N° 1114
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 1998.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n° 1078).
TOME I
AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COOPÉRATION
PAR M. Bernard CAZENEUVE,
Député.
(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.
La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :
M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Michel Voisin, Jean-Claude Sandrier, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Bernard Birsinger, Jacques Blanc, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Philippe Douste-Blazy, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Roger Franzoni, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, Elie Hoarau, François Hollande, François Huwart, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Marius Masse, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Arthur Paecht, Jean-Claude Perez, Robert Poujade, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Philippe de Villiers, Jean-Claude Viollet, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane.
S O M M A I R E
Pages
INTRODUCTION 5
PREMIÈRE PARTIE
LEUROPE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA DÉFENSE
I. LE RENFORCEMENT CONTINU DE LOTAN 7
A. UNE ATTRACTIVITÉ NON DÉMENTIE 7
B. UNE RÉORIENTATION POURSUIVIE 10
C. LA FRANCE ET LOTAN 13
II. LES CONTRADICTIONS DE LUEO 16
A. UN CADRE OPÉRATIONNEL RENFORCÉ 17
B. QUELLE VOLONTÉ POUR LUEO ? 18
III. VERS LAGENCE EUROPÉENNE DE LARMEMENT 19
IV. LINDISPENSABLE OSCE 21
DEUXIÈME PARTIE
LA RÉFORME DE LA COOPÉRATION
MILITAIRE ET DE DÉFENSE
I. UNE MODERNISATION INDISPENSABLE 23
A. UNE INADAPTATION MANIFESTE 23
B. LA RÉFORME DES STRUCTURES 25
C. LA FUSION ET LE RÉÉQUILIBRAGE DES BUDGETS 26
II. LE RENOUVEAU DE LA COOPÉRATION DE DÉFENSE 29
III. LA RÉORIENTATION DE LA COOPÉRATION MILITAIRE 33
A. UNE POLITIQUE INFLÉCHIE 33
B. LÉVOLUTION DES MOYENS 34
C. LÉVOLUTION DE LA POLITIQUE DE FORMATION 39
2. Les écoles nationales à vocation régionale 40
D. LA COOPÉRATION POUR LA GENDARMERIE 44
IV. LA MISE EN OEUVRE DE LA NOUVELLE POLITIQUE AFRICAINE DE
LA FRANCE ET LE DÉVELOPPEMENT DES SYNERGIES AVEC LE
MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 46
A. LA REDÉFINITION DE LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ FRANÇAISE EN
AFRIQUE 46
B. LE PROJET RECAMP 47
C. LÉVOLUTION DU DISPOSITIF MILITAIRE FRANÇAIS 50
V. CONCLUSION 53
TROISIÈME PARTIE
LES CHARGES DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE
I. UN SOUTIEN AFFIRMÉ À LONU 55
II. UNE LARGE PARTICIPATION AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE
LA PAIX 58
A. LES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DE LONU 58
B. LES OPÉRATIONS DÉLÉGUÉES PAR LE CONSEIL DE SÉCURITÉ 62
C. LES INTERVENTIONS SOUS COMMANDEMENT NATIONAL 65
III. UNE RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE ASSUMÉE 68
CONCLUSION 71
EXAMEN EN COMMISSION 73
Mesdames, Messieurs,
Pour la deuxième année consécutive, la Commission de la Défense a jugé quà loccasion de lexamen des crédits du ministère des Affaires étrangères et du ministère délégué à la Coopération et la Francophonie, le point devait être fait de façon globale sur les actions de ces départements qui relèvent de sa compétence, autrement dit les actions en matière de sécurité extérieure et de défense, ainsi que sur les crédits qui sont affectés à celles-ci.
Cest pourquoi sera tout dabord examinée laction menée en matière dorganisation de la sécurité et de la défense en Europe. Limportance des enjeux et la profondeur des changements dans le domaine de la sécurité européenne méritent une analyse aussi précise que possible pour éclairer la réflexion et les décisions futures de lAssemblée nationale. Sur un plan plus strictement budgétaire, lévolution de cotisations de la France à lOTAN mérite dêtre replacée dans le contexte global de lévolution des missions de cette organisation.
La coopération militaire et de défense mérite une approche densemble. Dans ses diverses composantes, il sagit en effet dun instrument unique, au service du rayonnement de notre pays et de laffirmation des politiques quil met en oeuvre par le moyen de sa diplomatie. Le rapport pour avis présenté à loccasion de lexamen de la loi de finances pour 1998 regrettait léclatement de la coopération militaire entre le ministère des Affaires étrangères, le secrétariat dEtat à la Coopération et le ministère de la Défense. Le regroupement en cours et la dynamisation qui laccompagne montrent le bien-fondé dune prise en compte globale et lintérêt dune action unifiée et cohérente.
Enfin, la part que prend notre pays à la sécurité internationale est lun des éléments de son rang parmi les autres puissances. Il sagit dabord des modalités selon lesquelles il fait face à ses obligations de membre du Conseil de Sécurité de lONU. Cependant, si les opérations de maintien ou de rétablissement de la paix sont toujours décidées par résolution du Conseil de Sécurité, aujourdhui la conduite des interventions les plus importantes nest plus assurée par le Département des opérations de maintien de la paix de lONU ; elle est au contraire déléguée aux Etats ou à des coalitions régionales. Par ailleurs dautres opérations relèvent daccords bilatéraux. Dès lors, bien que la décision dassocier la France à une opération multilatérale ou de déclencher une opération bilatérale intéresse au premier chef le ministère des Affaires étrangères, cest sur le budget de celui de la Défense que sen imputent les dépenses. Une vision correcte de laction de la France en ce domaine impose ainsi une approche qui dépasse les frontières budgétaires traditionnelles. Cela correspond par ailleurs à la volonté renouvelée, exprimée par le Président de lAssemblée nationale, de voir le Parlement renforcer ses missions de contrôle, et ce notamment sur les accords de défense et le suivi des engagements militaires. Cest ce qui sera tenté dans la troisième partie du présent rapport.
PREMIÈRE PARTIE
LEUROPE DE LA SÉCURITÉ ET DE LA DÉFENSE
La constitution dune Identité européenne de sécurité et de défense est lun des axes de la politique étrangère de la France. Cette identité se constitue à travers plusieurs institutions. LUnion européenne va se voir doter de compétences encore fort réduites, mais sans doute prometteuses lors de lentrée en vigueur du traité dAmsterdam. LOSCE est certainement lenceinte où se définissent le mieux les équilibres à partir desquels la sécurité intérieure de lEurope pourra se constituer. LUEO se dote progressivement de moyens qui pourraient en faire le bras armé des Européens. La création, en cours, de lOCCAR est sans doute létape majeure de la constitution dune Agence européenne de larmement. Mais cest aujourdhui encore lOTAN, où le poids des Etats-Unis est écrasant, qui reste de loin la principale composante de la capacité armée des européens.
I. LE RENFORCEMENT CONTINU DE LOTAN
On le sait, lOTAN sest constituée en 1949 entre les pays dEurope de lOuest et les Etats-Unis (ainsi que le Canada) en tant qualliance militaire défensive contre la menace représentée par lUnion soviétique.
Or, aujourdhui, alors que non seulement cet Etat a disparu, mais que lOTAN a signé en 1997 deux accords avec ses principaux pays successeurs, lacte fondateur avec la Russie, qui énonce pour la première fois que la Russie et lOTAN ne se considèrent pas comme des adversaires , et une charte avec lUkraine, lOTAN continue dattirer les candidats à ladhésion.
LOTAN a dabord fait preuve de mesure devant cet enthousiasme. Le fait quelle soit une alliance défensive mérite dêtre en effet analysé. Quelle soit défensive signifie quelle a vocation à servir de bouclier à lensemble de ses membres si lun dentre eux étaient attaqué. De ce fait ceux-ci ont le droit danalyser les risques quils pourraient prendre en admettant de nouveaux membres. Or, un élargissement dans des conditions mal maîtrisées pouvait affecter létat des relations internationales en Europe, en donnant à la Russie limpression que lOTAN restait, quoi quil arrive, son ennemie. Ensuite, lOTAN est une alliance, ce qui implique que les relations entre ses membres se doivent dêtre pacifiées. On sait sur ce point linfluence stabilisatrice qua eu lOTAN sur les relations gréco-turques. Or la situation extérieure, voire intérieure, des candidats nétait pas toujours simple.
Cest pourquoi lOTAN a dabord créé un programme spécifique au sein de la CSCE (future OSCE), le Partenariat pour la Paix. Celui-ci a été défini par le sommet de Bruxelles en janvier 1994. LOTAN conclut avec chacun des pays de lEst un accord de partenariat prévoyant notamment la transparence des budgets de défense, lacceptation dun contrôle parlementaire sur les forces armées, une coopération en matière de planification des armements et de formation des hommes ainsi que la participation à des exercices communs. Les partenaires non-membres de lOTAN forment, avec les membres de celle-ci, le Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA), qui apparaît comme lantichambre de lOTAN , lune des voies pour y adhérer.
De fait, au sommet de Madrid, trois de ces pays (la Pologne, la République tchèque et la Hongrie) ont été appelés par lOTAN à engager des négociations dadhésion. Celles-ci se sont déroulées rapidement. Début novembre 1998, les trois candidats ont adressé à lAlliance atlantique des lettres confirmant leur souhait de rejoindre lOTAN, dans lesquelles ils déclaraient partager les objectifs et les valeurs de lAlliance et prenaient lengagement daccepter son acquis juridique et politique, de participer pleinement à ses activités politiques et militaires, de contribuer aux dépenses communes selon une clé de répartition définie et de ne pas bloquer de futurs élargissements. Les protocoles dadhésion ont été signés le 16 décembre 1997 et ladhésion de la Pologne, de la République tchèque et de la Hongrie devrait être effective avant le prochain sommet de lAlliance, à Washington, en avril 1999.
Lappel de deux autres pays, la Roumanie et la Slovénie, souhaitée par une majorité de membres dont la France, na pu réunir un consensus et a été renvoyé au sommet de Washington. Il a été convenu cependant que lAlliance statuera en prenant en compte les développements positifs dans le sens de la démocratie et de la primauté du droit intervenus dans un certain nombre de pays dEurope du sud-est, en particulier la Roumanie et la Slovénie . Il est certain que la stabilité en Europe a tout à gagner à des adhésions de pays balkaniques dès lors que ceux-ci répondent aux conditions pour entrer dans lOTAN.
En tout état de cause, et quoi quil arrive, il est essentiel que lOtan ne devienne pas la source dun clivage en Europe entre ceux qui en seraient membres et ceux qui nauraient pas vocation à le devenir. En ce cas en effet, alors quelle a été créée pour répondre à une menace, elle renierait sa nature dinstrument de paix et de stabilité pour ses membres pour devenir la cause dune tension dont il nest pas certain quelle naurait pas vocation à senvenimer. De ce point de vue, il est indispensable quelle continue à affirmer sans ambiguïté que sa porte reste ouverte sans exclusive aux pays dEurope qui reconnaissent ses objectifs et ses valeurs.
Lélargissement de lOTAN à des pays dont léquipement militaire était bien loin de ses standards, et qui se trouvaient à lEst dun dispositif par ailleurs tourné contre la menace soviétique, a donné lieu à dautres divergences, en matière de coût et de financement.
Lan dernier, le présent avis se faisait lécho dun rapport du Département dEtat américain au Congrès qui chiffrait le coût de lélargissement entre 10 et 13 milliards de dollars à la charge des nouveaux membres pour la restructuration de leurs forces armées -soit entre 6 et 7,5 % de leur PNB - , 8 à 10 milliards de dollars à la charge des membres actuels pour le renforcement de leurs capacités de projection, et 9 à 12 milliards à la charge de lAlliance pour le renforcement de ses infrastructures. Au total, les montants étaient compris entre 27 et 35 milliards de dollars, cest-à-dire, au cours actuel, entre 159 et 206 milliards de francs. Cette étude pouvait par ailleurs apparaître comme raisonnable puisque par exemple le bureau du budget du Congrès américain avait conclu, lui, à un coût compris entre 61 et 125 milliards de dollars.
Aujourdhui cependant, la question du coût de lélargissement apparaît comme réglée, de façon raisonnable et cohérente.
A lautomne dernier, les experts de lOTAN avaient en effet effectué leur propre étude. Celle-ci estimait à 1,2 et 1,6 milliard de dollars sur dix ans les coûts directs pour lAlliance de lélargissement à respectivement trois et cinq pays, coûts sans rapport avec les chiffres très supérieurs évoqués précédemment.
Leurs travaux, prenant en compte le contexte stratégique nouveau depuis la fin de la guerre froide, estimaient que les moyens à mettre en oeuvre sétaient beaucoup allégés, et que les moyens nouveaux destinés aux missions nouvelles de lOTAN au service de la paix devraient pour lessentiel être financés par le redéploiement des ressources existantes.
De ce fait, il ressort que les nouveaux membres sont dores et déjà en mesure dapporter une contribution sérieuse à leur propre défense et aux missions de lAlliance, et que les lacunes de leurs capacités pourront être traitées progressivement. Dans ce cadre, la modernisation de leurs forces est bien entendu pour lessentiel à leur charge.
Par ailleurs, il apparaît que les membres actuels disposent dores et déjà de moyens suffisants, notamment en terme de projection et de renforcement, pour faire face à lélargissement.
Reste alors la question des coûts communs, qui sont pour lessentiel des coûts dinfrastructure pour le développement de linteropérabilité entre forces alliées, et concernent donc les systèmes de communication, de commandement et de contrôle, la défense aérienne et les capacités de renforcement. A la suite des travaux des experts, le Conseil atlantique réuni en session des ministres des Affaires étrangères, puis le Sommet de Madrid ont évalué ces coûts à 7,6 milliards de francs étalés sur 10 ans, soit un peu moins de 9 milliards de francs si lon tient compte des frais de fonctionnement induits.
Ces ordres de grandeur ont été jugés raisonnables par tous les alliés. La question des coûts de lélargissement de lOtan est ainsi réglée à la satisfaction générale, y compris celle de votre rapporteur qui avait suggéré que telle soit la solution.
Le renforcement du poids de lOTAN en Europe va de pair avec sa redéfinition. Si lalliance défensive entre les seize pays membres prévue par larticle 5 nest aucunement remise en cause, le nouveau contexte stratégique, et en particulier la mise en oeuvre effective de l Acte fondateur OTAN-Russie, amène lOtan à cesser de centrer ses missions sur la mise en oeuvre de cet article et à assumer au contraire de nouvelles missions.
De fait, sagissant de l Acte fondateur , les structures prévues ont été mises en place et des programmes de travail définis. Des consultations régulières ont lieu sur des sujets commun et un climat de confiance sest établi. Ainsi, le Conseil permanent OTAN-Russie a pu traiter de sujets tels que la coopération en Bosnie-Herzégovine dans le cadre de la SFOR, la situation au Kosovo, des opérations conjointes de maintien de la paix, la non-prolifération darmes de destruction massive, la reconversion dofficiers, les infrastructures militaires ou la maîtrise des armements conventionnels. Par ailleurs une mission militaire russe est désormais présente au QG de lOTAN, à Mons.
Aussi laccent est désormais mis sur larticle 4 du Traité de Washington, qui prévoit une concertation entre les alliés sur tous les problèmes de sécurité et dont le champ géographique, contrairement à celui de larticle 5, nest pas limité à la zone couverte par les territoires des Etats membres.
Le nouveau concept stratégique défini au sommet atlantique de Rome, en novembre 1991 établit ainsi, à côté des forces de défense principales, composées de corps multinationaux stationnés en Europe, des forces de réaction rapide qui pourront être déployées hors de la zone de lOTAN.
Parallèlement à cette évolution, lOTAN a décidé, en juin 1992, de se donner la possibilité dintervenir hors zone en appui aux activités de maintien de la paix entreprises sous la responsabilité de la CSCE.
La première mise en oeuvre effective de larticle 4 a été lintervention de lOtan en ex-Yougoslavie sur mandat de lONU, dabord pour faire respecter lembargo contre la Serbie et le Monténégro et linterdiction de survol au-dessus du territoire de Bosnie-Herzégovine (1993), puis pour faire appliquer les accords de paix de Dayton en 1996 au moyen dune force multilatérale, lIFOR. Aujourdhui encore, la paix civile nest assurée en Bosnie-Herzégovine que par la présence de la force de 37 000 militaires que lOTAN y entretient, désormais dénommée SFOR.
Lévolution du contexte européen se confirmant, avec la poursuite du développement de lidentité européenne, la diminution de la menace militaire immédiate et du risque dun conflit majeur, et en même temps la persistance, voire la multiplication, de petits conflits aussi meurtriers que localisés, de nouvelles mesures ont été prises.
Ainsi, lOTAN a décidé lors du sommet de Madrid, en juin 1997, de créer de nouvelles structures pour les nouvelles missions que sont les missions hors article 5 : les groupes de forces interarmées multilatérales (GFIM). Il sagit déléments détats-majors identifiés et projetables en cas dopération. Une cellule spécialisée, le CJPS (Combined joint planning staff), est chargée de leur planification.
Laffirmation de lidentité européenne a aussi conduit à décider, à la même occasion, la mise en place dun SACEUR-adjoint européen, chargé dassurer le relais avec lUEO pour la planification et la conduite de missions conduites par les seuls Européens, mais avec des moyens OTAN, dans le cadre de lUEO.
Au bout du compte, il a été également jugé nécessaire par les chefs dEtat et de gouvernement réunis au sommet de Madrid de réexaminer le concept stratégique de lAlliance pour ladapter à la nouvelle situation et aux nouveaux défis qui existent en Europe sur le plan de la sécurité . Les résultats des études et les propositions dactualisation devraient en principe être prêts pour le sommet de Washington davril 1999.
La question posée est en fait celle du rôle de lOTAN dans un contexte géographique et stratégique marqué par la disparition de ce qui avait suscité sa création.
Il apparaît que les principes fondamentaux du traité, la fonction de défense collective de lAlliance, le lien transatlantique, devront être maintenus. De même le rôle de la dissuasion nucléaire dans la défense des alliés ne saurait être réexaminé.
En revanche les modifications de lenvironnement stratégique intervenues depuis 1991, et notamment la reconnaissance du fait que la Russie nest plus un adversaire, doivent être prises en compte.
Il en est de même pour les évolutions majeures intervenues depuis cette date sagissant de lIdentité européenne de sécurité et de défense (IESD). Il sagit tout particulièrement des dispositions du Traité dAmsterdam sur les pouvoirs du Conseil européen en matière dorientations générales de la politique européenne de sécurité et de défense, de stratégies communes et dactions communes. Par ailleurs, on ne voit pas comment le nouveau concept pourrait ne pas traduire les décisions prises à Madrid sur le SACEUR-adjoint européen.
La question se pose aussi de la place de lOTAN au milieu des autres institutions internationales et européennes. On pourrait envisager que lOTAN élargisse ses compétences au-delà de celles dune organisation militaire, et puisse être dotée de la compétence pour déclencher une opération de rétablissement ou de maintien de la paix. On voit bien cependant que la recherche des équilibres européens ne passe pas par la seule OTAN. LOTAN ne permet pas forcément lexpression de toutes les alliances et inimitiés historiques, ni de toutes les forces qui permettent de stabiliser cet équilibre. Cest pourquoi lOTAN, aussi indispensable quelle soit, doit rester une organisation principalement militaire, et ne pas pouvoir décider seule du déclenchement dune opération de maintien de la paix.
Le présent rapport, posant lan dernier la question de lintérêt de la réintégration de la France dans lorganisation militaire intégrée, question alors dactualité, concluait par la négative.
La France, on le sait, reste une puissance dont la sécurité extérieure ultime repose sur une force nucléaire autonome, elle-même fondée sur un principe spécifique, la réponse du faible au fort. De là vient que sa défense est dabord nationale.
Du fait de cette doctrine, la situation spécifique des Français ne leur a dans le passé guère posé de difficultés opérationnelles. Tel na plus été le cas lors que lOTAN a entrepris de mettre en place, avec leur concours, des opérations de maintien ou de rétablissement de la paix. Les militaires français se sont alors retrouvés, malgré les apparences, sur les marges dun dispositif de commandement parfaitement fonctionnel et intégré, et de ce fait soumis à une hiérarchie militaire extérieure où la France navait aucune prise.
Depuis cette époque, qui nest pas si ancienne puisque cest celle de lIFOR, les officiers français ont pris lhabitude de travailler avec lOTAN. Les manuels sont parfois revus en commun. Comme notre collègue François Lamy la relaté à la Commission de la Défense au retour dune mission en Bosnie-Herzégovine, dans lactuel dispositif SFOR, les Français, qui sont à la tête de la Division multinationale sud-est, ne sont en aucun cas marginalisés. Au sein de cette division, des bataillons communs avec dautres pays ont été créés. Ainsi le bataillon dhélicoptères, basé à Ploce, est organisé à partir du roulement indifférencié déquipages français, allemands, italiens et espagnol, les uns et les autres travaillant en commun.
Les Français sont désormais partie prenante aux GFIM, les états-majors interarmées projetables dans le cadre des missions hors article 5, ainsi quau CJPS. Ce sont même les officiers membres des missions françaises auprès des états-majors OTAN qui y représentent la France.
Par ailleurs, lorganisation militaire intégrée se présente comme une chaîne exclusivement militaire de commandement qui remonte jusquau Conseil atlantique, dont elle applique avec une très grande autonomie daction les ordres qui sont en fait très généraux. Ce système, lié à la nécessité, pendant la Guerre froide, de pouvoir appliquer de façon immédiate un ordre du Conseil daller arrêter lennemi à la frontière de lAlliance, a survécu à celle-ci. De ce fait, les ordres auxquels obéit, au fur et à mesure que la situation évolue, le contingent sur le terrain, sont ceux de la chaîne militaire, laquelle aboutit au commandement régional (pour la Bosnie, le Commandement Sud), puis au SACEUR (Commandement stratégique Europe), qui est tenu par un Américain.
Or, il apparaît de façon de plus en plus criante que cette organisation est inadaptée aux missions autres que celles de larticle 5, et notamment aux missions de maintien de la paix. En effet, il y a une différence de nature entre la défense du sol national et de la liberté de la nation et lenvoi de soldats à létranger. Eu égard à lurgence, à la gravité des enjeux, à lampleur aussi de la concession de lallié doutre-atlantique qui avait envoyé ses appelés partager le sort de la liberté de ses alliés, il pouvait être envisagé que des pays souverains consentent eux mêmes aux véritables abandons de souveraineté que représentait la mise sous les ordres de SACEUR de leurs forces nationales. Tel nest pas le cas pour des missions de maintien de la paix.
De fait, en Bosnie-Herzégovine, la France, pour éviter que ses forces soient sous le contrôle exclusif de SACEUR, a créé la fonction de COMFRANCE ; le général COMFRANCE, qui est le général français le plus haut placé dans la hiérarchie de la SFOR, cest-à-dire actuellement le Commandant-adjoint, se voit attribuer, outre ses fonctions au sein de la SFOR, les attributions de correspondant de létat-major des Armées. Il dispose pour cela dadjoints relevant de lui indépendamment du commandement de la SFOR. Lun deux est spécifiquement chargé de vérifier les conditions demploi des forces françaises par la SFOR, le général COMFRANCE faisant sur ce point rapport directement à lEtat-major des Armées. Cette solution permet de maintenir les forces françaises sous le contrôle politique des autorités françaises, ce qui ne serait pas possible par la chaîne normale de lOTAN .
Or, le contrôle politique spécifique que la France a pu ainsi établir du fait de sa position singulière dans lOTAN, bien loin de susciter la commisération pour les sacrifices quil impose par ailleurs -la France nayant pas de poste dans lorganisation intégrée- semble au contraire faire des émules.
En effet, les Allemands viennent dinstaurer, sur le modèle français, un COMALLEMAGNE chargé de mettre en oeuvre pour les forces allemandes le même système de vérification dont dispose la France. A lappui de cette novation, ils invoquent larrêt de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe qui nautorise lenvoi de forces à létranger quaprès un vote exprès du Bundestag et pour le mandat quil définit. Lenvoi de troupes en Bosnie-Herzégovine relevant de ce cas de figure, les Allemands font valoir quils doivent disposer dune instance capable dévaluer en permanence la conformité de la mission au mandat donné par le Bundestag.
Ainsi, on voit bien que dans ces opérations qui ne concernent plus la garantie de leur propre sécurité mais au contraire représentent des contributions qui leur sont demandées pour tenter de contrôler et réduire des conflits dans le cadre de la sécurité globale de la planète, les pays participants retrouvent naturellement la volonté dun contrôle diplomatique de leurs forces.
Un nouvel exemple de cette analyse peut être fourni à travers la réaction des alliés à la décision de lOTAN de frapper la Serbie, sans forcément demander un mandat spécifique au Conseil de sécurité. En effet, les Allemands, puis les Italiens ont approuvé la décision. Ils ont cependant ajouté que lenvoi de forces de leur part était soumis à un vote de leur Parlement respectif !
Ces éléments font sérieusement douter que laffirmation du rôle de la France dans les opérations de maintien de la paix sur le continent, y compris dans le cadre de lOTAN, doive passer par une réintégration dans le commandement intégré. A vrai dire, on pourrait sans doute même se demander si le contexte nouveau permet encore de parler en ces termes. Une illustration supplémentaire peut en être fournie par lexamen des budgets de lOTAN et de la part que la France y prend.
Le budget de lOTAN a été, en 1998, de 9,386 milliards de francs. En fait, il se divise en trois. Le budget civil aura représenté 956 millions de francs. La France, membre à part entière, y participe à hauteur de 16,5 %, soit 154 millions de francs en 1998 ; le budget civil devrait être à peu près reconduit lan prochain.
Le budget militaire, qui recouvre les coûts de fonctionnement, aura, lui, représenté, 4,16 milliards de francs. La France y participe davantage depuis le 5 décembre 1995, mais de façon encore partielle et sur la base de clefs de répartition complexes : la part française en 1998 aura été de 188 millions de francs alors que lapplication de sa quote-part devrait aboutir à un total de 680 millions de francs. Selon le ministère de la Défense (la contribution à ce budget constitue larticle 65 du chapitre 36-01 de son titre III), elle sera de 239 millions de francs en 1999, en hausse de 27 %. Il faut noter que cette hausse constitue une régularisation de la part française, le budget militaire ne passant de 1998 à 1999 de 4,16 à 4,35 milliards de francs.
Le budget dinfrastructures est du même ordre que le budget militaire : 4,27 milliards de francs en 1998. Cependant, la participation française aux différents équipements seffectue sur une base ad hoc et selon des clefs de partage des coûts multiples. En pratique, la France participe aux frais des installations quelle utilise. De ce fait, alors quelle ny aura contribué quà hauteur de 170 millions de francs en 1998 (chapitre 54-40, article 35 du titre V du budget de la défense) elle y contribuera à hauteur de 211 millions de francs en 1999 (chapitre 54-41, article 63 du fait de la réforme de la nomenclature) soit une hausse de 38, 82 %.
Cette évolution est le signe que la France, sans être revenue au sein du commandement intégré, est de plus en plus partie prenante aux équipements de lOTAN, et donc que, tout en conservant son autonomie politique, elle les utilise de façon croissante. De fait, ceux-ci sont de plus en plus soit des équipements de surveillance aérienne et de commandement (lACCS par exemple, avec lequel le SCCOA de larmée de lair est compatible), soit des investissements liés aux nouvelles missions de maintien de la paix.
Par ailleurs, il y a sans doute là aussi le signe dune poursuite de lévolution interne de lOTAN qui rend sans doute de plus en plus obsolète lanalyse en termes de commandement militaire intégré au sens où on avait lhabitude de la formuler.
II. LES CONTRADICTIONS DE LUEO
LUEO est la plus ancienne organisation de sécurité en Europe. Fondée en mars 1948, elle est au départ une alliance défensive. Jusquen 1992, lUEO était composée de la France, de lAllemagne, de lItalie, des pays du Bénélux, de lEspagne, du Portugal et de la Grande-Bretagne. Cependant, le poids pris par lOTAN dans la défense de lEurope de lOuest en avait fait une institution en sommeil. LUEO restait malgré tout la seule institution européenne compétente en matière de défense. Lévolution du contexte européen suscita lidée de la ranimer.
Les objectifs divergeaient cependant. A la volonté de la France qui souhaitait en faire le cadre dune Europe de la défense sopposait notamment la conception britannique qui voulait en faire une sorte de succursale de lOTAN. Au bout du compte, il a été décidé à Maastricht, sous la pression de la France, de rapprocher politiquement lUEO de lUnion européenne, tandis que, sous la pression britannique, elle se rapprochait militairement de lOTAN.
Dans cette double optique, ces dernières années ont vu le renforcement des capacités dintervention de lUEO.
Le développement opérationnel de lUEO a dabord pour but de doter celle-ci des outils nécessaires à laccomplissement des missions dites de Petersberg : missions humanitaires ou dévacuation des ressortissants, mission de maintien de la paix, voire de rétablissement de la paix.
Elle a été dotée dun centre satellitaire, installé en Espagne à Torrejon, chargé dune mission de surveillance générale sur des zones intéressant lUEO. Ce centre est devenu opérationnel en 1995.
En mai 1997, il a été décidé détablir un comité militaire de lUEO. Celui-ci est constitué des Chefs détat-major des armées des pays membres et est responsable devant le Conseil de lUEO. En session permanente, chaque Chef détat-major est représenté par un délégué militaire. Lorganisation a été affinée lors de la réunion ministérielle de Rhodes, en mai 1998 ; le conseil des délégués militaires est présidé par un officier général, président du Comité des délégués militaires et directeur de létat-major de lUEO ; le président du Comité des délégués militaires est assisté dun élément de soutien et dune cellule de planification et dispose du centre satellitaire.
LUEO reste cependant une institution aux moyens modestes : en 1998, son budget aura été de 220 millions de francs, soit 2,3% du budget de lOTAN. La contribution française, de 36,85 millions de francs (16,75 %) figure au chapitre 42-31 du budget des Affaires étrangères.
De fait, lUEO ne dispose en propre ni de forces ni des structures de commandement permanentes. En revanche, les Etats membres et associés ont désigné chacun des unités et des états-majors, dénommées génériquement FRUEO (forces relevant de lUEO), quils seraient prêts à mettre à la disposition de lUEO pour ses différentes missions.
Il sagit dabord des diverses forces multinationales européennes. Se trouve dans ce cas le Corps européen. Y participent désormais la France, lAllemagne, la Belgique, le Luxembourg et lEspagne. Créé en 1992, il rassemble jusquà 54 000 hommes ; son état-major, de 150 officiers, dispose aujourdhui de capacités opérationnelles comparables à celles de létat-major du Corps de réaction rapide de lOTAN (ARRC). Il fournit actuellement des éléments à la SFOR en Bosnie-Herzégovine.
Font également partie de cette catégorie les Euroforces (France, Italie, Espagne et Portugal), créées le 15 mai 1995. LEurofor (Force opérationnelle rapide européenne) est une force terrestre daction rapide qui peut aller jusquau volume dune division légère, chaque nation contribuant à la hauteur dune brigade. Elle est constituée de forces pré-identifiées. La planification, la préparation, voire la conduite de ses opérations, sont de la responsabilité dun état-major, léger mais renforçable, de 50 officiers, basé à Florence. LEuromarfor, force navale non permanente, ne dispose pas de structures de commandement propres mais sappuie en cas dactivation sur des moyens nationaux fournis par le pays auquel a été confié le commandement, selon le principe de rotation.
Depuis quelques années, à la suite de ces initiatives, les forces multinationales se sont multipliées : les Allemands et les Britanniques ont ainsi établi avec les Belges et les Néerlandais une division multinationale ; une force amphibie britannico-néerlandaise et une autre italo-espagnole ont été constituées ainsi quun corps germano-néerlandais. Toutes ces unités ont été désignées comme FRUEO.
Enfin, le rapprochement entre lOTAN et lUEO permet désormais à lUEO de disposer des moyens et capacités de lOTAN. En effet, lOTAN a décidé de pré-identifier des forces séparables mais non séparées qui pourront être utilisées dans le cadre de lUEO. Pour la planification des missions UEO, un poste de SACEUR-adjoint européen a été créé. LUEO sera désormais associée aux différentes phases du cycle détablissement des plans de lOTAN. Enfin, parmi les moyens de lOTAN que lUEO pourra utiliser figurent le système de communication intégré et les GFIM.
Le renforcement des capacités opérationnelles de lUEO contraste cependant avec des difficultés de décision qui ne doivent pas être sous-estimées. En effet, du fait de son rapprochement avec lUnion européenne et lOTAN, elle compte désormais quatre catégories de membres :
les membres de plein exercice (dix, les neuf anciens auxquels sest ajoutée la Grèce, tous membres de lUnion européenne et de lOTAN) ;
les observateurs (les membres de lUnion européenne neutres, donc non membres de lOTAN -Suède, Finlande, Irlande et Autriche-, ainsi que le Danemark, membre de lUnion européenne et de lOTAN, mais qui récuse toute idée de défense européenne hors de lOTAN) ;
les associés (membres de lOTAN, mais pas de lUnion européenne -Islande, Norvège, Turquie-) ;
les associés partenaires (dix pays dEurope de lEst, membres du Conseil de Partenariat euro-atlantique, ayant vocation à entrer dans lUnion européenne et lOTAN).
Or, alors même que larticle 8 du Traité de Bruxelles ne limpose pas nécessairement, lUEO a pris lhabitude de statuer par consensus : elle nagit que si tout le monde est daccord. Si tel nest pas le cas, elle ne peut agir.
Cette doctrine est source de difficultés. Ainsi, faute de consensus, lopération Alba en Albanie, en 1997, a du être menée hors de lUEO, alors même que celle-ci avait les capacités nécessaires pour cela.
LUEO est la seule institution européenne qui dispose de pouvoirs organisés en matière de défense. En effet, si le traité dAmsterdam a donné au Conseil européen des pouvoirs en matière dorientation de la politique européenne et de défense, seule lUEO dispose de moyens dexécution. Il serait donc dommage quune incapacité à décider empêche toute action ayant son origine en Europe de dépasser le caractère multilatéral pour acquérir une visibilité proprement européenne. Cest pourquoi la volonté opiniâtre du Gouvernement français dy introduire, malgré les résistances à affronter, le principe dabstention constructive, afin den faire un élément essentiel de laffirmation progressive de lidentité européenne de sécurité et de défense, doit être soutenue.
III. VERS LAGENCE EUROPÉENNE DE LARMEMENT
On sait désormais que la coopération européenne est une nécessité pour permettre une meilleure maîtrise des programmes darmement, seule à même dassurer la compétitivité économique des industries de défense et le maintien de lemploi en leur sein. Eu égard aux coûts croissants des armements, cette coopération est même indispensable pour les grands pays européens sils veulent disposer de capacités dintervention en rapport avec leur puissance économique et leur influence diplomatique.
Cest lUEO qui avait été choisie pour être le moteur de ces coopérations industrielles, dans le cadre de lEurogroupe puis du GAEO (Groupe Armement de lEurope occidentale). Le GAEO est une instance à treize (les dix UEO/OTAN/Union européenne et les trois UEO/OTAN). Mais il a été jusquici impossible, au sein du GAEO, dinstituer une Agence européenne de larmement.
En effet, les travaux ont buté sur la difficulté de remettre en cause le principe du juste retour industriel, aux termes duquel chaque pays doit recevoir, programme par programme, une part de travail correspondant au montant de ses commandes. En fait, le principe du juste retour est très favorable aux acheteurs les moins développés puisquil impose que leur soit donnée pour chaque commande une part du travail, alors quils nont ni les compétences, ni les équipements pour cela. Cest ainsi pour eux un facteur de progrès technologique et demploi. En revanche les pays dotés dune puissante industrie darmement sont obligés daccepter de confier à dautres des tâches quils savent faire. De ce fait, le principe du juste retour est générateur de surcoûts considérables et empêche toute rationalisation compétitive des industries darmement.
Devant les difficultés, la France et lAllemagne, immédiatement rejoints par lItalie et la Grande-Bretagne, ont créé en novembre 1996 un organisme fondé sur ces nouveaux principes dacquisition, lOrganisme conjoint de coopération en matière darmement (OCCAR). Il faut noter que ces quatre pays représentent ensemble plus de 80 % de la production européenne darmement.
LOCCAR a été installé à Bonn. Dans un premier temps, y ont été intégrés les programmes franco-allemands (lhélicoptère Tigre, les missiles Roland, Hot et Milan). Progressivement, devraient sy ajouter les autres programmes en coopération, à commencer par le véhicule blindé de combat dinfanterie (VBCI), et des satellites de communication.
Les programmes sont conduits par une structure réduite. Chaque programme sera dirigé par une direction de programme intégrée et internationale, y compris dans ses relations avec les états-majors. Une fois les programmes définis, des appels doffre seront lancés. La restructuration actuelle des industries européennes darmement permet dores et déjà de penser quà leuropéanisation des directions de programmes correspondra celle des fournisseurs, et quen pratique cest à travers la répartition du travail entre les usines et les filiales de ceux-ci que se réalisera, de façon pragmatique, la diffusion des retombées industrielles.
Cependant, le développement de lOCCAR suppose que lui soit attribuée la personnalité juridique, qui peut seule lui conférer lautonomie contractuelle. Devant la réticence de lUEO à attribuer à lOCCAR le statut dorgane subsidiaire de lUEO, les quatre pays fondateurs ont signé le 9 septembre 1998 une convention quadrilatérale lui accordant cette personnalité. LOCCAR apparaît donc désormais comme linstitution structurante en matière dEurope de larmement et le principal organe précurseur de lAgence européenne de larmement. De ce fait, lOCCAR reste ouvert à tout pays qui en accepte les règles de fonctionnement et participent à un programme significatif. La candidature de la Belgique et des Pays-Bas est à létude.
IV. LINDISPENSABLE OSCE
LOSCE est la plus large institution dEurope puisquelle regroupe 55 pays, soit tous les pays du continent, et même au-delà puisque les pays issus de lex-URSS en font tous partie, ainsi que les Etats-Unis et le Canada. La République fédérale de Yougoslavie en est suspendue depuis le 7 juillet 1992.
De par son passé LOSCE est dabord lirremplaçable enceinte de consultation et de développement de la confiance entre ses membres. Son Forum permanent de coopération en matière de sécurité (FCMS) est ainsi chargé de connaître tous les problèmes politico-militaires pouvant se présenter, dharmoniser les efforts de désarmement, daméliorer la transparence et la confiance sur les territoires des participants, détablir un code de conduite des rapports politico-militaires et dorganiser des négociations entre participants dune même région.
Mais elle est aussi une véritable organisation. A ce titre, elle joue un rôle dans le domaine du désarmement (le Traité sur la réduction des forces conventionnelles en Europe -Traité FCE- y est rattaché). De même, elle sest dotée dès 1992 de capacités de prévention et de gestion des crises : elle a ainsi créé un Haut Commissariat aux minorités, chargé de détecter et de désamorcer les facteurs de tension dus aux minorités nationales, et un Bureau international des droits de lHomme (BIDDH). LOSCE dispose même du statut dorganisation régionale de sécurité, au sens du chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, ce qui pourrait lui permettre dintervenir, par exemple en actionnant lOTAN ou lUEO, dans la perspective du règlement de conflits.
La spécificité de lOSCE est ainsi de réunir lensemble des pays européens, de les réunir sur un pied dégalité, et aussi de les avoir réuni sur des bases pacifiques et de compréhension dès lépoque de la Guerre froide. De ce fait cest la véritable institution où peut saffirmer la coopération pacifique et de la compréhension en Europe.
Le caractère indispensable de lOSCE aujourdhui peut se déduire de lévolution de son budget et de ses missions. Son budget est en effet passé de 160 millions de francs en 1995 à 725 prévus en 1999, soit une multiplication par 4,53 en quatre ans. La France y cotise pour 9 % (budget ordinaire) ou 10,34 % (pour les opérations importantes), soit un montant de 50 à 70 millions de francs sur le chapitre 42-31 du budget des affaires étrangères. Il est par ailleurs remarquable que cette augmentation soit exclusivement due au développement du rôle opérationnel de lOSCE : le budget est aux quatre cinquièmes consacré aux missions dobservation ou de négociation.
La localisation de ces missions est elle-même révélatrice : lOSCE est présente en Bosnie-Herzégovine, où elle a assuré lintégralité de lorganisation des élections de septembre 1998, en Croatie, où la définition de sa mission en Slavonie orientale va être renforcée, en Moldavie où elle est garante du mémorandum daccord du 8 mai dernier entre les parties, en Biélorussie, dans le Caucase, en Macédoine. Tout récemment, dans le cadre de laffaire du Kosovo, alors que limpasse diplomatique était totale et que lOTAN, semble-t-il ne voyait plus de solution que dans une intervention militaire unilatérale sans mandat spécifique sur le sol dun Etat souverain, situation dont on peut imaginer de quels déséquilibres elle était porteuse, le président Milosevic a accepté lenvoi dune mission de 2 000 observateurs de lOSCE. Laffaire est entendue : lOSCE est linstitution qui réunit tous les pays de la grande Europe et qui seule dispose de la légitimité nécessaire pour tenter de résoudre le plus prudemment possible les difficultés les plus graves de ses zones de crise.
Cest pourquoi la France estime quau-delà de ces deux rôles de forum et dorganisation de négociation de lEurope avec elle-même, lOSCE a aussi à jouer un rôle de socle normatif en matière de sécurité européenne. Une Charte de sécurité européenne ne créera déquilibre consenti que si tous les acteurs de lEurope ont pu participer à sa négociation. Cette formulation suffit à montrer tout lavenir quil faut donner à lOSCE.
DEUXIÈME PARTIE
LA RÉFORME DE LA COOPÉRATION
MILITAIRE ET DE DÉFENSE
Seule une grande puissance est en situation davoir une politique de coopération militaire et de défense. La France dispose dune telle politique.
Elle en a défini les orientations principales : aide à des pays moins développés pour définir et mettre en uvre leur politique de défense et les éléments de sécurité nécessaires à leur développement, soutien à lévolution démocratique et au respect de l'Etat de droit, contribution au développement de la sécurité internationale, mais aussi application des accords de défense et de coopération signés par la France, et encore accompagnement des exportations de matériels de défense et de la coopération en matière darmement et contribution à la lutte contre les nouveaux risques affectant la sécurité intérieure de notre pays.
Votre rapporteur avait cependant, lors de son premier rapport, lan dernier, déploré léclatement de cette politique et, par certains aspects, son incohérence.
I. UNE MODERNISATION INDISPENSABLE
Il apparaissait que la coopération militaire était répartie entre trois départements ministériels. La coopération avec les pays dits du champ , cest-à-dire les anciennes colonies françaises dAfrique subsaharienne, élargies aux pays ACP, relève du ministère ou du secrétariat dEtat à la coopération, qui dispose à ces fins dune structure spécifique, la Mission militaire de Coopération. La coopération avec le reste du monde (dits pays hors champ ) relève du ministère des Affaires étrangères qui dispose à cette fin de la Sous-Direction de laide militaire. Enfin, le ministère de la Défense mène également des actions de coopération dans les pays dAfrique où la France entretient, en vertu daccords de défense, des troupes prépositionnées.
On faisait apparaître aussi quà cet éclatement correspondaient des moyens extrêmement contrastés : alors quau projet de loi de finances pour 1998 703 millions de francs étaient inscrits pour le compte de la MMC, 86,1 millions de francs seulement étaient inscrits au budget des Affaires étrangères pour la coopération avec le reste du monde, autrement dit un potentiel de 80 pays. Par ailleurs, de façon moins bien définie, les sommes consacrées à la coopération militaire par le ministère de la Défense semblent se situer entre 100 et 200 millions de francs.
Cette invraisemblable disparité se traduit clairement en termes de moyens. En 1998, la MMC aura disposé pour lAfrique subsaharienne de 570 assistants militaires techniques tandis que le ministère des Affaires étrangères nen aura eu que 67 ; 44 postes étant consacrés au Maroc et à la Tunisie, 23 seulement auront été affectés au monde non africain, soit un effectif plus faible que celui des seules missions dassistance militaire au Tchad (55 postes), en Mauritanie (42 postes) ou à Djibouti (34 postes).
Cette situation apparaissait comme peu satisfaisante, eu égard aux nombreuses opportunités qui souvrent hors dAfrique à la France en matière de coopération militaire et de défense.
En effet, les pays dEurope centrale et orientale ont à peu près tous entrepris la refonte de leur organisation militaire et la réduction du format de leurs armées, notamment dans la perspective de leur entrée dans lOTAN. Ce contexte nouveau ouvre lopportunité dune nouvelle offre de coopération militaire à destination de ces pays.
De nouveaux modes de coopération se mettent en place. Dans tels pays de lEurope orientale, certains de nos partenaires, au lieu de dépêcher des attachés de défense, ont détaché des coopérants militaires au sein des états-majors, qui mettent en oeuvre de nouveaux modes de formation des élites des pays bénéficiaires, avec une efficacité plus grande des dispositifs en vigueur.
La transformation du Conseil de coopération nord-Atlantique en Conseil de partenariat euro-Atlantique saccompagne aussi de lélaboration de programmes de coopération militaire qui seront ainsi proposés aux pays demandeurs. Les pays qui assureront la coopération seront ceux qui auront inséré leurs propositions dans ces programmes et auront développé ceux-ci.
Les pays dits émergents dAmérique du Sud ou dAsie du Sud-Est sont à la recherche de partenaires solides et éprouvés. Auprès de tels pays comme le Brésil, le Chili, Singapour ou Taïwan, lenvoi de coopérants de défense peut avoir des conséquences extrêmement positives en matière dexportation darmement français, et donc dactivité industrielle et demplois.
En conclusion, il était regretté que, du fait de cet éclatement, la capacité de formation militaire de la France, partout reconnue, reste limitée à lAfrique et pour une bonne part, à ses méthodes les plus traditionnelles.
Une ouverture était donc souhaitée. Il était suggéré que les deux coopérations puissent être regroupées, que le ministère des Affaires étrangères se rapproche de celui de la Défense et que des procédures dévaluation commune puissent être mises en place.
Lexamen du présent projet de loi de finances permet sur ce plan à votre rapporteur dexprimer le plus grand optimisme. En effet, suite au réexamen par le Gouvernement de la politique de coopération militaire de la France, notamment en Afrique, une réforme des structures de cette coopération est en cours. Si elle nest pas encore aboutie en termes administratifs, la fusion des budgets est déjà effective. Celle-ci a dores et déjà des conséquences positives sur les crédits accordés à la coopération militaire dite hors champ .
Sur le plan administratif, il semble établi que la Mission militaire de coopération et la Sous-Direction de laide militaire seront regroupées au sein dune Direction de la coopération militaire et de défense, et que celle-ci sera placée sous lautorité du Secrétaire général adjoint, Directeur général des affaires politiques de sécurité.
Cette Direction de la coopération militaire et de défense, selon lappellation envisagée, devrait maintenir un lien étroit avec le ministère de la Défense et avec celui de la Coopération et de la Francophonie. Conformément aux voeux exprimés dans le rapport pour avis de lan dernier, le ministère de la Défense devrait de ce fait être associé de façon beaucoup plus complète à lévaluation des actions de la MMC. Les premières évaluations quil a conduites ont montré quel rôle positif il pouvait jouer dans lévolution de celles-ci ; il est vrai quil reste, en tout état de cause, celui dont relève le domaine de compétence technique des coopérants militaires, et celui qui fournit les hommes. Ces liens permettront également dassurer la cohérence des coopérations opérationnelles de formation technique et de conseil, ainsi que celle de nos engagements juridiques.
Au sein de cette Direction cependant, une approche différenciée en fonction de la situation de nos partenaires sera maintenue. On comprend bien en effet que la France ne puisse avoir la même approche, ni même exactement les mêmes politiques, selon quelle a affaire à des pays dEurope par exemple, parfois membres des mêmes institutions quelle, lUnion européenne ou lOTAN, ou des pays dAfrique dont elle continue à assurer la sécurité. Il est clair notamment que, selon les cas, les interlocuteurs ne sont absolument pas les mêmes.
Cest pourquoi la nouvelle Direction comportera deux sous-directions chargés lune de la politique de coopération militaire (ce terme se référant plus spécifiquement à lancien secteur du champ ), lautre de la coopération de défense. Ainsi, les pays cibles pourront, au sein de la même direction, bénéficier du concours de lune ou lautre selon leurs besoins.
Enfin, et cest un élément essentiel de rapprochement et de la fusion des deux coopérations et de leur dynamisation lune par lautre, un pôle commun regroupera les moyens nécessaires à la mise en oeuvre des actions des deux sous-directions, autrement dit le budget, la gestion des assistants militaires techniques, les stages et laide directe.
La première étape de la réforme a été la fusion des budgets. Celle-ci est effective dans le projet de loi de finances pour 1999.
En 1998, les crédits de la coopération de défense constituaient le chapitre 42-29 du budget du ministère des Affaires étrangères. Ce chapitre était lui-même subdivisé en deux articles, larticle 10 consacré aux actions de coopération à létranger et larticle 20 à la formation des stagiaires étrangers. Les crédits de la coopération militaire (cest-à-dire ceux de la MMC) constituaient le chapitre 41-42 du budget du ministère délégué à la Coopération et à la Francophonie et étaient ventilés en quatre articles, consacrés respectivement à lassistance technique militaire -cest-à-dire laide aux personnels - (article 10), la formation des stagiaires militaires étrangers - (article 20), lassistance technique et la coordination cest-à-dire le financement des missions dassistance locale - (article 30) et à laide en matériel et à lentretien des infrastructures - (article 40).
La réforme a supprimé le chapitre 41-42 et regroupé lensemble des crédits au chapitre 42-49. En revanche, au sein du chapitre 42-29 rénové, les crédits sont désormais ventilés en quatre articles, comme dans lancien chapitre 41-42.
Une difficulté persistante dont se plaignait la MMC était quelle ne disposait que de crédits de flux, son budget relevant intégralement de larticle 41-42 donc du titre IV (subventions de fonctionnement), et non de crédits qui lui auraient permis de subventionner des investissements (crédits du titre VI). De ce fait, si elle pouvait, en application de larticle 40 du chapitre 41-42, subventionner lentretien décoles ou de centres de formation militaire, par exemple, elle ne pouvait pas subventionner leur construction ou leur extension. Huit millions de francs ont donc été transférés en crédits de paiement au chapitre 68-80, sur une ligne nouvelle contributions aux actions de coopération militaire , pour permettre ce nouveau type daction.
Enfin, les crédits de déplacement des personnels de ladministration centrale ont été transférés au chapitre adéquat du ministère, soit le 34-90.
Le premier signe que cette fusion est bien effectuée dans le sens de la rénovation de la coopération militaire et de défense française est que, pour la première fois depuis plus de dix ans, elle se fait non pas dans le cadre dune diminution, mais dun maintien global du budget, cest-à-dire, en francs courants, au franc près :
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COOPÉRATION MILITAIRE ET DE DÉFENSE
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BUDGET VOTÉ DE 1998
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(en francs)
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Chapitre 41-42 (MMC)
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703 315 000
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Chapitre 42-29
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86 119 000
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Total
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789 434 000
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PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999
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(en francs)
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Chapitre 42-29
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780 534 000
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Chapitre 68-80
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8 000 000
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Chapitre 34-90(1)
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900 000
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Total
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789 434 000
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(1) Crédits non individualisés
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Par ailleurs, second signe tangible, un redéploiement est accompli au profit de la coopération de défense. 28 millions sont en effet transférés de la MMC vers le service de laide militaire du ministère des Affaires étrangères pour la coopération dite hors champ.
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COOPÉRATION MILITAIRE (MMC)
ÉVOLUTION DES DOTATIONS
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(en francs)
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Libellé
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Dotation 1998
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Dotation 1999
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Evolution
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Coopération technique - aide en personnel
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402 035 086
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373 235 086
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- 7,2 %
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Formation des stagiaires étrangers
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104 264 933
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105 300 000
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+ 1 %
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Appui aux missions de coopération
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17 014 981
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15 979 914
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- 6,1 %
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Aide en matériel et entretien des infrastructures
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180 000 000
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172 000 000
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NS(1)
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Total
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703 315 000
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666 515 000
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- 3,97 %
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(1) En 1999, les 8 millions de francs transférés du chapitre 42-29 vers le chapitre 68-80 seront consacrés intégralement à des actions conduites par la MMC.
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COOPÉRATION DE DÉFENSE (SAM)
ÉVOLUTION DES DOTATIONS
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(en francs)
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Libellé
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Dotation 1998
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Dotation 1999
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Evolution
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Coopération technique - aide en personnel
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58 640 000
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+ 26,7 %
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Formation des stagiaires étrangers
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51 650 000
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+ 50 %
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Appui aux missions de coopération
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3 029 000
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NS(1)
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Aide en matériel et entretien des infrastructures
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700 000
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NS(1)
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Total
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86 119 000
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114 019 000
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+ 32,5 %
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(1) La ventilation 1998 nest pas comparable avec la ventilation 1999
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COOPÉRATION MILITAIRE ET DE DÉFENSE
DOTATION 1999 (CHAPITRE 42-29)
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(en francs)
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Article
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Libellé
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Dotation 1999
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10
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Coopération technique - aide en personnel
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431 875 086
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20
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Formation des stagiaires étrangers
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156 950 000
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30
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Appui aux missions de coopération
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19 008 914
|
40
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Aide en matériel et entretien des infrastructures
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172 700 000
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Total
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780 534 000
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Le budget de la coopération militaire avec lAfrique subsaharienne diminue aussi de 4 % environ, tandis que celui de la coopération de défense augmente de 32,5 %. La coopération de défense, qui représentait 12 % de la coopération militaire en 1998, en représente 17 % en 1999. Il sagit là dun revirement majeur dont on ne peut que se féliciter et qui devra être poursuivi.
De fait, cette réforme est bien la traduction de la réorganisation et de la réorientation de la politique de coopération militaire et de défense, et le rééquilibrage constaté est bien le résultat de la constitution des structures qui la mènent en instrument unique destiné à mettre en oeuvre avec efficacité une volonté politique rénovatrice.
En effet, le transfert de crédits effectué au profit de la coopération de défense est la première étape dun redéploiement qui doit prendre plus dampleur. Il apparaît que pour les trois prochaines années, un peu plus de 3 % des crédits affectés à la coopération militaire menée par la MMC devraient être redéployés annuellement vers les pays dits hors champ .
Cette double évolution, en structure et en crédits, rend désormais possible la formulation de façon crédible dune politique de coopération de défense et rend obligatoire la reformulation de la politique de coopération militaire avec les pays africains. On ne peut que sen réjouir.
II. LE RENOUVEAU DE LA COOPÉRATION DE DÉFENSE
La forte augmentation des crédits de la coopération de défense, de 32,5 %, est pour celle-ci le signe dun vrai renouveau.
ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE COOPÉRATION
DE DÉFENSE DEPUIS 1989
(en millions de francs)
La répartition des nouveaux moyens mis à sa disposition permet de constater quils sont demblée mis au service dune politique réfléchie et déterminée.
La priorité est lEurope centrale et orientale : 4 postes de coopérants militaires permanents y sont créés, augmentant de moitié leffectif actuel, qui passe de 8 à 12. Il sagit dun troisième poste en Pologne, un deuxième en Roumanie, un en Bulgarie, un en Estonie (en revanche le poste en Lettonie est supprimé) et un auprès du Partenariat pour la Paix.
La France dispose désormais dun officier expert technique auprès de chacun des états-majors de Pologne, de la République tchèque, de la Hongrie, de Slovaquie, Bulgarie et de Roumanie, soit de tous les anciens pays de lEst membres du Pacte de Varsovie. En Pologne et en Roumanie, elle fournit également un officier instructeur auprès de lenseignement militaire supérieur, comme aussi en Ukraine et en Estonie (au Collège interbalte de Tartu) ainsi quà lInstitut stratégique du Partenariat pour la Paix. Enfin, en Pologne, elle dispose dun troisième coopérant, un officier de lair, dans le cadre du renouvellement de la flotte polonaise davions de combat.
Limportance de la coopération militaire avec lEurope orientale dans le cadre des opportunités tant politiques que militaires ou commerciales que fournit son rapprochement avec lOTAN na donc pas échappé. Votre rapporteur, tout en souhaitant que ce mouvement samplifie pour atteindre un meilleur niveau opérationnel, se félicite de cette orientation.
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ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE COOPÉRANTS
DE DÉFENSE À LÉTRANGER
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1994/1995
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1995/1996
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1997/1996
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1998/1997
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1998/1999
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1999/2000
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Lettonie
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-
|
1
|
1
|
1
|
1
|
-
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Pologne
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1
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1
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1
|
1
|
2
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3
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Rép. tchèque
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
Slovaquie
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
Roumanie
|
-
|
1
|
1
|
1
|
1
|
2
|
Ukraine
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
1
|
Hongrie
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
1
|
Bulgarie
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
Estonie
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
PPP(1)
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
Maroc
|
82
|
67
|
50
|
30
|
30
|
30
|
Tunisie
|
16
|
16
|
14
|
14
|
12
|
12
|
Liban
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
2
|
Jordanie
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4
|
4
|
4
|
4
|
4
|
3
|
Arabie Saoudite
|
9
|
5
|
5
|
5
|
5
|
5
|
Emirats
|
2
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
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Egypte
|
-
|
-
|
-
|
-
|
-
|
1
|
Qatar
|
8
|
4
|
4
|
4
|
4
|
4
|
Total
|
127
|
103
|
83
|
63
|
64
|
69
|
(1) Partenariat pour la Paix
Source : ministère des Affaires étrangères
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Hors dEurope cependant, une seule création de poste a lieu, en Egypte, pour la remise en condition dun centre de maintien de la paix. Il faut certes se féliciter de cette création, qui vient accompagner la redéfinition de la politique de la France en Afrique.
On peut aussi penser quau Maroc ou en Tunisie, dotés respectivement de 30 et 12 coopérants militaires, la priorité doit dabord être non pas au renforcement des effectifs mais au développement dune coopération à la fois plus proche des considérations opérationnelles et dun niveau qui tienne compte effectivement des réalités et situe clairement ces pays comme des partenaires : sur ce point, il faut mentionner que le bataillon marocain de la SFOR en Bosnie-Herzégovine ne reçoit que des éloges pour son efficacité.
Le même raisonnement peut être également tenu pour le Moyen-Orient, où il est vraisemblable que les effectifs permanents actuels suffisent à y faire garantir le respect des accords de défense que nous avons passés (avec les Emirats et le Qatar) et nos intérêts commerciaux.
Mais est-il raisonnable quaucune implantation ne soit encore faite en Amérique du Sud, au Brésil, au Chili, ou encore en Asie du Sud-Est ? Il faut certes tenir compte de laction des armées elles-mêmes (ainsi les pilotes de chasse singapouriens viennent-ils sentraîner en France). Il reste quil y a là des lacunes qui montrent le besoin criant quà la France du développement de sa coopération de défense.
Les contraintes pour proposer des stages sont bien moins lourdes que celles que comporte une implantation. La France en propose dores et déjà de nombreux aux militaires étrangers : ceux-ci forment, avec les stagiaires de la MMC, 15 % des auditeurs des stages et des cours militaires français. Cette proportion est sans doute une limite.
La coopération de défense voit en 1999 ses crédits de stages augmenter de 50 %. Sa politique est den profiter moins pour augmenter le nombre des stagiaires que le niveau des stages : un effort important sera accompli pour proposer des qualifications de haut niveau dans le domaine politico-militaire, de lenseignement militaire supérieur et des formations détat-major ainsi que des formations techniques de haut niveau (de pilotes, de missiliers, etc.) susceptibles de promouvoir nos intérêts industriels.
En ce sens, la création dun cursus de formation des sous-officiers en Pologne au cours de lannée 1999 est projetée. Dans ce cas, ce cursus sera progressivement ouvert aux partenaires régionaux.
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ÉVOLUTION DES FORMATIONS EN FRANCE
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1992
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
Afrique du Nord - Moyen-Orient
|
297
|
358
|
369
|
382
|
354
|
349
|
342
|
Afrique noire non francophone
|
13
|
3
|
4
|
6
|
11
|
|
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Europe
|
242
|
221
|
390
|
234
|
265
|
268
|
238
|
Amérique
|
54
|
52
|
52
|
36
|
49
|
33
|
23
|
Asie - Océanie
|
32
|
34
|
41
|
54
|
59
|
40
|
35
|
Total
|
638
|
668
|
856
|
712
|
738
|
690
|
638
|
(Source : ministère des Affaires étrangères)
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Si lon ne peut que se louer de cette politique qualitative, susceptible de meilleures retombées pour notre pays, il faut cependant dire un mot de la répartition des formations : en 1998, sur 638 stagiaires, 23 seulement sont venus des deux Amériques et 35 dAsie et dOcéanie, soit respectivement 3,6 % et 5,5 %. Là aussi, on peut constater que lAmérique et lAsie du Sud-Est sont délaissées. Ce doit être le prochain terrain dexpansion de la coopération de défense française.
III. LA RÉORIENTATION DE LA COOPÉRATION MILITAIRE
La coopération militaire avec les pays africains comporte des aspects spécifiques par rapport à la coopération de défense générale. La faiblesse fréquente des Etats avec lesquels elle traite, leur organisation, la place considérable quy a tenue la France, métropole coloniale puis pays décolonisateur, a donné une place centrale à ses coopérants militaires.
Depuis plusieurs années, la France a infléchi sa politique dans le sens dune plus grande autonomie et dune meilleure efficacité des forces armées de ces Etats dans le cadre du respect de leur part du jeu démocratique.
Leffort engagé est passé par une réorganisation générale des forces armées, une gestion rationnelle des ressources humaines, notamment pour réduire limpact éventuel de lappartenance ethnique, et la définition dune politique budgétaire assurant au moins le versement régulier des soldes ainsi que, dans les quelques pays où la dimension des forces de défense est supérieure aux besoins, par une aide pour restructurer progressivement celles-ci suivant des formats compatibles avec les ressources financières nationales.
La Mission militaire de coopération ne sen est pas tenue là cependant. Elle a cherché à développer deux autres types dactions.
Il sagit dabord du développement dun enseignement militaire local. La réduction du format de larmée française rend en effet très difficile laccueil dun nombre de militaires étrangers de plus en plus important au fur et à mesure de lextension du champ . De plus, le caractère très sophistiqué des matériels en usage dans larmée française rend cet enseignement, au moins techniquement, largement inadapté aux conditions africaines.
Il sagit ensuite de la sécurité intérieure. Lidée a été dappuyer la création, lorganisation et léquipement de forces militaires spécialisées dans le maintien de lordre (Gendarmerie, gardes nationales), de sorte que les forces armées de combat ne soient plus impliquées dans des opérations de sécurité publique pour lesquelles elles ne sont pas formées, avec le risque de déboucher sur des excès incompatibles avec lordre démocratique recherché.
Lévolution du format des armées françaises et la poursuite de la politique damélioration menée, amènent à poursuivre la diminution de la présence de coopérants français au sein des forces. En même temps, de nouvelles initiatives peuvent être lancées. Elles concernent le développement de capacités autonomes de maintien de la paix. Cest le concept RECAMP de renforcement des capacités de maintien de la paix des Etats africains, dans le respect de leur capacité dinitiative et en liaison avec les autres fournisseurs daide internationaux.
Cette nouvelle politique oblige aussi à rechercher la plus grande synergie possible en matière de coopération militaire entre les forces prépositionnées et les missions dassistance militaire, celles-ci concentrant leur action sur lassistance militaire technique et les cessions de matériels, tandis que celles-là apportent un complément de formation opérationnel et un soutien aux actions de maintien de la paix.
Le redéploiement de la politique de coopération militaire et de défense se traduira pendant plusieurs années par une réduction de 3 % à 4 % environ du budget de la MMC. Cette année, cette réduction est de 4 %.
(en millions de francs)
1 : Rémunérations (aides en personnel et missions dexperts)
2 : Fonctionnement (frais de fonctionnement des missions dassistance militaire et frais de représentation)
3 : Aide directe (matériel, entretien et investissement)
4 : Formation des stagiaires militaires étrangers
De façon cohérente avec linfléchissement politique ci-dessus décrit, alors que les crédits consacrés à la formation des stagiaires étrangers augmentent un peu pour tenir compte de linflation, et que laide en matériels, très importante pour des armées souvent très démunies, est maintenue si lon tient compte des 8 millions de francs transférés au chapitre 68-80, cest une fois de plus sur laide en personnel que porte la réduction. La réduction de loutil appui aux missions de coopération en est le simple corollaire.
De fait, leffectif dassistants militaires techniques perd pour la troisième année consécutive 70 postes environ, avec 506 postes au lieu de 570 en 1998, 640 en 1997 et 714 en 1996.
Comme à laccoutumée, ce sont les missions les plus nombreuses qui sont les plus touchées. En liaison avec la fermeture des implantations militaires françaises en République Centrafricaine, la mission locale installée dans ce pays perd 31 postes, près de la moitié de son effectif. Celle du Tchad (46 postes désormais) perd 9 postes, celle des Comores (11 au lieu de 16) 5, de même que celle du Gabon (35 au lieu de 40). Plus aucune mission locale natteint les 50 postes.
Cependant, la politique de réduction des effectifs ménage les fonctions de formation et dinstruction : plus de 110 AMT serviront encore à ce titre en 1999, et il sagit du seul secteur, avec le service de santé, où il existe encore des postes de substitution et cela en cohérence avec la politique générale et le maintien des crédits de formation.
De plus, la MMC aussi poursuit son redéploiement au-delà du pré carré : pour la première fois, lEthiopie apparaît dans ses listes, avec deux AMT. Avec lAngola, la Guinée équatoriale et le Malawi, cest le quatrième pays non francophone à être dans ce cas.
Il faut ajouter que si, afin dassurer une continuité dans laction entreprise, la durée de la mission de la grande majorité des AMT est de deux ans, des missions de courte durée (de 2 à 6 mois) sont organisées si nécessaire pour répondre à des besoins conjoncturels, tels que lencadrement de stages de formation ou la remise en état accélérée de matériels.
|
|
|
|
|
ÉVOLUTION DES POSTES DASSISTANT MILITAIRE TECHNIQUE
|
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
Angola
|
2
|
2
|
4
|
5
|
Bénin
|
24
|
22
|
22
|
21
|
Burkina-Faso
|
14
|
14
|
15
|
17
|
Burundi (1)
|
24
|
-
|
-
|
-
|
Cambodge
|
17 (2)
|
15
|
15
|
14
|
Cameroun
|
54
|
50
|
45
|
42
|
Cap Vert
|
1
|
-
|
-
|
-
|
Centrafrique
|
63
|
59
|
59
|
28
|
Comores
|
34
|
28
|
16
|
11
|
Congo (3)
|
25
|
23
|
7
|
7
|
Côte dIvoire
|
50
|
45
|
40
|
40
|
Djibouti
|
47
|
41
|
34
|
32
|
Ethiopie
|
-
|
-
|
-
|
2
|
Gabon
|
60
|
51
|
40
|
35
|
Guinée
|
29
|
27
|
26
|
23
|
Guinée Equatoriale
|
4
|
4
|
4
|
4
|
Madagascar
|
25
|
24
|
22
|
22
|
Malawi
|
1
|
1
|
1
|
1
|
Mali
|
25
|
23
|
21
|
20
|
Mauritanie
|
52
|
47
|
42
|
39
|
Mozambique
|
4
|
2
|
-
|
-
|
Niger
|
50
|
44
|
42
|
39
|
Sénégal
|
32
|
31
|
31
|
30
|
Tchad
|
60
|
55
|
55
|
46
|
Togo
|
34
|
32
|
29
|
27
|
Total
|
714
|
640
|
570
|
506
|
(1) Fermeture de la mission militaire au Burundi à lété 1996
(2) Pour mémoire, (effectifs pris en charge par le budget des Affaires étrangères en 1996)
(3) La coopération avec le Congo est actuellement suspendue
|
|
|
|
|
RÉPARTITION DE LAIDE LOGISTIQUE DIRECTE
(LOI DE FINANCES INITIALE)
|
(en millions de francs)
|
Pays
|
1997
|
1998
|
1999 (prévisions)
|
Angola
|
0,11
|
0,3
|
0,5
|
Bénin
|
4,5
|
4,5
|
5
|
Burkina-Faso
|
5
|
5
|
5,5
|
Cambodge
|
2,5
|
2
|
2
|
Cameroun
|
9
|
9
|
10
|
Cap Vert
|
0,5
|
0,25
|
-
|
Centrafrique
|
10
|
10
|
5
|
Comores
|
2,5
|
2
|
2,5
|
Congo
|
5
|
-
|
3
|
Côte dIvoire
|
12
|
11
|
11
|
Djibouti
|
6,5
|
6,5
|
8
|
Ethiopie
|
-
|
-
|
0,3
|
Gabon
|
5
|
5
|
5
|
Guinée Bissau
|
0,5
|
0,25
|
-
|
Guinée
|
6,5
|
7
|
8
|
Guinée Equatoriale
|
0,7
|
0,7
|
0,7
|
Madagascar
|
7
|
8
|
8
|
Mali
|
5
|
6
|
7
|
Mauritanie
|
7
|
6
|
7
|
Niger
|
6,5
|
6,5
|
7
|
Sénégal
|
12
|
11
|
12,5
|
Tchad
|
12
|
12
|
13
|
Togo
|
5
|
5
|
5
|
Autres pays(1)
|
-
|
-
|
2
|
EIA - ENVR (2)
|
-
|
22
|
|
Sous-total
|
124,81
|
140
|
128
|
TITRE VI (art. 68-80)
|
-
|
-
|
8(4)
|
Transport
|
25
|
24
|
18
|
Non affectés
|
30,19
|
16
|
26
|
Total
|
180(3)
|
180
|
180
|
(1) Cap Vert, Gambie, Haïti, Caraïbes
(2) EIA = Ecoles interafricaines
(3) 30 millions ont fait lobjet dun arrêté dannulation de crédit
(4) Pour louverture décoles au Burkina Faso, Cameroun, Gabon
(Source : Ministère délégué à la Coopération et à la Francophonie)
|
Cest désormais la formation des cadres officiers et sous-officiers des armées et des gendarmeries qui est la priorité de la Mission militaire de coopération.
Cette formation est effectuée de deux façons : en France dabord, dans les écoles militaires françaises et dans le cadre de stages réguliers ou de cours spéciaux et, de plus en plus, en Afrique, dans les écoles nationales, à vocation régionale ou non, aidées par la Mission militaire de coopération.
Lenseignement et la formation dispensés en France concernent lenseignement militaire supérieur, du 1er et du 2ème degrés, (pour les officiers), des stages de formation, dapplication et de perfectionnement (pour les officiers subalternes) et des stages techniques de spécialité (pour les sous-officiers). Leur durée varie de quelques semaines (pour les stages techniques de spécialité), à plusieurs années (pour les formations dofficiers et de médecins).
Dautre part, des filières spécialisées et adaptées aux besoins des pays partenaires sont développées dans les écoles militaires françaises pour mieux répondre à la demande de formation. Il sagit du Cours supérieur international de Gendarmerie à Melun, du Cours supérieur du commissariat de lArmée de terre à Montpellier, du Cours spécial de lEcole de lair à Salon-de-Provence et du Cours spécial de lEcole navale à Lanvéoc-Poulmic). Chacun de ces cours forme chaque année entre une dizaine et une trentaine dofficiers.
Sagissant des filières communes, du fait de la réduction des effectifs militaires français et de lévolution consécutive du format des écoles de formation, le nombre de places offertes aux stagiaires étrangers dans les écoles françaises se réduit dannée en année ; en effet, fort logiquement, ce nombre est proportionnel aux effectifs français (le quota est de 20 % maximum).
Par ailleurs, lextension du champ de compétence de la MMC, le 1er janvier 1996, a augmenté le nombre de stages à financer. Ce différentiel entre offre et demande est amené ainsi à saccroître.
On voit très nettement les conséquences de ce double mouvement sur les chiffres de 1998. Le nombre de stagiaires accueillis a diminué de plus de 30 %, passant de 1 338 à 916. En même temps, le nombre de stagiaires originaires dautres régions que lAfrique francophone sest accru, passant de 74 à 97. En conséquence, leffectif des stagiaires dAfrique francophone chute de 35 %, et passe de 1 264 à 819.
|
|
|
|
|
|
|
ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION
DES STAGES DE FORMATION EN FRANCE
|
|
1993
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
Afrique du Sud
|
|
|
|
2
|
2
|
|
Afrique anglophone
|
|
|
|
12
(1 %)
|
12
(0,9 %)
|
20
(2,2 %)
|
Afrique francophone et Cameroun
|
1 186
(99,2 %)
|
1 480
(98,2 %)
|
1 321
(95,9 %)
|
1 171
(92,9 %)
|
1 264
(94,5 %)
|
819
(89,4 %)
|
Afrique lusophone et hispano-phone
|
10
(0,8 %)
|
11
(0,7 %)
|
29
(2,1 %)
|
30
(2,4 %)
|
22
(1,6 %)
|
27
(3,4 %)
|
Ethiopie
|
|
|
|
|
|
1
|
Amérique et Caraïbes
|
|
|
|
2
|
4
|
7
(0,8 %)
|
Asie du Sud-Est (Cambodge)
|
|
16
(1,1 %)
|
25
(1,8 %)
|
29
(2,3 %)
|
20
(1,5 %)
|
35
(3,8 %)
|
Océan Indien (Maurice et
Seychelles)
|
|
|
3
(0,2 %)
|
15
(1,2 %)
|
14
(1 %)
|
7
(0,8 %)
|
Total
|
1 196
|
1 507
|
1 378
|
1 261
|
1 338
|
916
|
La MMC a donc été amenée à réfléchir sur la structure de son offre de formation. Eu égard à cette situation, eu égard aussi à la politique générale de coopération militaire, tendant à une autonomie de plus en plus grande de nos partenaires, et compte tenu de ce que linstruction sur nombre darmements sophistiqués en France ne trouve pas son application en Afrique, où de telles armes ne sont pas en dotation, il a été décidé de limiter les formations en France à celles du plus haut niveau et, consécutivement, de développer la formation en Afrique même.
Avant 1996, la MMC avait ouvert deux écoles interafricaines. Il sagit de la Division dapplication des transmissions de Bouaké, en Côte dIvoire, créée en 1983, et de lEcole dapplication de linfanterie (EAI) de Thiès, au Sénégal, créée en 1987.
En 1996, cette politique a été reprise, dune façon légèrement différente. Sous leffet de la volonté des pays africains de développer par eux-mêmes la coopération régionale, le concept décoles interafricaines a cédé la place à celui décoles nationales à vocation régionale. En fait, il est apparu aux pays africains que la meilleure formule était une coopération régionale au sein de laquelle chacun se spécialise dans un domaine. Certaines écoles nationales sont alors choisies pour être la référence des pays de la région, et accueillent des stagiaires et élèves venant de lensemble de ces pays.
La MMC a décidé dencourager fortement le développement de cette politique et de ces écoles. La règle de son action daccompagnement est de faire en sorte que ces écoles bénéficient du même niveau et de la même qualité denseignement quen France, de façon à leur donner un label reconnu, quon pourrait considérer comme une sorte de Label France . Cela acquis, lopération est entièrement bénéfique : la formation technique peut rester adaptée aux réalités locales, en même temps que les pays africains acquièrent de meilleures conditions de maîtrise de leur formation militaire et développent aussi leur solidarité régionale.
La formation dans ces écoles est entièrement financée par la Mission Militaire de la Coopération.
Le budget qui leur est consacré recouvre essentiellement les frais de fonctionnement et dinstruction, lalimentation, lhébergement et les frais de transport des stagiaires, les frais engagés pour la réalisation, lamélioration et lentretien des infrastructures et, bien sûr, les soldes et accessoires des AMT, qui sont au nombre de 12 actuellement à raison de 2 ou 3 officiers ou sous-officiers par école. Pour 1998, ce budget, hors soldes et accessoires des AMT, est de lordre de 16 millions de francs.
Les crédits supplémentaires nécessaires sont par ailleurs compensés par la diminution des frais nécessaires pour organiser les stages en France.
Au début de 1998, quatre écoles de ce type fonctionnaient sur le continent : lécole dapplication de linfanterie de Thiès (Sénégal), la division dapplication des transmissions de Bouaké (Côte dIvoire), lécole militaire dadministration et lécole détat-major de Koulikoro au Mali, ces deux dernières écoles ayant toutes deux ouvert leurs portes en 1997.
Ces écoles auront formé en 1998 269 stagiaires contre 193 en 1997. Ceux-ci proviennent des pays suivants.
Pays
|
Stagiaires
|
Angola
|
2
|
Bénin
|
18
|
Burkina-Faso
|
11
|
Burundi
|
5
|
Cameroun
|
24
|
Centrafrique
|
9
|
Congo
|
1
|
Côte dIvoire
|
22
|
Djibouti
|
8
|
Gabon
|
12
|
Guinée
|
14
|
Madagascar
|
6
|
Mali
|
49
|
Mauritanie
|
16
|
Niger
|
12
|
Sénégal
|
30
|
Tchad
|
14
|
Togo
|
16
|
Total
|
269
|
Chacune delles comprend 2, 3 ou 4 assistants miliaires techniques (AMT) qui y occupent des postes dencadrement.
Au second semestre 1998, trois nouvelles ENVR ont été créées :
- le cours dapplication de Gendarmerie à Abidjan (30 stagiaires),
- lécole du service de santé de Lomé (15 élèves médecins),
- le centre dinstruction naval dAbidjan (24 officiers mariniers).
Cette action sera encore amplifiée en 1999, avec louverture de 6 ENVR supplémentaires :
- le centre de perfectionnement de police judiciaire de Porto Novo (Bénin) ;
- lécole de maintien de la paix de Zambakro (Côte dIvoire) ;
- lécole de soutien matériel dOuagadougou (Burkina Faso) ;
- lécole nationale dofficiers dactive de Thiès (Sénégal) ;
- le centre de perfectionnement du maintien de lordre dAwae (Cameroun) ;
- lécole de pilotage de Garoua (Cameroun).
Parallèlement, leffort de la MMC en faveur des ENVR sur le budget de 1999 devrait augmenter de 30 % environ et se situer à 21 millions de francs.
Ainsi, en 1999, près de 300 stagiaires africains supplémentaires devraient être formés dans les écoles nationales à vocation régionale africaines. Ils seront ainsi 550 environ.
Cette augmentation des capacités de formation vers lAfrique devrait permettre de diminuer denviron 150 le nombre délèves et stagiaires formés en France, et de progresser vers lobjectif fixé, cest-à-dire de faire effectuer 50 % de la formation en Afrique.
Par ailleurs, la majorité des pays africains disposent à léchelon national décoles ou de centres dinstruction militaire où est formée une partie de leurs cadres.
Le ministre délégué à la coopération et à la francophonie y détache plus de 100 officiers et sous-officiers instructeurs et spécialistes. Cependant, ces écoles ou centres dinstruction sont placées sous commandement local.
Les ressources budgétaires qui y sont consacrées sélèvent à plus de 75 millions de francs à partir des articles 10 et 40. Là aussi, elles concernent essentiellement le financement des soldes de nos AMT et celui des matériels daide à linstruction (documentation, matériels pédagogiques et audiovisuels, informatique, etc.). Une petite part de ce budget sert aussi à financer les améliorations et lentretien des infrastructures spécialisées.
Au total, la MMC consacre plus de 205 millions de francs (à partir des articles 10, 20 et 40) à la formation des cadres des armées africaines aussi bien en France que sur le continent africain, soit le tiers de ses ressources.
Il faut noter aussi que ce sont les écoles qui bénéficieront de la possibilité nouvelle de subventionnement des investissements donnée à la MMC par louverture dune ligne budgétaire au chapitre 68-80. Sur 8 millions de francs disponibles, 5 millions de francs iront, pour leur création, au centre de perfectionnement dAwae (1 million de francs), à lécole de pilotage de Garoua (0,6 million de francs) et à lécole détat-major du Gabon (3,4 millions de francs), et 3 millions de francs seront destinés à laménagement de lécole de mécanique du Burkina Faso.
Le deuxième axe dintérêt de la MMC en Afrique est la constitution de forces militaires de sécurité solides, opérationnelles et respectueuses de la loi.
Cette préoccupation sest traduite par un double effort de formation et déquipement des forces de Gendarmerie.
Dabord, il faut rappeler le Cours supérieur de Gendarmerie à Melun, créé en 1994 à linitiative de la MMC et financé par elle. Mais ce cours nest que la partie la plus visible de laction de la MMC. Des stages sont également organisés en France : en 1998, 181 stagiaires de vingt et un pays, dont 70 officiers ont été formés dans les écoles de gendarmerie, pour un coût de 9 millions de francs. Cette somme sera portée à 11 millions de francs en 1999.
Par ailleurs, il faut rappeler, au titre de la formation, louverture en 1998 de lEcole nationale à vocation régionale de gendarmerie dAbidjan, et celle, prévue pour 1999, de lENVR de police judiciaire de Porto Novo au Bénin.
De façon générale, en 1999, sur 506 AMT, 103, soit près dun sur cinq, seront des gendarmes, pour un coût de 82,14 millions de francs. Le nombre dAMT gendarmes diminue ainsi moins que celui de lensemble des AMT. Il faut ajouter trente gendarmes envoyés pour des missions de courte durée. Chacun des pays où est implantée une MMC dispose ainsi dune petite mission de gendarmerie, pouvant aller jusquà dix officiers et sous-officiers.
Le tableau ci-après présente cette évolution.
ÉVOLUTION DES POSTES DASSISTANTS MILITAIRES TECHNIQUES DE LA GENDARMERIE AU COURS DES DOUZE DERNIÈRES ANNÉES
Sur leur effectif de 103, 47 gendarmes seront affectés à des écoles ou centres dinstruction. La formation apparaît bien comme la spécialité de la gendarmerie : près dun AMT gendarme sur deux sy consacre, et, alors que les gendarmes ne représentent quun cinquième des AMT, ils constituent près de la moitié des formateurs.
Sagissant des équipements, un très gros effort a été accompli depuis 1992 afin de donner aux forces de gendarmerie une capacité opérationnelle suffisante. La priorité, initialement accordée aux unités de maintien de lordre (gendarmerie mobile, garde nationale) afin que les forces armées ne soient plus impliquées dans des opérations de ce type, porte désormais sur lappui aux gendarmeries territoriales ayant en charge la sécurité de proximité au quotidien sur lensemble du territoire. Laide est essentiellement ciblée sur des moyens de transport et de transmission radio. Elle permet lapplication effective sur le terrain des principes daction enseignés dans les écoles de Gendarmerie, en France ou en Afrique. Elle peut couvrir aussi lacquisition davions très légers (en fait, dULM) de surveillance.
Lensemble, améliorant la présence et lefficacité de la Gendarmerie, semble dores et déjà se traduire par un bilan tout à fait positif, notamment vis-à-vis du grand banditisme.
En 1998, 21,67 millions de francs daide directe ont été consacrés à cette action, portant le total de cette aide depuis 1990 à 284,59 millions de francs. Il faut signaler également que ce type de projet est éligible au Fonds daide et de coopération (FAC) qui y consacre, bon an mal an, 20 millions de francs environ. Laide en équipement aux gendarmeries est ainsi chaque année à peu près de 40 millions de francs.
IV LA MISE EN UVRE DE LA NOUVELLE POLITIQUE AFRICAINE DE LA FRANCE ET LE DÉVELOPPEMENT DES SYNERGIES AVEC LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE
La redéfinition de la politique de coopération militaire en Afrique sinscrit dans le cadre plus vaste de la redéfinition générale de la politique de sécurité de la France sur ce continent.
La France estime désormais que, dans le domaine de la sécurité et du maintien de la paix en Afrique, la première responsabilité revient désormais aux Africains, sous légide de lONU et lOUA. Cette doctrine nouvelle a été réaffirmée par le Premier Ministre dans son discours du 3 septembre 1998 devant lIHEDN.
Dans ce cadre, qui répond aux souhaits exprimés par lOUA et les principales organisations de coopération régionale du continent, la France a à la fois entrepris de redéfinir les modalités de sa présence militaire en Afrique, et aussi dinscrire celle-ci dans un cadre multilatéral.
Lobjectif est désormais de sassocier à dautres pays pour aider le développement des capacités africaines de maintien de la paix.
En ce sens, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont convenu, par un accord passé le 22 mai 1997, de coordonner leurs initiatives dans ce domaine. Il sagit de programmes de formation et déquipement permettant aux armées africaines de participer plus largement à de futures opérations de maintien de la paix mandatées par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Les pays africains ont réservé un accueil très favorable à cette initiative des trois pays et ont manifesté le souhait dy être étroitement associés. Le secrétariat des Nations Unies a donc accepté dorganiser à New-York, en liaison avec lOUA, des réunions au cours desquelles tous les Etats intéressés ont pu échanger des informations sur les efforts en cours et mettre en regard les offres et les demandes. Deux réunions de ce type ont déjà été tenues, le 5 décembre 1977 et le 28 mai 1998. Cette initiative nest donc dores et déjà plus une initiative tripartite, mais une nouvelle forme de coopération militaire, désormais ouverte à tous les donateurs et pays africains volontaires.
Sagissant des donateurs, les Etats-Unis ont lancé un programme daide aux Etats africains désireux de renforcer leurs armées dans le domaine du maintien de la paix. Avec un budget de lordre de 15 millions de dollars pour 1998, le programme ACRI (African Crisis Response Initiative) vise à former au maintien de la paix 10 000 à 12 000 soldats africains sur cinq ans. Chaque pays africain participant au programme fournit un bataillon qui reçoit une formation initiale de 70 jours, assurée par une soixantaine dinstructeurs américains. A ce jour, cinq pays ont bénéficié du programme ACRI : le Sénégal, lOuganda, le Malawi, le Mali et le Ghana. Dici la fin de lannée, lEthiopie devrait également recevoir les équipes américaines.
La coopération militaire britannique avec lAfrique, notamment dans le domaine du maintien de la paix, est, elle, sensiblement moins développée. A Harare, deux militaires britanniques sont affectés au collège militaire du Zimbabwe et huit autres sont en charge dun groupe de formation régional. A Accra, trois officiers britanniques sont affectés au collège militaire.
Par ailleurs, les Belges ont participé à divers épisodes du programme ACRI.
Enfin, lAfrique du Sud organise en novembre 1998 un exercice interarmées multinational de maintien de la paix. Il est prévu une participation de 4 000 hommes issus de 12 nations différentes, dont la France, ainsi quune contribution financière de lAllemagne et des pays nordiques.
Cependant, cest la France qui fournit leffort le plus notable : cest le projet RECAMP.
Le projet français RECAMP (REnforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix) vise à permettre aux pays dAfrique dêtre en mesure de mettre sur pied, en cas de besoin, des unités capables dêtre engagées dans des opérations internationales, et à préserver les équilibres actuels, tant intérieurs que sous-régionaux. Il se traduit essentiellement par la formation de cadres et le prépositionnement de matériel.
La France a réorienté vers ce projet environ 20 % de sa coopération militaire avec lAfrique, soit près de 180 millions de francs en 1998.
RECAMP est plus ambitieux que le programme américain ACRI : alors que la formation et les exercices dACRI concernent des effectifs relativement réduits et sinscrivent dans un cadre bilatéral, la formation et les exercices de RECAMP sinscrivent dans une optique sous-régionale, au niveau de lAfrique de lOuest et centrale. De plus, contrairement à ACRI, RECAMP prévoit le prépositionnement de matériel à lattention des forces africaines de maintien de la paix.
Le programme RECAMP comporte trois volets :
Il sagit dabord de la création du centre de formation de maintien de la paix de Zambakro, en Côte dIvoire. Cette école, créée sur limpulsion de la MMC, aura, on la vu, le statut dEcole Nationale à Vocation Régionale (ENVR). Elle fournit ainsi une réponse africaine à un besoin régional.
Elle comprendra deux entités : un centre de formation au maintien de la paix, à vocation internationale, qui sera placé sous la responsabilité dun officier supérieur français en charge de la formation des cadres et un centre national dinstruction des forces armées, commandé par un officier supérieur ivoirien et chargé de la formation des forces ivoiriennes.
Dans le centre de formation au maintien de la paix seront enseignées, en liaison avec les organisations internationales (OUA et ONU), les techniques spécifiques de cette spécialité. Actuellement, trois types de stages sont prévus : stages dobservateurs, de cadres détat-major de force, et de cadres de PC de bataillon. Bien que ces stages soient ouverts en priorité aux pays de la sous-région, le statut de lécole lui permettra de lier des contacts avec dautres centres africains à la même vocation, comme lécole dHarare au Zimbabwe.
Le coût initial de cet équipement est de 16 millions de francs.
Vingt stagiaires devraient être formés en 1998/1999 et quarante lannée suivante.
Les Etats-Unis, qui souhaitent développer leur coopération avec la Côte dIvoire, devraient apporter leur soutien financier au centre et y affecter des instructeurs.
Le second volet du dispositif est le prépositionnement de matériel pour léquipement des forces de maintien de la paix.
Ainsi, en janvier 1998, a été effectué le prépositionnement à Dakar du matériel nécessaire à léquipement dun bataillon. Ce matériel, dune valeur de 25 millions de francs, nest pas à lusage exclusif de larmée sénégalaise mais de tous les pays de la sous-région qui peuvent lutiliser pour des opérations de maintien de la paix. Il a effectivement été utilisé au cours de lexercice Guidimakha 98 et se trouve actuellement mis à la disposition de la Mission des Nations Unies en République Centrafricaine (MINURCA).
La MMC prévoit de prépositionner chaque année un équipement similaire de plus.
Enfin, il a été décidé de faire évoluer les traditionnels exercices franco-africains vers le thème du maintien de la paix et une plus grande multilatéralité.
Dans cette optique, du 20 février au 1er mars a eu lieu lexercice Guidimakha à la frontière du Sénégal, de la Mauritanie et du Mali. Huit pays africains y ont participé. Outre la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne y ont contribué chacun avec une section délite et un avion de transport de troupes. Le coût pour le budget de la Défense a été denviron 10 millions de francs.
Guidimakha a rencontré un très grand succès tant auprès des participants que des observateurs invités. Aussi, il a été décidé que, précédé dun séminaire politico-militaire, dun exercice de PC et de stages de formation de maintien de la paix au profit des pays africains engagés, ce type dexercice serait reconduit tous les deux ans. Le prochain exercice aura lieu au Gabon au début de lannée 2000.
En 1997, un exercice avait déjà eu lieu sur le thème du maintien de la paix, lexercice Nangbeto. Cependant, il ne réunissait que des pays francophones, autour de la France.
La comparaison ci-après donne la mesure du tournant que représente Guidimakha : les pays participants sont beaucoup plus nombreux, les forces françaises réduites de moitié.
Exercice
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Date et lieu
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Participants
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Effectif français
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Autres
effectifs
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Nangbeto
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Bénin - Togo
mars 1997
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Bénin
Togo
Burkina Faso
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1 200
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2 500
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Guidimakha
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Sénégal
février 1998
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Sénégal
Mauritanie
Mali
Ghana
Guinée
Guinée Bissau
Gambie
Cap Vert
Etats-Unis
Grande Bretagne
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600
|
2 500
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Guidimakha a ainsi permis de valider le concept français de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix. Il marque un tournant dans la coopération militaire franco-africaine et permet daffirmer la volonté de la France de contribuer de manière significative à lémergence dune véritable diplomatie préventive en Afrique, sous couvert de lONU et de lOUA.
Un tel engagement de la France dans le maintien de la paix en Afrique nest possible que parce que sa présence y est exceptionnellement importante.
En effet, elle ny dispose pas seulement des 570 assistants militaires techniques. Dans le cadre daccords de défense conclus pour la plupart lors des indépendances, le ministère de la Défense entretient en permanence des forces, dites forces prépositionnées sur le sol africain. Elles sont installées au Sénégal, en Côte dIvoire, au Gabon, à Djibouti ainsi quau Tchad où leur présence est légalisée non par un accord de défense, mais par un accord de coopération militaire technique.
Elles disposent de moyens importants. Au 1er mai 1998, cest 6 453 hommes et, en termes déquipement, deux bâtiments, quinze avions de combat, six avions de transport, un avion de patrouille maritime et 19 hélicoptères.
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MOYENS MILITAIRES PRÉPOSITIONNÉS EN AFRIQUE
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Hommes
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Evolution
1997/1998
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Matériel
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Djibouti
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3 177
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+ 5
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9 hélicoptères
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10 Mirage F1
1 Transall
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1 EDIC
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Sénégal
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1 145
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- 113
|
1 hélicoptère
|
1 Transall
1 Atlantique
|
1 Frégate
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Côte dIvoire
|
572
|
+ 105
|
1 hélicoptère
|
|
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Gabon
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582
|
- 20
|
5 hélicoptères
|
2 Transall
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République Centrafricaine
|
1 578
|
- 1 578
|
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Tchad
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977
|
+ 142
|
3 hélicoptères
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5 Mirage F1
2 Transall
3 Puma
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Total
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6 453
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- 1 460
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Au 1er juin 1997
(Source : Ministère de la Défense)
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La raison dêtre de ces forces ne relève pas dabord de coopération mais bien de défense : pour le pays daccueil, cest une garantie de type dissuasif pour assurer lintégrité de son territoire national et lintangibilité de ses frontières. Pour la France, il sagit de disposer de moyens pour assurer la protection de nos ressortissants et des étrangers installés dans le pays demandeur ou dans la région, et de sassurer de bases et de points dappui procurant de larges facilités (aéroports, dispositifs daccueil et de soutien déventuels renforts) en cas dinterventions extérieures.
De ce fait, leur commandant nest en aucun cas subordonné à lattaché militaire, par ailleurs chef de la mission dassistance locale, ou à lambassadeur, mais relève directement du Chef détat-major des armées.
Lan dernier, votre rapporteur regrettait leur faible association au développement dune politique de coopération dynamique avec lAfrique, association qui aurait aussi été susceptible de dégager des moyens pour la coopération de défense.
Il semble quil ait été entendu. En effet, lampleur du programme RECAMP ne se conçoit que du fait de lassociation de ces forces aux objectifs quil fixe.
De fait, cest au sein des troupes prépositionnées quest stocké le matériel prévu pour les opérations de maintien de la paix.
Ces forces contribuent également à la formation des contingents africains destinés à participer à ces opérations : ainsi le 43è BIMa dAbidjan a-t-il fourni début 1998 un détachement dinstruction opérationnel (DIO) dune dizaine dinstructeurs pour la préparation du contingent ivoirien de la MINURCA, force de maintien de la paix en RCA ; en 1997, à NDjamena, les éléments français du dispositif Epervier avaient fourni un DIO pour la formation des unités tchadiennes de la MISAB qui avait précédé la MINURCA.
Ce sont également elles qui fournissent les cadres et les effectifs français nécessaires aux exercices multinationaux, tels que Guidimakha.
Ainsi, les hommes et les ressources de la MMC et les forces prépositionnées sont-ils désormais mis en commun au service de la coopération militaire en Afrique.
En même temps, lévolution de la doctrine française sur la sécurité en Afrique permet de reconfigurer le format des forces prépositionnées.
En effet, le rôle central désormais donné aux Africains eux-mêmes permet dalléger le dispositif français.
Celui-ci est sensiblement plus coûteux que celui consacré à la coopération. En 1997, dernière estimation fournie à votre rapporteur, les crédits qui y étaient consacrés sélevaient à 3 milliards de francs environ, dont la moitié pour Djibouti. Cette estimation était en fait une estimation basse dans la mesure où les chiffres communiqués pour les implantation en République centrafricaine (649 millions de francs) et au Tchad (369 millions de francs, et 341,5 prévus pour 1998) ne concernaient que des surcoûts par rapport au coût constaté en métropole, ces implantations étant placées budgétairement sous le régime des opérations extérieures.
Alors quil y avait près de 8 000 militaires prépositionnés en Afrique en 1997, ils ne sont plus que 6 453 en 1998 et il ne devrait plus y en avoir que 5 600 en 2002 ; la déflation pour 1999 est dun cinquième environ. Elle est quasi-intégralement due au départ des Français de République Centrafricaine ; dès lors, compte tenu aussi de la réforme de la rémunération des militaires à létranger, les coûts des forces prépositionnées pour 1998 pourraient être évalués aux environs de 2,3 millions de francs en 1998.
La RCA est par ailleurs une excellente illustration de la nouvelle politique, puisque cest grâce à un appui logistique et de formation fourni par le dispositif militaire français actuel de prépositionnement et de coopération quune force interafricaine de maintien de la paix, la MINURCA, a pu se constituer rapidement et mener une action efficace sous légide de lONU et de lOUA face à une crise locale.
En même temps, à Bangui, en concertation avec la communauté internationale (Résolution 1125 du Conseil de sécurité de lONU), le ministère des Affaires étrangères a assuré les dépenses dentretien des contingents de la MISAB, ce qui a représenté un coût total de 24 millions de francs pour lannée 1997, et la MMC se tient prête, dès acceptation du projet par les autorités centrafricaines, à porter assistance à la MINURCA dans sa mission de restructuration des forces armées centrafricaines (Résolution 1182 du Conseil de sécurité de lONU) par léquipement dune compagnie dintervention (3 millions de francs) et éventuellement la formation de formateurs.
V. CONCLUSION
Le présent examen de la politique française de coopération militaire et de défense incite ainsi à loptimisme : fusion des structures dépendant du ministère des Affaires étrangères et de celui de la Coopération, redéploiement des moyens vers les pays dEurope centrale et orientale, modernisation de la coopération militaire avec lAfrique et association plus grande des moyens du ministère de la Défense à celle-ci ; il ny a là que des éléments positifs.
Pourrait-on aller plus loin ? Il est certain que les moyens de la coopération militaire et de défense, avec 788 millions de francs, restent modestes. Le redéploiement des forces prépositionnées, dont lobjet est en quelque sorte aussi une action de coopération en matière de défense, devrait générer une économie annuelle globale dau moins autant. Un petite part de cette économie ne pourrait-elle pas venir renforcer les actions de coopération de défense et conforter le redéploiement de celle-ci ? Cest le vu de votre rapporteur.
TROISIÈME PARTIE
LES CHARGES DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE
Pour la France, puissance nucléaire, membre permanent du Conseil de Sécurité, quatrième force économique mondiale, les charges de la sécurité internationale représentent une réalité tant financière, en cotisations au budget de lONU, que militaire, en hommes et en matériel affectés à diverses opérations de maintien de la paix, soit sous lautorité de lONU, soit dans un cadre multinational mais avec laval de celle-ci, soit encore dans un cadre bilatéral, en application daccords passés avec des pays amis.
I. UN SOUTIEN AFFIRMÉ À LONU
Les cotisations obligatoires de la France aux budgets de lONU et de ses diverses institutions spécialisées constituent larticle 10 du chapitre 42-31 du budget des Affaires étrangères. Elles représenteront cette année 1 411,436 millions de francs, en diminution de 2,7%. Cependant, moins de la moitié de ce chiffre intéresse la Commission de la Défense : il sagit des cotisations au budget régulier et des cotisations aux opérations de maintien de la paix.
La politique de la France est de se conformer rigoureusement à ses engagements au sein de lONU. Elle satisfait donc intégralement et dans les temps à lensemble de ses obligations financières à légard de lOrganisation des Nations Unies. Cette année encore, notre pays est le premier membre permanent du Conseil de Sécurité à avoir versé avant la fin février sa contribution au budget ordinaire due au titre de lannée 1998, soit 68,8 millions de dollars.
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ÉVOLUTION DE LA CONTRIBUTION FINANCIÈRE DE LA FRANCE À LONU
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1995
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1996
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1997
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1998(1)
|
1999(1)
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Budget régulier :
|
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6,32
|
6,4075
|
6,42
|
6,49
|
6,54
|
|
69,064
|
70,102
|
68,378
|
68,379
|
68,379
|
|
366,037
|
361,025
|
365,823
|
403,437
|
415,061
|
Opérations de maintien de la paix :
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|
|
|
|
|
7,875
|
7,936
|
7,959
|
7,929
|
7,929
|
|
306,800
|
110,186
|
78,412
|
53,984
|
39,830
|
|
1 541,616
|
558,516
|
461,069
|
333,445
|
241,768
|
Total :
|
|
|
|
|
|
|
375,864
|
180,288
|
146,790
|
153,457
|
108,209
|
|
1 907,653
|
919,541
|
826,892
|
736,882
|
656,829
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(1) Prévisions
Source : ministère des Affaires étrangères
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Il ne sagit pas seulement là dune question de respect formel des procédures. En effet, lOrganisation est soumise à de grandes difficultés financières du fait de lattitude de certains pays. Sagissant des quatre premiers débiteurs de lONU au 30 juin 1998, on notera que si le Japon y figure, cest quil est pour la première fois en retard dans le paiement de sa cotisation annuelle. On saluera leffort fait par la Russie, qui, malgré les difficultés, poursuit lapurement de ses arriérés et dont la dette est passée de 237 millions de dollars en 1997 à 136 millions de dollars en 1998, soit une diminution de près de moitié. Dans une moindre mesure, on aura la même attitude vis-à-vis de lUkraine, qui, avec 235 millions de dollars darriérés, réduit ceux-ci de 40 millions de dollars.
En revanche, les Etats-Unis mènent une politique délibérée. Avec 1,539 milliards de dollars, leur dette représente 62 % du total des arriérés, Japon compris. Elle est en hausse de 17 %. Leur volonté est en effet dobtenir la réduction de leurs quotes-parts de 25 % actuellement à 20 % pour le budget général et de 30,993 % à 25 % pour les opérations de maintien de la paix.
Cette attitude a mis lONU en crise financière. De ce fait, celle-ci est amenée à emprunter pour financer les opérations de maintien de la paix quelle a décidées, et a le plus grand mal à assurer les remboursements des pays qui y participent.
Lattitude des Etats-Unis, ou plus exactement du Congrès, a du reste fini par entraîner des réactions de plus en plus vives à lONU. En effet, les Etats-Unis sont actuellement menacés, sils ne règlent pas un arriéré de 350 millions de dollars avant le 31 décembre, de perdre leur voix à lAssemblée générale...
La politique de la France est en fait tout à fait volontariste et destinée à atténuer autant que possible les difficultés financières de lONU et de lui permettre de continuer à mener dans les meilleures conditions possibles les missions qui sont les siennes. Cette volonté apparaît dautant plus clairement que la France est aussi devenue le premier pays créancier de cette organisation.
On sait en effet que lONU rembourse les Etats, sur la base de clés forfaitaires, pour leur participation aux opérations de maintien de la paix quelle conduit. La France ayant été un temps le premier contributeur en forces pour lONU est aussi le pays qui a accumulé la plus importante créance. La situation sest cependant améliorée puisque la créance de la France sur lONU est passée de 220 millions de dollars au 15 août 1997 à 151 millions de dollars en décembre. Ce chiffre doit néanmoins être comparé aux 65 millions de dollars dus au second créancier, le Royaume-Uni.
Cependant, lONU ne conduit plus dopérations de maintien de la paix importantes. On peut le voir à travers la ventilation des appels de cotisations à lONU entre budget régulier et opérations de maintien de la paix. La division par trois de la cotisation française entre 1995 et 1998 sexplique ainsi par une division par plus de six des appels pour les opérations de maintien de la paix. Ceux-ci ne représentent plus que 60 % environ de la cotisation au budget régulier.
Par ailleurs, les policiers et les observateurs, reçoivent une indemnité directement de lONU, ce qui fait quil ny a pas là non plus lieu à remboursement.
La créance française apparaît donc comme un arriéré. Il reste que des droits à remboursement continueront à naître chaque année au titre de la FINUL, et désormais, de la MINURCA. Sagissant de la FINUL, on peut estimer, malgré la très grande irrégularité des remboursements de lONU, que le tiers des dépenses engagées environ fait lobjet dun remboursement.
En tout état de cause et en conclusion, il faut souligner que la façon dont la France sacquitte de ses cotisations à lONU est, au plus haut point, un acte de politique internationale. Dans la mesure où cest la capacité daction de lONU qui est en jeu, il convient désormais danalyser aussi la participation à laction menée.
II. UNE LARGE PARTICIPATION AUX OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX
LONU conduit actuellement seize opérations de maintien de la paix. Ces opérations sont celles qui ont été expressément ordonnées par une résolution du Conseil de Sécurité et qui sont placées aussi sous lautorité du Secrétaire général de lONU, via le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP). Elles font lobjet dun réexamen tous les six mois.
La France ne participe pas à toutes ces opérations, mais seulement à neuf dentre elles. Ainsi elle ne participe pas à lUNMOGIP (surveillance de la frontière indo-pakistanaise), à lUNFICYP (à Chypre), à lUNDOF (Golan), au groupe de soutien des polices locales en Slavonie orientale (Croatie), à la FORDEPRENU (Macédoine), à la MONUP (péninsule de Prevlaka, en Croatie) et à la MONUT (Tadjkistan). Le motif en est une combinaison de raisons budgétaires, stratégiques et techniques. La France est partie prenante plutôt dans les régions où sa présence est traditionnelle (Afrique francophone), dans des zones dintérêt stratégique (ex-Yougoslavie, Koweit), et dans les missions où un savoir-faire spécifique est demandé, comme les opérations de police civile.
· LONUST (Opération des Nations Unies pour la Surveillance de la Trêve) est la plus ancienne opération de lONU toujours en cours. Décidée par la résolution des Nations Unies n° 50 en mai 1948 pour contrôler la trêve intervenue à lissue du conflit israélo-arabe de 1948, elle assure également aujourdhui le renforcement ponctuel des autres opérations de lONU dans la région (FINUL au Liban et UNDOF dans le Golan).
Il sagit dune mission dobservation. La France fournit 6 des 168 observateurs. Le surcoût prévu pour la France pour lannée 1998 est de 5,21 millions de francs, dont 4,73 au titre III et 0,48 au titre V.
· La FINUL (Force Intérimaire des Nations Unies au Liban) a été créée en mars 1978 par la résolution des Nations Unies n° 425. Déployée au Liban-Sud, principalement dans la zone de sécurité occupée par Israël, elle avait initialement pour objet de confirmer le retrait des forces israéliennes du Liban-Sud et assister le Gouvernement libanais dans sa reprise effective du contrôle de cette région. Bien quaucun de ces objectifs nait été atteint, son mandat est régulièrement renouvelé sur linsistance du Secrétaire général de lONU. La FINUL reste en effet un facteur de paix non négligeable dans la région.
Elle est beaucoup plus importante que lONUST : 4 480 militaires dont 246 Français, chargés avec leurs sept VAB (véhicules de lavant blindés) de protéger le quartier général de la Force. Ce détachement est désormais la plus importante participation française à une force sous mandat de lONU. Il nest pas sans intérêt de noter que la France est désormais le seul membre permanent du Conseil de Sécurité à entretenir un contingent au sein de la FINUL. Le surcoût pour 1998 devrait être de 56,03 millions de francs, dont 55,08 pour le titre III et 0,95 pour le titre V.
· La constitution de la MONUIK (Mission dObservation des Nations Unies pour lIrak et le Koweït) a fait suite à la Guerre du Golfe. Mise en place par les résolutions des Nations Unies n° 687 (avril 1991) et n° 689 (avril 1991) et étendue par la résolution n° 806 (février 1993), elle a pour rôle de contrôler la zone démilitarisée entre lIrak et le Koweït et dassurer un rôle dinterposition. Son effectif au 30 juin 1998 est de 1 120 hommes. La France ny contribue que pour 11 observateurs, comme les autres membres du Conseil de Sécurité. Le surcoût devrait être de 3,98 millions de francs en 1998.
· La MONUA (Mission dobservation des Nations-Unies en Angola), créée par la résolution n° 1118 du 30 juin 1997, a succédé aux missions UNAVEM (UN Angola Vérification Missions) menées de décembre 1988 à juin 1997. Six fois moins nombreuse que la dernière mission UNAVEM (UNAVEM III), elle comporte 1213 membres dont 92 observateurs et 405 policiers. Son mandat consiste essentiellement à aider les parties angolaises à consolider la réconciliation nationale, à renforcer la confiance et à instaurer un climat propice à la démocratie et au relèvement à long terme du pays. La France ne fournit plus que 3 observateurs à la MONUA.
Le surcoût de la MONUA est estimé à 4,12 millions de francs en année pleine, contre 8,8 millions pour lUNAVEM III.
· La MINUBH (GIP) (Mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine, Groupe International de Police) a été créée par la résolution des Nations Unies n° 1035 du 15 décembre 1995 pour mettre en oeuvre les aspects militaires de laccord de paix en ex-Yougoslavie. Sa mission consiste à former des fonctionnaires de police, accompagner les équipes des forces de police de Bosnie-Herzégovine, et aider les autorités locales à créer les conditions propices à des élections libres et honnêtes. Ce groupe, récemment renforcé, comporte 1 962 policiers et gendarmes. La France lui fournit 123 gendarmes, pour un surcoût annuel de 29, 36 millions de francs prévu en 1998. Sur ce théâtre bosniaque, cette participation française à la MINUBH complète le détachement français appartenant à la SFOR (3 530 militaires sur un total de 37 500).
· La MINURSO (Mission des Nations Unies pour le Référendum au Sahara Occidental) a été créée en avril 1991 par la résolution des Nations Unies n° 690. Son rôle consiste à superviser le cessez-le-feu, maintenir un dispositif dinterposition et contrôler le processus électoral visant à établir le futur statut du Sahara occidental (lintégration au Maroc ou lindépendance).
Au regard des difficultés rencontrées et notamment de la lenteur des opérations de recensement et dinscription sur les listes électorales, cette mission qui devait se terminer fin 1995 a été prolongée. A vrai dire, il ny a pas dévolution prévisible à court terme. Ses effectifs au 30 juin 1998 sont de 397 militaires dont 202 observateurs, parmi lesquels 25 Français. Le surcoût est de 7,19 millions de francs pour 1998.
· La MONUG (Mission dObservation des Nations Unies en Géorgie) a été créée en août 1993 par la résolution des Nations Unies n° 858. Son mandat a été renforcé par la résolution n° 937 (juillet 1994) et prorogé plusieurs fois.
Cette force est chargée dobserver laccord de cessez-le-feu et de séparation des forces conclu le 14 mai 1993 entre les Abkhazes, la Géorgie et la Russie. Elle doit aussi faciliter le règlement négocié de ce conflit. Elle est, par ailleurs, chargée dobserver également lopération de maintien de la paix menée sur place par la CEI avec des troupes russes. Sur demande des dirigeants géorgiens, lOSCE a également déployé des observateurs. Au 30 juin 1998, elle comportait 81 observateurs dont 5 Français. Le surcoût prévu pour lannée 1998 est de 2,35 millions de francs.
· La MIPONUH, créée par la résolution des Nations-Unies n° 1141 du 28 novembre 1997 a succédé à la MANUH (Mission dAppui des Nations Unies en Haïti), qui succédait elle-même à la MINUHA. Dans la continuité de ces missions, elle est chargée daider le gouvernement haïtien en fournissant une aide et un appui à la police nationale. Elle comporte 284 policiers. La France lui fournit 35 gendarmes. Le surcoût prévu de la MIPONUH pour 1998 est de 6, 83 millions de francs.
· La MINURCA (Mission des Nations Unies en République Centrafricaine) a été créée par la résolution 1159 du 27 mars 1998. Son rôle est dabord de contribuer, en collaboration avec les forces nationales, à maintenir la sécurité dans Bangui et à y assurer la liberté de mouvement, à protéger les installations-clés de la ville, et à superviser le stockage et le contrôle des armes récupérées. Il est ensuite dapporter une aide à la formation dinstructeurs de la police et des conseils pour la restructuration de ses forces. Enfin, elle devait apporter toute son aide et un appui technique pour la préparation des élections législatives de 1998, cela incluant laide à lélaboration dun code électoral.
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Opérations
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Effectif de la force
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Effectif français
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Surcoût prévu
pour 1998
(en millions de francs)
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ONUST
|
168
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6 (observateurs)
|
5,21
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FINUL
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4 480
|
246
|
56,03
|
MONUIK
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1 120
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11 (observateurs)
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3,98
|
MONUA
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1 213
|
3(observateurs)
|
4,12
|
MINUBH (GIP)
|
1 922
|
123 (gendarmes)
|
29,36
|
MINURSO
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397
|
25 (observateurs)
|
7,19
|
MONUG
|
81
|
5 (observateurs)
|
2,35
|
MIPONUH
|
284
|
35 (gendarmes)
|
12,3
|
MINURCA
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1 379
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208
|
66,09
|
Total
|
11 044
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662
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186,63
|
(Source : Ministère de la Défense)
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Ces opérations auront ainsi mobilisé 662 militaires français pour un surcoût de 186,63 millions de francs. Cela fait de la France le neuvième contributeur de forces de lONU. Lexamen détaillé de la participation française indique que, sauf dans les cas où elle estime avoir une responsabilité particulière, au titre de puissance régionale ou dobligations liées au passé ou à la francophonie, la France ne détache plus que des observateurs.
De fait, la France détache des gendarmes pour le développement de la police dHaïti, pays dont elle ne saurait se désintéresser eu égard à son caractère francophone et à son statut dancienne colonie française dAmérique, du temps du premier empire colonial. Des gendarmes français sont également présents en Bosnie-Herzégovine, en complément de la part que la France prend dans la SFOR.
Par ailleurs, la FINUL au Liban et la MINURCA en RCA sont les seules opérations à mobiliser plusieurs centaines de soldats français. Ces opérations ont en fait été décidées largement à linitiative de la France. La MINURCA notamment succède à un dispositif exclusivement français, et marque les premiers pas des pays africains dans lorganisation et la conduite autonome dopérations de maintien de la paix.
Les opérations conduites sous lautorité de lONU ne sont cependant pas les seules auxquelles participent des détachements français.
On le sait, depuis le succès pour le moins mitigé des opérations menées par elle en Somalie ou en ex-Yougoslavie, lONU préfère désormais charger des organisations régionales ou des coalitions des opérations les plus lourdes ou les plus conflictuelles.
Cependant, en aucun cas cela ne doit être interprété comme le signe du développement dun droit international nouveau. Sur cinq interventions de ce type en effet, deux trouvent leurs fondements juridiques dans une résolution des Nations Unies, une est sous légide de lOSCE, accord régional au sens du chapitre VIII de la Charte et les deux dernières, qui sont de petites opérations de police ou dobservation, se déroulent en accord avec les Etats sur le sol desquels elles sont menées.
En revanche, leur conduite opérationnelle est effectuée non pas sous lautorité du Département des opérations de maintien de la paix, mais bien dans des cadres et selon des modalités fixés par les organisations et les Etats qui en sont chargés.
· La principale opération en cours est lopération Joint Guard, devenue Joint Forge en Bosnie-Herzégovine. Cest lOTAN qui a reçu mandat de la mettre en oeuvre, suite à la résolution n° 1088 du 15 décembre 1996 des Nations Unies. Elle mobilise 37 467 militaires, dont 3 529 Français, réunis au sein dune force dénommée SFOR. Au sein de la SFOR les Français assurent le commandement de la division multinationale sud-est, aussi dénommée division Salamandre.
Ce nest pas le premier mandat de lOTAN en Bosnie-Herzégovine puisque la SFOR y succède à lIFOR, force elle aussi mise en oeuvre par lOTAN dans le cadre dun premier mandat décidé par la résolution n° 1031, du 15 décembre 1995, pour faire appliquer les aspects militaires de laccord de Dayton.
La mission envoyée par la Commission de la Défense en Bosnie-Herzégovine en mai 1998 a pu constater que si la volonté de vivre ensemble des communautés bosniaques ne semblait pas être véritablement revenue, en revanche, la SFOR réussissait très bien dans sa mission de stabilisation et de pacification.
Le surcoût pour lannée 1998 est évalué à 1 051 million de francs, très proche de celui de lannée précédente, dont 971 millions de francs pour le titre III et 80 pour le titre V.
· Sur le même théâtre a été créée lECMM (Mission dObservation de la Communauté Européenne). Elle a débuté en juillet 1991. Cette mission, placée sous légide de lOSCE et dirigée par le pays assurant la présidence de lUnion européenne, a un rôle de médiation, dobservation et de témoignage. Répartis sur lensemble du théâtre, les 308 membres de la mission agissent en tiers impartiaux et neutres.
La participation française est, depuis le début, la plus importante par le nombre de personnes affectées et par sa contribution financière. Au 30 juin 1998, le détachement français est de 46 personnes ; le surcoût est évalué à 15 millions de francs, au lieu de 25,4 en 1997.
· Après le succès de lopération Alba, en Albanie, au printemps 1997, menée par une force multinationale européenne sous la direction de lItalie assistée de la France, lUEO a réussi à créer, à la demande des Albanais, un petit détachement chargé daider ceux-ci en matière de police. Cest lEMCP (Elément multinational de conseil en matière de police). LEMCP a été créée par le mandat 41 de lUEO du 16 septembre 1997 pour six mois renouvelables et il a été prorogé deux fois depuis.
Leffectif de lEMCP est de 110 policiers ou gendarmes dont 11 gendarmes français. Le surcoût pour lannée 1998 est estimé à 5 millions de francs.
· Héritage de la Guerre du Golfe comme la MONUIK, lopération Southern Watch (dont la participation française est dénommée Alysse) se poursuit toujours. Localisée en Arabie Saoudite, elle repose sur les résolutions n° 688 et n° 949 de lONU, et a débuté en août 1992. Initialement, cette force coalisée (sa composante militaire est formée de la France, du Royaume-Uni et des Etats-Unis) sétait donné pour objectif dinterdire à lIrak lutilisation de ses moyens aériens au sud du 32ème parallèle. Depuis le 3 septembre 1996, lobjectif du mandat a été étendu au sud du 33ème parallèle, mais la France na pas souscrit à cette extension. Son effectif total est de 5 643 militaires, dont 174 Français. Lestimation du surcoût pour 1998 est de 172 millions de francs, dont 55 millions de francs pour le titre III et 117 millions de francs pour le titre V (contre 336 en 1997).
· Enfin, il faut citer lopération FMO (Force Multinationale et Observateurs) au Sinaï. Elle repose sur un protocole daccord signé en août 1981 entre lEgypte et Israël, et est chargée de contrôler la bonne application du traité de paix entre ces deux pays (Traité de Camp David). Elle assure cette mission depuis le 25 avril 1982. Onze nations forment la composante militaire de cette force de 1 500 militaires dont le quartier général est situé à Rome. Lessentiel du contingent français (16 militaires dont 2 observateurs) est constitué par un détachement de lArmée de lair chargé de mettre en oeuvre un petit avion de liaison. Le surcoût pour lannée 1998 devrait sélever à 4 millions de francs dont 3,5 millions de francs au titre III.
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Effectifs
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Surcoûts *
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(dont
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(dont
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Total
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Français
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titre III) *
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titre V) *
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Joint Forge (SFOR)
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37 467
|
3 529
|
1 051
|
971
|
80
|
ECMM
|
308
|
46
|
15
|
15
|
-
|
EMCP
|
110
|
10
|
5
|
5
|
5
|
Southern Watch
|
5 643
|
174
|
172
|
117
|
55
|
FMO
|
1 500
|
16
|
4
|
3,5
|
0,5
|
Total
|
45 028
|
3 775
|
1 247
|
1 111,5
|
140,5
|
* en millions de francs
(Source : Ministère de la Défense)
|
En 1998, ces opérations auront ainsi mobilisé 3 775 militaires français (contre 4 512 en 1997) pour un surcoût prévisionnel de 1 111,5 million de francs (contre 1 584,32 en 1997). Il faut souligner le poids écrasant de la Bosnie-Herzégovine dans ce total, puisque sur 3775 militaires, seuls 190, soit 5 %, sont détachés ailleurs que dans les Balkans, dans deux opérations seulement, Southern Watch (174 militaires) et FMO (16 seulement sur 1 500). Par ailleurs, il faut rappeler que, ces opérations nétant pas conduites par le Département des opérations de maintien de la Paix de lONU, elles sont intégralement à la charge de lEtat français et ne donnent lieu à aucun remboursement de lONU.
Outre sa participation à des opérations multinationales, la France a dû mener en 1998 plusieurs opérations extérieures avec ses seules forces.
· Il sagit dabord de lopération Almandin III ; celle-ci sest inscrite dans le cadre de la Mission interafricaine de surveillance des accords de Bangui. (MISAB). Lambassade de France et des infrastructures françaises ayant été attaquées au mortier, elle avait comme consignes, dans la continuité dAlmandin I et Almandin II menées dans le cadre de laccord de défense du 13 mai 1960 liant la France à la République Centrafricaine, de dissuader toute attaque menée par les mutins à lencontre des forces et des intérêts français, mais aussi des détachements de la MISAB. Commencée le 21 juin 1997, elle a pris fin le 15 avril 1998, à louverture du mandat de la MINURCA. Elle apparaît ainsi à tous égards comme une opération de transition.
Almandin III a mobilisé 322 militaires ; le surcoût total a été de 75,1 millions de francs, soit 72 millions de francs au titre III et 3,1 millions de francs au titre V. Au prorata de la durée, on peut considérer que cette opération a occasionné 29 millions de francs de surcoûts sur lannée 1998.
· Lopération Aramis est menée depuis le 17 février 1996 dans le cadre du soutien de la France au Cameroun et des accords de défense avec ce pays. Elle sinscrit dans lenvironnement du conflit frontalier de Bakassi qui oppose le Cameroun et le Nigeria. Elle se traduit par une assistance aux forces camerounaises (aide à la réorganisation du commandement, soutien logistique, renseignement, entraînement). Sont engagés 67 hommes et deux hélicoptères des EFAO. Le surcoût pour 1998 est de 14,6 millions de francs.
· Lopération Bubale, qui avait débuté le 28 janvier 1997 a été une mission de soutien logistique à la MISAB. Comme Almandin III, elle sest achevée le 15 avril 1998. Y étaient engagés 97 militaires. Le surcoût total a été de 46,8 millions de francs, 41,9 pour le titre III et 4,9 pour le titre V. Par analogie avec Almandin III, on pourra ainsi considérer que 10,5 millions de francs correspondent aux dépenses de lannée 1998.
· Les opérations Cigogne 2A et 2B, du 16 décembre 1997 au 15 avril 1998 ont également été des opérations de transition destinées à accompagner le désengagement des EFAO, assurer le soutien de la MISAB jusquà la fin de son mandat, et faciliter la transition entre la MISAB et la MINURCA et linstallation de celle-ci. Les effectifs engagés ont été en moyenne de 90 hommes, le surcoût a été de 13,6 millions dont 0,2 pour le titre V.
· Dans le cadre de la médiation relative au différend entre lErythrée et le Yémen à propos de leur souveraineté sur larchipel des Hanish, une mission dobservation a été confiée à la France depuis le 10 juin 1996. Cest la mission Condor. Elle consiste notamment en une surveillance aérienne régulière. Son surcoût pour 1998 est de 2,6 millions de francs.
· Lopération Corymbe se traduit par la présence dun bâtiment de combat au large des côtes africaines, en particulier dans le golfe de Guinée. La mission est en cours depuis 1991. Elle met en oeuvre deux avisos A 69 (186 hommes). Le surcoût prévu pour 1998 est de 18,9 millions de francs.
· Lopération Epervier est menée au Tchad depuis février 1986. Il sagit de concourir à la protection des ressortissants français, mais aussi à la stabilité du Tchad, de fournir une aide, essentiellement logistique, au profit de larmée tchadienne, et enfin, on le sait, de constituer un support pour intervenir sur lensemble de la zone dAfrique centrale et de lOuest, notamment en fonction des accords de défense que la France peut avoir avec les pays de la région, sur ordre de létat-major des armées. De lavis de votre rapporteur, cela donne plutôt à Epervier le caractère de force prépositionnée. Le ministère de la Défense inclut du reste le dispositif français au Tchad dans la présentation de ces forces. On se reportera donc à la deuxième partie du présent rapport.
· Lopération Hélianthe est consécutive aux accords de cessez-le feu intéressant le Liban-Sud et signés par le Liban, Israël, la Syrie et la France en juillet 1996. La mission, qui consiste à participer à la surveillance du respect des accords par les parties, ne requiert que 3 hommes (un officier général, un officier supérieur, et un sous-officier). Le surcoût pour lannée 1998 est estimé à 2,8 millions de francs.
· Lopération Iskoutir est une opération humanitaire daide à des populations civiles de Djibouti ; elle se poursuit depuis 1992. Deux officiers et deux sous-officiers y sont affectés. En 1998, elle aura occasionné un surcoût de 1,4 million de franc.
· Les opérations Melchior I et Melchior II ont consisté à rapatrier en Transall à la demande du chef de lEtat béninois, le contingent béninois participant à lECOMOG (243 hommes) depuis Monrovia au Libéria jusquà Cotonou. Cette opération, qui a mobilisé 16 hommes pendant trois jours non consécutifs, est estimée à 550 000 francs.
· Lopération Thétis a consisté à assurer, du 17 janvier au 1er juin 1998 la présence de la France dans les eaux du Golfe persique. Elle a mobilisé une frégate, armée par 224 hommes, et son surcoût est estimé à 16 millions de francs.
· Enfin, plusieurs opérations ont pour objet la garde et la protection spécifiques dambassades de France à létranger. Sont ainsi concernées les ambassades de France en Algérie (153 hommes et 35,9 millions de francs), au Congo (14 hommes et 0,9 millions de francs) et en République Centrafricaine (opération Murène, 33 hommes et 7,4 millions de francs de surcoûts).
Cest ainsi quen 1998 ces opérations auront concerné 1 209 militaires, pour un surcoût de 154,35 millions de francs.
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|
Opérations
|
Effectif de la force
|
Coût prévu pour 1998
(en millions de francs)
|
ALMANDIN
|
322
|
29,2
|
ARAMIS
|
67
|
14,6
|
BUBALE
|
97
|
10,5
|
CIGOGNE 2A et 2B
|
90
|
13,6
|
CONDOR
|
|
2,6
|
CORYMBE
|
186
|
18,9
|
HELIANTHE
|
3
|
2,8
|
ISKOUTIR
|
4
|
1,4
|
MELCHIOR I et II
|
16
|
0,55(1)
|
THÉTIS
|
224
|
16
|
AMB. ALGERIE
|
153
|
35,9
|
AMB. CONGO
|
14
|
0,9
|
AMB. RCA (MURÈNE)
|
33
|
7,4
|
Total
|
1209
|
154,35
|
(1) Les opérations Melchior nont duré que quelques jours
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III UNE RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE ASSUMÉE
En additionnant les trois types dinterventions, on peut ainsi caractériser les actions extérieures de la France pour 1998:
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|
Militaires
|
Surcoûts*
|
Opérations ONU
|
662
|
186,63
|
Opérations déléguées par le Conseil de sécurité
|
3 775
|
1 247
|
Opérations sous commandement
national
|
1209
|
154,35
|
Total
|
5 646
|
1 587,98
|
* en millions de francs
|
La comparaison peut être faite avec les chiffres de 1997.
|
|
|
|
Militaires
|
Surcoûts*
|
Opérations ONU
|
469
|
140,34
|
Opérations déléguées par le Conseil de sécurité
|
4 512
|
1 584,42
|
Opérations sous commandement
national
|
782
|
175,58
|
Total
|
5 764
|
1 900,34
|
* en millions de francs
|
On peut en faire les commentaires suivants. Dabord, même sil augmente un peu, le poids des opérations ONU reste très modeste : un peu plus de 10 % de leffort global, tant en hommes quen coûts. Laugmentation par rapport à 1997 est intégralement due à la MINURCA.
Il faut signaler la part prépondérante des opérations en Bosnie-Herzégovine : 3700 militaires, et 1,1 milliard de francs de surcoûts, y sont consacrés, soit plus des deux tiers de leffort.
LAfrique est la deuxième zone importante ; avec 1 000 militaires environ et 208 millions de francs de surcoûts, sajoutant au coût des troupes prépositionnées, elle représente 13 % de leffort.
Ces deux zones représentent plus de 80 % des opérations extérieures françaises. On retrouve là les commentaires faits plus haut sur lorientation générale de ces opérations.
Enfin, la diminution des coûts par rapport à 1997 ne traduit en aucun cas une sorte de désintérêt de la France pour son rôle de grande puissance. En effet, la différence en matière dopérations internationales sexplique intégralement par une réduction concertée de leffort fourni dans le cadre de la mission Southern Watch et la fin de la mission Alba. Notre pays continue donc à prendre toute sa part dans les missions de sécurité rendues nécessaires par lévolution de la situation internationale.
CONCLUSION
Au terme de lexamen par le présent rapport pour avis des divers aspects de la politique étrangère de défense, de coopération militaire et de sécurité internationale menée par la France par le moyen des instruments financés par les crédits du ministère des Affaires étrangères et de la Défense, les conclusions suivantes peuvent être présentées.
Les éléments constitutifs de lIdentité européenne de sécurité et de défense continuent à évoluer. Le renforcement de lOTAN saccompagne dune évolution profonde de ses modes daction et des relations internes entre ses membres, elle-même liée à la transformation des missions opérationnelles de lOrganisation.
La constitution de forces spécifiques selon les opérations, linstitution des GFIM, la création dun poste de SACEUR-adjoint européen, chargé notamment de la planification dopérations susceptibles dêtre conduites par les seuls alliés européens dans le cadre de lUEO, sont les traductions techniques de cette évolution.
La révision du concept stratégique devra en être la traduction diplomatique et doctrinale. Tirant les conséquences de lévolution des pratiques, elle devra comporter des opportunités plus ouvertes pour le développement de lIdentité européenne de sécurité et de défense.
En tout état de cause, la transformation de lOTAN est dores et déjà favorable au développement du rôle que la France peut y tenir, sans quelle ait pour autant à réviser sa doctrine de fond à son égard ; lévolution actuelle des cotisations de la France à lOTAN nappelle de ce fait aucune réserve.
LUEO apparaît comme linstrument de plus en plus opérationnel dune volonté défaillante. Le principe de labstention constructive doit y être introduit au plus vite.
La création de lOCCAR doit être saluée. Avec la constitution de pôles européens transnationaux en matière dindustrie aéronautique et de défense, lOCCAR, abandonnant le principe du juste retour , est le support technique fondamental du développement dune politique européenne déquipement militaire. Nul doute que les quatre pays fondateurs sauront en faire un instrument cohérent et efficient.
Lévolution de la crise du Kosovo montre le caractère indispensable de lOSCE pour prévenir dirréparables déchirures de lEurope. Sa légitimité doit être confortée et son rôle développé.
Sagissant maintenant de la coopération militaire et de défense, la réforme en cours mérite une approbation sans réserves, même sil faudra veiller dans lavenir à la poursuite effective du développement de la coopération de défense avec les pays dEurope orientale et avec les pays émergents, ainsi quà une étroite association du ministère de la Défense à la définition des actions menées.
Enfin, la France continue à prendre sa part de la sécurité internationale et des opérations de maintien ou dimposition de la paix. En ce sens, elle remplit parfaitement les devoirs de sa charge de membre permanent du Conseil de Sécurité de lONU.
EXAMEN EN COMMISSION
La Commission de la Défense sest réunie le 27 octobre 1998 sous la présidence de M. Paul Quilès, Président, pour examiner les crédits du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Coopération pour 1999, sur le rapport de M. Bernard Cazeneuve, rapporteur pour avis.
M. Bernard Cazeneuve a exposé que, bien que son rapport pour avis traite également de lévolution des conditions de la défense et de la sécurité en Europe, ainsi que de la part prise par la France aux opérations de sécurité internationale ou de maintien de la paix, il concentrerait son propos sur la politique française de coopération dans le domaine de la défense.
Il a souligné que cette politique apparaissait lan dernier dans une situation assez critique, dans la mesure où elle était fractionnée entre trois départements ministériels, le ministère des Affaires étrangères, qui gérait ce quon appelle la coopération de défense, cest-à-dire la coopération militaire avec lensemble des pays développés ou émergents, le Secrétariat détat à la coopération duquel dépendait la coopération avec les anciennes colonies françaises en Afrique, élargie depuis 1996 à lensemble des pays signataires de la Convention de Lomé, et le ministère de la Défense qui entretient de nombreuses forces prépositionnées en Afrique.
Il a ajouté quà ces moyens dispersés correspondaient des budgets disparates ; en effet, alors que la mission militaire de coopération (MMC) disposait du chapitre 41-42 du ministère de la coopération, cest à dire de 703 millions de francs, le service de laide militaire du ministère des affaires étrangères ne gérait, pour le reste du monde, quune dotation de 86,1 millions de francs ; par ailleurs les actions de coopération du ministère de la défense en Afrique pouvaient être estimées entre 100 et 200 millions de francs.
Il a fait valoir quen conséquence, si la France disposait dune mission dassistance militaire de 59 membres en République Centrafricaine ou de 55 membres au Tchad, elle ne pouvait réunir que 63 coopérants de défense pour le reste du monde dont 5 seulement dans les pays dEurope centrale et orientale, et navait à lépoque ouvert aucun poste en Hongrie, pays pourtant candidat à lentrée dans lOTAN.
Le rapporteur pour avis a alors souligné que la réforme de la coopération engagée par lactuel Gouvernement corrigeait une grande partie de ces incohérences et était dores et déjà source de progrès considérables dans la modernisation de la coopération militaire.
Il a précisé que les deux coopérations conduites avec lAfrique, dune part, et le reste du monde, dautre part, allaient être fusionnées et sest réjoui que ce regroupement permette linteraction des moyens et des méthodes, par le biais notamment dune évaluation comparative des projets dans le cadre dune même enveloppe et non plus de dotations budgétaires séparées. Il a indiqué, quen pratique, la coopération militaire serait confiée à une Direction du ministère des affaires étrangères qui devrait prendre le nom de Direction de la coopération militaire et de défense, au sein de laquelle lancien service de laide militaire et lancienne MMC devraient constituer chacune une sous-direction.
Il a ajouté que cette réforme administrative saccompagnait dune réforme budgétaire et que lensemble des crédits était désormais regroupé dans le chapitre 42-29 du budget des Affaires étrangères.
Il a estimé que cette fusion saccompagnait de signes positifs. Il a fait valoir que, dabord, elle se faisait au franc près, sans diminution de crédits, alors que lan dernier encore, si les crédits de la coopération de défense avaient été stabilisés, ceux de la MMC avaient diminué de 5% environ. Les crédits consacrés à la coopération sétablissaient ainsi dans le projet de budget à 789,434 millions de francs.
Il a ajouté que 4 % des crédits de la MMC, soit une dotation de 28 millions de francs, étaient redéployés vers le Service de laide militaire, et que cette politique devrait être poursuivie dans les prochaines années. Il a fait observer que, pour le Service de laide militaire, ce redéploiement aboutissait dans le projet de budget à une augmentation de ses crédits dun tiers.
Il a ensuite indiqué que cette progression se traduisait immédiatement en actions nouvelles, comme lavait souhaité le rapport pour avis de lan dernier, puisque quatre postes de coopérant de défense étaient créés en Europe centrale et orientale et auprès du Partenariat pour la Paix, lun des trois postes de coopérant en Pologne étant un conseiller Air , ce pays cherchant en ce moment à renouveler sa flotte davions de combat.
Il a indiqué que cette politique dynamique de coopération se traduisait également dans loffre de stages. Laugmentation de 50 % des crédits de stages est destinée à accroître leur niveau et leur technicité. Il est envisagé en particulier de développer des stages de pilote ou de missiliers, ainsi que des cours détat-major. M. Bernard Cazeneuve a ajouté quétait également à létude la création dun cursus de sous-officier en Pologne.
Le rapporteur pour avis sest réjoui de cette identification judicieuse des priorités et a estimé que le renforcement ainsi opéré était de nature à changer à long terme les références au sein de lOTAN tout en appuyant utilement le développement de lindustrie française.
Abordant la MMC il a exposé que celle-ci poursuivait la politique engagée depuis quelques années. La diminution de ses crédits lamène une fois de plus à réduire le nombre dassistants militaires techniques (AMT), dont leffectif passe de 570 à 506, soit une réduction de 64 contre 70 lan dernier. Cest sur les missions les plus nombreuses que porte lajustement : celle de Centrafrique passe de 59 membres à 28 ; celle du Tchad de 55 à 46. Plus aucune mission natteint 50 coopérants. En revanche, la formation est autant que possible préservée : plus de 110 AMT restent affectés à ces tâches dans des écoles nationales, dans certains cas à vocation régionale.
Il a expliqué que les écoles nationales à vocation régionale étaient le grand chantier actuel de la MMC. Du fait de laccroissement du nombre des pays dont elle a la charge et de la réduction des promotions dofficiers français, la MMC souhaite en effet transférer autant que possible les formations en Afrique. Dans ce cadre, les pays africains ont estimé que la meilleure solution était que chacun deux puisse offrir un ou plusieurs centres dexcellence, où viendraient aussi se former les élèves ou stagiaires des pays voisins. La MMC offre, pour les écoles ainsi définies, des AMT (douze y sont affectés) et des crédits. Sept écoles nationales à vocation régionale fonctionnent actuellement, et six devraient être ouvertes en 1999, parmi lesquelles une école de maintien de la paix à Zambakro en Côte dIvoire.
Il a relevé que pour le financement de cette nouvelle politique de formation, 8 millions de francs ont été distraits du chapitre 42-29, pour être placés sur une ligne du chapitre 68-80 destiné aux subventions dinvestissement. Cette année, ces 8 millions de francs seront en totalité consacrés à des investissements dans des écoles nationales, notamment à vocation régionale.
Il sest également félicité que, conformément aux voeux quil avait exprimés lan dernier, la coopération militaire soit rapprochée du ministère de la Défense. Il a indiqué quil serait désormais fait appel aux services de ce ministère de façon beaucoup plus complète pour évaluer les actions des missions locales de coopération.
Le rapporteur pour avis a enfin replacé la coopération militaire avec les pays africains dans le cadre de la redéfinition de la politique africaine de la France en matière de sécurité. La France considère désormais que cest dabord aux Africains eux-mêmes quil revient dassurer leur sécurité. Le concept RECAMP (renforcement des capacités africaines de maintien de la paix) a été élaboré en application de cette doctrine. Le rapporteur pour avis a souligné que la mise en oeuvre de ce concept amènerait à recourir à la fois à la MMC et aux forces prépositionnées. Pour la formation, la MMC développe lécole nationale à vocation régionale de Zambakro. Dans le cadre dun élargissement de leur aide à la sécurité de lAfrique, les Etats-Unis devraient également participer au financement de cette école et y envoyer des instructeurs. Pour lentraînement, les troupes prépositionnées jouent un rôle clé, comme on la constaté lors des dernières manoeuvres Guidimakha, au Sénégal. Elles constituent des détachements de formateurs chargés dentraîner les bataillons africains et de les conseiller sur le terrain. Enfin, la MMC met désormais en place des dépôts déquipement, au rythme dun par an. Ces dépôts sont sous la garde des forces prépositionnées, et les équipements sont prêtés aux forces africaines pour leurs opérations.
En conclusion, M. Bernard Cazeneuve a jugé positive laction menée en matière de coopération militaire et de défense, quil sagisse de laction menée en Afrique ou du redéploiement de la coopération militaire. Il a remarqué cependant que, dans ce dernier domaine, les progrès à faire étaient encore considérables. Espérant que, lan prochain, pourrait être annoncée louverture de postes de coopérants militaires au Brésil, au Chili ou à Singapour, il a suggéré que soit utilisée à cet effet une petite partie des crédits qui vont être dégagés par lallégement du dispositif français en Afrique.
Le rapporteur pour avis a enfin proposé de donner un avis favorable aux crédits des Affaires étrangères et de la Coopération.
M. Michel Voisin a souhaité savoir quelles étaient les évolutions respectives du nombre de stagiaires étrangers accueillis dans des écoles militaires françaises et des crédits de laide directe en matériel.
M. Georges Lemoine sest interrogé sur létat des relations franco-malgaches, notamment en ce qui concerne la coopération de défense, Madagascar étant demandeur dune coopération dans le domaine de la gendarmerie.
M. François Lamy sest enquis du contenu de laccord de coopération conclu entre la France et le Qatar dont la presse sest récemment fait lécho.
M. Bernard Cazeneuve a apporté les précisions suivantes :
le nombre de stagiaires étrangers en France a globalement diminué puisquil est passé de 1 338 en 1997 à 916 en 1998. Dans le même temps, le nombre de stagiaires accueillis en Afrique, dans les écoles nationales, notamment à vocation régionale, bénéficiant de lassistance française, sest accru ; le nombre de stagiaires qui y ont été formés est passé de 193 en 1997 à 269 en 1998 et devrait atteindre 550 en 1999 ;
le volume des crédits consacrés à laide logistique directe a été maintenu au niveau de 180 millions de francs depuis 1997. Une partie des moyens destinés à cette aide sera affectée en 1999 à des subventions dinvestissement pour soutenir les écoles nationales à vocation régionale ;
la France et Madagascar ont signé récemment un accord de coopération ; 22 assistants militaires techniques apportent leur concours à la formation de militaires malgaches ;
le récent accord de coopération entre la France et le Qatar na pas encore été soumis à la ratification du Parlement.
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La Commission de la Défense, sur proposition de son rapporteur pour avis, a donné un avis favorable à ladoption des crédits destinés aux Affaires étrangères et à la Coopération.
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