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Session ordinaire de 2001-2002 - 25ème jour de séance, 60ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 13 NOVEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

FORMATION DES INFIRMIÈRES 2

MESSAGE DU 11 NOVEMBRE 2

SITUATION DE L'AFGHANISTAN 3

AGRESSIONS CONTRE DES POLICIERS 4

LICENCIEMENTS 5

RECONSTRUCTION DE TOULOUSE 5

CATASTROPHE DE TOULOUSE 6

POLITIQUE PÉNALE 7

MOULINEX 8

GENDARMERIE 9

POLITIQUE SPATIALE EUROPÉENNE 9

ACCORD DE MARRAKECH 10

FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR 11

LOI DE FINANCES POUR 2002
-deuxième partie- (suite) 11

ÉQUIPEMENT ET TRANSPORTS ;
AVIATION CIVILE 11

A N N E X E ORDRE DU JOUR 32

La séance est ouverte à quinze heures.

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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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FORMATION DES INFIRMIÈRES

M. Jean Pontier - Je me félicite que le Gouvernement se soit engagé, devant les besoins criants des hôpitaux, à recruter près de 45 000 infirmières sur trois ans. Pour pallier les manques, le recours à des infirmières ayant quitté la profession ou à de jeunes Espagnoles diplômées sans emploi a été évoqué mais non la promotion par la voie de la formation continue - droit pourtant reconnu à tout salarié. L'insuffisance des crédits du protocole Aubry et les limites des fonds spécifiques neutralisent cette voie de recrutement. Plusieurs aides-soignantes de ma ville de Tournon-sur-Rhône doivent ainsi renoncer au bénéfice du concours d'entrée à l'institut de formation ou sacrifier leurs revenus, les centres hospitaliers et les établissements médicaux ne disposant pas des crédits nécessaires pour financer sur trois ans les actions de formation continue. Le Gouvernement peut-il, au-delà du plan triennal, abonder les budgets des établissements de soins afin de promouvoir des personnels motivés et aptes à suivre les cycles d'études spécialisés en soins infirmiers ?

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - La réponse est oui ; je pourrais en rester là...

M. le Président - Merci, Monsieur le ministre... (Sourires)

M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé - Nous en avons parlé hier avec Mme Guigou en présentant le budget de la santé. Nous nous étions penchés sur la formation continue dès les protocoles de 2000, en y réservant un tiers de l'enveloppe de 2 milliards. Une circulaire avait réservé 15 % des places des instituts de formation en soins infirmiers aux aides-soignantes. Celles-ci représentent aujourd'hui 12 % des effectifs des instituts, qui vont former 25 346 infirmières.

Il est vrai que l'accès à la formation s'est heurté dans quelques centaines de cas à l'insuffisance de l'enveloppe financière des établissements. 900 millions réservés dans l'enveloppe 2001 permettront de traiter au cas par cas ces injustices, qui devraient disparaître en 2002 grâce au milliard apporté au Fonds de modernisation des établissements de santé (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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MESSAGE DU 11 NOVEMBRE

M. Jean Proriol - Dans la perspective des cérémonies du 11 novembre, le secrétaire d'Etat aux anciens combattants a adressé aux maires, par le truchement des préfets, un premier message devant être lu devant les monuments aux morts, puis un second qui s'est substitué en urgence au premier. Entre temps, il avait été expurgé de plusieurs paragraphes dont je vous livre des extraits : « Face à l'immense duperie de cette guerre... L'immense gaspillage de cette guerre abjecte (Exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) née du cynisme industriel (Mêmes mouvements)... qui n'a cessé, sous des formes multiples, de tenter de ramener l'humain à l'état d'objet (Mêmes mouvements)... Dans l'esprit de ceux que ne leurrait pas un patriotisme falsifié s'instillait un sentiment de révolte, d'absurdité, que rien n'aurait dû pouvoir effacer, et pourtant... » Quel est le mystérieux complexe militaro-industriel, argument traditionnel de l'extrême gauche, que nous sert un ministre de la République ? Les morts de 14-18, que vous accusez d'être les victimes d'un patriotisme falsifié, ne méritent-ils pas l'hommage de toute la nation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) Ou M. le secrétaire d'Etat a signé le premier message sans le lire, et il a manqué de vigilance, ou, plus grave, il l'a lui-même écrit, exprimant sa pensée profonde, voire celle du Gouvernement.

M. le Président - Venez-en à votre question.

M. Jean Proriol - Quel remords ou quelles pressions lui ont-ils inspiré une version plus politiquement correcte ? Maire depuis trente-neuf ans, j'ai toujours lu les messages du ministre, mais je m'y serais refusé cette année. Monsieur le Premier ministre, nous voulons des explications (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. le Président - La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants (Huées, « Démission ! » sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jacques Floch, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants - La rédaction d'un message s'adressant à la nation pour le 11 novembre requiert de se pencher sur l'histoire. Je revendique les deux messages (Huées sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). Après lecture du premier, j'ai estimé que certains mots pouvaient être fâcheusement détournés. Je regrette, Monsieur Proriol, que vous n'ayez pas lu l'ensemble du message lu devant les 36 000 monuments aux morts par l'ensemble des maires de France. Et, voyez-vous, j'ai enregistré depuis deux jours des réactions qui m'ont rassuré (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV ; huées sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

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SITUATION DE L'AFGHANISTAN

M. Robert Gaïa - Monsieur le Premier ministre, je souhaite approfondir le fructueux dialogue que nous avons engagé depuis le 11 septembre.

La situation de l'Afghanistan nous interpelle fortement. Nous avons tous été bouleversés par la mort sur le front de l'information de trois journalistes, dont deux Français, Johanne Sutton de RFI et Pierre Billaud de RTL. Les talibans ont subi une défaite cuisante en perdant les provinces du Nord puis Kaboul. L'Alliance du Nord va-t-elle poursuivre jusqu'aux frontières iranienne et pakistanaise ? Pendant ce temps, l'action diplomatique piétine. S'il y a des dialogues entre Afghans et entre leurs voisins avec la Russie et les Etats-Unis, si aux Nations unies les propositions françaises et britanniques sont débattues, on ne voit rien venir de concret.

Je suggère, à l'instar de notre collègue François Loncle, ancien journaliste, un code international pour garantir la sécurité des reporters sur les lieux de conflit.

D'autre part, je m'interroge sur le décalage croissant entre la situation militaire et le surplace diplomatique. Qui va gérer la victoire d'une coalition de chefs de guerre sans représentativité nationale ni projet ? Ce grand écart porte en germe un redoutable effet boomerang.

M. Lionel Jospin, Premier ministre - Je ne peux répondre sans évoquer comme vous la mémoire de Johanne Sutton, de Pierre Billaud et du journaliste allemand Volker Handloik, morts en Afghanistan, victimes de la violence et - au moins dans un cas - de la sauvagerie, victimes aussi de leur dévouement à la cause de l'information jusque dans les conditions les plus extrêmes.

Des développements militaires majeurs viennent de se produire : après Mazar-e-Charif, la prise de Kaboul, à la suite du retrait des talibans, renverse la situation.

Des offensives sont menées vers l'ouest, pour le contrôle d'Hérat, et au nord vers Konduz et Taloqan. Ces avancées semblent avoir abouti (« Ne nous lisez pas le journal ! » sur les bancs du groupe du RPR) Cela vous gênerait-il d'entendre évoquer devant l'Assemblée nationale des réalités qui sont par ailleurs naturellement retracées par les médias ? Estimeriez-vous que la représentation nationale ne doit pas débattre du moment que la presse rend compte des événements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

Ces avancées semblent avoir abouti à la reconquête des douze provinces du Nord et on peut penser que les talibans se regroupent actuellement dans des zones-refuges au sud et à l'est de Kaboul, où se trouvent vraisemblablement les réseaux d'Al-Qaida.

Cette évolution est positive, car elle autorise d'autres progrès stratégiques et ouvre un champ d'action nouveau à l'aide humanitaire.

La chute de Kaboul, la libération des provinces du Nord, l'éventualité de ralliements dans le sud ouvrent à la France et à la communauté internationale des possibilités qu'elles vont s'empresser d'utiliser pour acheminer cette aide.

Vous avez parlé de décalage entre les progrès militaires et la situation politique. Je préfère ce décalage au piétinement sur les deux plans, que nous déplorions il y a quelques jours. Pour autant, votre interpellation est juste, il faut que le plan politique rattrape le plan militaire.

La communauté internationale doit veiller à ce que le transfert du pouvoir à Kaboul et ailleurs s'effectue pacifiquement, dans le respect des droits de l'homme, et définir les formes de présence qui garantiront la paix civile et l'exercice impartial d'une autorité de transition, en attendant la constitution d'une instance représentative.

C'est à l'ONU de montrer le chemin à cet égard. La recherche d'une solution politique doit être accélérée, en associant toutes les composantes de la société afghane.

La France participera à l'effort humanitaire par le transfert de vivres, l'envoi d'équipes, la participation à la coordination, proposée par le Président de la République, au niveau de l'ONU.

La libération de Kaboul conforte le choix de la France de soutenir les efforts des Alliés pour écarter le régime illégitime et oppresseur des talibans. Il appartient à ces mêmes Alliés et à la communauté internationale de transformer ce succès militaire en victoire politique et de donner une perspective au peuple afghan, longtemps otage du terrorisme. Si nous y parvenons, ce sera la première victoire sur le terrorisme. Il restera a en gagner d'autres à l'échelle internationale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et sur de nombreux bancs du groupe communiste).

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AGRESSIONS CONTRE DES POLICIERS

M. Yves Fromion - Monsieur le ministre de l'intérieur, chaque journée apporte son lot d'informations calamiteuses sur l'insécurité dans notre pays (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) et sur la situation de plus en plus difficile des forces de l'ordre, sans que le Gouvernement y oppose une politique cohérente et efficace.

Deux policiers ont été victimes d'une tentative de meurtre la semaine dernière à Saint-Ouen. Comment se fait-il que l'auteur de ce crime se trouvait encore sur le territoire national, alors qu'il avait fait l'objet de nombreuses condamnations pour vols et infractions à la législation sur le séjour ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur - Dès le lendemain de ce drame, où deux policiers ont été blessés par balles, alors qu'ils effectuaient un contrôle routier, le directeur général de la police nationale est allé leur rendre visite et je le ferai moi-même dès qu'ils iront mieux (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

Cette affaire a ému non seulement l'ensemble des policiers, mais la population française, d'autant qu'elle survient après d'autres événements tout aussi inacceptables...

M. Jean-Louis Debré - Répondez à la question !

M. le Ministre - Monsieur Debré, on vous a vu à l'_uvre ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) Les réponses que nous apportons visent à donner aux policiers plus de sécurité et de compensations. La situation actuelle est le fruit de dérives dans la société, vous le savez très bien (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Toutes les agressions contre des policiers ont été élucidées et leurs auteurs traduits en justice. J'espère que les jugements seront sévères, s'agissant de policiers qui sont au service du droit et de la sécurité du pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

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LICENCIEMENTS

M. Patrick Malavieille - Après plusieurs années de baisse, le chômage est reparti à la hausse ces quatre derniers mois. Si elle n'est pas comparable à la situation d'avant 1997, cette hausse est très préoccupante. Comment pourrait-il en être autrement quand on voit des pans entiers de notre économie massacrés par des groupes dont les stratégies mutilent les hommes et les territoires ? Sur l'autel de la finance, on brise des vies et des pays. Les mêmes dirigeants économiques sont plus pressés de pétitionner contre la loi de modernisation sociale que de développer l'emploi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

Aujourd'hui les salariés de Moulinex qui luttent contre ces groupes sont représentatifs de tous les hommes et toutes les femmes frappés par les licenciements, comme ceux d'Alstom dans le Gard, où 113 salariés sont jetés à la rue.

S'il est nécessaire de mener une réflexion sur l'avenir de certaines filières industrielles, il n'en faut pas moins apporter des réponses immédiates aux situations concrètes. Madame la ministre, êtes-vous prête à mettre en _uvre rétroactivement les dispositions de la loi sur la modernisation sociale qui freinent les licenciements ? Quelles mesures sociales novatrices entendez-vous prendre pour répondre au désespoir des salariés ?

Cela permettrait à notre pays de retrouver le chemin de l'emploi (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - La situation est effectivement moins bonne aujourd'hui qu'il y a quelques mois et nous connaissons une hausse du chômage, heureusement sans comparaison avec celles du passé. Si nous résistons mieux que nos voisins européens, c'est parce que nous avons mis en place des politiques volontaristes et que l'emploi reste plus que jamais la priorité du Gouvernement.

Avec Christian Pierret nous mobilisons tous les moyens dont nous disposons pour trouver des solutions pour les salariés frappés par des licenciements économiques et, au-delà de cela, pour contenir la hausse du chômage. Le plan de soutien présenté par Laurent Fabius doit relancer la consommation. Des mesures spécifiques pour l'emploi - 100 000 stages et emplois aidés de plus - ont été décidées pour les salariés les plus fragiles. Nous mobilisons le service public de l'emploi pour un accompagnement personnalisé des chômeurs. Et bien entendu, nous appliquerons la loi de modernisation sociale qui va être votée définitivement par le Parlement dans les quinze jours à venir.

Si notre pays continue à créer plus d'emplois qu'il n'en disparaît, (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) c'est grâce à cette politique volontariste, qui tranche avec celle des gouvernements d'hier et avec l'absence absolue de propositions de l'opposition sur ce sujet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

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RECONSTRUCTION DE TOULOUSE

M. Philippe Douste-Blazy - Le 21 septembre, Toulouse a subi la plus grande catastrophe industrielle des cinquante dernières années dans l'Union européenne. Je voudrais dire toute ma gratitude aux collègues ici présents et aux élus locaux pour leur extrême solidarité.

Mais force est de constater que, huit semaines après la catastrophe, la reconstruction n'a pas véritablement commencé (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Plusieurs députés socialistes - Parlez-en au Maire !

M. Philippe Douste-Blazy - Je vous remercie, Monsieur le Premier ministre, d'avoir affecté 1,5 milliard à la reconstruction des équipements publics. Mais le problème est qu'il est impossible de traiter plus de cent logements par jour par manque de fenêtres, de vitres, et surtout d'aides financières car les sinistrés ne peuvent faire l'avance aux artisans. Peut-on créer un fonds d'urgence pour les aider à sortir du labyrinthe des expertises et contre-expertises ? Je crois que vous êtes acquis à cette idée. Pour qu'elle soit efficace, il faut des procédures dérogatoires en matière d'assurance. Peut-on avoir une obligation de résultat sur ce problème, qui ne doit pas faire l'objet d'un traitement administratif mais humanitaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement - Face à cette catastrophe exceptionnelle, la réponse de l'Etat a été exceptionnelle. Au-delà des 1,5 milliard, vous savez que l'Etat s'est mobilisé pour reloger les plus touchés qu'il a envoyé cent mobilhomes, mis en place des procédures dérogatoires pour utiliser tous les logements vacants du parc social, qu'il travaille avec la FNAIM, ce qui permet de trouver chaque jour une dizaine de logements dans le parc privé, comme vous savez que la mairie et l'Etat ont mis en _uvre une procédure de réquisition. Aussi n'y a-t-il plus personne dans les centres d'urgence.

Je pense donc que vous auriez dû mettre autant d'insistance à remercier l'Etat que les autres collectivités locales (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Je rappelle que le problème des fenêtres est à peu près réglé dans le parc social. D'ici la fin du mois, 7 000 logements seront placés sous le statut que nous appelons « provisoire durable », qui garantit la vue, la luminosité et la protection face aux intempéries et au froid. Les fournisseurs vous le diront, les fenêtres sont faites sur mesure et il est impossible aux entreprises d'y procéder du jour au lendemain sur les dizaines de milliers de fenêtres des appartements touchés à Toulouse. Cette stratégie donne satisfaction dans le parc social (Exclamations bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Ce n'est pas le cas dans le parc privé (Mêmes mouvements).

M. le Président - Du calme, s'il vous plaît ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

Mme la Secrétaire d'Etat - Le fonds d'urgence que vous demandez est constitué et nous y avons impliqué Totalfina. Pas une entreprise de Toulouse, de Midi-Pyrénées, de France ne manque à l'appel. Dès qu'une entreprise locale ne pourra accomplir un travail, le Gouvernement prendra en charge les frais de déplacement et d'hébergement d'une autre entreprise de France. Mais pourquoi vous, Monsieur le maire de Toulouse, n'avez-vous pas utilisé le fonds d'aide sociale de votre budget pour engager un plan d'urgence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Je regrette que l'Etat soit seul à faire l'effort qui s'impose ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. le Président - Je vous demande un peu de calme, ce sujet mérite d'être traité dans la dignité.

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CATASTROPHE DE TOULOUSE

M. Pierre Cohen - Depuis la catastrophe de Toulouse, force est de constater que la situation sur le terrain a peu évolué (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Messieurs, il faut analyser les raisons de ce blocage. L'impatience est légitime et plus d'un millier de personnes ont manifesté dimanche leur colère devant le retard à mettre « hors d'air » les logements sinistrés. La situation est aujourd'hui inacceptable. Malgré le plan d'aide de 1,5 milliard et les aides et allégements fiscaux....

M. Christian Jacob - C'est une honte !

M. le Président - Monsieur Jacob, de grâce ! (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Pierre Cohen - On s'émeut devant la faim dans le monde, on ne manifeste aucun respect envers ceux qui, à Toulouse, ont froid...

Malgré ces aides, malgré les garanties annoncées par Totalfina et des compagnies d'assurance, le traitement des dossiers a été beaucoup trop lent pour réaliser les travaux de première nécessité dans les meilleurs délais. La lourdeur des procédures, la mauvaise volonté des assureurs, la prudence de quelques syndics, l'irresponsabilité de Totalfina ne doivent pas l'emporter sur la ferme volonté politique que vous avez affichée. Quels moyens le Gouvernement peut-il mettre en _uvre pour débloquer de façon définitive cette situation ? Quel message rassurant pouvons-nous transmettre aux habitants qui vont faire face à des factures de chauffage élevées ? Peut-on les assurer qu'EDF, dans sa mission de service public, prendra en charge l'intégralité des surcoûts ?

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Devant une situation aussi grave, nos mots d'ordre doivent être, comme l'a demandé le Premier ministre, urgence et solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe UDF).

Je ne reviens pas sur les aides de l'Etat, elles sont tout à fait normales, mais j'apporte quelques compléments d'information. D'abord, il est indispensable d'alléger et d'accélérer les procédures d'indemnisation (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, sur les bancs du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe du RPR). Des mesures exceptionnelles ont été mises en place dans les jours qui ont suivi l'explosion, mais il y a eu des retards qu'il faut reconnaître. De nouveaux assouplissements sont nécessaires. Le plus important est d'alléger les procédures d'expertise et de cantonner les expertises contradictoires aux dossiers les plus lourds. 400 experts sont mobilisés. Ces améliorations récentes commencent à porter leurs fruits, mais des instructions ont été données pour aller plus loin dans ce sens.

En second lieu, il faut mettre en place des dispositifs transitoires pour parer au plus pressé. Totalfina et ses assureurs vont prendre en charge le financement des dépenses pour mettre hors eau et « hors air » les logements sinistrés. Ce qui a bien fonctionné dans le parc social va être étendu au parc privé (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

Enfin, ceux qui ont déjà tout perdu s'inquiètent de devoir payer cher l'énergie nécessaire face au froid qui vient. A l'initiative du Gouvernement, un accord sur la prise en charge des surcoûts de chauffage a été mis au point entre Totalfina et les fournisseurs d'énergie. EDF enverra des factures du même montant que l'an dernier et Totalfina a accepté, ce qui est normal, de prendre en charge directement les surcoûts (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe UDF). Ainsi, dans cette situation difficile avons-nous agi dans l'urgence, pour la solidarité (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, sur les bancs du groupe communiste, du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

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POLITIQUE PÉNALE

M. Jean-Luc Warsmann - Je veux remercier M. Fabius pour son propos empreint de dignité et de solidarité et qui répondait en cela à celui de M. Douste-Blazy ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Depuis quelques semaines, les Etats-Unis d'Amérique subissent un terrorisme d'un genre nouveau, avec des tentatives de contamination par le bacille du charbon par le moyen de courriers piégés. En France, des dizaines de personnes ont envoyé des lettres contenant de la poudre blanche pour provoquer de fausses alertes. Les actes sont inacceptables. Aussi, le 17 octobre, la ministre de la justice a-t-elle donné instruction à tous les procureurs généraux de poursuivre leurs auteurs en recourant à la procédure de comparution immédiate. Ces instructions ont été efficaces si l'on en juge par les condamnations prononcées : dès le 18 octobre, une personne a été punie de trois mois de prison en Charente-Maritime ; le 22, une peine de six mois avec sursis a été prononcée à Nancy ; le 25, une peine d'un mois ferme l'a été à Lorient et le 26, une autre de même durée à Metz.

Monsieur le Premier ministre, vous avez montré que la volonté d'un gouvernement permet de faire appliquer la loi et je vous dis donc : bravo ! (Applaudissements sur divers bancs) Cependant, depuis quelques mois, notre pays connaît aussi une recrudescence de la délinquance quotidienne : pourquoi ne pas y répondre de la même manière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Il ne saurait y avoir de justice à deux vitesses et je vous demande donc de donner instruction de faire rechercher au plus vite les auteurs de dégradations, d'incendies de véhicules et de trafics en tout gendre. Mobilisez les moyens de les faire juger rapidement et sanctionner effectivement ! En un mot, luttez contre cette délinquance avec la même fermeté que contre les envois de poudre blanche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice - Il est bien de reconnaître que, dans ce pays, il y a une politique pénale et qu'elle ne passe pas par des instructions individuelles mais par des circulaires réfléchies. Lors de la dernière conférence des procureurs généraux, nous avons d'ailleurs beaucoup travaillé sur le sujet mais l'instruction à laquelle vous faites référence était la cinquième ou la sixième depuis le début de l'année. Dans ce cadre, nous avons, comme vous le souhaitez, mis l'accent sur la répression de la délinquance quotidienne, s'appuyant ou non sur des réseaux. C'était en particulier le cas de la circulaire du 9 mai dernier, circulaire très commentée, certains magistrats du siège jugeant excessif qu'on demande aux procureurs de les informer sur la situation d'un quartier ou d'une commune. Mais la mesure nous paraissait nécessaire pour que les juges apprécient les sanctions qui s'imposaient.

Compte tenu des difficultés d'application de ce texte, nous avons négocié avec le Premier ministre - et obtenu sans difficulté - un plan d'action pour la justice comportant le recrutement de 1 200 magistrats supplémentaires afin d'améliorer l'exécution des peines en intervenant en aval des audiences.

En raison du rôle joué par les réseaux de délinquants, le ministre de l'intérieur et moi-même avons décidé en septembre de prolonger la circulaire du 9 mai par une circulaire commune et nous avons réuni procureurs et préfets en vue de lancer des actions ciblées contre cette délinquance quotidienne et tout ce qui la sous-tend - traite d'êtres humains, prostitution, trafic de stupéfiants, vol organisé de voitures.

L'entreprise sera de longue haleine, mais nous avons dégagé des moyens et donné les instructions nécessaires. J'espère donc que vous nous appuierez dans cette tâche qui requiert de tous une énergie quotidienne et non la polémique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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MOULINEX

Mme Laurence Dumont - Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, vous savez quelle tension règne aujourd'hui dans les sites du groupe Moulinex de Basse-Normandie, condamnés à la fermeture. De fait, à huit jours de leur licenciement, les 3 150 salariés de Bayeux, de Cormelles-le-Royal, de Falaise et d'Alençon ne connaissent toujours pas le contenu exact du plan social préparé par les administrateurs judiciaires ! L'énervement se fait donc jour, hier à Cormelles, un bâtiment a été incendié et, à Alençon, un moule a été détruit. Les comportements, nés de la détresse, sont compréhensibles s'ils ne sont pas excusables. Où en sont les négociations avec l'AGS, gérée par le MEDEF, sur le financement de l'accord d'entreprise de 1997, qui garantirait le versement d'une surprime de licenciement de 80 000 F ? Qui pourrait bénéficier des mesures d'âge et, en particulier, de la nouvelle allocation équivalent-retraite ? Quelles autres mesures d'accompagnement social sont envisagées ?

Je souhaite que vos réponses contribuent à apaiser le climat, en redonnant espoir à ces milliers de victimes d'une catastrophe industrielle (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité - Hier, à Alençon et à Cormelles, se sont en effet produits des événements dramatiques qui témoignent de l'exaspération et du désespoir des salariés mais qui ont été accompagnés de violences injustifiables. Je fais donc appel aux représentants des salariés et du patronat pour qu'ils arrivent à un accord sur les mesures proposées par le Gouvernement. M. Michel Bove a en effet élaboré à notre demande plusieurs propositions, portant aussi bien sur les possibilités de préretraites, sur les cellules de reclassement et sur des projets de reconversion et de formation, l'objectif étant que chacun des 3 140 salariés se voit offrir une solution.

Le coût de ces mesures s'élèverait à 600 millions. Cela étant, le débat se concentre aujourd'hui sur le montant de l'indemnité de licenciement. Actuellement, les assureurs et le patronat avancent un chiffre de 60 000 F et les salariés demandent 80 000 F de plus. M. Pierret et moi-même faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que se rapprochent les points de vue et pour qu'un effort supplémentaire soit consenti (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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GENDARMERIE

M. Renaud Donnedieu de Vabres - Parce que ce sont des militaires astreints à une obligation de réserve particulière, les gendarmes ont le sentiment d'avoir été laissés pour compte. Comme les policiers, ils sont en première ligne face à une délinquance en croissance vertigineuse et ils constatent que l'impunité progresse, faute du courage nécessaire pour imposer la tolérance zéro. Mais il connaissent aussi une situation spécifique : l'addition des contraintes liées au plan Vigipirate, à la protection des convois d'euros et de leur devoir de présence, en ville comme en milieu rural, pose avec acuité la question de leurs conditions de travail, celle du régime des permissions et celle de la récupération des heures supplémentaires et des astreintes. Cette récupération est d'ailleurs toute théorique puisqu'ils ne bénéficieront pas, eux, des 35 heures !

Monsieur le ministre de la défense, quand allez-vous répondre à leurs légitimes demandes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Alain Richard, ministre de la défense - Dans les tout prochains jours ! Et si à votre habitude vous nous faites l'honneur de participer après-demain au débat sur les crédits de la défense, nous pourrons évoquer à la fois ces réponses et les moyens de les financer.

Il est vrai que les gendarmes sont sollicités très fortement depuis quelques mois, mais ils peuvent s'exprimer - et s'expriment - sur le sujet par les voies normales de concertation. Un effort pour réduire leurs charges de travail et pour libérer un peu de leur temps a été fait l'an dernier mais nous ne pourrons, pour l'instant du moins, aller beaucoup plus loin. Les mesures à prendre auront donc la forme de compensations indemnitaires et de créations de postes.

Vous évoquez le devoir de réserve : je veux rappeler à ce propos que les gendarmes élisent leurs représentants dans leurs unités et qu'ils sont représentés également, au niveau national, au sein du Conseil de la fonction militaire, de sorte qu'il existe toujours pour eux un dialogue social. Ces derniers mois, ils ont ainsi pu définir leurs priorités professionnelles, auxquelles le Gouvernement sera attentif. Voyez-en le gage dans le fait que j'assiste depuis quatre ans et demi à toutes les réunions du Conseil de la fonction militaire - alors qu'au cours des quatre années précédentes, le ministre n'avait honoré de sa présence qu'une de ces sessions sur huit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

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POLITIQUE SPATIALE EUROPÉENNE

M. Christian Cabal - Demain s'ouvre à Edimbourg un conseil européen des ministres chargés de l'espace qui va décider de la politique à mener dans les trois années à venir. Il risque de prendre des décisions qui nous engageront pour longtemps, et irrévocablement. Or, dans ce domaine, notre gouvernement se montre attentiste, se contentant d'engranger les bénéfices des actions engagées par ses prédécesseurs. Ainsi en ce qui concerne le CNES, créé par le général de Gaulle, encore une fois visionnaire : le financement de son contrat d'objectifs reste très hypothétique...

Plus grave : devant notre frilosité, nos partenaires allemands et italiens songent à se désengager des actions communes.

Pour que l'exploit scientifique de Claudie Haigneré se réédite, qu'Ariane ait un successeur, que l'Europe conserve son leadership dans le domaine de l'environnement, lié à ses satellites d'observation de la Terre tels qu'Envisat, ou que nos forces armées disposent d'informations satellitaires, le Gouvernement doit sortir du « provisoire durable » qui paraît devenir sa maxime, engager nos partenaires européens à s'impliquer davantage dans la politique spatiale (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - M. Gayssot, qui est retenu à Edimbourg, m'a prié de vous faire connaître sa réponse... (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Je voulais bien sûr parler de M. Schwartzenberg. Notre pays tient à conserver sa place d'excellence dans l'industrie spatiale et à assurer la convergence des efforts industriels européens. C'est pourquoi nous avons décidé, au niveau européen, de réduire les coûts du programme Ariane pour garantir sa pérennité. Notre pays est en pointe dans ce domaine et c'est grâce à lui que l'Europe peut se targuer d'avoir une des meilleures industries aérospatiales du monde.

M. le Président - Il conviendra de féliciter M. Gayssot pour la rapidité de son déplacement (Sourires).

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ACCORD DE MARRAKECH

M. André Aschieri - Avant d'être un enjeu politique et écologique, l'effet de serre est un concept scientifique établi depuis maintenant un siècle. Un accord vient d'être conclu à Marrakech sur l'application du protocole de Kyoto, qui inspire des inquiétudes. Pourtant, le processus arrive à son terme. L'objet de la conférence aurait dû être de confirmer les acquis de Bonn, malgré l'opposition des Etats-Unis - que vous avez été un des seuls ministres à dénoncer - qui ont rejeté en mars le protocole de Kyoto en le jugeant vicié. Grâce à l'adhésion du Japon et de la Russie, ce protocole va devenir opérationnel. Que représente alors l'accord de Marrakech et de quelles garanties d'application disposons-nous, assorties notamment de quelles sanctions ? Quels progrès peut-on attendre de l'organisation qui sera mise en place au sommet de Johannesburg en 2002 en matière de réduction des gaz à effet de serre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - La conférence de Marrakech a confirmé l'intention de tous les pays, à l'exception des Etats-Unis, de ratifier le protocole de Kyoto. Le Parlement français l'a fait il y a un an et demi. Nous attendons cette ratification avant le sommet de la Terre qui aura lieu à Johannesburg en septembre 2002. Les pays éligibles au mécanisme posé par le protocole pourront procéder à des échanges et des transferts de technologie avec les pays du sud, faire de la mise en _uvre conjointe avec les pays de l'est européen ou opérer sur le « marché des permis d'émission », sous réserve du respect du système d'observance - le terme juridique international étant « compliance » - qui n'est pas autre chose qu'un système de sanctions. Ainsi, si un pays n'atteint pas ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre d'ici 2010, il ne sera plus éligible au mécanisme, ou devra faire un effort supplémentaire. Cet accord est aux trois quarts positif. Même si nos amis américains n'en font pas encore partie, la porte reste ouverte pour améliorer nos conditions climatiques (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

La séance, suspendue à 16 heures 5, est reprise à 16 heures 35 sous la présidence de Mme Lazerges.

PRÉSIDENCE de Mme Christine LAZERGES

vice-présidente

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FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

Mme la Présidente - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 29 novembre 2001 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents. Il sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, en application de l'article 61-5 du Règlement, la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2002 auraient lieu le mardi 20 novembre, après les questions au Gouvernement.

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LOI DE FINANCES POUR 2002 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002.

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ÉQUIPEMENT ET TRANSPORTS ; AVIATION CIVILE

Mme la Présidente - Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement, concernant l'équipement et les transports et le budget annexe de l'aviation civile.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial de la commission des finances pour les transports terrestres - Je rappelle en préambule que le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables a été clos le 31 décembre 2000 par l'article 35 de la loi de finances initiale pour 2001, et je confirme que, comme le ministre s'y était engagé, les crédits disponibles de ce fonds ont été intégralement reportés sur les chapitres correspondants de la section « Transports » du budget.

M. Michel Bouvard - C'est exact.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - J'en viens aux crédits pour 2002, pour constater que les moyens des services et les interventions publiques s'élèvent à 4,3 milliards d'euros en crédits de paiement, en progression de 5 %. J'ajoute que 85 emplois nouveaux doivent être affectés, dans les DDE, aux opérations de « viabilité hivernale »...

M. Michel Bouvard - Alors là !

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - ...mais pensez-vous que cela sera suffisant, Monsieur le ministre, au moment où l'on passe aux 35 heures ?

M. Michel Bouvard - Non !

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - L'Etat doit pourtant assumer ses responsabilité, et le déneigement incombe à vos services. (M. Michel Bouvard applaudit) Pour ne rien vous cacher, j'éprouve quelques craintes.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - Pour les voies navigables, les dépenses ordinaires baissent, ce qui traduit l'achèvement des plans sociaux, mais les dépenses en capital progressent fortement.

Le Gouvernement a défini trois priorités : le développement des transports en commun urbains, le renouveau du transport ferroviaire et l'entretien du réseau routier national. S'agissant des transports collectifs d'Ile-de-France, les crédits progressent de 1 %. Depuis un décret de 2000, cette subvention comprend l'ancienne indemnité compensatrice et les réductions tarifaires. Je me félicite, qu'un titre de transport offrant 50 % de réduction aux personnes modestes bénéficiaires de la CMU soit institué au 1er janvier 2002, conformément aux dispositions de la loi SRU.

Le trafic de la RATP a fortement progressé en 2000, et les prévisions pour 2001 montrent qu'il se stabilise. La situation de l'entreprise s'améliore puisque son résultat comptable pour 2000 était à nouveau positif. Cependant, sa dette qui excède 4,18 milliards d'euros n'est maîtrisée qu'en raison du faible niveau d'investissement observé en 2000. On peut donc craindre que les investissements prévus dans l'ambitieux contrat de plan Etat-région n'aient pour conséquence d'accroître son endettement.

L'effort en faveur des transports collectifs de province est particulièrement significatif puisque la dotation de l'Etat atteint 204,28 millions d'euros en autorisations de programme, et que les crédits de paiement progressent de 21 %. Se trouve ainsi traduit l'engagement que vous aviez pris, Monsieur le ministre, lors de la discussion sur le projet de loi SRU.

S'agissant du transport ferroviaire, l'enjeu de l'année 2002 est, sans conteste, la régionalisation. Je me réjouis qu'une mesure nouvelle de 205,8 millions d'euros permette aux nouvelles autorités organisatrices que sont les régions de renouveler une partie du matériel roulant. J'espère que cet effort sera durable.

La régionalisation conduit à porter la dotation destinée aux transports régionaux à 1,5 milliard d'euros. Cette augmentation s'accompagne de la suppression de la subvention versée à la SNCF pour ses services régionaux. De ce fait, la progression nette de la dotation au transport régional est de 543,9 millions d'euros, ce qui est déjà très positif.

En 2002, 1 439 millions d'euros seront consacrés à la décentralisation des services ferroviaires régionaux de voyageurs. Cette augmentation de 12 % illustre la détermination du Gouvernement à régionaliser le transport ferroviaire dans les meilleures conditions possibles.

Si la politique de la SNCF semble porter ses fruits, au vu des résultats constatés en termes de trafic, ses résultats financiers ont été révisés à la baisse pour l'exercice 2001 en raison de l'impact - estimé à 130 millions d'euros - du mouvement social qui a touché l'entreprise au printemps et des mesures budgétaires correctives. Le déficit atteindrait donc 162 millions d'euros. Ces difficultés prévisibles rendent d'autant plus urgente la compensation par le ministère de la défense de l'application des tarifs appliqués aux militaires. Pouvez-vous confirmer, Monsieur le ministre, que la loi de finances rectificative pour 2001 prendra en compte les montants dus pour 1998 et 1999 ? Plus généralement, il convient d'apurer ce déficit structurel.

L'activité fret, qui a progressé de plus de 6,2 % en 2000, s'est repliée de 5,1 % au premier trimestre 2001. Je me félicite que la SNCF puisse enfin acheter 604 locomotives neuves destinées au fret. Néanmoins, de grands efforts restent à accomplir pour décongestionner les axes routiers, notamment en zone montagneuse. Certes, les contrats de plan Etat-régions prévoient déjà la réouverture de la ligne entre Pau et Canfranc et le prolongement éventuel de son exploitation jusqu'à Saragosse. Par ailleurs, une relation transalpine de ferroutage sera établie entre Aiton - France - et Orbassano - Italie. De plus, le projet de liaison à grande vitesse entre Lyon et Turin, prévue pour 2015, permettra l'acheminement du fret.

Mais il reste à organiser, aussi, le ferroutage à travers les Pyrénées.

Le désendettement du secteur ferroviaire se poursuit et le Gouvernement reconduit pour une année supplémentaire l'apport en capital à RFF qui s'établira donc à nouveau à 1,83 milliard d'euros.

Cette mesure est cependant exceptionnelle, le programme de désendettement s'étant achevé en 2001. Que comptez-vous faire désormais pour assurer le désendettement de RFF ?

Votre budget privilégie notamment l'entretien du réseau routier. Les crédits d'entretien et de maintenance progressent de 5,52 millions d'euros. Pour les crédits relatifs à l'entretien préventif, à la réhabilitation et à la sécurité des infrastructures, les autorisations de programme augmentent de 5 % et les crédits de paiement de 1,4 %. Le Gouvernement maintient ainsi - et je vous en remercie - une vigoureuse politique d'entretien des routes, amorcée il y a trois ans après un déclin dont la Cour des comptes a rendu compte.

Les crédits relatifs aux investissements routiers nationaux progressent de 33,79 % en autorisations de programme, les crédits de paiement de 0,20 % seulement. Cette ligne a été abondée suite à la clôture du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables de 378 millions d'euros en crédits de paiement et de 4,88 millions en autorisations de programme. Elle doit financer le volet routier des contrats de plan, mais leur taux d'avancement ne s'établira qu'à 25 % fin 2001 et 38,3 % fin 2002 au lieu des 42,8 % prévus. Comment bouclerons-nous les contrats de plan ? J'espère que l'Etat va rattraper ce retard.

Au total, les crédits des routes augmentent de 4,7 % en autorisations de programme et de 18,8 % en crédits de paiement. Ils subissent des retards d'engagement dus aux lenteurs du contrôle financier déconcentré, ce qui est d'autant moins acceptable qu'on en arrive à les engager en période d'affluence sur les routes. Les reports des crédits ne sont pas toujours effectifs. Une plus grande prévisibilité permettrait d'engager sans inquiétude des opérations en fin d'exercice, donc d'améliorer les délais des travaux et, partant, l'efficacité du service public.

La sécurité routière reste prioritaire. Ses crédits progressent de 19 % en autorisations de programme. L'effort financier total de l'Etat atteint 1,54 milliard d'euros.

S'agissant de la sécurité dans les tunnels, on peut se demander si les crédits considérables consacrés à atteindre un illusoire risque zéro ne seraient pas mieux employés à assurer la sécurité sur tout le réseau routier, notamment en montagne.

M. Michel Bouvard - Voilà une question de bon sens.

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - Je vous remercie de votre décision sur le tunnel du Mont-Blanc.

M. Michel Bouvard - Très bien !

M. Augustin Bonrepaux, rapporteur spécial - Il aurait été irresponsable de ne pas le rouvrir dans les conditions proposées, alors que la circulation était reportée sur la vallée de la Maurienne chère à M. Bouvard et le tunnel de Fréjus qui est moins sûr (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR). Mais il est aussi aberrant d'interdire le passage des camions dans le tunnel de Foix - le plus moderne de France - où l'on pourrait opter pour une circulation alternée, au lieu de faire passer les poids lourds en ville. Je vous serais reconnaissant d'examiner cette possibilité.

La réforme du secteur autoroutier a été lancée par l'ordonnance du 28 mars 2001, ratifiée par la loi du 5 novembre. Elle élargit la concurrence pour l'attribution de nouvelles concessions et apporte les moyens nécessités par l'abandon de l'adossement. Comment utiliserez-vous le produit de l'ouverture au capital d'ASF ?

Votre budget est un bon budget, qui s'inscrit dans la suite logique de cette législature. C'est donc sans réserve que la commission des finances l'a adopté et vous demande, mes chers collègues, de faire de même (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission de la production pour l'équipement et les transports terrestres, maritimes et fluviaux - Ce budget continue de poursuivre un objectif de régulation des transports, avec l'ambition d'en faire un outil de développement et d'échange au service de la nation. Le Gouvernement s'attache à équilibrer les modes, en privilégiant les modes propres comme le ferroviaire, avec l'approbation de nos concitoyens.

En engageant en 1998 la « réforme de la réforme », il a libéré la SNCF d'une dette asphyxiante, doté le système ferroviaire des moyens de mieux produire, et permis une évaluation.

Les crédits de votre ministère pour 2002 s'élèvent à plus de 23 milliards d'euros. En hausse de 2,8 %, ils traduisent la forte priorité accordée aux transports. S'y ajoutent la dotation de 1,8 milliard d'euros à RFF pour réduire son endettement et les dividendes des SEM autoroutières pour 152 millions d'euros, qui serviront à la politique intermodale. Au total, il s'agit donc de 25 milliards d'euros.

Pour la deuxième année consécutive, après 18 ans de baisse, une augmentation des effectifs de votre ministère est enregistrée. Ces 1 500 agents supplémentaires concernent principalement la sécurité et les polices urbaines. Plus d'un millier de postes sont créés pour régulariser des emplois précaires.

Ce budget privilégie la multimodalité et la sécurité dans les transports.

La multimodalité conduit à doubler l'enveloppe ferroviaire sur cinq ans. De même, les engagements de la loi SRU sont tenus avec la généralisation du transfert des services régionaux de voyageurs, qui induit une augmentation de 30 % des dotations versées aux régions. Les moyens d'exploitation et le matériel roulant, auparavant entièrement financés par la SNCF, seront ainsi accrus, l'Etat y consacrant plus de 220 millions d'euros. Je relève particulièrement l'enveloppe des contrats de plan et du TGV-Est européen. Ces efforts ne doivent pas être contrariés par le peu d'avancement des études, car nous en restons à une hypothèse de moins de 50 % de réalisation des contrats de plan. Je salue les efforts de rationalisation de la SNCF, mais seront-ils suffisants ?

Les sommes consacrées l'an dernier aux transports collectifs sont consolidées au profit des projets inscrits au contrat de plan Etat-région de l'Ile-de-France.

Je souligne enfin les moyens consacrés à l'entretien du patrimoine routier, qui permettront d'accélérer la réparation des ouvrages d'art, en progressant de 7 %.

La sécurité revêt une grande importance pour nos concitoyens. Si le système transport n'est pas comparable aux autres moyens de production, c'est qu'il est exposé aux sursauts de la société. Peut-il faire face à ces situations ? Non ! L'Etat doit prendre ses responsabilités.

En 2002, les crédits de la lutte contre l'insécurité routière, atteindront près de 100 millions d'euros, soit 8 % de plus que l'an passé, et près de 43 % de plus en trois ans. Cette augmentation est notamment destinée à l'amélioration de la sécurité des infrastructures.

S'agissant de la sécurité maritime, les moyens de paiement augmentent de 23 %. Les créations d'emplois seront poursuivies, particulièrement pour les inspecteurs de la sécurité maritime afin d'atteindre l'objectif d'un doublement des contrôles des navires dans les ports français. Il faudrait accentuer l'effort au bénéfice du transport fluvial, moins marginal que par le passé.

Je salue le travail réalisé par la présidence française de l'Union européenne qui a permis de faire avancer les négociations sur l'harmonisation des conditions de travail des conducteurs de poids lourds et le contrôle technique des véhicules utilitaires. D'autres textes sont en préparation, notamment le règlement relatif aux contrats de service public, pour lequel la France a affirmé son attachement au libre choix par les collectivités territoriales de leur mode de gestion des services publics locaux, et souligné les dangers d'une concurrence non régulée. Il faut saluer la prise de conscience de la Commission européenne qui, dans son Livre blanc sur la politique des transports à l'horizon 2010, reconnaît la nécessité de rééquilibrer les modes de transport et de développer le fret ferroviaire et les modes de transport alternatifs. Mais une telle politique ne pourra être engagée sans une mobilisation énergique des aides européennes.

Je reviens sur l'un des événements majeurs de 2002, l'extension de la régionalisation à tout le territoire national, qui attribue les compétences TER aux régions, hormis l'Ile-de-France.

Cette disposition est issue de la loi SRU et une large majorité l'a soutenue ici après le succès de l'expérimentation engagée en 1997.

Les chiffres sont parlants : dans les sept régions ayant participé à l'expérimentation, entre 1996 et 2000, les trafics TER et les recettes ont augmenté respectivement de 21,6 % et de 20,7 %, contre 13,4 % et 13 % pour les autres régions.

Ce transfert de compétence a été préparé tout au long de l'année 2001 afin d'évaluer les coûts de fonctionnement et les contributions de l'Etat.

La loi de finances 2002 prévoit une contribution aux services régionaux de 1 507 millions d'euros, soit 364 millions de plus qu'en 2001. Sur ce total, la contribution à l'exploitation absorbe 1 046 millions d'euros, la compensation des tarifs sociaux 180 millions d'euros, la dotation pour le matériel roulant 206 millions d'euros.

Pour les gares, il a été convenu avec les régions qu'un programme serait élaboré après un état des lieux.

L'engouement pour les transports propres est manifeste. Les voies navigables enregistrent une augmentation sensible depuis 1996, plus 12,6 % en tonnage de fret et 19,5 % en tonnes-kilomètres. Le trafic voyageurs des TER, mais aussi des grandes lignes évolue aussi positivement. Malheureusement, il n'en va pas de même pour le trafic marchandises : 2001 marque un recul d'environ 8 %, dont la moitié due au mouvement social du printemps. Le défaut de qualité du transport ferroviaire rejette les chargeurs vers le mode routier, souvent malgré eux. Ce budget fournira les moyens de faire face à la croissance du trafic voyageurs, de rénover les réseaux, d'acheter des locomotives. Il faudra, il est vrai, remédier aux difficultés du fret, restructurer les goulets d'étranglements, nombreux sur le territoire national, faire face au manque de moyens d'investissement du système ferroviaire et à son endettement endémique. Je reste préoccupé par les difficultés du transport combiné, en chute de près de 12 %. La Commission européenne a interdit de le subventionner, alors que la concurrence avec le mode routier n'est pas loyale puisque celui-ci n'intègre pas les coûts externes.

Malgré ses difficultés, notre système ferroviaire reste une référence dans le monde ; le fret ferroviaire est le plus important d'Europe, le TGV est un modèle envié partout. La régionalisation des transports de voyageurs devrait encore donner un coup de fouet au trafic. Une grande partie de ces évolutions positives relève de l'engagement actif du Gouvernement.

Cette politique est la bonne, il est nécessaire de la poursuivre. La commission a donné un avis très favorable à votre budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial de la commission des finances pour les transports aériens et la météorologie - J'aurais préféré commenter ce budget dans des conditions moins dramatiques que celles que nous impose l'actualité. Si nos premières pensées vont aux victimes, nous ne pouvons pas nous désintéresser des conséquences économiques de ces drames.

Les compagnies américaines ont perdu 60 % de leur chiffre d'affaires sur les lignes intérieures, Air France a perdu 30 % de son trafic sur l'Atlantique nord et pour septembre la perte avoisine 60 millions d'euros. KLM a réduit ses capacités, tandis que Swissair et Sabena ont déposé leur bilan. Au total, les pertes de revenu des treize premières compagnies européennes devraient s'élever, d'ici fin 2001, à 3,6 milliards d'euros.

Vous avez, Monsieur le ministre, pris des mesures opportunes, mais à mon sens timides. Vous avez annoncé le déblocage d'un milliard de francs pour renforcer la sûreté et dédommager les pertes d'exploitations subies par certaines compagnies. Mais aucune modalité de versement n'a été déterminée et ces sommes ne sont pas à la mesure de l'ampleur de la crise.

En outre, le Gouvernement n'a pas pris de position sur les surprimes d'assurance. Les compagnies ont été confrontées à la résiliation des contrats couvrant les risques de guerre puis, dans un second temps, au rétablissement très partiel de leurs garanties moyennant une augmentation ahurissante de leurs primes, l'Etat intervenant en complément du marché pour reconstituer les garanties.

Cette solution est transitoire et le secteur aérien est dans la plus totale incertitude.

Sur le plan social, la crise se traduit par la non-reconduction des contrats à durée déterminée, l'annulation des embauches, la suppression de l'intérim, l'apuration des soldes de congés et de RTT. Mais ces mesures seront sans doute insuffisantes au regard d'une crise qui s'annonce longue.

Les subventions directes proposées par le Gouvernement ne sont pas destinées aux compagnies aériennes, mais, pour l'essentiel, aux aéroports et compensent les coûts supplémentaires de sûreté. Mais je rappelle que la sûreté est une mission régalienne, dont la prise en charge relève de l'Etat. A cet égard, la taxe additionnelle de 15 F prélevée sur chaque passager s'analyse en une charge pour les entreprises, alors que le plan Vigipirate dans les gares et les trains n'est pas financé, lui, par une surtaxe sur les billets. Nous attendons de vous des précisions sur la date et les modalités du versement des aides aux professionnels du transport aérien, tous métiers confondus.

L'analyse des crédits de l'aviation civile pour 2002 est frappée d'incertitudes depuis le 11 septembre. En effet, ce budget se fonde sur des hypothèses économiques que l'attentat du World Trade Center a complètement remises en cause. La forte diminution du trafic aérien réduira par exemple le produit de la taxe de l'aviation civile et de la redevance de route. Si l'on s'en tient aux hypothèses antérieures au 11 septembre, le budget annexe de l'aviation civile pour 2002 s'établit à 1,41 milliard d'euros, contre 1,32 milliard d'euros en 2001. Le produit de la redevance de route y est évalué à 850,5 millions d'euros, celui des redevances pour services terminaux à 188,8 millions d'euros. Mais la diminution du trafic va remettre en cause l'ensemble des recettes de l'aviation civile dans une proportion que nous ne pouvons calculer. Assez curieusement, compte tenu des circonstances, les deux principaux chapitres budgétaires relatifs aux infrastructures et à la sûreté diminuent de 7,2 % en crédits d'investissement. Mais le Gouvernement n'a pas indiqué s'il escomptait allouer des dotations supplémentaires à la sûreté. Je déplore d'ailleurs que le chapitre 82-01 retrace dans le même article les dépenses d'infrastructures et les dépenses de sûreté, qui ne relèvent pas de la même politique.

La plus grande confusion règne actuellement en ce qui concerne le choix des dépenses d'infrastructures. Aéroports de Paris veut développer l'aérogare CDG1, alors qu'Air France ne peut faire de prévision de croissance avant plusieurs mois. ADP souhaite également développer le satellite E, mais les pouvoirs publics interdisent l'utilisation à pleine capacité de la quatrième piste, pour amoindrir les nuisances sonores. La présentation du budget annexe n'apporte aucune information fiable en la matière, ce qui me conduit à proposer un amendement tendant à individualiser les investissements d'infrastructure d'un côté, les investissements de sûreté de l'autre.

Le Comité des investissements à caractère économique et social, présidé par le ministre de l'économie, vient de refuser le programme d'investissements présenté par ADP. Pourquoi ? Est-ce, comme les compagnies aériennes l'ont dit parce que ce programme ne correspond pas à leurs besoins ?

Autre problème, la fiscalité sur le transport aérien. Le Gouvernement continue d'alourdir les taxes qui pèsent sur les passagers. Elles atteignent désormais, sur les lignes intérieures, près du tiers du prix du billet. Un aller et retour Paris-Marseille revient ainsi à 88 euros, auxquels s'ajoutent 5 euros de TVA et 24 euros de taxes et redevances aériennes diverses.

Or le principal concurrent d'Air France est désormais le TGV ; dès qu'il relie deux villes en moins de trois heures, l'avion perd de 60 % à 80 % de la clientèle. Surchargé de taxes, le trafic aérien ne peut que s'effondrer, d'autant que le transport ferroviaire n'assume pas ses dépenses d'infrastructures et de sécurité.

Une fiscalité plus lourde pèsera sur le coût de gestion des compagnies secondaires, les condamnant à disparaître ou à devenir des sous-traitants d'Air France, comme c'est déjà le cas pour certaines. Elle mettra également en cause la survie des petits aéroports : Nîmes ou Béziers seront ainsi condamnés par la proximité du TGV ou de l'aéroport plus important de Montpellier.

Dans le même ordre d'idées, le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, ne répond plus à sa vocation initiale qui était de subventionner les lignes déficitaires avec la province, dans un souci d'aménagement du territoire. La Cour des comptes vient d'en demander la suppression et pour ma part, je proposerai par amendement, lors de l'examen des comptes spéciaux du Trésor, de supprimer ses crédits et d'en reverser le montant au budget des transports.

Je terminerai par la question du nouvel aéroport. Depuis neuf ans, les gouvernements essaient de faire croire aux riverains des installations actuelles que le déplacement supprimera les nuisances dont ils sont victimes. Ce n'est pas le cas. En fait, seule la logique de hub permet aux compagnies d'être rentables. Roissy a été conçu pour accueillir 80 millions de passagers, il faut que cette plate-forme remplisse cet objectif. Investir ailleurs, par exemple à Chaulnes en Picardie, serait coûteux et inutile.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Un député a quitté votre groupe sur cette question.

M. Gilbert Gantier - L'aéroport de Mirabel, à 80 km de Montréal a été délaissé par les compagnies, qui le jugent trop éloigné. Créer un troisième aéroport parisien, c'est gaspiller 40 milliards à une époque où l'on souhaite éviter une urbanisation massive. Le construire dans la Somme, c'est déplacer le problème en obligeant l'Etat à créer des infrastructures supplémentaires.

Si le problème tient principalement aux nuisances sonores, l'Etat et Aéroports de Paris pourraient indemniser les riverains les plus menacés pour leur permettre de s'installer ailleurs.

M. le Ministre - Vous êtes pour l'exode.

M. Gilbert Gantier - Ce serait la solution la moins coûteuse.

Je ne puis donc approuver ces crédits. La commission ne m'a pas suivi. A l'Assemblée de décider.

M. François Asensi, rapporteur pour avis de la commission de la production pour les transports aériens - L'onde de choc du 11 septembre a touché toute la filière aéronautique mondiale. Mais dès le premier semestre, le ralentissement de la croissance et la hausse du prix du kérosène affectaient les résultats des compagnies en Amérique du nord. En Europe, Swissair, British Airways, KLM ont connu des difficultés, et Sabena vient d'annoncer 6 000 licenciements. L'Asie est également touchée. Une fois encore, les salariés vont subir les effets de la crise. Aux Etats-Unis par exemple, les compagnies ont présenté des plans sociaux si rapidement après le drame que cela ne fait aucun doute : ces plans étaient préparés depuis longtemps.

L'industrie aéronautique n'est pas épargnée non plus. Airbus a révisé ses prévisions de fabrication, Boeing envisage 30 000 licenciements d'ici 2002.

Dans ce contexte, les entreprises américaines ont obtenu près de 20 milliards de dollars d'aides gouvernementales, découvrant ainsi les vertus de l'interventionnisme... Il est regrettable qu'elles se livrent à des pratiques tarifaires très agressives sur les lignes transatlantiques. Il faut dénoncer ces pratiques et la négociation d'un code de bonne conduite entre l'Europe et les Etats-Unis par la Commission européenne devrait rétablir une concurrence plus loyale.

Vous avez prévu deux milliards de francs pour renforcer la sûreté et la sécurité dans les aéroports. Des aides supplémentaires seront sans doute nécessaires, malgré les réserves de Bruxelles, si le dumping continue sur l'Atlantique nord.

Une fois la crise conjoncturelle passée, on peut espérer une croissance de 5 % par an pour le trafic passagers, et de 10 % dans la zone Asie-Pacifique. Pour l'instant, les compagnies adoptent des politiques de repli. Dans ce contexte, celles qui s'en sortent le mieux sont Air France et Lufthansa.

Jusqu'au 11 septembre, Air France affichait des résultats satisfaisants, après la recapitalisation par l'Etat, la fusion avec Air Inter, le développement du hub. Depuis, le trafic a diminué de 7 %, mais la compagnie doit consolider ses atouts pour maintenir son avance lorsque la confiance reviendra.

En revanche, AOM et Air Liberté ont été victimes d'une politique de diversification hasardeuse, de l'irresponsabilité des actionnaires et d'erreurs de gestion manifestes des dirigeants de Swissair. Leur avenir reste incertain. Je souhaite qu'Air France s'engage à réemployer les salariés de ces compagnies dès que les conditions de reprise seront établies et bénéficie d'aides de l'Etat pour prévoir des conventions de préretraite. Il faut maintenir un deuxième pôle aérien français pour répondre à la demande régionale croissante.

Face à ces enjeux, il faut être très attentif à la capacité de nos aéroports, alors que le Gouvernement s'apprête à choisir la localisation de la future infrastructure.

Depuis le 11 septembre, l'activité de Roissy a diminué de 36 %. Les sociétés de service, les sous-traitants ont été très affectés. Des salariés fragiles, peu qualifiés, des jeunes et des familles de Seine-Saint-Denis sont menacés dans leur emploi.

Plus généralement, c'est la régulation de ce secteur qui est en jeu. Roissy est aujourd'hui la plate-forme la plus fréquentée d'Europe. Pour s'en tenir à la limite de 55 millions de passagers que vous avez fixé, on a réfléchi à la construction d'un troisième aéroport dans le grand bassin parisien. L'étude remise au Premier ministre le 19 octobre dernier en confirme la nécessité, mais dans une logique de développement durable, donc le respect du cadre de vie, de l'environnement et des politiques écologiques, logique qui exclut tout déplafonnement de la fréquentation à Roissy et à Orly.

Après consultation de l'ACNUSA, vous devrez vous prononcer sur les projets de couloirs aériens en région parisienne. Les riverains y seront très attentifs. Le respect de la santé publique et de l'environnement doit rester le fil conducteur de votre action.

Malgré la conjoncture, la construction aéronautique ne devrait pas connaître de ralentissement à moyen terme. Seules les difficultés de trésorerie des compagnies peuvent les amener à annuler des commandes. Airbus, second sur le marché civil, a obtenu 155 commandes au salon du Bourget, dont 67 fermes. Cela devrait entraîner la création de 40 000 emplois directs en France et plus de 150 000 en Europe. Je me réjouis de la signature d'un contrat avec Dubaï pour l'acquisition de 22 A380, avion pour lequel vous vous êtes engagé personnellement.

M. le Ministre - Il y a 43 commandes en tout.

M. François Asensi, rapporteur pour avis - Pour préparer de nouvelles coopérations en Europe dans la recherche aéronautique et spatiale, vous devez soutenir le projet de l'ONERA qui, avec son partenaire allemand, souhaite constituer un espace européen de la recherche en relation avec le CNES. Cette Europe de la recherche qui balbutie a besoin de l'impulsion publique.

Il en va de même pour le projet d'un espace communautaire transatlantique visant à créer une zone de liberté en ce qui concerne les droits de trafic.

En fait, le transport aérien européen a besoin d'une politique extérieure commune face à la domination des Etats-Unis sur les pays isolés dans le cadre des accords de « ciel ouvert ». Vous avez obtenu un accord avantageux avec les Etats-Unis, mais l'Europe doit mener une politique plus vigoureuse.

Ce budget du transport aérien ne détonne pas avec la politique positive que vous menez depuis 1997, Monsieur le Ministre. Aussi la commission de la production a-t-elle émis un avis favorable à son adoption (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial de la commission des finances pour la mer - Madame la Présidente, vous qui protégez notre littoral et vous souciez donc de la mer, vous aurez comme moi constaté avec horreur, j'espère, qu'alors que tous les autres rapporteurs ont disposé de 15 minutes, on ne m'en attribue que dix. La France ne serait-elle plus la deuxième puissance maritime du monde ?

Mme la Présidente - Je ne regarderai pas l'heure tourner !

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial - Je souhaite néanmoins que vous fassiez part de mon observation au Bureau, d'autant que, cette année, manquera aussi le rapport de notre regretté collègue Capet, dont M. Filleul a assumé la tâche. Nous avions une demi-heure, nous n'en avons plus que le tiers !

Les chiffres se trouvant dans le « bleu » et dans mon rapport écrit, j'éviterai de les citer trop et, par ailleurs, je profiterai de la faculté qui m'est encore offerte de m'exprimer en francs, et non en euros...

S'établissant à 6 166 millions de francs, les crédits de la mer diminuent de 8,2 % par rapport à l'an dernier, mais en apparence seulement : si l'on tient compte du transfert de certaines dépenses sur d'autres budgets, la baisse n'est que de 0,49 % - après une augmentation de 2,36 % en 2001, il est vrai.

D'autre part, ce bleu ne retrace qu'une partie de l'effort de l'Etat en faveur du secteur, certains crédits figurant dans les budgets de la recherche, de la défense ou de l'économie et des finances. Au total, les sommes consacrées à la mer atteignent ainsi 10 370 millions.

Comme chaque année, l'ENIM absorbe 75 % de ce budget. Si l'on en fait abstraction et hors dépenses de personnel, les dotations atteindront 1 530 millions, soit une progression de 5,47 %. Nous sommes donc devant un bon budget et la commission des finances l'a donc adopté.

Il s'articule autour de cinq axes : en premier lieu, il vise à renforcer la sécurité maritime, en particulier le contrôle des navires et la signalisation. Les crédits augmentent de 24 % dans ce domaine, cependant que 42 emplois sont créés. Bravo !

En second lieu, ce budget permettra de poursuivre la réforme de la formation maritime : adaptation aux nouvelles normes de l'OMI, développement du centre de Nantes, passage sous statut public des personnels des lycées maritimes... 79 emplois sont créés dans ce secteur, dont 16 d'enseignants.

Les moyens destinés aux ports s'établissent à 844 millions, en croissance de 11 % pour ce qui est des crédits d'investissement, hors « Ports 2000 » qui bénéficiera à lui seul de 180 millions d'autorisations de programme. C'est bien plus qu'il n'y eut entre 1993 et 1998, mais il reste encore, hélas, beaucoup à faire !

Le budget intègre une subvention à l'ENIM en baisse de 3,33 % - mais cette diminution est compensée par une dotation du régime général et, en tout état de cause, ces crédits permettront de financer le régime de cessation anticipée d'activité pour les marins exposés à l'amiante.

Enfin, les crédits destinés à soutenir la flotte de commerce battant pavillon français croissent de près de 21 % et cette aide pourra ainsi être étendue aux navires sous registre des TAAF.

Je ferai maintenant quelques observations sur la façon dont l'Etat gère le « domaine mer ».

S'agissant de notre flotte de commerce, l'instauration du GIE fiscal a répondu aux attentes de l'armement, mais fait problème pour les pétroliers : la banque participant au GIE étant considérée comme propriétaire du navire et les Etats-Unis rendant le propriétaire responsable de toute pollution par les hydrocarbures, les banques refusent de s'engager dans ce système, ce qui compromet le renouvellement des navires. Ne pourrait-on ménager un régime spécial pour ces pétroliers ? Mais je sais que vous recherchez une solution avec le ministère des finances...

Il y a quelques jours, les ports de Lorient et Boulogne étaient bloqués par les marins pêcheurs, mécontents de la diminution des TAC et quotas proposée par la Commission. Le ministre de l'agriculture et de la pêche s'est engagé à défendre leurs intérêts à Bruxelles, mais il reste que les ressources des fonds exploités par ces pêcheurs artisanaux diminuent dramatiquement. Notre pays devant importer - pour quelque 10 milliards il y a déjà quelques années de cela ! -, il importe de développer notre flotte industrielle qui, seule, peut exploiter les grands fonds ou les mers lointaines. En accord avec M. Glavany, je plaide donc pour que nos chalutiers de pêche industrielle bénéficient du régime du GIE fiscal et je vous demande d'appuyer cette demande à Bruxelles.

Par ailleurs, il faut faire bénéficier les marins artisanaux des ASSEDIC.

Je veux aussi vous faire part d'un profond désaccord : il a trait à une réorganisation au sein de votre ministère ! Jusqu'en 1980, la « Mer » était rattachée au ministère des transports et placée sous le règne sans partage d'un secrétaire général de la Marine marchande, trônant place Fontenoy dans des bureaux aujourd'hui attribués à Mme Lienemann. Pour mémoire, signalons qu'un des adjoints de ce satrape est devenu président du groupe RPR du Sénat... Depuis des années, la gauche réclamait un ministère de plein exercice et ce d'autant plus fermement en 1980 que nos ports avaient connu pendant l'été un grave conflit, terminé par l'intervention de la Royale. En 1981, un ministère de la mer fut donc créé et subsista jusqu'en 1993.

En 1997, ce département n'a pas été rétabli et voici que vous proposez de regrouper les directions qui s'y sont substituées en une seule. Autrement dit, nous reviendrions à la situation d'avant 1981 !

M. le Ministre - Non ! La mesure prépare la création d'un ministère !

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial - Quoi qu'il en soit, la coexistence de plusieurs directions placées sous l'autorité du ministre garantit que les arbitrages seront rendus par les politiques. Ce n'est pas le cas si l'on transfère cette compétence à la technostructure : le peu d'empressement mis par vos services à répondre à nos questions montrent que celle-ci n'est guère encline à associer la représentation nationale aux décisions. Et, pour des raisons voisines, nous ne pouvons admettre que les crédits du personnel « mer » soient fondus dans ceux de l'ensemble des services.

J'ai cherché quel était le mauvais génie qui vous avez poussé à ce transfert, contraire à la récente loi organique, et j'ai découvert que c'était la Cour des comptes, qui voulait plus de « lisibilité ». Pour que ces magistrats n'aient pas à récoler les chapitres, nous devrions donc être privés de tout moyen de contrôle !

Je l'ai dit, les crédits consacrés aux ports témoignent de la volonté de développer ces infrastructures. Les dépenses d'entretien et de réparation sont en augmentation pour les ports d'intérêt général, mais baissent pour les ports autonomes cependant, afin de « s'adapter aux besoins », nous dit-on. Mais ces ports n'ont-ils pas à compenser les retards enregistrés au cours des années passées ? L'augmentation de 2001 n'a permis que la moitié des dépenses indispensables.

Cela étant, bravo pour les 62 %, puis 27 % d'augmentation en faveur des ports non autonomes, au cours de ces deux années 2001-2002 !

L'an dernier, je suggérais une loi Gayssot sur l'« interportualité ». Je me félicite donc que vous ayez confié à l'ingénieur général Rousset une mission en vue de rapprocher les trois ports de Boulogne, Dunkerque et Calais qui, ensemble, constituent le deuxième port de commerce français, le premier port de voyageurs d'Europe continentale et le premier centre européen de transformation des produits de la mer.

Le développement du cabotage me semble une excellente solution pour réduire le trafic routier de marchandises : les conclusions du récent colloque franco-espagnol vont dans ce sens.

M. Capet avait alerté sur les graves conséquences qu'aurait la disparition des duty-free sur les lignes transmanches et ses craintes se sont révélées exactes pour Boulogne et pour Calais. La solidarité à laquelle s'était engagé le Gouvernement doit donc jouer.

Le monde maritime s'inquiète également du projet de directive sur les services portuaires, notamment sur l'auto-assistance. Nous vous demandons d'être très attentif sur ce point.

La mer n'a sans doute pas encore la place qu'elle mérite, mais ce budget démontre que votre volonté est forte de faire bouger les choses. Je demande donc à l'Assemblée de l'adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. Jean Proriol - L'actualité est douloureusement chargée en matière de transports et d'équipements. Sur terre, les problèmes de sécurité sont nombreux. Dans les tunnels, après la catastrophe du Mont-Blanc est survenue celle du Gothard. Sur les rails, la technologie du TGV est-elle fiable lorsqu'elle utilise des ballasts et des rames de plus de cinquante ans ?

M. le Ministre - Cela se fait surtout en Angleterre, où le secteur est privatisé !

M. Jean Proriol - A l'intérieur des trains, l'insécurité règne, tant pour les agents que les usagers. Ceux-ci subissent en outre d'incessants retards et interruptions de trafic. Enfin, et malgré votre action personnelle, Monsieur le ministre, l'insécurité règne également sur les routes.

Dans les airs, le Concorde a dû arrêter puis reprendre ses vols commerciaux. Cela nous aura au moins permis de voir un ministre communiste vanter les mérites de cet appareil de standing.

M. le Ministre - C'est pour faire payer les riches ! (Sourires)

M. Jean Proriol - C'est une bonne habitude, mais sans eux, le Concorde n'existerait pas et vous ne pourriez pas l'emprunter.

Le 11 septembre et le 12 novembre ont semé la panique dans le monde aérien, tant chez les passagers que chez les employés, qui voient les compagnies s'éteindre les unes après les autres. Et le reste du temps, les retards font râler le personnel et les voyageurs.

En mer, on déplore plusieurs naufrages de pétroliers. Pourquoi les tragédies se reproduisent-elles ? Quel est le résultat concret de vos efforts ?

Dans cette tourmente, il faut dégager des priorités. Votre budget augmente certes de 3,2 % mais les crédits de la sécurité routière, des infrastructures ferroviaires, de la sécurité maritime et du transport combiné sont tous en baisse. Les augmentations, elles, sont discutables. 15 % pour les routes, c'est bien pour le développement, mais peu pour l'entretien. 27 % pour le transport des voyageurs, c'est la conséquence de la régionalisation ferroviaire, mais ces crédits vont à la SNCF sans que ceux qui lui sont généralement alloués ne baissent. La clarification des flux financiers dans le secteur, notamment en direction de RFF, est indispensable. Enfin, une augmentation de 4 % bénéficie à l'administration.

Comment les crédits dédiés à la sécurité routière peuvent-ils diminuer alors que le Gouvernement n'a cessé, depuis 1997, de la proclamer priorité nationale et que le nombre de morts sur la route reste plus élevé qu'ailleurs ? Vous annoncez des mesures ambitieuses, mais les crédits font l'objet d'une sous-consommation avérée.

Contrairement à ce que vous prétendez, l'intermodalité n'est pas non plus une de vos priorités. Il est vrai que vous utilisez pour vos démonstrations des agrégats différents de ceux décrits dans les bleus ! La mise en place des moyens de transport intermodaux voit bien ses crédits diminuer. Pour faire apparaître une hausse des investissements nouveaux, vous vous contentez de désendetter un peu moins RFF, mais au total il y a moins d'argent.

Et comment développer l'intermodalité sans s'assurer de la fiabilité du transport ferroviaire ? Le transport de marchandises a chuté de 8 % sur les neuf premiers mois de l'année. Les grèves et les retards ont eu raison des clients. Or leur confiance est le point capital du transfert de la route au rail.

La loi SRU, qui développe des objectifs si généreux - cohérence du développement urbain, encouragement des modes alternatifs de déplacement et de la mixité sociale - fait peser sur les acteurs locaux des charges nouvelles. La circulaire que vous avez publiée le 21 juillet sur la réforme des contributions d'urbanisme est loin d'être un chef d'_uvre de simplicité. Elle ne consacre pas moins de dix-neuf pages à la participation pour voies nouvelles et réseaux. Vous n'êtes pas maire...

M. le Ministre - Je l'ai été !

M. Jean Proriol - ...sans quoi vous n'auriez pas bâti une telle usine à gaz. Pour les extensions des réseaux publics rendues nécessaires par de nouvelles constructions, l'ancienne participation à la réalisation des équipements est remplacée par cette PVNR, versée aux communes par les propriétaires fonciers. Mais les communes doivent préfinancer les travaux sans être assurées de récupérer leurs fonds si les opérations n'aboutissent pas.

La régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs est prévue pour le 1er janvier prochain, mais l'Etat n'a toujours pas publié les décrets d'application de la loi SRU. Il n'a pas non plus arrêté le montant des dotations compensatoires alors que les conseils régionaux auront voté leur budget avant la fin de l'année. La région Aquitaine par exemple, dirigée par un président socialiste, peine à s'entendre avec la SNCF sur l'exploitation des TER, et toutes les régions s'interrogent sur les mécanismes d'indexation de la prestation fournie par la SNCF. Le dernier projet de convention a fait l'objet de réserves de la part du Conseil économique et social et du comité des finances locales. Le point d'achoppement n'est pas la SNCF, mais le montant de la dotation que l'Etat attribuera à chaque région pour le transport des lignes ferroviaires.

Les régions attendent donc, tout comme les citoyens, des garanties et nous ne les trouvons pas dans votre budget. Le groupe DL ne le votera donc pas (Applaudissements sur les bancs du groupe DL).

M. Jean-Marie Bockel - La part du budget destinée aux transports urbains de province reste stable, mais les besoins augmentent : 19 agglomérations sont équipées de transports collectifs en site propre ou sont sur le point de l'être, 33 ont des projets de construction... Cette stabilité est donc regrettable. En revanche, la hausse de 6,5 % de l'enveloppe consacrée aux plans de déplacements urbains vient à point nommé, alors qu'une deuxième génération de PDU beaucoup plus ambitieux et offensifs se fait jour. La nouvelle circulaire sur les aides de l'Etat rénove leurs conditions d'attribution en simplifiant le mécanisme et en les étendant aux actions favorisant l'intermodalité. La contribution de l'Etat aux transports collectifs en site propre diminue de 4,6 %. Bien que les autorisations de programme restent élevées, ces crédits seront insuffisants pour lancer les projets envisagés. En effet, Michel Destot, nouveau président du GART, a évalué les besoins de subventions à 186 millions d'euros pour 2002 et 223 millions pour 2003. Le compte n'y est pas. Les projets de Grenoble et du Mans notamment, qui feront l'objet d'une demande de subvention pour l'année 2002, ne sont pas encore pris en compte. Pour 2003, de nombreux projets supplémentaires seront mis en forme. Les crédits de l'Etat seront insuffisants pour les financer. Il faut faire le point avant la deuxième lecture.

En matière de lutte contre la pollution, des efforts importants sont nécessaires. Pour l'heure, ils sont essentiellement pris en charge par les collectivités, l'Etat ne représentant que 4 % des investissements totaux. La principale source de financement est donc le versement transport. Or la SRU a abaissé le seuil de population permettant de lever cet impôt. Elle permet ainsi à des syndicats mixtes de financer des opérations. Toute révision à la baisse du versement transport aurait des conséquences importantes sur le service public du transport urbain.

Je voudrais évoquer devant vous, Monsieur le ministre, le projet de raccordement ferroviaire entre Bâle et Mulhouse, dont la mise en service est prévue en 2010. Je souhaite que le financement de ce projet intermodal gare-aéroport, qui fera l'objet d'un comité de pilotage transfrontalier, soit inscrit au futur contrat de plan Etat-région.

Je tiens également à rappeler mon attachement à la réalisation du TGV Rhin-Rhône, et j'aimerais des précisions à ce sujet. J'aurais enfin souhaité vous entendre exposer la position de la France sur la proposition de règlement européen relatif à l'action des Etats-membres en matière d'exigence de services publics.

Ce budget est un bon budget et il constitue une chance unique de s'affranchir du « tout-automobile ». Je sais que vous saurez répondre aux attentes des maires des grandes villes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Michel Bouvard - Le budget du ministère de l'équipement et des transports est l'un des principaux budgets civils du pays et celui par lequel l'Etat peut encore le mieux participer au développement économique tout en jouant son rôle de régulateur. Mais les transports conditionnent aussi les déplacements quotidiens de nos concitoyens, et la qualité des équipements est indispensable.

Les terribles événements du 11 septembre ont fragilisé encore le transport aérien déjà touché par le ralentissement économique et nous approuvons les mesures prises par le Gouvernement pour soutenir ce secteur durement affecté. Il faut aussi évoquer les catastrophes répétées dans les grands tunnels alpins, mais aussi la montée de l'insécurité dans les transports en commun. Ce contexte contribue à une tentation de repli sur soi difficilement compatible avec la croissance économique et l'utilisation de modes de transport respectueux de l'environnement.

Vous nous présentez un budget qui ne progresse que par effet d'optique, notamment du fait de l'intégration dans vos ressources des crédits du FITTVN.

On pourrait donc considérer, comme vous nous y invitez, que la situation serait favorable, au moins en termes budgétaires. Mais quel est le bilan réel de la législature qui s'achève ?

S'il faut saluer en vous le ministre qui a défendu avec ténacité ses orientations politiques face à Bruxelles s'agissant du transport ferroviaire, position que nous pouvons partager sur certains points, force est de constater que l'investissement n'a pas été prioritaire. Malgré la croissance, l'effort d'équipement du pays a été quelque peu sacrifié et votre ministère n'a pas toujours été soutenu à la hauteur des enjeux.

Certes, l'endettement du système ferroviaire a été stabilisé, le système autoroutier réformé et la régionalisation des services de voyageurs en chemin de fer a été étendue. Mais, en matière budgétaire, la Cour des comptes est sévère. Après avoir mis l'accent sur l'opacité de la présentation des comptes, elle montre que, pour les routes, les crédits en francs constants ont subi, depuis 1998, une véritable descente aux enfers, en dépit de la croissance retrouvée. Et que dire de la faiblesse du taux de consommation des crédits !

L'évolution n'est pas meilleure, tant s'en faut, pour les transports aériens au cours de la même période. Certes, la situation est plus favorable pour les transports terrestres, mais cela ne compense pas les diminutions de crédits dont ont souffert les deux autres chapitres. D'ailleurs, le budget des transports terrestres a stagné jusqu'en 1999, et la progression constatée en 2000 est due en grande partie à la prise en compte de la TVA relative à la subvention versée à RFF. Il est donc clair que sans le FITTVN, passé de 4,128 milliards de francs en 1996 à 8,481 milliards en 2000, les moyens auraient été en régression absolue. C'est donc une débudgétisation massive qui a eu lieu au fil de la législature, accentuant une tendance dont je vous accorde qu'elle avait été timidement amorcée par votre prédécesseur.

La Cour des comptes, qui n'est pas dupe, le souligne d'ailleurs de manière cinglante.

En dépit de vos efforts pour obtenir des arbitrages plus favorables, la situation, aujourd'hui, est donc insatisfaisante.

Alors que s'est achevée une période de forte croissance, la remise en état du patrimoine routier est insuffisante, la dette de la SNCF stagne et celle de RFF est à un niveau incompatible avec les besoins d'investissements ferroviaires.

Si une forte augmentation de ses dotations en capital a marqué les exercices 1997 et 1998, une régression a eu lieu en 1999 et en 2000, au moment même où la croissance était la plus forte.

S'agissant de la dette ferroviaire, une présentation complète exigerait que l'on ajoute à la dette de la SNCF et de RFF, les 38 milliards d'emprunt de la SNCF transférés au SAAD. Ainsi reconstituée, la dette d'ensemble du système ferroviaire, qui s'établissait à 237 milliards le 31 décembre 1996, s'élevait à 253 milliards le 31 décembre 2000 et la prévision est de 258 milliards pour cette année.

Comment le Gouvernement aurait-il pu accorder une priorité aux investissements de votre ministère alors que les investissements de l'Etat ont été sacrifiés à la folle croissance des dépenses de fonctionnement nouvelles ?

C'est ainsi que moins de 80 milliards sont consacrés aux budgets d'investissements civils, quand le coût des 35 heures dépasse 100 milliards.

Or les investissements sont indispensables au secteur des transports, comme le sont les moyens de contrôle.

La catastrophe du Saint-Gothard vient aussi nous rappeler l'urgence des investissements en infrastructure de transport dans les massifs montagneux pour assurer le transit du fret : celui-ci a quintuplé dans les Alpes depuis 1970. Mes collègues Guibal, Estrosi, Ollier et moi-même, tous élus des grands itinéraires vers l'Italie, avons tous adopté une attitude responsable. Ainsi, nous avons souscrit au rééquilibrage des transports vers le rail, en faveur duquel nous avons d'ailleurs milité depuis 1993.

Nous avons appuyé vos efforts pour que le projet « Lyon-Turin » voie le jour, et nous avons soutenu les mesures de régulation du trafic décidées après la fermeture du tunnel du Mont-Blanc. Notre groupe a contribué à l'adoption de mesures de sécurité renforcées dans les différents textes de loi sur la sécurité dans les transports. Nous avons également soutenu la position courageuse qui a été la vôtre lorsque vous avez décidé de rouvrir le Mont-Blanc aux poids lourds. En revanche, le système d'alternat entre le tunnel du Mont-Blanc et celui du Fréjus annoncé à la suite de la catastrophe du Gothard, paraît difficilement acceptable car il susciterait d'importants problèmes, tant économiques que touristiques. Nous avons en effet appris avec stupeur que les véhicules légers étaient également concernés, à la différence de ce qu'ont fait les Suisses pour le tunnel du Saint-Bernard.

S'agissant des investissements alpins, malgré les décisions prises au Sommet de Turin et malgré les annonces de Chambéry, nous savons bien que les investissements nécessaires constituent une véritable difficulté pour l'Etat. Le pôle autoroutier alpin a notre appui, mais nous avons constaté avec amertume que les ressources provenant de l'allongement des concessions autoroutières risquaient de fondre rapidement avec la cession, décidée en catastrophe par votre collègue des finances, de 45 % du capital d'ASF, pour suppléer aux déboires financiers du dossier des UMTS. Qui peut prétendre encaisser les dividendes d'un capital cédé ? Encore avez-vous, in extremis, récupéré 5 milliards, qui, au moins, ne finiront pas dans le tonneau des Danaïdes des retraites que le Premier ministre s'obstine à ne pas réformer.

Pendant ce temps, et pour la seule région Rhône-Alpes, outre le dossier stratégique du Lyon-Turin, sont en attente de financement l'autoroute A41 entre Saint-Julien-en-Genevois et Villay-le-Pelloux, l'autoroute A48 entre Ambérieu et Coirannes, l'autoroute A89 entre Balbigny et la Tour-de-Salvagny, l'électrification et la modernisation de la ligne ferroviaire du Haut-Bugey entre Bourg-en-Bresse et Bellegarde, l'électrification de la ligne ferroviaire entre Grenoble et Chambéry, la ligne grande vitesse Lyon-Saint-Exupéry-sillon alpin, le tunnel fret sous le massif de Chartreuse et la valorisation des itinéraires fret entre Dijon et Modane...

Ce constat relatif à l'insuffisance des investissements n'est pas seulement le nôtre : notre collègue Bockel a évoqué les problèmes de financement des infrastructures de transport en commun. Le GART estime à 56 milliards sur 12 ans les besoins d'investissement pour les seuls réseaux en site propre. Les transports collectifs de province sont négligés. Nicole Questiaux dénonce elle aussi cette impasse dans un excellent rapport au CSSPF, qui met en évidence le décalage entre les investissements du contrat de plan et le plan décennal ferroviaire. Comment le mettrez-vous en _uvre, compte tenu de la dette de RFF ?

J'insiste sur le problème de la vacance des postes dans de nombreuses subdivisions, qui ralentit l'instruction des permis de construire. Je rappelle nos attentes concernant la viabilité hivernale. Nos concitoyens montagnards doivent pouvoir se déplacer, et je crains que le recrutement de vacataires n'incombe encore aux conseils généraux. Vous comprendrez donc qu'en dépit de vos efforts, le groupe RPR ne puisse s'associer à ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Gilbert Biessy - Ce budget n'est pas un budget comme les autres. La période est cruciale : l'économie mondiale subit de fortes perturbations, avec la guerre, mais aussi des événements considérables comme l'intégration de la Chine à l'OMC. Comment dès lors établir un budget sur la base de prévisions fiables ?

Ce budget est aussi le dernier de la législature, aboutissement de cinq années de travail et ultime élément du bilan de la majorité plurielle.

J'en rappellerai les grandes lignes.

L'intermodalité a fait l'objet d'une réelle politique de promotion. Depuis 1997, les investissements de l'Etat dans le transport et les routes ont progressé de plus de 5 % par an. L'enveloppe ferroviaire a doublé. Cette orientation se traduit aujourd'hui par l'affectation des dividendes des sociétés d'autoroutes à la politique intermodale.

En 2000, le transport routier de marchandises a augmenté de 5 % contre 6,2 % pour le rail et 6,4 % pour le fluvial, ce qui témoigne d'un changement d'orientation fondamental.

Les choix financiers sont clairs, et les avancés politiques aussi capitales que l'adoption, sous présidence française, du paquet ferroviaire par le Parlement européen et le conseil des ministres des Quinze. Le transport combiné représente désormais 25 % de l'activité fret de la SNCF.

M. Marc-Philippe Daubresse - Et combien dans le budget ?

M. Gilbert Biessy - Le volet ferroviaire des contrats de plan 2000-2006 est huit fois plus important que dans les plans précédents.

L'objectif est réaffirmé de doubler le trafic-rail pour le fret d'ici 2008.

La SNCF a été désendettée à hauteur de 28 milliards de francs en 1997. Au-delà d'un choix économique, le rail est un choix environnemental - celui du développement rural - et un choix en faveur de la sécurité.

Les récentes catastrophes intervenues en Europe, nous rappellent que le danger est omniprésent.

Nous avons pris des décisions sur la formation, la réglementation et les contrôles routiers dans les tunnels. Mais nous savons bien que la première réponse passe par l'évolution structurelle de nos modes de transports, et notamment par le quadruplement dans les liaisons transalpines, et le quintuplement sur les liaisons transpyrénéennes du service d'autoroute ferroviaire.

Ces orientations sont prises à l'horizon 2015 : pour les responsables politiques, c'est court, mais pour les usagers, 2015, c'est bien loin !

Nous devons donc tout faire pour raccourcir les délais, même si la France ne peut avancer seule. Il faut obtenir les crédits européens indispensables aux liaisons ferroviaires transalpines et transeuropéennes. La sécurité et le développement durable l'exigent.

Des dossiers qui constituaient de véritables « serpents de mer » ont progressé.

C'est le cas de l'harmonisation sociale dans le secteur routier, qui a fait ses premiers pas avec la loi du 6 février 1998 réglementant la profession et encadrant ses pratiques. L'action a abouti à un accord sur la durée du temps de travail, signé par le conseil européen en décembre 2000.

M. le Ministre - Sous la présidence française.

M. Gilbert Biessy - En effet. Il était utopique il y a cinq ans. Je pense aussi à la fin de l'hémorragie des emplois du ministère, supprimés par centaines, voire par milliers depuis vingt ans. Nous reconstituons les bases d'un véritable service public. Pour la deuxième année, ce budget crée des emplois, au nombre de 2 000 dont 766 créations nettes et 1 200 au titre de la résorption de la vacance.

M. Marc-Philippe Daubresse - Quelle efficacité !

M. Gilbert Biessy - C'est inédit, même en tenant compte de l'aviation civile.

S'agissant des transports publics urbains, 18 projets en site propre ont été lancés, dont plus de 60 % sont réalisés.

En matière de sécurité routière, la loi du 18 juin 1999, tant combattue sur certains bancs...

M. Michel Bouvard - Nous l'avons votée !

M. Gilbert Biessy - Certains, pas tous. Elle apporte une réponse à l'illusion d'impunité de la délinquance routière.

L'augmentation de 8,5 % des moyens de la sécurité routière montre qu'elle reste bien une priorité nationale.

La récente institution du conseil national de la sécurité routière, est un signe fort de la volonté de l'Etat. En effet, la lutte contre l'insécurité routière est difficile et ses résultats ne sont jamais acquis. Nous sommes cependant passés de 8 400 à 7 400 morts par an.

C'est encore bien trop, et nous devons continuer à travailler, même contre les réticences qui restent nombreuses.

Dire aussi que le nombre de morts ne suffit d'ailleurs pas à rendre compte du sentiment croissant d'insécurité routière.

La route fait partie de la société : on y trouve des gestes d'incivilités répétés, un sentiment d'impuissance des victimes, voire de crainte. Il existe une délinquance quotidienne de la route qui renforce le sentiment général d'insécurité.

La formation du conducteur est prise en compte dans ce budget, mais, comme vous le disiez vous-même, il y a quelques années, la conduite automobile est aussi un geste social. Il ne serait donc pas inutile d'incorporer à la formation un volet « éthique du conducteur dans ses relations avec les autres ».

Certains comportements qui nous paraissent choquants semblent naturels à ceux qui s'y livrent. Comment s'en étonner alors qu'une partie de la jeunesse perd ses repères ? Il y a donc un travail fondamental à initier dès la « conduite accompagnée ». Je souhaite que le Gouvernement progresse en ce sens.

Bien des observateurs, pas toujours bien intentionnés, auraient voulu que ce budget marque une rupture et engage une cure d'austérité...

Il est sain que le Gouvernement n'ait pas alimenté la paranoïa ambiante. Le sang froid est une qualité majeure dans le monde dangereux qui est le nôtre.

En cette période d'incertitude, il est du devoir d'un Gouvernement responsable, non de stocker du sucre comme le faisaient nos grands-mères, mais de soutenir l'économie pour préserver la confiance des Français.

Votre ministère tient un rôle important dans ce domaine. Entre 1997 et 2001, des centaines de milliers d'emplois ont été créés dans les transports, le tourisme, la construction. Le chômage dans le BTP a diminué de moitié. Il ne faut pas s'arrêter en chemin, et vous ne le faites pas. Ce budget prolonge la politique menée depuis cinq ans, sans céder à la panique du contexte international ou à la pression des échéances électorales. Il joue son rôle économique en mariant équilibre et volontarisme.

Certes, ses engagements sont insuffisants dans plusieurs secteurs-clés. Mais ils sont aussi sans précédent. Ce budget peut être amélioré, et il le sera dans un esprit constructif et responsable !

L'objectif du groupe communiste n'est ni de pavoiser, ni de se lamenter, mais de poursuivre avec détermination sur la voie tracée, de rester toujours exigeant envers lui-même et envers la majorité plurielle, une majorité de gauche plurielle qui s'est constituée en moins d'un mois suite à une dissolution précipitée de l'Assemblée, mais qui s'est consolidée tout au long de cinq années passées à travailler de concert, sans gommer les différences. Notre pays y a gagné, gageons qu'il y gagnera encore. Parce que ce budget est solidaire, clair dans ses objectifs et porteur d'avenir, le groupe communiste le votera (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Marc-Philippe Daubresse - Vous ne vous étonnerez pas, Monsieur le ministre, que je ne fasse pas des cinq années passées le même bilan que mon prédécesseur...

M. le Ministre - Vous parlez de la dissolution ?

M. Marc-Philippe Daubresse - Beaucoup de promesses, peu d'actes, un manque de volonté politique évident face à la nécessité de préparer la France aux évolutions des transports, qui sont en pleine mutation, voilà où nous en sommes. Vous avez lancé certaines politiques, vous avez annoncé beaucoup de choses, on peut maintenant vous juger aux actes.

Le Livre blanc de la Commission européenne sur les transports, qui a été présenté le 12 septembre dernier, prône des mesures urgentes pour rééquilibrer les flux de marchandises et de passagers entre les différents modes de transports. C'est vrai que les deux questions majeures d'aujourd'hui sont l'intermodalité et la sécurité des transports.

Pourtant ce budget n'offre pas de perspectives en ce sens, il est toujours plus axé sur le fonctionnement et la préservation des emplois que sur l'investissement.

En matière ferroviaire, les crédits ont certes sensiblement augmenté depuis votre arrivée, mais pour quelle politique et quels résultats ? Comme l'a constaté M. Filleul dans son excellent rapport, les investissements ferroviaires en sont encore au stade des études préliminaires. Depuis 1997 les investissements de la SNCF ont chuté de 5 milliards.

L'année 2001 a été marquée par un mauvais résultat pour le fret, dû à un service de mauvaise qualité, au conflit de mars-avril dernier et au ralentissement économique déjà perceptible. Le trafic du fret ferroviaire a diminué de 8 %. Des mesures spectaculaires auraient dû apparaître dans ce budget pour renverser la tendance : il n'en est rien.

Nous nous inquiétons également de la baisse du montant de la contribution pour les charges d'infrastructures ferroviaires. La situation financière de RFF, déjà fragile ne peut qu'empirer. Dans un rapport, le CSSPF souligne que la réforme de 1997 n'a pas résolu le problème de l'endettement colossal des chemins de fer français. Cette situation paralyse tout investissement massif. En 1993 j'expliquais déjà, dans un rapport sur le sujet, qu'il fallait aider le transport combiné en désengorgeant les voies saturées...

M. le Ministre - Vous parlez de la réforme de Mme Idrac ?

M. Marc-Philippe Daubresse - La réforme du désendettement de la SNCF a effectivement été initiée par Mme Idrac, et heureusement qu'elle l'a fait et que vous l'avez poursuivie !

Cela dit, le problème de l'engorgement des voies, qui empêche le développement du transport de marchandises, n'est toujours pas réglé, faute des moyens permettant les investissements nécessaires.

Cette impasse financière ne permet donc pas le rééquilibrage rail-route proclamé par le Gouvernement et dont M. Biessy vient de dire qu'il se ferait vers 2015 : on attend que les gouvernements futurs prennent en charge les problèmes !

Vous parlez de Mme Idrac. Qui a lancé le transport combiné ? Bernard Bosson ! Qui a créé un fonds pour le transport combiné ? Bernard Bosson !

Qui a inscrit dans une loi d'aménagement du territoire le fonds pour les transports terrestres ? C'est Charles Pasqua et certains rapporteurs qui sont dans cette salle !

Or cette année, pour la première fois, l'aide au transport combiné est en diminution, alors comment voulez-vous développer l'intermodalité ?

M. le Ministre - C'est à cause de l'Europe !

M. Marc-Philippe Daubresse - C'est une réponse un peu facile.

En ce qui concerne le transport des voyageurs, le transfert aux régions de la responsabilité des TER, initié par M. Pons et Mme Idrac, est unanimement reconnu comme une étape importante de la décentralisation. Or que constatons-nous ? Que la quasi-totalité des régions, y compris celles dirigées par la gauche, se plaignent que la décentralisation financière est insuffisante.

Dernier point, l'insécurité croissante dans les transports en commun. Vous aviez refusé un amendement que vous avez maintenant repris dans la loi sur la sécurité quotidienne. Les agressions contre les voyageurs ont progressé de 20 % entre 1999 et 2000 et il faudrait prendre des mesures beaucoup plus rigoureuses.

En ce qui concerne la sécurité des infrastructures, mon collègue Bouvard a évoqué le problème des liaisons transalpines. Nous sommes très sceptiques sur les conditions de réouverture du tunnel du Mont-Blanc : cette circulation alternée risque d'entraîner une accumulation dans la vallée de poids lourds en attente. Il vaudrait mieux accélérer la réalisation de l'autoroute ferroviaire Lyon-Turin, dont nous avions été les premiers à parler...

M. le Ministre - Ah pour parler, vous parlez !

M. Marc-Philippe Daubresse - J'irai même plus loin : si demain un aéroport est construit sur l'axe Paris-Lille, l'autoroute va être encore plus engorgée par les camions et il faudra soit l'élargir, soit prévoir une autoroute ferroviaire sur l'axe Lille-Paris-Lyon. Vous parlez, mais nous ne voyons pas d'actes, alors que vous êtes, en Europe, un des ministres des transports qui est resté le plus longtemps en place !

En ce qui concerne la modernisation des transports routiers, vous avez, je le reconnais, réalisé certaines avancées sociales, initiées d'ailleurs par M. Bosson. Mais il reste à opérer l'indispensable harmonisation fiscale et sociale au niveau européen.

Sur le volet fluvial, où en est le canal Seine - Nord ?

Sur le plan maritime, des efforts ont été réalisés après les naufrages de pétroliers, mais ils restent insuffisants.

En ce qui concerne l'aviation, je me réjouis comme vous que le Concorde ait pu reprendre l'air. Sur le troisième aéroport en région parisienne, l'UDF attend vos propositions. Il ne faut pas continuer à engorger Roissy mais choisir un lieu disposant d'une grande réserve foncière et permettant l'intermodalité des transports.

Je conclurai avec André Comte-Sponville, que le pessimisme est signe d'intelligence et l'optimisme de volonté. Je crains, Monsieur le ministre, que la volonté ne vous ait manqué pour préparer la France aux rendez-vous de l'avenir en matière de transport. Le groupe UDF votera contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

Mme Odile Saugues - L'examen d'un budget est un acte éminemment politique et cette discussion est pour moi l'occasion de revenir sur le bilan de la politique du Gouvernement en matière de transports, notamment ferroviaires.

Depuis 1997, les crédits consacrés aux transports ferroviaires ont doublé. La nouvelle génération de contrats de plan Etat-région consacre cet effort sans précédent.

Cette ambition a été bien relayée par la SNCF et RFF. Mais elle se heurte à des obstacles conjoncturels et structurels. D'abord, les espoirs mis dans le développement du fret ne se sont pas confirmés. Cet été le nombre de trains de fret a diminué de 50 % à 70 % par rapport à 2000. Dès lors, pour doubler le trafic du fret sur 10 ans, il faut retrouver la confiance des chargeurs, donc développer les investissements dans les infrastructures - je me félicite du projet de plate-forme multimodale prévue dans le Pas-de-Calais pour 2003 - et le matériel roulant, ce que la SNCF a compris en commandant 200 locomotives électriques pour le fret. La signature le 26 octobre d'un accord entre la SNCF et les utilisateurs de transport de fret sur le dédommagement en cas de retard de livraison va dans le bon sens.

L'autre grand handicap du système ferroviaire est son endettement. Selon le rapport du CSSPF...

M. Michel Bouvard - Excellente lecture.

Mme Odile Saugues - ...après la période noire de 1992 à 1996, il devenait indispensable que la SNCF ne supporte plus la totalité des charges d'infrastructures. Malgré la réforme de 1997, les dotations en capital par l'Etat, le relèvement des redevances de l'utilisation de l'infrastructure, la dette nette fin 2000 reste comparable à celle de 1997 et les prévisions pour 2001 ne sont pas positives. Comment le système ferroviaire pourra-t-il renouveler le matériel, entretenir le réseau, garantir la sécurité, répondre aux objectifs d'aménagement du territoire et conquérir des marchés nouveaux ? L'endettement pèse sur l'investissement qui, selon les chiffres que vous avez donnés, sera, d'ici 2020, inférieur à ce que prévoient l'Allemagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, l'Espagne.

M. Michel Bouvard - On ne peut pas financer en même temps les investissements et les 35 heures.

Mme Odile Saugues - Enfin, l'expérimentation des transports ferroviaires régionaux a été une réussite, et la généralisation aura lieu dans quelques semaines, accompagnée d'une augmentation de 30 % de la dotation aux régions. Toutes les améliorations que ce transfert a permises ont enclenché une nouvelle dynamique et une augmentation sensible du trafic. J'insiste pour que l'on maintienne l'exploitation avec deux agents, même si cela entraîne un surcoût de 9 francs par km. J'insiste également pour que ce transfert soit pleinement compensé car les régions devront moderniser le financement d'un parc parfois très vétuste. Nous nous inquiétons de voir cette réforme contrariée par des règlements européens, en particulier celui relatif aux contrats de service public dans les transports de voyageurs, en cours de discussion.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis - Exactement.

Mme Odile Saugues - Sur ce point, nous attendons vos déclarations, car cette réforme importante ne peut être conduite que dans un climat serein.

La tâche à accomplir est donc immense. Mais que de chemin déjà parcouru depuis 1997, pour réorienter les modes de transport. Pour relever ce défi, qui est aussi celui de la qualité de la vie, vous pouvez compter sur le soutien du groupe socialiste (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Daniel Paul - Si le ralentissement de la croissance se fait également sentir sur les échanges maritimes, leur progression est néanmoins constante. Pour mieux affirmer la vocation maritime de notre pays, les trois priorités sont d'assurer la sécurité de nos côtes, d'assurer la place de notre pavillon, l'emploi de nos marins, l'avenir de nos industries navales, et de permettre à nos ports de capter une part significative de trafic.

C'est en fonction de ces priorités que j'examinerai le budget pour 2002 et l'action conduite depuis 1997.

Comme en tout domaine, triomphe le libéralisme. La recherche du moindre coût met en danger nos littoraux mais aussi les marins eux-mêmes. Ainsi la Commission européenne a enregistré de 1990 à 1998 la perte de 131 navires et de 731 marins. Vos efforts auprès de Bruxelles et des instances maritimes internationales vont dans le bon sens, de même que les efforts d'organisation et d'investissement pour corriger les retards, qu'il s'agisse des plans POLMAR ou des moyens des CROSS.

Mais notre pays doit se doter de moyens de remorquage de haute mer plus importants. L'Etat ne devrait-il pas y réfléchir avec les communautés locales du littoral ? Pour accueillir les navires en difficulté, les ports doivent aussi être en état de maîtriser les risques encourus, en fonction des cargaisons. Enfin, il faut améliorer le contrôle des navires dans les ports, domaine dans lequel nous n'avons pas toujours été exemplaires, en poursuivant l'effort entrepris pour augmenter les effectifs.

Si notre pavillon ne poursuit pas son déclin, il est difficile de rétablir la situation. Face aux excès de la déréglementation, les armateurs demandent de nouvelles aides, de nouveaux avantages fiscaux. Le groupe communiste souhaite que l'on contrôle l'aide publique et son utilisation efficace. Toute nouvelle aide doit être liée à l'emploi de marins français, et le contrôle doit être exercé par les représentants du personnel. La même règle doit prévaloir pour les aides publiques aux industries navales, sur lesquelles le conseil des ministres européen du 5 décembre doit se prononcer.

Au cours de cette législature, de gros efforts ont été consentis en faveur de nos ports, comme le prouve le lancement récent des travaux de Port 2000 au Havre. Mais des inquiétudes apparaissent. Pour que nos ports soient efficaces, il faut veiller à la qualification des personnels, la qualité des matériels, au bon fonctionnement des liaisons terrestres. La logique libérale s'y oppose. Ainsi, pour les investissements dans le levage, la mixité des investissements entre public et privé est acquise. Mais je souhaite que l'Etat maintienne la parité avec le secteur privé. Par ailleurs, une directive européenne vise à contraindre les ports à adopter des normes de sécurité plus libérales. S'il faut améliorer la transparence, ce ne peut être au prix de la sécurité, ni en ouvrant la voie au dumping social. Chaque Etat doit donc se montrer vigilant. Enfin, il faut développer le cabotage, sinon d'autres le feront. Le « mer routage » doit permettre de contourner les montagnes et de soulager les autoroutes.

Ce budget s'inscrit dans la logique suivie depuis 1997. Soucieux de développer les infrastructures, nous ne devons jamais oublier les hommes. Face aux pressions libérales, il nous faut allier étroitement efficacité économique et efficacité sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Yves Coussain - Comme mon collègue M. Daubresse l'a fait au nom de l'UDF, je considère que ce budget, dont les crédits en augmentation ne garantissent pas la qualité, ne répond pas aux besoins du secteur des transports (Murmures sur les bancs du groupe socialiste).

Pour ma part, je souhaite d'abord vous rappeler les recommandations de la délégation à l'aménagement du territoire de l'Assemblée. Dans son rapport sur les schémas de services collectifs de transport, elle s'inquiète du décalage entre votre volonté proclamée de rééquilibrer la part des différents modes de transport et la réalité de votre action. Le schéma prévoit une croissance annuelle de 2,4 % pour la route contre 2,1 % pour le rail, alors que la route absorbe déjà 84,6 % de la dépense nationale en faveur des transports. Or dans ce budget, les subventions au transport combiné baissent de moitié et les dépenses relatives aux infrastructures ferroviaires diminuent. C'est aller à l'inverse de vos priorités.

En second lieu, nous ne pouvons nous résoudre à l'abandon des territoires isolés en raison d'une logique qui obéit à la demande.

Elle favorise les territoires les plus peuplés, va contre l'équité en matière d'accès aux transports et accélère le mouvement de concentration de la population et des activités autour des grandes agglomérations, avec les conséquences qu'on connaît.

La loi de février 1995 avait mis en place deux outils : le FITTVN - mais il a été victime d'une budgétisation - et le FPTA, devenu le FIATA. Contrairement à M. Gantier, je souhaite que ce dernier fonds soit confirmé dans sa vocation, qui est de subventionner les lignes aériennes de province déficitaires. Il devrait notamment être mobilisé pour améliorer la régularité des vols et, surtout, pour abaisser le prix des billets vers les destinations qui ne sont pas desservies par des trains rapides ou des autoroutes.

L'accident du Gothard est révélateur de l'absence de sécurité dans les tunnels « bidirectionnels ». Quelles conséquences en tirez-vous pour les projets en cours ? Je pense en particulier au tunnel du Lioran, le plus vieux tunnel aménagé sur une route nationale : je me réjouis de la décision de commencer les travaux l'an prochain, c'est-à-dire dans les délais prévus par le contrat de plan, mais ne faudrait-il pas ajouter à la réalisation du nouveau tube le réaménagement de l'ancien tunnel ?

Enfin, le passage aux 35 heures dans l'administration de l'Équipement va avoir des incidences négatives pour nos départements de montagne. Déjà, la DDE du Cantal a fait savoir au conseil général qu'elle ne pourrait faire face à ses obligations conventionnelles de déneigement avec le personnel dont elle dispose et lui a donc demandé de financer des embauches...

M. Michel Bouvard - Eh oui !

M. Yves Coussain - Où seront donc affectés les 1 500 postes nouveaux dont vous faites parade ? Est-il normal que le Gouvernement se défausse sur les conseils généraux des effets d'une décision qu'il a prise ? Les départements de montagne n'ont pas vocation, et surtout n'ont pas les moyens de faire face : ferez-vous le nécessaire pour les directions départementales ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Jean-Pierre Baeumler - Comme les années précédentes, mon propos portera exclusivement sur les questions de sécurité routière et, en guise de préambule, Monsieur le Ministre, je reprendrai votre mot d'ordre : « La lutte contre l'insécurité routière est un combat de tous les jours ».

Ce combat est plus que jamais indispensable : après une baisse régulière de la mortalité sur les routes pendant un semestre, on a recensé 2 017 tués de juillet à septembre, soit une augmentation de 2,4 % par rapport à 2000. La perspective d'une amnistie présidentielle a certainement joué dans le relâchement des comportements : comme le souligne le professeur Got, c'est en effet la multiplication des infractions mineures qui conduit à une insupportable mortalité. Rappelons donc que, si une loi d'amnistie devait être votée, elle ne devrait en aucun cas porter sur les infractions aux règles de la conduite : il faut tuer net le sentiment d'impunité ressenti par trop de conducteurs.

Depuis 1997, le Gouvernement agit. Le comité interministériel du 26 novembre 1997 a en effet permis de lancer une politique globale, cohérente et volontariste. Puis la sécurité routière a été déclarée grande cause nationale de l'année 2000 et un Conseil national a été institué.

Pour atteindre à la tolérance « zéro », la démarche du Gouvernement se veut à la fois dissuasive et pédagogique.

Dissuasive : un délit de grand excès de vitesse a été créé, on a instauré la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule en cas d'infraction grave, le dispositif policier a été renforcé, le recours aux radars automatique développé. A cela se sont ajoutées récemment l'institution d'un délit de non-respect des distances de sécurité, l'obligation d'immatriculer les deux-roues et l'extension des cas de rétention du permis de conduire ainsi que des possibilités de dépistage après accident, sans oublier l'harmonisation de la politique pénale.

Pédagogique : vous avez accru les moyens dont disposent les préfets pour améliorer la formation au bon usage de la route à tous les âges de la vie, renforcé l'effectif des inspecteurs du permis de conduire et amélioré la formation donnée aux enfants et adolescents.

Le présent budget vous permettra de poursuivre sur ces deux voies. En croissance de 8,3 %, il inscrit dans la durée les objectifs de la campagne « Sécurité routière, grande cause nationale » et vous assure la possibilité de mener des campagnes de communication réalistes, donc efficaces, tout en consolidant la formation dispensée aux jeunes.

L'année 1999-2000 a marqué un réel tournant dans la politique de communication, avec des campagnes faisant appel à des images réelles d'accidents. Par rapport à 1998, le doublement des crédits permettra une nouvelle campagne, avec des « spots » d'une tonalité proche de celle des « spots » réalisés auparavant par Raymond Depardon. Cette campagne mettra l'accent sur les dangers d'une vitesse excessive et sur la nécessité de respecter les distances de sécurité et, de plus, traitera des déplacements professionnels et des trajets entre domicile et travail - on sait en effet que, pour les salariés, l'accident de la route est la première cause d'accident mortel au travail.

Deuxième priorité après la communication : le partenariat avec l'Education nationale. Pour changer les comportements, l'apprentissage de la route doit commencer dès l'école. Depuis 1993, l'éducation à la sécurité routière est obligatoire et, pourtant, un jeune sur deux n'en aurait pas bénéficié cependant que nos élèves n'auraient suivi de tels cours que pendant trois heures et demie en moyenne, au cours de toute leur scolarité, contre une centaine en Allemagne ! L'explication en est sans doute que la sécurité routière n'est rattachée à aucune matière, que cet enseignement repose sur le volontariat et que les professeurs n'y sont pas formés. Il conviendrait donc d'en faire une discipline à part entière et de prévoir une préparation spécifique dans le cadre des IUFM.

Vous avez bien compris la nécessité de donner toute sa place au monde de l'éducation dans ce combat. Depuis 1997, les comités interministériels ont insisté sur les actions de prévention, de sensibilisation et de formation. Celui de 2000 a créé une attestation de première éducation à la route, pour le primaire, et d'une attestation scolaire de sécurité routière, pour les élèves de troisième, ainsi que d'une épreuve allégée de conduite d'un deux-roues. Il faut continuer. Les jeunes nous montrent d'ailleurs la voie : sur les dix propositions retenues pour le Parlement des enfants, quatre concernaient la sécurité routière.

On ne réduira le nombre des morts de la route qu'en mobilisant tout le monde : l'action ne peut venir seulement d'en haut ! Mais c'est avec confiance que nous voterons les crédits consacrés à la sécurité routière car ils confirment l'engagement du Gouvernement en faveur de cette cause et sa volonté de tendre vers une tolérance zéro face à la délinquance au volant (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme la Présidente - Compte tenu de l'heure, je propose de lever la séance et d'entendre l'exposé et les réponses du ministre à partir de 21 heures.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 10.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            Jacques BOUFFIER

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A N N E X E
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 29 novembre 2001 inclus a été ainsi fixé en Conférence des présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Equipement et transports ; budget annexe de l'aviation civile.

MERCREDI 14 NOVEMBRE, à 9 heures et à 15 heures, après les questions au Gouvernement :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Aménagement du territoire ;

      · Enseignement professionnel ;

à 21 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Services du Premier ministre : services généraux, SGDN, Conseil économique et social, Plan, budget annexe des journaux officiels.

JEUDI 15 NOVEMBRE, à 15 heures et à 21 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Défense.

VENDREDI 16 NOVEMBRE, à 9 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Jeunesse et sports (nouvelle procédure) ;

      · Recherche (nouvelle procédure) ;

à 15 heures et à 21 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Fonction publique et réforme de l'Etat ;

      · Industrie, poste et télécommunications.

LUNDI 19 NOVEMBRE, à 10 heures, à 15 heures et à 21 heures,

et MARDI 20 NOVEMBRE, à 9 heures :

_ Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 :

      · Culture (nouvelle procédure) ;

      · Economie et finances : charges communes, services financiers, budget annexe des Monnaies et médailles, comptes spéciaux du Trésor, taxes parafiscales ; commerce extérieur (nouvelle procédure) ;

      · Articles non rattachés ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement :

_ Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2002 ;

_ Lecture définitive du projet portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier ;

à 21 heures :

_ Projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes ;

_ Projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme ;

_ Projet, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du Traité d'extradition entre la France et les Etats-Unis d'Amérique (ensemble un procès-verbal d'accord sur la représentation) ;

_ Texte de la commission mixte paritaire sur la proposition relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions du droit successoral.

MERCREDI 21 NOVEMBRE, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures,

et JEUDI 22 NOVEMBRE, à 9 heures, à 15 heures et à 21 heures :

_ Texte de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

MARDI 27 NOVEMBRE, à 9 heures :

_ Proposition de M. Alain BOCQUET et plusieurs de ses collègues tendant à ouvrir le droit à la retraite à taux plein pour les salariés ayant cotisé quarante annuités avant d'atteindre l'âge de 60 ans ;

(Séance réservée à un ordre du jour fixé par l'Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures,

et MERCREDI 28 NOVEMBRE, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

_ Texte de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet relatif à la Corse.

JEUDI 29 NOVEMBRE, à 9 heures :

_ Proposition de MM. Jean Antoine LEONETTI, Philippe DOUSTE-BLAZY, Jean-Louis DEBRÉ et Jean-François MATTEI relative au renforcement de la lutte contre l'impunité des auteurs de certaines infractions ;

(Séance réservée à un ordre du jour fixé par l'Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)

à 15 heures et, éventuellement, à 21 heures :

_ Texte de la commission mixte paritaire sur le projet relatif aux musées de France ;

_ Texte de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident grave de transport terrestre ;

_ Deuxième lecture de la proposition tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales ;

_ Eventuellement, suite du texte de la commission mixte paritaire ou de la nouvelle lecture du projet relatif à la Corse.


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