat.

Pour autant, il convient de noter que les associations sont très présentes sur ce marché, soit comme mandataires (elles assurent alors le recrutement de salariés pour des particuliers qui deviennent leur employeur, et les aident dans l'accomplissement des obligations sociales, administratives et fiscales liées à cet emploi), soit comme prestataires (elles proposent alors une prestation de services à des personnes physiques, le cas échéant en recrutant à cet effet des personnes en difficulté dans le cas des associations intermédiaires). Le plus souvent, comme on l'a indiqué, elles sont soumises à la taxe sur les salaires, mais exonérées de TVA, d'impôt sur les sociétés et de taxe professionnelle.

Or, les associations d'aide à domicile sont inquiètes. Déjà préoccupées par les incidences éventuelles sur leurs activités de l'instruction fiscale du 15 septembre 1998 relative au régime fiscal des associations, et craignant de devenir imposables aux impôts commerciaux (17), elles font valoir que même si la TVA au taux réduit ne devait s'appliquer qu'aux entreprises commerciales, alors qu'elles-mêmes resteraient exonérées, une telle mesure pourrait se traduire par des effets de substitution, voire par une baisse de l'emploi dans le secteur associatif sans hausse équivalente dans le secteur marchand. Elles évoquent « un risque de déstabilisation de l'emploi ».

Ces craintes appellent, au minimum, une expertise approfondie de la mesure envisagée. Il paraît donc raisonnable de demander au Gouvernement de mesurer avec soin les effets qu'un assujettissement au taux réduit de la TVA de ces services rendus aux personnes pourrait exercer sur l'offre associative, avant d'envisager de mettre en _uvre une telle mesure dans le cadre de l'expérimentation proposée par la Commission européenne. Les conclusions de cette étude devront être présentées au Parlement.

c) Les travaux dans l'habitat : un dossier prioritaire

La présente proposition de résolution demande au Gouvernement d'_uvrer pour que le Conseil de l'Union européenne adopte, dans les meilleurs délais, la proposition de directive du 17 février 1999, afin que le taux réduit de la TVA puisse effectivement être appliqué à certains services à forte intensité de main d'_uvre à compter du 1er janvier 2000. Dans cette perspective, elle formule un choix clair et résolu en demandant au Gouvernement d'informer la Commission européenne, avant le 1er septembre 1999, que la France envisage, dans la mesure où les marges de man_uvre budgétaires le permettront, de soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finances, les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, au taux réduit de la TVA.

Cette demande n'est pas nouvelle. On rappellera, en effet, que dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, votre Commission avait déjà adopté un amendement assujettissant au taux réduit les travaux d'amélioration et d'entretien (18). En séance, votre Rapporteur général avait déclaré, à l'intention du Gouvernement : « Nous souhaitons que vous preniez l'engagement formel de faire de la mesure proposée dans cet amendement votre priorité en matière de réduction ciblée de TVA. Car c'est une bonne mesure qui intéresse tout à la fois les ménages et un secteur économique très important, et qui peut de ce fait avoir des conséquences positives sur l'emploi. Voilà pourquoi nous souhaitons être entendus ». M. Alain Barrau était intervenu pour approuver ce choix que M. Jean-Pierre Brard avait jugé « essentiel pour l'emploi ». M. Gérard Fuchs s'était déclaré « d'accord sur l'objectif ». Du côté de l'opposition, plusieurs intervenants, notamment MM. François d'Aubert et Philippe Auberger, avaient également souhaité cette baisse de la TVA, en la jugeant efficace pour l'emploi et l'activité. Le message avait d'ailleurs été entendu par le Gouvernement, le secrétaire d'Etat au budget ayant alors déclaré : « Dominique Strauss-Kahn et moi-même nous nous apprêtons, sous votre impulsion directe, mesdames et messieurs les députés, à faire savoir par écrit au commissaire européen, M. Monti, que les services d'artisanat du bâtiment destinés à l'amélioration des logements étaient un domaine ultraprioritaire sur lequel nous souhaitons que la législation communautaire soit modifiée. Cette action renforcée et inlassable, nous nous sommes engagés à la conduire et nous allons nous y employer. Il est clair que si les Gouvernements poussent tous ensemble en faveur de secteurs tels que celui-ci, on peut escompter des résultats » (19).

Le choix du bâtiment est donc en parfaite cohérence avec les orientations passées de votre Commission.

Pourquoi ce choix ? Trois raisons majeures le justifient.

En premier lieu, un assujettissement au taux réduit des travaux dans l'habitat ancien serait sans doute la mesure susceptible de produire les effets les plus significatifs sur l'activité et l'emploi : forte intensité en main d'_uvre ; importance du « travail au noir », le caractère diffus et difficilement contrôlable de cette activité favorisant le recours au travail clandestin ; sensibilité de la demande au niveau des prix, acuité de la concurrence qui garantit une bonne répercussion de la baisse de la fiscalité indirecte. De plus, une telle réforme permettrait d'apaiser, dans ce secteur d'activité, les craintes de distorsions de concurrence liées à la mise en place du nouveau régime des micro-entreprises, la profession étant particulièrement sensible à certaines pratiques commerciales déloyales qui semblent effectivement se développer (20).

De ce point de vue, les avis convergent. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, tout en considérant que des allégements de cotisations patronales ciblés sur les bas salaires seraient plus efficaces, notait, en juillet 1997, que « bien que la théorie économique ne plaide guère en faveur de mesures ciblées, le logement, compte tenu de son impact social, de l'intensité en emplois localisés en France du secteur et de l'importance du travail clandestin, est rapidement apparu comme un domaine privilégié de réflexion » (21).

Au demeurant, c'est bien ce raisonnement, conjugué avec un souci de justice sociale, qui sous-tendait plusieurs dispositions adoptées, comme on l'a vu, depuis l'automne 1997, pour soutenir les travaux de construction, d'amélioration ou d'entretien dans l'habitat : l'assujettissement au taux réduit de la TVA des opérations de rénovation et d'amélioration dans le logement social (au même titre que les opérations de construction depuis la loi de finances pour 1997) ainsi que la construction et les travaux sur les logements foyers, l'institution puis la majoration du crédit d'impôt pour les travaux d'entretien, le remboursement mis en place pour les travaux réalisés par des bailleurs privés bénéficiant d'une subvention de l'ANAH et portant sur des logements conventionnés, etc.

En second lieu, il semble acquis que cette mesure pourra rentrer dans le cadre des baisses de TVA qui seront autorisées si la proposition de directive du 17 février 1999 est définitivement adoptée. On rappellera, en effet, que figurent, dans son exposé des motifs, parmi les services susceptibles de remplir les conditions requises pour une baisse de TVA et d'offrir les meilleures opportunités de création d'emploi, « les prestations de réparation et de rénovation d'immeubles anciens à usage d'habitation ».

Enfin, le coût net de cette mesure, bien que très important, sera inférieur, et de beaucoup, à celui d'une baisse d'un point du taux normal de la TVA. Il sera également sensiblement moins élevé qu'une baisse de la TVA dans la restauration.

On peut évaluer, en effet, le coût brut d'une telle mesure à 21 milliards de francs, bien que certaines estimations aboutissent parfois à des résultats plus élevés (22). Toutefois, on rappellera que cette mesure pourrait s'accompagner d'une suppression corrélative de certains avantages existants, en matière d'impôt sur le revenu, pour les dépenses engagées par les ménages au titre des travaux réalisés dans leur résidence principale, et qu'elle constituerait, à cet égard, une simplification appréciable :

- réduction d'impôt au titre des dépenses de grosses réparations et d'amélioration (article 199 sexies D du code général des impôts) : 4,2 milliards de francs pour 1999 ;

- crédit d'impôt au titre des dépenses d'entretien (article 200 ter du code général des impôts) : 3,9 milliards de francs en année pleine.

Avec un décalage dans le temps d'une année, une économie globale de l'ordre de 8 milliards de francs, d'après les données fournies par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, pourrait être ainsi réalisée, ce qui ramènerait le coût net de la mesure à 13 milliards de francs environ.

Bien sûr, compte tenu des enjeux budgétaires, l'idée est parfois avancée de réduire le champ d'application de la mesure, afin de minimiser son coût pour les finances publiques. On indiquera, à cet égard, que les seuls travaux d'entretien représentent environ un tiers de l'assiette totale des travaux réalisés dans le bâtiment. Mais il est trop tôt pour se prononcer sur ce point : il importe, à ce stade, que le Gouvernement présente à la Commission européenne une demande aussi large que possible (entretien et grosses réparations), le périmètre exact de la mesure pouvant être apprécié ultérieurement, en fonction des marges budgétaires qui seront disponibles. De plus, on rappellera que les exemples sont nombreux où, à force de complexité, certaines mesures ont perdu toute lisibilité et, partant, toute efficacité.

En outre, il conviendrait également de prendre en compte les rentrées fiscales supplémentaires qui résulteraient des effets économiques de la mesure, en termes de créations d'emplois, mais également de réduction du travail clandestin (effets qui sont sans doute proportionnellement plus importants au niveau des dépenses d'entretien). L'expérience de la Belgique est à cet égard intéressante : ce pays soumet en effet au taux réduit de la TVA les travaux d'entretien et de rénovation relatifs aux immeubles d'habitation occupés depuis au moins quinze ans et malgré l'absence de données fiables, il semble que le manque à gagner pour le Trésor belge ait été largement couvert par le blanchiment du travail au noir dans le secteur immobilier.

Compte tenu d'ailleurs de l'importance et de l'intérêt de cette mesure, le Bureau de votre Commission des finances, dans la logique des orientations tracées par le groupe de travail sur l'efficacité de la dépense publique et le contrôle parlementaire constitué, en octobre 1998, par le Président Laurent Fabius, a engagé la procédure permettant de faire réaliser, par un organisme indépendant, une « étude évaluant l'impact d'une baisse de TVA sur les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat ancien ». Elle s'articulera autour de quatre volets :

Le premier volet porte sur l'impact économique d'une baisse globale de la TVA sur les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat ancien. Il s'agit, notamment, d'évaluer l'efficacité de la mesure, en appréciant :

- les effets que la réduction du taux de TVA pourrait avoir sur les prix ;

- l'augmentation de la demande qui pourrait résulter de cette baisse des prix ;

- son impact potentiel en termes de création d'emplois et de lutte contre le travail clandestin.

Le deuxième volet concerne les effets de plusieurs scénarios consistant à mettre en _uvre cette mesure de façon plus ciblée et/ou à l'accompagner d'une suppression de certains avantages fiscaux existants pour ce type d'opérations :

- baisse de la TVA accompagnée d'une suppression corrélative des réductions ou crédits d'impôt mis en place, jusqu'à présent, pour favoriser la réalisation de ces travaux (articles 199 sexies D et 200 ter du code général des impôts). Cette combinaison aurait, en effet, des conséquences qu'il serait utile de mieux appréhender : les taux du crédit ou de la réduction d'impôt sont désormais de 20%, alors que le différentiel de TVA serait de 15% seulement ; les dépenses prises en compte sont plafonnées dans le cadre des mécanismes existants, ce qui ne serait plus le cas avec une baisse de TVA ; la réduction d'impôt ne profite qu'aux ménages imposables, etc ;

- baisse de la TVA sur une partie seulement des travaux susceptibles d'être réalisés dans l'habitat ancien, en distinguant l'entretien et les grosses réparations ;

- baisse de la TVA sur les seuls travaux réalisés dans les résidences principales, à l'exclusion des résidences secondaires ;

- baisse de la TVA pour les dépenses engagées par les seuls ménages occupants, à l'exclusion des bailleurs.

Le troisième volet est relatif à l'impact budgétaire d'une telle mesure. Cette évaluation doit prendre en compte l'effet « mécanique » d'une baisse globale de la TVA sur les gros travaux et sur les dépenses d'entretien dans l'habitat ancien, ainsi que les économies susceptibles d'être dégagées en fonction des différents scénarios étudiés dans le deuxième volet. Elle devrait évaluer, par ailleurs, les rentrées fiscales indirectes qu'une baisse de la TVA sur les travaux pourrait générer (par exemple en matière d'impôt sur le revenu), ainsi que celles résultant des effets économiques de la mesure, notamment en termes de créations d'emplois et de réduction du travail clandestin.

Le quatrième volet de l'étude demandée doit permettre d'apprécier, à coût budgétaire équivalent, l'efficacité comparée de solutions alternatives, que ce soit en matière de TVA (conformément au droit communautaire tel que modifié par la proposition de directive du 17 février 1999) ou à travers un abaissement du coût du travail par une diminution des charges sociales, de façon généralisée sur les bas salaires.

Cette étude devra être remise à votre Commission pour le 30 juin 1999. Elle contribuera à renforcer les éléments d'information qui permettront au législateur de se prononcer en toute connaissance de cause sur une mesure dont on peut espérer qu'elle constituera une disposition emblématique de la prochaine loi de finances.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné la proposition de résolution au cours de sa séance du 11 mai 1999.

Après l'exposé de votre Rapporteur général, plusieurs orateurs sont intervenus.

Le Président Augustin Bonrepaux a rappelé qu'il avait plaidé, dans le passé, pour une diminution de la TVA sur la restauration, sans défendre pour autant l'idée d'une application du taux réduit de 5,5%, compte tenu du fait que, dans les Etats européens appliquant à ce secteur un taux réduit, celui-ci était le plus souvent de l'ordre de 14% ou 15%. Il a regretté qu'il ne soit pas possible à la France de créer un taux intermédiaire entre le taux normal et le taux réduit de TVA.

M. Pierre Méhaignerie a admis que le secteur du bâtiment pût être considéré comme prioritaire pour une baisse de la TVA, compte tenu des effets que l'on peut attendre d'une telle mesure sur le travail dissimulé. Il a cependant estimé que le passage aux 35 heures neutraliserait l'impact d'une éventuelle baisse de TVA, en raison de la détérioration de l'emploi et de la croissance qui en résulteront nécessairement.

M. Michel Bouvard a jugé intéressantes les perspectives tracées par votre Rapporteur général concernant la baisse de la TVA sur les travaux dans le bâtiment. Il a cependant rappelé que les baisses ciblées réalisées jusqu'à présent ne représentaient qu'environ 13 milliards de francs, ce qu'il a jugé modeste.

Il a considéré, surtout, que la question de la restauration était particulièrement importante, et que les objections récurrentes du commissaire européen Mario Monti ne liaient pas l'Assemblée nationale dans le cadre d'une résolution sur une proposition de directive communautaire. Il a observé qu'aujourd'hui, en France, le taux réduit de la TVA s'appliquait à une part importante de l'activité de restauration, évoquant, outre la restauration rapide, les cantines scolaires et la restauration hospitalière, dont les spécificités devaient être préservées. Il a considéré que la restauration traditionnelle souffrait de distorsions tant sur le marché intérieur que vis-à-vis des autres Etats de l'Union européenne qui appliquaient des taux réduits à cette activité. Il a souhaité que la France _uvre, en tout état de cause, pour une évolution des règles en vigueur, dans le sens soit d'une généralisation du taux réduit, soit de la création d'un deuxième taux réduit intermédiaire.

Il a finalement considéré la demande d'assujettissement au taux réduit des travaux dans l'habitat comme une initiative beaucoup moins audacieuse que celle de l'exigence de la majorité qualifiée plutôt que l'unanimité pour autoriser un Etat à appliquer le taux réduit de la TVA à un service à forte intensité de main-d'_uvre, tout en reconnaissant les réels effets que l'on pourrait attendre de cette réduction de taux en termes de création d'emplois et d'activité

.

M. Philippe Auberger a indiqué que le groupe RPR se réjouissait de la présentation de cette proposition de directive qui ouvrait de nouveaux espaces pour l'application du taux réduit de TVA. Il a estimé, cependant, qu'il n'était pas de bonne méthode de préjuger, comme le faisait la proposition de résolution, au détour de l'examen d'un texte communautaire, des choix fiscaux du prochain projet de loi de finances. Il a regretté, par ailleurs, la confusion résultant du fait que la proposition de résolution abordait, dans le même temps, un problème fiscal de fond et la question de l'unanimité régissant, en matière de fiscalité, le fonctionnement institutionnel de l'Union européenne. Il a rappelé, qu'à titre personnel, il était favorable, dans ce domaine, à l'application de la règle de la majorité, sous réserve de la révision de la pondération des voix entre les Etats membres et du maintien en vigueur du « compromis de Luxembourg » permettant à un Etat membre de tenir en échec à une majorité défavorable au nom de la préservation de ses intérêts vitaux.

M. Gérard Fuchs a observé que le coût brut annoncé d'une diminution du taux de la TVA sur les travaux de réparation et de rénovation dans l'habitat était de l'ordre de 22 milliards de francs et son coût net de 15 à 17 milliards de francs. Il s'est interrogé sur l'existence de marges de man_uvre suffisantes pour aller au-delà de ce que proposait votre Rapporteur général et a jugé inopportunes les demandes de baisses de TVA pour d'autres secteurs, qui pourraient s'analyser comme traduisant une certaine irresponsabilité. Il a donc souhaité que la proposition de résolution s'en tienne aux perspectives tracées par votre Rapporteur général.

Votre Rapporteur général a considéré que la proposition de résolution qu'il présentait s'efforçait de ménager un équilibre entre ce qui était souhaitable en matière de baisse de la TVA et les contraintes juridiques et budgétaires. Il a réfuté l'analyse selon laquelle il était ainsi procédé à un examen anticipé des orientations du projet de loi de finances pour 2000, la résolution étant justifiée par le calendrier européen, la proposition de directive devant être examinée par le Conseil de l'Union européenne le 25 mai 1999.

Il a souhaité dissiper un malentendu en indiquant que le point 2. de la proposition de résolution ne visait pas à remettre en cause la règle de l'unanimité pour l'acceptation par le Conseil de la proposition de directive, mais uniquement à suggérer un passage à la majorité qualifiée pour les mesures d'application, à savoir l'autorisation donnée par le Conseil à chaque Etat membre qui souhaiterait mettre en _uvre, sur la base de la future directive, une baisse de TVA. Il a rappelé qu'il s'agissait de la mise en _uvre d'un simple mécanisme optionnel, expérimental, limité dans le temps, et que la proposition de directive prévoyait elle-même une décision à la majorité qualifiée pour la sortie du dispositif en cas de distorsions de concurrence.

Il a indiqué, enfin, qu'en matière de restauration, des raisons juridiques et budgétaires ne semblaient pas permettre la mise en _uvre du taux réduit de TVA, mais a rappelé que ce secteur bénéficiait de la suppression progressive de la part salariale des bases de la taxe professionnelle et pourrait tirer avantage de la réforme, à l'étude, des cotisations sociales patronales.

La Commission est ensuite passée à l'examen de l'article unique.

La Commission a adopté un amendement de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne, tendant à justifier, par l'ajout d'un considérant, la demande de passage à la majorité qualifiée du Conseil pour l'autorisation que les Etats membres devront obtenir de celui-ci en vue de soumettre au taux réduit de la TVA certains services à forte intensité de main d'_uvre.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Marc Dumoulin, tendant à citer, dans un considérant supplémentaire, l'ensemble des prestations de service aux particuliers nécessitant une forte intensité de main-d'_uvre, telles que la restauration, la réparation automobile, la réparation de chaussures et la coiffure, parmi les prestations de services qui pourraient être assujetties au taux réduit de la TVA.

La Commission a ensuite examiné un amendement présenté par M. Philippe Auberger, tendant à demander au Gouvernement de transmettre à la Commission européenne la liste la plus large possible de services pouvant être soumis au taux réduit de TVA.

M. Philippe Auberger a considéré que l'examen de la proposition de directive présentée par la Commission européenne était une occasion unique et qu'à vouloir trop limiter la liste des services à soumettre au taux réduit, la France risquait de ne plus pouvoir, par la suite, procéder à d'autres baisses de TVA, même si les marges de manoeuvre budgétaires le permettaient.

M. Christian Cuvilliez a jugé la proposition de résolution trop frileuse par rapport à une proposition de directive de la Commission européenne qui offrait déjà des possibilités limitées. Il a fait part de sa crainte qu'en réduisant par avance la marge de man_uvre du législateur, le texte en discussion ne soit surtout une proposition d'irrésolution.

Votre Rapporteur général a fait valoir que la proposition de résolution souhaitait afficher une ambition, mais aussi faire preuve du sens des réalités. Il a jugé que, dans le débat conduit avec le Gouvernement, il convenait de mettre en exergue les priorités déjà affirmées par la représentation nationale dans le passé. Il a précisé, toutefois, qu'un amendement de la Délégation pour l'Union européenne proposait précisément d'introduire le mot « notamment » avant l'expression du souhait de voir appliquer une baisse de taux sur les travaux dans le bâtiment, ce qui permettrait d'afficher clairement une priorité sans se montrer trop restrictif.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné deux amendements identiques, l'un présenté par M. Philippe Auberger, l'autre par M. Michel Bouvard, ayant pour objet de supprimer le point 2. de l'article unique de la proposition de résolution tendant à demander que, dans le cadre de la future directive, les baisses de TVA soient autorisées par le Conseil à la majorité qualifiée.

M. Philippe Auberger a considéré que la formule proposée s'analysait comme une remise en cause d'un mode de décision communautaire fixé par les traités.

Votre Rapporteur général a indiqué que, dans le cadre de l'application d'une disposition expérimentale elle-même arrêtée à l'unanimité, le recours à la majorité qualifiée était justifié, d'autant qu'il s'agissait de la procédure déjà prévue par la proposition de directive pour obliger un Etat, le cas échéant, à revenir au taux normal en cas de distorsion de concurrence.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

Elle a examiné un amendement de M. Philippe Auberger, ayant pour objet de supprimer le 3. de cet article, qui demande de préserver le droit des Etats de revenir au taux normal y compris pendant le délai de trois ans prévu pour l'expérimentation.

M. Philippe Auberger a déclaré ne pas voir l'intérêt de cette disposition, observant qu'un « aller-retour » entre le taux normal et le taux réduit dans un délai inférieur à trois ans ne permettrait pas d'apprécier les effets sur l'emploi de la mesure prise.

Votre Rapporteur général a jugé utile le rappel du principe de la liberté fiscale des Etats. Il a indiqué que la majorité actuelle avait suffisamment insisté sur ce point dans un passé récent, notamment lors de la discussion de la proposition de loi organique (n° 1151) déposée par M. Nicolas Sarkozy sur la rétroactivité fiscale, examinée en novembre dernier par l'Assemblée. Il a estimé qu'une majorité nouvelle devait pouvoir défaire ce qu'une majorité précédente avait fait.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne, tendant, d'une part, à demander la suppression d'une redondance dans la proposition de directive et, d'autre part, à proposer que le Gouvernement demande à la Commission européenne un rapport d'évaluation d'ensemble du dispositif avant le 31 décembre 2002.

Votre Rapporteur général s'est déclaré favorable à cette demande d'évaluation, mais a fait valoir que les redondances avaient parfois une vertu pédagogique. Il a proposé un sous-amendement tendant à ne conserver que la demande de rapport.

La Commission a adopté ce sous-amendement et l'amendement ainsi modifié.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par M. Philippe Auberger, demandant que soient mesurés avec soin non pas le seul effet sur les associations d'une baisse de la TVA sur les services à domicile, mais l'ensemble des effets que pourrait exercer, sur le travail dissimulé, l'assujettissement de certains services au taux réduit de TVA.

Votre Rapporteur général a estimé que cette demande était cohérente avec l'amendement, précédemment rejeté, du même auteur, tendant à présenter une liste aussi complète que possible de services pouvant être assujettis au taux réduit. Il a jugé qu'elle n'était plus justifiée dès lors qu'il avait été décidé de reconnaître une priorité à un secteur précis, rappelant, à cet égard, que le Bureau de la Commission des finances avait récemment décidé de commander une étude sur les effets d'une baisse de la TVA sur les diverses catégories de travaux dans l'habitat, notamment concernant la résorption du travail dissimulé.

La Commission a rejeté cet amendement.

Puis elle a examiné un amendement présenté par M. Michel Bouvard tendant, par une modification du point 5. de la proposition de résolution, à demander au Gouvernement d'informer la Commission européenne, avant le 1er septembre 1999, que la France envisageait de soumettre au taux réduit de la TVA, notamment les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, ainsi que la restauration traditionnelle.

M. Michel Bouvard s'est étonné de la teneur du débat, considérant que, dans la perspective du Conseil Ecofin du 25 mai, il convenait de demander les ouvertures les plus larges possibles en matière de baisses de la TVA, l'occasion d'une telle négociation n'étant guère fréquente. Il a estimé qu'en réduisant par avance les marges de man_uvre disponibles, la France risquait de se lier les mains et de renoncer par avance à des baisses de TVA que les équilibres budgétaires permettraient peut-être dans l'avenir.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne, ayant pour objet d'insérer au point 5. l'adverbe « notamment », avant la désignation des travaux dans le bâtiment comme le secteur prioritaire pour une baisse de la TVA.

Votre Rapporteur général a considéré que, tout en maintenant clairement l'annonce de la priorité en faveur du logement, cet ajout permettrait effectivement de laisser la porte ouverte pour d'autres mesures.

La Commission a adopté cet amendement.

Puis elle a examiné un amendement de M. Julien Dray, tendant à demander au Gouvernement d'informer la Commission européenne du souhait de la France de soumettre sa restauration à un taux de TVA de 14% dans le cadre de l'expérimentation sur les services à forte intensité de main d'_uvre.

M. Yann Gallut, faisant usage de la faculté qui lui est reconnue par l'article 38, alinéa premier, du Règlement, a rappelé que huit Etats membres de l'Union européenne appliquaient un taux réduit à la restauration et qu'il convenait de mettre fin à des distorsions de concurrence menaçant l'emploi dans un secteur comprenant 800.000 actifs, dont 400.000 salariés. Il a précisé que cet amendement préservait l'application du taux réduit aux cantines des écoles, des hôpitaux, des résidences pour personnes âges et des entreprises.

Votre Rapporteur général a indiqué que cet amendement n'entraînerait pas forcément de difficulté budgétaire, mais qu'il supposait de relever de près de dix points le taux applicable à certains services de restauration rapide, ce qui serait contradictoire avec l'objectif affiché de réduction de la TVA.

M. Michel Bouvard a considéré que l'argumentation de M. Julien Dray était pertinente et que, si le commissaire Mario Monti ne retenait pas la restauration parmi les services à forte intensité de main d'_uvre pouvant être soumis au taux réduit, il appartenait au Gouvernement de faire pression dans ce sens, le cas échéant en demandant la possibilité de créer un taux intermédiaire.

Votre Rapporteur général a jugé qu'élargir la liste des baisses de TVA souhaitées risquerait de rendre plus difficile encore la décision unanime requise des Etats membres.

Le Président Augustin Bonrepaux a considéré qu'il convenait de focaliser la demande française sur une mesure forte afin d'obtenir une efficacité maximale.

La Commission a rejeté cet amendement.

Après que M. Philippe Auberger eut fait part de l'abstention du groupe RPR et que M. Christian Cuvilliez eut indiqué qu'il s'abstenait, la Commission a adopté l'article unique ainsi amendé de la proposition de résolution.

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION
ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Proposition de résolution sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final / n° E 1236)

Article unique

L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final/n°  E 1236),

Considérant que, dans la limite des marges de man_uvre budgétaires que l'évolution de la conjoncture permettrait de dégager, la France doit s'orienter vers une réduction progressive du niveau de ses prélèvements obligatoires ;

Considérant que, dans cette perspective, la baisse de la TVA doit être privilégiée, en raison du poids de la fiscalité indirecte dans notre pays et de la nécessité de mettre en _uvre des mesures qui bénéficient à l'ensemble des ménages, à la croissance et à l'emploi ;

Considérant que ces objectifs d'équité fiscale et de soutien de l'activité ne pourraient être atteints, dans l'immédiat, en revenant sur la hausse de deux points du taux normal décidée, en 1995, par le précédent Gouvernement, en raison du coût budgétaire d'une telle mesure et du caractère aléatoire de la répercussion de cette baisse du taux de l'impôt sur les prix et, partant, sur le pouvoir d'achat des ménages ;

Considérant que la mise en _uvre de baisses ciblées de TVA apparaît, dans ces conditions, comme prioritaire ;

Saluant, à cet égard, les efforts importants réalisés depuis dix-huit mois ;

Saluant, également, les efforts accomplis par le Gouvernement pour réorienter la politique de l'Union européenne, afin que la définition des politiques communautaires prenne davantage en considération le critère de l'emploi ;

Considérant, dans ces conditions, que la présentation de la proposition de directive susvisée concrétise le succès de cette démarche et qu'elle offre des perspectives intéressantes dans le cadre de la lutte contre le chômage ;

Considérant, en effet, que cette proposition de directive permet d'envisager l'adoption rapide de mesures fortes en matière de baisse de la TVA ;

Considérant que le vote à la majorité qualifiée du Conseil pour autoriser les Etats à appliquer des taux réduits de TVA offrirait plus de souplesse et serait davantage en cohérence avec la règle de la majorité qualifiée retenue pour les décisions qu'il pourrait être amené à prendre si les mesures prises créaient des distorsions de concurrence ;

Considérant qu'il pourrait être opportun de viser, dans ce cadre, certains services rendus aux personnes, qui répondent aux conditions posées par la Commission européenne, compte tenu de la sensibilité de ce marché aux prix et de ses importantes perspectives de développement ;

Considérant, néanmoins, qu'une baisse de la TVA sur ces prestations ne peut être envisagée sans que soit préalablement mesuré le risque d'éviction qu'une progression de la présence des entreprises sur ce marché pourrait exercer sur l'offre associative ;

Considérant que les travaux de réparation et de rénovation d'immeubles anciens à usage d'habitation constituent également des prestations de services à forte intensité de main-d'_uvre, et que leur assujettissement au taux réduit de la TVA serait une mesure socialement juste et significative en termes de soutien à l'activité et pourrait favoriser une réduction du travail dissimulé ;

Demande au Gouvernement :

1. d'_uvrer pour que le Conseil de l'Union européenne adopte, dans les meilleurs délais, cette proposition de directive, afin que le taux réduit de la TVA puisse effectivement être appliqué à certains services à forte intensité de main-d'_uvre à compter du 1er janvier 2000 ;

2. de faire en sorte que l'exigence d'une majorité qualifiée soit substituée à celle d'une décision unanime en ce qui concerne l'autorisation que le Conseil est appelé à donner pour qu'un Etat puisse appliquer le taux réduit de la TVA à un service à forte intensité de main-d'_uvre ;

3. de préserver la liberté fiscale des Etats membres en leur accordant la possibilité de revenir, à tout moment, sur un éventuel assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services à forte intensité de main-d'_uvre, y compris au cours de la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 ;

4. d'obtenir, en outre, que soit ajouté un dernier alinéa à l'article 1er, prévoyant que, sur le fondement des rapports établis par les Etats membres, la Commission présentera au Conseil un rapport d'évaluation d'ensemble du dispositif avant le 31 décembre 2002 ;

5. de mesurer avec soin les effets qu'un assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services rendus aux personnes pourrait exercer sur l'offre associative, avant d'envisager de mettre en _uvre une telle mesure dans le cadre de l'expérimentation proposée par la Commission européenne ;

6. d'informer la Commission européenne, avant le 1er septembre 1999, que la France envisage, dans la mesure où les marges de man_uvre budgétaires le permettront, de soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finances, notamment les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, au taux réduit de la TVA.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte de la proposition de résolution (n° 1526)

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Conclusions de la Commission

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PROPOSITION DE RÉSOLUTION
sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre
(COM [99] 62 final / n° E 1236)

PROPOSITION DE RÉSOLUTION
sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre
(COM [99] 62 final / n° E 1236)

Article unique

L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Article unique

Alinéa sans modification.

Alinéa sans modification.

- Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final/n°  E 1236),

Alinéa sans modification.

Considérant que, dans la limite des marges de man_uvre budgétaires que l'évolution de la conjoncture permettrait de dégager, la France doit s'orienter vers une réduction progressive du niveau de ses prélèvements obligatoires ;

Alinéa sans modification.

Considérant que, dans cette perspective, la baisse de la TVA doit être privilégiée, en raison du poids de la fiscalité indirecte dans notre pays et de la nécessité de mettre en _uvre des mesures qui bénéficient à l'ensemble des ménages, à la croissance et à l'emploi ;

Alinéa sans modification.

Considérant que ces objectifs d'équité fiscale et de soutien de l'activité ne pourraient être atteints, dans l'immédiat, en revenant sur la hausse de deux points du taux normal décidée, en 1995, par le précédent Gouvernement, en raison du coût budgétaire d'une telle mesure et du caractère aléatoire de la répercussion de cette baisse du taux de l'impôt sur les prix et, partant, sur le pouvoir d'achat des ménages ;

Alinéa sans modification.

Considérant que la mise en _uvre de baisses ciblées de TVA apparaît, dans ces conditions, comme prioritaire ;

Alinéa sans modification.

Saluant, à cet égard, les efforts importants réalisés depuis dix-huit mois ;

Alinéa sans modification.

Saluant, également, les efforts accomplis par le Gouvernement pour réorienter la politique de l'Union européenne, afin que la définition des politiques communautaires prenne davantage en considération le critère de l'emploi ;

Alinéa sans modification.

Considérant, dans ces conditions, que la présentation de la proposition de directive susvisée concrétise le succès de cette démarche et qu'elle offre des perspectives intéressantes dans le cadre de la lutte contre le chômage ;

Alinéa sans modification.

Considérant, en effet, que cette proposition de directive permet d'envisager l'adoption rapide de mesures fortes en matière de baisse de la TVA ;

Alinéa sans modification.

Considérant que le vote à la majorité qualifiée du Conseil pour autoriser les Etats à appliquer des taux réduits de TVA offrirait plus de souplesse et serait davantage en cohérence avec la règle de la majorité qualifiée retenue pour les décisions qu'il pourrait être amené à prendre si les mesures prises créaient des distorsions de concurrence ;

(Amendement n° 2 de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne)

Considérant qu'il pourrait être opportun de viser, dans ce cadre, certains services rendus aux personnes, qui répondent aux conditions posées par la Commission européenne, compte tenu de la sensibilité de ce marché aux prix et de ses importantes perspectives de développement ;

Alinéa sans modification.

Considérant, néanmoins, qu'une baisse de la TVA sur ces prestations ne peut être envisagée sans que soit préalablement mesuré le risque d'éviction qu'une progression de la présence des entreprises sur ce marché pourrait exercer sur l'offre associative ;

Alinéa sans modification.

Considérant que les travaux de réparation et de rénovation d'immeubles anciens à usage d'habitation constituent également des prestations de services à forte intensité de main-d'_uvre, et que leur assujettissement au taux réduit de la TVA serait une mesure socialement juste et significative en termes de soutien à l'activité et pourrait favoriser une réduction du travail dissimulé ;

Alinéa sans modification.

Demande au Gouvernement :

Alinéa sans modification.

1. d'_uvrer pour que le Conseil de l'Union européenne adopte, dans les meilleurs délais, cette proposition de directive, afin que le taux réduit de la TVA puisse effectivement être appliqué à certains services à forte intensité de main-d'oeuvre à compter du 1er janvier 2000 ;

1. Alinéa sans modification.

2. de faire en sorte que l'exigence d'une majorité qualifiée soit substituée à celle d'une décision unanime en ce qui concerne l'autorisation que le Conseil est appelé à donner pour qu'un Etat puisse appliquer le taux réduit de la TVA à un service à forte intensité de main-d'_uvre ;

2. Alinéa sans modification.

3. de préserver la liberté fiscale des Etats membres en leur accordant la possibilité de revenir, à tout moment, sur un éventuel assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services à forte intensité de main-d'_uvre, y compris au cours de la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 ;

3. Alinéa sans modification.

(nouveau). d'obtenir, en outre, que soit ajouté un dernier alinéa à l'article 1er, prévoyant que, sur le fondement des rapports établis par les Etats membres, la Commission présentera au Conseil un rapport d'évaluation d'ensemble du dispositif avant le 31 décembre 2002 ;

(Amendement n° 3, sous-amendé, de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne)

4. de mesurer avec soin les effets qu'un assujettissement au taux réduit de la TVA de certains services rendus aux personnes pourrait exercer sur l'offre associative, avant d'envisager de mettre en _uvre une telle mesure dans le cadre de l'expérimentation proposée par la Commission européenne ;

5. de mesurer...




...européenne ;

5. d'informer la Commission européenne, avant le ler septembre 1999, que la France envisage, dans la mesure où les marges de man_uvre budgétaires le permettront, de soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finances, les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, au taux réduit de la TVA.

6. d'informer...


...loi de finances, notamment les
travaux...
...de la TVA.

(Amendement n° 1 de M. Alain Barrau, Rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne)

AMENDEMENTS SOUMIS À LA COMMISSION
ET NON ADOPTÉS

Article unique

Amendement présenté par M. Marc Dumoulin :

Après le dernier considérant, insérer le paragraphe suivant :

« Considérant que l'assujettissement au taux de TVA réduit pour les prestations de services aux particuliers nécessitant une forte intensité de main d'_uvre (telles que la restauration, la réparation automobile, la réparation de chaussures, la coiffure, l'esthétique corporelle, etc.) serait une mesure socialement juste et significative en termes de soutien à l'activité et pourrait favoriser une réduction du travail dissimulé. »

Amendement présenté par M. Philippe Auberger :

Insérer, après le point 1, le nouveau point suivant :

« 1-bis. de transmettre à la Commission européenne la liste la plus large possible des services qu'il entend faire bénéficier du taux réduit de TVA en application de la nouvelle directive ; ».

Amendement présenté par M. Philippe Auberger :

Supprimer le point 2.

Amendement présenté par M. Michel Bouvard :

Supprimer le point 2.

Amendement présenté par M. Philippe Auberger :

Supprimer le point 3.

Amendement présenté par M. Philippe Auberger :

Rédiger ainsi le point 4 :

« 4. de mesurer avec soin les effets qu'aurait, dans le domaine du travail au noir, l'assujettissement de certains services au taux réduit de TVA ; ».

Amendement présenté par M. Michel Bouvard :

Rédiger ainsi le point 5 :

« 5. d'informer la Commission européenne, avant le 1er septembre 1999, que la France envisage de soumettre, notamment, les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, ainsi que la restauration traditionnelle, au taux réduit de la TVA. »

Amendement présenté par M. Julien Dray :

Ajouter, après le point 5, un alinéa ainsi rédigé :

« 6. d'informer la Commission européenne, avant le 1er septembre 1999, que la France envisage de soumettre, dans le cadre de la prochaine loi de finances, la restauration à un taux réduit de TVA à 14%, sans distinguer la vente à emporter de la consommation sur place. (Les cantines scolaires, les cantines d'hôpitaux, la restauration des résidences pour personnes âgées et les cantines d'entreprises autogérées restant au taux réduit de 5,5%). »

ANNEXE

OBSERVATIONS ET AMENDEMENTS PRÉSENTÉS AU NOM DE LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE

en application du cinquième alinéa de l'article 151-2 du Règlement

Par M. Alain BARRAU

Rapporteur

SOMMAIRE

_____

Pages

INTRODUCTION 57

I. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE 59

II. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 61

III. AMENDEMENTS A LA PROPOSITION DE RESOLUTION 61

TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION 63

AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA DÉLÉGATION 67

Mesdames, Messieurs,

La proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre, reçue à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 mars dernier, répond à une forte demande.

D'abord, de la France.

Notre pays a montré, à de multiples reprises au cours des deux dernières années, l'intérêt qu'il portait à des baisses ciblées de TVA. Les réductions de taux décidées dans des domaines aussi divers que les travaux de réhabilitation dans le logement social, les médicaments et appareillages destinés aux personnes souffrant de certains handicaps ou les abonnements pour la fourniture de gaz et d'électricité, l'attestent. Cet intérêt est justifié par deux motifs principaux : le souhait de réduire les prélèvements obligatoires, notamment ceux relatifs à la consommation des ménages - qui sont comparativement plus élevés en France que dans les autres Etats membres - et ceux qui, comme la TVA, sont susceptibles de profiter à tous les agents économiques ; la volonté de favoriser la création d'emploi en stimulant le développement d'activités à forte intensité de main-d'_uvre et en limitant les tentations de recours à l'économie souterraine.

Toutefois, compte tenu des limitations fixées par l'annexe H de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 modifiée portant sur le système commun de taxe sur la valeur ajoutée - autrement appelée « sixième directive » - pour les activités pouvant donner lieu à l'application de taux réduits, on ne pouvait guère aller plus loin. Ainsi, au cours de l'examen en première lecture du projet de loi de finances pour 1999, l'amendement prévoyant une réduction du taux de TVA sur les travaux d'amélioration et d'entretien dans l'habitat, que la Commission des finances de l'Assemblée avait adopté, a dû être rejeté en séance publique en raison de sa non-conformité à cette annexe. Le Gouvernement avait alors exprimé la volonté de convaincre les autres Etats membres de modifier la réglementation communautaire afin d'ouvrir cette possibilité.

Lors de l'examen, le 5 novembre dernier, de la proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres pour 1999 (E 1171), la Délégation a décidé, à l'invitation de son Rapporteur (23), le dépôt d'une proposition de résolution qui demandait notamment au Gouvernement d'obtenir le rétablissement de la ligne directrice 12 pour 1998 - prévoyant que chaque Etat « examinera, sans obligation, l'opportunité de réduire le taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les services à forte intensité de main-d'_uvre et non exposés à la concurrence transfrontalière ». Proposition qui a été adoptée par la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sans modification sur ce point, et qui, depuis, est devenue définitive.

Par la suite, le Gouvernement a, avec l'appui d'autres Etats membres, obtenu, non seulement que la possibilité de réduire les taux de TVA sur les services à forte intensité de main-d'_uvre ne soit pas abandonnée, mais que le Conseil européen de Vienne des 11 et 12 décembre dernier invite la Commission à autoriser les Etats membres à recourir à cette mesure.

Au-delà de la France, cette proposition satisfait plus largement une exigence exprimée par les pays de l'Union européenne. Déjà, dans une résolution du 22 septembre 1995, le Parlement européen avait proposé d'inclure les services à fort coefficient de main-d'_uvre et les services de réparation et d'entretien dans la liste de biens et de services pouvant être assujettis au taux réduit. En outre, les 20 et 21 novembre 1997, le Conseil européen extraordinaire sur l'emploi de Luxembourg avait conclu que chaque Etat membre examinerait l'opportunité de réduire le taux de TVA sur les services à forte intensité de main-d'_uvre et non exposés à la concurrence transfrontalière. Le Conseil européen de Vienne s'inscrit dans le prolongement logique de cette démarche, de même que la présente proposition.

Il est donc essentiel que l'Assemblée nationale demande au Gouvernement de faire en sorte que cette proposition soit adoptée dans les meilleurs délais, afin que des réductions de TVA puissent être décidées dans le cadre de l'examen de la prochaine loi de finances. Par ailleurs, il est souhaitable qu'elle lui fasse part des améliorations auxquelles elle pourrait donner lieu.

C'est la raison pour laquelle MM. Didier Migaud, Augustin Bonrepaux, Jean-Louis Idiart et le Rapporteur, ont souhaité, avec les membres du groupe socialiste et apparentés, déposer une proposition de résolution sur ce texte.

Compte tenu de l'importance du sujet et de la compétence propre de la Délégation, celle-ci a jugé utile de donner sa position sur cette proposition de résolution. D'autant plus qu'elle pourrait être améliorée sur plusieurs points. Le Règlement de l'Assemblée prévoit, à cet égard, que « sauf pour les propositions de résolution déposées par l'un de ses rapporteurs, la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne peut faire connaître des observations et présenter des amendements(...) » (article 151-2, § 5). Ces observations et amendements sont consignés dans le rapport de la commission saisie au fond (article 151-2, § 4 et 5).

Aussi, après un rappel du contenu de la proposition de directive et de cette proposition de résolution, la Délégation, qui a examiné celle-ci lors de sa réunion du 6 mai 1999, vous soumettra trois amendements.

I.- LA PROPOSITION DE DIRECTIVE

Le dispositif proposé par la Commission repose sur les principaux éléments suivants.

- Les motifs justifiant le texte sont de deux ordres. D'abord, faire baisser les prix à la consommation en permettant la réduction des taux de TVA, et stimuler, de ce fait, la demande des services employant une main-d'_uvre importante. En deuxième lieu, diminuer corollairement l'incitation des consommateurs à faire appel à l'économie souterraine. La Commission, qui a toujours montré un certain scepticisme à l'égard de ce type de texte, émet cependant trois réserves principales. Elle affirme, premièrement, que cette initiative n'est pas sans danger au regard du principe de neutralité fiscale et du bon fonctionnement du marché intérieur. Deuxièmement, ses effets positifs sur l'emploi, selon elle, « sont loin d'être acquis ». Enfin, la Commission considère que la poursuite de la réduction des charges pesant sur le travail, notamment le travail peu qualifié et faiblement rémunéré, devrait être la priorité. Ces réserves expliquent les diverses précautions prévues par le texte.

- La proposition de directive prévoit que le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser un Etat membre à appliquer des taux réduits de TVA pendant la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002. Cette règle repose, on le voit, sur deux conditions strictes : un vote du Conseil à l'unanimité et l'obligation d'appliquer les taux réduits pendant toute cette durée.

Les services concernés doivent satisfaire trois exigences : être à forte intensité de main-d'_uvre ; être fournis directement aux consommateurs finaux ; être principalement locaux et non susceptibles de produire des distorsions de concurrence, et, partant, ne pas mettre en péril le bon fonctionnement du marché intérieur.

Les Etats souhaitant procéder à des réductions de taux doivent en informer la Commission avant le 1er septembre 1999 et lui communiquer toutes les données lui permettant d'apprécier que l'ensemble de ces conditions sont remplies. En particulier, les cinq types de données suivantes :

_  le champ d'application de la réduction de taux et la description précise des services concernés ;

_  des éléments permettant de vérifier que les conditions précitées sont remplies ;

_  des éléments montrant que la mesure n'est pas susceptible de produire des distorsions de concurrence - qui sont, on le voit, redondants par rapport aux précédents ;

_  des éléments relatifs au coût budgétaire de la mesure envisagée ;

_  des éléments attestant le lien étroit entre la baisse des prix résultant de la réduction des taux et l'accroissement prévisible de la demande et de l'emploi.

- Il est prévu que si la Commission constate que les mesures prises par les Etats membres ne peuvent plus être maintenues en raison des distorsions de concurrence qu'elles créent entre activités similaires, soit à l'intérieur d'un Etat membre, soit entre différents Etats membres, elle propose des mesures appropriées au Conseil, qui statue sur celles-ci à la majorité qualifiée.

- Les Etats membres ayant recouru au dispositif devront établir, avant le 1er octobre 2002, un rapport détaillé « contenant une évaluation globale de l'efficacité de la mesure en termes de création d'emploi et d'efficience ».

- Les Etats membres doivent faire entrer en vigueur les mesures de transposition de la directive au plus tard le 31 décembre 1999.

II.- LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Elle adresse cinq demandes au Gouvernement :

_uvrer pour que le Conseil adopte la proposition de directive dans les meilleurs délais, afin de pouvoir appliquer le taux réduit de TVA à de nouvelles activités dès le 1er janvier 2000 ;

- faire en sorte que l'autorisation du Conseil de recourir à la mesure soit décidée à la majorité qualifiée, plutôt qu'à l'unanimité ;

- préserver la liberté fiscale des Etats membres en leur donnant la possibilité de revenir à tout moment sur une réduction de taux ;

- mesurer préalablement les effets qu'une baisse de taux pourrait exercer sur l'offre associative ;

- informer la Commission avant le 1er septembre 1999 que la France envisage de prévoir dans la prochaine loi de finances une réduction du taux de TVA sur les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat.

III.- AMENDEMENTS A LA PROPOSITION DE RESOLUTION

Le Rapporteur a donc proposé à la Délégation de soutenir vigoureusement la proposition de résolution et la proposition de directive. Celle-ci constitue, en effet, une mesure importante en faveur de l'emploi et de la réduction des prélèvements obligatoires. Au surplus, soutenue par une large partie de la majorité et de l'opposition, elle transcende largement les clivages politiques. Enfin, elle permet de renforcer la politique européenne en faveur de l'emploi et de conforter la position de la France dans les négociations communautaires. Par ailleurs, les demandes contenues dans la proposition de résolution sont de nature à améliorer le dispositif proposé.

Toutefois, afin de perfectionner ce dernier, il a présenté les deux amendements suivants à la proposition de résolution.

1.- Il serait souhaitable de motiver la demande de substitution du vote à la majorité qualifiée du Conseil à celui de l'unanimité pour autoriser le recours à la mesure. Aussi, pourrait être ajouté, après le sixième considérant, le considérant suivant :

« Considérant que le vote du Conseil à la majorité qualifiée pour autoriser les Etats à appliquer des taux réduits de TVA offrirait plus de souplesse et serait davantage en cohérence avec la règle de la majorité qualifiée retenue pour les décisions qu'il pourrait être amené à prendre si les mesures prises créaient des distorsions de concurrence ; ».

2.- Il n'est pas nécessaire de maintenir le c) du quatrième alinéa de l'article 1er, qui prévoit l'obligation pour les Etats membres de fournir des éléments montrant que la mesure n'est pas susceptible de créer des distorsions de concurrence, alors que ces éléments doivent déjà être fournis en application du b) de ce quatrième alinéa. On gagnerait aussi à ce que, sur le fondement des rapports d'évaluation établis par les Etats membres, la Commission présente avant le terme de la période d'expérimentation, soit le 31 décembre 2002, un rapport d'évaluation global, ce qui permettrait d'éclairer les résultats enregistrés dans chaque Etat d'un autre regard et d'avoir une idée synthétique du bilan global du dispositif. Il serait donc souhaitable d'insérer après le point 3 le nouveau point suivant :

« 4. D'obtenir, en outre, que :

le c) du quatrième alinéa de l'article 1er, qui est redondant avec le b), soit supprimé ;

soit ajouté un dernier alinéa à l'article 1er, prévoyant que, sur le fondement des rapports établis par les Etats membres, la Commission présentera au Conseil un rapport d'évaluation d'ensemble du dispositif avant le 31 décembre 2002 ; ».

*

* *

TRAVAUX DE LA DÉLÉGATION

La Délégation a examiné la proposition de résolution au cours de sa séance du 6 mai 1999.

Intervenant après l'exposé du Rapporteur, Mme Nicole Ameline a estimé que l'examen de cette proposition de directive ne pouvait être isolé d'une réflexion globale sur la fiscalité et regretté que le retour de la croissance économique en France n'ait pas permis une baisse plus forte de la fiscalité et une diminution globale des taux de TVA. Pour elle, il ne pourra y avoir de baisse du niveau des prélèvements obligatoires sans un effort durable de diminution des dépenses publiques.

Observant que le texte proposé par la Commission tendait moins à harmoniser la fiscalité qu'à produire un effet économique sur l'emploi, elle a critiqué l'exclusion de son champ d'application du secteur de la restauration et de l'hôtellerie, qui se caractérise pourtant par une forte intensité de main-d'_uvre. Elle a demandé s'il existait des évaluations chiffrées des effets prévisibles du texte proposé et selon quels critères le secteur qu'elle a mentionné en était écarté.

M. Maurice Ligot a regretté que la proposition de directive ne définisse pas les services à forte intensité de main-d'_uvre. Pour lui, si l'on veut maximiser l'effet d'une baisse du taux de TVA sur l'emploi, il faudrait que cette notion soit définie de manière large et que la réduction du taux de TVA n'exclue pas les grands secteurs de services créateurs d'emplois. Evoquant toutefois l'incidence de telles mesures sur les ressources fiscales, il a souligné que le Gouvernement devrait s'engager parallèlement dans la voie d'une diminution des dépenses publiques, en remettant en cause celles qui ne présentaient pas un intérêt décisif.

Répondant à Mme Nicole Ameline, M. Gérard Fuchs a rappelé que, si la croissance économique avait été étouffée par l'augmentation de deux points du taux de TVA en 1995, la relance de la consommation opérée par l'actuel Gouvernement, notamment par des baisses ciblées de la TVA, avait permis le retour à la croissance. Dès lors, ce sont des mesures ayant un impact sur l'emploi qu'il convient de privilégier. Outre la réduction du déficit public, il conviendrait de choisir un secteur prioritaire sur lequel serait concentré l'effort de baisse de la TVA. Dans cette optique, l'effet sur l'emploi d'une baisse des taux serait de toute évidence plus important dans le secteur de l'habitat que dans celui de la restauration.

M. Yves Fromion, évoquant le coût budgétaire et le peu d'efficacité de la réforme relative aux 35 heures, a souligné que l'opposition n'avait pas la même conception des mesures à prendre pour diminuer le niveau des dépenses publiques. Présentant ses observations, en son nom propre et en celui de Mme Nicole Catala, il a approuvé la mesure relative au taux réduit et souhaité en outre la création d'un taux intermédiaire de TVA, de façon à accroître la souplesse du dispositif. S'agissant de la proposition de résolution de M. Didier Migaud, il s'est montré réservé à l'égard de la disposition demandant que l'autorisation de recourir à un taux réduit de TVA soit décidée à la majorité qualifiée du Conseil ; il a souhaité que le champ des secteurs pouvant bénéficier d'un taux réduit de TVA soit élargi : il devrait comprendre non seulement l'habitat, mais aussi la restauration et l'hôtellerie, l'artisanat, l'emploi à domicile, ainsi que les entreprises de service dans le secteur de l'environnement. En ce domaine, la baisse du taux de TVA serait un moyen d'alléger les charges des collectivités locales liées à la mise en _uvre de la réglementation européenne de l'environnement.

Réservé à l'égard de cette dernière suggestion, M. Didier Boulaud a souligné que l'application du taux réduit de TVA aux opérations de collecte et de tri sélectif des ordures ménagères, prévue par la loi de finances pour 1999, risquerait de perdre son effet incitatif si ce taux était appliqué de manière générale au secteur de l'environnement.

Le Président Alain Barrau a justifié le choix d'un seul secteur : en ciblant ainsi sa demande, l'Assemblée pourrait convaincre plus aisément le Gouvernement de prendre rapidement une décision. De surcroît, le secteur proposé est fortement créateur d'emplois. Le dispositif de la proposition de directive est optionnel, conformément au principe défini à Luxembourg, selon lequel les Etats qui souhaitent prendre ce genre de mesures le pourront. Par voie de conséquence, le vote à la majorité qualifiée devrait être rendu applicable aux décisions par lesquelles le Conseil autorise un Etat membre à appliquer le taux réduit.

M. Maurice Ligot, tout en admettant les raisons qui peuvent militer en faveur du choix d'un seul secteur, a craint qu'une telle position ne limite à l'excès la marge de négociation avec le Gouvernement.

Convenant de la pertinence de cet argument, M. Gérard Fuchs a toutefois rappelé que le débat en Commission des finances s'était conclu, sur ce point, par la décision de limiter la demande de réduction du taux de la T.V.A. aux travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat. De surcroît, évoquer la possibilité d'une telle baisse en faveur d'autres secteurs ne manquerait pas, dans la mesure où elle n'aurait aucune chance de se réaliser, de mécontenter les professionnels concernés.

Mme Nicole Ameline a apporté son soutien à la position défendue par M. Maurice Ligot : mentionner le secteur de la restauration ferait prendre conscience au Gouvernement de son importance dans la politique de l'emploi et l'inciterait à envisager, le cas échéant, d'autres mesures en sa faveur. Au surplus, la fixation d'un taux intermédiaire permettrait d'élargir la marge de négociation.

Le Président Alain Barrau a souligné le caractère pragmatique de sa démarche, et rappelé que les mesures envisagées devaient encore subir des arbitrages. Selon les évaluations disponibles, la perte de recettes découlant pour l'Etat de la réduction du taux de la T.V.A. sur les travaux de réparation, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat est estimée à 20 milliards de francs. Dans un souci de compromis, il a suggéré que la proposition de résolution soit amendée de façon à prévoir que la réduction du taux de TVA concerne « notamment » les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien dans l'habitat.

A l'issue de ce débat, la Délégation a adopté les observations et amendements présentés par le Rapporteur.

*

* *

AMENDEMENTS PRESENTES PAR LA DELEGATION

1. Ajouter, après le sixième considérant, le considérant suivant :

« Considérant que le vote à la majorité qualifiée du Conseil pour autoriser les Etats à appliquer des taux réduits de TVA offrirait plus de souplesse et serait davantage en cohérence avec la règle de la majorité qualifiée retenue pour les décisions qu'il pourrait être amené à prendre si les mesures prises créaient des distorsions de concurrence ; ».



2. Insérer, après le point 3, le nouveau point suivant :

« 4. D'obtenir, en outre, que :

le c) du quatrième alinéa de l'article 1er, qui est redondant avec le b), soit supprimé ;

soit ajouté un dernier alinéa à l'article 1er, prévoyant que, sur le fondement des rapports établis par les Etats membres, la Commission présentera au Conseil un rapport d'évaluation d'ensemble du dispositif avant le 31 décembre 2002 ; ».



3. Insérer au point 5 l'adverbe « notamment » avant « les travaux de grosses réparations, d'amélioration et d'entretien de l'habitat, au taux réduit de la TVA ».

____________

N° 1585.- Rapport de M. Didier Migaud, rapporteur général (au nom de la commission des finances) sur la proposition de résolution (n° 1526) de MM. Didier Migaud, Augustin Bonrepaux, Alain Barrau, Jean-Louis Idiart et les membres du groupe socialiste et apparentés sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer à titre expérimental un taux de TVA réduit sur les services à forte intensité de main-d'_uvre (COM [99] 62 final/n° E 1236).

1 () Voir le rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur le fonctionnement du régime transitoire de taxation à la TVA des échanges intracommunautaires, présenté conformément à l'article 28 terdecies de la sixième directive modifiée (23 novembre 1994), et les rapports de la Commission au Conseil présentés conformément à l'article 12 paragraphe 4 de la sixième directive précitée les 13 décembre 1994 et 13 novembre 1997.

2 () Le niveau du taux normal varie effectivement, au sein de l'Union européenne, entre 15% (Luxembourg) et 25% (Danemark et Suède).

3 () Rapport n° 2799 du 21 mai 1996 présenté par M. Philippe Auberger, Rapporteur général, sur les propositions de résolution de MM. Robert Pandraud (n° 2629) et  Philippe Auberger (n° 2702).

4 () Synthèses, Revenu et patrimoine des ménages, N° 11, édition 1997, pages 19 et suivantes.

5 () Soit 30,5 milliards de francs, en 1999, en ce qui concerne la France.

6 () JO Débats Assemblée nationale, 3e séance du 16 octobre 1998, pages 6868 et suivantes.

7 () Le décalage entre les deux dates précitées, 1er septembre 1999 pour la transmission d'une demande à la Commission européenne et 1er janvier 2000 pour la mise en _uvre de la mesure, pourrait rendre nécessaires certaines dispositions transitoires d'accompagnement afin d'éviter toute répercussion sur le marché liée à un gel des opérations dans l'attente d'une baisse de la TVA.

8 () Cette mesure avait été adoptée par votre Commission lors du dernier débat budgétaire : voir le rapport n° 1111 présenté par votre Rapporteur général sur la première partie du projet de loi de finances pour 1999, pages 376 et suivantes, et les débats en séance : JO Débats Assemblée nationale, 1ère séance du 17 octobre 1998, pages 6901 et suivantes.

9 () JO Débats Assemblée nationale, 3e séance du 16 octobre 1998, pages 6859 et suivantes.

10 () JO Débats Assemblée nationale, 2e séance du 2 avril 1998, page 2468.

11 () Cette mesure avait été adoptée par votre Commission dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 1998 : voir le rapport n° 528 de votre Rapporteur général (nouvelle lecture), pages 34-40, et les débats en séance : JO Débats Assemblée nationale, 3e séance du 17 décembre 1997, pages 8043-8044. Voir également la seconde délibération supprimant cette disposition précédemment adoptée par l'Assemblée nationale : JO Débats, 1ère séance du 18 décembre 1997, pages 8122 et suivantes.

12 () Cette mesure avait été adoptée par votre Commission lors du dernier débat budgétaire : voir le rapport n° 1111 présenté par votre Rapporteur général sur la première partie du projet de loi de finances pour 1999, en particulier les pages 371 et suivantes, et les débats en séance : JO Débats Assemblée nationale, 2e séance du 16 octobre 1998, pages 6836 et suivantes.

13 () Instruction du 22 décembre 1993.

14 () Par gestion indirecte, on entend les livraisons de repas par un fournisseur extérieur à ces cantines ou restaurants, qui peuvent être soumises au taux réduit, sous réserve d'un certain nombre de conditions prévues par l'article 279-a-bis du code général des impôts et par l'article 85 bis de son annexe III.

15 () Voir JO Débats Sénat, séance du 27 avril 1999, page 2404. A cette occasion, le coût d'une application d'un taux intermédiaire de 14% à la restauration dans son ensemble a été évalué, par le Gouvernement, à 9 milliards de francs.

16 () On observera que depuis la loi du 29 janvier 1996 en faveur du développement des emplois de services aux particuliers, les clients de ces entreprises bénéficient déjà de la réduction d'impôt sur le revenu pour l'emploi d'un salarié à domicile prévue à l'article 199 sexdecies du code général des impôts.

17 () On rappellera que l'instruction fiscale du 15 septembre 1998 avait d'abord pour objet de clarifier le régime fiscal des associations, afin de mettre fin à une instabilité juridique préjudiciable que la précédente majorité avait laissé perdurer. Ce travail était nécessaire, mais il est rapidement apparu que des difficultés importantes subsistaient et que la spécificité du secteur associatif n'avait pas été suffisamment prise en compte. C'est pourquoi votre Rapporteur général a souhaité continuer à travailler sur ce sujet avec le Gouvernement. C'est d'ailleurs en réponse à une question qu'il avait lui-même adressée au secrétaire d'Etat au budget que M. Christian Sautter a annoncé, récemment, plusieurs avancées significatives, sur le délai accordé aux associations pour se conformer aux dispositions de la circulaire, sur la non taxation de leurs activités marchandes accessoires et sur la question de la rémunération des dirigeants des grandes associations (voir JO Débats Assemblée nationale, 2e séance du 17 février 1999, page 1553, et la nouvelle instruction 4 H-1-99, B.O.I. n° 33 du 19 février 1999).

18 () Voir le rapport n° 1111 (tome II) présenté par votre Rapporteur général sur la première partie du projet de loi de finances pour 1999, pages 413 et suivantes.

19 () JO Débats Assemblée nationale, 3e séance du 16 octobre 1998, pages 6868 et suivantes.

20 () Voir, sur cette question, JO Sénat, 29 avril 1999, réponse à la question écrite n° 12026 (12 novembre 1998) présentée par M. André Dulait. On rappellera qu'à la suite de l'adoption d'un amendement de votre Rapporteur général, l'article 7 de la loi de finances pour 1999 prévoit que le Gouvernement déposera au Parlement, avant le 15 septembre 1999, un rapport sur la mise en _uvre de l'extension du régime fiscal des micro-entreprises.

21 () Rapport du groupe de travail sur les possibilités d'évolution des taux de TVA, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, 31 juillet 1997.

22 () L'assiette totale des travaux susceptibles d'être concernés par la mesure est en effet de l'ordre de 150 milliards de francs. Le coût d'une baisse de la TVA a cependant été évalué, par le Gouvernement, à 23 milliards de francs : voir JO Débats Assemblée nationale, 3e séance du 16 octobre 1998, page 6870.

23 () Cf. Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, Alain Barrau, « Pour l'emploi », 1998 (rapport n°1182).