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Session ordinaire de 2000-2001 - 14ème jour de séance, 31ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 26 OCTOBRE 2000

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ
SOCIALE POUR 2001 (suite) 2

ART. 5 2

APRÈS L'ART. 5 3

ART. 6 4

ART. 7 5

ART. 8 5

APRÈS L'ART. 8 5

ART. 9 6

ART. 10 8

APRÈS L'ART. 10 10

ART. 11 13

ART. 12 16

AVANT L'ART. 14 17

ART. 14 18

ART. 15 21

ART. 16 22

La séance est ouverte à quinze heures.

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FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2001 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

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ART. 5

M. Yves Bur - Sous couvert de simplification, l'article 5 supprime la possibilité pour les exploitants agricoles soumis à un régime réel d'imposition, de calculer leur cotisation selon une assiette « en année N », c'est-à-dire fondée sur les revenus de l'année en cours : cette possibilité est particulièrement adaptée en cas de variation importantes du revenu d'une année sur l'autre.

La possibilité de retenir l'assiette N a été obtenue après plusieurs années de revendications syndicales justifiées par le caractère fiscalement inique de l'assiette N-1.

L'amendement 185 tend donc à la suppression de l'article 5.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 328 a le même objet. Il permettrait d'éviter l'instabilité des règles fiscales pour des professions qui ont mis des années à obtenir une assiette qui prenne en compte les variations d'activité et donc de revenus.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociale pour les recettes et l'équilibre général - En agriculture plus qu'ailleurs, il peut y avoir des écarts de revenus importants d'une année sur l'autre. Mais parler d'iniquité fiscale est impropre : l'assiette triennale subsiste et l'assiette annuelle n'est qu'optionnelle. L'article 5 harmonise l'assiette avec celle des non salariés non agricoles et facilite le travail de la Mutualité sociale agricole. Même si l'on peut comprendre les arguments des auteurs de ces amendements, je demande qu'ils soient repoussés.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Même avis.

Les amendements 185 et 328, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Bernard Accoyer - L'amendement 337 est défendu.

M. Alfred Recours, rapporteur - Avis défavorable, pour les raisons déjà exposées.

L'amendement 337, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Bur - L'amendement 333 est défendu.

L'amendement 333, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances - Le dispositif actuel, issu de la grande réforme de 1996, qui a fait suite à des années de revendication, a substitué le revenu professionnel au revenu cadastral. Mais il a abouti à un système très complexe qui distingue quatre assiettes de référence : deux triennales et deux annuelles. L'amendement 2 le simplifie pour faciliter la gestion des caisses de MSA tout en gardant la possibilité de choisir entre assiette annuelle et triennale, laquelle lisse les revenus et atténue donc les crises conjoncturelles.

Cet amendement permettrait aux professionnels de revenir sur leur choix dans un délai de dix ans.

M. Alfred Recours, rapporteur - La commission des affaires sociales a adopté cet amendement, sous réserve d'un sous-amendement 53 réduisant le délai à six ans.

Mme la Ministre - Avis favorable à l'amendement compte tenu du sous-amendement.

Le sous-amendement 53, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 2 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - L'amendement 3 est de précision.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Les amendements 4, 13 et 14 visent à modifier légèrement le dispositif relatif à la période de transition en prévoyant que si les professionnels n'ont pas opté expressément pour l'assiette annuelle, on considère qu'ils ont choisi l'assiette triennale.

M. Alfred Recours, rapporteur - Ce sont des amendements de simplification. Avis favorable.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 4, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 13 et 14.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Je retire l'amendement 15 car il est devenu inutile.

L'amendement 5 est de conséquence.

M. Alfred Recours, rapporteur - Avis favorable.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 5, mis aux voix, est adopté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Deux catégories de personnes acquittent une cotisation dite de solidarité, les associés non exploitants et les agriculteurs ayant une exploitation de subsistance. Compte tenu de la jurisprudence de la Cour de cassation et de la modicité de ces cotisations, l'amendement 6 prévoit dans ces cas une assiette annuelle.

M. Alfred Recours, rapporteur - Avis favorable.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 6, mis aux voix, est adopté.

L'article 5 ainsi amendé, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 5

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - L'amendement 202 est important, surtout pour les jeunes agriculteurs.

L'an dernier nous avions adopté un amendement majorant de 15 points la réduction des cotisations sociales dans les trois années suivant l'installation.

Cet amendement prolonge l'exonération de deux ans et aurait pour effet que la réduction de charges sociales pour les jeunes agriculteurs serait de 65 % la première année, 55 % la deuxième, 35 % la troisième et de 25 % les deux dernières années.

Cette mesure est très attendue par la profession et favoriserait l'installation.

M. Alfred Recours, rapporteur - C'est un excellent amendement, qui pérennise et renforce le dispositif adopté l'an dernier.

J'ai accepté de lever la forclusion sur un sous-amendement de Mme Béatrice Marre qui va dans le même sens.

Mme la Présidente - Ce n'est pas un sous-amendement, mais un amendement.

M. Bernard Accoyer - Rappel au Règlement ! On vient de nous distribuer cet amendement en séance, alors que la discussion générale est terminée. Quand a-t-il été déposé ? Le délai de dépôt des amendements a-t-il été réouvert parce que le Gouvernement aurait déposé lui-même des amendements ?

Mme la Présidente - Cet amendement a été accepté par la commission et peut donc venir en discussion, conformément à l'article 99-5 du Règlement.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Sur le fond, je crois que nous serons unanimes à adopter cet amendement, qui concerne aussi bien les jeunes agriculteurs déjà installés que ceux qui s'apprêtent à le faire.

Je souligne que l'an dernier le délai de mise en _uvre de la majoration d'exonération a entraîné un surcoût de gestion de 10 millions pour la MSA. Je souhaiterais que cette année le décret d'application soit rédigé plus vite, dans l'intérêt des jeunes agriculteurs et de la MSA.

Mme la Présidente - Je rappelle que nous en sommes encore à l'amendement 202.

Mme la Ministre - Je trouve excellent cet amendement qui va faire bénéficier les jeunes agriculteurs d'une exonération plus importante, et ce pendant cinq ans au lieu de trois. Je lève le gage.

L'amendement 202, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - La commission des affaires sociales ne s'est pas prononcée sur l'amendement 382 de Mme Marre. Le président et le rapporteur de la commission ont levé le délai de forclusion pour la présentation de cet amendement, comme le Règlement les y autorise...

M. Bernard Accoyer - Quel article ?

M. Alfred Recours, rapporteur - Celui que Mme la Présidente a cité. Vous conviendrez que nous n'abusons pas de ce pouvoir et c'est peut-être pourquoi vous êtes un peu surpris.

Sur le fond, l'amendement va dans le même sens que le précédent et j'y suis très favorable.

Mme la Ministre - Cet amendement est superflu car ces dispositions sont déjà prévues à l'article 7 du projet de loi d'orientation sur la forêt, qui a été voté en première lecture en juin dernier. Les jeunes agriculteurs ayant signé un CTE pourront bénéficier de l'exonération sans condition relative à la taille de l'exploitation.

M. François Goulard - Les CTE, dont M. Recours n'a même pas prononcé le nom, représentent à nos yeux une tentative de fonctionnarisation de l'agriculture à laquelle nous sommes hostiles, car elle renforcerait les inégalités entre agriculteurs.

M. Alfred Recours, rapporteur - La ministre ayant indiqué que l'amendement avait ou aura satisfaction, je le retire.

L'amendement 382 est retiré.

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ART. 6

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 54 est rédactionnel.

L'amendement 54, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Bur - L'amendement 334 de M. de Courson est défendu.

M. Alfred Recours, rapporteur - Nous avons déjà examiné cette question. Rejet.

Mme la Ministre - Avis défavorable.

L'amendement 334, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - L'option d'une double assiette, triennale et annuelle, n'existe pas pour la CSG, à la différence des cotisations sociales. L'amendement 7 tend à permettre ce choix et à en préciser les modalités.

M. Yves Bur - L'amendement 335 est identique.

M. Alfred Recours, rapporteur - Avis favorable. Cette mesure coûte 50 millions, mais la dépense sera compensée par le gain attendu des dispositions de l'article lui-même. Reste qu'un problème d'équité risque de se poser vis-à-vis de l'ensemble des non-salariés non-agricoles.

Mme la Ministre - Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement. Il est déjà tenu compte, dans l'assiette de la CSG applicable aux exploitations agricoles, des spécificités de ces dernières. La profession agricole est la seule à bénéficier d'un lissage des revenus professionnels.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis - Outre le fait que les revenus agricoles puissent être lissés, ce qui est consubstantiel à l'exercice de cette profession, il ne me paraît pas choquant que l'assiette soit triennale. L'impossibilité où sont les agriculteurs de tenir compte de leurs déficits dans le calcul de leur CSG est une injustice. Vous la jugez acceptable parce que d'autres professions la subissent aussi. Je ne partage pas cette conception, et je regretterais que le Gouvernement maintienne sa position, auquel cas, cependant, je retirerais mon amendement. Oui, il est injuste de demander à des actifs d'acquitter des impôts sur des revenus qu'ils n'ont pas perçus. Vous saurez, j'en suis sûr, vous faire notre interprète auprès de votre collègue de l'Economie.

Je retire l'amendement que, je le rappelle, la commission des finances a adopté à l'unanimité.

L'amendement 7 est retiré.

M. François Goulard - Je partage l'analyse de M. Cahuzac, dont la proposition, comme celle de M. de Courson, pourrait recueillir ici l'unanimité. Le Gouvernement devrait revoir sa position.

L'amendement 335, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 7

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 55 est rédactionnel.

Mme la Ministre - Avis favorable du Gouvernement, qui lève le gage.

M. Bernard Accoyer - De plus en plus le PLFSS ne traite que de questions fiscales et de procédures hautement techniques. Nous nous éloignons de l'esprit de ce type de texte, qui veut que l'on discute de protection sociale. Sur ce point, je tiens à m'élever contre les détournements opérés sur la C3S, cette contribution sur les bénéfices des sociétés destinée à l'origine à sauver les caisses des artisans et commerçants mises à mal par la dramatique explosion de la grande distribution. Le Gouvernement, peu à peu, se livre à un dépeçage de la C3S. Au lieu que ses fonds aillent aux artisans et commerçants qui souffrent, ils sont utilisés à tout autre chose.

Je ne voterai ni l'amendement ni l'article 7.

L'amendement 55, mis aux voix, est adopté.

L'article 7 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 8

M. Bernard Accoyer - Encore une validation ! Je dénonce cette façon de procéder.

L'article 8, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 8

M. Alfred Recours, rapporteur - Les rémunérations pour congés payés et intempéries versées aux salariés du BTP sont mutualisées dans des caisses de congés payés. De ce fait, les entreprises et les salariés ne bénéficient pas, pour les sommes payées au titre de ces congés, des allégements et exonérations existants. Un système forfaitaire avait été mis au point. Pour les allégements que nous sommes en train de décider, il faut éviter toute pénalisation de ce type. C'est à quoi tend l'amendement 56. Je sais que ma proposition peut soulever certaines difficultés mais, si le Gouvernement m'assure que les compensations existantes seront suffisantes au regard des nouvelles exonérations, je veux bien retirer l'amendement.

Mme la Ministre - Mon analyse sera légèrement différente : je ne crois pas que les employeurs relevant des caisses de congés payés soient pénalisés par rapport aux autres employeurs, car ils cotisent à un taux beaucoup plus faible -0,5 %- et bénéficient déjà de diverses mesures d'allégement, pour l'emploi des jeunes, pour la réduction du temps de travail, ainsi que de l'abattement de 10 % pour la CSG et la CRDS. Quant aux indemnités pour intempéries, elles ne sont pas soumises à cotisation, étant assimilées à des indemnités de chômage. Voilà pourquoi je souhaite le retrait de l'amendement.

M. Alfred Recours, rapporteur - Chaque fois qu'on adopte une mesure favorable à une catégorie, cela pose le problème des compensations pour d'autres. Si vous acceptiez de conduire une expertise avec la caisse de surcompensation du bâtiment, je pourrais retirer l'amendement.

Mme la Ministre - J'accepte cette expertise conjointe.

M. François Goulard - Je reprends l'amendement, car je n'ai pas été convaincu par votre argumentation. S'il y a bien un avantage pour la cotisation au titre des accidents du travail, il est sans commune mesure avec ce qu'apporte l'exemption. Votons cet amendement en première lecture, ne serait-ce que pour inciter davantage le Gouvernement à conduire l'expertise demandée !

L'amendement 56, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 9

M. Jean-Luc Préel - J'arrive en retard dans ce débat et vous prie de m'en excuser : c'est que j'ai été retenu par une manifestation des professionnels de santé, très mécontents des sanctions collectives qu'on leur impose.

Cet article devrait faire partie d'un DMOS -je me souviens qu'il y a un an, M. Le Garrec se réjouissait de l'arrivée prochaine d'une grande loi de modernisation sociale...

M. Marcel Rogemont - Elle va arriver !

M. Jean-Luc Préel - Un an plus tard, nous n'avons rien vu venir et la fin de la législature approche. Cet article manifeste la grande complexité de la loi sur les 35 heures, loi imposée, identique pour tous, qui conduit à des situations inextricables. On voit des artisans obligés de renoncer à certains travaux faute de trouver des salariés compétents, tandis que la rigidité de votre loi empêche les salariés qui le souhaiteraient de faire des heures supplémentaires.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 57 tend à éviter toute ambiguïté lors de la mise en place d'équivalences par voie contractuelle.

Mme la Ministre - Favorable.

M. François Goulard - Voilà un amendement symbolique de tout ce qui nous oppose : nous faisons confiance à la convention, vous préférez la voie réglementaire.

M. Alfred Recours, rapporteur - La convention existe, mais la loi sert à l'encadrer.

L'amendement 57, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 58 complète le précédent pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 19 janvier 2000.

Mme la Ministre - Favorable, sous réserve des sous-amendements 376, 377 et 378. Les deux premiers sont rédactionnels, le troisième est de cohérence avec l'article 19 de la loi du 19 juin 2000.

M. Alfred Recours, rapporteur - Les sous-amendements 376 et 377 n'appellent pas d'observation, mais le dernier demande quelques précisions. En effet, il ne faudrait pas que se trouvent dispensés de la clause d'emploi des accords antérieurs à la loi et n'apportant pas aux salariés les garanties offertes par cette loi. Je souhaiterais que ce point soit étudié d'ici à la seconde lecture.

Mme la Ministre - Soit : nous y réfléchirons d'ici là.

M. Maxime Gremetz - Je déplore que les décrets d'application de la loi sur les 35 heures et les circulaires ne soient pas, sur certains points, conformes à l'esprit du texte voté par le législateur. Madame la ministre, j'ai fait porter une étude juridique relative à ce problème à votre ministère. Quand je participe à l'élaboration d'une loi, j'entends qu'elle soit appliquée dans sa lettre et dans son esprit. Or, en ce qui concerne les accords, si la loi spécifie que les exonérations et les aides incitatives ne seront accordées que sous condition de création d'emplois ou de maintien d'emplois, les décrets ne reprennent pas cette exigence. Je peux citer des départements dans lesquels des exonérations de cotisations patronales ou des aides ont été consenties à des entreprises qui en suppriment.

M. François Goulard - Il n'y a pas d'obligation de création d'emplois dans la deuxième loi RTT !

M. Maxime Gremetz - Vous l'avez mal lue ! Car elle prévoit non seulement que les exonérations et les aides sont conditionnées, mais aussi que le nombre d'emplois préservés ou créés doit être précisé dans les accords. D'ailleurs, si tel n'était pas le cas, nous aurions voté contre le projet de loi !

M. François Goulard - Maxime Gremetz s'est fait avoir !

M. Maxime Gremetz - Que les aides soient de moins en moins soumises à condition est contraire à la loi. Si cette situation perdure, nous serons obligés de faire un recours. Il est trop facile pour les entreprises de supprimer des emplois après avoir empoché les aides !

Mme la Ministre - Nous examinerons votre dossier avec attention.

M. François Goulard - Si M. Gremetz pense que la deuxième loi sur les 35 heures conditionne l'octroi d'aides à des créations effectives d'emplois, il se trompe ! Il a obtenu une rédaction qui lui convenait mieux, mais il a fait un marché de dupes !

M. Maxime Gremetz - Ce n'est pourtant pas ce que vous avez dit dans vos explications de vote ! Vous reprochiez au Gouvernement de nous avoir fait trop de concessions !

M. François Goulard - Nous en sommes au raffinement du raffinement, les amendements que nous discutons interprétant des dispositions peu claires. Une telle complexité dépasse mes compétences. Or ces textes devront être appliqués par des PME qui ont autre chose à faire que de s'interroger sur leur signification et qui se trouvent pénalisées par leur complication.

M. Bernard Accoyer - Je me félicite que cette discussion nous donne l'occasion de reparler des 35 heures, qui sont financées cette année, à hauteur de 85 milliards, par des recettes qui devraient revenir à la protection sociale. L'échange intervenu entre M. Gremetz et Mme Guigou montre que l'on veut à tout prix promouvoir cette mesure symbolique, au nom d'intérêts politiciens et en dépit du tort qu'elle cause à la France ! Aux termes d'une étude menée par Ernst et Young auprès de 350 responsables de filiales de sociétés étrangères implantées en France, 65 % d'entre eux ne choisiraient pas notre pays pour investir aujourd'hui, en raison du poids des prélèvements fiscaux et sociaux, des 35 heures, des lourdeurs administratives ; 44 % envisagent une délocalisation à l'étranger, non pas seulement au Royaume-Uni mais aussi en Allemagne ou aux Pays-Bas. Les 35 heures sont totalement incomprises à l'étranger.

M. Maxime Gremetz - C'est un institut patronal qui le dit !

M. Bernard Accoyer - Alors que tout démontre que les 35 heures handicapent notre économie, ayez enfin un regard sincère sur les déclarations de M. Fabius qui dit -avec raison- qu'il faut surseoir à leur application dans les PME !

MM. François Goulard et Yves Bur - Très bien !

M. Maxime Gremetz - Je voudrais faire un rappel au Règlement.

Mme la Présidente - Sur quel article vous appuyez-vous ?

M. Maxime Gremetz - Sur l'article 58 ou plutôt je demande une suspension de séance. Il faut relire ici-même la loi sur les 35 heures, puisque j'entends dire qu'elle n'a jamais prévu de conditionner les aides !

Mme la Présidente - Vous n'avez pas délégation de votre groupe pour demander cette suspension ; je ne peux donc pas vous l'accorder.

Les sous-amendements 376 et 377, successivement mis aux voix, sont adoptés, de même que le sous-amendement 378.

L'amendement 58 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - Les amendements 59 et 60 sont rédactionnels.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 59, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 60.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 61 est de cohérence avec les précédents.

L'amendement 61, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 9 modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 10

M. Jean-Luc Préel - Cet article concerne le FOREC, qui est une véritable machine infernale, Créé il y a un an, il reste toujours virtuel et la question de son financement demeure entière, alors qu'il faut trouver 85 milliards pour 2001. Le conseil de surveillance, constitué de parlementaires, qui doit en contrôler le fonctionnement n'est bien entendu pas en place. Est-ce sérieux ? Est-ce démocratique ?

La création du FOREC permet de débudgétiser les dépenses liées aux 35 heures. Mais après l'annulation par le Conseil constitutionnel de la taxe sur les heures supplémentaires, les 64 milliards prévus en 2000 pour son financement se sont révélés insuffisants. La situation est encore plus difficile pour 2001, et la TGAP n'apportera jamais les 12,5 milliards prévus en 2002, alors que le financement des 35 heures atteindra alors son rythme de croisière.

Des ressources supplémentaires devront donc être trouvées. En 2001, officiellement l'Etat ne versera plus rien au FOREC, mais il s'agit d'un système de tuyauterie : la taxe sur les véhicules de société et une partie de la taxe sur les conventions d'assurance vont être directement affectées au fonds.

Tout cela est d'une folle complexité. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Telle est la devise de l'énarchie de Bercy.

M. Bernard Accoyer - Madame la ministre, je pense que vous avez conscience, en abordant la question de l'application des 35 heures et de leurs conséquence sociales et humaines, que vous pénétrez dans un champ miné par votre prédécesseur. Derrière les sourires de la passation de pouvoir, en effet, il y a les réalités de la situation sociale de la France. Le ministre de l'économie et des finances lui-même déclare qu'en raison du manque de main-d'_uvre qualifiée, il n'est plus possible de répondre à la demande et que la France est engagée dans une spirale infernale. A plus long terme, la croissance va être bridée par l'application dogmatique des 35 heures, laquelle entraîne en outre un détournement de ressources sociales.

J'espère que sur cette question, votre seule réponse ne sera pas l'indifférence, comme au sujet des 700 000 familles qui, le 31 octobre, vont être privées de la protection sociale dont elles bénéficiaient jusqu'à présent.

M. François Goulard - D'abord une remarque de procédure. Avant le FOREC, les exonérations de charges sociales ont toujours été couvertes par des dotations budgétaires, figurant dans la loi de finances. L'innovation que constitue le FOREC est une assez grave erreur, sur le principe et pour la lisibilité des documents budgétaires.

D'ailleurs, à l'occasion de la réflexion que nous menons actuellement sur la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, nous sommes parvenus à l'idée qu'il était indispensable de revoir les frontières entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. Nous voyons bien ici les inconvénients du choix qui a été fait : ou bien nous parlons, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, de dispositions fiscales qui n'ont rien à y faire, ou bien nous renvoyons le débat sur les recettes au projet de loi de finances, mais notre approche est alors incohérente puisque nous examinons les dépenses mais non leur financement.

Au-delà de cette observation, vous ne nous ôterez pas l'idée que le Gouvernement a voulu rendre opaque le coût du financement des 35 heures, qui n'est pas sans le gêner. A terme, les 35 heures vont constituer une charge considérable pour les finances publiques et vont probablement empêcher d'amorcer, comme dans la plupart des autres pays européens, une décrue des dépenses publiques.

L'un des grands sujets de débat pour les prochaines échéances électorales sera de savoir si l'on continue cette politique folle, qui menace nos entreprises et le pouvoir d'achat des Français et qui entraîne une dégradation des conditions de travail. Notre pays est le seul au monde à subventionner le non-travail, à payer les entreprises pour qu'elles fassent travailler moins longtemps leurs salariés !

Quant à prétendre que cela entraîne des créations d'emplois, c'est faux ! Les créations enregistrées résultent tout simplement de la croissance, comme chez nos voisins européens. Au total, les 35 heures, grandes consommatrices de crédits budgétaires, ne feront que nuire à l'économie française et à l'emploi (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Yves Bur - L'amendement 275 tend à supprimer cet article car nous dénonçons tant les problèmes que posent les 35 heures aux entreprises et leur coût pour le contribuable que la débudgétisation de leur financement.

M. Alfred Recours, rapporteur - Certains auraient la chance de voir des centaines de milliers d'emplois se créer sans y être pour rien, et d'autres en verraient autant disparaître malgré leurs efforts ? Je ne suis pas sûr que cette défense soit la meilleure pour permettre à l'opposition de redevenir majoritaire...

Il s'agit ici du financement par le FOREC des aides Robien et de l'exonération des cotisations familiales. Il est vrai que les emplois Robien coûtent beaucoup plus cher que ceux de Martine Aubry.

M. Jean-Luc Préel - C'est une loi souple, basée sur le volontariat !

M. Alfred Recours, rapporteur - Je conçois que vous ne vouliez pas qu'ils soient financés...

M. François Goulard - Si, mais par le budget de l'Etat !

M. Alfred Recours, rapporteur - Votre logique se dévoile de plus en plus. Avis défavorable.

Mme la ministre - Contre. L'article 10 précise que le FOREC prend en charge l'ensemble des mesures relatives à la réduction du temps de travail, y compris celles de la loi Robien, mises en place par l'opposition.

L'amendement 275, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 10, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 10

M. Maxime Gremetz - Notre amendement 359 est au c_ur du sujet. Il y a trois ans, le Gouvernement s'est engagé sur la modification de l'assiette des cotisations sociales. Mme Aubry nous l'a dit, les difficultés qu'elle a rencontrées à Bercy nous contraignaient à chercher une autre voie. Nous sommes pugnaces et nous avons trouvé le début d'une piste que nous avons concrétisée avec la création de la CSB, la contribution sociale sur les bénéfices. Monsieur Accoyer, vous avez hurlé avec vos amis : on s'attaquait à ces entreprises qui ont déjà tant de difficultés ! Mais la CSB ne concerne que les grandes sociétés. Elle a rapporté l'an dernier 4,3 milliards. Savez-vous que si l'on ne prélevait qu'1 % des bénéfices des trente plus grandes entreprises, on détiendrait 6 milliards de francs ? Qui va nous dire que Valéo ou Carbonnes-Lorraine en serait ruiné ?

Mme la ministre a parlé de révolution culturelle. La contribution que nous avons créée doit prendre de l'ampleur, notamment dans le cadre du prochain PLFSS, après une étude sur les revenus financiers non imposés.

Notre proposition vise à commencer tout doucement cette évolution, en portant la CSB de 3,3 à 5 %, ce qui rapporterait 3 milliards supplémentaires. Le Gouvernement ne peut pas, après ce qu'il a fait l'an dernier, alors que nous n'avions pas la même croissance, ni les profits records d'aujourd'hui, stopper brutalement. Il ne peut pas refuser de prélever 3 milliards supplémentaires sur les profits des grandes sociétés pour augmenter les allocations familiales, rattraper le pouvoir d'achat des pensions et retraites et rembourser les lunettes et les soins dentaires des enfants. Il ne peut pas réserver à cette proposition le même sort qu'à l'UNEDIC : on sait très bien que la nouvelle convention ne permet pas de mieux indemniser les chômeurs. La gauche plurielle doit absolument avancer.

M. Alfred Recours, rapporteur - Cet amendement a été repoussé par la commission. Avant que le président de la commission ne prenne la parole, je voudrais rappeler certains faits. D'abord, le produit attendu des taxes sur les sociétés, CSB comprise, n'est pas tout à fait exact. Ensuite, la réforme des cotisations patronales est engagée. Nous en modifions l'assiette et le contenu tous les ans.

M. Maxime Gremetz - Faites les comptes !

M. Alfred Recours, rapporteur - Nous avons encore à progresser, mais ce n'est pas en modifiant unilatéralement un des éléments des cotisations patronales sans considérer l'ensemble que nous pourrons répondre à votre question, Monsieur Gremetz.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - J'écoute toujours M. Gremetz avec attention, mais il me permettra de replacer dans son contexte la référence qu'il a faite à Mme Aubry. Mme Aubry a dit que nous allions étendre l'allégement des cotisations jusqu'à 1,8 fois le SMIC pour éviter ce qu'on doit appeler les « trappes à bas salaires ».

La réforme avait un deuxième objectif, il a été atteint : la réduction du temps de travail est un élément-clé de la création d'emplois -sur ce point je suis en désaccord avec M. Goulard. On peut avancer aujourd'hui le chiffre de 400 000 emplois créés au terme de la réforme (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Troisièmement, vous savez bien, Monsieur Goulard, qu'il ne s'agit pas de moins travailler, mais de mieux travailler.

En ce qui concerne la CSG, Mme Aubry avait clairement annoncé que le coût de la baisse des cotisations, soit 25 milliards, devait, à terme, être supporté à parts à peu près égales par la CSB et la TGAP. Or nous sommes en train de réaliser cet engagement. La TGAP rapportera un peu plus de 7 milliards l'an prochain et la CSB plus de 6 milliards. L'économie française se porte bien et les entreprises françaises contribuent effectivement davantage à l'équilibre financier de la réforme (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR).

C'est pour cette raison de fond, Monsieur Gremetz, que nous avons, ce matin en commission, repoussé votre amendement.

Mme la Ministre - J'ai évidemment écouté très attentivement M. Gremetz, dont l'intervention se situait dans le droit fil de celle d'hier soir : les bénéfices des entreprises ayant augmenté, il estime légitime que leurs contributions au financement des allégements de charges augmentent également.

M. Bernard Accoyer - C'est surréaliste !

Mme la Ministre - Mais à cause, justement, de cette augmentation des bénéfices, le produit de la CSB va passer de 3,8 milliards en 2000 à 6 milliards en 2001, soit une augmentation de 50 %. Votre objectif sera donc atteint, Monsieur Gremetz, sans qu'il soit besoin d'une modification législative.

En outre, l'assiette de la TGAP va être étendue dans le prochain collectif budgétaire -c'est un engagement. Les entreprises seront donc davantage sollicitées pour le financement du FOREC.

Ces deux taxes touchent essentiellement les entreprises capitalistiques auxquelles vous faites allusion.

Pas plus qu'hier, je ne puis donc répondre favorablement à votre proposition.

M. François Goulard - Je vois qu'on ne ménage pas les bonnes paroles à M. Gremetz -certains parlent de pommade.

En ce qui concerne l'imposition des sociétés, la majoration de 10 % va être progressivement supprimée, mais la mesure est gagée par une augmentation de la fiscalité des entreprises !

On peut certes, Monsieur Gremetz, continuer à augmenter la fiscalité pesant sur les entreprises. Mais parmi les événements importants des dernières années, il n'y a pas eu que la chute du Mur de Berlin : il y a eu aussi l'intensification des échanges et la liberté de circulation des biens et services. Aujourd'hui les entreprises font leurs choix d'implantation en fonction de critères parmi lesquels la fiscalité joue un rôle important. Or plusieurs pays très proches du nôtre sont engagés dans un mouvement inverse...

M. Maxime Gremetz - L'Allemagne !

M. François Goulard - Effectivement l'Allemagne, qui a un gouvernement socialiste, est en train de mettre en _uvre un plan de réduction de l'impôt sur les sociétés qui va faire tomber son taux à 25 %. Alors si on augmente les prélèvements en France, les entreprises iront ailleurs : ce sera regrettable pour le Trésor public, mais surtout pour les Français.

Vous nous expliquez que nous sommes engagés dans un grand mouvement de substitution des revenus du capital à ceux du travail pour l'assiette des cotisations sociales : c'est se payer de mots ! D'abord parce que le FOREC ne finance pas la protection sociale mais des dépenses qui incombent à l'Etat. Ensuite parce que la CSB et la TGAP ont un montant très marginal par rapport à l'ensemble des prélèvements sociaux : c'est donc une mesure purement cosmétique.

Et en ce qui concerne la TGAP, il serait souhaitable que son produit diminue, car cela signifierait une réduction des activités polluantes. Mais comme on a besoin d'une manne pour financer les 35 heures, on va être incité à augmenter les taux et c'est profondément malsain.

Monsieur Le Garrec, vos chiffres mirifiques de créations d'emplois se fondent sur les emplois déclarés à l'administration pour bénéficier des aides. Mais vous oubliez qu'il y a aussi des entreprises qui suppriment ou gèlent des emplois à cause des 35 heures ! Votre comptabilité est incomplète, le bilan réel n'est pas positif.

Monsieur Recours, vous vous référez de plus en plus à la période 1993-97 pour faire des comparaisons. Mais je vous rappelle que depuis 1997 la valeur du franc et de l'euro a baissé de 25 % et que les taux d'intérêt sont passés de 10 % à 3,5 % : cela a des conséquences considérables sur la croissance !

Alors cessez de raconter que c'est par la vertu d'un gouvernement socialiste que l'économie française se porte mieux : c'est le résultat des efforts que nous avons consentis pour construire l'euro. Vous en bénéficiez aujourd'hui, estimez-vous heureux !

M. le Président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Nous sommes heureux !

M. Bernard Accoyer - Nous assistons à un nouveau coup de force du parti communiste ! (Exclamations sur les bancs du groupe communiste) Le Gouvernement est tout sucre tout miel devant M. Gremetz et j'ai vu les circonlocutions de la fine fleur du parti socialiste pour essayer de l'amadouer. Rien n'est trop beau pour calmer ses ardeurs ! (Rires sur divers bancs)

Son amendement propose tout simplement d'augmenter un impôt de 50 % et on lui répond gentiment que ça n'est pas inintéressant mais que, tous comptes faits, ce n'est pas utile parce que, grâce à la croissance, les prélèvements obligatoires vont de toute façon augmenter de 50 % !

Madame la ministre, quand 93 % des chefs d'entreprise qui ont investi en France ces dernières années se plaignent de prélèvements fiscaux excessifs, pensez-vous qu'il soit responsable, de la part du membre du Gouvernement que vous êtes et à qui on prête des ambitions importantes, de tenir de tels propos ? Vous dites ensuite : « Ne vous inquiétez pas, Monsieur Gremetz, les prélèvements sur les bénéfices des sociétés vont augmenter de 50 % et c'est très bien. Il en ira de même avec la TGAP, dont nous allons élargir l'assiette. »

En réalité, l'obligation des 35 heures conduit soit les entreprises à payer plus, soit les salariés à gagner moins. Ce sont même les deux à la fois.

M. Maxime Gremetz - Il y a des conservateurs, qui défendent les patrons, et des modernes, qui défendent les salariés.

Je ne parle pas des entreprises en général. Je suis d'accord pour aider les PME qui créent de l'emploi.

Je pense aux grandes entreprises dont l'INSEE indique qu'elles ont réalisé au premier semestre 2000 des profits historiques, autant qu'en un an pour les 20 premiers grands groupes, soit 90 milliards. France-Télécom : 25 milliards, soit 8 milliards de plus ; Total-Fina : plus 213 %. Vous voulez que j'en cite d'autres ?

Plusieurs députés RPR, UDF et DL - Oui !

M. Maxime Gremetz - PSA plus 25 %, Schneider, Lafarge, L'Oréal, Casino...

Le Gouvernement a décidé de ne pas modifier l'assiette des cotisations. Il faudra pourtant y venir. En effet vouloir financer la protection sociale en taxant le tabac, l'alcool et la pollution, c'est vouloir que l'on fume plus, que l'on boive plus, et que l'on pollue plus. Cela n'a pas de sens !

Monsieur Le Garrec, quand vous affirmez que la ministre n'a jamais tenu les propos que j'ai cités, je vous renvoie au Journal officiel. Vous ne pouvez pas dire que le Gouvernement fait ce qu'il a annoncé. Il se borne à prélever une petite goutte d'eau dans la mer des profits.

Monsieur Le Garrec, quand vous dites que l'on a décidé de financer les exonérations de charges sociales, vous mélangez les genres (Approbations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Nous avions tous pris l'engagement de mettre en cause les exonérations patronales au titre des bas salaires. M. Seillière n'a-t-il pas dit en commission : « Votre gouvernement est bien parce qu'il avait annoncé qu'il supprimerait l'exonération jusqu'à 1,3 SMIC, or il l'étend jusqu'à 1,8 SMIC » ? Ainsi le groupe Magneti-Marelli, qui ferme ses usines après avoir ponctionné le maximum de fonds publics, bénéficie de l'exonération jusqu'à 1,8 SMIC pour 680 de ses 700 salariés, tant il les paie mal. Voilà la réalité. Et vous prétendez qu'on ponctionne le capital ?

Baisse-t-on ou non la surtaxe Juppé, à hauteur de 12,5 milliards ? Ne baisse-t-on pas le taux maximal de l'impôt sur le revenu, actuellement à 54 % ?

Mme la Présidente - Votre temps de parole est expiré.

M. Maxime Gremetz - Non, vous ne voulez pas ponctionner les profits ! Si vous refusez notre amendement, de quoi discuterons-nous ? De bouts de ficelle ! On nous dira qu'il n'y a pas d'argent pour financer telle ou telle mesure. Sur cet amendement, nous demandons un scrutin public (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Mme la Présidente - Sur l'amendement 359, je suis saisie par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

A la majorité de 45 voix contre 7 sur 52 votants et 52 suffrages exprimés, l'amendement 359 n'est pas adopté.

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ART. 11

M. Jean-Luc Préel - L'article 11 pourrait s'intituler « FOREC suite » ou comment financer l'usine à gaz des 35 heures, dont l'obligation pénalise les artisans et d'autres. Pour financer la RTT, il est proposé d'affecter les taxes sur l'alcool, le tabac et les activités polluantes à un FOREC qui demeure virtuel. Quand ce dernier sera-t-il effectivement créé, et un administrateur nommé ?

M. Recours se félicite que les 50 milliards de taxe sur le tabac soient affectés au financement des 35 heures. Mais comment est-ce compatible avec son engagement contre le tabagisme ? Il n'est pas plus admissible que le produit des droits sur les alcools soit transféré du FSV aux 35 heures, quand on connaît la misère de la politique d'éducation à la santé et de prévention, quand on sait que 50 000 personnes meurent chaque année des méfaits de l'alcool et 60 000 de ceux du tabac. Les sommes perçues devraient servir à développer la prévention et à soigner les victimes. L'affectation que vous en faites est scandaleuse.

Il en va de même pour la TGAP, dont le rapport est estimé, de façon très exagérée, à 7 milliards en 2001 et à 12 milliards en 2002. Le produit de la taxe devrait là encore être affecté à la lutte contre la pollution, par exemple à la mise aux normes des exploitations agricoles.

La TGAP n'est pas une invention géniale ; qu'au moins elle soit utile à l'environnement.

Longue vie donc au FOREC ; publiez vite le décret, nommez comme administrateur un haut responsable de Gaz de France ou d'une raffinerie pétrolière. Peut-être saura-t-il faire fonctionner le FOREC ! -et s'il sort de l'ENA et de Bercy, ce sera encore mieux !

M. Bernard Accoyer - Cet article montre de façon éclatante combien le Gouvernement fait peu de cas de l'avenir de la protection sociale. Les besoins de l'assurance maladie sont considérables, l'avenir des retraites requiert un effort important -mais l'article 11 détourne des recettes considérables au profit des 35 heures : 13 milliards pris sur la contribution sociale des bénéfices des sociétés et sur la taxe pour activités polluantes ; 52 milliards provenant des droits sur le tabac ; 12 milliards des droits sur les alcools ; 8 milliards de transferts divers. Le plus grave, c'est l'absence de compensation, au mépris de la loi organique de 1994. Tout cela est scandaleux, d'autant plus que le FOREC n'est encore que virtuel. Nous voterons contre l'article 11.

M. Yves Bur - Les difficultés que nous avions prédites lors de l'examen de la loi sur les 35 heures sont devenues aujourd'hui manifestes, en particulier pour les petites entreprises, confrontées à une pénurie de personnel quand la demande augmente. Vous avez dû en outre trouver des recettes nouvelles pour financer le coût de votre loi, sans pour autant que leur pérennité soit garantie. Enfin, vous ne respectez pas la loi de 1994 qui impose la compensation intégrale des charges transférées.

M. Alfred Recours, rapporteur - A vous entendre, on croirait que 85 milliards de francs vont se perdre dans le FOREC comme dans un trou sans fond. Mais ce fonds ne sert qu'à ventiler des recettes entre l'assurance maladie, la vieillesse et la famille -et si les tuyauteries sont compliquées, elles sont transparentes. Les 85 milliards d'exonérations de charges sociales liées aux 35 heures sont entièrement compensées pour la protection sociale qui n'y perd pas un centime.

Quant aux recettes, vous citez le tabac. Parlons-en ! En 1997, la loi de finances que vous aviez votée, Monsieur Accoyer, attribuait à l'Etat 94 % de recettes provenant du tabac, dont la protection sociale n'obtenait que 6 % ! En 2001, ce sera 100 % pour la protection sociale -et c'est bien ainsi ; de même, il serait logique que les droits sur l'alcool aillent à l'assurance maladie.

M. Maxime Gremetz - L'article 19 de la loi sur les 35 heures accordait des allégements de cotisations sociales aux entreprises s'engageant, dans le cadre d'un accord collectif, à créer ou préserver des emplois. La loi pose une deuxième condition : il faut un accord majoritaire, c'est-à-dire signé par les syndicats représentant la majorité des salariés. Et les accords doivent préciser le nombre d'emplois à créer ou à préserver. Enfin, quelqu'un regrettait tout à l'heure, à tort, l'absence de remboursement, puisqu'il est bien prévu que le bénéfice de l'allégement est suspendu dans un certain nombre de cas, notamment lorsqu'il n'a pas été satisfait dans le délai d'un an aux engagements pris en matière d'embauches.

Je vous renvoie à ce gros roman que constitue la deuxième loi sur les 35 heures. L'opposition en fait une lecture digne de M. Seillière et du MEDEF !

M. Bernard Accoyer - L'amendement 17 tend à supprimer l'article 11, en raison de l'opacité du dispositif créé, malgré les protestations de transparence de M. Recours. La diversité et le manque de lisibilité des ressources affectées aux 35 heures nous conduisent à rappeler que ce sont les entreprises, déjà victimes, qui devront payer un supplément de charges : 4 milliards de francs sur les véhicules des entreprises, autant sur les conventions d'assurance -encore dois-je vous rappeler, Madame la ministre, que ce genre de textes est souvent annulé par le Conseil constitutionnel !-, 3 milliards de francs sur les tabacs, dont nous avons parlé tout à l'heure. Or, 18 milliards de ces détournements ne sont pas compensés, contrairement à ce que vous avez affirmé, Monsieur le rapporteur ! Lorsque vous dites que les 35 heures ne coûtent rien parce que les sommes prélevées sont affectées à la protection sociale, ce n'est pas tout à fait vrai, car sans les 35 heures, les 85 milliards de francs d'allégements de charges prévus n'auraient pas lieu d'être. Il s'agit donc bien en réalité de prélèvements supplémentaires sur les Français !

M. François Goulard - L'amendement 253 est défendu. Il est incontestable qu'une charge nouvelle, qui s'élèvera à au moins 110 ou 120 milliards en régime permanent, a été créée. L'article 11 est tout de même assez extraordinaire. La loi fixe une fraction de 2,81 % du droit de consommation à affecter au FOREC. Le PLFSS s'écarte ainsi du principe séculaire d'unicité qui interdit l'affectation des recettes et auquel obéit la loi de finances, ce qui interdit toute compréhension des grands équilibres. Vous enfreignez la jurisprudence Chasseloup-Laubat, qui avait posé en son temps qu'un ministre de la marine affectant le produit de la vente de canons à l'érection d'un stade dédiée à son prédécesseur enfreignait un principe. Pour la statue que vous pourriez être tentée d'ériger à votre prédécesseur, Madame la ministre, je vous conseille en tout cas d'attendre un peu, vous risquez de découvrir bientôt les mines posées par ses soins ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

M. Alfred Recours, rapporteur - Monsieur Accoyer a bien voulu dire que je ne disais « pas tout à fait vrai », ce qui marque une progression dans sa réflexion. Ce qui est vrai, c'est que je n'ai pas été tout à fait complet, puisqu'à 18 milliards près, il n'y a pas de compensation. Mais ces 18 milliards sont antérieurs à 1994, ils sont la conséquence de décisions prises par votre majorité, en particulier par M. Balladur. Ce sont vos 18 milliards ! S'il est une vérité incontestable, c'est que vos excès nuisent à l'honnête du débat.

M. Bernard Accoyer - Dire que tout est compensé, c'est une contre-vérité.

M. Alfred Recours, rapporteur - Les 18 milliards sont de votre fait ! Et puisque nous parlons de ce qu'il y a d'anormal dans les recettes du FOREC, laissez-moi vous dire que l'argumentation que vous avancez à l'appui de l'amendement 17, lorsque vous dites que ce sont les vignerons qui financent le FOREC, est franchement expéditive !

M. Jean-Luc Préel - Monsieur le rapporteur, il est vrai que toutes les exonérations de charges ne sont pas compensées. Je me suis élevé contre cette lacune. Mais rien n'a été fait depuis 1994 pour y remédier. Mais, Monsieur le rapporteur, restons courtois. Quant à la complexité du débat, affirmer que le FOREC est alimenté par des cotisations instituées par l'Etat pour financer les 35 heures est peut-être un raccourci, mais c'est la réalité. L'Etat a décidé d'appliquer les 35 heures, à lui d'en compenser les effets ! Pourquoi dire que les droits sur le tabac et l'alcool qui alimentent le fonds sont affectés à la protection sociale, alors qu'ils financent les 35 heures ?

Pour ma part, je suis favorable au vote, parallèlement à l'ONDAM, d'une enveloppe dédiée à la prévention et à l'éducation de la santé. Il serait normal que les droits sur le tabac et sur l'alcool soient affectés à cette action plutôt qu'à la réduction du temps de travail !

Mme la Ministre - M. Préel vient de clore une controverse en reconnaissant avec honnêteté que les anciennes exonérations n'avaient pas été compensées.

Avis défavorable sur les amendements, bien sûr, car le FOREC ne peut pas se passer des 6 milliards que les droits sur les boissons lui rapporteront en 2001. Ces droits sont d'ores et déjà utilisés dans le champ de la sécurité sociale puisqu'ils sont actuellement affectés au fonds de solidarité vieillesse.

J'ajoute que si le Gouvernement a décidé l'année dernière de créer un établissement public pour financer l'ensemble des allégements de charges, c'est dans un souci de transparence : il s'agit d'isoler le financement des dispositifs liés à la réduction du temps de travail, le fonds étant astreint à une obligation d'équilibre entre ses recettes et ses dépenses. C'est une logique qui me paraît saine.

Les amendements 17 et 253, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Mme Muguette Jacquaint - Où prendre les recettes du FOREC ? Nous proposons par notre amendement 156 de créer une contribution sur les revenus financiers des entreprises. J'entends l'opposition nous accuser de vouloir casser l'économie française ; chacun sait que ce n'est pas vrai ! En vérité, qui met en difficulté les PME ?

M. Bernard Accoyer - Les 35 heures !

Mme Muguette Jacquaint - Mais non ! Ce sont les grands groupes, qui réalisent plus de profits financiers que jamais. C'est pourquoi il faut les mettre davantage à contribution.

Si on se contente de taxes sur le tabac, sur l'alcool et sur les activités polluantes, on en viendra presque à souhaiter, pour que les ressources augmentent, que dans notre pays on fume, on boive et on pollue davantage ! Nous pourrions imaginer, dans le même ordre d'idées, une taxe sur les hamburgers et le Coca-Cola, puisqu'on entend beaucoup parler de l'obésité des jeunes !

Le Gouvernement fait un effort, mais il ne va pas assez loin.

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 276 est défendu.

M. Alfred Recours, rapporteur - Mme Jacquaint a accepté de dire que nous allions dans le bon sens, même si ce n'est pas assez loin. La commission, pour sa part, considère qu'il faudra peut-être envisager dans l'avenir des recettes nouvelles mais que pour cette année, on peut s'en tenir à ce qui est prévu. En conséquence, avis défavorable.

Mme la Ministre - Madame Jacquaint, le Gouvernement n'est pas du tout insensible à votre idée de favoriser le développement des activités productives plutôt que celui des opérations financières. Néanmoins, il n'est pas favorable à votre amendement. D'abord parce qu'un prélèvement significatif existe déjà avec la contribution sociale sur les bénéfices et la taxe sur les activités polluantes ; ensuite parce qu'il est très difficile de distinguer ce qui est spéculatif et ce qui ne l'est pas.

Avis également défavorable à l'amendement 276.

M. François Goulard - J'ai écouté Mme Jacquaint avec attention et respect. C'est vrai qu'il y a un paradoxe à financer la sécurité sociale avec la taxe sur les alcools -qui est, d'une certaine manière, un impôt sur la misère.

Mme Muguette Jacquaint - Il n'y a pas que les miséreux qui boivent !

M. François Goulard - Mme Jacquaint a le droit de penser que taxer les entreprises est bénéfique, surtout pour les salariés. Je pense le contraire. D'abord parce que la délocalisation n'est pas un vain mot. Ensuite parce qu'imposer les entreprises risque d'amputer le pouvoir d'achat des salariés. Je ne peux donc pas souscrire à cet amendement. En revanche, Mme Jacquaint a opposé les grandes entreprises et leurs profits spéculatifs aux PME, qui ont une action positive sur l'emploi. Je me réjouis que la position du parti communiste ait évolué : il y a quelques années, l'entreprise était en elle-même condamnable.

Mme Muguette Jacquaint - Il y a bien longtemps !

M. François Goulard - Toutefois, il est illusoire d'opposer petites et grandes entreprises.

Mme Muguette Jacquaint - Je ne les oppose pas.

L'amendement 156, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 276.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 62 est rédactionnel.

L'amendement 62, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement de coordination 307 supprime le financement du fonds de préretraite des travailleurs de l'amiante par une fraction des droits sur les tabacs.

Mme la Ministre - J'avais levé le gage sur votre amendement à l'article 3. L'amendement 307 devient sans objet.

M. Alfred Recours, rapporteur - Il est retiré. L'amendement 64 est rédactionnel.

L'amendement 64, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 65 est également rédactionnel.

L'amendement 65, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 66 est de coordination.

L'amendement 66, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 67 est rédactionnel.

L'amendement 67, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 68 est de coordination.

L'amendement 68, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 69 est rédactionnel.

L'amendement 69, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Jean-Luc Préel - La commission réécrit la loi !

Mme Muguette Jacquaint - Nous nous abstiendrons sur l'article.

L'article 11, modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 12

M. Bernard Accoyer - Je voudrais d'abord revenir sur ce fait : le rapporteur avait bien dit que tout était compensé alors que 18 milliards d'exonérations ne l'étaient pas. Puis il a dit qu'en tout état de cause, la situation était déjà la même en 1997. Mais le devoir du Gouvernement est d'améliorer sans cesse le système, surtout ce qui touche à la protection sociale !

J'en reviens à l'article 12, pour dénoncer une nouvelle fois la mécanique des tuyaux du Gouvernement. Il a fallu se livrer à un savant travail de plombier pour réunir toutes les recettes nécessaires au financement des 35 heures. L'exposé des motifs est exemplaire : « L'article modifie la répartition du produit de la CSG entre le FSV et la CNAMTS à hauteur de 0,15 point : la part de ce produit affectée au FSV est minorée, passant de 1,3 % à 1,15 % ; la part affectée à la CNAMTS est relevée pour passer de 5,1 % à 5,25 % pour la part de contribution assise sur les revenus d'activité professionnelle et sur les revenus de l'épargne financière et de 3,8 % à 3,95 % pour la part de contribution assise sur les revenus de remplacement des personnes imposables. » Où est la transparence, où est la clarté et donc la solidité de notre système de protection sociale ?

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 70 est de coordination.

L'amendement 70, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Alfred Recours, rapporteur - L'amendement 71 est rédactionnel.

L'amendement 71, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 12, modifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - A la demande de la commission, l'article 13 est réservé jusqu'après l'article 43.

M. Bernard Accoyer - C'est logique. La réserve de l'article premier ne l'est pas.

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AVANT L'ART. 14

M. Jean-Luc Préel - L'amendement 254 tend à ce que la commission des comptes de la sécurité sociale dépose un rapport au Parlement sur la simplification des allocations familiales. Le système actuel est incompréhensible pour les utilisateurs. Il existe 23 prestations et 15 000 références.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour la famille - Un tel rapport ne relève pas de la commission des comptes de la sécurité sociale. Par ailleurs, nous avons déjà franchi une étape dans la simplification et l'harmonisation des règles. Toutes les allocations de logement ont été remaniées et les barèmes revus. Elles vont augmenter pour les deux tiers des bénéficiaires et les personnes en-dessous du RMI percevront la même aide que les bénéficiaires du minimum social. Outre ces dispositions réglementaires, le Gouvernement et la CNAF ont chacun des mesures à prendre. Un travail important a déjà été fait mais, pour conserver une politique sociale ambitieuse, il faut tenir compte de toutes les situations. Avis défavorable.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance - La simplification est l'objectif de chacun d'entre nous, mais je crois que cette procédure compliquerait les choses. Je suis en train de négocier la prochaine convention d'objectifs et de gestion, qui comporte un volet sur la simplification. Le groupe « famille et pauvreté » y travaille aussi, car les familles modestes ont besoin de règles claires pour faire valoir leurs droits. Surtout, la réforme des aides au logement entrera en vigueur au premier janvier.

Par ailleurs, je ne crois pas que la commission des comptes de la sécurité sociale soit l'instance appropriée. Je fais confiance aux partenaires traditionnels de la politique familiale, et notamment à la CNAF, qui est au plus près des familles et qui se mobilise sur le travail de simplification.

L'amendement 254, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Luc Préel - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 18 heures 15 est reprise à 18 heures 30.

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ART. 14

M. Jean-Luc Préel - Nous abordons les articles concernant la branche famille. Je crois sincèrement que ce Gouvernement n'a pas de politique familiale, contrairement à d'autres pays, comme la Suède, qui mène une action très volontariste en ce domaine.

Chaque année on nous dit qu'on va prendre des mesures montrant qu'il y a une véritable politique familiale, mais celle-ci n'est toujours pas définie.

Hier Mme Guigou a rappelé un certain nombre de dispositions prises les dernières années : je rappellerai également la mise sous condition de ressources des allocations familiales, sur laquelle vous êtes revenus et la réduction de l'AGED que vous allez peut-être aussi revoir.

Aujourd'hui la branche famille renoue avec les excédents, mais pour quelles raisons ? Parce que les recettes augmentent du fait de la croissance, mais aussi à cause d'une certaine timidité dans les dépenses. A la limite, si on supprimait toutes les allocations, la branche aurait un excédent considérable -est-ce le but recherché ? Ne devrait-on pas plutôt viser une véritable politique familiale ?

En outre il y a dans ce budget un détournement de recettes anormal, la prise en charge par la branche famille des majorations de retraites pour enfants à charge : cette mesure a entraîné un vote négatif unanime du conseil d'administration de la CNAF, ce qui pose tout de même un grave problème et incite à voter contre cette disposition.

Deux mesures, cependant, sont intéressantes : la création, à l'article 15, de l'allocation de présence parentale, et l'effort d'investissement pour les crèches, à l'article 18, encore qu'il soit inutile de créer un fonds spécial d'une durée limitée à une année. N'aurait-il pas été plus simple d'ouvrir une ligne de crédits supplémentaires au niveau de la CNAF ?

Enfin, je répète qu'en dehors de l'alignement des barèmes des aides au logement, aucune mesure n'est prise pour simplifier les 23 prestations familiales et les 15 000 références.

Mme Hélène Mignon - Nous sommes à l'Assemblée nationale, pas à la CNAF. Quand on interroge les directeurs des CAF, ils vous disent qu'ils appliquent les décisions de leur conseil d'administration, et non les votes de l'Assemblée. Alors faisons attention à ne pas mélanger les genres.

Il y a plusieurs approches possibles de la politique familiale. Nous cherchons, pour notre part, à rétablir l'égalité entre les familles et à permettre aux familles modestes aussi de choisir le mode de garde de leurs enfants -de recourir, par exemple, aux services d'une assistante maternelle agréée plutôt qu'à ceux d'une voisine. C'est vrai que les allocations sont dégressives, mais je trouve normal de prendre des mesures qui permettent de concilier la vie professionnelle et la vie familiale. Que l'APE soit désormais cumulable avec le RMI ne me semble pas une incitation pour les bénéficiaires à reprendre le travail plus rapidement, mais un moyen de leur permettre de choisir le moment où elles le feront.

Nous trouvons toutes ces propositions intéressantes et nous les approuvons.

Mme Muguette Jacquaint - Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai déjà dit lors de la discussion générale, mais me concentrerai sur un problème très concret, qui a fait l'objet d'un long débat à la Conférence de la famille, la garde des jeunes enfants.

L'organisation du travail s'est modifiée et les couples ont du mal à trouver des gardes appropriées.

Je me félicite de la création d'un fonds d'investissement pour les crèches. Cela va aider les collectivités locales et les associations à ouvrir les structures d'accueil qui manquent pour les jeunes enfants, mais reste le problème des frais de fonctionnement. J'ai déjà posé la question, mais n'ai pas obtenu de réponse précise. Est-ce que dans les contrats pour l'enfance une partie des frais de fonctionnement de ces établissements sera prise en charge ? Les budgets des collectivités locales ne sont pas élastiques et les situations sur le terrain sont très inégales.

M. François Goulard - Vous avez raison.

Mme Muguette Jacquaint - Je me félicite de la majoration de l'AFEAMA, mais je regrette que beaucoup de prestations soient accordées sous conditions de ressources.

L'année dernière, j'avais proposé que les allocations familiales soient versées dès le premier enfant. On m'avait répondu que cela serait trop coûteux. Ne pourrait-on, à défaut, revoir les plafonds de ressources de l'AJE et d'autres prestations ? Je connais des exemples de familles ne bénéficiant pas de l'AJE, alors que leurs revenus n'ont rien d'extraordinaire.

Une telle revalorisation des plafonds constituerait non seulement une aide à la famille, mais un soutien à la consommation.

J'apprécie les efforts considérables faits par la CNAF, qui a repris cette année à sa charge la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. S'il subsiste un excédent, je souhaiterais qu'il soit alloué aux familles.

M. François Goulard - Tout à fait d'accord ! 

Mme Muguette Jacquaint - De bonnes mesures sont proposées, je les approuve mais il y a encore un effort à faire.

On a évoqué les réactions des directeurs des CAF. Certes, le Gouvernement a son rôle à jouer dans la politique familiale, mais nous aurions tout à gagner à ce que les décisions soient pries en concertation avec le conseil d'administration de la CNAF, sinon à quoi bon parler démocratie, droits nouveaux, amélioration des services ?

M. François Goulard - Mme Jacquaint a raison : il faut revoir les plafonds des allocations et il faut donner de vrais pouvoirs d'appréciation au conseil d'administration de la CNAF car toute action sociale doit prendre en compte les situations individuelles.

Je voudrais faire une suggestion au Gouvernement : l'an prochain, placer les articles relatifs à la famille en tête de la loi de financement, de sorte que nous ayons plus de temps à leur consacrer et que plus de collègues soient présents.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance vieillesse - Et l'assurance vieillesse ? C'est important aussi !

M. François Goulard - La croissance a procuré des recettes qui ont été plus qu'absordées par la hausse des dépenses dans la branche maladie. Mais elles ont laissé des excédents aux branches famille et vieillesse, qui pourraient servir à revaloriser certaines allocations, qu'il est en tout cas critiquable d'utiliser pour financer des charges relevant normalement du budget de l'Etat.

L'allocation de présence parentale est une bonne mesure. Mais il faut bien concevoir que la politique familiale est une politique sociale, opérant donc une redistribution au profit des ménages qui ont des enfants et au détriment de ceux qui n'en ont pas. Cette politique familiale et sociale est aujourd'hui insuffisante. Les ménages comptant trois enfants et plus sont particulièrement mal traités. Il est regrettable de ne pas faire davantage pour eux. Ce Gouvernement ne s'est pas illustré en bien par sa politique familiale, prenant depuis 1997 des mesures plutôt défavorables à la famille. A preuve les allégements de CSG sur les bas salaires décidés sans considération de charges de famille.

La politique familiale prépare également l'avenir du pays. La dénatalité qui frappe la plupart des Etats développés menace leur avenir et témoigne que nos sociétés manquent de confiance en elles-mêmes et dans l'avenir. Il y a là un vrai problème collectif. Cette question n'est pas suffisamment prise au sérieux. C'est une forme de drame national que de ne pas être capable d'assurer le renouvellement des générations. Nous avons donc besoin d'une politique familiale plus généreuse.

Mme la Ministre déléguée - Je m'inscris en faux contre l'affirmation que nous n'aurions pas de politique familiale.

M. François Goulard - Je n'ai pas dit cela !

Mme la Ministre déléguée - Je remercie la commission et les rapporteurs de leur travail, et tous les intervenants de leur contribution à la discussion.

Nous allons maintenant prendre des décisions très importantes pour la famille, qui n'est pas le parent pauvre de la politique du Gouvernement. La récente conférence pour la famille, présidée par le Premier ministre, a inscrit 10 milliards au profit des familles ; excusez du peu !

J'ai organisé cette conférence pour la famille autour de cinq idées.

Il s'agit d'abord de faciliter la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, pour les femmes et aussi pour les hommes. La création du fonds pour la petite enfance, l'aide au fonctionnement des structures collectives, la majoration de l'allocation pour recourir à une assistante maternelle vont dans ce sens. Rappelons également le décret sur les crèches pris cet été.

Nous voulons aussi accompagner le retour à l'emploi des femmes qui désirent retravailler. Si nous avons maintenu en France un taux élevé de fécondité, contrairement à ce qui vient d'être dit dans un propos qui date un peu, notre taux est en fait l'un des plus élevés d'Europe.

M. François Goulard - C'est vrai, mais il est insuffisant !

Mme la Ministre déléguée - N'opposons pas les droits des femmes et ceux de la famille. Le Gouvernement a créé une aide à la reprise d'activité et vous propose de maintenir l'allocation parentale d'éducation pendant les deux mois suivant la reprise d'activité.

Une troisième mesure importante ne figure pas dans le projet. Ce sont les 6,5 milliards d'aide au logement, qui apportent une aide considérable aux familles.

Nous souhaitons encore soutenir la responsabilité parentale partagée. C'est à quoi tend le congé pour enfant malade. S'y ajoutent les opérations temps libre pour les adolescents, le travail d'aide et d'accompagnement des parents, et ce que nous préparons sur l'autorité parentale conjointe.

Enfin nous travaillons, avec Mme Lebranchu, à la réforme du droit de la famille, qu'il s'agisse de l'accès aux origines pour tous les enfants ou de la stabilité à établir dans le domaine de la filiation.

Toutes ces décisions sont prises en coopération avec l'ensemble des partenaires de la politique familiale. Nous avons en effet la volonté de nous adresser non pas à la famille, entité abstraite, mais à toutes les familles telles qu'elles sont, dans leur très grande diversité. Nous avons pour objectif que chaque famille soit pour chaque enfant un lieu d'affection, de solidarité et d'éducation.

Aujourd'hui, les parents sont plus attentifs et plus impatients pour préparer la réussite de leurs enfants, en raison, je crois, de la diversité croissante des parcours parentaux ou conjugaux, tant il est vrai que la famille contemporaine offre de multiples visages.

Je veux accompagner cette pluralité dans le respect des libertés conquises, avec une attention portée aux fragilités nouvelles, pour une responsabilité parentale équitablement assumée.

L'article 14 tend à réformer l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée. En effet, si j'ai tenu à donner une impulsion très forte au développement de l'accueil collectif des jeunes enfants, j'ai aussi la volonté d'encourager la garde par l'assistance maternelle, à laquelle le familles modestes n'ont pas accès. 30 000 familles supplémentaires pourront y recourir désormais. Elue d'un département rural, je sais qu'il n'est guère possible d'y aménager des locaux en crèche, et la garde par assistance maternelle est en milieu rural la meilleure formule. Voilà une première mesure destinée à l'ensemble des familles, et en particulier à celles qui en ont le plus besoin (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

L'article 14, mis aux voix, est adopté.

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ART. 15

Mme Hélène Mignon - Je ne commenterai pas longuement cet article, qui a déjà été présenté par François Brottes d'une manière très émouvante, sinon pour souhaiter qu'on préserve la possibilité de faire évoluer cette allocation nouvelle à l'avenir, si cela se révélait nécessaire.

M. Yves Bur - Voici une bonne mesure, que nous voterons en espérant que la procédure sera simple et rapide. A cette occasion je voudrais rappeler qu'on attend toujours l'instauration d'un congé pour accompagner les personnes en fin de vie.

M. Claude Billard - L'hospitalisation d'un enfant est un événement qui bouleverse la vie familiale, et peut être très difficile à supporter, surtout quand elle dure longtemps. Les parlementaires communistes se félicitent de la création de ce congé, assorti d'une allocation. Jusqu'ici, comme il n'existait aucun dispositif spécifique, il fallait recourir à diverses formules de congé non rémunéré, ou au temps partiel, avec tous les problèmes qu'on imagine dans le cas des familles monoparentales. Or, la présence d'un parent auprès de l'enfant est essentielle pour sa guérison. Nous regrettons néanmoins que le montant de l'allocation ne soit plus élevé.

M. Bernard Accoyer - Nous voterons évidemment cet article, en regrettant qu'un an ait été perdu. Le Gouvernement s'est en effet opposé à la proposition de loi de notre collègue Muselier, que le groupe RPR avait inscrite dans une de ses niches parlementaires.

Mme la ministre déléguée - C'est un moment important, et rare, que celui où l'on crée une nouvelle prestation, en particulier quand il s'agit de reconnaître le statut de parent d'un enfant très malade. Le Gouvernement ne s'est assurément pas opposé à votre proposition de loi, Monsieur Muselier. Il a souhaité, en concertation avec les associations et avec des parlementaires comme Mme Mignon et M. Brottes, bien cibler le dispositif et peser ses conséquences financières. Sur de tels sujets, la polémique politicienne n'est pas de mise.

Le dispositif comporte deux volets : protection des parents qui prennent un congé pour s'occuper d'un enfant très malade ; institution d'un revenu de remplacement qui sera majoré si les deux parents prennent conjointement un congé à mi-temps, mesure de parité parentale dont je me réjouis particulièrement. L'allocation sera accordée pour quatre mois, et renouvelable deux fois. Le dispositif sera ouvert aux salariés et non-salariés, ainsi qu'aux demandeurs d'emploi.

Quant aux démarches, elles ont été simplifiées le plus possible, le délai étant fixé à quinze jours pour l'employeur -contre deux mois pour un congé habituel-, comme pour l'instruction par le médecin-conseil de la CAF, étant entendu qu'il commence, en cas d'urgence, dès la transmission du certificat médical, sous réserve de ratification par la CAF.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure - Une durée de quatre mois peut être parfois trop longue. L'amendement 72 vise à ne pas enfermer le dispositif dans un cadre trop rigide.

Mme la Ministre déléguée - Favorable. Il n'y aura pas de liste limitative des pathologies.

L'amendement 72, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L'amendement 356 vise à étendre le dispositif à la fonciton publique de l'Etat et des collectivités territoriales.

L'amendement 356, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - Cette allocation étant aussi un revenu de remplacement, le Gouvernement, sur proposition de Marie-Françoise Clergeau, a déposé l'amendement 373 qui majore son montant dans le cas de familles monoparentales.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure - La commission a, bien entendu, voté cet amendement.

L'amendement 373, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre déléguée - L'amendement 357 étend aussi le dispositif aux différentes fonctions publiques. La motivation de l'amendement 358 est identique.

Les amendements 357 et 358, acceptés par la commission, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 15, modifié, mis aux voix, est adopté.

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ART. 16

M. Jean-Luc Préel - Nous ne sommes pas d'accord sur cet article, et le nombre d'amendements de suppression déposés me donne à penser que cet avis est partagé par beaucoup d'entre nous, y compris sur les bancs de la majorité plurielle. Je défendrais ainsi volontiers l'amendement de M. Sarre !

Le FSV a été créé pour prendre en charge le financement des avantages vieillesse à caractère non contributif et de solidarité nationale. Or, la majoration pour enfants des pensions est un avantage servi dans le cadre de la retraite. Il n'y a donc aucune raison d'en transférer la charge, qui représente 17 milliards à terme, de la branche vieillesse à la branche famille.

M. Bernard Accoyer - 20 milliards !

M. Jean-Luc Préel - Cette somme devrait plutôt être affectée au progrès de la politique familiale défendue avec conviction par Madame la ministre. Depuis trois ans et demi que vous êtes au Gouvernement, nous voyons enfin arriver quelques mesures !

M. Yves Bur - Le transfert de la charge des majorations de pensions pour enfants de la branche vieillesse à la branche famille pose un problème de fond. Il a soulevé l'opposition de l'ensemble du conseil d'administration de la CNAF et de l'UNAF, car il prive la politique familiale de ressources. Est-il vraiment juste de considérer cette majoration de pensions de retraite comme un avantage familial différé ? Le choix du Gouvernement est lourd de conséquences pour la CNAF, qui se voit transférer là une charge de plus de 20 milliards. Il est loin d'encourager la natalité. Ces majorations de pensions constituent bien un avantage vieillesse, qui doit rester à la charge du FSV. Ce choix, tout comme celui de n'augmenter les allocations familiales que de 1,8 % au lieu des 2,2 % consentis aux retraites, montre que la famille n'est pas une priorité absolue.

Mme Muguette Jacquaint - J'ai déjà dit que l'article 16, qui transfère progressivement du FSV à la CNAF la charge de la majoration de 10 % des pensions des retraités ayant élevé trois enfants ou plus, pose problème. Selon les syndicats, cette charge devrait s'élever à 20 milliards de francs à terme et à 2,9 milliards pour 2001. Le FSV, abondé principalement par des recettes fiscales et parafiscales, a vocation à financer les prestations vieillesse des périodes non contributives telles que le service militaire ou le chômage. La mesure qui nous est proposée vise en fait à dégager des moyens pour financer les exonérations de charges.

M. Bernard Accoyer - C'est une conséquence des 35 heures.

Mme Muguette Jacquaint - Je soutiens toujours les 35 heures, mais je persiste à dire que leur mode de financement n'est pas satisfaisant. Ce transfert de charges s'opère au détriment de la politique familiale et procède du même esprit que le refus de verser les allocations familiales dès le premier enfant. La philosophie même de cette disposition appelle les réserves du groupe communiste, car nous renonçons là à accroître nos moyens pour répondre aux besoins des familles.

M. Bernard Accoyer - Cet article obère nos capacités à financer une véritable politique familiale. M. Jospin s'est délibérément attaqué à la famille dès 1997, en diminuant plusieurs allocations, puis en 1998 en soumettant les allocations familiales à une condition de ressources, et enfin cette année avec cette mesure d'autant plus scandaleuse que la CNAF s'est déjà vu transférer la charge de l'allocation de rentrée scolaire. Vous n'avez pas de politique familiale ! En transférant à la branche famille ces 20 milliards de charges supplémentaires en quelques années, vous la considérez une fois de plus comme la vache à lait de la protection sociale !

On veut délester le FSV parce que ses recettes sont détournées pour financer les 35 heures...

Cet article est donc inacceptable. La CNAF et les organisations familiales l'ont refusé comme nous-mêmes car vous persistez à taxer davantage ceux qui ont fait le choix d'avoir des enfants (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Mme la Ministre déléguée - Je ne peux pas laisser passer de tels propos.

Nous clarifions les comptes de la branche famille, mais qui peut nier que les avantages liés au fait d'avoir élevé des enfants font partie intégrante des comptes de la famille ? J'assume totalement cette décision, sachant que, dans le débat sur l'avenir de la branche vieillesse, ces avantages ont été un moment menacés. Le conseil d'administration de la CNAF pourra mener sa propre réflexion et, le cas échéant, améliorer ou moduler le dispositif.

L'opposition nous accuse de ne plus avoir de politique familiale. Pour sa part, lorsqu'elle était aux affaires, elle n'avait certes pas à débattre de la répartition des excédents de la branche famille puisqu'elle nous a laissé un déficit de 14,5 milliards !

M. Yves Bur - Et vous ?

Mme la Ministre déléguée - Elle critique par ailleurs le taux de progression de la base mensuelle des allocations familiales, mais elle-même ne l'avait pas revalorisée en 1995 et l'avait gelée en 1996, année où elle a aussi fait passer l'allocation de rentrée scolaire de 1 500 F à 1 000 F ! Elle n'a donc pas de leçons à nous donner, nous qui, pour notre part, répartissons au profit des familles les excédents de la branche famille.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 35.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

        www.assemblee-nationale.fr


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