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Session ordinaire de 2000-2001 - 66ème jour de séance, 153ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 17 AVRIL 2001

PRÉSIDENCE de M. Pierre LEQUILLER

vice-président

Sommaire

INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE -nouvelle lecture-(suite) 2

ARTICLE PREMIER A 2

APRÈS L'ART. PREMIER A 2

ARTICLE PREMIER 2

ART. 2 3

APRÈS L'ART. 2 4

APRÈS L'ART. 3 4

ART. 3 BIS A 4

APRÈS L'ART. 3 BIS A 5

ART. 3 BIS 5

ART. 4 6

ART. 5 9

ART. 6 9

APRÈS L'ART. 6 10

APRÈS L'ART. 7 11

ART. 8 BIS 11

APRÈS L'ART. 9 12

ART. 9 BIS 12

ART. 11 14

ART. 11 BIS 14

ART. 12 14

ART. 13 14

ART. 14 14

ART. 14 BIS 14

APRÈS L'ART. 15 15

AVANT L'ART. 16 15

ART. 16 16

APRÈS L'ART. 16 17

ART. 16 BIS 17

ART. 16 TER 18

ART. 17 18

APRÈS L'ART. 17 19

ART. 17 BIS 19

ART. 18 19

APRÈS L'ART. 18 19

ART. 19 20

ART. 20 21

APRÈS L'ART. 20 22

EXPLICATIONS DE VOTE 22

ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 18 AVRIL 24

La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.

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INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE -nouvelle lecture-(suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.

M. le Président - J'appelle maintenant dans le texte du Sénat, dans les conditions de l'article 91, alinéa 9, du Règlement, les articles du projet de loi sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

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ARTICLE PREMIER A

Mme Martine Lignières-Cassou, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Par l'amendement 1, la commission propose de supprimer cet article dépourvu de portée normative. De plus, les véritables priorités de santé publique résident, selon nous, dans le développement de la contraception, l'information et la recherche.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Le Gouvernement, qui approuve l'amendement, est préoccupé, je l'ai déjà dit, par le nombre d'IVG auxquelles il est procédé en France -plus de 200 000 par an- et il a engagé une politique volontariste pour modifier cette situation. Quoi qu'il en soit, cet article déclaratif ne relève pas de la loi.

L'amendement 1, mis aux voix, est adopté. L'amendement 39 tombe. L'article premier A est supprimé.

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APRÈS L'ART. PREMIER A

Mme Christine Boutin - A quoi vise l'amendement 38 ? A préciser que le droit de toute femme enceinte à mener à terme sa grossesse doit être respecté. Nous pensons en effet que la loi doit réaffirmer avec force, par un article de principe, qu'aucune pression en faveur de l'IVG ne doit être exercée sur la femme enceinte. Comme vient encore de le montrer le sondage BVA publié aujourd'hui, l'avortement, loin d'être un choix libre et volontaire, apparaît le plus souvent comme la seule issue possible. Il reste bien « l'expression d'une contradiction entre le désir des femmes et les réalités sociales, économiques et familiales. »

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Nous sommes là pour aider toutes les femmes, quel que soit leur choix.

Mme la Ministre - Avis défavorable également. L'IVG est un droit pour les femmes, et l'apport d'informations ne constitue aucunement une pression. Je rappelle qu'une IVG pratiquée sans consentement est punissable. Ne prenons pas les femmes pour des enfants, voire des bébés. Les femmes sont capables de prendre elles-mêmes leur décision.

Mme Christine Boutin - Je ne relèverai pas l'assimilation de la femme au bébé, dont d'ailleurs la dignité aussi doit être respectée. Je vous le dis avec respect, Madame la ministre, mais solennellement : lorsque cette loi sera votée, il y aura bien un droit à l'avortement en France, qui n'existe pas aujourd'hui. Je suis étonnée qu'une ancienne Garde des Sceaux puisse affirmer le contraire. Le droit à l'IVG, vous le savez très bien, n'existe pas, si fort qu'il soit réclamé par les femmes de la majorité plurielle.

L'amendement 38, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ARTICLE PREMIER

Mme la Rapporteure - Par l'amendement 2, la commission propose de rétablir le texte voté par l'Assemblée. Il est en effet nécessaire d'allonger les délais pour les femmes en détresse, et l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé estime que cela ne présente aucun risque médical particulier. La France est d'ailleurs un des pays européens où les délais sont les plus courts. Enfin, il faut bien répondre aux cas de révélation tardive de grossesse.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est d'accord avec cet amendement, conforme à l'objet même de la loi.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Vingt-cinq ans après la loi Veil, on enregistre, malgré la contraception, une IVG pour trois naissances : n'est-il pas temps de s'interroger sur l'échec de la prévention ? Vous pouvez toujours invoquer une politique volontariste : dans les faits, elle n'existe pas. Dois-je rappeler que l'information et l'éducation sexuelle, absentes du projet initial, y ont été introduites par des amendements UDF ? J'avais demandé dès le début les trois séances obligatoires au collège, au lycée et à l'école. J'espère que seront retenues aussi des dispositions concernant les généralistes, les professeurs et les jeunes. La clarté, l'homogénéité et la répétition du message sont les conditions de son efficacité. Les échecs de la contraception peuvent renvoyer à l'ambivalence du désir des femmes. Il n'y en a pas moins, hélas, des femmes démunies qui dépassent le délai légal -et il y a aussi les réalités du terrain dénoncées par les praticiens. Pour obtenir une réponse à une demande d'IVG, il faut accomplir un véritable parcours du combattant. Le constat des professeurs Frydman et Nisand est à cet égard édifiant : manque de lieux d'accueil, de personnel, de moyens, carences du statut des médecins pratiquant l'IVG. Ce ne sont pas les 12 millions de crédits alloués l'an dernier ni les 15 millions de cette année qui suffiront à y remédier.

Votre seule réponse, c'est l'allongement du délai légal. Mauvaise réponse pour trois raisons.

Elle ne résout qu'un problème marginal puisqu'elle ne concernera que 1 % des femmes qui avortent et 40 % de celles qui sont hors délai, comme l'a souligné Mme Leroy, du planning familial. Que proposez-vous aux 3 000 femmes ayant dépassé les douze semaines ?

D'autre part, il est choquant que vous vouliez passer en force, contre l'avis des médecins. Même si les risques pour la femme restent minimes, le passage de dix à douze semaines change la nature de l'acte médical. Si IVG il doit y avoir, mieux vaudrait promouvoir l'IVG par voie médicamenteuse.

Surtout, l'allongement du délai légal introduit une interférence avec le diagnostic prénatal. La France est le seul pays où l'on pratique l'échographie dès la onzième semaine et celle-ci peut faire apparaître des images pathologiques dont certaines régressent par la suite. L'arrêt de la Cour de cassation concernant Nicolas Perruche va obliger les médecins à informer les parents de ces risques et ceux-ci seront écartelés.

Pour toutes ces raisons, au nom du groupe UDF, je voterai contre cet amendement (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF).

L'amendement 2, mis aux voix, est adopté et l'article premier est ainsi rédigé.

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ART. 2

M. Bernard Perrut - Au cours de la discussion générale nous avons souligné les problèmes que posera l'allongement du délai légal -problèmes d'ordre médical et manque de structures d'accueil adaptées, personnel insuffisant et mal formé.

Puisque vous avez décidé cette mesure, il faut au moins qu'elle s'accompagne de garanties. Notre amendement 60 corrigé propose qu'une commission d'experts soit saisie pour évaluer les risques médicaux, et aussi psychologiques, pour la femme d'une IVG au-delà de dix semaines.

Mme la Rapporteure - L'amendement 3 de la commission vise à rétablir le texte voté en première lecture. Nous sommes opposés à l'amendement 60, qui, remettant la décision entre les mains d'une commission d'experts, témoigne d'une conception archaïque de la médecine.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est opposé à l'amendement 60 et favorable à l'amendement de la commission.

Le terme « interruption volontaire de grossesse » dit bien que c'est à la femme de décider. Il existe en outre une possibilité d'interruption médicale de grossesse au-delà de douze semaines.

Mme Muguette Jacquaint - Contre l'amendement 60. Il faut qu'une IVG se fasse dans les meilleures conditions possibles. Mais cet amendement revient à substituer à la volonté de la femme celle d'experts et médecins. J'ai beaucoup de respect pour les médecins mais j'ai toujours défendu le droit de la femme de décider elle-même si elle veut interrompre une grossesse non désirée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Mme Guigou a parlé du droit des femmes à avorter. Nous sommes en désaccord philosophique sur ce point. Pour nous l'avortement n'est pas un droit, mais un mal nécessaire et c'est le devoir de la société d'affronter ce problème. Je note que votre prédécesseur avait une position différente de la vôtre : le 3 octobre 2000, Mme Aubry disait qu'elle n'avait jamais parlé d'un « droit » à l'IVG, mais d'un « accès » à l'IVG pour les femmes en échec de contraception ou ayant subi des violences. Je suis parfaitement en phase avec ses propos.

L'amendement 60 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 3, mis aux voix, est adopté et l'article 2 est ainsi rédigé.

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APRÈS L'ART. 2

M. Bernard Perrut - Vous savez combien les délais d'attente sont longs dans les établissements pratiquant l'IVG. Plutôt que d'allonger le délai légal, ne faudrait-il pas donner à ces établissements les moyens de mieux appliquer la loi de 1975 ? C'est dans les grandes villes que ces services fonctionnent le mieux ; dans les villes moyennes l'attente est très longue et beaucoup de femmes se retrouvent ainsi hors délai. Notre amendement 65 vise à prendre en compte cette situation : l'IVG pourra être pratiquée après le délai légal si la femme enceinte peut prouver, par tout moyen, qu'elle l'avait demandée à temps. Cela implique que toutes les demandes d'IVG soient enregistrées par écrit.

Une telle mesure permettrait de pallier les carences actuelles.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Cet amendement revient à ne pas allonger le délai légal.

Mme la Ministre - Avis défavorable. L'allongement de dix à douze semaines permettra de répondre à la majorité des situations. Nous poursuivons les efforts pour que les services hospitaliers disposent des moyens nécessaires.

L'amendement 65, mis aux voix, n'est pas adopté.

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APRÈS L'ART. 3

Mme Christine Boutin - L'amendement 41 vise à préciser les informations à fournir à la femme enceinte dans le dossier remis lors de la consultation en vue d'une IVG. Un tableau lui permettant de calculer facilement le montant des aides financières auxquelles elle a droit l'aiderait à prendre une décision plus sereine (Protestations sur les bancs du groupe communiste).

L'amendement 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - L'amendement 40 relève du même esprit. Il précise que le dossier-guide fournit notamment la liste des associations susceptibles de soutenir la femme venue consulter pour une IVG.

Mme la Rapporteure - Défavorable. Cette liste figure déjà dans le dossier-guide.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 40, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 3 BIS A

Mme la Rapporteure - L'amendement 4 tend à supprimer cet article, introduit par le Sénat, qui crée un répertoire départemental des aides économiques et des lieux d'accueil. Nous allons rencontrer toute une série d'amendements de l'opposition reposant sur l'idée que le recours à l'IVG aurait avant tout des raisons économiques -Mme Boutin a même cité un sondage BVA selon lequel 30 à 40 % des femmes concernées seraient dans ce cas.

Mme Christine Boutin - Ce sont elles qui le disent.

Mme la Rapporteure - Or, nous avons beaucoup auditionné, et entendu en particulier des chercheuses de l'INSERM qui nous ont dit que la motivation la plus fréquente était la crainte de ne pas se montrer un bon parent, soit que l'intéressée soit trop jeune, ou trop âgée, ou que son couple ne soit pas stable. Vous noterez que ces critères se retrouvent quand il s'agit d'assistance médicale à la procréation, puisque dans ce cas, le couple doit être en âge de procréer, marié ou stable. Et vous savez bien que la société continue de porter un regard négatif sur les femmes élevant seules leurs enfants (Mme Boutin s'exclame). C'est donc sur ces normes sociales qu'il faut travailler au lieu de se donner bonne conscience avec des amendements comme ceux que vous présentez.

M. François Colcombet - Très bien !

Mme la Ministre - Favorable.

M. Bernard Perrut - Vos propos m'inquiètent, Madame la rapporteure. L'IVG ne doit pas devenir une fin en soi, et tout doit être mis en _uvre pour aider les femmes qui le souhaiteraient à garder leur enfant, grâce aux aides financières et à l'entretien préalable. On devrait en particulier développer la « maternologie », qui peut apporter une aide spécifique à des femmes éprouvant quelque difficulté à établir un lien avec un enfant (Murmures sur les bancs du groupe communiste).

L'amendement 4, mis aux voix, est adopté, et l'article 3 bis A est ainsi supprimé.

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APRÈS L'ART. 3 BIS A

Mme Christine Boutin - L'amendement 42 précise que le dossier-guide comporte notamment un répertoire des aides économiques et des lieux d'accueil. Vous avez cité le sondage BVA, Madame la rapporteure. Il a été fait les 13 et 14 avril dernier, et montre que 37 % des femmes invoquent leur situation matérielle pour expliquer un recours à l'IVG, 27 % un avis médical, 14 % l'avis de leur compagnon, tandis que 2 % seulement ne citent aucune raison extérieure.

Mme Muguette Jacquaint - Evidemment, on les culpabilise !

Mme Christine Boutin - Ce sondage vous gêne !

L'amendement 42, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 3 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 5 rétablit le texte de la première lecture en ce qui concerne la consultation médicale. Le médecin devra donner une information claire, loyale et appropriée et remettre un dossier-guide mis à jour.

Mme la Ministre - Favorable.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je suis en partie d'accord. Mais pour que l'information soit loyale, elle ne doit pas être tronquée, c'est la condition même de l'exercice d'une liberté. Par le sous-amendement 31, 2e correction, je propose de rappeler que l'IVG n'est pas un droit, mais qu'elle est limitée aux situations de détresse.

Mme la Rapporteure - Défavorable. Où voulez-vous en venir ?

Mme la Ministre - Défavorable. Toute femme a le droit de demander une IVG, dès lors que le délai est respecté.

Mme Bernadette Isaac-Sibille - Il y a un problème de sémantique. Une femme ne va pas forcément consulter « en vue » d'une IVG. Elle peut simplement vouloir s'informer et questionner. Or le texte parle du « médecin sollicité » par une femme en vue d'une IVG. La sémantique reflète bien l'idéologie du projet.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Vous n'avez pas répondu, Madame la ministre, à ma proposition de compléter le dossier-guide par une information sur les aides susceptibles d'être accordées à une femme désirant garder son enfant.

Le sous-amendement 31, 2e correction, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Mon sous-amendement 32 tend à insérer une référence aux associations et organismes susceptibles d'apporter une aide morale ou matérielle aux intéressées.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Le dossier-guide remis à la femme par le médecin comprend déjà la liste des organismes susceptibles de l'aider dans sa démarche.

Mme la Ministre - Même rejet que pour les amendements 40 et 41 de Mme Boutin.

Le sous-amendement 32, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Notre sous-amendement 37 tend à ce que le dossier-guide énumère les droits, aides et avantages garantis par la loi aux familles, aux mères, célibataires ou non, et à leurs enfants, ainsi que les possibilités offertes par l'adoption d'un enfant à naître.

Je reprends les termes mêmes de la loi Veil, qui était et qui reste un modèle d'équilibre et de respect de la liberté des femmes.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Je suis foncièrement révoltée par cette proposition de substituer une souffrance à une autre.

Mme Muguette Jacquaint - Et comment !

Mme la Ministre - Même avis défavorable.

Le sous-amendement 37, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 5, mis aux voix, est adopté et l'article 3 bis est ainsi rédigé.

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ART. 4

Mme Christine Boutin - L'amendement adopté par la commission à cet article rend facultatif l'entretien social préalable, ce qui démasque la philosophie de l'ensemble du projet. Mme la rapporteure est partie du postulat que toute femme décidant de recourir à l'IVG avait fait un choix définitif et éclairé. Mais rien n'est plus faux. Une femme enceinte est fragile, elle peut subir des pressions. Le simple fait d'être écoutée peut lui ôter sa peur de garder l'enfant. En tout état de cause, rendre cet entretien facultatif lui supprime une chance de réfléchir calmement. Il faudrait au contraire l'étoffer, en faire un vrai lieu d'écoute et d'information ; qu'il permette de déceler l'éventuelle ambivalence du désir de la femme, de faire surgir son désir profond, de discuter les éventuelles pressions de l'entourage et de la société. Quand bien même il ne permettrait qu'à une femme sur mille de garder son enfant, cet entretien mériterait d'être maintenu.

Les travailleurs sociaux estiment hors de leur rôle de rappeler certaines valeurs civiques. Pourtant, la loi Pelletier, adoptée cinq ans après la loi Veil, précise bien que cet entretien doit être l'occasion d'une information en vue de permettre à la femme de garder son enfant. La philosophie de cette loi comme de la loi Veil est donc à l'opposé de celle du projet d'aujourd'hui : le « tout avortement ».

M. Bernard Perrut - Alors que nous sommes à une époque qui ne jure que par la communication, j'ai ici l'impression que l'on veut supprimer tout moyen d'information et de dialogue qui pourrait conduire une femme demandant une IVG à changer d'avis. La délégation aux droits des femmes nous dit : on ne peut pas obliger une femme majeure à se plier à un entretien dont elle n'a pas envie. Mais permettez-moi de citer une conseillère conjugale qui travaille dans un hôpital et qui a rencontré près de 500 femmes par an depuis dix-huit ans : nous sommes là, dit-elle, non pour convaincre les femmes de renoncer à leur projet mais pour les aider à comprendre ce qui leur arrive ; dès les premières secondes de l'entretien, je leur remets le papier signé qui atteste que cet entretien a eu lieu, elles ne sont donc pas obligées de rester ; or, en dix-huit ans, seulement deux sont parties aussitôt.

Cela montre bien l'utilité de cet entretien. Le supprimer...

Mme Muguette Jacquaint - Mais on ne le supprime pas !

M. Bernard Perrut - ...conduira à laisser les femmes dans une certaine ignorance. Si cet entretien perd son caractère obligatoire, une forte proportion de femmes ne s'y rendra pas et sera donc privée d'une occasion de peser un choix adulte, d'accomplir une cheminement intellectuel.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Très bien !

Mme la Rapporteure - L'amendement 6 de la commission tend à rétablir le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, c'est-à-dire à étendre l'obligation légale de proposer l'entretien préalable aux cliniques privées. Espace de parole, nous dit M. Perrut. Oui, mais la parole étant libre et la femme majeure, c'est à cette dernière de dire si elle le juge nécessaire.

Mme la Ministre - Avis défavorable. Cet entretien sera systématiquement proposé mais il n'aura pas un caractère obligatoire.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Trop souvent, il est réduit à sa plus simple expression et dure quelques secondes à peine, alors que la femme ne demande qu'à parler. Le rendre facultatif pour les majeures -comme le souhaitent d'ailleurs la plupart des professionnels, je le reconnais- reviendrait à moyen terme à le supprimer, alors qu'il peut aider les femmes à comprendre le sens de leur geste et les aider à ne plus se retrouver en semblable situation. Le laisser au choix de chacune, c'est croire à tort que chacune est en mesure de faire librement le choix de l'IVG.

Depuis quelques années, observe l'une de mes correspondantes, on met en place des cellules de soutien psychologique pour les victimes d'attentats ou de catastrophes naturelles ; l'IVG serait-elle devenue si banale qu'elle ne justifie pas un tel soutien ? Il s'agit pourtant de rien de moins que de décider de transmettre ou non la vie, ce qui est la pouvoir le plus extraordinaire dont dispose l'être humain !

L'entretien obligatoire, c'est aussi l'occasion, souvent unique, de parler du partenaire, du couple, de la sexualité, de la contraception. « De qui est cet enfant que je porte ? » est bien la question essentielle, et loin de nous l'idée de faire de l'entretien une sorte d'examen de passage, au cours duquel la femme aurait à justifier sa décision.

Mme Bernadette Isaac-Sibille - J'insiste sur ce dernier point : l'entretien obligatoire est parfois le seul moment où une discussion peut avoir lieu entre les deux membres du couple.

Le sous-amendement 33, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - Le sous-amendement 53 tend à insérer une référence au syndrome post-abortif, car il faut rappeler, même si cela déplaît à Mme Lignières-Cassou, que, pour 86 % des femmes, l'avortement est un événement qui laisse des traces (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

Mme la Rapporteure - Mais personne ne dit le contraire !

Mme Christine Boutin - Lisez donc les témoignages parus dans L'Humanité : une mineure ayant avorté raconte que tout le monde l'y a incitée, lui a dit qu'elle était trop jeune pour garder l'enfant, que ce n'était pas raisonnable, mais qu'elle l'aurait fait quand même si elle avait eu un travail ; une autre dit s'être rendu compte qu'elle avait pris sa décision sous l'effet de la panique. C'est dans L'Humanité ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

Mme Muguette Jacquaint - Ce n'est pas parole d'Evangile ! (Sourires)

Mme Christine Boutin - Mais on lit la même chose dans tous les journaux, de droite ou de gauche, féministes ou non, dans Elle comme dans Femme actuelle : « Avorter est une blessure qui ne guérit jamais », « N'avais-je vraiment pas d'autre solution ? » C'est pourquoi nous voulons que la femme bénéficie d'un suivi comprenant la prévention du syndrome post-abortif.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable : nous sommes tous d'accord pour considérer l'IVG comme un acte difficile, mais le « syndrome post-abortif » me paraît aussi difficile à définir qu'inélégant dans l'expression. Je me demande même si l'on ne cherche pas, par là, à stigmatiser encore plus les femmes qui subissent une IVG (Protestations sur les bancs du groupe UDF).

Mme Christine Boutin - Vous préférez les laisser à leur détresse !

Mme la Ministre - Cessez vos caricatures : personne ne prétend que l'IVG soit la solution idéale. Ce que nous voulons, c'est que la femme soit laissée libre de sa décision. J'ajoute que les modalités de la consultation ne sont pas du domaine législatif.

Mme Christine Boutin - Alors, je suis prête à retirer le sous-amendement si vous vous engagez à en reprendre la substance dans le décret d'application...

Le sous-amendement 53, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - Le sous-amendement 54 précise que tout doit être fait pour permettre à la femme de garder son enfant, afin que son choix soit vraiment libre et éclairé.

Mme la Rapporteure - La loi est justement là pour aider la femme à assumer ce choix, quel qu'il soit (Exclamations sur les bancs du groupe UDF).

Le sous-amendement 54, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - Le sous-amendement 52 a trait à un point important : l'autorisation parentale pour les mineures, que le dernier alinéa supprime indûment. Il est incohérent de dénoncer d'un côté la démission des parents et de rendre inutile, de l'autre, le consentement parental pour un acte aussi grave et douloureux qu'une IVG.

Mme la Rapporteure - Il ne s'agit pas de supprimer l'autorisation parentale, mais de ménager des possibilités de dérogation.

Mme la Ministre - Le principe reste en effet l'autorisation, mais il pourra y être dérogé lorsqu'elle sera impossible à recueillir.

Le sous-amendement 52, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Perrut - Il peut y avoir, c'est vrai, des cas dans lesquels les parents sont incapables de répondre à la détresse de leur enfant, mais les dérogations doivent rester l'exception. Le Sénat a proposé que la jeune fille soit alors assistée, et non pas seulement accompagnée, par une personne qualifiée, formée à ce type de mission. Nous proposons, par le sous-amendement 61, que cette personne soit habilitée par le juge des enfants.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable : l'adulte qui sera habilité par le juge n'aura plus un simple rôle d'accompagnement et de soutien psychologique, mais une véritable responsabilité juridique.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est opposé à la judiciarisation de la procédure.

Le sous-amendement 61, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Perrut - Le sous-amendement 62 a pour but d'informer des aides existantes les mineures qui désirent garder leur enfant.

Mme la Rapporteure - Les mineures qui demandent à recourir à l'IVG ne le font pas pour des raisons principalement financières.

Mme la Ministre - L'entretien préalable, qui reste obligatoire pour les mineures, a notamment pour objet de les informer de ces possibilités, mais il n'est pas nécessaire d'en inscrire les modalités précises dans la loi elle-même.

Le sous-amendement 62, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 6, mis aux voix, est adopté, et l'article 4 ainsi rédigé.

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ART. 5

Mme la Rapporteure - L'amendement 7 vise à rétablir le texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

Mme la Ministre - D'accord, bien entendu.

L'amendement 7, mis aux voix, est adopté, et l'article 5 est ainsi rédigé.

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ART. 6

Mme Christine Boutin - J'ai déjà eu l'occasion de traiter de l'autorité parentale et des difficultés soulevées par le texte à ce sujet. Mme la ministre nous a certes donné des indications, mais je ne les trouve toujours pas suffisamment précises.

L'article 6 vise à supprimer l'autorisation parentale pour l'IVG d'une mineure, laquelle peut se faire accompagner par un adulte qui n'aurait pas de responsabilité particulière, nous dit-on. Mais, dans ce cas, qui prend la responsabilité de la décision et de l'acte médical ? Ne s'agit-il pas, en réalité, d'un adulte « alibi », et d'une super-tartuferie de la majorité et du Gouvernement, qui abandonnent la jeune fille à sa solitude tout en lui donnant le sentiment qu'elle est épaulée ?

M. Bernard Perrut - Tout comme ma collègue Christine Boutin, je regrette l'imprécision des réponses qui nous sont faites à ce sujet. Je déplore, en outre, que la commission des lois n'ait pas été saisie pour avis. Le flou est manifeste : si l'accompagnement de la jeune fille mineure n'a aucune responsabilité, ni civile, ni pénale, qui endosse cette responsabilité ? En particulier, que se passera-t-il si une mineure décide d'agir en justice contre une décision que, finalement, elle n'entend pas assumer ?

Mme Christine Boutin - L'amendement 43 est de suppression.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Je le répète : il ne s'agit pas de supprimer l'autorisation parentale mais d'autoriser qu'il y soit dérogé en cas de nécessité.

Mme la Ministre - Nous avons eu de longs débats à ce sujet. Avis défavorable.

L'amendement 43, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Bernard Perrut - Il est proposé, avec l'amendement 64, de faire intervenir le juge pour enfants en matière d'IVG. Ce magistrat est fréquemment saisi lorsque le consentement parental fait défaut et, selon l'article 375 du code civil, il est compétent lorsqu'il existe un danger pour la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur. De plus, des nombreuses décisions sont déjà rendues chaque année en matière d'IVG.

On en revient, une nouvelle fois, à la question de la responsabilité, qui n'a toujours pas reçu de réponse satisfaisante.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Il est exact que les juges pour enfant sont déjà requis lorsqu'il n'y a pas unanimité de consentement -c'est-à-dire lorsque les parents s'opposent au v_u de leur fille mineure. La conséquence, ce sont les jugements contradictoires, rendus par des magistrats qui disent eux-mêmes se sentir si mal à l'aise dans ce rôle qu'ils refusent de l'endosser. Nous avons déjà dit, d'autre part, qu'il ne nous paraît pas bon de judiciariser l'IVG des mineures.

Mme la Ministre - Je me suis largement exprimée sur ce point. Cette question relève de la jeune fille mineure, de sa famille et de l'équipe médicale. Exciper de l'article 375 du code civil pour imposer l'intervention systématique du juge pour enfants, ce serait présumer qu'il y a danger, et modifier radicalement le rôle du magistrat. Et que deviendrait l'obligation de confidentialité ?

Mme la Rapporteure - L'amendement 8 est défendu.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Nous sommes nombreux ici à approuver le principe du régime dérogatoire pour les mineurs, à condition de l'entourer de garanties. Le problème tient à l'application de ce principe et, en cette matière, nos interrogations restent sans réponse.

A défaut de parents, vous proposez un adulte référent -mais qui est-il ? L'infirmière, l'assistance sociale, le médecin peuvent-ils être des deux côtés de la barrière ? Ce mélange de genres apparaît bien problématique et la loi devrait définir plus précisément qui peut être « l'adulte référent ».

Pourquoi, d'autre part, ne pas avoir suivi les sénateurs, qui proposent que l'adulte référent ne se limite pas à accompagner la mineure, mais l'assiste, conformément aux dispositions du code civil dans certaines conditions ?

J'en viens, une fois encore, à la responsabilité de l'adulte référent. La réponse donnée en première lecture avait laissé dubitatif M. Le Garrec lui-même, qui avait demandé que la chose soit précisée. Elle ne l'est toujours pas. Parlons, pourtant, du risque anesthésique. La décision de pratiquer une IVG sera-t-elle à ce point globale que la jeune fille mineure pourra se dispenser de l'autorisation parentale pour se soumettre à une anesthésie générale ?

M. Pierre Menjucq - Mme la rapporteure nous explique que l'IVG peut être source de traumatisme, ce qui suppose un suivi médical et des soins. Or le projet ne dit mot de la manière dont ce traumatisme sera assumé -et pour cause : par idéologie, cette loi qui se veut généreuse fait fi de l'essentiel, la famille.

M. Bernard Perrut - Le sous-amendement 63 est défendu.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable puisque, une fois encore, on demande l'intervention du juge pour enfants. Je tiens, par ailleurs, à rassurer ceux qui refusent d'entendre les explications de la ministre, en les invitant à lire attentivement l'amendement 8.

Mme la Ministre - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

L'amendement 64, mis aux voix, n'est pas adopté.

Le sous-amendement 63, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 8, mis aux voix, est adopté, et l'article 6 est ainsi rédigé.

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APRÈS L'ART. 6

M. Bernard Perrut - Nous avons adopté une nouvelle exception à l'exercice de l'autorité parentale, dans la continuité de ce qui se fait depuis une vingtaine d'années. Se trouve ainsi érigé, face à l'autorité parentale, un droit des enfants.

La loi de 1979 a ainsi, par exemple, introduit dans la loi sur l'IVG la nécessité du consentement de la mineure enceinte, qui n'y figurait pas en 1975. De même, la loi de 1993 abaisse de 15 à 13 ans l'âge auquel l'enfant est appelé à donner son consentement personnel.

Nous proposons donc, par l'amendement 56, de regrouper dans un article unique du code civil l'ensemble des exceptions à l'autorité parentale. Ce sujet devrait certes être examiné dans le cadre d'une réforme globale du droit de la famille. L'urgence nous amène cependant à proposer d'adopter dès maintenant une liste des actes que le mineur non émancipé peut accomplir seul.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable sur cet amendement que nous avons déjà repoussé en première lecture. Il n'est certes pas dénué d'intérêt, mais il manque de précision. Ainsi, les distinctions qui existent en fonction de l'âge des enfants ne sont pas reprises. Mieux vaut donc l'examiner, une fois amélioré, dans le cadre de la révision du droit de la famille.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui traite de la même manière des actes que le mineur non émancipé peut accomplir seul et de l'IVG, pour laquelle le consentement parental doit être maintenu, sauf refus ou incapacité des parents à accompagner leur fille. Cet amendement me paraît d'ailleurs peu cohérent avec les positions que vous avez défendues jusqu'ici.

L'amendement 56, mis aux voix, n'est pas adopté.

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APRÈS L'ART. 7

Mme Christine Boutin - L'amendement 44, qui procède toujours de la volonté de répondre aux difficultés des femmes ayant subi un avortement, vise à créer des services de consultation pour le suivi psychologique post-abortif. Je sais que ce terme ne plaît guère à Mme la rapporteure. Je reconnais qu'il n'est pas très heureux, et suis prête à discuter de la formulation. Mais il nous faut prendre en considération les difficultés des femmes qui ont avorté. Ne sont-elles pas 86 % à dire qu'elles en subissent les conséquences toute leur vie ? Bien que défavorable à l'avortement, je comprends leur situation et ne les juge pas. Mais il est stupéfiant qu'en dépit de votre choix de faciliter l'avortement et de votre reconnaissance qu'il constitue un échec et une souffrance, vous vous refusiez de la sorte à aider celles qui l'ont subi.

Mme la Rapporteure - Je suis défavorable à la rédaction de cet amendement. Je tiens cependant à rassurer Mme Boutin : l'article 4, qu'elle n'a pas voté, prévoit un entretien avant et après l'IVG, si la femme le désire.

L'amendement 44, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 8 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 9 vise à compléter le dispositif adopté en première lecture. Il poursuit un triple objectif : privilégier la collégialité et le caractère pluridisciplinaire des équipes qui examinent les demandes d'IMG, mettre fin à l'intervention obligatoire d'un médecin inscrit sur la liste d'experts près la Cour de cassation ou une cour d'appel lorsque la demande d'IMG est dictée par la santé de la femme, et enfin renforcer les droits de la femme dans cette procédure dont elle est paradoxalement absente aujourd'hui. La femme, ou le couple, doit pouvoir être entendu par les membres de l'équipe pluridisciplinaire, qu'il s'agisse de la santé de la femme ou de celle du f_tus.

Mme la Ministre - Le Gouvernement partage les objectifs de la commission. La nouvelle rédaction de l'article 8bis permet la réunion, dans toutes les situations, d'une instance de concertation unique -la décision devant être prise rapidement- et l'introduction d'un médecin choisi par la femme, ce qui est de nature à faciliter la concertation.

Le Gouvernement propose, avec l'amendement 67, d'améliorer cette rédaction, la présence d'une personne non médecin au sein de l'instance d'expertise étant susceptible d'introduire une confusion et de fausser les repères juridiques inscrits dans la loi de 1975. Il convient de préserver le caractère strictement médical de l'interruption médicale de grossesse ; l'instance de concertation pluridisciplinaire doit donc être composée de médecins qualifiés.

M. le Président - Cet amendement est incompatible avec celui défendu par la commission.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est défavorable à l'amendement 9.

Mme la Rapporteure - Nous maintenons l'amendement 9. On traite aujourd'hui de la santé du f_tus dans des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, où interviennent aussi des psychologues. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire de même s'agissant de la santé des femmes. Avec au moins trois médecins, l'instance en cause est d'ailleurs bien médicalisée.

Mme la Ministre - Je me permets d'insister, car il s'agit là de la cohérence de nos débats. Il est important de ne pas introduire dans cette commission d'éléments d'appréciation psychologique et sociale, qui renvoient plutôt à l'IVG.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je rejoins Mme la rapporteure lorsqu'elle préfère la collégialité, plus adaptée à la complexité des problèmes, au médecin expert. Mais Mme la ministre a raison de vouloir préserver le caractère médical de la commission. Notre législation doit être claire et les médecins ont besoin de repères juridiques précis.

J'ai, pour ma part, le souci de régler tous les problèmes des femmes en difficulté. Malgré l'allongement des délais et l'appel à l'IMG, il en restera en effet plusieurs milliers. C'est pourquoi je souhaiterais qu'on puisse aussi envisager l'interruption de grossesse pour motifs psychosociaux. Elle se pratique en catimini tous les jours, autant que cela se fasse de façon légale, sur avis d'une équipe pluridisciplinaire comprenant, cette fois, des psychologues, des conseillères familiales, sociales, etc.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Nous avons déjà eu cette discussion en première lecture. D'une part, le terme « psychosocial » n'a aucune portée juridique. D'autre part, nous ne voulons pas transférer l'IVG dans l'IMG.

Mme la Ministre - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin - J'ai du mal à comprendre... Il me semble que le sous-amendement de Mme Boisseau va bien dans le sens souhaité par la rapporteure, à savoir qu'il y ait une équipe pluridisciplinaire, et je suis pour cette solution, contre la position de Mme la ministre.

Le sous-amendement 34, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 9, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 9

M. Bernard Perrut - M. Mattei est déjà intervenu sur le sujet que traite l'amendement 66 : celui-ci prévoit qu'en cas d'accouchement entre le troisième et le sixième mois de gestation, donc en deçà du seuil de viabilité f_tale, le couple puisse mentionner sur le livret de famille cette naissance sans vie et faire inhumer le f_tus. Il s'agit de répondre à la détresse des femmes perdant leur enfant suite à une fausse couche ou à une IMG et de reconnaître au couple la qualité de parents.

Mme la Rapporteure - Un amendement similaire avait été rejeté lors de l'examen de la loi sur la modernisation sociale. Mme la ministre nous avait en effet démontré que l'amendement, dans cette rédaction, était en fait plus restrictif que la pratique actuelle.

Mme la Ministre - Même avis.

Mme Bernadette Isaac-Sibille - Nous avons eu récemment, dans le département du Rhône, deux cas d'enfants mort-nés avant le 180e jour de gestation. Dans certains départements, comme l'Isère, les circulaires autorisent à récupérer le corps de l'enfant pour l'enterrer et à inscrire cette naissance sur le livret de famille. Mais ce n'est pas le cas dans le Rhône et il a fallu l'intervention de M. le Préfet et de M. le ministre Vaillant pour que les enfants puissent être inhumés, ce qui a permis aux parents de mieux vivre leur deuil.

Cet amendement me paraît très intéressant car il supprimerait ce seuil du 180e jour de gestation et permettrait de garder trace des enfants mort-nés.

L'amendement 66, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 9 BIS

Mme la Rapporteure - La commission des affaires sociales a souhaité supprimer cet article introduit par le Sénat. Je laisse au président de la commission le soin d'exposer notre démarche.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Nous avons eu ce débat à plusieurs occasions. L'article introduit par le Sénat sur proposition de M. Claude Huriet précise que « nul n'est recevable à demander une indemnisation du seul fait de sa naissance », cela en réaction à l'arrêt de la cour de cassation dit « arrêt Perruche ».

Mme la ministre a annoncé qu'elle consulterait la commission nationale d'éthique à ce sujet. Pour notre part, Claude Evin et moi-même avons organisé une table ronde, le 29 mars, dont le compte rendu intégral va être diffusé. Outre les parlementaires, y ont participé M. Bertrand Mathieu, professeur de droit public à l'université de Paris I, Mme Catherine Labrusse-Riou, professeur de droit privé à l'université de Paris I, qui était l'une des plus opposées à l'arrêt Perruche, M. Patrice Jourdain, professeur de droit à l'université de Paris I, M. Bernard Hoerni, président de la section éthique et déontologique du Conseil national de l'Ordre des médecins, M. Laurent Cocquebert, directeur général adjoint de l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales et M. Gérard Prier, représentant de l'association des paralysés de France.

Deux problèmes se posaient. Le premier concerne la nature même du débat et il a été très bien résumé à la page 23 de l'excellent rapport de Mme Lignières-Cassou. Il ressort de la lecture attentive de l'arrêt de la Cour de cassation que le préjudice indemnisé est la souffrance de la vie handicapée et non la vie elle-même : la Cour constate un lien de causalité entre l'erreur commise par le laboratoire et cette souffrance et c'est ce préjudice qui donne lieu à indemnisation. Si on s'en tient à cette lecture, l'amendement voté par le Sénat n'a pas d'objet.

Deuxième question posée, faut-il légiférer ? Mme Catherine Labrusse-Riou et les représentants des associations ainsi que tous les autres participants, sauf un, ont estimé qu'il ne fallait pas se précipiter, mais poursuivre la réflexion et examiner l'état des pratiques et l'évolution de la jurisprudence.

Cette table ronde a donc bien montré que l'interprétation qui est souvent faite de l'arrêt Perruche ne correspond pas à sa lettre et que d'autre part, quelle que soit l'analyse qu'on fait de l'arrêt, une intervention du législateur serait prématurée.

Cela justifie l'amendement de suppression de l'article voté par le Sénat.

Mme la Ministre - J'approuve entièrement ces propos. Avis favorable à l'amendement.

Mme Christine Boutin - Je suis plutôt convaincue, moi aussi, par ce discours. L'enjeu est gravissime, car l'arrêt de la Cour de cassation a donné lieu à des interprétations qui ont vivement ému l'opinion publique en général, et les associations de parents handicapés en particulier. Et si la table ronde, à laquelle j'ai assisté, a montré qu'il ne fallait pas légiférer trop rapidement, il reste que l'arrêt a troublé le regard que la société porte sur le handicap. Or tel est bien l'enjeu : voulons-nous que la solidarité nationale s'exerce à l'égard de tous les handicapés ou préférons-nous entrer dans une logique où le handicap relèvera de la responsabilité familiale ?

Mme la Rapporteure - Cela, c'est autre chose.

Mme Christine Boutin - Tel est pourtant l'enjeu véritable de l'arrêt Perruche. Face à cette situation, d'aucuns souhaitent légiférer sans attendre, tels M. Mattei ou M. Huriet. Au risque de surprendre certains de mes amis, je préfère, quant à moi, que l'on prenne le temps de la réflexion. Cela ne signifie pas accepter qu'on indemnise du seul fait de vivre : on ne pourra faire l'économie d'une discussion approfondie sur cette question, mais nous pourrons y revenir à l'occasion de la suite de la navette ou lors du débat sur les lois bioéthiques. En tout cas, la question posée est bien celle-là : quel regard la France veut-elle poser sur le handicap ? Je souhaite, quant à moi, une solidarité générale à l'égard du handicap, car il n'y a pas que celui de la naissance, il y a aussi les accidents ou la vieillesse.

L'amendement 10, mis aux voix, est adopté, et l'article 9 bis est supprimé.

M. le Président - En accord avec le Gouvernement et la commission, et vu l'heure déjà tardive, je lèverai la séance dès que nous aurons terminé l'examen de ce projet. Le texte relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie sera donc renvoyé à demain après-midi.

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ART. 11

Mme la Rapporteure - L'amendement 11 rétablit le texte de la première lecture. Il s'agit de transférer du code pénal à celui de la santé publique les sanctions liées aux IVG illégales. Sachez du reste qu'on trouve déjà plus de droit pénal hors du code pénal qu'en son sein !

L'amendement 11, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté, et l'article 11 est ainsi rédigé.

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ART. 11 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 12 rectifié permet d'une part de rétablir cet article tel que rédigé par l'Assemblée en première lecture, et d'autre part de préciser que les IVG « médicamenteuses » pratiquées sous le contrôle d'un médecin ne peuvent être assimilées au délit consistant à fournir à une femme les moyens matériels de s'auto-avorter.

L'amendement 12 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l'article 11 bis est ainsi rétabli.

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ART. 12

Mme Christine Boutin - Cet article supprime les sanctions pénales applicables à la « propagande » de l'avortement. Si ce dernier terme était certes maladroit, il reste qu'en autorisant la publicité de l'avortement, on le banalisera. N'est-il pas paradoxal de faciliter celle-ci quand on interdit celle du tabac ?

Mme la Rapporteure - L'amendement 13 rétablit le texte de la première lecture. Si l'on rétablit le délit de propagande, on interdit les permanences téléphoniques régionales.

L'amendement 13, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté, et l'article 12 est ainsi rédigé.

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ART. 13

Mme la Ministre - L'amendement 73 vise à rapprocher encore davantage Mayotte du droit commun.

Mme la Rapporteure - Favorable. L'amendement 14 de la commission est ainsi satisfait.

L'amendement 14 est retiré.

L'amendement 73, mis aux voix, est adopté, et l'article 13 ainsi rédigé.

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ART. 14

Mme la Ministre - L'amendement 74 relève du même esprit. Mais s'agissant de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie, des adaptations sont nécessaires.

Mme la Rapporteure - Favorable. L'amendement 15 de la commission est retiré.

L'amendement 74, mis aux voix, est adopté, et l'article 14 est ainsi rédigé.

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ART. 14 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 16 vise à supprimer cet article additionnel introduit par le Sénat, et ayant pour objet la remise d'un énième rapport sur l'information et la prévention en matière de sexualité et de contraception. L'information du Parlement est déjà prévue par la loi sur la contraception d'urgence.

L'amendement 16, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté. L'article 14 bis est ainsi supprimé.

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APRÈS L'ART. 15

Mme Marie-Thérèse Boisseau - L'amendement 36 complète ainsi l'article 2212-10 du code de la santé publique : « Sur la base des déclarations mentionnées à l'alinéa précédent, un rapport annuel sera remis au Parlement faisant état de l'évolution statistique du nombre d'interruptions volontaires de grossesse et présentant une analyse de ces résultats ».

En effet, si l'INED, en liaison avec l'INSERM, doit assurer le traitement statistique des données issues des déclarations faites par les médecins, force est de constater que les moyens mis à sa disposition sont insuffisants. Les derniers chiffres disponibles sur l'IVG remontent en effet à 1996.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Les dernières informations de l'INED ne datent pas de 1996 mais de 1998, et l'INSERM a publié un rapport à la fin de l'année dernière.

Mme la Ministre - Je ne crois pas non plus que les ajouts proposés soient utiles.

L'amendement 36, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - L'objet de l'amendement 45 est de créer un fonds de prévention de l'IVG, destiné à subvenir aux besoins des associations et organismes agréés d'accompagnement des femmes enceintes en difficulté afin de les aider à mener leur grossesse à terme comme après la naissance de l'enfant. Il s'agit toujours de respecter la liberté de la femme de choisir entre avorter ou mener sa grossesse à terme.

Mme la Rapporteure - Cet amendement avait déjà été repoussé en première lecture à la fois pour une raison juridique -la liste des annexes aux lois de financement de la sécurité sociale est fixée par une loi organique et non par une loi simple- et de fond : nous n'avons pas la même conception de la prévention que Mme Boutin.

Mme la Ministre - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

L'amendement 45, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Christine Boutin - Nous avons en effet des conceptions différentes de l'avortement et de la prévention.

Mme Muguette Jacquaint - Certes !

Mme Christine Boutin - Par l'amendement 46, je propose la création d'un observatoire public sur la prévention de l'IVG. Cela permettrait de faire un bilan annuel sur l'évolution du nombre d'IVG, que nous sommes unanimes à trouver trop élevé en France. Cela permettrait également d'étudier les raisons qui ont conduit les femmes à avorter et d'évaluer le suivi psychologique post-abortif.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. Nous avons déjà repoussé semblable amendement en première lecture et je redis que nous n'avons pas la même conception de la prévention car pour nous, elle consiste d'abord à développer la contraception.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 46, mis aux voix, n'est pas adopté.

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AVANT L'ART. 16

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Puisque priorité doit être donnée à la contraception, nous proposons justement, dans l'amendement 26, qu'un rapport soit remis au Parlement avant la fin de l'année sur la politique menée par le Gouvernement pour réduire le coût de la contraception.

La contraception hormonale reste chère et elle est presque exclusivement à la charge des femmes. Les nouvelles générations de pilules micro-dosées ne sont pas remboursées par la sécurité sociale, à l'exception du Tétragynon depuis 1985, alors qu'elles sont beaucoup prescrites par les médecins dans la mesure où elles ont la réputation d'être mieux tolérées. De plus, les laboratoires en abreuvent les centres de planning familial, qui les distribuent facilement : les femmes s'y habituent et ne veulent plus en changer, bien que la plaquette coûte entre 50 et 70 F et la boîte entre 150 et 200 F.

Les stérilets sont également coûteux : entre 300 et 800 F, dont moins de 100 remboursés, et il faut ajouter à ce prix celui de la consultation médicale pour la pose.

Si l'on veut véritablement rendre plus accessible la contraception et ainsi prévenir des grossesses non désirées, il convient d'une part de développer des pilules génériques, ainsi que le Gouvernement s'était engagé à le faire, d'autre part, de favoriser la prise en charge de la contraception par la sécurité sociale. Il paraît en effet paradoxal que la sécurité sociale prenne en charge intégralement le coût d'une interruption de grossesse et pas celui de la contraception.

Il faut _uvrer pour un remboursement maximal de la contraception, voire pour sa gratuité, en particulier pour les mineures.

L'amendement 27 demande quant à lui un rapport sur la politique du Gouvernement en matière de recherche sur de nouvelles méthodes contraceptives.

M. le Président de la commission - Depuis plusieurs années, la commission a pris systématiquement l'initiative de rapports de suivi sur les grands textes passés devant elle et votés par le Parlement, qu'il s'agisse des 35 heures, de la CMU ou de la lutte contre les exclusions. Et nous avons bien l'intention de continuer dans cette voie. Une telle approche me paraît de loin préférable à celle préconisée dans les amendements 26 et 27.

Compte tenu du rôle croissant joué par la Délégation aux droits des femmes, c'est elle qui pourrait assurer le suivi du présent texte, dès qu'il sera voté, et ce non par un rapport exhaustif mais par des rapports périodiques sur des points précis.

Ce sont ces considérations qui ont amené la commission à repousser les amendements 26 et 27.

Mme la Ministre - Je suis tout à fait d'accord avec les modalités proposées par le président de la commission.

Mme Muguette Jacquaint - Lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale, nous avions déjà posé la question du remboursement des pilules de troisième génération et l'on nous avait répondu qu'il y avait encore des analyses à faire... Je continue donc à insister sur la nécessité de mieux rembourser toutes les pilules contraceptives, et notamment celles citées dans l'amendement 26. La réponse de la commission à ce sujet ne m'a pas totalement satisfaite. Comme je suis également pour pousser la recherche sur de nouvelles méthodes contraceptives je ne voterai pas contre les amendements 26 et 27.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Merci. Je suis moi aussi convaincue qu'il faut être en mesure d'offrir aux femmes le panel contraceptif le plus diversifié possible.

Que la Délégation aux droits des femmes suive de près l'application du présent texte une fois qu'il aura force de loi, c'est son droit et même son devoir. Mais il n'est jamais bon d'être juge et partie. Or la Délégation aux droits des femmes est un organe politique qui fera forcément un rapport politique. Or je voudrais que nous disposions aussi d'un rapport neutre, extérieur et scientifique.

Les amendements 26 et 27, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

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ART. 16

Mme la Rapporteure - L'amendement 17 rétablit la possibilité de délivrer la contraception d'urgence à des mineures sans prescription médicale.

L'amendement 17, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, et l'article 16 ainsi rétabli.

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APRÈS L'ART. 16

Mme la Rapporteure - L'amendement 18 tend, à l'initiative de Mme Boisseau, à assurer aux étudiants en médecine et à l'ensemble des professionnels de santé un enseignement spécifique en matière d'éducation sexuelle et de contraception.

Mme la Ministre - Je partage cette préoccupation, mais le contenu des formations n'est pas du ressort de la loi. Au reste, il existe déjà un enseignement de ce type en deuxième cycle d'études médicales, et un stage en centre gynécologique sera bientôt obligatoire en troisième cycle.

Mme la Rapporteure - Au vu de ces explications, je suis prête à retirer l'amendement.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je le reprends, car les cours actuellement dispensés aux généralistes restent très théoriques. Ce qui leur manque, c'est un enseignement plus concret, leur permettant de parler de contraception de façon précise et efficace à n'importe quelle patiente.

L'amendement 18, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - L'amendement 75 a pour objectif la création, dans chaque département, d'un réseau de médecins généralistes, rémunérés à l'acte dans le cadre d'une convention avec les autorités sanitaires et sociales, assurant des consultations médicales gratuites destinées aux personnes exposées à un risque de grossesse ou à des risques infectieux. Il convient en effet de prolonger l'action des centres du Planning familial, qui font un excellent travail, mais qui sont très inégalement répartis sur le territoire, et auxquels les jeunes ont d'autant moins facilement accès que leurs horaires ne sont guère adaptés.

Mme la Rapporteure - La commission ne l'a pas examiné, mais je comprends mal ce dont il s'agit : est-ce de soins, de prévention, d'information sur la contraception, de lutte contre le sida et les MST ? Et comment définir les « personnes exposées à un risque de grossesse » ?

Mme la Ministre - Le Gouvernement est favorable à la constitution de réseaux de soins, ainsi qu'à la prévention des grossesses non désirées, mais il ne considère pas que la grossesse constitue un risque en soi.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je vais tâcher d'être plus claire. L'objectif poursuivi est triple : accessibilité plus grande, notamment pour les jeunes ; délivrance d'une information médicalisée ; gratuité enfin  et c'est d'ailleurs pourquoi j'ai dû contourner l'article 40 en demandant la remise d'un rapport au Parlement sur la question...

Mme la Rapporteure - Je ne suis guère plus éclairée, ni par cette explication, ni par le texte même de l'amendement.

L'amendement 75, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 16 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 19 rétablit le texte voté par l'Assemblée en première lecture, et étend, en outre, l'éducation sexuelle aux écoles primaires, à raison de trois séances annuelles au moins, par groupes d'âge homogènes ; des élèves formés par un organisme agréé par le ministère de la santé pourront être associés à ces actions.

Mme la Ministre - Avis favorable.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je suis heureuse que cet amendement soit retenu, et que l'on fasse appel à la participation des élèves eux-mêmes.

Le réalisme doit primer et, si l'on sait que 80 % des informations grappillées par les jeunes le sont auprès des autres jeunes, autant tout faire pour qu'elles soient sûres !

Je regrette, en revanche que rien ne soit dit des enseignants. Le sous-amendement 35 vise à combler cette lacune en instaurant une formation à l'éducation sexuelle au sein des IUFM.

Quant au sous-amendement 30, il vise à élargir au mieux l'information en la diffusant aussi dans les centres d'information jeunesse, les maisons des jeunes et de la culture et les maisons de quartier.

Mme la Rapporteure - Autant il nous est possible de légiférer pour ce qui a trait aux établissements dépendant de l'éducation nationale autant il nous est impossible de contraindre les associations. Certes, nos campagnes de sensibilisation se sont aussi appuyées sur elles, mais une telle action ne peut que prendre la forme d'un v_u : elle ne peut leur être imposée.

Mme la Ministre - Même avis pour le sous-amendement 30. Quant au sous-amendement 35, il n'est pas du domaine législatif.

Les sous-amendements 30 et 35, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 19, mis aux voix, est adopté et l'article 16 bis est ainsi rétabli.

M. le Président - Les amendements 57 et 58 tombent donc.

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ART. 16 TER

Mme Christine Boutin - Il n'est pas question de nier la sexualité des personnes handicapées mentales, mais il est impératif de la situer dans un contexte global plutôt que de la limiter, comme nous le propose cet article et comme c'est déjà le cas pour les adolescents, à la prévention des MST et des grossesses non désirées.

Tel qu'il est rédigé, l'article aura pour conséquence que les handicapées mentales auront d'autant plus de mal à résister aux abus que l'on semble y consentir en expliquant comment limiter les risques. Il faut, aussi, penser aux parents, dont on nie l'autorité alors même qu'ils peuvent rarement choisir l'établissement d'accueil de leur enfant. Vous l'aurez compris : l'amendement 47, qui est de suppression, est défendu.

Mme la Rapporteure - Avis défavorable. La commission est favorable à cette disposition intéressante, introduite par le Sénat.

Mme la Ministre - Avis défavorable. J'avais approuvé l'introduction, par le Sénat, de cet article additionnel.

L'amendement 47, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 16 ter, mis aux voix, est adopté.

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ART. 17

Mme la Rapporteure - L'amendement 20 a un objectif triple. En premier lieu, il confirme -ce que le Sénat a approuvé- que le consentement parental n'est plus obligatoire pour la prescription, la délivrance ou l'administration des contraceptifs aux mineures. En revanche, contrairement au texte voté par le Sénat, cet amendement prévoit la suppression de l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux, revenant ainsi au texte initial du projet.

L'amendement permet en outre de réécrire l'article L. 5134-1 du code de la santé publique pour y insérer les dispositions de la loi du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence.

Enfin, l'amendement précise que les diaphragmes et les capes sont soumis à prescription médicale obligatoire et donc délivrés en pharmacie, comme les contraceptifs intra-utérins.

Mme la Ministre - Avis favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement 68, qui précise la rédaction du troisième alinéa du I.

Le sous-amendement 68, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 20, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article 17 est ainsi rédigé.

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APRÈS L'ART. 17

Mme Christine Boutin - Dans cet hémicycle, deux conceptions de l'avortement s'opposent, tout le monde en convient. Tout le monde convient aussi que le nombre d'avortements qui se pratiquent en France, 25 ans après la loi Veil, signale un échec. Mais alors que notre pays est l'un de ceux où la contraception est la plus développée, Mme la rapporteure et d'autres orateurs s'obstinent à lier diffusion de la contraception et diminution du nombre des avortements, ce qui est une ineptie. Il conviendrait, au moins, que toute information gouvernementale sur les méthodes de contraception soit exhaustive : l'efficacité des campagnes en serait renforcée d'autant. C'est à quoi tend l'amendement 49. Pour l'instant, en effet, les campagnes sont très orientées, et certaines méthodes sont tout bonnement passées sous silence.

Mme la Rapporteure - L'amendement a été adopté par la commission contre l'avis de sa rapporteure et de son président qui, ni l'une ni l'autre, ne considèrent le coïtus interruptus ou la méthode Ogino comme des méthodes de contraception.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Il en existe d'autres que celles-là, qui sont archaïques.

Mme la Ministre - Avis défavorable. Je ne vois pas l'utilité d'un article spécialement dévolu à la qualité de l'information que le Gouvernement s'est engagé à développer.

Mme Christine Boutin - C'est avec une profonde satisfaction que je viens d'entendre Mme la ministre s'engager ainsi à veiller au caractère objectif et complet de l'information. Je ne manquerai pas de noter les changements qui interviendront dans les prochaines campagnes ! Quant à Mme la rapporteure, je lui indique qu'il existe d'autres méthodes que la méthode Ogino ou le coït interrompu !

L'amendement 49, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 17 BIS

Mme la Rapporteure - L'amendement 21 vise, conformément à la position de la commission -qui vient d'être rappelée par son président- à supprimer cet article. Celui-ci prévoit en effet un nouveau rapport supplémentaire sur la politique de contraception et l'accueil des femmes dans les structures pratiquant l'IVG.

Mme la Ministre - Avis favorable.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Je pense qu'en voulant supprimer cet article, nous pratiquons une confusion des genres. Tout ne peut pas reposer sur la délégation aux droits des femmes qui a son rôle à jouer, mais demeure un organe politique. J'appelle donc vraiment de mes v_ux ce regard extérieur, scientifique, qui compléterait utilement son travail.

L'amendement 21, mis aux voix, est adopté, et l'article 17 bis est ainsi supprimé.

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ART. 18

Mme la Rapporteure - L'amendement 22 vise à rétablir le texte adopté par l'Assemblée en première lecture. Il concerne les sanctions pénales liées à la contraception.

L'amendement 22, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 18 est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

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APRÈS L'ART. 18

Mme Marie-Thérèse Boisseau - L'amendement 25 de Mme Isaac-Sibille est défendu.

L'amendement 25, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

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ART. 19

Mme Christine Boutin - L'amendement 50 vise à supprimer l'article 19 qui autorise la stérilisation des personnes handicapées. Il s'agit là d'un sujet très important. Le comité consultatif national d'éthique -CCNE- rappelle d'ailleurs, dans l'un de ses rapports que je vous cite, que la stérilisation supprime une fonction qui n'est pas seulement physiologique. Dans sa dimension anthropologique, la capacité de procréer met en effet en jeu le sentiment d'être dans le monde, d'y avoir sa place, l'expression sexuée et la prolongation de la lignée. Je vous invite à lire ce rapport dans le détail. Le CCNE y pose notamment la question du droit à limiter ses capacités procréatrices. Il rappelle que toutes les familles philosophiques et spirituelles reconnaissent un droit à l'exercice des capacités procréatrices, mais non une obligation morale de le réaliser. La reconnaissance d'un tel droit exige que cette capacité soit protégée, puisqu'elle contribue à la possibilité de fonder une famille, reconnue par la Déclaration universelle des droits de l'homme. Ce que vous proposez, Madame la rapporteure, Madame la ministre, est donc extrêmement grave. Certes, vous l'assortissez de conditions, mais celles-ci ne sont pas suffisamment précises.

Mme la Rapporteure - Nous sommes là dans le domaine de l'intime conviction. Si toutes les convictions sont légitimes, ce n'est pas en fonction des siennes propres que l'on doit légiférer. Comme en matière d'IVG, il appartient donc à chaque personne d'exercer sa liberté à disposer de son corps et, après avoir reçu une information complète du médecin, de poser un choix délibéré, libre, éclairé et motivé. Nous avons à respecter le libre arbitre de chacun, dès lors que les conditions prévues sont remplies.

Mme la Ministre - Avis défavorable.

L'amendement 50, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - L'amendement 23 rectifié vise à rétablir le texte de l'Assemblée. L'article 19 a posé les conditions préalables à la stérilisation que sont la consultation préalable, l'information par le médecin, l'existence d'un délai de réflexion et d'une clause de conscience pour le médecin. Le Sénat y a ajouté un âge minimum de 35 ans, auquel peut être substitué le résultat d'un calcul incompréhensible. Nous ne reprendrons pas ce point, mais nous proposons en revanche de conserver le passage de deux à quatre mois du délai de réflexion.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. Bernard Perrut - Le sous-amendement 59 vise à préciser les risques encourus par les personnes ayant recours à cet acte chirurgical, et notamment celui d'être stérile.

De même, afin de parer à tout changement de situation d'opinion de l'homme désirant recourir à une ligature de ses canaux déférents, qui encourt ainsi le risque d'être stérile, il faut l'informer des possibilités de congélation de son sperme.

L'amendement 58, quant à lui, part du constat que 25 000 à 30 000 demandes de stérilisation à visée contraceptive sont recensées chaque année. Il convient, afin de préserver la santé publique et d'éviter les excès, de leur donner un cadre légal et, en tout état de cause, d'avertir l'homme des éventuelles conséquences de son choix.

Mme la Rapporteure - Le sous-amendement 59 a été accepté par la commission contre l'avis de son président et de sa rapporteure. Ses deux alinéas me semblent assez antinomiques. Par ailleurs, le prélèvement et la cryoconservation sont des techniques médicales qui peuvent évoluer. Quant à l'amendement 58, il fait référence à l'article 16-3 du code civil. Or, si nous légiférons aujourd'hui, c'est précisément parce que cet article 16-3 dispose qu'il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne, et parce qu'il fait l'objet d'interprétations divergentes de la part des conseils régionaux de l'Ordre.

D'autre part, cet amendement spécifie quels médecins peuvent pratiquer la stérilisation. Il nous semble que cela ne relève pas de la loi.

Mme la Ministre - Monsieur Perrut, le Gouvernement est bien conscient de la nécessité d'informer les personnes qui recourent à la stérilisation du caractère généralement définitif de cet acte : mais cette information est déjà prévue par l'article 19 tel qu'il a été voté en première lecture.

Quant à l'information sur la possibilité de congeler le sperme, elle devrait être donnée dès la première consultation médicale ; mais cette précision relève du règlement plutôt que de la loi. Le Gouvernement n'est donc pas favorable au sous-amendement 59.

Avis défavorable également à l'amendement 58 : d'une part, nous n'avons pas à énumérer limitativement les informations à donner, d'autre part nous souhaitons suivre la proposition du Sénat de porter le délai de réflexion de deux à quatre mois.

Le sous-amendement 59, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 23 rectifié, mis aux voix, est adopté et l'article 19 est ainsi rédigé.

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ART. 20

Mme Christine Boutin - Les amendements 51 et 55 tendent à interdire la stérilisation sans finalité thérapeutique des personnes handicapées mentales. Il s'agit d'une violation quasi-irréversible de l'intégrité physique et elle est d'autant plus condamnable quand elle est effectuée sur une personne incapable de donner son consentement.

Le comité national d'éthique souligne que la stérilisation est le plus souvent considérée comme une mutilation, notion qui recouvre soit une amputation, soit une blessure grave altérant l'intégrité physique. Les diverses techniques chirurgicales de stérilisation relèvent effectivement de l'une ou l'autre de ces catégories et n'échappent à la qualification de violence que s'il y a nécessité thérapeutique.

Cette réponse du comité national d'éthique montre l'importance de cette question.

La France, pays des droits de l'homme, ne peut inscrire dans la loi cette atteinte à l'intégrité de la personne.

Mme la Rapporteure - Pourquoi légiférons-nous sur cette question ? Parce que l'article 16-3 du code civil ne protège pas suffisamment les personnes handicapées mentales. Tous les jours la presse et les associations dénoncent des abus. Dans tel CAT, 16 jeunes femmes sur 19 ont été stérilisées, pas toujours avec leur consentement. Des couples d'handicapés mentaux légers regrettent d'avoir été stérilisés. Des familles nous disent que telle institution n'acceptera de prendre leur fille que si elle est stérilisée. Donc aujourd'hui, les personnes handicapées ne sont pas protégées.

Demain, avec un article 19 concernant l'ensemble des personnes majeures désirant se faire stériliser, nous augmentons le risque du recours à la stérilisation des personnes handicapées mentales et les médecins comme les familles vont se retrouver face à ces difficultés. Il faut donc légiférer. Ce n'est pas une question facile, mais rien ne serait pire que la loi du silence qui règne actuellement. L'article 20 est un article de protection. Nous limitons le recours à la stérilisation des personnes handicapées mentales au cas où il y a contre-indication médicale à la contraception ou impossibilité avérée de la mettre en _uvre. D'autre part, nous avons repris deux amendements du Sénat précisant qui peut saisir le juge des tutelles et interdisant de passer outre au consentement de la personne handicapée si elle est apte à l'exprimer.

Nous avons retravaillé le texte car la notion de personne handicapée mentale est médicale et non pas juridique. Le Sénat l'a remplacée par la notion de « personne majeure sous tutelle », mais c'est une définition beaucoup trop large car elle peut englober des situations de surendettement, de difficultés sociales, etc.

Nous avons également repris un amendement du Gouvernement concernant les personnes sous curatelle : il leur sera possible de saisir elles-mêmes le juge des tutelles.

Le juge des tutelles sera garant du consentement de la personne et de son information préalable. Avis défavorable à l'amendement 51.

Mme la Ministre - Je ne suis pas favorable à l'amendement 51 car il supprime un article introduit par le Sénat qui me paraît tout à fait utile.

Sur l'amendement 55, avis défavorable également, car il est déjà satisfait.

L'amendement 51, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme la Rapporteure - J'ai déjà défendu l'amendement 24 rectifié.

Mme la Ministre - Auquel je suis très favorable, car il étend la protection aux personnes placées sous curatelle et apporte encore d'autres améliorations au texte voté par le Sénat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Cet article a été bien amélioré par le Sénat et par notre commission. Je reste néanmoins sensible aux réactions des associations d'handicapés qui réclament un vaste débat sur le sujet. Plusieurs questions demeurent en effet : qui décidera qu'une personne est apte à se prononcer ? Comment prendra-t-on l'avis des handicapés ? Quid des handicapés légers qui ne sont pas soumis à une protection légale ? Ne risque-t-on pas de les placer sous tutelle pour les stériliser ? (Exclamations sur les bancs de la commission) Toutes ces questions, et d'autres encore, méritent un large débat, et une consultation suffisante des associations.

Mme la Rapporteure - En première lecture, vous aviez pourtant incité à voter cette disposition, en nous disant que l'UNAPEI y était très favorable.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - S'il y a plusieurs lectures, c'est pour que l'on puisse évoluer. Entre-temps, j'ai reçu de nouveaux témoignages.

L'amendement 55, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 24 rectifié, mis aux voix, est adopté et l'article 20 est ainsi rédigé.

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APRÈS L'ART. 20

Mme la Ministre - L'amendement 71 répare un oubli en étendant à Mayotte la loi sur la contraception d'urgence. Quant à l'amendement 72, il étend à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie les dispositions du présent projet, dans la limite de ce qui relève des compétences de l'Etat.

Mme la Rapporteure - Favorable.

Les amendements 71 et 72, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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EXPLICATIONS DE VOTE

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Réviser la loi Veil, vingt-cinq ans après, oui. Mais à trois conditions. Que les nouvelles dispositions aboutissent à terme à moins d'avortements, ce qui suppose un minimum de cohérence dans la politique de prévention. Or, si l'UDF n'était pas intervenue, il n'y aurait rien dans cette loi sur l'information et l'éducation sexuelles de nos enfants. D'autre part, les dispositions relatives à la contraception restent insuffisantes. Nous n'avons aucune assurance quant à la diversification des méthodes, et l'on ne fait pas assez d'efforts pour la recherche en ce domaine.

Loin de réduire le nombre des avortements, cette loi risque de l'accroître, du fait d'une interférence dramatique, « mortifère » entre l'allongement du délai légal et cette pratique exclusivement française de l'échographie dès la 11ème semaine : celle-ci, en insufflant le doute dans l'esprit de certaines femmes, provoquera des avortements supplémentaires.

Enfin, cette révision n'aboutira pas non plus a améliorer les conditions des avortements. En effet la majorité du corps médical est réticente devant l'allongement du délai légal. Et je ne sais toujours pas ce que vous proposez aux femmes qui auront dépassé le nouveau délai. Or, ce sont les plus démunies. Nous avons été nombreux à dénoncer le manque de moyens pour l'accueil des femmes qui veulent avorter, et de ce point de vue, rien d'essentiel ne changera.

Parce que cette loi ne propose pas de mesures fortes pour réduire le nombre d'avortements ; parce qu'elle risque au contraire de l'accroître ; parce que les femmes décidant d'avorter ne seront pas mieux accueillies, le groupe UDF votera, dans sa grande majorité, contre cette loi.

M. Patrick Delnatte - S'agissant d'une question de conscience, le groupe RPR, comme en première lecture, laissera la liberté de vote à ses membres. Personnellement, je regrette qu'en répondant aux difficultés constatées pour le seul droit de disposer librement de son corps, on occulte la réalité de certains problèmes.

Le système proposé par le texte ne mettra pas fin à l'échec qu'exprime l'importance du nombre d'IVG en France.

M. Bernard Perrut - Le sujet qui nous occupe est l'un de ceux dont les enjeux sont lourds et qui ne trouvent jamais de solution tout à fait satisfaisante. Quelles que soient ses convictions, personne ne peut être sûr que la réponse apportée soit la bonne.

Le débat de ce soir suscite aussi des interrogations fondamentales dans le domaine médical et amène à réfléchir sur ce que doit être l'accueil de tous les jours, sur la disponibilité des équipes. C'est pourquoi nous avons tout au long de la discussion défendu des amendements qui visaient non pas à rouvrir un débat moral ou éthique mais à améliorer un texte que nous jugeons insuffisant. En rencontrant les conseillères conjugales chargées des entretiens préalables, des médecins et des femmes concernées, nous avons compris qu'il y avait parfois une certaine ambivalence du refus ou du désir d'enfant, et donc des hésitations sur la décision à prendre. Nous aurions donc souhaité mettre dans ce texte un peu plus d'humanité, en particulier en conservant un caractère obligatoire à cet entretien qui peut permettre à la femme d'être accompagnée et de trouver un fondement à sa décision. Nous espérions aussi que le Gouvernement s'engagerait sur un surcroît de moyens ainsi qu'à faire plus de prévention et d'information. Le groupe DL laissera la liberté de vote à chacun de ses membres mais constate avec regret que ce texte ne répond pas à ses attentes, non plus qu'à celles des femmes.

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté.

Prochaine séance cet après-midi, mercredi 18 avril, à 15 heures.

La séance est levée à 1 heure 5.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 18 AVRIL 2001

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement

2. Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 2936) relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie.

M. Pascal TERRASSE, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 2971)

A VINGT ET UNE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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