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PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée relatif à la coopération

en matière de défense et au statut des forces

NOR : MAEJ1429488L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I- Situation de référence et objectifs de l’accord

Le cadre juridique de notre coopération en matière de défense avec la République de Guinée était déterminé par un accord de coopération militaire technique signé le 17 avril 1985, accord qui n’est jamais entré en vigueur faute d’approbation par la Partie guinéenne. Cette circonstance n’a cependant pas fait obstacle à la conduite de certaines actions de coopération.

Lors de la visite en France, à l’été 2012, du Président de la République de Guinée, les autorités guinéennes ont fait part de leur volonté de conclure un nouvel accord de coopération en matière de défense.

L’accord du 13 janvier 2014 vise ainsi à encadrer la coopération bilatérale de défense et à fournir un statut aux personnels destinés à sa mise en œuvre.

II- Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

- Conséquences économiques

La relance de notre coopération de défense avec la Guinée entraîne des échanges de savoir-faire. La Guinée s’intéresse notamment aux équipements militaires qui équipent l’armée française et tend à adopter des équipements similaires. A titre d’exemple, la création d’une préfecture maritime s’est traduite par l’acquisition par la Guinée de trois vedettes RAIDCO (6 M€) et un projet d’acquisition de trois patrouilleurs OCEA (20 M€). Parallèlement, l’équipement des sémaphores guinéens, soutenu et partiellement financé par la France (Direction de la coopération de sécurité et de défense du Ministère des affaires étrangères et du développement international à hauteur de 177.000 euros et « Eléments français au Sénégal ») a été fourni par des entreprises françaises ou européennes.

- Conséquences financières

Notre dispositif de coopération de défense et de sécurité s’est étoffé avec la création d’un poste de coopérant dans l’armée de l’air en 2013. Sa mise en œuvre fait l’objet de projets communs révisés périodiquement.

Cet accord de coopération bilatérale de défense ne crée pas d’obligations financières particulières mais prévoit des exonérations de droits et taxes pour l’importation de matériels et approvisionnements destinés à l’usage exclusif des forces de la Partie d’envoi.

- Conséquences sociales

Les forces armées guinéennes ont été longtemps caractérisées par la faiblesse de leur gestion et de leur organisation, le point le plus critique ayant été atteint pendant le Conseil national pour la démocratie et le développement, entre 2008 et 2010. Après son investiture, le Président de la République de Guinée, Alpha Condé, a lancé un grand programme de réforme du secteur de la sécurité, dont l’un des points saillants a été, en décembre 2011, la mise à la retraite de près de 4000 militaires, une première depuis l’indépendance de la Guinée en 1958. Le décret portant organisation du ministère de la défense, signé le 11 avril 2014, permet d’envisager la professionnalisation de nombreuses filières, en particulier dans le domaine des ressources humaines. La mise en œuvre de cet accord intergouvernemental dans ce domaine doit promouvoir une gestion assainie des ressources humaines.

- Conséquences environnementales

La prise en compte des questions environnementales en Guinée est encore balbutiante. Cependant, dans le domaine de la défense, quelques actions marquantes ont déjà été mises en œuvre avec notre coopération (dépollution pyrotechnique du champ de tir de Kindia, création d’une cellule environnement au sein de la préfecture maritime). Ainsi, les conséquences environnementales de cet accord ne peuvent être que vertueuses.

- Conséquences juridiques

L’objectif du présent accord est de donner une nouvelle impulsion à notre coopération de défense avec la République de Guinée. Cette coopération est essentiellement centrée sur la coopération militaire menée soit par la direction de la coopération de sécurité et de défense du ministère des Affaires étrangères, soit par l’état-major des armées, au ministère de la Défense.

Le présent accord ne prévoit pas de clause d’assistance en cas d’exercice de la légitime défense par la République guinéenne.

Ses dispositions sont pleinement compatibles avec, d’une part, les engagements de la France dans le cadre des Nations Unies (articles 2 et 51 de la Charte des Nations unies) et, d’autre part, ses engagements dans le cadre de l’OTAN et de l’UE. Le Traité de Washington du 4 avril 1949 n’exclut pas la possibilité pour un État Partie au Traité de Washington de conclure des accords avec des États tiers, pour autant qu’ils ne soient pas en contradiction avec ledit Traité (article 8). Le Traité sur l’Union européenne (article 42.7) renvoie aux engagements souscrits par les États membres dans le cadre de l’OTAN.

L’accord a été rédigé sur le modèle des accords et traités de partenariat de défense conclus entre 2009 et 2012 avec huit autres États africains1, il se compose, après un préambule et un article 1er consacré aux définitions utilisées, de quatre parties.

La première partie de l’accord (articles 2 à 5) est relative aux principes généraux de la coopération. Elle rappelle les grands objectifs et les principes de celle-ci, expose les domaines et formes de la coopération en matière de défense, et engage chaque Partie à mettre à disposition de l’autre les facilités qui apparaîtraient nécessaires à l’accomplissement de la coopération.

La deuxième partie de l’accord (articles 6 à 15) traite du statut des membres du personnel engagés dans la coopération en matière de défense, en particulier sous l’angle des conditions d’entrée et de séjour des personnels, du port de l’uniforme et des armes ainsi que de l’utilisation de celles-ci, de la compétence juridictionnelle, du règlement des dommages.

Les stipulations relatives aux règles de priorité de juridiction en cas d’infraction commise par les membres du personnel ou des personnes à charge de l’une ou l’autre Partie contiennent des garanties relatives au droit à un procès équitable au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH). L’article 13 §7 précise les droits procéduraux dont doivent bénéficier, a minima, les personnes poursuivies devant les juridictions guinéennes. S’agissant de la peine capitale, l’accord précise que les Parties subordonnent l’exercice de leur compétence de juridiction à l’engagement préalable que celle-ci, lorsqu’elle est encourue, ne sera ni requise ni prononcée. Ces dispositions permettent d’éviter que les membres du personnel français ou leurs personnes à charge ayant commis des infractions en dehors du service ne soient exposés, devant les juridictions guinéennes, à la peine de mort ou à des traitements contraires à l’article 3 de la CEDH. La Guinée est partie à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civils et politiques conclu le 16 décembre 1966.

La troisième partie de l’accord (articles 16 à 20) porte sur les facilités opérationnelles accordées dans les domaines de la circulation militaire, du soutien logistique, de l’importation et de l’entreposage des matériels, et des moyens de communication.

L’accord n’appelle pas de modification du droit interne.

Articulation avec le cadre juridique existant :

L’accord prévoit des exonérations de droits et de taxes pour l’importation de matériels et approvisionnements destinés à l’usage exclusif des forces, sous certaines conditions (cf. article 18). Il est conforme au droit communautaire. L’article 131 a) du règlement n° 1186/20092 du 16 novembre 2009 (codifiant le règlement n° 918/83) établissant un régime communautaire de franchises douanières prévoit que, jusqu'à l'établissement de dispositions communautaires dans le domaine considéré, les États membres peuvent octroyer des franchises particulières aux forces armées stationnées sur leur territoire en application d'accords internationaux.

Actuellement, la coopération en matière de défense avec la République de Guinée est restreinte à un accord de coopération militaire technique signé le 17 avril 1985. Cependant, la France n’a jamais reçu l’instrument d’approbation guinéen, condition requise pour l’entrée en vigueur de cet accord.

L’accord de coopération en matière de défense signé le 13 janvier 2014 se substituera à l’accord de coopération militaire technique signé en 1985, sans qu’il y ait nécessité d’abroger ce dernier dès lors qu’il n’est jamais entré en vigueur.

- Conséquences administratives

L’accord n’institue pas de structure de pilotage de la coopération bilatérale de défense et de sécurité, il n’engendre donc aucune conséquence administrative particulière.

III – Historique des négociations

Lors de la visite en France, à l’été 2012, du Président de la République de Guinée, il a été convenu par les ministres de la défense de négocier un nouvel accord de coopération. Dans ce but, un projet d’accord relatif à la coopération en matière de défense et au statut des forces a été élaboré mais l’ouverture des négociations avec la partie guinéenne a toutefois été différée en raison de la dégradation de la situation politique en Guinée et de la sensibilité politique de ce type d’accord.

L’évolution positive de la situation constatée lors des élections législatives du 28 septembre 2013 a permis de reconsidérer cette position et le projet d'accord a été transmis aux autorités guinéennes à la fin du mois de novembre 2013. Celles-ci ont rapidement marqué leur accord au projet, qui a été signé le 13 janvier 2014.

IV – État des signatures et ratifications

L’accord a été signé le 13 janvier 2014. Côté guinéen, l’accord a fait l’objet d’une loi d’autorisation le 2 juillet 2014 et d’un décret de publication du 3 juillet de la même année. L’instrument de ratification n’a pas encore été transmis.

V - Déclarations ou réserves

Sans objet.

1 Togo, Cameroun, Comores, Gabon, République centrafricaine, Djibouti, Côte d’Ivoire et Sénégal

2 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:324:0023:0057:FR:PDF


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