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Session ordinaire de 2000-2001 - 88ème jour de séance, 203ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 13 JUIN 2001

PRÉSIDENCE de M. Yves COCHET

vice-président

Sommaire

          DÉPÔT DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE 2

          DÉMOCRATIE DE PROXIMITÉ (suite) 2

          QUESTION PRÉALABLE 2

          ERRATA 30

          ORDRE DU JOUR DU JEUDI 14 JUIN 2001 31

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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DÉPÔT DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

M. le Président - M. le Président de l'Assemblée nationale a reçu, le mercredi 13 juin 2001, de M. François Sauvadet, président de la commission d'enquête sur le recours aux farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage, la lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine et les enseignements de la crise en termes de pratiques agricoles et de santé publique, le rapport fait au nom de cette commission par M. Michel Vergnier.

Ce rapport sera imprimé sous le n° 3138 et distribué, sauf si l'Assemblée, constituée en comité secret, décide, par un vote spécial, de ne pas autoriser la publication de tout ou partie du rapport.

La demande de constitution de l'Assemblée en comité secret doit parvenir à la Présidence dans un délai de cinq jours francs à compter de la publication du présent dépôt au Journal officiel de demain, soit avant le mardi 19 juin 2001, à minuit.

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    DÉMOCRATIE DE PROXIMITÉ (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la démocratie de proximité.

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QUESTION PRÉALABLE

M. le Président - J'ai reçu de M. Jean-Louis Debré et des membres du groupe RPR une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du Règlement.

M. François Fillon - La France change, les Français aussi, mais pas l'architecture politique de la France. Alors qu'une immense aspiration à plus de décentralisation se fait jour et alors que nos concitoyens sont en quête de responsabilité et de liberté, alors qu'un souffle nouveau pousse à une réforme d'ensemble des pouvoirs, le Gouvernement nous soumet un projet de circonstance aussi étriqué que brouillon.

Entre la France institutionnelle et celle du terrain existe un fossé que ce projet ne comblera pas, en dépit de son titre flatteur. Il est décourageant, pour tous ceux qui croient à la nécessité d'une modernisation du pays, de constater le contraste entre, d'une part, l'immense battage et déploiement de force gouvernemental autour de l'archaïque projet de modernisation sociale, de l'autre, la misère et l'improvisation politiques qui entourent la question, pourtant cruciale et d'actualité de la décentralisation.

Ce texte est-il le fruit d'une réflexion mûrie du Gouvernement sur le fossé qui va s'élargissant entre les Français et la chose publique, sur les voies et moyens de démocratiser la République et de faire prévaloir une conception plus ouverte, plus diversifiée de la citoyenneté ? Assurément non, car si tel était le cas, le Gouvernement ne s'évertuerait pas à légiférer sur le seul espace public qui échappe actuellement à la critique de l'opinion, l'espace municipal. Il y a quelque chose d'étrange à légiférer sur la démocratie locale, vivante et riche, plutôt que sur la démocratie nationale, objet de désillusion pour les citoyens dont témoigne leur absentéisme électoral croissant. En somme, le Gouvernement légifère sur ce qui va plutôt bien et esquive ce qui va plutôt mal. Faiblesse endémique du Parlement, distance accrue entre les citoyens et les pouvoirs européens, manque de transparence de la sphère publique, exiguïté du dialogue social, essoufflement de la décentralisation : tous ces sujets lourds sont contournés au profit d'une prétendue démocratie de quartier, dont nos concitoyens n'ont pas attendu le Gouvernement pour la pratiquer.

Ce projet serait-il alors la mise en _uvre des propositions du rapport Mauroy ?

Non plus, ou alors de façon modeste et elliptique ! Car le rapport Mauroy avait une cohérence que le Gouvernement s'emploie à défaire, bout après bout. C'est la méthode des « petits pas », nous dit-on, comme pour les négociations de Camp David ! Le problème, c'est que l'avenir de la décentralisation ne doit pas procéder d'une négociation en forme de troc mais d'une vision d'ensemble destinée à rénover le pacte républicain. Or, en matière de décentralisation, cette cohérence fait défaut depuis quatre ans.

En vérité, l'origine de ce texte se situe dans le revers subi par la gauche lors des dernières municipales. Cette confrontation électorale a démontré que celle-ci perdait le contact avec les Français. A l'occasion de l'élection la plus personnelle, la plus révélatrice des attentes de nos concitoyens, le Gouvernement s'est aperçu, à ses dépens, que son bilan national n'avait pas de résonance dans les quartiers, les cités et les villages. Le Gouvernement s'est dès lors empressé de trouver une riposte, un « je vous ai compris », afin de donner le change. Et c'est ainsi que sont nés, dans l'urgence, le projet sur la sécurité quotidienne et celui sur la démocratie de proximité. Qu'importe que ces projets ne traitent qu'à la marge le fond des problèmes, l'objectif est seulement de faire rapidement illusion.

Plus nous approchons des échéances électorales de 2002, plus l'action gouvernementale est indexée sur la conjoncture la plus immédiate. Des licenciements interviennent et voici que tombent les amendements psychodramatiques sur la loi de modernisation sociale ; les élections municipales révèlent les angoisses de nos concitoyens face à l'insécurité et voici le projet sur la sécurité quotidienne ; les mérites de la démocratie locales sont vantés, voici donc le texte sur la démocratie de proximité ; le projet de loi sur la Corse met en lumière le sort inéquitable réservé aux autres collectivités territoriales et voilà que surgissent aujourd'hui les amendements de réparation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Ce gouvernement agit de plus en plus comme un prestataire de services, qui, l'_il rivé sur l'audimat social, agit au coup par coup, sous la pression des sondages d'opinion ou de ses alliés politiques. Le Gouvernement est l'otage de l'actualité et non un éclaireur politique capable de mobiliser les Français autour de perspectives de moyen et long terme. En agissant ainsi dans l'urgence, je crains que nous n'enfermions la politique dans une logique de court terme fatal à l'intérêt général.

Dans la foulée des municipales, le Gouvernement a décidé d'occuper l'espace de la décentralisation, en affichant le souci d'une proximité qui, visiblement, ne lui est pas spontanément reconnu par les Français. De ce projet conjoncturel, il n'est pas étonnant que le contenu soit superficiel et parcellaire. Nous sommes appelés à nous prononcer sur une sorte de DMOS de la décentralisation.

Les articles 1 à 7 concernent la participation des habitants à la vie locale. Sur le principe, nul n'aura rien à y redire ; au niveau local comme au niveau national, le défi est le même : il faut adapter les pouvoirs et élargir le débat public pour libérer la force créatrice des Français.

Le RPR a décliné ses propositions lors du débat du 27 janvier sur la décentralisation. Face à la gauche qui vante les mérites du scrutin de liste et de la proportionnelle, nous avons d'abord affirmé notre attachement au scrutin uninominal pour toutes les élections, exception faite des municipales, car il rapproche l'élu des citoyens, l'oblige à une explication et à une pédagogie permanentes.

Notre groupe s'est également prononcé en faveur de l'élection des membres des structures intercommunales auxquelles participent plus de 21 000 communes. L'intercommunalité doit sortir de la démocratie indirecte ; les membres de ces structures devraient être désignés par les citoyens dans le cadre d'un scrutin s'inspirant de la loi PLM. L'ampleur du dossier aura sans doute effarouché le Gouvernement, qui ne veut brusquer personne à un an des élections.

Enfin, nous suggérons d'élargir les conditions du recours au référendum local car la société civile est avide de participation et il faut avoir confiance en elle. Il conviendrait d'enrichir le chapitre V du code des communes au profit des départements et régions et d'examiner la possibilité d'abaisser le seuil de déclenchement de la procédure.

Ce que nous proposons là est autrement plus innovant que le titre I de ce projet. Celui-ci a pour objet de systématiser ce qui existe souvent déjà : les conseils de quartier sont dès à présent en place dans plus de la moitié des municipalités concernées ; la faculté pour un conseil municipal de créer des comités consultatifs sur tout problème d'intérêt communal figure dans le code général des collectivités territoriales, et nous sommes nombreux à l'utiliser.

Mais en généralisant les conseils, on cadenasse, on fige, on fonctionnarise la démocratie locale. En outre, l'Association des maires de France a mis le Gouvernement en garde contre le risque d'une délégitimation progressive du conseil municipal, concurrencé par les conseils de quartier et les conseils de communauté.

Tout ce qui concerne la publicité des actes des collectivités locales, les droits des élus minoritaires, l'octroi à l'opposition d'un espace dans les documents d'information existe déjà en partie, et si ce n'est le cas, l'opposition trouve bien d'autres moyens de faire entendre sa critique. Croyez-moi, de nombreuses oppositions municipales sont mieux traitées que nous ne le sommes dans cet hémicycle ! En réalité, tout dépend de la volonté du maire de promouvoir ou non le débat démocratique, et vos mesurettes ne changeront rien à cette donnée.

Ce titre I est à la fois terriblement inutile, parce que les communes n'ont pas attendu ce projet pour faire vivre le dialogue local, et incurablement socialiste (Sourires sur les bancs du groupe DL et du groupe du RPR), parce qu'une fois de plus on légifère pour imposer et uniformiser.

Le titre II relatif aux conditions d'exercice des mandats locaux est modeste, mais il a au moins le mérite de répondre en partie et sans le dire à la question du statut de l'élu, sans cependant établir clairement le coût financier des mesures proposées.

Indemnités faibles, équipes réduites, moyens logistiques et d'expertises limités, contrôles tatillons, difficultés de réinsertion dissuadent nombre de nos concitoyens de briguer un mandat local. Il faut donc rappeler que la démocratie a un coût et instaurer un statut de l'élu attractif et protecteur. Ce titre II en pose modestement les bases, mais ces avancées restent insuffisantes et, au surplus, sont détachées de toute évolution globale de la décentralisation.

L'élu local est acteur de la décentralisation. Parler des droits de l'acteur sans évoquer et sans rénover l'environnement politique et administratif au sein duquel il agit, c'est examiner le problème par le petit bout de la lorgnette.

En outre, ce titre II passe à côté d'un élément important : pour sécuriser les élus locaux, il serait souhaitable de mettre en place de centres d'informations permettant aux élus d'être conseillés et de disposer d'une assistance juridique. Rappelons que depuis sa publication en 1996, la partie législative du code général des collectivités territoriales a été modifiée par 42 lois qui ont eu un impact sur 390 articles... Le conseil juridique constitue, au regard de cette instabilité des normes juridiques, une mission de service public.

Je laisse le soin à notre Assemblée de juger par elle-même du titre III relatif aux services départementaux d'incendie et de secours, qui a peu de rapport avec la démocratie de proximité, ainsi que de l'usine à gaz du titre IV relatif à la composition et aux compétences de la CNDP. Je l'invite enfin à débattre sans retenue sur le titre V relatif aux opérations de recensement !

Ce projet à l'intitulé aussi accrocheur qu'inadéquat correspond bien à la méthode erratique employée par le Gouvernement depuis quatre ans sur la décentralisation. Aucune vision d'ensemble ne sous-tend la politique menée.

Nous eûmes d'abord le projet sur l'intercommunalité.

Puis le projet de Dominique Voynet sur l'aménagement du territoire.

Puis la recentralisation fiscale : en moins de trois ans, la part des recettes fiscales autonomes dans les budgets des collectivités locales est passée de 54 % à 44 %.

Puis le projet sur la sécurité au quotidien, dont certaines dispositions relèvent de la décentralisation.

Puis le projet sur la Corse, qui agréait toutes les requêtes de l'île de Beauté, ignorant toutes celles des collectivités du continent.

Nous avons enfin ce projet sur la démocratie de proximité.

Au milieu de ce parcours sinueux, nous eûmes droit au mois de janvier à une discussion générale sur la décentralisation, animée par le Premier ministre, dont nul n'a très bien saisi l'utilité.

Voilà la méthode, ou plutôt l'anti-méthode, employée. Or la décentralisation est un sujet sérieux. Chacun sent bien qu'une nouvelle étape doit être engagée, mais de façon cohérente et démocratique, en associant l'ensemble des acteurs.

Centralisatrice et conservatrice, dépourvue d'une vision générale et dynamique de la décentralisation, la politique du Gouvernement aura toujours cédé à la logique des circonstances. A la cohérence, il a préféré le coup par coup, à la transparence, les amendements de dernière minute.

Monsieur le ministre, en l'espace d'un mois, vous êtes devenu l'homme des amendements impromptus. J'avais déjà eu l'occasion de dénoncer cette pratique lors de l'examen du projet sur la Corse. Vous court-circuitez le Conseil d'Etat, privé de son pouvoir de rendre un avis éclairé et vous prenez notre Assemblée au dépourvu, en l'obligeant à se prononcer dans la précipitation.

Cette pratique à la hussarde que vous avez utilisée pour le projet sur la Corse, vous la reprenez de façon plus insidieuse puisque vous avez, avec la collaboration du maire de Paris, décidé de modifier par amendements la loi PLM. Lundi, le Conseil de Paris a ainsi été pressé d'avaliser des orientations qui figurent dans vos amendements. Comme Philippe Séguin l'a indiqué, il n'est pas raisonnable de se dégager ainsi du passage en Conseil d'Etat et en Conseil des ministres au profit d'un pipe-line direct entre le groupe socialiste du Conseil de Paris et la majorité parlementaire.

Cette approche, juridiquement périlleuse, est politiquement ruineuse, car elle transforme ce qui devrait constituer une réforme cohérente pour Paris en une opération de couloir.

Oui, le statut de Paris mérite une réforme de fond.

M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis de la commission de la production - Que ne l'avez vous faite !

M. Bernard Derosier, rapporteur de la commission des lois - Là, vous vous mettez en difficulté !

M. François Fillon - Il faut d'abord reconnaître à Paris le statut de collectivité unique à statut particulier, parce qu'à l'évidence la dualité commune-département est obsolète, parce que Paris est une capitale dotée d'une organisation à deux étages, porteuse d'un héritage historique avec notamment l'existence d'une préfecture de police. Cette collectivité unique doit avoir un maire de droit commun, disposant de pouvoirs, à commencer par les pouvoirs de police municipale. Cette collectivité unique doit définir une nouvelle relation entre le maire de Paris et les maires d'arrondissements, avec une extension de la démocratie locale qui trouve son expression la plus forte à travers l'élection directe du maire de Paris au suffrage universel.

Voilà la réforme cohérente qu'il faut pour Paris. Le petit chemin emprunté par le Gouvernement et le maire de Paris est sans ambition, marqué par le conservatisme le plus étroit.

A ces amendements PLM s'ajoutent ceux portant sur des compétences prétendument supplémentaires accordées aux régions dans différents domaines. Vous les aviez annoncés dans une ultime volte-face lors de l'examen du projet sur la Corse. Ce qui était inenvisageable pendant quatre ans s'avère donc aujourd'hui possible... Ce revirement est révélateur de la mollesse de vos convictions sur la décentralisation.

Sur le contenu, ces amendements méritent tout juste la moyenne.

Sur les aides aux entreprises, nous constatons quelques avancées. Sur l'apprentissage, le transfert aux régions de la charge du versement à l'employeur de l'indemnité compensatrice forfaitaire liée au contrat d'apprentissage constitue aussi un premier pas.

Il y a aussi du flou, par exemple avec la gestion des ports et aéroports et le pouvoir de réviser le plan régional pour la qualité de l'air.

Il y a enfin du dérisoire : je pense à l'amendement mineur sur la formation professionnelle et à l'amendement miniature relatif à l'enseignement supérieur et la recherche.

Tout cela manque d'envergure. Nous sommes loin des recommandations du rapport Mauroy et même des suggestions émises par les présidents de région issus de la majorité plurielle.

En résumé, la genèse de ce texte est conjoncturelle, son contenu est à la fois chaotique, dérisoire et contraignant et, enfin, la méthode qui l'inspire est erratique. Sans ambition pas de vision, sans vision pas de cohérence, sans cohérence pas d'action de fond...

Je vous propose donc de remettre les priorités dans l'ordre.

Pour engager une nouvelle étape de la décentralisation, il faut d'abord énoncer une vision. Ce que nous voulons, c'est une France plus ouverte à l'innovation, à la liberté et à la responsabilité, qui ne peuvent s'épanouir dans le cadre institutionnel actuel.

Notre objectif se fonde sur la conviction que la société française a changé. Elle est en quête d'authenticité et de responsabilité. Elle est attentive à sa qualité de vie et tourne le dos à un schéma de développement centralisateur et uniforme. Aussi l'Etat doit-il apprendre à déléguer certaines de ses compétences. La décentralisation ne doit plus être comprise comme une simple adaptation structurelle, mais comme une véritable doctrine politique. Elle a besoin dès lors d'un second souffle. Il faut rénover, transcender, les lois de 1981 et 1982, qui sont dépassées par leur propre succès. Le statu quo n'est plus possible.

La réforme à laquelle nous pensons doit tendre à une décentralisation pour tous, car l'avenir de la décentralisation n'est pas du seul ressort du Gouvernement ou même des élus. Acteurs publics, privés, citoyens doivent être associés à l'élaboration d'un nouveau contrat politique, qui mériterait sans doute d'être couronné par un référendum. Il faut aussi une décentralisation régulée. Il n'y aura pas de prochaine étape de la décentralisation si l'Etat ne s'interroge pas sur son propre fonctionnement. Il doit se recentrer sur ses missions régulatrices en développant le principe des délégations de pouvoirs.

Il faut en outre une décentralisation clarifiée et mettre un terme à la confusion actuelle, en rationalisant la multiplicité des pouvoirs. Parce que la région doit constituer le vecteur principal des grandes ambitions locales, nous préconisons le mariage des régions et des départements en intégrant leur mode d'élection et l'assiette de leur fiscalité.

La modernisation de la fiscalité locale passe par la reconnaissance de l'autonomie fiscale des collectivités et de la spécialisation fiscale qui va de pair avec la responsabilité démocratique.

Il faut enfin une décentralisation approfondie. L'Etat doit transférer de nouvelles et larges attributions aux collectivités et déléguer certaines de ses charges liées au service public.

Les collectivités locales sont, selon nous, mieux à même que l'Etat de servir le développement, de favoriser l'égalité des chances dans les domaines de l'aménagement du territoire, du développement économique, de la formation professionnelle et de l'enseignement du primaire au supérieur, de la sécurité, les maires devant être associés à la direction et à la gestion d'une partie des forces de police et de gendarmerie affectées à la prévention et la petite délinquance, enfin de l'action sociale s'agissant en particulier du volet insertion du RMI.

Voilà des transferts de compétences autrement plus ambitieux que ceux effleurés par les amendements du Gouvernement.

Une vision, des convictions, une méthode, enfin un projet déclinant les dispositions précises : voilà comment on réforme.

La distance entre les pouvoirs et les citoyens se creuse dangereusement. Comment construire un espace public plus participatif et plus démocratique ? En recentrant l'Etat sur ses missions régulatrices, en clarifiant l'articulation des pouvoirs locaux, en élargissant leurs compétences, en rénovant la fiscalité locale, en définissant de nouvelles modalités électives et de participation démocratique. Tout cela relève d'un projet global.

Depuis quatre ans, tout montre que le Gouvernement n'est pas animé par cette vision d'ensemble. Ce texte en est la preuve. En le rejetant, nous obligerons le Gouvernement à s'interroger sur les fondements de la politique de décentralisation.

Parce qu'il n'y a pas lieu de débattre d'un projet qui n'en est pas un, je vous invite à écourter son examen (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur - Je m'interroge sur le sens même du propos de M. Fillon, qui s'est fort éloigné de la défense d'une question préalable, démontrant ainsi l'embarras qui était le sien (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Le RPR, champion des promesses non tenues (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), nous reproche en vérité de tenir nos engagements, alors que lui-même n'a jamais rien fait pour la décentralisation, et s'était même prononcé contre les lois de 1982 et 1983 (Mêmes mouvements).

M. Patrick Ollier - Votre discours date ! Arrêtez donc de regarder dans le rétroviseur !

M. Franck Dhersin - Vous êtes au pouvoir depuis quatre ans !

M. le Ministre - Aujourd'hui, en revanche, alors que notre démarche à nous vise à rendre l'Etat plus démocratique et plus proche des citoyens, certaines propositions de M. Fillon tendent tout bonnement à disloquer l'Etat (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), et je ne crois pas que nos concitoyens voudront le suivre dans cette voie !

Si je l'ai bien entendu, il n'y aurait pas lieu de délibérer de la démocratie de proximité, alors que nos concitoyens demandent à être davantage associés aux décisions et que les élus locaux eux-mêmes ont tout à y gagner. La baisse continue du taux de participation aux élections, y compris municipales, doit inviter le législateur à faciliter la démocratie participative, en fixant un cadre minimum (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) que les collectivités auront tout loisir d'élargir si elles le souhaitent. Cela ne devrait pas soulever de vives oppositions...

M. Marc-Philippe Daubresse - C'est la méthode qui fait problème !

M. le Ministre - Il n'y aurait pas lieu non plus de délibérer, ai-je cru comprendre, des conditions d'exercice des mandats locaux. Nous croyons, quant à nous, que les assemblées locales doivent être aussi représentatives que possible de la société française, et qu'un mandat électif est une chose trop sérieuse pour que son exercice puisse être entravé par des facteurs purement matériels. C'est pourquoi il vous est proposé de prolonger et d'approfondir la loi de 1992 en adoptant quelques mesures concrètes dont plusieurs membres de l'opposition, et M. Teissier lui-même, ont bien voulu reconnaître, et je les en remercie, qu'elles constituaient de réelles avancées.

Faudrait-il enfin refuser de délibérer des nouveaux transferts de compétences que comporte le présent projet, et qui répondent aux demandes unanimes qui se sont exprimées tant au sein de la commission Mauroy que lors de l'examen du projet de loi sur la Corse ? C'est ainsi, par exemple, que le texte répond au souhait, exprimé par le président de l'Association des régions françaises, M. Raffarin, que les conseils régionaux puissent accorder aux entreprises, sous certaines conditions, des avances remboursables sans intérêts. Je suis certain que tous les présidents de conseils régionaux seront fort intéressés par cette disposition.

M. Guy Teissier - Demandez plutôt à Fillon !

M. le Ministre - Il n'est pas en reste, car il m'a demandé, dans le débat sur la Corse, si j'étais prêt à étendre à toutes les régions françaises certaines dispositions de projet. J'ai dit que oui, nous sommes en train de le faire, et ça ne lui convient pas ! C'est à croire que ce qui l'embarrasse, c'est le fait que, contrairement à nos prédécesseurs, nous tenons nos engagements ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Ce projet n'est cependant qu'une première étape, et le mieux est l'ennemi du bien, d'autant que l'opposition, ai-je cru remarquer, n'est pas exempte de divergences en son sein en ces matières (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Yves Deniaud - Et chez vous, il n'y a pas de divergences ?

M. le Ministre - J'imagine les reproches que vous nous feriez si nous légiférions d'une façon jugée par vous trop précipitée sur des sujets aussi délicats que les prérogatives des communes dans le domaine du logement, ou que les transferts de personnels...

En ce qui concerne le statut de Paris, j'ai envie de dire à M. Fillon : pas vous, et pas à moi ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Il faut tout de même se rappeler l'application restrictive qui a été faite de la loi PLM, pendant vingt-quatre ans, par le RPR !

M. Guy Teissier - Gaston n'a pas fait mieux à Marseille !

M. le Ministre - M. Fillon n'a parlé que de Paris... (Sourires) Oui, le RPR est bien mal placé pour nous faire la leçon, les Parisiens le lui ont d'ailleurs signifié récemment !

M. Guy Teissier - Les Marseillais se sont prononcés aussi !

M. le Ministre - Le RPR a voté contre la loi PLM, il a refusé de la réformer par la suite, et il en a fait l'application la plus restrictive qui soit, le maire d'arrondissement que j'ai été peut en témoigner, et M. Goasguen lui-même avait plaidé en vain pour un meilleur partage des compétences entre l'Hôtel de Ville et les vingt arrondissements. Force est de constater qu'il a fallu que la majorité change au Conseil de Paris pour que nous puissions soumettre à votre examen un dispositif résultant d'une concertation constructive entre le Gouvernement, les parlementaires et la mairie de Paris elle-même...

S'agissant des pouvoirs de police, le RPR s'est toujours opposé à toute évolution, y compris en matière de circulation et de stationnement, qui feront l'objet de dispositions dans le cadre du texte qui vous est soumis aujourd'hui. Il semble en revanche se rallier, par la voix de M. Fillon, à l'idée de créer une police municipale ; pour ma part, j'y ai toujours été opposé et je le demeure : il faut bien que quelqu'un reste fidèle aux positions du RPR... (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Pour toutes ces raisons, je demande à l'Assemblée de repousser la question préalable, dont les auteurs, j'en suis persuadé, ne feraient rien s'ils étaient à notre place.

M. François Fillon - Chiche !

M. le Ministre - Les Français seront juges le moment venu. Pour l'heure, je suis fier de soumettre à votre Assemblée un projet qui concrétise les engagements que nous avons pris et qui va dans le sens de la décentralisation, souhaitée par une majorité de nos concitoyens. Mieux vaut une majorité qui a la volonté de changer les choses que des gouvernants pour lesquels les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Bernard Roman, président de la commission des lois - J'ai été quelque peu surpris, et par moments choqué, par l'intervention de M. Fillon. Il a reproché à la majorité de répondre coup par coup aux attentes de l'opinion publique, mais n'est-ce pas notre rôle que de prendre le pouls de celle-ci et d'apporter des réponses législatives aux besoins qu'elle exprime ? Au demeurant, nous n'avions pas attendu les élections municipales pour réfléchir et travailler à ce projet sur la démocratie de proximité.

Je me réjouis des louanges que vous avez adressées au rapport Mauroy, mais comment oublier que vous aviez quitté avec fracas la commission avant ses conclusions ?

M. Marc-Philippe Daubresse - Pour cause de recentralisation !

M. le Président de la commission - De même, c'est au rapport Mauroy que vous rendez hommage quand vous vous réjouissez des évolutions proposées pour le mode de scrutin départemental ou pour l'intercommunalité.

De ce point de vue, je m'étonne du regard que vous portez sur l'article premier. Vous traitez les conseils de quartier avec condescendance, affirmant que le code des collectivités territoriales prévoit déjà de tels organes et évoquant la lettre du Président de l'association des maires de France qui craint que les conseils municipaux soient ainsi privés d'une part de leur légitimité. Mais en prévoyant que ces conseils de quartiers seront présidés par un élu municipal, nous nous assurons précisément d'une bonne articulation entre les deux instances.

Je suis aussi en désaccord avec vous en ce qui concerne l'opposition municipale. Aujourd'hui, les droits de l'opposition sont mal assurés et il appartient au législateur, comme il avait modifié le mode de scrutin municipal en 1982 en y introduisant la proportionnelle -ce dont vous vous félicitez maintenant-, de garantir le pluralisme et de renforcer ces droits.

Je m'étonne également de votre regard de mépris sur le titre II. Les dispositions relatives aux conditions d'exercice des mandats locaux répondent aux souhaits des associations. Et seule votre vision politicienne vous empêche de voir que ce socle du statut de l'élu que vous appelez de vos v_ux, nous vous le proposons aujourd'hui.

Vous avez déploré la méthode des petits pas de la majorité. Mais, en matière de décentralisation, c'est bien ainsi que les choses progressent, on l'a vu avec le régime indemnitaire des maires comme avec l'intercommunalité, qui s'est bien développée grâce à la gauche et contre la droite ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Quant aux petits pas de la droite, il n'y en a eu aucun lors de ses deux précédents passages au pouvoir et, même en remontant trente ans en arrière, on n'en compte que trois : 1972 et la création des établissements publics régionaux ; fin des années 1970 et le rapport Guichard ; 1980 et le grand projet de décentralisation de M. Bonnet.

M. Marc-Philippe Daubresse - Vous aviez voté contre !

M. le Président de la commission - Il n'avait été examiné qu'au Sénat, puis les élections étaient intervenues.

Vraiment, quand on a un aussi piètre bilan, il faut un certain culot pour monter à la tribune et pour tenir un tel discours !

M. François Fillon - Je parle quand je le veux !

M. Franck Dhersin - Il se croit dans un conseil de quartier à Lille...

M. le Président de la commission - Pour toutes ces raisons, nous refusons de voter cette question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. René Dosière - Pour ma part, je juge normal de légiférer sur les communes car je ne crois pas, comme M. Fillon, qu'elles se portent bien. Ainsi, l'abstention, nouvelle, aux dernières élections municipales doit nous inquiéter et je me demande si elle ne tient pas, pour partie à la dissociation, de plus en plus marquée, entre le contribuable et l'électeur.

Nous avons vous et nous, à l'évidence, des conceptions différentes de la décentralisation. Vous avez jugé ce texte parcellaire et conjoncturel et appelé à un projet plus global, mais ce raisonnement est politiquement fallacieux car ce n'est pas de la sorte que la décentralisation s'est mise en marche. Chaque tentative pour la mener de façon globale a été un échec, le référendum du général de Gaulle de 1969, comme le projet Barre-Bonnet, qui s'est enlisé au Sénat. La seule décentralisation efficace est celle qui s'effectue au fur et à mesure dans un train de réforme tiré par la locomotive installée part Gaston Defferre en 1982, avec la loi droits et libertés, et auquel les wagons ont été progressivement ajoutés, jusqu'à celui-ci. Ainsi les dispositions relatives au statut de l'élu viennent compléter le texte de 1992 et elles seront elles-mêmes complétées un jour, même si je suis certain que leur application marquera un progrès considérable.

De même, sans la loi de 1992, sans ces petits pas successifs, la loi Chevènement n'aurait pas connu un succès tel que les deux tiers de la population sont désormais au sein d'une intercommunalité à fiscalité propre.

Vous proposez de marier conseils régionaux et conseils généraux, ce n'est pas réaliste ! Pensez-vous vraiment que la dizaine de présidents de conseils généraux que comptait le gouvernement Balladur auraient accepté de fusionner avec les régions ?

M. François Fillon - Oui !

M. René Dosière - En fait, votre discours n'est pas crédible parce que vous n'avez fait adopter aucune loi de décentralisation de 1993 à 1997.

M. Patrick Ollier - Et la loi Pasqua de 1994 ?

M. René Dosière - Je vous le concède, elle comportait quelques dispositions en la matière, mais c'est bien la seule.

En revanche, depuis 1997, ce sont au moins dix textes de décentralisation que le prétendu centralisateur Lionel Jospin a fait adopter.

Je refuse donc que vous veniez ici nous donner des leçons, vraiment votre bilan devrait vous inciter à un peu d'humilité ! Ce n'est pas avec une telle attitude, qui vous prive de toute crédibilité, que vous réduirez l'écart entre l'élite et les citoyens.

Quand la gauche parle de décentralisation elle est crédible, car c'est elle qui a fait la décentralisation dans ce pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). C'est pourquoi le groupe socialiste repoussera cette motion (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Guy Teissier - Vous nous avez accusés de ne pas avoir soutenu la loi PLM de 1982. Mais rappelons pourquoi la gauche l'a votée : c'était uniquement pour gêner Jacques Chirac à la mairie de Paris (Rires sur les bancs du groupe socialiste) en instituant 20 maires d'arrondissement de plein exercice. Mais vous avez reculé devant notre opposition vigoureuse. Moi qui suis maire d'arrondissement à Marseille depuis 1983, je sais de quoi je parle. Gaston Defferre avait procédé à un tel découpage que, majoritaires en voix, nous étions minoritaires en sièges !

M. Patrick Ollier - C'est le cas aujourd'hui à Paris.

M. Guy Teissier - Ce texte dirigiste vise à corseter, uniformiser le système au mépris des spécificités. Il ne traduit ni un effort d'imagination salutaire, ni une vision prospective. Projet de conjoncture, il ne s'inscrit nullement dans la lignée des grands textes fondateurs de la décentralisation. Le groupe DL votera donc la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Marc-Philippe Daubresse - Nous pensions qu'après les municipales, vous aviez entendu le message des citoyens qui tient en trois mots : simplifier, clarifier, expérimenter. Le groupe UDF était prêt à travailler de façon positive à un texte sur la démocratie participative, de même que nous étions parvenus à un compromis acceptable en CMP sur la loi Chevènement.

Or votre projet complexifie, opacifie, enrégimente. M. Fillon en a fait la démonstration s'agissant des transferts de compétences, et le propos de M. Roman montre que vous établissez un mélange des genres entre démocratie participative et démocratie représentative. En réalité ce texte n'a pas pour objectif de traiter le fond du problème, mais de vous sortir du bourbier municipal, où vous vous êtes faits déborder sur votre gauche, et du guêpier corse. Le groupe UDF votera donc la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Gilles Carrez - M. Fillon a présenté un projet ambitieux et cohérent pour relancer la décentralisation dans le domaine des institutions, avec le jumelage des conseillers généraux et des conseillers régionaux, des transferts de compétences et des finances locales. Le Ministre et M. Roman ont répondu en évoquant le passé, et des mesures qui, il y a 30 ans, ont eu leur utilité mais qui ne répondent plus aux attentes de nos concitoyens.

Ce texte, qui manque de souffle, illustre bien le double langage permanent du Gouvernement. Vous avez eu tort, Monsieur Roman, de citer la commission Mauroy. J'en étais membre. Ce projet dirigiste, caporalisateur, qui veut unifier le pays de Dunkerque à Menton, est aux antipodes des travaux de la commission, qui voulait avant tout faire confiance aux élus. Nous y étions entrés avec un esprit constructif, nous avons dû partir.

M. Joseph Parrenin - Chirac vous a dit de partir.

M. Gilles Carrez - Pendant que nous travaillions, le Gouvernement accumulait les mesures de recentralisation, substituait les dotations d'Etat à la fiscalité locale, créait un véritable Gosplan de l'urbanisme avec la loi Gayssot. Comment aurions-nous pu rester ? Il fallait voir comment M. Mauroy était déstabilisé à mesure que le Gouvernement faisait l'inverse de ce qu'il souhaitait.

Aujourd'hui, vous essayez de jeter de la poudre aux yeux. Mais vous êtes des recentralisateurs (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) et vous ne supportez pas d'entendre un discours cohérent sur la décentralisation. Le groupe RPR votera la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. le Président - J'ouvre la discussion générale.

M. Bernard Birsinger - En abordant ce débat sur la démocratie de proximité, je pense à celui qui nous a occupés ces derniers jours sur les moyens dont disposent les comités d'entreprise pour s'opposer aux licenciements boursiers (Exclamations sur les bancs du groupe UDF).

Si les électeurs se désintéressent de la vie politique, c'est en partie en raison de la coupure entre l'économique et le politique. Si nous voulons que les citoyens participent, ils doivent pouvoir donner leur avis sur l'utilisation des crédits et des profits.

En renforçant les droits des salariés dans l'entreprise, la majorité a grandement fait progresser la démocratie en général. En revanche, le vote de la droite sur ce texte en dit long sur sa volonté de participation citoyenne.

Aujourd'hui, tout le monde parle de démocratie de proximité. Jugeons plutôt aux actes.

Ce projet traduit la volonté d'adapter la démocratie locale à notre temps. Tous défendent désormais la décentralisation de 1981. Pour lancer la deuxième étape de la décentralisation, le Premier ministre a institué une commission pluraliste présidée par Pierre Mauroy, chargée d'élaborer des propositions pour « refonder l'action publique locale ». Certaines associations d'élus locaux ont également réalisé un travail susceptible d'alimenter utilement la réflexion.

Devant le 83e congrès des maires à Paris, le 21 novembre dernier, le Premier ministre a confirmé cette volonté de rendre la décentralisation plus légitime, plus efficace, plus solidaire. Vous-même, Monsieur le ministre, déclariez le 18 janvier, au Sénat que l'approfondissement de la démocratie de proximité doit conjuguer une plus grande participation des citoyens aux décisions et l'amélioration des conditions d'exercice des mandats locaux.

Mais les bonnes intentions ne suffisent pas à rasséréner nos concitoyens. Lors des élections municipales, l'abstention massive, en particulier dans les quartiers populaires, chez les ouvriers, les employés et les jeunes, due certes à des causes multiples, a révélé la crise des partis politiques, des institutions, de l'Etat, d'une certaine forme de démocratie représentative.

Une époque se termine. Il nous faut passer à un nouvel âge de la démocratie. Désormais, les citoyens veulent peut-être moins élire des représentants que des interlocuteurs, qui leur permettent d'évaluer, de contrôler, d'avoir réellement de l'influence sur le cours des choses.

Permettre l'intervention permanente des citoyens sur les choix de gestion à tous les niveaux, voilà ce qui doit guider notre conception de la République.

De ce point de vue, le présent projet reste en deçà des attentes de tous ceux qui agissent sur le terrain pour aider à la participation des citoyens à la vie locale.

Certes, le quartier est important. Mais cantonner la participation citoyenne à ce petit territoire, et encore seulement dans les villes de plus de 50 000 habitants, c'est un peu court, d'autant que ces conseils seraient présidés par un élu et que leurs membres seraient désignés par le conseil municipal. Nous pensons quant à nous que le conseil de quartier doit être ouvert à tous, à tout moment, sur tous les sujets, et décider souverainement de son fonctionnement. Et nous ne voyons pas pourquoi il serait obligatoirement présidé par un élu.

M. Patrick Ollier - En effet.

M. Bernard Birsinger - De nombreuses villes ont mené des expériences de démocratie participative. A Bobigny par exemple, cette volonté de placer en permanence au centre des décisions l'usager et l'habitant nous a conduits à créer des lieux permanents d'intervention, de délibération et de contrôle. Ces espaces de confrontation et d'échange sont d'une richesse extraordinaire, que la loi doit préserver en même temps qu'elle doit inciter à de nouvelles expériences. Sans doute la volonté de partager le pouvoir n'est-elle pas encore généralisée mais le débat est lancé et chacun peut voir qu'il y a là un des moyens de résoudre la crise de la politique. D'ailleurs, les initiatives se multiplient. En 1998, cinquante villes réunies à Barcelone élaboraient une Charte des droits de l'homme dans la ville, ratifiée à ce jour par trente huit d'entre elles. Au Brésil, la ville de Porto Alegre, pilote en matière de budget participatif, lui consacrait un colloque en 1999. En mai 2000, un colloque rassemblant plus de quatre-vingts collectivités à Saint-Denis décidait la création d'un observatoire international de la démocratie participative. La mobilisation est, on le voit, générale. Il ne faut donc pas que la décentralisation s'arrête en route.

Dans un contexte où la politique est souvent déniée, il est vital d'encourager le désir de chacun de participer à la vie et à l'organisation de la cité. Or les dispositions relatives à la démocratie participative nous laissent un peu sur notre faim et ne nous semblent pas de nature à provoquer une dynamique de généralisation des pratiques expérimentées ici ou là. Nos remarques portent aussi sur la forme car il nous a été accordé à peine un mois pour réfléchir à un projet de 60 articles, adopté en Conseil des ministres le 23 mai dernier, et à un autre projet, intégré au premier, concernant les régions. Tout cela sans réelle concertation, hors deux séances de la commission des lois consacrées à l'audition de quelques associations. Pourquoi une telle précipitation ? Pourquoi l'urgence ?

Quand Lionel Jospin annonçait, à l'ouverture du congrès des maires de France, que les travaux de la commission Mauroy ne resteraient pas lettre morte, n'étions-nous pas en droit de penser que les mesures préconisées feraient l'objet d'un débat dans tout le pays, à l'instar du « tour de France » qui a préparé la loi SRU ? D'ailleurs, la commission Mauroy recommandait un tel débat préalable, afin « d'entendre la voix non seulement des élus locaux mais aussi de tous les acteurs de la décentralisation -associations, entreprises, universitaires, chercheurs et médias- et en définitive de tous les citoyens désirant s'exprimer ».

Pour ce qui est de la participation des habitants à la vie locale, l'essentiel du projet repose sur l'obligation faite aux villes de plus de 50 000 habitants d'avoir une politique de quartiers structurée et visible. Mais comme il n'est pas fait mention des communautés urbaines et des communautés d'agglomération, il nous a semblé que le risque était grand de voir les seules villes centres se doter de conseils de quartier tandis que les autres communes membres ne disposeraient pas d'outil pour favoriser la participation des habitants et encore moins de moyens. Cette situation choquante a amené mon groupe à déposer un amendement tendant à rendre obligatoire la création de conseils de quartier dans les villes de plus de 3 500 habitants. Il a été rejeté en commission. Nous le regrettons d'autant plus qu'en retenant le seuil de 50 000 habitants, on ne peut prétendre légiférer pour l'ensemble des administrations territoriales de la France, puisque la loi ne concernerait que 112 communes et 14 millions d'habitants ! Si on ajoute à cela la disposition retenue par la commission introduisant l'élection au suffrage universel direct des élus d'agglomérations, il apparaît clairement que le projet se trouve « taillé sur mesure » pour les établissements publics de coopération intercommunale. A ce stade se pose alors la question du rôle que conserveraient les conseils municipaux, dès lors que le structurant relève de la communauté et la proximité des conseils de quartier communautaires.

Dans ce même titre, le mode de désignation proposé pour les membres des conseils de quartier est, je l'ai déjà dit, trop rigide et assez éloigné des expériences de « démocratie directe » conduites par un certain nombre de villes depuis six ans. Aussi défendrons-nous des amendements qui posent le principe que tout habitant est, de droit, membre du conseil de quartier.

D'autre part, considérant que la démocratie ne se divise pas et ne peut se limiter à la gestion d'une enveloppe, nous proposons que le conseil de quartier puisse librement se saisir de toutes questions qu'elles soient ou non d'intérêt local. Nous nous félicitons de l'adoption par la commission d'un amendement de notre groupe qui élargit l'intervention du conseil de quartier à l'ensemble des questions touchant à la ville.

Par ailleurs, comment parler de participation si l'on exclue d'emblée, dans certains quartiers, 35 % de la population ? La réactivation de la démocratie locale ne passe-t-elle pas par le droit de vote de tous les étrangers aux élections locales ? On le sait, l'opposition bloque la proposition de loi au Sénat et cela en dit long sur sa façon de concevoir la démocratie locale.

Une autre partie du projet concerne les droits des élus au sein des conseils municipaux.

Les dispositions proposées vont dans le bon sens, même si nous pensons qu'il aurait aussi fallu saisir l'occasion qui nous était donnée de reconnaître l'existence des groupes politiques dans toutes les communes de plus de 3 500 habitants et de les doter de moyens de fonctionnement permettant à l'ensemble des élus de participer plus efficacement à la vie municipale. Cette revendication apparaît d'autant plus sérieuse que la commission des lois a adopté un amendement de notre groupe qui augmente le nombre d'élus au sein des conseils municipaux. Peut-on renforcer la place des élus sans renforcer le rôle des conseillers municipaux ?

Quant aux mesures destinées à améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux, elles constituent une réelle avancée et reprennent d'ailleurs les propositions formulées par Mme Jacqueline Fraysse en décembre dernier, au nom du groupe communiste.

L'application de la loi sur la parité a permis une rénovation démocratique qu'il nous faut poursuivre. Cela passe par la limitation du cumul des mandats et par un véritable statut de l'élu. De ce point de vue, le présent projet constitue une étape, même si la question du financement n'est pas réglée de façon tout à fait satisfaisante. Nous aurions pu mettre les employeurs à contribution. On peut aussi déplorer l'absence de dispositions concernant les retraites des élus.

Je veux dire ici l'accord du groupe communiste sur le titre IV qui renforce de façon considérable l'intervention des gens sur les grands projets d'aménagement et l'autonomie des collectivités territoriales en matière de décisions d'aménagement et d'équipement. Les pouvoirs de la Commission nationale des débats publics sont radicalement transformés de façon à lui assurer une indépendance accrue.

En conclusion, je dirais que si notre volonté commune est de renforcer la démocratie de proximité, nous devons cependant raison garder et nous donner le temps de construire ensemble une loi qui permette de traduire dans les faits ce puissant désir de démocratie.

On ne trouvera pas d'issue positive dans la précipitation ou dans la tentation de faire de ce projet un « fourre-tout » de fin de session. Nous voulons une société de partage des informations et des décisions, une ville pour tous et par tous. Pour nous, la démocratie de proximité a pour objet de rapprocher les citoyens de tous les niveaux de décision, du local au mondial, du particulier au global (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe UDF).

M. Marc-Philippe Daubresse - Les lois de circonstance n'ont jamais permis de réaliser de grandes ambitions. La démonstration en est faite encore aujourd'hui avec ce projet.

La décentralisation est une _uvre de longue haleine. Tous les gouvernements se sont essayés à l'améliorer, sans toujours y parvenir. Rappelons qu'après le référendum de 1969 sur la régionalisation, c'est Raymond Barre qui a, le premier, proposé un transfert des compétences de l'Etat aux collectivités locales. Ce projet déposé le 20 décembre 1978, qui comptait plus de 150 articles et dont l'inspiration est largement reprise dans tous les discours d'aujourd'hui, n'a pas franchi le cap du Sénat, notamment à cause du vote négatif des élus socialistes d'alors. Il a largement inspiré les lois de 1982 et 1983, de même que la loi Perben, en chantier en 1997, inspira la loi Chevènement de 1999.

Le Président de la République a prononcé à Rennes il y a quelques mois un discours fondateur pour définir les nouveaux rapports entre l'Etat et le citoyen. Le Premier ministre a confié à Pierre Mauroy la présidence d'une commission sur la décentralisation. On pouvait alors s'attendre à une nouvelle étape dans ce domaine essentiel, et le groupe UDF était prêt à y participer, comme pour la loi Chevènement. Personne en effet n'a le monopole des bonnes idées en matière de décentralisation, et chacun sait qu'il existe sur tous ces bancs des jacobins et des girondins.

Malheureusement, ce projet nous laisse sur notre faim.

D'abord pour une raison de méthode : vous faites du saucissonnage et évoquez de manière très partielle la décentralisation au milieu de dispositions à objets fort divers, en vous gardant bien de traiter le sujet fondamental qu'est la réforme fiscale des collectivités locales.

Ce texte était destiné à effacer votre échec aux élections municipales. Mais à entendre les orateurs, je me demande qui, à part le groupe socialiste, soutient le titre I... Vous ratez le coche car, comme pour les 35 heures, vous voulez imposer un modèle unique et rigide, un quadrillage des quartiers par le pouvoir politique.

Le Carrefour national des associations d'habitants et des comités de quartier, que vous avez consulté, ne s'y est pas trompé, en parlant d'« instrumentalisation des habitants » par les élus. Notre collègue Noël Mamère a pour sa part déclaré en commission que ce projet était une mauvaise réponse d'une majorité débordée par sa gauche.

De fait, et ceci explique sans doute votre échec dans la plupart des grandes villes de province, vous n'avez pas su prendre la mesure des aspirations de nos concitoyens en matière de participation aux décisions locales. Plutôt que de parler de manière inappropriée de « démocratie de proximité », vous auriez mieux fait de définir le principe d'une « démocratie participative » souple et ouverte aux expérimentations locales.

En commission, Monsieur le ministre, vous vous êtes dit prêt à assouplir les modalités de mise en place des conseils de quartier ; mais la seule modification substantielle apportée par le rapporteur, qui a refusé tous nos amendements, est le relèvement du seuil d'application de 20 000 à 50 000 habitants -comme s'il avait peur de votre projet de loi ! Le groupe UDF vous propose, au contraire, d'étendre le principe de démocratie participative à toutes les communes de plus de 3 500 ou 10 000 habitants, mais en laissant les conseils de quartier s'organiser comme ils l'entendent.

S'agissant des droits de l'opposition, nous considérons qu'il faut laisser à celle-ci la possibilité de faire des proposition à chaque séance du conseil.

Plus grave, vous ratez le rendez-vous de la décentralisation en nous proposant une loi de circonstance. Pour vous sortir du guêpier corse, vous nous aviez laissé espérer des avancées ; mais vous n'avez fait qu'introduire à la sauvette des amendements transférant quelques compétences aux régions sans transférer les moyens correspondants.

Pour notre part, nous vous proposons une démarche qui tient en trois mots : simplifier, clarifier, expérimenter. Faut-il rappeler que c'est à l'initiative de Bernard Pons et d'Anne-Marie Idrac que la première méthode intelligente de décentralisation a été pratiquée, pour le transfert de l'Etat vers les régions des transports ferroviaires régionaux de voyageurs ?

Adrien Zeller, président de la région Alsace, vient de présenter à la DATAR soixante-dix mesures concrètes de décentralisation, dont nous avons repris les principales dans nos amendements. Nous proposons d'aller plus loin dans la décentralisation de la culture, du tourisme, de l'environnement... Nous proposons même de laisser les municipalités volontaires expérimenter la décentralisation de la police.

S'agissant des SDIS, la position de la commission des finances est sage. Ou bien on crée un grand service public de sécurité civile dépendant du ministère de l'intérieur, ce qui n'est pas notre souhait ; ou bien on départementalise les SDIS et on donne au département les moyens de prendre en charge les personnels.

Enfin, après avoir entendu M. Delanoë préconiser la suppression des régimes d'exception -je veux parler de la questure de la mairie de Paris-, nous vous proposons de montrer notre volonté décentralisatrice en abrogeant les articles 2 à 50 de l'arrêté du 12 Messidor An VIII relatifs aux fonctions du préfet de police de Paris, afin de redonner au maire de Paris les pouvoirs de police de la ville.

Roger Fauroux préconise dans son récent livre Notre Etat, une politique systématique de décentralisation. Les vingt-deux régions de France viennent de faire des propositions dans le même sens, l'Association des maires de France également. Il est plus que temps que le Gouvernement de la République réponde aux attentes ainsi exprimées.

Les dispositions du projet relatives aux conditions d'exercice du mandat des élus locaux et à la réforme des procédure d'utilité publique vont dans le bon sens, mais pourraient être singulièrement améliorées. S'agissant du statut des élus locaux, pourquoi ne pas avoir repris la proposition de loi rapportée par Jean-Paul Delevoye au Sénat ?

Il est encore temps pour le Gouvernement d'assouplir sa position, de prendre en considération nos amendements et de démontrer sa volonté décentralisatrice. Le sujet mérite mieux qu'une loi en trompe-l'_il (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Georges Sarre - Ce projet est, tous les élus parisiens en conviennent, une occasion unique de modifier la loi PLM pour la rendre plus lisible et plus conforme aux attentes des habitants. Quelle que soit leur sensibilité, les élus parisiens savent qu'il faut déconcentrer dans les mairies d'arrondissement la gestion des équipements de proximité.

Il faut préserver l'unité de la capitale, et c'est pourquoi les élus du MDC ne souhaitent pas que les arrondissements aient la personnalité morale, ce qui aboutirait à une balkanisation de fait. En revanche, ils sont favorables à une large déconcentration, notamment des équipements sportifs et culturels, ainsi que de quelques services fondamentaux comme la propreté. Je suis également favorable à ce que la nouvelle loi donne une liste exhaustive des services et équipements déconcentrés, afin d'éviter tout risque de litige.

Bien entendu, il ne servirait à rien de donner des compétences de gestion aux arrondissements sans les doter à proportion en personnel et en crédits. Il convient aussi que les personnels des services déconcentrés soient placés sous l'autorité directe du maire d'arrondissement.

Enfin, il est urgent de modifier le mode de calcul de la dotation globale versée aux arrondissements en fonction de la réalité sociologique de chacun d'eux.

Le Gouvernement propose également de créer des conseils de quartier. Ces conseils renforceront la démocratie participative, mais limiteront la démocratie représentative. Comme seul le suffrage universel, à nos yeux, confère la légitimité, nous préconisons que les conseils soient élus au suffrage universel direct. Et comme, à Paris, il faut éviter la prolifération des micro-quartiers, mieux vaut s'en tenir à la division administrative actuelle de la capitale en 80 quartiers. Je prends l'exemple du quartier bien connu de Belleville, qui est situé à la fois sur le Xe, le XIe, le XIXe et le XXe arrondissement. Comment faire, pour Belleville, un conseil de quartier ?

M. Gilles de Robien - Où est le problème s'il est élu ?

M. Georges Sarre - Je suis favorable, je le répète, au maintien de 80 quartiers bien délimités, dont les membres des conseils seraient élus au suffrage universel.

Le projet qui nous est soumis n'a cependant pas pour principal objectif de modifier le statut de Paris. Il découle en fait des conclusions du rapport Mauroy sur l'avenir de la décentralisation, au c_ur de laquelle il convient de replacer le citoyen. Pour cela vous nous proposez de transférer certaines compétences aux régions, dans la suite du débat sur la Corse qui a donné lieu, ici, à bien des surenchères, et au cours duquel le Gouvernement, à nos yeux, est allé au-delà de l'acceptable.

La question de la décentralisation, on le constate, favorise la démagogie. N'écoutez pas, Monsieur le ministre, les caprices et les tentations de certains féodaux et ne vous laissez pas abuser par ces sirènes que sont les fédéralistes régionalistes. Certains amendements constituent véritablement un pas de plus dans le détricotage de l'Etat et de la République. Je pense en particulier à l'intervention des maires dans le domaine de la sécurité.

M. Gilles de Robien - C'est Vichy qui a nationalisé la police municipale !

M. Georges Sarre - Vous dites cela sans rire ?

M. Gilles de Robien - C'était en 1941. Vérifiez, et rendez-nous ce que Vichy nous a pris !

M. Georges Sarre - Quand des hommes politiques n'ont pas de grands projets, ils s'accrochent à deux mamelles : la décentralisation et l'Europe, espérant ainsi réduire l'abstention dans laquelle se cantonnent de nombreux électeurs. Les politiques suivies n'en seraient-elles pas plutôt responsables ?

M. Gilles de Robien - Vous faites de l'électoralisme !

M. Georges Sarre - Certains amendements proposés sont donc très dangereux.

Reste que la décentralisation existe, et qu'il est possible de la pousser plus loin à condition de ne jamais mettre en question l'unicité de la République, car nous irons alors vers le fédéralisme, qui est dangereux pour la France, laquelle, on le sait, est diverse. Comment peut-on oublier mille ans d'histoire en jouant avec notre organisation administrative ?

Ce projet consacre des avancées dans le domaine de la démocratie locale. La discussion et les multiples amendements, parmi lesquels j'espère que vous accueillerez favorablement les nôtres permettront, je le souhaite, de parvenir à un texte satisfaisant (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

M. Franck Dhersin - Votre projet ne restera pas dans les annales de notre histoire parlementaire, ni ne rejoindra le panthéon de nos grandes lois républicaines. Son destin est de se diluer dans les milliers de pages que contiennent déjà nos codes. Nous attendions le texte décentralisateur qui marquerait la législature Jospin. Et voici un texte creux et timoré que vous allez essayer de nous vendre comme refondateur, mais sans convaincre personne.

Ce texte « paillette » atteint tout juste le niveau de la simple circulaire ministérielle. S'il avait une telle importance ses travaux préparatoires se seraient déroulés tout autrement. Jusqu'à récemment nous ne disposions que de votre avant-projet, auquel venait s'ajouter un train de mesures sur la participation du public aux grands projets ou un autre sur la rénovation du recensement.

Le rapport Mauroy nous laissait attendre tout autre chose.

Quelques promesses nocturnes, vous ont ensuite permis de gagner du temps et de calmer des grondements qui n'épargnaient pas vos rangs.

Les premières auditions en commission ne laissèrent pas de nous étonner, notamment celle de Pierre Mauroy critiquant ouvertement votre projet. Sans véritables raisons les auditions des associations d'élus locaux ont été pour finir annulées...

L'examen du texte en commission commença au pas de charge, alors que nous n'avions toujours pas les fameux transferts de compétences promis... Vous vous êtes montré, si j'ose dire, bien cavalier avec la représentation nationale, surtout pour un ancien ministre des relations avec le Parlement !

De trois choses l'une : ou bien ce texte était essentiel, vous le prépariez à fond et son examen pouvait attendre l'automne, ou bien il n'était pas essentiel, et il pouvait également attendre l'automne, ou bien ce texte n'est ni l'un ni l'autre, et alors il n'a pas lieu d'être.

Sur le fond, signalons d'abord que, sur l'instauration d'une commission consultative des services publics, vous avez recopié à quelques détails près, des dispositions de la loi de 1992, et que le titre II relatif au statut de l'élu reprend globalement d'une proposition de la droite sénatoriale, ce dont nous nous félicitons, même si ce statut aurait mérité un texte particulier.

Faute d'étude d'impact préliminaire, je suis opposé en revanche à votre réforme du recensement.

Deux éléments essentiels caractérisent votre projet : l'extrême politisation des institutions municipales, et le volet décentralisateur.

En rendant obligatoire la constitution de conseils de quartier, vous portez atteinte à la libre administration des collectivités territoriales. Sous couvert de renforcer la démocratie de proximité, vous donnez ainsi au maire le moyen de quadriller le terrain municipal et de contrôler les associations.

Ce n'est pas la démocratie de proximité mais la soviétisation de la vie de quartier ! Elu du Nord, je sais de quoi je parle ! Cette conception n'est pas celle du groupe DL. De nombreuses municipalités ont créé des instances de quartier, sans attendre que quelqu'un de Paris le leur dise ! Marseille l'a fait il y a cent ans. Quelle est donc cette manie française de vouloir tout organiser par le haut au mépris des initiatives et des réalités locales ! Laissez donc faire la liberté ! Qui mieux que le conseil municipal élu au suffrage universel sait ce qui est bon pour ses administrés ?

Dans le même mouvement, vos amis ont adopté en commission l'élection au suffrage universel des membres des EPCI ! Ces municipalités qui se vident par le bas et par le haut nous inquiètent au plus haut point, tout comme l'opacité qu'engendre cette multiplicité d'intervenants : qui fera quoi ? En revanche, on sait bien qui paiera : les contribuables locaux ! C'est que votre conception de la démocratie de proximité est chère, et nous y sommes opposés car nous ne voulons pas d'une augmentation des impôts locaux.

J'en viens maintenant aux transferts de compétences, simple habillage de promesses nocturnes, avec un côté « il ne faut pas désespérer Billancourt » ! En vérité, il n'y a rien dans vos amendements !

Il faut dire qu'un préfet n'est pas forcément le meilleur juge en matière de décentralisation ! Confier à cet « empereur au petit pied » le soin de donner son imprimatur à des transferts de compétences est aussi absurde que si l'oiseau sciait la branche sur laquelle il est perché ! Votre texte, en fait, est très napoléonien.

Vos amendement signifient : « Vous, les régions, vous n'aurez pas le droit de tout faire mais vous aurez le droit de tout payer ! » Nous vous répondons : « Non ! ».

    Notre groupe a déposé de nombreux amendements qui reflètent notre conception de ce que doit être un vrai transfert de compétence, c'est à dire l'octroi à une collectivité du soin de déterminer dans un domaine particulier la politique qu'elle souhaite mettre en _uvre et lui en conférer les moyens L'Etat n'a pas à faire ce qui pourrait mieux être fait à l'échelon local. L'Etat n'a pas à décider que telle route doit passer par ici ou par là, qu'il faut aider ou non telle ou telle entreprise locale, qu'il faille engager telle ou telle ligne budgétaire pour l'organisation de tel ou tel festival régional, que telle ou telle université doit dispenser telle ou telle formation diplômante complémentaire ! Bref, il faut que l'Etat fasse enfin confiance à ceux qui ont été élus à tel ou tel endroit !

Parce que nous ne partageons pas votre conception de la démocratie de proximité, qui conduira à une augmentation des impôts locaux, et parce que les transferts de compétences que vous nous proposez sont parcellaires, timorés et, pour tout dire, indigents, nous ne voterons pas votre projet (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jacques Pélissard - Trois impératifs catégoriques nous doivent guider : la démocratie, la décentralisation, la participation des citoyens. Ceux-ci, hier encore désignés sous le nom d'« administrés », veulent être des citoyens à part entière, être informés et associés aux projets qui les concernent et non plus les subir.

Nous avons tous, quelle que soit la taille de nos communes, développé des procédures de concertation ou de consultation, mais il vient un moment où il faut passer à la décision, et celle-ci, pour être démocratique, ne peut être le fait que des élus du suffrage universel : c'est leur responsabilité, leur risque -politique, en tout cas- et leur honneur.

Que penser de l'obligation de créer des conseils de quartier ? Il doit s'agir, selon nous, d'une démarche souple, territorialisée, et respectueuse de la libre administration des collectivités. Il y a des villes et des quartiers où cette création se justifie, et d'autres où ce n'est pas le cas. Laissons les expériences en cours se poursuivre au lieu de plaquer, à la façon jacobine, un cadre unique sur des réalités si diverses.

Qui plus est, en confiant à un élu de la majorité municipale la présidence des conseils de quartier et en y faisant désigner à la proportionnelle les représentants du conseil municipal, vous allez politiser ces nouvelles instances en y transposant les débats partisans, au risque de susciter la désaffection des habitants ou, ce qui n'est pas incompatible, la constitution d'un contre-pouvoir sans légitimité. J'observe également que le périmètre des quartiers ne sera pas forcément pertinent, et que le lien avec la structure intercommunale n'est pas assuré.

Mais le risque majeur est celui de la parcellisation de nos villes, par le développement des égoïsmes de quartier, qui pourront s'opposer à tel ou tel équipement pourtant utile à la collectivité. La ville est un tout, ne laissons pas son tissu social se défaire.

L'article 9, qui prévoit la création de missions d'information, est intéressant, mais le processus de déclenchement est timoré : dans ma ville, par exemple, l'opposition municipale, malgré le soutien qu'est venu lui apporter le ministre à la veille des élections, compte moins du cinquième des membres du conseil. Il faudrait abaisser le seuil au sixième de l'effectif.

Enfin, la séance annuelle réservée aux projets de l'opposition ouvrira la porte à toute la démagogie : n'oublions pas qu'il n'y a pas d'article 40 dans notre législation communale !

Je souhaite que nous travaillions ensemble pour améliorer ce texte, pour le rendre plus réaliste et plus respectueux des libertés communales, sans lesquelles il n'est pas de démocratie participative (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. René Dosière - En 1982, Gaston Defferre a mis le train de la décentralisation sur ses rails. Il a commencé, bien entendu, par la locomotive, en l'occurrence la loi sur les droits et libertés des collectivités locales, puis il a ajouté quelques wagons ; à votre tour, Monsieur le ministre, vous en ajoutez un autre, qui concerne plus directement le citoyen, mais vous en profitez pour « retaper » au passage les wagons antérieurs, qu'il s'agisse des conditions d'exercice des mandats locaux ou du transfert des compétences.

Ce train de réformes s'est enrichi depuis quatre ans : fonctionnement et mode d'élection des conseils régionaux, limitation -inachevée, hélas- du cumul des mandats, parité -une belle réussite, puisque les femmes représentent désormais 48 % des conseillers municipaux dans les communes de plus de 3 500 habitants-, loi sur l'intercommunalité et la taxe professionnelle unique, sans oublier le statut original et novateur de la Nouvelle-Calédonie et la loi d'orientation de l'outre-mer. Ainsi, ce Premier ministre dont l'opposition de droite met en cause la volonté décentralisatrice aura, en quatre ans, fait voter au moins dix textes concernant la décentralisation quand ses deux prédécesseurs en ont fait voter un seul, sur la même durée. Les faits parlent d'eux-mêmes...

A vrai dire, ce train de la décentralisation, qui n'avait guère de voyageurs au départ, a vu sa composition modifiée : les élus de droite sont de plus en plus nombreux à l'emprunter, n'hésitant pas, le cas échéant, à tenter de pousser dehors ses occupants d'origine, voire de leur dénier le droit de le fréquenter. Je sais bien que, selon l'Evangile, les derniers seront les premiers, mais dans ce que Péguy appelait l'ordre politique il en va différemment. Si je me réjouis, avec mes amis socialistes, d'accueillir de nouveaux décentralisateurs, je n'accepte pas leurs leçons.

Il est vrai que, dans le domaine des finances locales, le remplacement de recettes fiscales par des dotations d'Etat n'est pas satisfaisant, mais l'argumentation de la droite serait plus crédible si elle était moins récente, alors que le phénomène est ancien et que nous sommes peu nombreux à l'avoir stigmatisé dès l'origine. Rappellerai-je, en outre, que la révision des valeurs locatives était prête au printemps 1993, lorsqu'une majorité de droite est arrivée dans l'hémicycle, que les simulations avaient été publiées fin 1992, mais que vous n'avez cessé d'en repousser l'application, qui aurait pourtant mis fin à de nombreuses injustices ?

M. Marc-Philippe Daubresse - Vous auriez pu le faire après 1997 !

M. René Dosière - Aujourd'hui, hélas, ce texte est devenu obsolète. A défaut d'actes concrets en faveur de la décentralisation, vous êtes prodigues en écrits et en paroles.

Les dispositions du projet peuvent être regroupées sous quatre rubriques principales.

En ce qui concerne la place du citoyen dans la démocratie locale, les premiers jalons ont été posés dans la loi de 1992, mais un nouveau pas est franchi aujourd'hui, avec la création de conseils de quartier dans les villes de plus de 50 000 habitants, l'extension aux ressortissants non communautaires du droit de vote aux consultations locales - improprement appelés « référendums locaux », car il ne s'agit pas d'un processus décisionnel -, ou les pouvoirs nouveaux accordés aux conseils d'arrondissement des trois plus grandes villes de France, entre autres dispositions. Sans doute certaines communes n'avaient-elles pas attendu pour mettre en _uvre des pratiques analogues, mais leurs élus devraient se réjouir de voir leur exemple suivi.

La démocratie au quotidien, c'est également la possibilité, pour les élus minoritaires, de remplir convenablement leur mandat. A ceux qui considèrent, y compris à gauche, que c'est faire la part belle aux oppositions que de leur ouvrir largement les colonnes des revues municipales ou d'inscrire une fois l'an leurs propositions à l'ordre du jour, je réponds que la qualité d'une démocratie se juge à la place qu'elle réserve aux minorités. Là encore, les véritables démocrates n'hésiteront pas à aller plus loin ; en tout cas, le texte ne le leur interdit pas.

S'agissant des conditions mêmes d'exercice des mandats locaux, le débat avait été admirablement posé, dès la loi de 1884, par ces deux opinions opposées. Pour le rapporteur d'alors, M. de Marcère, c'eût été « dénaturer le caractère des fonctions municipales que de rétribuer... les services désintéressés des notables qui sollicitent et qui reçoivent l'honneur de donner une part de leur temps et de leur activité à la cité. » A cela, Tony Révillon, auteur d'un amendement, rejeté, tendant à l'indemnisation des élus municipaux, répondait : « Les fonctions municipales sont à la fois un honneur et un devoir pour les citoyens. Or, paie-t-on l'accomplissement d'un devoir ? Encore faut-il qu'on puisse le remplir, ce devoir ! Encore faut-il le mériter, cet honneur ! Si, le jour où vous dites à l'élu au conseil municipal : "Il y a séance aujourd'hui", il est forcé d'être aux champs ou à l'atelier pour gagner sa vie et celle des siens, il ne pourra siéger au conseil municipal, et le droit que vous lui donnez, le devoir que vous lui imposez, ressembleront à une ironie. »

Il a fallu attendre le wagon décentralisateur de 1992 pour sortir des ambiguïtés passées et pour construire le socle d'un statut de l'élu local. Avec les dispositions du titre II, voilà le wagon rénové et le socle élargi, puisque les indemnités des adjoints sont revalorisées après que celles des maires l'ont été par la loi du 5 avril 2000, la couverture sociale et les remboursements de frais améliorés. En outre, l'extension du crédit d'heures et diverses mesures permettront aux actifs de mieux concilier activités professionnelle et politiques. Saluons aussi la création d'une allocation différentielle de fin de mandat. La proportion des retraités parmi les élus locaux a doublé en vingt ans. Il faut donc permettre aux actifs, en particulier à ceux du secteur privé, de s'investir dans la vie locale.

M. Jean-Antoine Leonetti - C'est vrai !

M. René Dosière - C'est désormais possible, tout en évitant la professionnalisation des fonctions politiques locales. Pour parer au risque de coupure entre les élus et les citoyens, le mieux est de concilier vie professionnelle et vie politique le plus souvent possible.

Depuis 1993, ces indemnités sont soumises à l'impôt sur le revenu. Mais le Gouvernement de l'époque n'avait pas souhaité s'enrichir et il avait créé une dotation nouvelle, dite « élu local » réservée aux petites communes pauvres afin de leur permettre de faire face aux charges de la hausse des rémunérations. La nouvelle augmentation, sensible, des indemnités devrait donc s'accompagner, dans la prochaine loi de finances, d'une hausse équivalente de la dotation d'élu local. Partagez-vous ce point de vue, Monsieur le ministre ?

Ce texte porte aussi sur les compétences des collectivités locales, départementales et régionales. Pour les départements, il s'agit de clarifier le fonctionnement de SDIS afin d'éviter les dérives financières consécutives à la loi de 1996. Le conseil général, qui prendra le nom de conseil départemental, pèsera d'un poids plus important. Les régions bénéficieront de compétences nouvelles en matière économique et dans les secteurs des transports, de l'environnement et de la formation professionnelle. Mais ces transferts sont limités. Pourtant, le transfert aux collectivités rend la gestion plus efficace et plus économe, on l'a vu avec le secteur social et avec la construction des établissements scolaires.

C'est bien pourquoi la modernisation de notre pays exige davantage de décentralisation. Vous souhaitez aller plus loin ultérieurement. Mais si les Français ignoraient il y a vingt ans ce qu'était la décentralisation, aujourd'hui ils l'ont appréciée et leurs attentes sont fortes. C'est pourquoi les socialistes ne peuvent rester les anciens combattants de la décentralisation. Ils doivent accentuer les transferts de compétences. Les domaines ne manquent pas : construction des universités, gestion des établissements scolaires, logement, santé, etc.

Quatrième aspect du texte : la participation du public aux grands projets d'aménagement. On ne peut que se féliciter que l'on rompe avec les attitudes technocratiques pour favoriser une large information et une certaine participation des habitants. C'est d'autant plus nécessaire que l'on constate un recul de l'intérêt général au profit de comportements de type corporatiste et conservateur, qui se cachent parfois derrière la défense de l'environnement.

M. Patrice Martin-Lalande - C'est vrai !

M. René Dosière - C'est pourquoi j'ai proposé par un amendement, qu'après le débat public, lorsque l'implantation d'un grand équipement est proposée -le troisième aéroport international par exemple- les populations concernées sont consultées sous la seule forme valable en démocratie : le vote.

M. Jean-Antoine Leonetti - Très bien !

M. René Dosière - Ainsi connaîtra-t-on véritablement l'avis de la population, autrement qu'avec des manifestations ou des pétitions qui sont souvent le prétexte à des agitations minoritaires.

M. Patrice Martin-Lalande - C'est vrai !

M. René Dosière - Pour éviter toute manipulation électorale, je suggère qu'il ne soit pas procédé au dépouillement du vote si la participation électorale n'atteint pas 50%.

Cet amendement a été adopté à l'unanimité par la commission des lois, où siégeaient des représentants de chaque groupe. Je souhaite que ce vote soit confirmé dans l'hémicycle.

Tel est donc le contenu de ce texte, beaucoup plus riche et plus dense que l'opposition ne le dit. Mais la messe est dite : une nouvelle fois, elle votera contre. Cela dit, quand on entend les louanges qu'elle adresse aujourd'hui aux textes de décentralisation qu'elle avait jadis repoussés, on se dit que le groupe socialiste a bien raison de voter ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bernard Outin - Je centrerai mon propos sur les dispositions relatives aux SDIS, qui reprennent les propositions formulées par notre collègue Jacques Fleury dans son rapport relatif à la mise en _uvre de la loi du 3 mai 1996.

Il est en effet urgent de résoudre quelques-uns des problèmes de fonctionnement et de financement de ces services. La loi de 1996 se caractérise par la départementalisation mais aussi par l'absence de toute évaluation de ses conséquences financières.

Or on peut craindre, une fois encore, que les correctifs aient été insuffisamment étudiés car la sécurité de nos concitoyens exige des moyens et une organisation conformes à la société d'aujourd'hui.

Dans tous les départements, le financement du SDIS est assuré par les participations des conseils généraux et des communes ou de leurs groupements dans des proportions diverses qui tiennent à l'histoire et aux choix opérés dans les départements. Donner au conseil général la majorité des sièges au conseil d'administration suppose que l'on adapte la participation financière en conséquence. Plus généralement, nous sommes favorables à tout ce qui va vers une péréquation qui tienne compte de la population, du potentiel fiscal, du niveau de protection. Mais cette recherche d'une meilleure répartition entre collectivités doit s'accompagner de la recherche d'autres ressources. Il serait normal que l'Etat participe mais aussi, comme nous l'avions proposé il y a deux ans, les compagnies d'assurance auxquelles profite la réduction du coût des sinistres que permet l'amélioration des services de secours et d'incendie. Et cette proposition vaut quel que soit le mode de financement retenu.

Un point mérite éclaircissement : actuellement le SDIS est dirigé par un directeur départemental, qui est en général un colonel et qui dépend du président du SDIS pour la gestion et l'administration du service, et du préfet pour la mise en _uvre opérationnelle. Or un amendement adopté en commission vise à créer un poste de directeur général des services pour la gestion financière et administrative, qui serait sans doute occupé par un civil. Il conviendra donc d'être très vigilant sur le fonctionnement de cette direction bicéphale.

Si au moins ce texte est l'occasion de faire le bilan de l'application de la départementalisation et de ses conséquences financières, nous aurons fait _uvre utile (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe UDF).

M. Gilles de Robien - Après les excellentes interventions de mes collègues de l'opposition, mais aussi de M. Birsinger, je centrerai mon propos sur la démocratie locale.

Pourquoi donc légiférer en la matière ? Grâce aux chartes d'autonomie, les communes ont acquis depuis des centaines d'années un degré d'autonomie qui permet à leurs élus, grâce à la légitimité que confère le suffrage universel, d'organiser elles-mêmes la vie quotidienne et le dialogue avec les citoyens. Et si ces derniers ne sont pas d'accord, ils ne manquent pas d'occasions de le faire savoir, plus particulièrement tous les six ans.

M. Patrick Ollier - Très bien !

M. Gilles de Robien - Bien sûr, la loi organise le mode d'élection, le financement, elle fixe le nombre des conseillers municipaux, mais il n'y a nulle raison que le fonctionnement du dialogue local soit fixé par le législateur, sa légitimité n'étant pas plus forte, en la matière, que celle des élus locaux, fondée sur les chartes communales, dans le respect de l'autonomie et de la fidélité.

C'est pourquoi je serais enclin, Monsieur le ministre, à vous demander de retirer votre texte (Sourires).

Qu'est-ce que cette démocratie de proximité dont vous nous parlez ? Y en aurait-il une autre ? Utiliser un tel pléonasme relève de la communication, et de ces effets d'annonce dont le Gouvernement s'est fait une spécialité depuis quelques années en donnant à ses projets de loi des intitulés auxquels leur contenu ne correspond pas, mais qui suscitent des attentes dans la population : c'est la loi de solidarité et de renouvellement urbain, alors que les conditions de vie se dégradent dans les quartiers, la loi de modernisation sociale, qui est en fait un frein à l'embauche, la loi de lutte contre les exclusions assortie d'une diminution des moyens des associations d'insertion comme du nombre de CEC et de CES...

De même, cette loi sur la démocratie de proximité réduit en fait les espaces de démocratie. C'est un texte liberticide. Sous un titre pompeux il regroupe des mesures disparates, comme celles concernant les pompiers, sans même régler le problème de leur retraite comme le proposait M. Landrain.

Trois mesures illustrent en particulier la régression démocratique à laquelle il conduit.

La première est l'institution d'une séance annuelle du conseil municipal réservée à l'examen des propositions de l'opposition. En effet, à la différence du Parlement, le conseil municipal pratique, à chaque réunion, le dialogue sur tous les aspects de sa politique. Vous limitez en fait le droit d'expression de l'opposition. Que deviendront alors le débat d'orientations budgétaires ou les questions orales que l'on peut poser à la fin de chaque séance ?

En second lieu, la saisine du conseil municipal pour instituer une mission d'information, avec droit de tirage annuel, est un véritable gadget, qui sera inapplicable en raison du mode de scrutin institué par la loi de 1983. J'ai interrogé trois maires UDF. Tous m'ont dit que dans leur commune l'opposition ne pourrait pas créer de mission faute de réunir 20 % des élus. Vous créez donc un droit virtuel, surtout pour des oppositions morcelées.

Enfin vos conseils de quartier sont une véritable caricature de démocratie locale. D'abord je suis réservé lorsque l'Etat impose des contraintes à la commune. S'il y a des réformes démocratiques à faire, c'est plutôt, à l'inverse, en s'inspirant des initiatives locales qui foisonnent dans chacune de nos communes.

M. Jean-Antoine Leonetti - Très bien.

M. Gilles de Robien - Si cette disposition était adoptée en l'état, ce serait une mise sous tutelle de la citoyenneté. Placer une association de quartier qui veut organiser le dialogue avec l'exécutif local sous la tutelle de celui-ci aboutirait à quadriller la ville et à étouffer l'aspiration citoyenne au profit du pouvoir en place. D'ailleurs, vous ne proposez pas un tel dispositif dans le cadre de l'intercommunalité. Une équipe municipale se doit non de présider les débats de quartier, mais de susciter les vocations citoyennes. Ce texte s'inspire bien du rapport de M. Mauroy, qui avait repris l'organisation de quartier dirigiste de sa propre ville, que les citoyens ne peuvent plus accepter. La véritable démocratie consiste à organiser des contre-pouvoirs indépendants qui sauront interpeller les responsables en place.

Par sa rigidité centralisatrice, ce texte paralysera notre pays. Philippe le Bel l'a instituée, les rois l'ont perpétuée, la Révolution l'a perfectionnée, vous la pratiquez à votre tour en voulant imposer par la loi ce qu'il revient au peuple de s'approprier et en confisquant la liberté associative -quel paradoxe en cette année du centenaire de la loi de 1901 ! Nous devons protéger nos libertés communales. « La commune est la seule association qui soit si bien dans la nature que partout où il y a des hommes réunis, il se forme une commune. Elle met la liberté à portée du peuple ; elle lui en fait goûter l'usage possible et l'habitue à s'en servir » disait un grand libéral, Alexis de Tocqueville. Nous vous demandons de le respecter (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Jean Rigal - Vingt ans après les lois Mauroy et Defferre, le Gouvernement nous propose d'engager la première phase d'une nouvelle étape de la décentralisation en approfondissant la démocratie locale et en instaurant la démocratie participative.

La décentralisation a profondément modifié notre pays en donnant aux élus des libertés nouvelles et en rapprochant les décisions des citoyens. Elle a pu aussi être détournée à des fins partisanes ou personnelles par certains élus, qui nous ramenaient à la féodalité. C'est pourquoi l'Etat, garant de l'intérêt général, doit pleinement jouer son rôle.

Ce projet, dans la lignée des travaux de la commission Mauroy et du débat d'orientations de janvier dernier, complète utilement l'_uvre réalisée depuis 1997 avec les lois sur l'aménagement durable du territoire, la coopération intercommunale, la limitation du cumul des mandats et la parité, même si ces deux derniers sujets restent à approfondir.

On peut regretter que le Gouvernement ne propose que par voie d'amendement de nouveaux transferts de compétences aux régions en ce qui concerne l'aide directe aux entreprises, l'enseignement supérieur, la formation professionnelle ou l'environnement. Ces questions auraient mérité un débat plus approfondi.

Je consacrerai surtout mon intervention au titre III qui traite du financement des services départementaux d'incendie et de secours, qui me tient particulièrement à c_ur. La charge de ce financement provoque de nombreuses difficultés dans les rapports entre les communes et leurs groupements et les départements. Il existe d'ailleurs des disparités criantes, voire scandaleuses entre les départements, certains conseils généraux, dont celui de mon département, se déchargeant au maximum sur les communes et leurs EPCI. En instituant la départementalisation des services d'incendie et de secours, la loi Pasqua de mai 1996 visait à homogénéiser le matériel et les installations, à harmoniser le statut des sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires et à mutualiser les financements. Nous en sommes loin ! La commission des finances a longuement débattu du sujet et a adopté plusieurs amendements dont l'un visant à plafonner l'évolution des contributions en fonction de leur taux de croissance et non de leur montant. Mais je regrette que le projet ne prévoit rien en ce qui concerne la répartition de ce qui existe actuellement, au terme du délai de cinq ans pour transférer les personnels et les biens. En commission des finances, de nombreux collègues se sont montrés résolus à faire avancer les choses. Il est temps de le faire et il n'est pas certain qu'une autre occasion se présente rapidement.

Globalement, ce texte comporte des avancées significatives pour la démocratie. Les radicaux de gauche ont à son égard un a priori favorable, mais souhaitent qu'il soit enrichi. Il semble que vous y soyez prêt. Nous serons attentifs au dialogue qui va se dérouler.

M. Claude Goasguen - Je souhaite évoquer un sujet particulier, qui n'a pas suscité jusqu'ici beaucoup d'interventions : l'article 13, qui concerne Paris, c'est-à-dire la préhistoire de la démocratie. Car si l'on en est à la démocratie de proximité pour le reste de la France, on se contenterait à Paris des premiers balbutiements de celle-ci. Or, le débat à propos de Paris s'engage mal car il n'y a rien dans le projet qui s'y rapporte, mis à part la suppression de la questure, et le fait de passer du contrôle de la Cour des comptes à celui de la chambre régionale des comptes. Cependant, en écoutant M. Sarre, j'ai eu le sentiment que lui savait quelque chose sur les amendements à venir.

Nous sommes quant à nous dans l'expectative. On nous a expliqué lundi, au Conseil de Paris, qu'un grand débat d'orientation était nécessaire. Mais depuis, nous courons après les amendements. Nous ne les avons pas vus au Conseil de Paris, non plus qu'en commission et, à cette heure, toujours pas ! J'entends bien qu'une réforme du statut de Paris, Lyon et Marseille est un sujet mineur mais j'aurais tout de même aimé savoir ce qui se prépare. Peut-être découvrirons-nous demain ces fameux amendements.

Quoi qu'il en soit, la méthode est inadmissible.

Et pourquoi sommes-nous appelés à discuter en catimini de la loi PLM ? Parce que le parti socialiste découvre que cette loi socialiste ...

M. le Ministre - C'est une loi de la République !

M. Claude Goasguen - ...n'est pas très bonne et n'a pas de réelle vocation décentralisatrice. Elle est en outre si peu claire qu'elle a entraîné une multiplication des contrôles de légalité, des recours administratifs et du contentieux. J'ajoute qu'elle n'est pas appliquée de la même façon à Paris, Lyon et Marseille. Bref, les socialistes découvrent ses défauts au bout de vingt ans. Nous, libéraux et centristes, l'avons quant à nous toujours combattue. Et nous avons en tout cas essayé de l'appliquer dans l'esprit le plus décentralisateur possible.

Il ne faut pas oublier que la première loi décentralisatrice concernant Paris date de 1975 : il s'agissait alors de faire passer le principe de l'élection au suffrage universel du maire de Paris. On ne peut pas dire que la gauche ait soutenu ce principe avec ferveur (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Pour ma part, je n'ai jamais été favorable à un statut spécial pour Paris et ne le suis pas davantage aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, si vous voulez réformer le statut de Paris, il faudra réformer la loi PLM. Et à mon sens aller dans les trois directions suivantes. D'abord normaliser le statut de la police parisienne. Cet arrêté de Messidor, qui témoigne de la fascination de la gauche pour la période consulaire, il faudra tôt ou tard l'abroger. Ensuite, inventer une nouvelle coopération intercommunale à Paris, étant entendu que beaucoup de sujets intéressent pareillement la capitale et des communes environnantes. Enfin, accroître les responsabilités des arrondissements. Nous serons à vos côtés pour ce faire et j'ai moi-même déposé plusieurs amendements à ce sujet.

M. René Dosière - On ne les a pas encore vus !

M. Claude Goasguen - Lisez-les et surtout ne vous privez pas de les voter ! Après tout, il n'est pas interdit de chercher des majorités d'idées, cela s'est déjà fait ici.

S'agissant des arrondissements, Monsieur le ministre, je voudrais que l'on n'oublie pas le référendum d'intérêt local. Vous parlez beaucoup des conseils de quartier mais vous semblez négliger cette forme de participation directe des citoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. Michel Vauzelle - Hier, nous débattions de l'Europe et aujourd'hui, grâce aux amendements du Gouvernement, nous allons parler des régions. Cette proximité des deux thèmes dans le calendrier de nos travaux, illustre l'urgence qu'il y a pour les Français de mener à bien une réflexion sur la répartition des compétences entre l'Union européenne, la France et les régions.

Avec le Premier ministre et sa proposition de Fédération d'Etats nations, nous devons refuser l'Europe des régions et la dissolution de la nation et de la République, une et indivisible, tant dans une Europe fédéraliste que dans une France fédérale. Pour autant, chacun ressent bien la nécessité d'une seconde étape de la décentralisation, aussi forte que le fut la première en 1982, conquête obtenue par la gauche dans un combat mené pied à pied contre la droite. Aussi croit-on rêver quand on entend celle-ci donner des leçons de décentralisation.

Aujourd'hui, vingt ans après, les Français souhaitent une forte extension de la décentralisation et, expressément, du domaine de compétence des régions. Ils voient en ces dernières, dans cette époque de mondialisation, des communautés bien adaptées à la défense de leurs libertés et de leur identité culturelle, en même temps que des espaces pertinents pour aménager ces nouveaux territoires que sont les pays et les agglomérations.

J'ai eu déjà plusieurs fois l'occasion d'appeler l'attention du Gouvernement sur cette « soif de région », cette soif de démocratie de proximité, et j'ai préconisé une régionalisation à la carte, c'est-à-dire tout simplement un droit à l'expérimentation qui fasse de la loi sur la Corse non pas un texte d'exception mais une loi révélatrice de l'avenir de toutes nos régions.

Nombre d'entre elles présentent des caractères -identité culturelle, position géographique, population, superficie, économie, densité universitaire...- qui les rendent d'ores et déjà capables d'exercer de nouvelles compétences, ou plutôt des blocs de compétence tels que « vie économique », « jeunesse », « environnement », « formation ». Je pense aussi qu'il faudrait que les présidents de régions soient désormais élus au suffrage universel et que le Premier ministre les réunisse régulièrement, comme cela se pratique avec succès en Italie.

Il faut en tout cas répondre à cette attente de nos concitoyens concernant les régions par un grand projet ambitieux, qui suppose l'ajout d'un mot et d'un seul dans l'article 72 de la Constitution et surtout un engagement ferme de l'Etat au sujet des moyens financiers requis par l'exercice des blocs de compétence. Il importe en effet d'éviter de recréer la situation financière insupportable où se trouvent en ce moment nos régions face aux charges dont la SNCF se débarrasse pour se consacrer à la noblesse -dont nous nous félicitons au demeurant- du TGV.

Compte tenu de l'ampleur de la réforme souhaitable, on pouvait sans doute espérer autre chose que les amendements qui nous sont aujourd'hui proposés. Et la démarche aurait sans doute pu être plus lisible. Mais le geste que fait aujourd'hui le Gouvernement est important et conforme à l'esprit qui a inspiré les négociations relatives aux contrats de plan ainsi qu'à celui du débat qui a eu lieu ici-même en janvier, à l'initiative du Premier ministre.

Nous vous remercions donc, Monsieur le ministre, pour ce que vous offrez aux régions aujourd'hui. Ces offres sont bonnes à prendre dans la perspective de l'action que la gauche doit conduire contre la fracture régionale, comme elle a su le faire dans les années 1982 et 1983 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gilles Carrez - Comme tous mes collègues de l'opposition, j'ai participé aux travaux de la commission Mauroy avec assiduité et dans un esprit constructif, jusqu'à ce que nous soyons obligés de la quitter, en septembre dernier, étant donné le double langage du Gouvernement qui mettait mal à l'aise le président Mauroy lui-même.

Pendant plusieurs mois, dans un climat plutôt consensuel, la commission a réfléchi à la meilleure manière de relancer la décentralisation. Mais dans le même temps, le Gouvernement n'a eu de cesse de recentraliser, de reconcentrer, d'enrégimenter. Une recentralisation financière massive a été opérée en remplaçant des impôts locaux par des dotations d'Etat. Tout y est passé, jusqu'à la vignette. Le Président du Sénat lui-même a été obligé de déposer une proposition de loi constitutionnelle pour stopper cette dérive et sauvegarder le principe de libre administration des collectivités locales. De même, la loi Gayssot sur la solidarité et le renouvellement urbains a organisé un véritable Gosplan de l'urbanisme et dépouillé certaines villes de leurs ressources fiscales sans la moindre concertation. Enfin, la recentralisation de l'aide sociale est opérée à travers la CMU et l'allocation personnalisée d'autonomie.

Ce gouvernement est profondément recentralisateur, sauf pour la Corse mais là, c'est la prime à la violence... Il tente de dissimuler son esprit jacobin derrière des pétitions de principe et des projets de loi trompeurs comme celui-ci, qui n'est nullement inspiré par la commission Mauroy.

Les maires n'ont pas attendu ce projet pour favoriser la participation des habitants. Mais c'est la diversité et le foisonnement des associations, conseils et comités de quartiers qui font leur force. Or vous voulez organiser l'uniformisation et la caporalisation sous la houlette de maires-adjoints commis d'office. Laissez donc vivre les maires et les élus locaux, ne leur donnez pas de leçons depuis Paris !

S'agissant des droits des élus au sein des assemblées locales, évitez d'accumuler les obligations législatives aussi démagogiques qu'inopérantes. La loi du 6 février 1992 a trouvé un bon équilibre concernant les droits des minorités.

M. René Dosière - A l'époque, on nous reprochait de légiférer !

M. Gilles Carrez - Preuve du caractère superficiel de votre démarche, vous êtes muets sur l'intercommunalité, dans laquelle les droits des minorités sont trop souvent bafoués. Est-il normal que dans la communauté d'agglomération constituée de Créteil, Alfortville et Limeil-Brevannes, trois députés-maires socialistes n'aient pas réservé une seule place à l'opposition ? La communauté d'agglomération voisine que je préside a, elle, offert une large place à l'opposition de gauche.

S'agissant de la démocratisation des mandats locaux, les mesures que vous proposez sont bonnes, mais il faut aller plus loin, afin de permettre aux salariés du secteur privé et aux membres des professions indépendantes de s'engager dans la vie publique.

Concernant le titre IV, j'appelle votre attention sur une préoccupation qui a été constamment exprimée au sein de la commission Mauroy, la sécurisation juridique des actes des collectivités locales. Elle est totalement absente de votre projet : vous construisez des usines à gaz, sources de contestation et de contentieux multiples ; ne vous étonnez pas si demain le juge administratif se transforme en véritable acteur de l'urbanisme et de l'aménagement !

S'agissant des opérations de recensement, nous sommes d'accord pour qu'on prenne en compte chaque année l'évolution de la population ; mais alors, que l'Etat fasse de même dans le calcul de ses dotations !

Enfin, je voudrais dire notre déception concernant les amendements relatifs aux nouveaux transferts de compétences aux régions, qui relèvent vraiment de l'homéopathie. Pourquoi refusez-vous de transférer une partie de la TIPP aux régions, comme pour la Corse  

Les socialistes ont contribué à la décentralisation, je le reconnais ; mais aujourd'hui ils sont à bout de souffle. Leurs récents échecs aux élections locales ne les incitent pas à l'audace. C'est l'opposition qui aujourd'hui est porteuse d'une relance de la décentralisation. Pour donner un peu de contenu à votre texte, Monsieur le ministre, vous feriez bien de puiser quelques idées dans l'intervention de notre collègue François Fillon ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Noël Mamère - Ce projet de loi représente une nouvelle étape de la démocratie participative, mais il ne répond que trop partiellement aux attentes formulées clairement et régulièrement par la population, notamment à l'occasion des dernières élections municipales.

Pire encore, certaines propositions sont en retrait par rapport aux pratiques expérimentées dans quelques-unes de nos villes.

La précipitation et le manque d'ambition sont les principaux défauts qui marquent ce projet fourre-tout, qui traite à la fois de la participation des citoyens et de la décentralisation. On pouvait espérer que le débat à l'Assemblée nationale serait précédé d'un débat public avec les citoyens, et je crains que la réforme ne soit un peu bâclée.

Alors que le taux d'abstention augmente de manière préoccupante, que le fossé se creuse entre citoyens et élus, le Gouvernement se contente d'un projet de loi a minima. Nous aurions besoin d'une refondation en profondeur de la vie politique, d'une Sixième République.

A quand le droit de vote pour tous les résidents étrangers -qui figurait parmi les 101 propositions du candidat François Mitterrand en 1981 ?

Comment expliquer que la création de conseils de quartier ne soit obligatoire que dans les villes de plus de 50 000 habitants ?

Comment comprendre que ces conseils de quartier s'organisent sans concertation avec les habitants ? L'un de nos amendements dit que ces conseils doivent être composés majoritairement d'habitants. En effet, ils ne doivent en aucun cas servir de courroies de transmission, d'assemblées de notables ou de réseaux de quadrillage d'une cité par quelques élus.

Un mot sur le recensement : je me demande en quoi il est concerné par la démocratie de proximité. En outre, certaines formulations risqueraient de favoriser des pratiques malhonnêtes.

Pour démocratiser notre vie publique, nous devons lutter contre le cumul des mandats, et donc doter les élus d'un véritable statut.

M. le Président - Votre temps de parole est écoulé !

M. Noël Mamère - Laissez-moi seulement souligner que ce projet apporte néanmoins de nombreux progrès, notamment concernant la démocratisation de l'intercommunalité. Les Verts souhaitent que notre Assemblée adopte l'amendement de la commission qui prévoit enfin l'élection au suffrage universel direct des conseils d'agglomération.

En référence à la convention d'Aarhus, les Verts souhaitent que l'environnement constitue un élément incontournable de la démocratie participative. Nous notons avec satisfaction les moyens et les objectifs donnés à la Commission nationale du débat public.

Vous comprendrez que je ne puisse terminer sans évoquer le projet de liaison à grand gabarit entre Toulouse et Bordeaux pour le transport de l'Airbus A380. Les Verts et les associations demandent, au nom du principe de cohérence, que s'instaure un débat public sur ce projet.

La Commission nationale du débat public a été saisie. Elle a rendu une réponse négative. On se demande bien à quoi elle sert !

M. Léonce Deprez - Votre projet, reconnaissons-le, apporte sur certains points les réponses que nous attendions. Nous apprécions que les élus puissent désormais exercer leur mandat sans être pénalisés comme ils l'étaient dans leur vie professionnelle ou familiale en raison du temps passé au service de leurs concitoyens. Nous ne sommes plus en 1930, ni même en 1960, et les citoyens sont de plus en plus égaux devant les obligations de la vie.

Nous avons aussi obtenu satisfaction au sujet des fonctions déléguées par le maire à ses adjoints et, sur des points très précis, à certains conseillers municipaux.

Les conditions d'exercice des mandats locaux devront être de mieux en mieux définies, selon le v_u exprimé par l'association des maires, en particulier avec l'accès à une retraite décente.

En revanche, ce projet est très en deçà des attentes des Français et de nombreux élus. MM. Huchon et Vauzelle, qui sont proches de vous, se sont exprimés dans ce sens dans Le Monde du 8 juin.

Nous souhaitions un projet marquant une volonté de clarification des compétences entre l'Etat et les différentes collectivités locales. Nous sommes donc quelque peu désappointés. Ce texte devrait plutôt s'intituler « projet pour le renforcement de la démocratie participative ». Celle-ci existe déjà, sous l'impulsion du maire et du conseil municipal dont c'est la vocation de la faire vivre dans chaque quartier. Rigidifier dans des textes l'organisation de cette démocratie sur la base de quartiers n'a pas paru souhaitable puisque, après débat en commission, elle a été abandonnée pour les villes de 20 000 habitants, et réservée à celles de 50 000 habitants. Vous nous avez entendus : tant mieux ! Aucun texte ne peut remplacer l'enthousiasme du maire, son don communicatif de contact humain, pour assurer la cohésion de sa commune et la vitalisation des quartiers. Laissez vivre les élus, laissez-les faire ! S'ils ne font pas ce qu'ils doivent, ils ne sont pas réélus ; c'est le bon sens même !

Je le dis à M. Dosière, ce n'est pas la démocratie locale qui est malade ; elle ne souffre que du retard pris par l'Etat à décentraliser les responsabilités et les ressources comme le requiert la nouvelle organisation territoriale de la République. M. Balligand le confirmerait.

Plutôt qu'un texte pour améliorer les relations entre les citoyens et leurs élus, mieux valait un projet pour améliorer la répartition des responsabilités et des ressources entre l'Etat et les collectivités locales. Il est difficile de faire admettre une loi de plus alors que celles que nous votons ne font pas toujours la preuve de leur efficacité. L'intercommunalité, que nous avons tous ici défendue...

M. Jean-Pierre Baeumler - Vous n'avez pas voté la loi de 1992 !

M. Léonce Deprez - Ne revenez pas toujours sur le passé ! Personnellement, j'ai été pendant vingt ans président d'un SIVOM dans l'espoir qu'il devienne une communauté de communes, et je suis redevenu président d'une communauté de communes !

La loi sur l'intercommunalité est en train de décevoir des élus de tous bords, parce que les recettes ont diminué de 20 %, ce qui fait mauvais effet. Et lorsqu'on leur annonce une nouvelle loi sur la démocratie de proximité, ils nous demandent de commencer par bien appliquer la loi sur l'intercommunalité.

Enfin, il faut départementaliser les centres de secours et en confier la responsabilité aux conseils généraux (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Jacques Fleury - Je traiterai essentiellement du titre III.

En effet j'avais été chargé d'établir un rapport sur l'application de la loi de 1996, qui était largement contestée par de nombreux élus locaux. La difficulté ne venait pas principalement de l'augmentation des dépenses des services de secours, car le poids qu'elles font supporter aux Français est nettement inférieur à ce qu'il est chez nos voisins, en raison de l'énorme potentiel humain de nos sapeurs-pompiers volontaires.

Ce qui m'avait choqué le plus, c'est que la composition des conseils d'administration des SDIS était très opaque : à côté de conseillers généraux élus au suffrage universel direct siégeaient des représentants des maires et des élus au troisième ou quatrième degré. Ce sont ces gens qui décidaient du montant de la contribution due par les communes et les EPCI. C'est pourquoi je souhaitais dans mon rapport que la gestion des SDIS soit confiée à une assemblée composée d'élus au suffrage universel direct, possédant la légitimité pour voter l'impôt. La proposition du rapporteur de confier cette responsabilité aux conseils généraux ne me choque donc pas. A défaut, j'avais proposé de geler les dépenses à la charge des communes et des EPCI, et de faire supporter toutes les dépenses nouvelles par les conseils généraux, ce qui justifiait que les conseillers généraux soient majoritaires dans les conseils d'administration des SDIS.

Je ne suis donc pas d'accord avec la proposition du Gouvernement et de la commission des finances de laisser une partie de l'augmentation à la charge des communes.

M. Franck Dhersin - Nous sommes d'accord !

M. Jacques Fleury - Je souhaite donc que l'on retienne mon amendement sur ce point, ainsi qu'un autre tendant à rendre plus équitable la répartition de la charge entre les communes.

La commission propose de créer un directeur général. Je n'avais pas retenu cette idée lorsque j'élaborais mon rapport, parce qu'elle est impopulaire, coûteuse et inutile. Le problème tient à la coexistence du président du SDIS avec un colonel ou un directeur généralement en place depuis longtemps. Si on organise la mobilité professionnelle de ce colonel et si le conseil général détient la majorité au conseil d'administration, le président du SDIS possédera un poids bien supérieur face au directeur, et le problème sera réglé. Je voterai donc contre la création d'un directeur général. Pour le reste, je sais que le Gouvernement prépare un autre texte sur les services de secours (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Patrick Ollier - Vous avez couvert d'un titre prometteur un texte sans réelle portée. Où est l'ambition participative, où est l'audace ? Rendre obligatoire ce qui existe déjà est insuffisant quand on aspire à la démocratie locale.

Ce texte est technocratique dans son inspiration, socialiste dans sa présentation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) : les effets d'annonce ne s'accompagnent pas des moyens qui rendraient le dispositif efficace.

Prenons l'exemple des conseils de quartier : les faire présider par des élus, c'est mélanger démocratie participative et démocratie représentative. Le jeune maire d'une grande ville du centre de la France m'a fait remarquer que cela l'obligerait, au passage, à supprimer plusieurs des conseils existants, faute d'adjoints en assez grand nombre pour les présider (« Très juste ! » sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). L'uniformisation n'est pas une démarche appropriée, et je souhaite que nous trouvions ici les moyens d'éviter l'instrumentalisation de la démocratie participative. Quant à la séance annuelle réservée à un ordre du jour fixé par l'opposition municipale, l'incitation à la surenchère et à la démagogie qui s'ensuivra créera, la médiatisation aidant, les conditions légales du conflit politique permanent.

Je proposerai, pour ma part, d'instituer des référendums consultatifs de quartier, ainsi que des conseils municipaux consultatifs, représentant les forces vives de la cité, et des conseils consultatifs des résidents communautaires, qui permettraient de mieux intégrer à la vie municipale ceux qui ne sont pas encore inscrits sur les listes.

M. Bernard Birsinger - Et les résidents non communautaires ?

M. Patrick Ollier - Ce n'est pas mon propos. M. Mamère en a parlé tout à l'heure.

S'agissant du statut de l'élu, les critiques sévères adressées au texte par MM. Brunhes et Derosier en commission me dispenseront d'être prolixe : je ne saurais aller aussi loin dans la remontrance. Où est la grande réforme, tant attendue, de la décentralisation ? Nous n'avons vu que quelques amendements sans réelle portée, et de modestes transferts de charges, non accompagnés des transferts de recettes correspondants. A cela, le Gouvernement et la majorité répondent généralement que nous n'avons rien fait quand nous étions au pouvoir (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste). Mis à part le fait que cette façon de regarder toujours en arrière est quelque peu lassante, je voudrais vous rafraîchir la mémoire en rappelant la loi Pons sur les chemins de fer régionaux et la loi Pasqua de 1994 sur l'aménagement du territoire, dont j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur.

M. le Ministre - Elle n'a pas été appliquée ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Patrick Ollier - Parce que, depuis quatre ans que vous êtes au pouvoir, vous n'avez jamais pris les décrets d'application, de sorte que les pays attendent toujours d'avoir une existence légale !

Votre projet a le goût de l'inachevé. Il y a tromperie sur la marchandise. C'est une déception pour tous ceux qui croient à la démocratie locale et veulent engager un vrai débat sur la décentralisation. C'est une occasion manquée, et nous le regrettons (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Mme Danièle Bousquet - Ce projet de loi est une étape importante dans la reconnaissance de la démocratie participative, qui permet de mieux répondre aux attentes des citoyens et de les impliquer davantage dans la vie locale. Cette participation citoyenne est déjà répandue dans notre pays, et nous nous en félicitons, car elle est au c_ur de notre engagement.

Nouvelle étape de la décentralisation, ce projet donne au citoyen le droit d'être informé, d'être consulté, de s'exprimer, de négocier. Les conseils de quartier sont des lieux de parole, de protestation et, surtout, de proposition, où seront confrontés les intérêts et les opinions de tous, pour préparer la décision collective qui sera prise dans l'intérêt général. Accessible à tous, l'information rendra plus lisible et plus transparente l'action publique.

Si les problèmes de voisinage doivent être traités, bien entendu, au sein des conseils de quartier, le quartier doit être également appréhendé en liaison avec la commune, avec l'agglomération, avec le monde extérieur. Nous souhaitons concilier la légitimité des pouvoirs publics élus au suffrage universel et l'aspiration nouvelle des citoyens à participer, à la place qui leur revient, à la vie publique locale. C'est pourquoi les conseils de quartier comprendront à la fois des élus et des représentants des habitants et des associations. Mais les citoyens sauront-ils ne pas penser la ville comme une simple addition de quartiers, et ne pas bâtir des projets sur le seul court terme ? Les expériences dont j'ai connaissance me rendent confiante.

Il convient, au reste, de veiller à la préservation des réussites locales. Le projet reconnaît et légitime des pratiques déjà existantes ; il faut éviter qu'il ne les freine ou les musèle, car il ne saurait y avoir de modèle unique. Le cadre proposé est suffisamment large, et c'est heureux. Les communes concernées auront l'obligation de créer des conseils de quartier et de les doter de moyens, mais il leur appartiendra de choisir comment faire en sorte que ces structures soient un véritable lieu d'échanges, de dialogue et de concertation.

L'histoire nous enseigne que le mot démocratie n'a pas toujours recouvert une réalité idéale. Dans l'Athènes antique elle-même, les étrangers et les femmes n'avaient pas la qualité de citoyens. Faisons donc mieux que la démocratie athénienne, et favorisons la participation de tous, sans exception, à la vie de la cité, ce qui signifie qu'il faut aussi donner la parole à ceux qui ne l'ont jamais, ou qui ne l'ont que rarement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La suite de la discussion est renvoyée à cet après-midi, jeudi 14 juin, à 15 heures.

Prochaine séance ce matin à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ERRATA

au compte rendu analytique de la 3ème séance du mardi 12 juin 2001.

- à la page 28, 17ème ligne, lire :

M. le Rapporteur - L'amendement 11 supprime une disposition introduite par le Sénat. En effet les ratios d'emprise doivent faire partie des règles prudentielles...

- à la page 37, lire :

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ARTICLE 18 BIS

M. le Secrétaire d'Etat au patrimoine - L'amendement 59 tend à supprimer cet article. Les obligations de couverture du territoire sont fixées par les cahiers des charges qui s'imposent aux opérateurs de téléphonie mobile. Il semble donc difficile de permettre la diffusion d'appareils de brouillage des fréquences utilisées par les téléphones mobiles. Cet article n'apporte pas de réponse satisfaisante au réel problème des nuisances que crée l'utilisation abusive des téléphones portables. La solution ne peut résider que dans l'évolution des comportements individuels vers plus de civisme. Pour les salles de cinéma, il existe des solutions techniques fondées sur le principe de la cage de Faraday, sans qu'il soit nécessaire de recourir au brouillage.

L'amendement 59, repoussé par la commission, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 18 bis, mis aux voix, est adopté.

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ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 14 JUIN 2001

A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Discussion de la proposition de loi (n° 3074) de M. Jean-Marc AYRAULT et plusieurs de ses collègues relative à l'autorité parentale.

M. Marc DOLEZ, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 3117)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 3089) relatif à la démocratie de proximité.

M. Bernard DEROSIER, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 3113)

M. Augustin BONREPAUX, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Avis n° 3112.)

M. Pierre COHEN, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges. (Avis n° 3105)

A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

        www.assemblee-nationale.fr


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