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Document E2805
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Conseil portant modification et suspension de l'application du règlement nº 2193/2003 instituant des droits de douane supplémentaires sur les importations de certains produits originaires des Etats-Unis d'Amérique.


E2805 déposé le 12 janvier 2005 distribué le 25 janvier 2005 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2004) 0822 final du 22 décembre 2004, transmis au Conseil de l'Union européenne le 22 décembre 2004)

Base juridique :

Article 133 du traité instituant la Communauté européenne.

Procédure :

Majorité qualifiée au sein du Conseil.

Avis du Conseil d'Etat :

En tant qu'elle modifie un texte qui avait été considéré comme comportant des dispositions de nature législative, et en raison du caractère législatif des dispositions qu'elle contient, cette proposition d'acte communautaire doit être regardée comme devant être soumise au Parlement.

Commentaire :

Cette proposition vise à suspendre, avec effet rétroactif au 1er janvier 2005, les sanctions commerciales appliquées dans le cadre de l'affaire des " Foreign Sales Corporation " ou FSC, en attendant le résultat de la nouvelle procédure contentieuse engagée à l'OMC sur le sujet.

Avec le contentieux Airbus-Boeing , qui vient de faire l'objet d'un accord entre la Commission et l'administration américaine, celui sur les FSC reflète l'intensité de la " guerre commerciale " à laquelle se livrent, dans certains domaines, les deux plus grandes puissances économiques et financières du monde.

1. Bref rappel du contentieux sur les FSC

En groupe spécial et en appel, l'Organe de règlement des différents (ORD) de l'OMC, saisi par la Communauté européenne, a jugé, en 2000, que le régime FSC constituait une aide illégale à l'exportation, qui viole l'Accord sur les subventions et celui sur l'agriculture.

La loi de 1984 sur les FSC permettait la création de sociétés, dans le but de promouvoir l'exportation des produits et des services de leur société mère. Ces " sociétés d'exportation " sont soit des filiales off-shore fictives, soit des sociétés écrans, par lesquelles les entreprises américaines font transiter leurs opérations de vente à l'étranger, en bénéficiant ainsi d'avantages fiscaux.

Dans cette première affaire, l'OMC avait accordé aux Etats-Unis un délai, jusqu'au 1er novembre 2000, pour supprimer ce régime.

Le 15 novembre 2000, le Président Clinton signait la loi sur les revenus extraterritoriaux ( Extra Territorial Income Act - ETI ), qui remplaçait le régime FSC .

Toutefois, cette loi ne modifiait pas la substance du système de subventions, si bien qu'elle a été contestée par l'Europe devant l'ORD.

En janvier 2002, l'OMC confirmait que le dispositif adopté constituait, également, une subvention à l'exportation interdite et que les Etats-Unis ne s'étaient pas conformés à sa décision antérieure.

Le 7 mai 2003, l'OMC approuvait la demande de l'Union européenne visant à introduire des contre-mesures d'un montant identique à celui estimé pour les subventions américaines, soit 4 milliards de dollars.

Cependant, en signe de bonne volonté, l'Union renonçait à recourir immédiatement à des mesures de rétorsion, afin de laisser au Congrès un délai raisonnable pour adopter la législation supprimant les FSC.

Après ce délai de grâce, le 1er mars 2004, l'Union européenne instituait des mesures de rétorsion, se traduisant par l'application de droits de douane additionnels de 5 % à une liste de produits américains, suivie de relèvements mensuels automatiques de 1 % jusqu'à un plafond de 17 %. Ce dernier devait être atteint le 1er mars 2005, si les Etats-Unis ne se conformaient pas, dans ce délai, au jugement de l'OMC.

2. La loi d'abrogation des FSC de 2004 et la réaction de la Commission

Le 22 octobre 2004, le Président George W. Bush signait la nouvelle loi abrogeant les Foreign Sales Corporations , l'" American JOBS Creation Act 2004 ".

La Commission estime que cette loi ne met pas un terme au contentieux sur les FSC, car elle laisse en place des dispositifs qu'elle estime contraires au premier jugement de l'OMC.

Ce texte prévoit, en effet, une période de transition de deux ans pour le retrait des aides aux exportateurs : les avantages du FSC seront ainsi partiellement maintenus jusqu'au 31 décembre 2006 (80 % en 2005 et 60 % en 2006).

En outre, la nouvelle loi contient une clause dite de grandfathering, qui préserve certains avantages au-delà de la fin de la période de transition. C'est le cas, notamment, des contrats appelés " ventes sous forme d'options " auxquelles ont eu recours, avant le 17 septembre 2003, des groupes importants, comme Microsoft , Motorola, General Electrics et... Boeing . Ce dernier recevra ainsi, chaque année, 150 millions de dollars de subventions, sous la forme de réductions fiscales.

Compte tenu de ces observations, la Commission européenne, avec l'accord des Etats membres, a décidé de riposter en prenant deux initiatives.

Premièrement, elle a saisi, le 13 janvier, l'OMC du dossier, afin que le juge multilatéral se prononce sur la conformité des dispositions transitoires et des clauses de sauvegarde du " American JOBS Creation Act ". Le " verdict " de l'ORD devrait être rendu au cours de l'été. Au vu de décisions antérieures de l'Organe d'appel, la Commission s'attend à ce que l'OMC juge ces dispositions incompatibles avec les règles de l'Organisation. En riposte à cette saisine, les Etats-Unis, pour des raisons de politique intérieure, ont déposé une plainte contre le régime douanier communautaire.

Deuxièmement, la Commission a jugé approprié de suspendre l'application des mesures de rétorsion pendant le déroulement de la procédure de règlement du différend.

Selon elle, trois motifs plaident en faveur de cette suspension :

- reconnaître, par cette mesure, que les Etats-Unis ont décidé, dans une certaine mesure de respecter leurs obligations internationales dans cette affaire ;

- encourager les Etats-Unis à procéder de la même manière dans les autres affaires où ils ne se sont pas mis en conformité avec de telles obligations (par exemple dans les cas de l'amendement Byrd) ;

- respecter les règles multilatérales, les mesures de rétorsion ne pouvant pas s'appliquer en l'absence de décision de l'OMC.

En conséquence, les mesures de rétorsion seront suspendues jusqu'au 31 décembre 2005 ou jusqu'à 60 jours après que l'OMC aura confirmé l'incompatibilité de ce qui subsiste des subventions FSC avec les règles de l'Organisation, selon la dernière de ces dates.

Celles-ci seront donc partiellement réintroduites le 1er janvier 2006, si l'OMC juge que les Etats-Unis n'ont pas éliminé les subventions déclarées illégales. Elles s'élèveront à 224 millions d'euros, soit 60 % des sanctions actuelles.

Le Conseil a adopté cette proposition le 31 janvier 2005.

Conclusion :

Après la présentation de ce document par M. Marc Laffineur, rapporteur, au cours de la réunion de la Délégation du 26 janvier 2005, celle-ci l'a approuvé en l'état des informations dont elle dispose.