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le 27 avril 2001

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N° 3021

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 avril 2001.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (n° 2937) de M. NOËL MAMERE tendant à créer une commission d'enquête relative à l'existence et au stockage de déchets nucléaires non retraitables à l'usine de la Hague, en violation de la loi du 30 décembre 1991, et sur les responsabilités de la COGEMA en la matière.

PAR M. MAXIME BONO,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Déchets, pollution et nuisances.

La Commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; M. Jean-Paul Charié, M. Jean-Pierre Defontaine, M. Pierre Ducout, M. Jean Proriol, vice-présidents ; M. Christian Jacob, M. Pierre Micaux, M. Daniel Paul, M. Patrick Rimbert, secrétaires ; M. Jean-Pierre Abelin, M. Yvon Abiven, M. Jean-Claude Abrioux, M. Stéphane Alaize, M. Damien Alary, M. André Angot, M. François Asensi, M. Jean-Marie Aubron, M. Pierre Aubry, M. Jean Auclair, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, M. Jean-Pierre Balduyck, M. Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, M. Christian Bataille, M. Léon Bertrand, M. Jean Besson, M. Gilbert Biessy, M. Claude Billard, M. Claude Birraux, M. Jean-Marie Bockel, M. Jean-Claude Bois, M. Daniel Boisserie, M. Maxime Bono, M. Franck Borotra, M. Christian Bourquin, M. Patrick Braouezec, M. François Brottes, M. Vincent Burroni, M. Alain Cacheux, M. Dominique Caillaud, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Jean Charroppin, M. Jean-Claude Chazal, M. Daniel Chevallier, M. Yves Cochet, M. Gilles Cocquempot, M. Pierre Cohen, M. Alain Cousin, M. Yves Coussain, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Claude Daniel, M. Marc-Philippe Daubresse, M. Philippe Decaudin, Mme Monique Denise, M. Léonce Deprez, M. Jacques Desallangre, M. Éric Doligé, M. François Dosé, M. Marc Dumoulin, M. Dominique Dupilet, M. Philippe Duron, M. Jean-Claude Étienne, M. Alain Fabre-Pujol, M. Albert Facon, M. Alain Ferry, M. Jean-Jacques Filleul, M. Jacques Fleury, M. Nicolas Forissier, M. Jean-Louis Fousseret, M. Claude Gaillard, M. Robert Galley, M. Claude Gatignol, M. André Godin, M. Alain Gouriou, M. Hubert Grimault, M. Michel Grégoire, M. Lucien Guichon, M. Gérard Hamel, M. Patrick Herr, M. Francis Hillmeyer, M. Claude Hoarau, M. Robert Honde, M. Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, M. Aimé Kergueris, M. Jean Launay, Mme Jacqueline Lazard, M. Thierry Lazaro, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Jacques Le Nay, M. Patrick Lemasle, M. Jean-Claude Lemoine, M. Jean-Claude Lenoir, M. Arnaud Lepercq, M. René Leroux, M. Jean-Claude Leroy, M. Roger Lestas, M. Félix Leyzour, M. Guy Malandain, M. Daniel Marcovitch, M. Didier Marie, M. Alain Marleix, M. Daniel Marsin, M. Philippe Martin, M. Jacques Masdeu-Arus, M. Marius Masse, M. Roland Metzinger, M. Roger Meï, M. Yvon Montané, M. Gabriel Montcharmont, M. Jean-Marie Morisset, M. Bernard Nayral, M. Jean-Marc Nudant, M. Jean-Paul Nunzi, M. Patrick Ollier, M. Joseph Parrenin, M. Paul Patriarche, M. Germinal Peiro, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, M. François Perrot, Mme Annette Peulvast-Bergeal, M. Serge Poignant, M. Bernard Pons, M. Jean Pontier, M. Jacques Pélissard, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Jean-Luc Reitzer, M. Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, M. Jean Roatta, M. Jean-Claude Robert, M. Joël Sarlot, Mme Odile Saugues, M. François Sauvadet, M. Jean-Claude Thomas, M. Léon Vachet, M. Daniel Vachez, M. François Vannson, M. Michel Vergnier, M. Gérard Voisin, M. Roland Vuillaume.

MESDAMES, MESSIEURS,

La commission de la production et des échanges a été saisie le 12 mars dernier d'une proposition de résolution déposée par M. Noël Mamère tendant à créer une commission d'enquête « relative à l'existence et au stockage de déchets nucléaires non retraitables à l'usine de la Hague, en violation de la loi du 30 décembre 1991, et sur les responsabilités de la COGEMA en la matière ».

Les règles de recevabilité des propositions de résolution visant à la création de commissions d'enquête sont fixées par l'article 141 du Règlement de l'Assemblée nationale. Aux termes de cet article, il est indiqué que le dépôt d'une telle proposition « est notifié par le Président de l'Assemblée au Garde des sceaux, ministre de la justice. Si le Garde des Sceaux fait connaître que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition, celle-ci ne peut être mise en discussion.»

Or, par lettre en date du 30 mars 2001, Mme Marylise Lebranchu, Garde des Sceaux, ministre de la justice a fait connaître à la présidence de l'Assemblée nationale l'existence « d'une information actuellement suivie au tribunal de grande instance de Cherbourg à l'encontre de la COGEMA pour stockage irrégulier de combustibles nucléaires et mise en danger d'autrui. » Cette procédure a été ouverte à la suite de deux plaintes de parties civiles respectivement déposées le 31 décembre 1993 et le 12 mai 1997.

Dans une seconde lettre datée du 11 avril 2001, la Garde des sceaux ajoutait : « me référant à ma réponse du 30 mars 2001, il m'apparaît utile de vous apporter les précisions suivantes : s'agissant des faits d'importation de combustible MOX allemand visés dans la proposition de résolution couvrant la période de juillet à août 2000, aucune procédure judiciaire n'est actuellement en cours En revanche, l'information actuellement suivie au tribunal de grande instance de Cherbourg à l'encontre de la COGEMA, à laquelle ma précédente lettre fait référence, couvre des faits relatifs à l'importation de combustible MOX en provenance d'Allemagne antérieurement à novembre 1998. Dès lors, les faits d'importation de ce combustible nucléaire évoqués dans la proposition de résolution paraissent, au moins pour partie, entrer dans la saisine du juge d'instruction ».

La recevabilité de la proposition de résolution (n° 2937) de M. Noël Mamère apparaît dès lors très incertaine. Pour le moins, la réponse de la ministre de la justice tend, sur le fondement du principe de séparation des pouvoirs, à limiter sensiblement le champ d'investigation et donc l'intérêt d'une éventuelle commission d'enquête. Mais, sur un sujet aussi passionnel, votre rapporteur, en accord avec le président de la commission de la production et des échanges a jugé très insatisfaisant voire très frustrant d'écarter purement et simplement la proposition de M. Noël Mamère pour des motifs de recevabilité et a tenu à porter le débat sur le terrain de l'opportunité de la création d'une telle commission.

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La commission d'enquête dont la création nous est proposée porte sur les éventuels existence et stockage de déchets nucléaires étrangers non retraitables à l'usine COGEMA de La Hague. La lecture de l'exposé des motifs de la proposition de résolution montre qu'il s'agit en fait de matières nucléaires importées d'Allemagne. Or, le droit français, conformément à l'article 3 de la loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs (plus connue sous le nom de « loi Bataille »), interdit « au-delà des délais techniques imposés par le retraitement », tout « stockage en France de déchets radioactifs importés, même si leur retraitement a été effectué sur le sol national ».

L'« acte fondateur » permettant le retraitement de combustible irradié allemand sur notre territoire est un échange de lettres entre les gouvernements français et allemand. Le premier échange date du 25 avril 1979 et porte sur le retraitement de « certaines quantités de combustibles irradiés en provenance de la République fédérale d'Allemagne ». Le second accord sous forme d'échange de lettres a été signé à Bonn le 25 avril 1990. C'est sur son fondement qu'est autorisé le retraitement à la Hague des combustibles allemands irradiés, qu'il s'agisse de combustibles « classiques » ou de MOX. Cet accord, publié au journal officiel du 17 août 1990 précise notamment que « les déchets radioactifs issus du retraitement en France des combustibles nucléaires irradiés en provenance de République fédérale d'Allemagne seront retournés à la République fédérale d'Allemagne, sous la responsabilité de laquelle ils seront stockés définitivement. »

Comme le montre clairement M. Noël Mamère dans l'exposé des motifs de sa proposition, deux types d'importations sont en cause :

- les importations de MOX irradié en provenance de centrales nucléaires allemandes. Le MOX est un combustible nucléaire contenant un mélange d'oxyde d'uranium et d'oxyde de plutonium. Il est destiné à des réacteurs spécialement conçus ou adaptés pour le recevoir. Entre 1988 et 1998, plus de cinquante tonnes de MOX allemand irradié sont entrées à l'usine de La Hague pour y être retraitées. A ce jour, seules cinq tonnes environ ont été retraitées. D'après les chiffres fournis par COGEMA, 48,9 tonnes de MOX allemand étaient entreposées à La Hague à la date du 28 février 2001 ;

- les importations de « matières » nucléaires en provenance de l'usine Siemens d'Hanau en Allemagne . Cette usine a arrêté la fabrication de MOX en 1995 . Lors de son démantèlement, Siemens a lancé un appel d'offres portant sur le retraitement des « matières » présentes dans l'usine. Que sont ces « matières » ? D'après le secrétariat d'Etat à l'industrie, il s'agit de « MOX terminé, présentant ou non des défauts ou ayant vieilli, ainsi que les assemblages MOX non terminés » (communiqué de presse du secrétariat d'Etat à l'industrie du 16 février 2001). La COGEMA a remporté cet appel d'offres et a signé en octobre 1997, un contrat portant sur 14 tonnes de matières nucléaires dont le quart environ est à ce jour arrivé à la Hague, le reste devant faire l'objet d'une dizaine de transports d'ici à 2003. Une fois retraitées, ces matières devront être rendues aux électriciens allemands.

La proposition de résolution de M. Noël Mamère se fait l'écho de doutes émis quant à la légalité des importations de matières nucléaires en provenance d'Allemagne. Ces doutes sont de deux ordres :

- ils se fondent d'abord sur une prétendue absence d'autorisation accordée par la direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN). S'agissant du MOX irradié, il est ainsi reproché à la COGEMA d'en avoir réceptionné sur le site de la Hague alors que, selon M. Noël Mamère, cette entreprise « ne bénéficie d'aucune autorisation pour retraiter ce mélange d'uranium et de plutonium issu du retraitement du combustible nucléaire des centrales ». La même remarque a été faite pour le MOX provenant d'Hanau : la COGEMA a en effet été assignée en référé par le CRILAN (comité de réflexion, d'information et de lutte anti-nucléaire) et M. Didier Anger, agissant en qualité de représentant du CRILAN à la commission spéciale et permanente d'information de La Hague, les requérants estimant qu'elle ne disposait pas de l'autorisation de retraiter et contestant la validité de l'autorisation de réceptionner, décharger et entreposer les combustibles MOX non irradiés. Par son jugement du 21 mars 2001, le tribunal de grande instance de Cherbourg a déclaré le CRILAN et M. Didier Anger irrecevables en leur action visant à faire reconnaître par le juge l'illégalité des importations de MOX et à en interdire toute nouvelle.

La COGEMA dispose-t-elle ou non des autorisations lui permettant de recevoir, d'entreposer et de retraiter les différents combustibles MOX allemands ?

Il convient de rappeler en préambule les autorisations nécessaires à ces opérations. Face à la multiplication des contentieux et polémiques sur ce sujet, l'autorité de sûreté nucléaire a jugé utile dans un communiqué de presse daté du 16 mars dernier de préciser la nature et la portée des différentes autorisations.

L'industriel doit obtenir deux types d'autorisations : les unes relatives au contrôle des matières nucléaires, les autres relatives à la sûreté nucléaire.

Les autorisations relatives au contrôle des matières nucléaires ont pour objet la protection physique des matières contre les actes de malveillance et le risque de prolifération nucléaire. Elles concernent les opérations d'importation (quand il s'agit de combustible étranger) et de transport. Elles sont délivrées par le ministère chargé de l'industrie. La DSIN n'est pas impliquée dans ces autorisations.

Les autorisations relatives à la sûreté nucléaire ont pour objet de vérifier que les opérations projetées se dérouleront dans des conditions de sûreté satisfaisantes. Elles sont normalement délivrées à deux stades :

- une autorisation de principe, faisant l'objet d'un décret d'autorisation de création, qui donne une liste de matières dont le retraitement est autorisé ou interdit dans chaque installation ;

- une autorisation opérationnelle, délivrée par la DSIN, qui approuve les dispositions de sûreté proposées par l'industriel pour chaque opération de retraitement, et lui donne le feu vert pour les mettre en _uvre.

Dans le cas, le plus général, où un laps de temps notable existe entre la réception des combustibles dans les piscines de refroidissement de la Hague et leur traitement effectif, la pratique actuelle est de scinder cette autorisation opérationnelle en deux autorisations successives : une autorisation pour la réception, le déchargement et l'entreposage des combustibles, suivie d'une autorisation pour le retraitement proprement dit. Chacune de ces autorisations est délivrée après examen du dossier de sûreté présenté par l'industriel pour les opérations correspondantes. La présentation du dossier de sûreté concernant le retraitement proprement dit peu avant la date souhaitée pour celui-ci permet de prendre en compte les caractéristiques précises du combustible et l'état de la technique à ce moment.

Or, il se trouve que le MOX irradié a fait l'objet de sept autorisations de recevoir et d'entreposer, la première datée du 21 avril 1988 et la dernière du 9 février 1998. Quant au retraitement, il est autorisé en vertu du décret du 17 janvier 1974 (autorisation de principe dans la terminologie de l'autorité de sûreté permettant à l'usine UP2-400 de la Hague de retraiter des combustibles de type MOX) et de l'autorisation opérationnelle (toujours selon la même terminologie) accordée par la DSIN le 30 octobre 1992 pour la réalisation d'une « campagne expérimentale » portant sur 4,7 tonnes de MOX.

Quant aux matières nucléaires provenant de l'usine d'Hanau, elles ont fait l'objet :

- d'une autorisation de la direction générale de l'énergie et des matières premières en date du 18 juin 1997 au titre du contrôle des matières nucléaires ;

- de trois autorisations de la DSIN (la dernière datant du 15 février 2001) permettant de réceptionner, d'entreposer et de décharger le combustible non irradié d'Hanau ;

- de l'autorisation de principe de retraitement du MOX non irradié dans l'unité UP2-400 de la Hague. Comme l'a rappelé le secrétariat d'Etat à l'industrie : « le recyclage effectif [nécessitera] simplement, le moment venu une autorisation particulière donnée par l'autorité de sûreté ».

La deuxième série de critiques apportées aux opérations conduites par COGEMA semble plus consistante aux yeux de votre rapporteur et ne peut laisser insensibles les députés, puisqu'il s'agit de s'interroger sur des pratiques qui, sans être contraires à la lettre de la loi du 30 décembre 1991, ne paraissent pas pleinement fidèles à son esprit.

L'article 3 de la loi de 1991 interdit tout stockage de déchets étrangers « au-delà des délais techniques imposés par le retraitement ». Faute de définition des « délais techniques », il est difficile de savoir où se termine le simple entreposage provisoire et où commence le stockage. Lors des débats précédant le vote de la loi de 1991, la question d'une durée maximale d'entreposage avait été évoquée sans qu'aucune réponse y soit apportée. Dans un entretien récent accordé au journal « Le Monde », M. Christian Bataille, rapporteur du texte de 1991, reconnaît que la loi « n'a pas envisagé le cas de combustibles qui resteraient longtemps en attente de retraitement ». Selon lui, « cette pratique est contraire à l'esprit de la loi : on ne peut pas stocker en France des matières qui ne feraient pas l'objet d'un retraitement industriel ». En tant que « père fondateur de la loi », il estime que « son esprit est bafoué par cette pratique ».

Dans le cas du MOX allemand irradié, le doute est entretenu par la faible quantité de combustibles retraités. Pourquoi ne retraite-t-on pas ce MOX ? Ce ne peut être en raison des délais de refroidissement des combustibles : nombre d'entre eux sont arrivés entre 1988 et 1993 à la Hague et d'après les spécialistes de la COGEMA, la durée de refroidissement du MOX est estimée dans une fourchette allant de cinq à sept ans. Est-ce en raison d'un engorgement de la filière, les capacités de production de l'usine MELOX de Marcoule étant strictement encadrées ? Est-ce en raison du vieillissement de l'unité UP2-400, seule habilitée aujourd'hui à retraiter le MOX (si tel est le cas, l'habilitation des usines UP2-800 et UP3 pourrait, si elle est accordée au terme d'une longue procédure, apporter des éléments de réponse). Est-ce pour une raison technique inavouée ? D'aucuns ont beau jeu, dans ce contexte, de prétendre que le retraitement du MOX n'est pas encore au point. Lors de son unique demande d'autorisation de retraiter le MOX allemand, la COGEMA n'avait-elle pas présenté cette opération comme une « campagne expérimentale » ?

Les matières provenant d'Hanau posent également un problème d'application de la loi de 1991. Celle-ci en effet n'avait pu prévoir que notre pays pourrait être amené à retraiter des combustibles non irradiés que, contrairement à M. Noël Mamère, le rapporteur se refuse à considérer comme des déchets nucléaires. Cette position est partagée par le secrétariat d'Etat à l'industrie qui dans son communiqué précité du 16 février 2001 indique que « ces matières ne sont en aucune façon du combustible irradié (...) et encore moins des déchets ». Ceci a une double conséquence : elles n'entrent pas dans le champ de la suspension récemment levée des transports de combustibles irradiés de l'Allemagne vers la France et de ce fait leur transfert était parfaitement légal, mais elles n'entrent pas non plus - et c'est plus fâcheux - dans le champ d'application de la loi de 1991.

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Faut-il dans ces conditions créer une commission d'enquête « relative à l'existence et au stockage de déchets nucléaires non retraitables à l'usine de la Hague, en violation de la loi du 30 décembre 1991, et sur les responsabilités de la COGEMA en la matière » ?

Il vient d'être montré que les problèmes soulevés par M. Noël Mamère sont d'abord d'ordre législatif. Leur résolution passe par une mise à jour de la loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991. Au delà des aménagements importants qui viennent d'être évoqués, il faudrait également prévoir un dispositif de sanctions en cas de stockage de déchets nucléaires étrangers. Plus généralement, les points abordés posent une nouvelle fois les questions liées au maintien du retraitement et à la place du MOX dans notre production électro-nucléaire. Plutôt qu'à une commission d'enquête, il appartiendra à la loi d'orientation sur l'énergie qui, conformément à la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, devra être présentée au Parlement avant le 31 décembre 2002, d'y apporter des réponses.

Par ailleurs sur des sujets plus techniques tel le retraitement du MOX, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques paraît être une enceinte plus appropriée qu'une commission d'enquête.

Or ledit Office prépare actuellement un rapport sur la gestion des combustibles irradiés non immédiatement retraités. Dans le cadre de ces travaux, M. Christian Bataille, rapporteur de l'Office organise le 3 mai prochain à l'Assemblée nationale une journée d'audition sur ce thème ouverte au public. Les principaux acteurs de la filière nucléaire, à commencer par Mme Anne Lauvergeon, président directeur-général de la COGEMA, y seront présents ainsi que des opposants à l'énergie nucléaire comme les représentants de Greenpeace ou Mme Monique Sené , présidente du groupement des scientifiques pour l'information sur l'énergie nucléaire. Il sera donc possible aux parlementaires membres ou non de l'Office d'intervenir sur les questions qui viennent d'être exposées et d'obtenir rapidement des réponses alors que la mise en place d'une commission d'enquête nécessite une procédure relativement lente et que son rapport est le plus souvent présenté au terme de son délai maximal d'existence de six mois.

De plus, convoquer à quelques semaines d'intervalle les mêmes intervenants risque de susciter des commentaires sur l'efficacité, la cohérence et la lisibilité de nos travaux.

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La commission a examiné la proposition de résolution lors de sa réunion du 24 avril 2001. Après l'intervention du rapporteur, M. Yves Cochet a déclaré ne pas se rallier aux conclusions du rapporteur, dont il a souligné qu'il avait évoqué des questions très importantes lors de son intervention. Il a estimé que si l'organisation d'une journée d'auditions dans le cadre des travaux de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques permettrait de faire progresser la transparence dans le domaine nucléaire, des questions subsistaient et méritaient de trouver une réponse grâce à la création d'une commission d'enquête :

- la première est liée à l'ambiguïté qui règne en matière d'autorisations délivrées à la COGEMA dont témoigne l'arrêt rendu par le TGI de Cherbourg. Selon M. Yves Cochet, la COGEMA a en effet estimé qu'aucune des pièces considérées comme manquantes par les plaignants, c'est-à-dire les autorisations d'importer du combustible irradié ainsi que l'autorisation de le retraiter, n'était exigée en application des dispositions législatives et réglementaires. Pourtant le directeur de la sûreté des installations nucléaires avait estimé que l'autorisation de transport ne valait qu'« en principe » autorisation de retraitement et que Mme Anne Lauvergeon, président directeur général de la COGEMA, avait reconnu, en 1999, que des autorisations supplémentaires étaient nécessaires. En conséquence, on peut se demander pourquoi le système français exige l'obtention de diverses autorisations, sources de confusion, et s'il ne serait pas nécessaire de le rationaliser en instituant, par exemple par voie législative, l'obligation d'obtenir une autorisation unique couvrant à la fois les opérations d'importation, de transport, de stockage et de retraitement ?

- la seconde question porte sur l'évaluation des stocks de combustibles irradiés de la COGEMA, par radionucléide, et sur leur évolution.

- par ailleurs, la demande d'extension des installations de La Hague qui devrait, selon M. Yves Cochet, être accompagnée d'un arrêté ou d'un décret de plafonnement des rejets réels et non pas théoriques conduit à se demander s'il ne faudrait pas encadrer de la même façon les rejets liés au retraitement de tous les combustibles, y compris du MOX. Cette question est particulièrement pressante, compte tenu des interrogations formulées par le rapport corédigé par MM. Charpin, Dessus et Pellat, remis au Premier ministre au mois de juillet 2000, concernant l'intérêt du retraitement, notamment du MOX ;

- s'agissant de l'usine UP2-400, elle devrait être fermée depuis des années à la fois en raison de son ancienneté et de son faible régime de fonctionnement ;

- la commission d'enquête devrait également s'interroger sur la possibilité pour la COGEMA de conclure des contrats de retraitement de combustibles irradiés sans être assurée que les pays cocontractants disposent de sites leur permettant de réceptionner les colis retraités. Est-il normal qu'à des fins purement commerciales, la COGEMA soit autorisée à conclure de tels contrats ?

- enfin, l'uranium de retraitement, présent sur le site de La Hague, doit-il être considéré comme un déchet nucléaire ?

M. Yves Cochet a conclu que toutes ces questions rendraient nécessaires la création de la commission d'enquête proposée par M. Noël Mamère.

Après avoir indiqué, en préambule, qu'il soutenait la proposition du rapporteur, M. Christian Bataille a jugé qu'il était nécessaire d'apprécier la problématique du retraitement dans une perspective énergétique d'ensemble. S'il faut indubitablement une filière nucléaire transparente, il faut également analyser dans la transparence les rejets toxiques liés à l'utilisation des combustibles fossiles ainsi que les conséquences de celle-ci en matière d'effet de serre. La commission de la production et des échanges a, à l'initiative de son président, engagé ce travail de réflexion globale sur l'énergie et a, d'ores et déjà, réfléchi aux inconvénients respectifs des différentes sources d'énergie. Peut-être faut-il aller plus avant dans cette réflexion et, par exemple, se demander quelles conséquences aurait le remplacement de nos centrales nucléaires par un parc équivalent de centrales thermiques.

Pour autant, M. Christian Bataille a jugé que la proposition de résolution de M. Noël Mamère trouvait son origine dans une difficulté réelle. Il a en effet indiqué que la loi n° 91-1381 du 30  décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs dont il avait été le rapporteur à l'Assemblée nationale, s'était essentiellement préoccupée du terme du cycle. Elle a surtout traité le devenir des combustibles une fois ceux-ci retraités et non avant cette opération.

Il a sans doute pu en résulter quelques abus de langage de la part d'industriels de la filière autour des notions de combustible « en attente » de retraitement ou dont le retraitement est « différé ».

Une réflexion s'impose donc et, comme le rapporteur l'a proposé, celle-ci pourrait être conduite dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Ainsi que l'a indiqué le rapporteur, cette instance organise le 3 mai prochain une journée d'auditions en présence de beaucoup des principaux acteurs industriels de la filière nucléaire et, probablement, de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement et du secrétaire d'État à l'industrie. Tous les députés pourront assister à ces tables rondes, s'y exprimer et éventuellement interpeller les personnes auditionnées.

Jugeant que l'avenir de l'industrie nucléaire, indispensable à notre pays, imposait de répondre aux questions posées par M. Noël Mamère, M. Christian Bataille a indiqué que l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques lui avait confié un rapport sur la gestion des combustibles irradiés non immédiatement retraités et qu'il s'attacherait dans ce cadre à obtenir tous les éclaircissements nécessaires. Il a précisé qu'il solliciterait de la COGEMA toutes les informations pertinentes notamment sur les quantités de radionucléides d'origine française et d'origine étrangère actuellement stockées à la Hague.

Rappelant que les principaux clients étrangers de cette entreprise étaient allemands et japonais, mais que figuraient également au nombre de ceux-ci des clients belges, hollandais et d'autres nationalités notamment espagnole, il a ajouté qu'il étudierait les contrats conclus et le devenir des matières dont le retraitement est annoncé comme différé. Il y a en effet, à cet égard, une différence de nature entre une attente de quelques années et une attente de quelques décennies. Il faut donc se demander s'il existe, parallèlement à la filière du retraitement, une filière du non-retraitement qui pourrait également être à l'_uvre en France puisqu'un tiers de nos combustibles ne fait pas l'objet d'un retraitement. Une autre question à trancher est de déterminer si les combustibles non-irradiés doivent être considérés comme des combustibles « en devenir » ou s'ils peuvent être, dans certains cas, assimilés à des déchets.

Estimant qu'il s'agissait là de questions importantes, il a jugé que les travaux de l'Office permettraient au Parlement de les étudier de manière adaptée.

M. Robert Galley a déploré que certains tentent de faire jouer au Parlement un rôle qui n'est pas le sien. On se trouve alors dans la logique défendue récemment par un député de la majorité, qui expliquait qu'en l'absence d'événement porteur d'une charge émotionnelle, il convenait de créer une émotion virtuelle. C'est ainsi qu'après avoir obtenu l'arrêt du surrégénérateur Superphénix - qui fut une grave erreur -, les collègues de M. Noël Mamère s'en prennent à l'usine de retraitement de La Hague et cherchent à créer un sentiment d'inquiétude sans fondement, relayant les actions extrémistes de l'association Greenpeace.

Il est souhaitable que le Parlement ne se disperse pas dans des travaux portant sur des questions dont l'importance en termes de santé publique est secondaire au regard par exemple des soixante mille morts liées au cancer du fumeur qui mériteraient une véritable mobilisation des pouvoirs publics. La représentation nationale doit s'intéresser aux vrais dangers et non à des thèmes qui ne constituent qu'un fond de commerce électoral.

M. Pierre Micaux a déclaré partager l'opinion de M. Robert Galley et s'est dit offusqué par cette discussion. Il a estimé que les auteurs de la proposition de loi introduisaient un doute insultant sur la compétence des chercheurs et ingénieurs français, auxquels il a tenu à rendre hommage.

Il convient de présenter des propositions constructives et, au lieu de décrier les choix stratégiques de la France en faveur de l'énergie nucléaire, de réfléchir plus avant sur le problème que pose l'épuisement des réserves de pétrole, de gaz et de charbon.

Enfin, a-t-il observé, s'il s'agit de créer une commission d'enquête, elle devrait porter sur le financement de Greenpeace, organisation étrangère dont l'origine des ressources mériterait d'être portée à la connaissance de tous.

M. Claude Gatignol a estimé que la proposition de loi de M. Noël Mamère était tout à fait digne d'intérêt, mais pour des raisons différentes de celles évoquées par MM. Yves Cochet et Noël Mamère.

En premier lieu, selon M. Claude Gatignol, elle démontre non la persévérance mais l'acharnement de M. Noël Mamère et de ses collègues contre ce qui reste une réussite technologique, économique et environnementale : la filière nucléaire civile française et sa spécificité, le retraitement des combustibles usés. Ce retraitement reste le meilleur moyen d'éviter le gaspillage, d'isoler les déchets ultimes et ainsi de réduire fortement leur volume. En réalité, l'usine de La Hague est donc, en matière nucléaire, une usine de tri sélectif qui permet de valoriser les déchets.

En second lieu, M. Claude Gatignol a souligné que la proposition de M. Noël Mamère semblait tentante. Grande est en effet la tentation de rappeler la rigueur de système d'autorisations et du processus industriel auxquels est soumise l'usine de la COGEMA. En ce qui concerne d'éventuelles conséquences sanitaires, grande est la tentation de rappeler que des études épidémiologiques se sont multipliées au cours des trente-cinq dernières années, tout comme les groupes d'experts et que tous ces travaux tendent à démontrer que l'exploitation de l'usine de la COGEMA n'a eu et n'a encore aucune conséquence sur la santé des riverains et l'équilibre de l'environnement. Plus encore, en dehors du pic de 1986 lié à l'accident de Tchernobyl, la radioactivité du milieu local -tant marin, aérien que terrestre- est en constante décroissance depuis 20 ans. D'ailleurs, la fréquentation touristique importante de la région de la Hague est le reflet de l'attrait qu'elle continue d'exercer.

En troisième lieu, M. Claude Gatignol a qualifié la proposition de M. Noël Mamère d'intéressante, en ce qu'elle condamnait a priori des choix politiques nationaux et même européens. Les traités internationaux n'ont donc, pour M. Noël Mamère, aucune valeur, alors qu'ils sont pourtant signés par les plus hautes autorités du pays.

En matière de retraitement, la transparence est bien réelle, puisque la sécurité des mouvements des combustibles est assurée en permanence par des contrôles fréquents et la présence continue de caméras de l'agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dès l'arrivée des matériaux.

Par ailleurs, M. Claude Gatignol a insisté sur le caractère profondément partial et partisan de cette proposition. Les salariés, les entreprises et les élus apprécient particulièrement peu le qualificatif de « poubelle internationale fonctionnant dans l'illégalité » accolé au site de la Hague, alors qu'ils travaillent dans le respect de règles très strictes. Les convois repartis en Allemagne et, il y a quelques mois, au Japon, démontrent en outre clairement qu'il y a retour dans le pays d'origine après retraitement.

Le nucléaire n'est certes pas un produit banal, mais la sûreté des installations et la sécurité du fonctionnement sont la première préoccupation des intervenants.

M. Claude Gatignol a souligné qu'à l'heure où l'on s'interroge sur l'effet de serre, de nombreuses délégations étrangères viennent sur le site de la Hague afin d'étudier la technologie française. Elle peut par ailleurs apporter une solution au démantèlement des stocks de plutonium militaire en les neutralisant et en permettant l'extraction de ce qui en est valorisable. Il ne faut pas passer à côté de ce marché prometteur. Il convient donc de laisser travailler ceux dont c'est le rôle et de ne pas interférer par intolérance et idéologie dans le travail irréprochable des salariés de la Hague et des chercheurs, dont l'excellent rapport de la commission spéciale et permanente d'information près de l'établissement de la Hague présidée par M. Bernard Cazeneuve s'est récemment fait l'écho. Il a conclu en indiquant qu'il voterait contre la création de la commission d'enquête.

Usant de la faculté offerte par l'article 38 du Règlement de l'Assemblée nationale, M. Noël Mamère a souhaité souligner qu'il partageait pleinement les arguments présentés par M. Yves Cochet en faveur de la constitution de cette commission d'enquête.

Même si la position des députés favorables à cette commission d'enquête semble aujourd'hui incongrue et très minoritaire, il a rappelé le rôle précurseur joué par certains écologistes qui, en 1984, dénonçaient les méfaits de l'agriculture productiviste et dont les mises en garde se sont révélées tout à fait prémonitoires quelques années après avec l'apparition de l'ESB.

Loin de vouloir mettre en cause la qualité des ingénieurs de la filière nucléaire française, les partisans de cette proposition de résolution ont pour objectif de lutter contre l'opacité qui est entretenue par la COGEMA quant à la gestion des déchets nucléaires. L'enjeu de la constitution de cette commission d'enquête est d'introduire de la démocratie dans le secteur nucléaire alors que jusqu'à présent des choix industriels, qui peuvent avoir des conséquences irréversibles en cas d'incident, ont été opérés sans aucune transparence.

Il a d'ailleurs souligné que M. Christian Bataille avait également reproché à la COGEMA son refus de communiquer le niveau des stocks actuels de déchets.

La constitution d'une commission d'enquête contribuerait à mettre fin à la culture du secret qui règne dans la filière nucléaire comme l'a illustré encore récemment le refus du CEA de démanteler des installations menacées par des risques sismiques à Cadarache, alors que depuis de nombreuses années des associations de riverains ont alerté les autorités de sûreté sur ce risque majeur.

M. Noël Mamère a ensuite déploré que l'usine de la Hague soit devenue une poubelle nucléaire, des quantités importantes de déchets étant stockées sur le site et aucun retraitement de ces déchets n'étant prévu à court ou moyen terme.

Constatant qu'il existait un véritable blocage pour entreprendre une enquête sur les conditions de fonctionnement de l'usine de retraitement de la Hague, plusieurs demandes de commission d'enquête ayant été rejetées, il a souligné que le débat qui allait s'instaurer prochainement au sein de la commission du débat public était largement insuffisant, aucun pouvoir d'investigation n'étant dévolu à cette instance.

Il a enfin regretté que de nombreux arguments fallacieux aient été avancés pour justifier du refus de constituer cette commission d'enquête comme par exemple ceux portant sur les nuisances générées par les autres énergies ou ceux relatifs à l'effet de serre car selon M. Noël Mamère une multiplication par dix du parc de centrales nucléaires ne changerait rien aux conditions de respect du protocole de Kyoto. Chacun sait en effet que les transports, qui n'utilisant pas l'énergie nucléaire, sont la cause principale de l'effet de serre.

Pour conclure, M. Noël Mamère a souligné que le refus de constituer cette commission d'enquête serait un nouveau symbole de l'état de déshérence du Parlement qui n'ose pas exercer les pouvoirs de contrôle qui sont les siens.

M. Claude Billard a déclaré partager les conclusions du rapporteur et a annoncé qu'en conséquence, il voterait contre l'adoption de la proposition de résolution soumise à l'examen de la commission de la production et des échanges. Rappelant qu'il était lui-même attaché à la transparence en matière nucléaire et que la COGEMA avait fourni de réels efforts en la matière, il a estimé que la France ne pouvait se passer de sa filière électro-nucléaire, qui constitue un atout. Il a souhaité que les travaux de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques soient pris en compte et estimé que la journée d'auditions organisées dans ce cadre permettrait d'améliorer l'information sur le sujet. Enfin, il a jugé que les combustibles usés, tels que le plutonium ou l'uranium, n'étaient pas des déchets mais des produits valorisables.

M. Jean-Yves Le Déaut s'est ensuite félicité que MM. Noël Mamère et Yves Cochet aient mentionné, lors de leurs interventions respectives, la loi de 1991 précitée, dont il a estimé qu'elle avait permis de grandes avancées de la démocratie et de la transparence dans le domaine nucléaire. Il a rappelé que dans un rapport remis au Premier ministre, il avait appelé à l'adoption d'une grande loi fondatrice sur le nucléaire.

Par ailleurs, il a estimé que la transparence dans le domaine nucléaire avait progressé ; à cet égard, il a signalé qu'il était possible, en consultant Internet, de connaître la quantité de déchets stockés à La Hague ou leur date de traitement. Il a jugé qu'il n'était pas pertinent de qualifier la France de « poubelle ». Selon lui, le vrai problème qui se pose en matière d'énergie nucléaire réside dans la volonté de certains de « sortir du nucléaire », alors même que le débat conduit à l'Assemblée nationale sur le thème de l'énergie a conclu au caractère indispensable tant au niveau mondial qu'au niveau national, de l'énergie électro-nucléaire en raison de l'absence actuelle de solutions de substitution. Il a regretté que l'attention se focalise sur le problème du retraitement des déchets, ce qui pourrait bloquer le système actuel, et a plaidé en faveur d'une initiative législative pour traiter cette question.

Enfin, il a rappelé que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques pouvait, en application de l'article 6 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, demander à ce que lui soient conférées les prérogatives attribuées aux commissions d'enquête parlementaires. Cette possibilité a d'ailleurs été utilisée en 1997, année où l'Office avait chargé Mme Michèle Rivasi d'un rapport sur les conséquences du stockage des déchets nucléaires sur la santé publique, adopté à l'unanimité. Il a estimé que créer une commission d'enquête portant sur un sujet traité par ailleurs par l'Office reviendrait à le déjuger et a regretté que M. Noël Mamère, membre de cet organisme, n'ait jamais assisté à ses réunions.

Enfin, il a déclaré que si les transports étaient effectivement une des causes principales de l'effet de serre, en raison de leur consommation d'énergies fossiles, l'énergie électro-nucléaire pouvait, pour sa part, être qualifiée d'énergie « propre » ; en conclusion, il a estimé que le recours à ce type d'énergie n'était pas incompatible avec le développement des énergies renouvelables.

Après avoir rappelé que la proposition de résolution posait un vrai problème de recevabilité, M. Maxime Bono, rapporteur, a indiqué que les questions soulevées relevaient soit du débat public, soit du débat législatif et que les points plus techniques pouvaient être traités par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

M. André Lajoinie, président, s'est félicité de la qualité du débat sur la proposition de résolution.

Soulignant qu'il n'existe pas d'« énergie parfaite », il a estimé que le nucléaire était indispensable à la couverture des besoins en énergie futurs de l'humanité. Plus encore que l'eau, l'énergie constitue l'enjeu crucial des années à venir : le récent refus du président américain de ratifier le protocole de Kyoto révèle bien l'échec d'une politique, qui a refusé de s'appuyer sur l'énergie nucléaire au profit d'une consommation, sans cesse accrue et toujours plus polluante, de pétrole.

Le nucléaire constitue une source d'énergie indispensable, que les propositions présentées par M. Noël Mamère et ses collègues tentent, de manière contournée et inavouée, de remettre en cause dans son fondement même. Il est irresponsable d'envisager de se passer de l'énergie nucléaire mais le fonctionnement de la filière nucléaire peut être amélioré et doit être rendu plus transparent.

Par ailleurs, en raison de la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur un sujet voisin, la création d'une commission d'enquête conduirait à une redondance de travaux et de moyens.

En conséquence, il a également estimé que la proposition de création d'une commission d'enquête devait être rejetée.

Puis, conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a rejeté la proposition de résolution (n° 2937).