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Session ordinaire de 2001-2002 - 23ème jour de séance, 56ème séance

3ème SÉANCE DU VENDREDI 9 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

Sommaire

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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COMMUNICATION

M. le Président - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de la culture et de la communication concernant la communication.

M. Didier Mathus, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Le projet de budget de la communication pour 2002 confirme le redressement opéré depuis 1998.

Orientées sur de nouveaux enjeux, les ressources sont consolidées, tant en matière d'audiovisuel que d'aides à la presse. Atteignant 21,26 milliards, le budget augmente de 3,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001 et la part de financement public représente 76,7 % du budget total de l'audiovisuel. Parallèlement, les ressources propres des organismes enregistrent une légère progression du fait de la restriction des volumes publicitaires pour les chaînes publiques. Ainsi, depuis 1998, les ressources publiques de France Télévision ont augmenté de plus de 31 % et les exonérations de redevance lui ont été intégralement remboursées pour la première fois cette année. En 2002, la part de financement public du groupe atteindra 77 % de son budget total. Cette situation de ses recettes dans le cadre d'un budget rééquilibré lui procure une plus grande liberté de programmation, la contrainte publicitaire s'en trouvant sensiblement desserrée. Désormais, toutes les sociétés du groupe sont assises sur un financement public majoritaire, ce qui n'était pas le cas de France 2 depuis 1996. Cette évolution répond à l'engagement pris par le Gouvernement lors de la présentation du projet de loi sur l'audiovisuel de donner un nouvel élan au service public en renforçant son indépendance. En outre, l'évolution statutaire a donné au groupe une meilleure assise, grâce aux regroupements opérés et à l'allongement du mandat des présidents. Parallèlement, le contrat d'objectifs et de moyens qui sera conclu dans les prochains jours précisera les engagements respectifs de l'Etat et de la télévision publique. Cet effort tout particulier des pouvoirs publics pour soutenir le secteur public tranche avec l'action menée dans la période 1993-1997 durant laquelle les ressources publiques de France 2 avaient diminué de 60 %.

J'en viens au numérique hertzien en rappelant d'emblée que 75 % de nos compatriotes ne reçoivent à l'heure actuelle que les cinq chaînes hertziennes. La rareté de l'offre est du reste une caractéristique marquante du paysage audiovisuel français. Sans doute faut-il y voir une séquelle de la privatisation de TF 1, la France se distinguant par une situation quasi unique au monde où un opérateur privé concentre plus de 30 % de l'audience et, de fait, plus de la moitié des recettes publicitaires. Dans ce contexte, le numérique apportera une bouffée d'oxygène appréciable : la fin de la rareté annonce le début de la modernité ! La multiplication des éditeurs - dans des conditions économiquement viables - participe de la démocratie et constitue un véritable encouragement à la création.

Bien entendu, les responsables des réseaux hertziens n'ont pas manqué de s'élever contre ces évolutions et les prises de position des dirigeants de TF 1 et de M 6 sont à cet égard édifiantes : seule la volonté de défendre les avantages acquis les motive ! Or, en l'espèce, leurs intérêts propres sont contraires à l'intérêt général car le développement de la télévision numérique de terre TNT ne vise pas à créer un nouveau media concurrent de l'offre payante existante mais à proposer de nouvelles chaînes, garantes d'un pluralisme enrichi. J'observe en outre que contrairement à ce qui est souvent prétendu, le bouquet numérique anglais a rencontré un véritable succès populaire.

Le passage au numérique est inéluctable : il n'y a donc pas lieu de s'interroger sur son opportunité mais de faire en sorte qu'il intervienne rapidement et dans les meilleures conditions possibles. Quant aux obstacles techniques parfois évoqués, ils ne résistent pas à l'analyse des experts. L'adaptation des antennes collectives ne nécessitera une intervention que dans 48 % des cas et son coût moyen est estimé à 160 F par appartement, soit moins que le prix d'une antenne intérieure !

Pour les antennes individuelles, des interventions seront nécessaires dans 32 % des cas. Les chiffrages résultant de diverses simulations prévoient des coûts compris entre 1 000 et 2 500 francs. Le coût moyen sera donc comparable à celui qu'on a connu quand ARTE a été diffusée sur le réseau hertzien, ou quand M6 est apparue. Il n'y a pas là d'obstacle réel à la diffusion du numérique.

Rappelons-le d'autre part, la télévision numérique terrestre, c'est une offre de programmes élargie et renouvelée, avec une majorité de programmes gratuits - parce que nous l'avons voulu - et une forte interactivité. Ce n'est donc pas le satellite du pauvre : c'est une autre façon de faire et de regarder la télévision.

Dans cette dynamique la télévision publique doit avoir un rôle moteur ; c'est indispensable face à l'immobilisme des opérateurs privés. Ce l'est aussi parce que, face aux opérateurs issus de conglomérats du BTP, de l'eau, du téléphone et de la communication, les chaînes publiques doivent être cet espace civique de liberté et d'indépendance face à la pression des intérêts marchands dont toutes les démocraties ont besoin. La télévision publique est donc une chance pour le numérique, comme celui-ci en est une pour elle. C'est une occasion à saisir pour France Télévision. Certes la modernisation des méthodes de travail et la mise en commun des ressources appellent une mutation des mentalités et le passage, dans chaque chaîne, du réflexe d'autonomie à un esprit de groupe ; mais c'est la seule chance de développement équilibré du groupe. C'est l'occasion pour France Télévision de rompre avec les rigidités héritées de l'âge bureaucratique de la télévision.

Vous connaissez le projet numérique de France Télévision, fondé sur une dynamique de synergies, et qui sera acté dans le contrat d'objectifs et de moyens. Le projet comporte la création d'une chaîne d'information en continu, d'un réseau de huit chaînes régionales, assis sur les capacités de FR3, et d'une chaîne de rediffusion à dominante familiale et culturelle, filiale de France Télévision à 51 % et d'ARTE à 49 %. Tout cela dans un cadre rénové et régulé, pour organiser les relations entre l'Etat actionnaire et sa télévision publique : l'Etat doit savoir ce qu'il attend de sa télévision et pourquoi il met de l'argent sur la table. C'est ce que nous avons vu avec les contrats d'objectifs et de moyens, qui sont à la veille d'être signés. C'est une façon nouvelle d'organiser ces relations, que nous avons souvent réclamée, parce que nous avons vécu un certain flou dans les relations entre l'Etat et sa télévision publique. Elles sont désormais clarifiées, et c'est France Télévision qui sera l'élément moteur de cette dynamique, qui sera pour elle l'occasion de se moderniser.

Un mot enfin sur ce qui se construit, toujours au sein de la télévision publique, avec la Cinquième Éducation. J'ai souvent rappelé l'indispensable dimension éducative de la télévision. A l'heure où se constituent, à travers de grands groupes, les réseaux du e-learning, il est indispensable que les services publics - éducation nationale et audiovisuel public - trouvent la capacité de dépasser des rivalités ancestrales et réfléchissent à la réponse de la collectivité à ce défi. Ce qui se construit autour de la Cinquième Éducation est donc très positif. J'espère que nous aurons bientôt une vraie capacité de développer une télévision à dimension éducative.

Ce projet de budget est excellent, et la commission vous appelle à le voter. Tous nos collègues, en commission, ont convenu qu'il n'appelait pas de critiques particulières. Au regard de la baisse drastique des moyens de l'audiovisuel public qu'avait opérée la majorité précédente, quand on constate aujourd'hui la consolidation de ses moyens et la clarification de ses missions, il n'y a pas à hésiter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Marie Le Guen, rapporteur spécial de la commission des finances - En commission des finances, comme dans celles des affaires culturelles, chacun a constaté que ce budget était bon. C'est celui de la consolidation, tant pour l'audiovisuel public que pour les aides à la presse. Mais c'est aussi celui de la modernisation. Je m'attacherai à deux aspects, la télévision numérique terrestre, mais aussi la distribution de la presse, point sur lequel il semble que le travail parlementaire depuis quelques jours ait eu une certaine utilité.

Sur l'audiovisuel public, quelques chiffres, pour situer les enjeux. Aujourd'hui son budget s'élève à 3,24 milliards d'euros, soit 21,3 milliards de francs. Ce qui représente une hausse de 3,2 % par rapport à 2001, hausse dans laquelle les ressources publiques progressent de 3,4 %. Ce qui porte la part du financement public à 76,8 % : on peut bien parler de consolidation. L'effort entrepris depuis plus de deux ans, en vue à la fois d'accroître les ressources de ce secteur mais aussi de les asseoir sur la ressource publique, est confirmé. Cela n'a été possible que grâce à ce qui a été obtenu en matière de redevance : nous portons celle-ci à 2,06 milliards d'euros, soit 13,5 milliards de francs, ce qui représente une hausse de 4,3 %. Cette prévision intègre un effet base dû à un meilleur encaissement, qui sera de 3,42 % l'an prochain - plus important donc que l'effet taux qui n'est que de 1,8 %. La redevance a fait l'objet d'un débat ces dernières années. Nous n'oublions pas que dans ce domaine le ministère des finances n'a pas toujours joué la transparence, et il subsiste des interrogations fortes sur le coût réel de la redevance, sans doute plus élevé qu'on ne l'a laissé croire au Parlement. Il y a aussi des interrogations sur la justice sociale dans le prélèvement de cet impôt. Mais il y a également une prise de conscience accrue de la nécessité, pour l'audiovisuel public, d'une ressource pérenne, unique et bien identifiée. Il faut tenir ensemble des éléments qui paraissent contradictoires ; mais au total, même si la question de son assiette reste posée, l'idée même de redevance semble sortir raffermie des débats de ces dernières années.

Examinons maintenant les moyens alloués à l'audiovisuel public. Le budget de France Télévision s'élève à 2,126 milliards d'euros, presque 14 milliards de francs, en hausse de 3,1 % par rapport à 2001. La ressource publique s'accroît. ARTE dispose de 185 millions d'euros, incluant 1,85 million d'euros de ressources propres, en hausse de 3,4 %. Avec 220 millions d'euros, RFO voit progresser de 4 % son budget, qui comporte 23 % de ressources propres ; là aussi nous devrons être vigilants. Quant à RFI, avec 123 millions d'euros, son budget progresse de 4,8 %. J'appelle toutefois l'attention de l'Assemblée sur le renouvellement des services offerts par RFI, que traduit cette progression ; la situation de la chaîne appelle un effort particulier, et nous devrons réfléchir, peut-être en loi de finances rectificative, à la nécessité de lui donner les moyens de son développement. Il en va de même de l'INA, premier organisme à avoir signé une convention d'objectifs et de moyens : il connaît un renouveau remarquable, et nous devons avoir à c_ur de conforter cette dynamique.

Au-delà des chiffres, c'est aujourd'hui, comme l'a dit M. Mathus, le problème de la télévision numérique terrestre qui est posé. Il est au c_ur de la réflexion de France Télévision. Je souhaite entendre sur tous les bancs de cette assemblée une prise de position précise à ce sujet. La majorité s'est clairement engagée en faveur de la télévision numérique terrestre, et soutient l'idée de donner à France Télévision les moyens d'avancer dans cette direction. Mais nous nous rappelons qu'il y a quelques années, lors des débats sur la loi audiovisuel, certains collègues, notamment de l'opposition, avaient vivement sollicité notre intérêt en faveur de la TNT. Quel est aujourd'hui leur point de vue ? Et quelles conséquences en tirent-ils quant au financement du service public ? Pour ma part je crois possible d'opérer ce développement en le conciliant avec le réalisme économique.

J'en viens aux aides à la presse.

Comme vous le savez, l'Etat soutient substantiellement la presse, en particulier quotidienne, par des aides directes et indirectes.

Les premières, qui s'élèvent à près de 40 millions d'euros, 255 millions de francs exactement demeurent au même niveau qu'en 2001, alors même que le plan social pour la presse parisienne est venu à échéance, ce qui prouve l'importance de l'effort accompli. L'aide au transport de la presse par la SNCF atteint 90 millions, le développement du portage bénéficie de 50 millions, l'aide aux quotidiens de province à faibles ressources de petites annonces représente environ 10 millions. Ces mesures disparates sont un héritage de l'histoire, et il conviendrait de réfléchir à une modernisation d'ensemble. Les aides indirectes sont constituées par l'allégement des taux de TVA, l'aide au transport de La Poste, qui s'est amélioré ; le régime spécial des provisions pour investissement figurent à l'article 39 bis, que nous avons rétabli en commission. S'y ajoute le Fonds de modernisation de la presse quotidienne, créé en 1998, qui s'élève à 90 millions. Souhaitons que le ministère des finances continue à améliorer le recouvrement de la taxe de 1 % alimentant ce fonds, dont l'existence répond à un besoin amplifié depuis le 11 septembre. On sait en effet ce qu'il est advenu des recettes publicitaires.

L'article 38 proposé par le Gouvernement tend à abonder le Fonds de modernisation par une subvention budgétaire et à pouvoir le mobiliser pour aider à la distribution des quotidiens.

La commission des finances, tout en reconnaissant l'intérêt de la démarche du Gouvernement, s'est interrogée sur les conditions de la mise en _uvre de cette aide, et sur la participation des éditeurs, des NMPP et de l'opérateur qui les dirige. Sur ces différents points vous allez, je le sais, pouvoir nous répondre.

Sur ce budget cohérent, qui s'en tient, en ces temps difficiles, à des priorités solides, nous allons avoir, je le pense, un débat qui éclairera le public... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Président - Nous en arrivons à la discussion générale.

M. Pierre-Christophe Baguet - Si l'on regarde votre budget avec les yeux du passé, il apparaît essoufflé, avec une hausse de 3,2 % seulement contre 6,1 % l'an dernier. Si on le regarde avec les yeux du présent, il paraît convenable eu égard à l'inflation, voire pédagogique face aux bons résultats de France 2.

En revanche, si on le regarde avec les yeux de l'avenir, il est lourd d'inquiétudes que l'on retrouve exprimées par les deux rapporteurs.

Je commencerai par m'élever contre l'incohérence du calendrier. En effet la loi du 1er août 2000 tendait à l'élaboration de contrats d'objectifs et de moyens. Or, nous examinons le budget de la communication le 9 novembre alors que le contrat de France-Télévision sera présenté le 14. Comme le Gouvernement possède la maîtrise de notre ordre du jour, et qu'il est lié de près à France-Télévision, vous auriez pu intervenir pour décaler de quelques jours notre discussion. Même si le Figaro est là pour nous informer, cette situation est regrettable.

Pour les aides à la presse, nous arrivons cette année à la fin d'un cycle, et nous regrettons de ne pas disposer d'un bilan. Les nouvelles vont s'appuyer pour l'essentiel sur la taxe de 1 % sur le hors media. Son inspirateur, qui en attendait 400 millions lors de sa création en 1998, reconnaît que son produit ne dépassera pas 200 millions l'an prochain.

Nous veillerons à ce que cette insuffisance de recettes ne porte pas préjudice à la presse.

J'appelle l'attention sur l'application de la loi relative à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, qui a introduit de nouvelles dispositions sur le travail de nuit. Les personnes travaillant de nuit cumulent un repos compensatoire et une compensation financière. Or, dans la presse où le travail de nuit a toujours existé, les compensations financières sont elles aussi anciennes.

Appliquer la loi telle quelle augmenterait les coûts de 15 %. Mme Guigou, alertée, n'a pas répondu. Que comptez-vous faire ?

De façon plus générale, M. Mathus a souligné la difficulté grandissante à lire le dispositif d'aide à la presse.

S'agissant de la redevance, M. Le Guen, l'an dernier, réclamait une enquête et même des sanctions contre les services de Bercy, qui avaient si longtemps dissimulé les coûts de la collecte, estimés à 480 millions, plus 486 millions de coûts indirects. Qu'en est-il aujourd'hui ? Sur le recouvrement et son coût, j'ai déposé deux amendements pour relancer le débat.

De plus, compte tenu de l'exonération étendue aux personnels de 65 ans, je m'interroge sur le montant des crédits inscrits au chapitre 46-01 du fascicule des services généraux du Premier ministre : 414 millions d'euros pour 2001, 409 pour 2002. Il y a là une incohérence ! Enfin, que veut dire M. Mathus lorsqu'il écrit dans son rapport que si le Parlement pousse trop à l'augmentation de la compensation, cela va conduire l'Etat à regarder favorablement les partisans de la disparition de la redevance ? Est-ce un procédé tactique pour annoncer la privatisation de France 2 souhaitée par M. Fabius, ou est-ce le suicide programmé de la TNT ? En effet il explique lui-même dans son rapport que la TNT devra être financée par une hausse annuelle des ressources de la redevance à hauteur de 3,5 % pendant cinq ans. Ceux qui continueront à acquitter la redevance ont de quoi s'inquiéter : bonjour la hausse pour les survivants !

Dans le secteur de la télévision analogique, le coût de la RTT fait apparaître de nettes différences entre les trois chaînes de France-Télévision, ce qui ne va pas dans le sens souhaité du renforcement de l'esprit de groupe. Et les explications données par le rapporteur sur France 3 sont inquiétantes. Je les partage. Les conséquences sur les huit télévisions numériques régionales risquent d'être bien lourdes !

J'en viens à la TNT. Compte tenu de l'importance du sujet, il eût été préférable, au lieu de travailler seule, de nous associer à vos réflexions. Bien des débats excessifs et inadaptés auraient été évités. La TNT ne pourra pas se développer dans le conflit. Par exemple, vous avez reproché au président du CSA, M. Baudis, de vous avoir imposé un calendrier irréaliste. Il a accepté de le différer. Et c'est vous qui à présent êtes en retard dans la publication des décrets.

Vous savez aussi que la TNT ne pourra pas se développer contre le secteur privé, en ne s'appuyant que sur l'audiovisuel public. J'ai demandé au président de la commission des affaires culturelles d'organiser un débat. Etes-vous prête à y participer ?

Un projet tel que la TNT ne pourra pas réussir sans coûts supplémentaires pour l'Etat, les contribuables et les utilisateurs. Didier Mathus indique par exemple qu'une antenne adaptée coûtera environ 160 F par appartement et 1 600 F pour une maison individuelle. Les dépenses pour passer à la télévision numérique, au total, seront énormes. On n'accède pas sans risque à trente nouvelles chaînes. Etes-vous assurée que l'Etat transférera sur la TNT une partie de son effort ? Sinon, il restera à trouver pour un milliard de publicité, afin de financer les neuf nouvelles chaînes !

En ce qui concerne le service public, vous avez annoncé dix nouvelles chaînes, puis sept, et aujourd'hui, trois seulement. Tout cela fait un peu désordre, d'autant qu'un rapporteur estime le coût à 2,1 milliards et l'autre l'évalue à 3,8 milliards. Que n'avons-nous débattu du sujet après la signature du contrat d'objectifs de France-Télévision ?

S'agissant du financement, un rapporteur se montre prudent quant au respect de la pluriannualité budgétaire, tandis que l'autre appelle à l'autofinancement en espérant que s'imposera une logique d'entreprise... que nous avions sollicitée en vain lors de l'examen de la loi d'août 2000.

D'autre part, qu'en est-il du versement du milliard annoncé ? Un rapporteur a suggéré que 500 millions pourraient être versés dès janvier mais Le Figaro ne fait état que de 300 millions, versés au deuxième semestre de 2002... comme par hasard. On m'a dit que ce milliard se trouvait pour l'instant sur le compte d'affectation spécial recueillant les produits de cessions, mais je n'en vois pas trace dans le bleu !

Enfin, comment ne pas s'interroger sur le choix que vous avez fait de créer huit chaînes régionales lorsque le découpage actuel de France 3 est en treize régions. Quant à la décision de faire de France 4 une chaîne culturelle, est-elle bien compatible avec l'existence d'Arte ? Et les familles auront-elles la chaîne qu'on leur a fait espérer ?

Compte tenu de toutes ces questions et de ces inquiétudes, nous ne pouvons que voter contre ce budget, en attendant le débat et les éclaircissements que nous vous avons demandés (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Michel Françaix - Ce budget est un bon budget, comme d'ailleurs l'opposition l'a sportivement reconnu en commission, quitte maintenant à se livrer à quelques effets de manche inévitables (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL).

C'est un bon budget parce qu'il croît, parce que la ressource publique progresse fortement pour représenter 76 % des crédits, parce que les exonérations de redevance ont été intégralement compensées et que la presse écrite n'est plus le parent pauvre de la communication.

Pour autant, des questions angoissantes restent pendantes : ainsi pour M. Le Lay qui, à propos du numérique hertzien, a parlé d'approche marxiste de la télévision ! Le propos a de quoi nous rajeunir et si c'est le seul argument qu'on a à opposer à une avancée formidable, pour défendre le modèle dominant, eh bien, soyons marxistes s'il le faut !

La multiplication des chaînes, l'amélioration de la qualité de l'offre vont ouvrir de nouveaux espaces de liberté : qui peut trouver à y redire ?

Est-ce le bon moment ? L'an passé, Madame la ministre, on vous reprochait de tarder, aujourd'hui, on vous reproche d'être trop en avance (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL) : je pense donc que le moment est bon.

Mais avez-vous tout prévu ? Savez-vous exactement combien il y aura de télévisions gratuites et de payantes, de télévisions locales, de nouvelles chaînes ? Evidemment non, vous ne le pouvez, en raison de l'existence du CSA et de notre refus d'une télévision tenue en bride par le Gouvernement !

Les trente chaînes nouvelles vont-elles toutes être des succès ? Je comprends que les partisans du marché s'inquiètent à l'idée que certaines pourraient ne pas très bien marcher, qu'il pourrait y avoir des concentrations limitées, mais n'est-ce pas normal ? Ce n'est en tout cas pas en arguant en faveur de l'immobilisme !

La société a changé et le champ culturel prend une extension croissante. La question se pose de plus en plus de l'utilisation du temps libre, au profit du divertissement ou de l'accomplissement personnel. Réconcilier industrie et culture, prendre la mesure de l'internationalisation, lutter contre l'hégémonie américaine, prendre en compte les nouvelles technologies, favoriser les télévisions locales et la diffusion des _uvres ne sont pas des tâches simples et faciles. Nous avons en outre à faire comprendre que la puissance publique ne peut assumer que pour une part le coût de la création.

La télévision, aussi, a changé, qu'il s'agisse de la conception des émissions, de l'écriture ou du rapport avec le téléspectateur. Hier plus ouvert sur le monde il est plus porté aujourd'hui sur le relationnel, entretenant avec les animateurs des rapports affectifs au point de retenir leurs noms plutôt que celui des magazines. Hier, la télévision était une fenêtre ; aujourd'hui, les caméras s'arrêtent au mur du jardin et c'est un miroir, quand ce n'est pas un judas pour épier le voisin, s'effrayer de ses peurs ou se consoler avec ses malheurs !

Tel est le cadre dans lequel nous avons à préparer l'avenir. Nous pouvons avoir de grands débats sur le service public, sur la qualité des programmes, et laisser libre cours à une cascade verbale intarissable, constituant ainsi un sujet transactionnel. Mais ce ne sera pas agir.

Le service public pose des questions difficiles, c'est l'évidence, et nous ne pouvons nous contenter de répéter qu'il est indispensable, que le financement mixte redevance-publicité est sain en lui-même. Nous devons aussi nous interroger sur la dépendance des chaînes publiques à l'égard des recettes publicitaires et ne pas nous borner à reprocher aux dirigeants des chaînes publiques de rechercher l'audience.

Comment ouvrir le marché de l'audiovisuel en cassant les oligopoles et en améliorant le rapport des forces entre diffuseurs et producteurs ? Comment favoriser l'émergence du numérique hertzien, le développement du câble, du satellite, d'Internet et des TNT ? Tels sont les termes renouvelés du débat.

Comment, d'autre part, remédier au sous-financement chronique de notre audiovisuel ? Il faut s'atteler à la tâche pour lui garantir des recettes sûres, pérennes et en expansion rapide. Nous avons fait un petit pas, mais nous sommes bien conscients que la tâche est encore longue.

Comment mieux gérer les entreprises publiques, les débureaucratiser pour les rendre plus rentables et créatives ? La loi d'août 2000 a apporté un certain nombre de réponses et nous sommes sur la bonne voie.

Comment mieux défendre notre audiovisuel face à la mondialisation et aux concentrations ? Pouvons-nous et devons-nous nous opposer à la constitution de grands groupes transnationaux de la communication, ou soutenir les groupes français qui sont parties prenantes de ce mouvement ?

Tous ces débats sont d'actualité, et nous les avons ouverts !

S'agissant des télévisions locales, nous avons indéniablement pris un retard certain, mais nous pouvons nous appuyer sur l'appétit que manifestent les Français à cet égard. L'obstacle est avant tout d'ordre financier et je suggérerai donc de nous orienter vers deux statuts juridiques distincts : l'un pour les télévisions commerciales, qui seraient autorisées à diffuser des moyens publicitaires pour les secteurs aujourd'hui interdits ; l'autre pour les les délibérations associatives, dotées d'un fonds d'aide comparable à celui dont bénéficiait déjà les radios associatives.

La télévision locale n'est pas une fausse bonne idée : elle contribuera à faire entrer dans le débat médiatique de nouveaux acteurs et peuvent susciter de nouvelles formes de créativité, de nouveaux liens sociaux, voire favoriser une insolence de l'esprit tranchant avec le modèle dominant la télévision.

La télévision est un enjeu de civilisation et un enjeu d'indépendance nationale, tant l'hégémonie de l'hyperpuissance américaine est forte dans le domaine culturel. En effet, sans avoir jamais lu Gramsci, les dirigeants américains ont compris que la domination culturelle conforte la domination économique et politique. L'essor de la demande culturelle dans notre pays ne doit pas profiter exclusivement à cette offre-là, au détriment de la culture nationale et européenne, et des cultures du monde. Nous combattons donc pour la qualité et la diversité de la culture, qui ne saurait être considérée comme un secteur marchand, soumis à la loi de la concurrence et au laisser-faire. Et je suis sûr, Madame la ministre, que vous saurez relever ce défi de la mondialisation, afin de garantir à tous l'accès aux _uvres de l'esprit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Laurent Dominati - M. le Premier ministre devant faire lundi un bilan de sa politique en matière d'audiovisuel, je vais essayer de l'y aider. Les points positifs d'abord sous votre règne, Madame la ministre : aucune chaîne de télévision n'aura déposé son bilan, et vous n'aurez pas eu besoin de couper les vivres à la télévision publique pour changer son président. Vous aurez su manier la carotte plutôt que le bâton.

Du reste, avec 20 milliards de francs, votre budget se compare à celui de la justice. C'est dire que le secteur est tenu pour stratégique. Mais avez-vous réalisé une révolution culturelle, comme l'assure M. Mathus, ou simplement réussi à force de conservatisme et de dépenses publiques, à maintenir les choses en l'état ? Peut-être M. Mathus pensait-il à Loft Story ?

Deux questions se posent à propos du budget. Ces milliards suffisent-ils ? A quoi serviront-ils ? Le Figaro nous annonce l'arrivée des contrats d'objectifs et de moyens après mûre réflexion de votre part, puisque la loi date de l'été 2000. Vous vous engagez à augmenter chaque année de 3 %, et cela pendant cinq ans, les ressources du public.

Bel engagement, se dit-on. Mais sera-t-il suffisant ? Les charges d'exploitation de France-Télévision ont crû de 6 % l'an dernier et la masse salariale de 11 % (M. Le Guen, rapporteur spécial, s'exclame). Ces chiffres proviennent de votre rapport ! Il y aura donc des besoins de financement dans l'avenir - surtout si l'on se réfère aux chaînes privées, qui augmentent leurs dépenses de 10 % par an, avec des pointes à 18 %. Comment France-Télévision fera-t-elle face à TF1 et M6, dans ces conditions ? On estime à 1 milliard par an les investissements que le secteur public devra faire dans le numérique Hertzien. Comment y arrivera-t-il avec vos 3 %. Même à gauche on commence à se poser des questions, et à dire tout bas qu'il faudra peut-être privatiser un jour.

Seconde question, à quoi l'argent servira-t-il ? Vous négociez avec Bruxelles pour expliquer à la Commission que les aides légales sont justifiées par les missions de service public.

M. Olivier de Chazeaux - Lesquelles ?

M. Laurent Dominati - Quel animateur du public n'a pas, un jour ou l'autre, travaillé dans le privé ? Même Serge July, qui dispense les bons points sur F3. Alors , où est la différence ? Si, il y a une exception, Michel Drucker, mais suffit-elle à définir la mission de service public ?

Alors, vous invoquerez la lutte contre l'hégémonie américaine. Mais selon le rapport du CSA, la part de la fiction américaine s'est accrue sur France 2 et France 3. Pour autant, la part des programmes pour la jeunesse n'a pas augmenté sur ces chaînes, au contraire, et 93 % de ces programmes sont achetés en dehors de l'Europe. Quant à la 5ème, elle a le public le plus âgé de toutes les chaînes, et ses investissements en direction de la jeunesse ont baissé de 20 %.

Bien sûr, direz-vous l'opposition critique toujours les chaînes publiques. Eh ! bien, parlons du privé. TF1 et M6 ont réduit leurs investissements dans la fiction française, et cela s'explique notamment par la réduction de la publicité. En revanche, les investissements documentaires ont augmenté.

Bref, vous devriez vous poser des questions, et j'espère que nous aurons l'occasion de faire mieux l'an prochain. Certes, vous avez fait des cadeaux à M6 et à TF1. 1,3 milliard à M6, des bénéfices doubles pour TF1. Mais pour quel résultat ? Pas d'expansion à l'étranger, au contraire. M6, c'est la CLT, qui est de moins en moins française et de plus en plus allemande, tout comme la première radio écoutée sur notre territoire. Canal + a perdu un peu de son indépendance. Il est vrai que TF1 investit en Bretagne : bonne nouvelle pour le rayonnement de la France !

Alors, les télévisions locales ? Non. Le câble ? La première chaîne, et encore RTL. Vous mentionnerez la télévision numérique de terre. Mais si nous n'avions pas été là, vous n'en auriez pas parlé ! Vous l'avez oubliée dans votre loi. Et vous l'avez assortie d'un tel carcan que les investissements tardent à venir. Il faut enfin passer de l'archaïsme réglementaire à l'ère de la liberté.

Il faut vous créditer d'un succès, tout de même. Alors que tous les gouvernements précédents s'y étaient cassé les dents, vous avez réussi à privatiser la SFP.

Il est vrai aussi qu'en matière d'action internationale, on peut saluer le succès de TV5. Mais que dire de l'AFP, cet outil remarquable qui est aujourd'hui si mal en point ? Vous aviez soutenu un plan de modernisation avec un président que vous avez lâché. Vous aviez promis au Parlement une loi qu'il n'a jamais vue. Cinq années gâchées !

M. Henri Plagnol - Bravo !

M. Laurent Dominati - L'entreprise est bloquée et vous, terrorisée, qu'avez-vous fait ? Rien.

Il y a d'autres OVNI français que l'AFP : le statut de la presse par exemple. Belle originalité que le monopole des NMPP. Vous n'êtes pas la seule à vous y être cassé les dents, mais cela fait cinq ans que ça dure ! Et cet autre monopole du syndicat du livre, qui est d'ailleurs en train de devenir une entreprise capitalistique puisqu'il a pris des parts dans la société de distribution du Parisien... Ce sont des scandales français ! Vos aides à la presse sont bien louables, mais c'est de liberté que la presse a besoin pour se développer !

Dans le domaine de la communication, dans la société de l'information tout entière, vous avez mis la France en retard. Où est la loi annoncée depuis trois ans ? Qu'est devenue la « société Internet » promise par le Premier ministre il y a deux ans ? Rien n'a évolué parce que vous en êtes restés à une vision archaïque des choses, en distribuant de petits cadeaux ici ou là mais sans résoudre aucun problème. Devant un bilan aussi dramatique, nous ne pouvons que voter non (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Christian Cuvilliez - Aujourd'hui s'ouvre à Doha, dans un lieu emblématique choisi pour étouffer toute velléité de contestation, un nouveau round de négociations de l'OMC. Les pommes de discorde sont nombreuses, mais je voudrais surtout évoquer le risque mortel que l'accord général sur le commerce des services fait peser depuis 1995 sur la santé, l'éducation et la culture. Cinquante Etats ont déjà souscrit à l'idée de mercantiliser tous les services publics. Si la communication n'est pas explicitement désignée, c'est qu'elle est déjà tellement immergée dans les marchés capitalistes qu'il n'est plus utile de négocier quoi que ce soit. De gigantesques batailles de pouvoir se livrent dans un espace qui devrait rester celui du savoir, de la culture et du divertissement, facteurs de liberté publique. Je ne méconnais pas les enjeux industriels et commerciaux qui existent, mais précisément est-ce l'homme ou le produit le plus important ?

Disant cela, j'indique pourquoi le groupe communiste, malgré tous ceux qui le pressaient de faire le contraire, a participé assidûment à la lente et laborieuse gestation de la loi sur l'audiovisuel, même amputée de son volet anti-concentration et pourquoi, malgré ses ambiguïtés, malgré un manque criant de moyens, il approuvera sa traduction budgétaire. Toutefois, Madame la ministre, le rapport de M. Mathus, remarquable exercice de mise en valeur, n'arrive pas à masquer la cruelle difficulté qu'il y a à faire le grand écart entre l'affectation de la redevance à France-Télévision et la nécessité de compenser cette perte par un meilleur rendement des recettes budgétaires restantes.

Quel est donc l'impact de cette loi sur notre paysage audiovisuel et comment faire pour que France-Télévision, l'INA et nos radios constituent un pôle public de référence, dont la priorité n'est pas de faire des profits ni d'alimenter des flux financiers mais de concourir au dynamisme de la filière sans y être subordonné ? Un pôle qui puisse assurer un accès gratuit à tous les citoyens et sur tout le territoire, selon le principe d'égalité d'accès au service public, à des émissions de qualité - celle-ci n'étant pas la norme moyenne mais la norme supérieure ? Comment faire pour que la holding puisse fournir des programmes conformes à la déontologie du service public : qualité, impartialité, culture, participation citoyenne... qui ne soient pas évalués par le seul taux d'audience mais aussi par des indices de satisfaction, des labels de qualité sur la forme et sur le fond et des indicateurs de gestion - intégrant la qualité de la gestion du personnel ?

Je dois regretter, à ce propos, l'analyse qu'a publiée M. Le Guen sur l'évolution de la masse salariale à France 3. Elle correspond à des mouvements souhaitables tant socialement que pour favoriser, à l'intérieur de la holding, les synergies et la mobilité entre chaînes. Et puis l'Etat, qui a accumulé une dette de remboursement de redevance de 20 milliards, qui a mis 5 milliards dans la corbeille de mariage de Vivendi Universal, qui a bradé la SFP pour 10 % de sa valeur et qui avait bloqué depuis des années l'évolution des salaires peut bien aujourd'hui veiller à ce que la holding s'installe confortablement et égalise les niveaux de fonctions et de rémunération de ses agents ! A ce propos, le transfert des 140 emplois de la SFP à France Télévision, prévu dans le plan de liquidation, tient-il toujours ?

Les transformations à l'INA dans le domaine du numérique, qui semblent être très bénéfiques, pourraient peut-être, sous certaines conditions, être étendues à l'AFP, dont nul ne saurait admettre la disparition. Il serait souhaitable de reconstituer un groupe de travail élargi dans lequel les élus, les experts et les différents intervenants étudieraient les conditions de mise en place du numérique terrestre hertzien mais aussi évalueraient les implications des techniques nouvelles de transmission de l'image et du son. Le pôle public de référence doit avoir toute sa place dans les organismes de régulation.

Le numérique terrestre hertzien, quoique techniquement accompli, a du mal à démarrer en France. En réduisant à trois le nombre de canaux de France Télévision, en n'accordant qu'un milliard en quatre ans à la holding, en lui laissant le soin de trouver les trois milliards restants, en différant sans cesse les candidatures, l'Etat et, il est vrai, le CSA, ne créent pas les meilleures conditions. Il est vrai que cette technique, en ouvrant des perspectives considérables, dérange les grands groupes privés du câble et du satellite. Il est vrai aussi que les opérateurs entrants sont disposés à s'investir dans le NTM, mais en spéculant sur les réussites ou les déboires de France-Télévision en la matière.

Pour que la conquête de ce nouvel espace de la communication se réalise, il faut une volonté politique et donc des moyens budgétaires. Pourquoi ne pas relever ce défi ensemble ? Par notre vote, nous exprimons cette volonté de dépassement (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Patrice Martin-Lalande - Inutile de dire que je ne partage pas l'optimisme des rapporteurs sur le budget de la communication pour 2002 !

Pour ce qui concerne la presse écrite, en dépit de quelques éléments positifs, tels le règlement - pour lequel je suis intervenu à plusieurs reprises - du statut social et fiscal des correspondants de la presse écrite, il y a lieu de s'inquiéter de toutes les menaces qui pèsent sur elle : effondrement de la publicité, prix élevé du papier, contrecoup des 35 heures.

Beaucoup de journaux connaissent actuellement une situation critique qui met en cause leur survie.

Face à cette situation, l'évolution des aides directes à la presse n'est pas rassurante. Pour intéressant qu'il soit, le fonds de modernisation doit en effet évoluer profondément et l'Etat ne doit pas profiter de son existence pour se désengager. Or, c'est bien dans cette voie qu'il s'engage, en y recourant non plus exclusivement pour l'investissement mais aussi pour l'exploitation et pour la distribution.

S'agissant de l'AFP, l'effort de l'Etat est insuffisant. Cependant que les charges de l'agence ont tendance à progresser sensiblement du fait du gonflement de la masse salariale qui découle des accords conclus, l'Etat se contente d'augmenter de 1,5 % ses abonnements. Il est impensable pour la survie de l'AFP que les abonnements progressent d'au moins 2 % ou 3 % !

S'agissant du financement de la télévision publique, comment vont être traduites les dispositions arrêtées par la Commission européenne le 17 octobre dernier en vue de clarifier les relations entre les télévisions et les Etats financeurs ?

Etant de ceux qui souhaitent que le vote du budget garde toute sa signification, je regrette que les conventions d'objectifs et de moyens des sociétés de l'audiovisuel public n'aient pas été publiées avant l'examen de ce budget et que l'on en découvre la teneur dans la presse d'aujourd'hui (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF).

Je me réjouis des nouvelles exonérations de redevance audiovisuelle votées par notre commission des finances. Pour autant, elles mettent en évidence la nocivité du système actuel ! Du reste, un rapport récent de la Mission d'évaluation et de contrôle dénonce cet impôt qu'elle juge archaïque, injuste et coûteux. Songez que les érémistes doivent l'acquitter, que son coût de recouvrement est exorbitant et que l'évasion fiscale qui s'y attache atteint des niveaux records ! Autre conséquence de son caractère foncièrement injuste : la nécessité de prévoir des exonérations multiples : cette année, une nouvelle mesure prévoit l'abaissement à 65 ans de l'âge d'exonération de redevance audiovisuelle dont bénéficient les personnes qui ne paient ni l'impôt sur le revenu ni l'ISF et le coût de la réforme est estimé à 61 millions d'euros.

A l'évidence, la meilleure solution serait de la supprimer. Pour autant je ne crois pas qu'il faille faire du produit des licences UMTS la recette de substitution. Cette ressource doit en effet être affectée en priorité à la réception des « zones blanches » de l'actuelle génération de téléphone mobile.

Contrairement à ce qui a été dit, la TNT n'est pas systématiquement un succès, et l'exemple britannique, trois ans après son lancement en témoigne. Par ailleurs, la télévision numérique européenne par satellite a perdu 6 milliards d'euros en 2000 et son endettement est de 25 milliards d'euros.

En France, le numérique ne représente que 6 % du marché de la télévision et avec seulement 1,7 milliard de recettes, le nombre de chaînes est trop élevé et leur espérance de vie par trop limitée.

Les multiples rebondissements du feuilleton de la télévision numérique terrestre prouvent que le Gouvernement a, depuis le début, bâclé ce dossier ! Cette réforme importante n'a-t-elle pas été présentée au Parlement sous la forme d'amendements de dernière minute dans la loi relative à l'audiovisuel ? (« C'est vrai » ! sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Et si nous souhaitons l'accès de tous au numérique audiovisuel, les choix financiers et technologiques pour y parvenir sont multiples. Or, le Gouvernement n'a pas présenté l'étude d'impact que j'avais demandée, laquelle nous aurait permis d'appréhender les avantages comparatifs de la TNT, par rapport aux autres technologies disponibles.

A l'heure des choix, personne n'est en mesure de dire qui financera la TNT, quand elle sera mise en place et comment elle sera distribuée ? Le ministre des finances en est du reste bien conscient puisqu'il vient - bien tardivement - de diligenter une enquête sur les conditions de distribution commerciale du numérique terrestre auprès de la DGCCRF.

Par ailleurs, les divergences entre le Gouvernement et le CSA ne manquent pas : ouverture de la publicité télévisée aux secteurs jusque-là interdits comme l'édition, le cinéma ou la presse, diffusion de la publicité tout au long des programmes des chaînes thématiques, retards sur le calendrier initial du démarrage fixé à Noël 2002...

Sachant que le projet numérique de France Télévision est estimé à 3,8 milliards, que les responsables de la télévision publique estiment pouvoir s'autofinancer à hauteur de 2 milliards et qu'ils estiment leurs besoins financiers supplémentaires à au moins 1,5 milliard, la dotation en capital d'1 milliard promise par l'Etat ne suffira pas.

Dès lors, à quels financements complémentaires aura-t-on recours ? Sera-t-il possible de conclure des alliances avec le secteur privé ?

La seule évolution dont il y ait lieu de se féliciter dans le secteur de télévision est l'assouplissement introduit par la loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel de la règle des 49 %, laquelle fixe le plafond de détention par une même personne du capital d'une chaîne hertzienne. Le maintien de cette règle avait d'ailleurs été dénoncé par le groupe RPR lors de la discussion de la dernière loi sur l'audiovisuel du 1er août 2000. Il n'aura donc fallu qu'un an pour vous convaincre !

S'agissant de l'Internet, la fracture numérique est loin d'être réduite et la France accuse toujours au moins deux ans de retard par rapport à ses voisins européens. De même, l'Internet à haut débit reste embryonnaire puisque seulement 3 % des foyers français en disposent. Ce retard est imputable au manque de réseaux câblés et aux difficultés de mise en _uvre du dégroupage - lequel permet aux opérateurs privés d'accéder au réseau local de France Télécom. Or, la pression pour différer l'arrivée de concurrents est forte : Cegetel, 9 Télécom et LDcom viennent ainsi de refuser de signer la convention de dégroupage qu'il leur avait été proposée !

En outre, du fait des coûts de connexion imposés par France Télécom, les opérateurs ne peuvent proposer un forfait d'interconnexion illimitée à moins de 300 F par mois, alors qu'il coûte 150 F en Angleterre. L'ART doit se prononcer sur ce point sans plus tarder car il constitue l'un des obstacles majeurs au développement de l'Internet dans notre pays.

La loi sur la société de l'information ne verra pas le jour au cours de la présente législature et certaines mesures urgentes ne pourront donc pas être prises comme celles relatives à la responsabilité des hébergeurs de sites.

D'autres dispositions sont votées séparément, ce qui tend à prouver qu'il aurait mieux valu ne pas persister dans le projet d'ériger un monument législatif dédié à la société de l'information et légiférer avec pragmatisme et célérité comme nous l'avons fait pour la loi signature électronique.

Afin d'enrichir son contenu et de ne plus entraver son développement, la fiscalité applicable à la presse en ligne doit être harmonisée avec celle dont bénéficient les journaux imprimés. Pour l'ensemble de ces raisons, vous comprendrez que le groupe RPR ne puisse voter ce projet de budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF).

M. Henri Plagnol - A l'UDF, nous pensons aussi que notre pays a besoin d'un service public fort mais contrairement à la majorité, une légère progression du budget de la communication ne suffit pas à nous convaincre que cet objectif sera atteint ! Au terme de cinq années de gouvernement de gauche, l'avenir du service public de l'audiovisuel est plus incertain que jamais ! Pourtant, le numérique hertzien terrestre aurait pu donner au secteur public une dernière chance de jouer un rôle dans le monde audiovisuel de demain. Du reste, il est vain d'opposer de manière artificielle les secteurs public et privé. Plutôt que de prétendre soustraire à la logique du marché cette nouvelle technologie, que ne faites-vous vôtres les suggestions du CSA, lequel vous incite à amender le cahier des charges opposé aux opérateurs qui développeront la TNT payante, à étaler le calendrier, à permettre de recourir plus largement à la publicité et à favoriser l'émergence de nouveaux services.

Plus largement, pouvez-vous nous indiquer, Madame la ministre, ce qu'il adviendra du projet relatif à la nouvelle société de l'information visant à éviter qu'Internet se développe hors de tout garde-fou législatif ?

Nous entendons défendre les futures chaînes locales et régionales car elles nous semblent essentielles pour la démocratie.

Je suis partisan comme M. Françaix d'ouvrir aux chaînes commerciales régionales la possibilité de recourir à la publicité dans les secteurs interdits, notamment la distribution. Il y a de plus en plus d'accords locaux entre la presse quotidienne régionale et les nouvelles chaînes qui se créent, et sans cette modification législative elles ne pourront se développer. Je crois d'autre part à la nécessité d'aider les chaînes associatives, en s'inspirant de ce qui existe pour les radios associatives, et j'aimerais avoir sur ce point l'avis de Mme la ministre.

Le doublement en taille de l'audiovisuel public qui résultera du lancement du numérique terrestre, si celui-ci réussit, appellera une augmentation forte et pérenne de ses ressources financières. Un milliard pour trois ans, si vous-mêmes ou vos successeurs parviennent à tenir l'engagement, c'est très bien ; mais il faudra une forte augmentation de la redevance, qui atteindra mille francs en 2005. Et, selon vos propres estimations, vous tablez sur une forte augmentation des ressources publicitaires. C'est dire que l'indépendance de l'audiovisuel public, dont se gargarise la majorité, ne signifie rien, puisque sans augmentation des recettes publicitaires même une redevance à mille francs ne suffira pas. Où donc en est le Gouvernement sur le financement de l'audiovisuel public pour assurer son avenir, au-delà du lancement du numérique terrestre ? Comptez-vous indéfiniment accroître la redevance ?

A l'UDF nous serions prêts à accepter une augmentation sensible des ressources de l'audiovisuel public, mais à une condition : qu'il assume vraiment son identité, et propose des émissions qui diffèrent par leur contenu de celles du privé. Les Sept d'Or décernés à Bernard Pivot à titre posthume et à Arte pour la diffusion d'une pièce d'Euripide ne sauraient cacher la misère culturelle du service public. J'espère donc que les contrats d'objectifs, sur lesquels nous avons peu d'informations, permettront à nouveau au service public de jouer son rôle.

Un mot sur les carences de notre pays en fait de présence audiovisuelle extérieure. A l'occasion du conflit en cours en Afghanistan, on voit bien que manque une grande voix francophone, une CNN à la française, qui pourrait donner une autre lecture des événements que celle des télévisions anglo-saxonnes ou arabes. Le ministre des Affaires étrangères a récemment exprimé le souhait qu'intervienne un accord dans le satellite pour que puisse exister une chaîne francophone en direction du monde arabe. Le vrai chantier serait de réfléchir aux synergies possibles entre RFI et TV5 pour constituer un outil comparable à BBC World Service, qui touche plus de 150 millions d'auditeurs ou de téléspectateurs. Cette grande voix française manque cruellement. Ce manque est aggravé par la crise que continue de connaître l'AFP, dont le personnel accomplit pourtant sa mission d'une manière digne d'éloge : jamais l'AFP n'a joué un rôle aussi important qu'aujourd'hui en Afrique ou au Proche-Orient. Il suffirait de 60 millions pour apurer les comptes : le budget prévu en est loin. Faute de permettre à l'AFP de se moderniser et de s'adapter à la nouvelle donne du numérique, nous risquons d'être privés de cet outil magnifique.

Au total, après cinq ans de ce gouvernement, l'audiovisuel public est loin d'être conforté dans son avenir. Nous ne pourrons donc voter ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

La discussion générale est close.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication - Ce projet de budget de la communication confirme le travail accompli tout au long d'une législature ambitieuse et cohérente, pour l'audiovisuel comme pour la presse. L'effort budgétaire en faveur de l'audiovisuel public a été constant. Avec une hausse de 3,2 % par rapport à 2001, nous conforterons en 2002 le niveau des ressources dont dispose le secteur, après deux années de forte évolution. Le budget atteindra ainsi 3,2 milliards d'euros, soit 21 milliards de francs. Dans cet ensemble, les ressources publiques progresseront de 3,4 %, pour atteindre 2,5 milliards d'euros, soit 16,3 milliards de francs, après deux années de hausses historiques : 11,7 % en 2000 et 10,3 % en 2001. Cette évolution implique une augmentation de la redevance de 1,76 %, après deux ans de stabilité. Le bilan est clair : les ressources du secteur audiovisuel public auront progressé de 35 %, soit de 4,3 milliards de francs en cinq ans - alors qu'elles avaient été amputées de 3,9 % en 1997. Dans l'ensemble du budget de l'audiovisuel public, nous aurons fait passer la part des ressources publiques des deux tiers à plus des trois quarts, précisément à 76,6 %.

Cette évolution doit conduire à faire jouer au service public la carte fondamentale de la diversité. Nous avons su donner une traduction budgétaire crédible à la conviction, largement partagée, de la place indispensable du service public audiovisuel. Nous avons su également - et je sais que sur ce point les avis diffèrent - consolider la ressource spécifique qu'est la redevance. Il n'est pas un pays où le service public puisse revendiquer sa spécificité sans redevance, c'est-à-dire sans une ressource pérenne et affectée, apportée par son public : c'est pourquoi je continue d'en défendre l'existence. Je remercie M. Le Guen d'avoir souligné cette marque spécifique de l'audiovisuel public. Je veux rassurer ici M. Dominati sur nos relations avec la Commission européenne : celle-ci, dans les règles qu'elle vient d'édicter, ne menace en rien l'existence du financement que nous assurons à l'audiovisuel public. Elle pose en principe que chaque Etat est responsable de sa définition du service public, qu'il doit confier à un organisme indépendant le contrôle exercé sur ses missions, et qu'il doit distinguer entre les missions de service public et les autres activités. Cela ne nous pose pas de problème : c'est ce que nous avons inscrit depuis longtemps dans la loi, avec l'autorité indépendante de régulation et les contrats d'objectifs et de moyens.

M. Laurent Dominati - Si ce n'est pas de la langue de bois...

Mme la Ministre - Bien entendu nous entendons aussi définir une politique d'exonérations adaptée à nos objectifs sociaux. Nous avons décidé l'année dernière d'en assurer la compensation par le budget de l'Etat. Notre objectif n'était évidemment pas d'engager ainsi une dévitalisation de la redevance. Cette politique d'exonération connaîtra d'ailleurs ses limites, puisqu'un compte d'affectation spécial ne peut être alimenté pour plus de 20 % de son montant par des ressources budgétaire.

Considérons les priorités des sociétés pour 2002. Avec des moyens ainsi consolidés, nous pouvons poursuivre efficacement notre action en direction des programmes et des contenus, mais aussi de la modernisation des entreprises. Les budgets des différentes sociétés de l'audiovisuel public traduisent ces priorités.

France-Télévision verra son budget progresser de 3,1 %. C'est prioritairement aux programmes que les moyens nouveaux seront affectés : 32,8 millions d'euros, sur un supplément de ressources de 57,46 millions d'euros. Ces sommes incluent notamment la préfiguration de La Cinquième 24 heures sur 24. En outre, des ressources en capital seront prévues pour les nouvelles chaînes de la télévision numérique terrestre : pour une dotation d'un montant total d'un milliard de francs, une première tranche a été fixée par le Premier ministre à 350 millions de francs , et sera versée dès cette année 2002. Le versement se fera en effet par tranches, puisqu'il faut pouvoir notifier cette contribution à Bruxelles ; mais l'engagement de l'Etat est clair, et inscrit dans le contrat d'objectifs et de moyens. Le budget d'Arte-France augmentera quant à lui de 3,4 %, pour l'essentiel au bénéfice des programmes. La préparation de la grille de journée est une des priorités prévues dans ce cadre.

Pour sa part, Radio France voit son budget progresser de 3,9 %. La modernisation de l'organisation du travail et surtout la poursuite des projets fondamentaux que sont la mise en place du « Plan bleu » et la numérisation de la production sont les priorités de ce budget. La société effectue, comme nous le souhaitions, cette évolution dans les meilleures conditions. Quant à RFI, son budget s'accroît de 4,8 %, hausse essentiellement destinée à la modernisation de l'organisation du travail.

La numérisation est une dimension transversale, commune à l'ensemble du secteur. Développement du service public dans le numérique terrestre, numérisation de la production, notamment à Radio France et à RFI, numérisation sur toute la chaîne de production et dans toutes les sociétés. C'est en particulier le cas pour l'INA qui a fait de la numérisation des fonds la priorité de son action. Comme vous le savez, l'INA inscrit désormais son évolution budgétaire dans le cadre de son contrat d'objectifs et de moyens, le premier signé dans l'audiovisuel public : de ce fait les ressources publiques progresseront de 7,7 %.

Si l'INA a été pionnier, à partir de 2002 toutes les sociétés de l'audiovisuel public seront dotées d'un contrat d'objectifs, signé, engageant les responsables et les tutelles. Il faut encore quelques semaines pour finaliser ces documents, mais je souhaite déjà vous indiquer les grands axes stratégiques de ces contrats, qui feront, année après année, l'objet d'un débat devant vous. S'agissant des contenus, et je pense répondre ici à la préoccupation de M. Cuvilliez, des indicateurs permettront de traduire les missions générales des entreprises. Ce sera là un élément très novateur dans la gestion de ces sociétés : seront mesurées la diversité des programmes en termes de genres et en fonction des heures de diffusion, la place réservée à l'information, au spectacle vivant, au documentaire, à l'information. Ces indicateurs apporteront une approche non seulement quantitative, mais qualitative ; nous tiendrons compte également de la satisfaction des téléspectateurs.

Le contrat de RFO marquera une étape importante : les évolutions technologiques permettent de rendre l'offre publique plus proche de celle dont bénéficie la population en métropole. Le contrat organisera donc la diffusion directe de France 2 et de La Cinquième outre-mer, les programmes de France 3 s'insérant dans l'offre des télévisions de pays : nous répondrons ainsi à une attente forte et parfaitement légitime de la part de nos compatriotes ultra-marins. M. Dominati a tort de s'inquiéter de la capacité du service public à résister à TF1 et à M6.

M. Christian Cuvilliez - Il n'est pas vraiment inquiet (Sourires).

Mme la Ministre - Tout, à commencer par les programmes et l'intérêt qu'ils suscitent, montre que France-Télévision fait bien mieux que résister. Au reste, sa fonction n'est pas de mener la compétition avec les télévisions privées...

M. Laurent Dominati - La direction de France 2 l'affirme pourtant !

Mme la Ministre - ...mais de remplir ses missions de service public. Elle n'a pas à entrer dans les rivalités fébriles qui peuvent opposer certains opérateurs privés.

S'agissant du financement, le Premier ministre a rendu ses premiers arbitrages pour France-Télévision, et quels que soient les échos donnés par la presse du matin, je veux vous en réserver la primeur. A partir de 2003, l'entreprise pourra bénéficier, en sus d'une part fixe de progression de la ressource publique de 3,1 %, d'une part variable, qui ira de 0,4 % à 0,6 %, attribuée en fonction des résultats obtenus. La progression des ressources publiques atteindra de 3,5 à 3,7 % par an. FTV pourra ainsi organiser sereinement son développement.

Ce contrat est transmis aujourd'hui même au comité d'entreprise et au conseil d'administration de chaque entreprise du groupe FTV et sera signé avant la fin de l'exercice en cours. Nous allons, dans le même esprit, finaliser les autres contrats d'ici la fin de l'année.

Cette démarche nous a permis de mieux prendre la mesure de la spécificité du service public, et de nous engager à la préserver dans l'avenir. Après l'intervention de M. Baguet, je veux rassurer ceux qui auraient été troublés en lisant ce matin dans la presse que les arbitrages pourraient conduire à fixer la redevance à 1 000 francs en 2005 (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). D'où vient cette confusion ? D'abord c'est le Parlement qui fixe l'évolution de la redevance. Ensuite, la progression spontanée de l'assiette permet de n'accroître que modérément le montant de la redevance. Ce montant sera donc en 2005 très inférieur à ce qui est annoncé. Monsieur Dominati, il faut en lisant la presse ne pas se départir d'un esprit critique.

M. Cuvilliez se préoccupe du sort des salariés de la SFP. Comme il s'y est engagé, le Gouvernement veillera à la mise en _uvre du plan social.

Sur 414 personnes, 130 salariés seront conservés par le repreneur, et 284 dont le poste sera supprimé recevront des offres d'emploi à l'intérieur de l'audiovisuel public à concurrence de 140 emplois, 100 à France-Télévision et les autres répartis dans l'ensemble des entreprises dont je salue l'esprit de solidarité.

M. Olivier de Chazeaux - Et si les entreprises n'ont pas besoin de salariés supplémentaires ?

Mme la Ministre - Ces personnels seront recrutés en fonction des besoins réels des entreprises.

Au-delà des seules considérations budgétaires, deux chantiers majeurs conditionnent l'évolution de notre paysage audiovisuel.

La télévision numérique de terre, d'abord, dont se préoccupent les deux rapporteurs. Le Parlement a voté, le 1er août 2000, la loi qui organise le cadre dans lequel doit se développer ce projet.

MM. Olivier de Chazeaux et Laurent Dominati - C'est nous qui l'avons lancé !

Mme la Ministre - Peut-être nous y avez-vous encouragés. Mais, après vous avoir entendus, je me demande si vous souhaitez réellement que ce projet aboutisse, ou si vous ne nourrissez pas en secret le v_u qu'il échoue ou du moins qu'il prenne du retard ! (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Les choix faits l'an dernier sont des choix forts, en parfaite cohérence avec nos priorités audiovisuelles et culturelles. Notre objectif est de donner jour à une télévision enfin sortie de l'étau du réseau hertzien, dont doit se contenter la grande majorité des téléspectateurs. Nous proposons à ceux-là de passer de 6 à 33 chaînes, de 5 à 15 chaînes gratuites, avec une meilleure définition d'image et de son. Il s'agit d'une évolution majeure et profitable aux opérateurs comme aux téléspectateurs.

A chaque étape, le gouvernement de Lionel Jospin a procédé avec méthode et réalisme économique, en s'appuyant sur les études nécessaires. Je demeure à l'écoute des opérateurs, prête à ajuster les éléments du cadre réglementaire. C'est ce que je fais depuis des mois, en harmonie avec le CSA tant sur le calendrier que sur le contenu des textes. Je viens de transmettre au Conseil d'Etat les décrets relatifs aux obligations de production, pour la rédaction desquels j'ai tenu le plus grand compte des remarques des professions et du CSA. Se pose aujourd'hui la question spécifique de la distribution.

M. Olivier de Chazeaux - C'est celle qu'il fallait régler la première !

Mme la Ministre - Pourquoi vous, chantres du libéralisme, êtes-vous si souvent en demande d'Etat pour les plus petits détails ? Laissez les entreprises décider elles-mêmes ! C'est au regard du droit de la concurrence qu'il faut apprécier les hypothèses avancées par les opérateurs. Aussi ai-je demandé au ministre de l'économie de faire examiner ce dossier. Je souhaite que les opérateurs soient pleinement éclairés avant de répondre à l'appel à candidatures lancé par le CSA. Au reste, la mise en place de la TNT n'est pas l'affaire d'un seul texte ou d'une seule décision. C'est un projet de longue haleine, dont l'ensemble des Français bénéficieront et dont j'ai le plaisir de vous dire que de nombreux opérateurs, de nouveaux rentrants comme on dit, se préparent à s'y engager.

Il offrira à la télévision locale, à laquelle M. Françaix est si attaché, un cadre nouveau et prometteur. Il faudra inévitablement porter un jour un nouveau regard sur la question des secteurs interdits de publicité, mais l'évolution de notre réglementation devra être progressive et concertée, en fonction des intérêts économiques et aussi culturels des secteurs jusque-là préservés. Les assouplissements éventuels devront principalement bénéficier aux chaînes thématiques et aux chaînes locales. Mais il faut avancer sans déclencher de tremblements de terre.

Quant aux télévisions associatives, je suis convaincue qu'elles apporteront une respiration au secteur audiovisuel, à condition de disposer d'un soutien financier, dont il s'agira de déterminer les contours.

Le Gouvernement déposera avant la fin de l'année le rapport sur les perspectives de développement des télévisions citoyennes de proximité, dont je souhaite qu'il soit la base d'un débat de fond débouchant sur des réformes concrètes.

Les aides publiques à la presse écrite avoisineront en 2002 les 68 millions d'euros, soit 450 millions de francs, en augmentation de 7,2 % par rapport à 2001 et d'environ 80 % par rapport à 1997. Voilà qui prouve à M. Martin-Lalande tout l'intérêt que le Gouvernement et la majorité portent à la presse.

L'Etat consacrera 290 millions d'euros soit 1,9 milliard de francs aux tarifs postaux préférentiels. Le Gouvernement s'est engagé à ne pas augmenter les tarifs postaux de la presse au cours de ce même exercice.

Avec l'accord du Gouvernement vous avez reconduit l'article 39 bis du code général des impôts pour cinq ans. Je vous en remercie.

Ce budget est marqué par la création d'une nouvelle aide. Après le fonds de modernisation créé en 1998 à votre initiative, Monsieur le rapporteur Le Guen, nous proposons d'instituer en 2002 une aide à la distribution des quotidiens nationaux d'information politique et générale. Cette initiative doit beaucoup à la vigilance des parlementaires. Vous aviez raison de souligner que dans la conjoncture mondiale actuelle, le soutien à une presse d'information est un élément fondamental d'une démocratie moderne.

Le principe et les modalités de cette aide ont fait l'objet d'une large concertation avec la profession, réunie en table ronde ; sa mise en place accompagnera la modernisation du système de la distribution groupée, conformément à l'esprit de solidarité qui a présidé à sa création.

Votre commission et votre rapporteur ayant souhaité soumettre l'approbation de cette aide à un engagement des parties concernées à maintenir ce système coopératif de distribution, je puis vous annoncer que, hier, toutes ont pris cet engagement par écrit, l'opérateur acceptant même de ne pas percevoir sa redevance pendant toute la durée du plan de modernisation des NMPP.

M. le Rapporteur spécial - Soit pendant trois ans.

Mme la Ministre - L'Etat apportera donc une aide directe de 2002 à 2004. L'an prochain, nous mobiliserons à cet effet 12 195 millions d'euros, soit 80 millions de francs, sur le budget mais aussi sur le produit, en progression, de la taxe instituée en 1997.

M. Baguet a posé le problème du travail de nuit dans la presse. Libéral, il devrait pourtant savoir que cette question relève de la négociation. Mais le Gouvernement restera vigilant !

M. Henri Plagnol - Et les intermittents du spectacle ?

Mme la Ministre - Pour l'AFP, les abonnements souscrits par l'Etat se monteront l'an prochain à 95 890 000 euros, soit 629 millions de francs et je suis sûre que tous les partenaires de l'Agence auront le souci de l'aider à s'adapter aux exigences de l'actualité et à mettre en place les nouveaux métiers indispensables.

A quoi servent les 3 milliards d'euros consacrés à l'audiovisuel public et les 360 millions d'euros des aides à la presse ? A développer ces médias, à faire vivre le service public, à donner à tous leurs chances dans un monde en mouvement. On ne pourrait y parvenir en réduisant les financements ou en hésitant entre le libéralisme absolu et une intervention pointilleuse de l'Etat, à tout propos et hors de propos. Nous voulons donc épauler le service public, le rendre fort, et réguler l'ensemble du secteur selon une politique culturelle originale. Les perspectives qui s'ouvrent pour la télévision numérique et pour les télévisions locales témoignent de la richesse des possibles, qui ne se limitent d'ailleurs pas à cela, loin de là. Avec ce budget, nous faisons aujourd'hui le point sur une démarche d'ensemble cohérente, mais c'est bien une ligne, un sillon que nous entendons continuer de tracer avec détermination ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

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QUESTIONS

M. Michel Françaix - Vous avez déjà répondu en grande partie à ma question, qui a trait aux aides à la presse. L'article 39 bis et les aides postales contribuent à consolider la position de celle-ci, tandis que le fonds de modernisation et, aujourd'hui, l'aide à la distribution et la confirmation du système coopératif lui permettent d'aller de l'avant. Aucun gouvernement n'aura fait autant au cours des 25 dernières années et j'espère que chacun mesurera bien ce que représente cet effort de 80 % sur cinq ans.

Cependant, la situation économique se faisant plus difficile, et même si les syndicats soutiennent que la presse est une et indivisible, il me paraît nécessaire d'accorder une attention toute spéciale aux quotidiens d'information. Ils participent en effet de la vie démocratique, mais le nombre en est faible et leur lectorat est moins important que dans les autres pays européens. Il faut donc préserver ce potentiel, au nom de la proximité qu'ils entretiennent avec le public, de la diversité qu'ils maintiennent face à un audiovisuel uniformisateur et de la réflexion qu'ils favorisent face à l'événement - pour tout dire, au nom de la liberté. Mais je sais que vous y veillerez !

M. le Président - Voulez-vous répondre à la question, Madame la ministre ? (Sourires)

Mme la Ministre - Merci, Monsieur Françaix, de souligner l'importance considérable des aides de l'Etat. Vous avez raison de noter la diversité des fonds de presse, et donc la diversité des besoins : c'est ce qui nous a conduit à mettre en place un système relativement complexe. Mais je ne manquerai pas de m'inspirer des propositions de simplification avancées par le rapporteur spécial.

Pour le portage, la progression sera de 250 % en cinq ans et les ressources du fonds de modernisation ont également crû. La création, qui vous doit beaucoup, d'une aide à la distribution de la presse nationale quotidienne, permettra, à la fois, de garantir la modernisation du secteur et le développement du multimédia et de pallier les incertitudes quant au niveau des ressources publicitaires.

Mon souci primordial est de sauvegarder le pluralisme et cela justifie que nous aidions les quotidiens à faibles ressources publicitaires. Mais cela doit aussi nous conduire à être très vigilants face aux fusions et concentrations inéluctables.

M. Olivier de Chazeaux - Ma question portera sur vos déclarations relatives à la redevance et au numérique hertzien.

M. Françaix a raison : la télévision - mais peut-être vaudrait-il mieux dire l'audiovisuel - et les technologies ont changé. Depuis les années soixante-dix, nous sommes passés d'une offre de programmes pauvre à un foisonnement de chaînes et la question du maintien de la redevance peut dès lors être posée : le fondement de cette taxe - la détention d'un récepteur de télévision - n'est plus adapté à la situation technologique. Je regrette donc que nous n'ayons pu débattre de ce point.

Vous venez de nous annoncer, sur la dotation en capital destinée au numérique hertzien, un premier versement de 350 millions dès 2002, cependant que la redevance devrait être relevée. Ces deux décisions ne vont-elles pas nous placer dans une position difficile face à la Commission, qui pourrait y voir un stratagème pour contourner ses propres orientations ? On a en effet le sentiment que vous voulez compenser la baisse des recettes publicitaires de France Télévision tout en finançant de façon prématurée le numérique hertzien - le ministère des finances ne s'étant pas prononcé sur le nombre des distributeurs.

Enfin, ce que vous accorderez à France-Télévision au titre de la part variable devrait être fonction du résultat de l'entreprise, avez-vous dit. Mais que faut-il entendre par résultat : un accroissement des recettes publicitaires - donc de l'audience - ou un effort de réduction des charges, de personnel notamment ?

Mme la Ministre - Nous ne sommes pas passés à l'abondance : cela reste à faire pour le plus grand nombre. Seul ceux qui ont le satellite peuvent parler d'un changement de monde. Le Gouvernement travaille en vue de procurer une relative abondance grâce au lancement de la TNT, et celle-ci n'a pas pris de retard, car que sont deux mois de plus pour une évolution aussi fondamentale ?

Quant au milliard, il n'est pas prélevé sur la redevance, mais sur le compte spécial de privatisation, car il a vocation à financer des investissements. Or, l'entreprise France-Télévision a vocation à faire un certain nombre d'investissements dès 2002, pour être sur la ligne de départ à la fin de l'année. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter des réactions de Bruxelles, au vu de l'interprétation qui prévaut sur la responsabilité des Etats quant à la fixation du périmètre et du mode de fonctionnement de leur audiovisuel public.

Enfin, lorsque j'ai dit que les ressources seraient réparties au vu des résultats, je n'ai pas voulu parler de résultats comptables, mais de la conformité aux objectifs, dont certains sont qualitatifs. De même que le CSA porte chaque année une appréciation de ce type pour les chaînes privées, il est normal que l'Etat se donne les moyens d'apprécier les mérites des sociétés publiques.

M. Jean Dufour - J'ai apprécié votre approche fondée sur la notion de pluralisme de la presse, Madame la ministre. Nos deux préoccupations principales concernaient les aides directes et les conditions de distribution, et nous avons eu satisfaction. Reste un souci : comment élargir le lectorat, afin que nous n'ayons pas seulement des titres, mais une presse jouant pleinement son rôle dans la vie du pays. Suite aux accords Galmot, il faut mettre en route, d'autre part, une réflexion pour que l'aide postale soit maintenue malgré tout.

Mme la Ministre - Je comprends votre inquiétude pour la presse écrite, mais les actions spécifiques ne sont pas évidentes à concevoir. L'éducation nationale mène depuis longtemps une politique de sensibilisation à la lecture de la presse écrite, mais il y a peut-être d'autres voies à explorer, à commencer par le renforcement du réseau de distribution. Les NMPP ont engagé une réflexion à cet égard. Sur les aides à la presse via les tarifs postaux, le Gouvernement a pris une position claire, mais je suis disposée à continuer la réflexion. La presse a engagé enfin un effort important vers le multimédia, pour faire découvrir la presse écrite à de nouveaux publics, les jeunes en particulier - avec le risque de susciter un lectorat de substitution.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la culture et de la communication concernant la communication.

Les crédits de la communication seront mis aux voix à la suite de l'examen des crédits de la culture.

Toutefois, j'appelle maintenant les lignes 38 et 39 de l'état E, les articles 38 et 47 rattachés à ce budget, et, en accord avec la commission des finances, un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 76.

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ÉTAT E, LIGNE 38

M. le Président - J'appelle la ligne 38 de l'état E concernant la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision.

M. Laurent Dominati - L'amendement 58 tend à supprimer la redevance. Celle-ci a soulevé des questions sur de nombreux bancs, et le Gouvernement avait confié il y a quelques années une mission exploratoire à Mme Bredin. Cet impôt arrive manifestement à son terme, et le ministre des finances lui-même semblait s'être résolu à le supprimer. Le rapporteur général dénonçait l'an dernier son caractère injuste et archaïque. Pourriez-vous nous éclairer un peu sur les débats internes au Gouvernement et au groupe socialiste ?

Par ailleurs, le débat de ce soir n'a pas apporté les réponses que nous attendions sur les contrats d'objectifs. Le milliard, on l'annonce depuis trois ans, c'est Mme Trautmann qui avait commencé. Ce soir, vous nous dites que vous y pensez toujours, même s'il se réduit à 350 millions de francs !

M. Jean-Marie Le Guen, rapporteur spécial - La commission a déjà repoussé plusieurs fois des amendements de ce type. Suite au rapport Migaud, elle a engagé une réflexion et considéré à la fois le caractère injuste de la taxe et la nécessité d'assurer une ressource pérenne à l'audiovisuel. Cette contradiction, tout le monde y est confronté, car la redevance ne date pas de 1997.

Nous n'avons certes pas encore trouvé la solution, mais nous commençons à avancer. Outre la redevance, il faudra mettre en place une ressource de substitution parce que s'il existait une recette pérenne de 15 milliards, nous le saurions déjà. Des propositions ont été formulées par M. Mathus, et nous poursuivons la réflexion, sachant que les principes sont déjà fixés. Je ne crois rien avoir en revanche entendu de bien précis venant de l'opposition.

En ce qui concerne la convention d'objectifs et de moyens, je suis favorable à un débat le plus large possible. Nous avions souhaité que France-Télévision établisse un véritable dialogue démocratique avec ses téléspectateurs, et je regrette que la polémique liée à la télévision numérique de terre ait empêché sa réalisation.

Vous êtes tous, Messieurs de l'opposition, intervenus comme si l'Etat était le gestionnaire directe de France-Television. Vous avez failli reprocher à la majorité le contenu de telle émission, voire l'aspect de l'ensemble du PAF ! Mais la loi que nous avons votée, dans un certain consensus, confie à un président la direction de l'entreprise pour cinq ans ; cette personnalité n'est même pas nommée par le Gouvernement, mais par le CSA, qui a des responsabilités bien plus précises que nous dans la gestion quotidienne de l'entreprise. Le rôle du Parlement est d'exercer un contrôle et celui de l'Etat de définir une stratégie, en aucun cas une ligne électorale.

M. Laurent Dominati - Nous n'avons parlé que du service public !

M. le Rapporteur spécial - L'intérêt de la convention d'objectifs et de moyens est justement de clarifier les responsabilités respectives de l'Etat et du gestionnaire de France-Télévision.

M. Laurent Dominati - C'est pourquoi nous souhaiterions la connaître !

M. le Rapporteur spécial - La commission est donc défavorable à ces amendements.

Mme la Ministre - J'y suis également défavorable. Monsieur Dominati, vous semblez vous plaindre que le milliard vienne trop tard. Que n'auriez-vous pas dit si le Gouvernement l'avait dégagé il y a un an, deux ans, sans utilisation précise ?

M. Laurent Dominati - Qu'il tenait sa parole !

Mme la Ministre - Il s'était engagé à donner les moyens nécessaires à l'entreprise quand elle en aurait besoin, pas à mettre à son compte un milliard deux ans trop tôt ! En ce qui concerne la redevance, Monsieur Dominati, quand on veut monter à l'étage, on ne commence pas par retirer l'échelle avant d'avoir construit un escalier.

M. Laurent Dominati - Nous sommes d'accord !

Mme la Ministre - Nous réfléchissons pour trouver une ressource pérenne et dynamique. M. Le Guen a émis des suggestions dans son rapport, dont par exemple une contribution du secteur des télécommunications. A la différence de certains de mes amis, je suis convaincue que la redevance est un des éléments de la reconnaissance du service public par les usagers.

M. Laurent Dominati - Si c'était le cas, il y aurait un meilleur taux de recouvrement !

Mme la Ministre - En tout cas, comme le rapporteur, j'attends vos suggestions.

M. Laurent Dominati - J'ai déposé une proposition de loi il y a trois ans !

M. Pierre-Christophe Baguet - Il y a une légère confusion au sujet du milliard. Votre prédécesseur en avait parlé avant qu'on n'aborde la question de la TNT. Il s'agissait de la compensation d'une perte de recettes publicitaires.

Par ailleurs, il ne faut pas nous caricaturer. Aucun d'entre nous ne vous a demandé de vous immiscer dans la gestion quotidienne de France-Télévision. Mais si nous avions pu prendre connaissance plus tôt des contrats d'objectifs et de moyens, cela aurait pu modifier la tonalité de nos débats.

Mme la Ministre - Le milliard est une compensation des exonérations par le budget. Le Gouvernement n'a jamais envisagé un tel cadeau !

Les amendements 47 et 58, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

La ligne 38 de l'état E, mise aux voix, est adoptée, de même que la ligne 39 de l'état E.

L'article 38, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur spécial - L'article 38 est très important et je souhaiterais expliquer la position de la commission.

M. le Président - Vous le pouvez, mais le vote reste acquis.

M. le Rapporteur spécial - Cet article concerne les aides en direction de la presse. La commission des finances l'avait repoussé dans un premier temps, pour des raisons purement techniques. Il s'agit en effet de mettre en place le fonds de modernisation de 80 millions qui doit aider à la distribution de la presse quotidienne. J'avais souhaité obtenir des garanties sur la solidarité des éditeurs de presse et sur le fait que l'opérateur prendrait ses responsabilités, afin que l'effort ne vienne pas entièrement de l'Etat. Nous avons obtenu ces garanties. Néanmoins, je souhaite inscrire dans la loi, à l'article 40, une modification des ratios entre les avances et les subventions. Ce point est aujourd'hui fixé par décret mais je pense préférable, s'agissant d'un secteur particulièrement en difficulté, qu'il figure dans la loi.

L'article 47, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 76

M. Pierre-Christophe Baguet - Notre amendement 131 vise à faire en sorte que la redevance audiovisuelle - dont le coût de recouvrement est de 900 millions pour un produit attendu de 14 milliards - soit perçue sur la base des indications fournies par le contribuable dans sa déclaration annuelle de revenus. Les effectifs affectés à son recouvrement pourraient ainsi être redéployés.

M. le Rapporteur spécial - Avis personnel défavorable, bien que je sois sensible à l'objectif poursuivi. Il est en effet d'autant plus légitime de dénoncer le coût excessif de recouvrement de cette taxe que le ministère des finances l'a dissimulé pendant des années ! Pour autant, la solution que vous préconisez n'est pas techniquement recevable...

M. Christian Cuvilliez - Elle est même parfaitement irréaliste !

M. le Rapporteur spécial - ...ne serait-ce que parce que la redevance est aussi perçue auprès de contribuables - professionnels, administrations... - qui ne souscrivent pas de déclaration de revenu.

Mme la Ministre - Défavorable.

L'amendement 131, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Nous en avons terminé avec l'examen des crédits du ministère de la culture et de la communication consacrés à la communication.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu lundi 12 novembre 2001, à 9 heures 30.

La séance est levée à le samedi 10 novembre 2001, à 0 heure 5.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            Jacques BOUFFIER

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ORDRE DU JOUR DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2001

A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 (n° 3262).

M. Didier MIGAUD, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Rapport n° 3320.)

· Intérieur

Sécurité :

M. Tony DREYFUS, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 31 du rapport n° 3320.)

Police :

M. Jean-Pierre BLAZY, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Tome II de l'avis n° 3324.)

Sécurité civile :

M. Jean-Antoine LEONETTI, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Tome III de l'avis n° 3324.)

Collectivités locales :

M. Gérard SAUMADE, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 32 du rapport n° 3320.)

M. René DOSIÈRE, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Tome IV de l'avis n° 3324.)

· Solidarité et santé ; économie solidaire

Solidarité :

M. Pierre FORGUES, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 19 du rapport n° 3320.)

Action sociale :

M. Francis HAMMEL, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome VIII de l'avis n° 3321.)

Rapatriés 

M. Marc LAFFINEUR, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 21 du rapport n° 3320.)

Santé :

M. Gilbert MITTERRAND, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Annexe n° 22 du rapport n° 3320.)

M. Jean-Pierre FOUCHER, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Tome X de l'avis n° 3321.)

A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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