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Session ordinaire de 2001-2002 - 42ème jour de séance, 100ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 18 DÉCEMBRE 2001

PRÉSIDENCE de M. Claude GAILLARD

vice-président

Sommaire

      COMMISSION MIXTE PARITAIRE 2

      MODERNISATION SOCIALE (lecture définitive) 2

      MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 10

      ACTION SOCIALE ET MÉDICO-SOCIALE (CMP) 14

      ORDRE DU JOUR DU MERCREDI 19 DECEMBRE 2001 21

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant qu'il avait décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2001.

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MODERNISATION SOCIALE (lecture définitive)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre demandant à l'Assemblée nationale de statuer définitivement, en application de l'article 45, alinéa 4 de la Constitution, sur le projet de loi de modernisation sociale.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion de ce projet de loi en lecture définitive.

M. Philippe Nauche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour le titre I - L'appréciation du Sénat a divergé de la nôtre sur certains articles du titre I - relatif à la santé, à la solidarité et à la sécurité sociale - que nous avions adoptés en troisième lecture. La commission vous propose de rétablir le texte de l'Assemblée, en adoptant un seul amendement de forme.

M. Gérard Terrier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour le titre II - Je serai tout aussi bref que mon collègue Philippe Nauche. S'agissant du titre II, je vous soumettrai trois amendements de codification.

Je regrette que l'actualité nous ait conduits à consacrer l'essentiel de nos débats aux mesures relatives au licenciement, au détriment de celles qui concernent le harcèlement moral et la formation professionnelle, elles aussi importantes.

Je remercie enfin tous ceux qui ont facilité mon travail, en particulier les administrateurs de la commission, dont l'aide m'a été précieuse.

M. Philippe Nauche, rapporteur - Très bien !

M. le Président - La parole est à M. Jean Ueberschlag.

M. Maxime Gremetz - Il était temps !

M. Jean Ueberschlag - Je me suis en effet laissé surprendre par la brièveté de nos rapporteurs. Sans doute veulent-ils expédier ce texte qui leur brûle les doigts. Pour ma part, j'ai bien l'intention d'utiliser l'intégralité des dix minutes dont je dispose.

Rarement un texte économique aura autant fait l'unanimité contre lui. Au-delà de ces quelques dispositions hétéroclites, c'est d'abord sur le dispositif relatif aux licenciements économiques, bâti à la hâte, sans concertation préalable, sous l'effet du climat social et la pression des députés communistes, qu'il sera jugé.

Les critiques fusent de tous bords. Selon la CFDT, « la définition plus restrictive du licenciement économique risque d'aboutir à un marché de dupes et d'entraîner des effets pervers, en excluant nombre de salariés des plans sociaux en cas de restructurations.

Les DRH mettent en garde le Gouvernement. Ils dénoncent « les risques sérieux que comportent certaines dispositions conçues dans l'urgence et sans concertation préalable avec les partenaires sociaux » et préconisent de porter l'effort humain et financier sur l'optimisation des politiques de reclassement.

Lorsque 56 grands chefs d'entreprise publient le 24 octobre un manifeste,...

M. Maxime Gremetz - Quelle référence !

M. Jean Ueberschlag - ...c'est parce qu'ils craignent que l'allongement des procédures et le durcissement de la définition du licenciement économique ne constitue pour les entreprises un carcan administratif dans un contexte de baisse de la croissance : plus de difficultés pour anticiper les évolutions et les crises, plus de difficultés à opérer les adaptations nécessaires à la sauvegarder de la compétitivité.

Le ministre de l'économie et des finances n'est pas en reste lorsqu'il déclare que ce texte ne va pas dans le sens « des nécessités d'une économie moderne qui doit être réactive et compétitive ».

Ce que redoutent à juste titre les chefs d'entreprise, c'est la détérioration de l'image de la France à l'étranger : coût du travail élevé, réglementation contraignante, culture de conflit social, avec en toile de fond les 35 heures et le durcissement du droit de licenciement et en perspective, les délocalisations et la perte de compétitivité. Les chiffres leur donnent raison : dans les dix dernières années, les investissements étrangers n'ont progressé que de 19 % en France, contre 120 % aux Etats-Unis et 111 % en Irlande. S'agissant de la compétitivité, notre pays se situe désormais au vingt-cinquième rang des 49 pays les plus industrialisés. Quant à notre climat social, il nous place au dernier rang pour la moindre durée annuelle du travail, la qualité de nos relations sociales, le niveau de nos charges patronales, les grèves à répétition et la complexité de notre droit du travail...

La nouvelle définition du licenciement économique, qui allie la rigidité à l'imprécision, ouvre une voie royale à de longs contentieux, avant que la Cour de cassation ne tranche à nouveau.

Que signifient « par tout autre moyen » ou « sauvegarde de l'activité » ? Ces imprécisions conduiront le juge à s'immiscer encore davantage dans la gestion de l'entreprise.

M. Maxime Gremetz - Ah !

M. François Goulard - C'est vrai.

M. Jean Ueberschlag - Rappelons qu'en Allemagne, l'employeur est seul juge de la nécessité et de l'urgence (Exclamations sur les bancs du groupe communiste), le pouvoir judiciaire ne s'immisçant pas dans ses choix de gestion. La multiplication des contentieux et l'insécurité juridique n'assureront en rien une meilleure défense des salariés et de l'emploi.

L'allongement systématique des procédures, avec la double consultation du comité d'entreprise sur le projet de restructuration puis sur celui de licenciement, pourra conduire à des délais supérieurs à six mois en cas de plan social, au risque de précipiter la chute de l'entreprise.

Où est la cohérence économique ?

Ce texte renforcera les inégalités entre les grands groupes, les grandes entreprises qui pourront proposer des plans sociaux généreux, et les entreprises moyennes, qui représentent l'essentiel de notre tissu économique et meurent en silence, loin du tumulte médiatique, privées de toute aide de l'Etat.

Alors que 80 % des licenciements se font déjà hors plan social, gageons que ce chiffre va augmenter, au détriment de nos PME soumises à la concurrence internationale.

Le doublement des indemnités de licenciement sera lourd de conséquences pour les petits entreprises, indolore pour les plus grosses, qui vont déjà au-delà de l'obligation légale.

Si le Gouvernement n'a malgré tout pas jugé bon de modifier son texte, c'est parce que sa démarche est avant tout électoraliste : impuissant face à la médiatisation de certains plans sociaux, il a été contraint de donner un gage aux communistes.

Une législation contraignante va donc protéger ceux qui le sont déjà plus que les autres, mais contrarier l'investissement.

Quant au médiateur, personnage jusque là sans identité, qui va largement intervenir dans la vie des entreprises, nous venons d'apprendre qu'il sera finalement recruté parmi des cabinets de conseil qui sont les seuls à se réjouir de la complexification de notre législation.

M. Germain Gengenwin - C'est bien vrai !

M. Jean Ueberschlag - Une fois encore, l'idéologie et la méthode autoritaire ont prévalu, sans qu'à aucun moment n'ait été prise en compte la situation des entreprises françaises dans le contexte international. Ce bel isolationnisme a des relents d'archaïsme. Or jouer contre la compétitivité de nos entreprises, c'est jouer contre l'emploi et contre les salariés.

Je ne reviendrai pas sur la formation professionnelle, qui est pourtant au c_ur de la question de l'employabilité.

La validation professionnelle, laquelle ne fait que consacrer des acquis sur le passé, alors que la formation doit être tournée vers l'avenir ne réussira qu'en fonction des moyens que l'on dégagera pour l'appliquer.

Enfin, ce texte abroge la loi Thomas sur les plans épargne retraite.

M. Philippe Nauche, rapporteur - Heureusement !

M. François Goulard - Et la PREFON ?

M. Jean Ueberschlag - Voilà donc la seule mesure concrète qu'a prise ce gouvernement en cinq ans dans le cadre la grande réforme des retraites annoncée : l'abrogation d'une loi qui ouvrait la possibilité de se constituer une retraite complémentaire. Vous refusez ainsi aux salariés du privé ce dont disposent déjà les agents de la fonction publique.

Ce texte est à n'en pas douter une faute politique aux lourdes conséquences économiques pour nos entreprises. Le groupe RPR y demeure donc opposé. Et soyez assuré qu'une des premières missions de la nouvelle majorité qui emplira bientôt cet hémicycle (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste) sera d'abroger ses dispositions les plus nocives. Ce projet, qui est passé en dix-huit mois et sept lectures de 48 articles à plus de 200, ne marque nullement un progrès de notre législation sociale, nous voterons résolument contre.

M. Germain Gengenwin et M. François Goulard - Très bien !

M. Germain Gengenwin - Demain, ce texte devrait être adopté, grâce au soutien d'une majorité retrouvée par le Gouvernement, mais au prix d'une modification profonde du texte initial, qui est passé de 70 à 224 articles.

Surtout l'essentiel du débat s'est finalement concentré sur le volet licenciement économique, qui marque un changement profond de notre législation du travail, je le regrette car les autres dispositions n'étaient pas toutes négatives. Que les choses soient claires : comme vous, nous avons été indignés de la façon dont certaines entreprises se sont comportées vis-à-vis de leurs salariés, licenciés de manière brutale et sans préavis. Pour autant, nous sommes en désaccord avec les solutions que vous proposez. Loin de moderniser les rapports sociaux, la superposition des procédures et des consultations va au contraire compliquer les relations dans l'entreprise, sans que soit renforcée, bien au contraire, la protection des salariés.

Ces dispositions relèvent plus du marchandage politique entre vous et vos alliés communistes que d'une véritable réflexion sur les moyens d'éviter les situations dramatiques que connaissent certains salariés.

Votre démarche aurait dû s'appuyer sur un dialogue avec les partenaires sociaux, mais ce dialogue n'a pas eu lieu et les syndicats s'en sont étonnés. En fait, vous tenez aux entreprises un double langage : d'un côté, vous souhaitez un pilotage lucide pour prévenir en temps utile les difficultés conjoncturelles, de l'autre, le licenciement économique est défini d'une telle manière que les initiatives pour opérer ces adaptations en temps utile seront impossibles.

Ainsi, la suppression de l'adverbe « notamment » dans la nouvelle définition du licenciement économique ouvre la voie à une dangereuse confusion des rôles : elle laisse désormais au juge la capacité d'apprécier la pertinence des décisions de gestion prises au sein de l'entreprise, le chef d'entreprise devant apporter la preuve qu'il n'avait pas d'autre possibilité. Mais les entreprises risquent ainsi de recourir davantage au licenciement pour motif personnel, afin d'éviter cet écueil.

Quant au droit ouvert au comité d'entreprise de s'opposer au projet de restructuration, c'est un leurre : s'il ne va pas interdire les licenciements, il va allonger les procédures, dont la durée moyenne sera portée à 200 jours, soit près du double de ce qu'elle est chez la plupart de nos concurrents européens, Et encore, ce délai ne comprend-il pas le congé de reclassement de neuf mois, pris en charge par l'entreprise. Cet allongement, s'il est supportable pour les grands groupes, sera très préjudiciable aux PME, alors que ce sont elles qui embauchent le plus. Lorsqu'il y a urgence, la PME doit aller vite, et procéder donc à des suppressions d'emplois plus nombreuses, dans l'urgence, sans que les possibilités de reconversion soient mises en _uvre dans les meilleures conditions.

Mais la plus fâcheuse des conséquences de votre projet est la terrible insécurité juridique qu'il va entraîner. Le plus grand flou demeure autour de certaines des dispositions et certains juristes soulignent par exemple à quel point la notion de « sauvegarde de l'activité » est susceptible d'ouvrir un contentieux considérable. Cette incertitude risque d'avoir de graves effets sur notre économie. Car, pour se protéger, les décideurs repousseront des projets d'investissement pourtant susceptibles de créer des emplois, par peur de ne pouvoir procéder aux adaptations nécessaires. Elle encouragera également des contournements de la loi, par un recours accru à l'intérim, ou par l'externalisation de certaines activités, ce qui accélérera la délocalisation. Notre pays s'en trouvera moins attractif. Or, comme le soulignait Laurent Fabius le 21 novembre dernier, « que personne ne s'y trompe, la détérioration de la compétitivité des entreprises est toujours payée par les salariés. Là où l'on misait hier sur la réglementation et la norme, il faut aujourd'hui valoriser aussi le contrat et la négociation. Les salariés, les entreprises, l'Etat ont tous à y gagner ».

M. Philippe Nauche, rapporteur - La négociation a besoin d'outils...

M. Germain Gengenwin - Les chefs d'entreprise étrangers louent la qualité de notre main-d'_uvre, de nos infrastructures et de notre système de formation, Mais dans le même temps, ils sont de plus en plus nombreux à dénoncer l'intervention excessive de l'Etat dans les relations économiques,...

M. Jacques Desallangre - Si seulement c'était vrai...

M. Germain Gengenwin - ...et la lourdeur de notre réglementation, que ce texte va encore aggraver.

Les investisseurs étrangers aspirent avant tout à un environnement cohérent, que le législateur ne modifie pas sans cesse et qui ne soit pas soumis à l'interprétation des tribunaux. Ce n'est pas ce que nous allons leur offrir avec ce projet.

Autre reproche majeur, ce texte est une occasion manquée. Vous êtes passés à côté du sujet, pourtant au c_ur de la problématique de l'emploi, de la relance du dialogue social dans l'entreprise. En voulant faire une loi de circonstance, destinée à satisfaire avant tout les composantes de la majorité plurielle et à montrer votre capacité d'action après les annonces des plans sociaux, le Gouvernement a gâché la chance réelle qu'il avait de moderniser les rapports dans l'entreprise et de donner de nouveaux droits aux salariés, celui d'être mieux informé; celui d'être mieux formé ; celui d'être plus étroitement associé au processus de décision.

On aurait pu imaginer la création d'un véritable compte épargne-temps, abondé par l'entreprise et disponible dans les périodes difficiles. Rien n'a été fait ! Au-delà, c'est également une plus grande participation des salariés à la vie de leur entreprise et au processus de décision qu'il aurait fallu renforcer. Notre législation du travail se caractérise en effet aujourd'hui par la faible implication des partenaires sociaux.

L'intervention du médiateur, à laquelle nous ne sommes pas opposés, s'apparente davantage à une simple étape dans la procédure qu'à un acte positif qui favoriserait le dialogue social.

Ce texte relève avant tout de l'affichage politique pour un Gouvernement qui cherche à rassurer à bon compte sa majorité dite plurielle. Certes, il comporte quelques bonnes dispositions,...

M. Jean Ueberschlag - Elles sont rares...

M. Germain Gengenwin - ...notamment en ce qui concerne la validation des acquis de l'expérience. On ne peut que regretter que vous n'ayez pas eu le courage d'aller plus loin et de proposer une véritable réforme de notre système de formation professionnelle, afin de permettre la reconnaissance d'un droit individuel du salarié à se former. Je profite de votre présence ce soir, Madame la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle, pour le dire.

M. Jean Ueberschlag - Eh oui ! Mme Guigou se désintéresse de ce texte !

M. Germain Gengenwin - Le Gouvernement a privilégié une démarche strictement politique. Il doit dès lors assumer toutes les conséquences d'une loi inadaptée aux exigences des entreprises et décalée par rapport aux attentes des salariés. Le groupe UDF refuse de s'associer à une telle démarche, et votera contre le projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Jacques Desallangre - Nous voici donc, au terme de longues discussions, devant le texte qui devait - selon les déclarations du Premier ministre en 1999 - réformer le dialogue social et renforcer la protection des salariés face aux licenciements boursiers. Examinons donc si cette loi répond aux objectifs fixés au lendemain des licenciements opérés, sans justification industrielle, par Michelin, Danone, Marks et Spencer, Alstom et tant d'autres. Devant l'indignation des salariés, bénéficiant d'une large solidarité des Français, le Gouvernement a voulu apporter des réponses par les projets dits de régulation économique et de modernisation sociale.

Le projet tel qu'il nous fut présenté en mai 2000 s'apparentait à un simple DMOS et devait donc gagner en volontarisme politique. C'est pourquoi j'avais déposé, au nom des députés du MDC, des amendements en vue de donner plus de souffle à certains articles, de rééquilibrer le rapport de force entre salariés et employeurs, d'encadrer le pouvoir exorbitant des patrons en matière de licenciement et de responsabiliser les actionnaires. Nous souhaitions ainsi lutter contre le discours de résignation qui s'insinue dans les consciences, paré comme toujours des atours de la modernité. Beaucoup d'entre nous semblent avoir accepté la réduction de la société à son économie, et de l'économie réelle à son abstraction financière... Nous devons construire des contre-pouvoirs citoyens pour lutter contre cette idéologie préjudiciable aux peuples et à nos régions. Comment accepter que les actionnaires exigent un taux de retour sur investissement à deux chiffres alors que l'économie nationale ne progresse que de 2 % ? (Exclamations sur les bancs du groupe DL) Ce comportement socialement irresponsable n'est toujours pas jugulé alors qu'il est la cause première des licenciements boursiers et que l'emploi, comme le reconnaît M. Seillière, « est devenu la seule variable d'ajustement ».

Mais cette dictature des marchés financiers ne s'est imposée que grâce au renoncement des gouvernements successifs, qui ont consenti au traité de Maastricht et à une construction européenne libérale, uniquement préoccupée d'instaurer la concurrence sur tous les marchés.

Considérant que les salariés et la collectivité nationale n'avaient pas à supporter le coût économique et social des licenciements boursiers, nous proposions de proscrire pour les sociétés prospères le recours à des licenciements abusivement appelés économiques, et de renforcer l'obligation de formation. Tout manquement à cette interdiction devait être sanctionné par une « restitution sociale » pesant sur les dividendes des actionnaires. Mais, une fois l'émotion passée et les larmes séchées, le cynisme revint au galop. Et de la grande réforme, il ne resta plus rien... Le rejet de nos propositions par le Gouvernement et la majorité, l'anémie du projet de loi ont justifié notre vote contre le texte, dès la première lecture.

Aujourd'hui, les très vives réactions du MEDEF devant la réécriture de l'article L. 321-1 du code du travail laisseraient supposer qu'on réforme en profondeur les motifs du licenciement économique.

M. François Goulard - C'est bien le cas !

M. Jacques Desallangre - Qu'en est-il réellement ? Les salariés licenciés hier chez Wolber, Moulinex ou Lu, auraient-ils conservé leur emploi si la nouvelle définition avait été en vigueur ? Là est la vraie question, si nous voulons mesurer l'effet du travail législatif pour la protection des salariés contre les licenciements boursiers.

Hélas, je crains que les agitations du MEDEF et des cinquante-six patrons ne soient qu'une illusion, une aubaine, qui vient accréditer à tort la thèse d'une réforme en profondeur. Le nouvel article L. 321-1 supprime certes l'adverbe « notamment », qui a permis à la jurisprudence d'élargir le champ du licenciement économique en l'autorisant pour préserver la compétitivité de l'entreprise. Mais on nous demande en même temps d'inscrire dans la loi la notion de « sauvegarde de l'entreprise ». Or Mme la ministre a reconnu que cette notion est intimement liée à celle de compétitivité. Comment prétendre combattre les injustices, quand on se borne à consacrer dans la loi, la jurisprudence qui les a permises ?

Je ne peux comprendre que le MEDEF et la droite s'émeuvent de cette réforme : à part l'allongement des délais de deux à trois semaines, la nouvelle procédure ne va pas au-delà de ce que pratiquent les grandes entreprises. Le projet ne répond donc pas à nos inquiétudes et à celles des salariés. Ceux-ci ont vu se multiplier les vagues de licenciement en période de croissance, qu'en sera-t-il demain, alors que le FMI et l'OCDE revoient à nouveau à la baisse les perspectives pour l'Europe ? Non, les salariés ne seront pas mieux protégés contre la spéculation et les licenciements boursiers.

Le refus des députés du MDC de participer à cette illusion et l'intransigeance opposée à nos propositions nous amèneront à voter de nouveau, comme nous l'avons fait depuis la première lecture, contre ce projet de loi.

M. Germain Gengenwin - Très bien !

M. François Goulard - Madame la ministre chargée de la Nuit (Sourires) - soit dit, cette fois en toute sympathie -, je veux avant d'entamer mon propos vous communiquer une information qui nous réjouit, et que M. Accoyer saura commenter avec plus de science que moi : le Conseil constitutionnel a annulé certaines dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale, en particulier celles qui « bidouillaient » les comptes de l'année 2000 dans des conditions invraisemblables. Nous les avions dénoncées ici à maintes reprises : le Conseil nous a entendus, et nous nous en réjouissons (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Maxime Gremetz - On a les victoires qu'on peut.

M. François Goulard - C'est une victoire du droit.

On sait quelles circonstances ont conduit aux modifications du droit de licenciement qui nous sont proposées, avec ces affaires malheureuses de plans sociaux, sources de véritables drames. Elles vous ont conduit, en catastrophe, à proposer des textes : cette manière de légiférer est mauvaise. Les lois ne doivent pas être des réponses de circonstance aux attentes de l'opinion, trompée par vos discours fallacieux. On sait en outre quels marchandages politiques ont entouré l'élaboration de ces textes.

M. Jacques Desallangre - Nous n'en sommes pas.

M. François Goulard - D'un côté, le Parti communiste, qui malgré une idéologie moribonde, retrouve quelque vivacité quand il s'agit de son vieil ennemi, le capitalisme, incarné par l'entreprise privée. De l'autre, les Verts, jamais en retard d'une irresponsabilité (Sourires sur les bancs du groupe du RPR), et comme toujours plus gauchistes qu'écologistes. Il est regrettable que la loi se détermine en fonction de telles influences, et qu'on pèse les termes d'un texte essentiel pour les entreprises et les salariés au trébuchet des équilibres internes à la majorité...

D'autre part, où est le dialogue social dans l'élaboration de ce texte ? Où est la consultation des partenaires sociaux ? Les syndicats de salariés ont-ils, à un moment quelconque, été entendus ? La réponse est non.

Au-delà des circonstances, considérons le fond. Notre droit du travail, déjà plus complexe et copieux que tout autre, va être à nouveau complexifié. Il fait déjà la part belle à l'intervention du juge. Mais celui-ci sera appelé plus encore, désormais, à pénétrer dans l'entreprise et à se prononcer sur ses actes de gestion. Son intervention est en effet prévue dans de nombreuses procédures. Je pense à l'amendement dit Michelin : en cas d'échec de l'accord sur la réduction du temps de travail, c'est au juge qu'on s'en remet. Je pense au désaccord éventuel sur la désignation du médiateur : c'est le président du TGI qui tranchera. En outre, on introduit dans le droit du licenciement des notions nouvelles qui seront soumises à l'appréciation du juge.

Or cette intervention permanente de la justice va ouvrir une période d'instabilité juridique, car nul ne saura quelle interprétation donner au droit : pendant des années, d'ici que la jurisprudence de la Cour de cassation ait fixé les choses, nous allons vivre dans un flou juridique préjudiciable aux relations sociales et à la bonne marche des entreprises.

Vous allez très loin dans la transformation du droit du licenciement, et la nouvelle définition du licenciement économique est lourde de conséquences, contrairement à ce qu'affirment certains membres de la majorité qui auraient voulu aller plus loin. La notion de mise en cause de la pérennité de l'entreprise, celle de sauvegarde de la pérennité de l'entreprise - notions dont la réalité est requise pour la qualification de licenciement économique - permettront au juge d'aller très loin dans l'appréciation du degré de dégradation de la situation de l'entreprise avant d'autoriser le moindre licenciement économique. Le plan social - devenu par miracle plan de sauvegarde - sera apprécié au regard des moyens de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient - c'est une arme redoutable, dont nul ne peut prévoir les effets.

A cela s'ajoute l'allongement des procédures. On comprend que cinquante-six grands patrons - dont certains professent des idées de gauche (Exclamations sur les bancs du groupe communiste) et ont été nommés à la tête d'entreprises publiques, depuis lors privatisées, par des gouvernements de gauche - aient voulu vous alerter sur les conséquences de ces textes pour la vie des entreprises.

Cette manifestation est unique : dans aucune grande démocratie on n'a vu autant de grands patrons alerter solennellement un gouvernement sur les conséquences de ses actes.

Votre intention est de rendre les licenciements plus difficiles. Vous allez en effet les rendre infiniment plus difficiles ! Dans les autres pays européens, on a davantage le respect de l'entreprise et de celui qui la dirige.

Il est nécessaire, évidemment, d'encadrer le droit de licencier ; tous les pays, bien sûr, le font.

M. Jacques Desallangre - Non !

M. François Goulard - Si. Mais peut-on sans inconvénient aller très au-delà de ce que font tous nos partenaires ?

Si l'on peut retarder des licenciements, jamais on ne les empêche. L'actualité économique, hélas, nous le prouve. Avec de telles mesures, vous allez d'abord accélérer les dépôts de bilan : d'une part, parce que vous allez empêcher les entreprises en difficulté d'avoir les réactions rapides qui, souvent, sont seules susceptibles de les sauver ; d'autre part, parce que vous allez encourager le dépôt de bilan délibéré, comme l'a souligné le premier un membre de votre majorité, notre collègue Tourret, qui est un praticien du droit.

M. Jacques Desallangre et M. Maxime Gremetz - Il ne connaît pas l'entreprise !

M. François Goulard - Vous allez, ensuite, produire un effet dissuasif sur la création d'emplois. C'est vrai pour les entreprises étrangères qui pourraient s'implanter chez nous comme pour les entreprises françaises. Parce que vous rendez la vie des grands groupes impossible, Alcatel a décidé de devenir une entreprise sans usines et de faire appel à des sous-traitants, de préférence étrangers.

Vous n'aimez pas les entreprises, c'est votre droit le plus strict (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV), mais le pays en paie les conséquences ! Fiscalité plus lourde que partout ailleurs, renchérissement insensé du coût de la main-d'_uvre avec les 35 heures, droit du licenciement infiniment contraignant : voilà le bilan de cette législature pour les entreprises françaises (Mêmes mouvements).

Nous avons besoin d'entreprises dynamiques qui créent de la richesse et de l'emploi. Par votre faute, le chômage progresse à nouveau dans notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR ; protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. Alain Calmat - Un million de chômeurs en moins !

M. Maxime Gremetz - Si nous communistes avions eu à faire la loi, nous ne l'aurions pas faite comme cela.

M. Bernard Accoyer - C'est bien la peine !

M. Maxime Gremetz - Nous serions allés plus loin.

En ce qui concerne la formation professionnelle et la validation des acquis, un progrès important a été accompli ; mais il serait indispensable de revoir la loi de 1971.

Sur le harcèlement moral, nous avons fait un grand pas. Nous le devons beaucoup à notre ami Georges Hage, qui a tenu bon, au prix de quelques moqueries. La notion prend place dans notre code du travail ; et la charge de la preuve incombera à la personne qui harcèle, non à celle qui est harcelée.

Dans le domaine de la lutte contre la précarité, je ne sous-estime pas les améliorations apportées par ce texte, mais il reste beaucoup à faire. Un exemple : l'entreprise Whirpool, à Amiens, compte plus de 30 % de salariés précaires sur un total de 800.

Et puis, au moment où le système de retraite par répartition fait l'objet d'une attaque en règle, je me réjouis que nous décidions dans cette loi d'abroger la loi Thomas.

Mais j'ai gardé le gros morceau pour la fin.

« La loi de modernisation sociale est une loi contre l'emploi. L'organisation patronale la fera annuler dès que les circonstances politiques le permettront », voilà ce que vient de déclarer M. Ernest-Antoine Seillière.

Pourtant, Monsieur Goulard, il est faux de dire que nous allons plus loin que partout en Europe en matière d'encadrement des licenciements. En revanche nous avons restreint la définition du licenciement économique afin d'empêcher les licenciements boursiers.

Il n'est pas vrai non plus que nous demandons au juge de trancher ; moi, je propose qu'on donne des droits nouveaux aux salariés et à leurs représentants.

M. François Goulard - Adressez-vous au Gouvernement !

M. Maxime Gremetz - Les salariés doivent avoir le droit de discuter de leur avenir, qui est aussi celui de leur région et de leur pays.

Le droit d'opposition du comité d'entreprise n'est pas de notre invention : il existe en particulier chez nos voisins allemands.

M. François Goulard - Pas dans les mêmes conditions !

M. Maxime Gremetz - J'aurais souhaité qu'on institue des droits nouveaux.

M. François Goulard - Encore faut-il des patrons...

M. Maxime Gremetz - Ils sont là ! Mais, pour nous, il n'y a pas les patrons d'un côté et les salariés de l'autre. Vous êtes, vous, pour le patronat de droit divin ; nous, nous voulons que patrons et salariés débattent ensemble du devenir de l'entreprise, de l'emploi et de la société qu'ils ont à construire ensemble. Et, en ce qui me concerne, j'aime tant les entreprises que je me bats pour qu'elles ne partent pas d'Amiens ! Ainsi en ce qui concerne Honeywell. Mais Honeywell préfère s'installer aux Etats-Unis, après avoir épuisé les fonds publics. Et Magneti-Marelli ferme son site en licenciant 550 personnes qui se sont dépensées sans compter pour l'entreprise, des années durant. Et Bata va envoyer ce soir d'autres lettres de licenciement...

Pourtant Magneti-Marelli est loin d'être une entreprise en difficulté : elle appartient au groupe Fiat, elle a reçu 300 millions d'argent public. Mais, après avoir tout dépensé, elle préfère délocaliser, parce qu'elle gagnera plus ailleurs. On ne peut tolérer de tels comportements.

M. Bernard Accoyer - Voilà l'interventionnisme !

M. Maxime Gremetz - Si je compare vos réactions et celles du MEDEF, je vois bien de quel côté vous vous situez ! Comme M. Bush, M. Seillière estime que ceux qui ne sont pas avec lui sont contre lui : vous avez visiblement choisi. Nous, nous sommes avec les salariés, du côté de la justice sociale et du progrès ! (Applaudissements sur bancs du groupe communiste)

La discussion générale est close.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle - Monsieur Goulard, votre introduction était des plus charmantes, mais je ne puis vous laisser dire que ce gouvernement ignorerait le dialogue social. Secrétaire d'Etat à la formation professionnelle, cela a été mon seul souci pendant quatre ans ! J'ai ainsi pu introduire des droits nouveaux : je pense à la validation des acquis de l'expérience, novation soutenue par les partenaires sociaux...

M. Bernard Accoyer - Oui : toute la France est dans la rue !

Mme la Secrétaire d'Etat - ...ou au financement de l'apprentissage, qui a également exigé d'amples négociations (Exclamations sur bancs du groupe DL et du groupe du RPR). Si nous avons partiellement réformé la formation professionnelle, nous n'y sommes parvenus qu'en nous appuyant sur ce dialogue. Certes, j'éprouve une certaine frustration de n'avoir pu traiter de la formation des salariés ni refondre la loi de 1971 mais, de cet échec, chacun porte une part de responsabilité : en ce qui me concerne, précisément parce que j'ai voulu croire jusqu'au bout en ce dialogue social. Cependant, le besoin d'organiser la formation tout au long de la vie est tel que ce dialogue ne peut que reprendre. Mais il le fera sans se limiter aux partenaires sociaux : il doit englober tous les autres acteurs, en particulier les régions et l'Etat (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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MOTION DE RENVOI EN COMMISSION

M. le Président - J'ai reçu de M. Jean-Louis Debré et des membres du groupe RPR une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du Règlement.

Mme Nicole Catala - Si je défends cette motion, c'est pour donner à la majorité plurielle et à Mme Guigou, dont je déplore l'absence, une ultime chance de remettre sur le métier ce texte irréfléchi et profondément modifié en deuxième lecture par des amendements laborieusement négociés avec le groupe communiste, sans la moindre concertation préalable avec les organisations syndicales. Cette façon d'élaborer la loi a engendré de telles imperfections que Mme Guigou se serait enfin décidée, aujourd'hui, à engager cette concertation, afin de « lever certaines réticences et de possibles ambiguïtés ». Il sera bien temps de clarifier après le vote de la loi ! Veut-on laisser au juge le soin de faire le travail que le législateur n'a pas fait ?

Il nous faut donc prendre le temps de réexaminer ce projet, d'en peser les termes, d'en mesurer les conséquences - et vous devez par conséquent voter cette motion de renvoi.

En l'état, ce texte ne peut avoir que de graves conséquences pour nos entreprises. En premier lieu, en effet, il portera une atteinte directe à la liberté de gestion en restreignant le choix des employeurs : ceux-ci devront obligatoirement négocier l'abaissement de la durée du travail à 35 heures, quand bien même les difficultés de leur entreprise appelleraient une décision contraire ; ils ne pourront réduire leurs effectifs que sous des conditions à la fois très strictes et juridiquement imprécises ; ils ne pourront licencier un salarié avant d'avoir tout tenté pour le reclasser dans l'entreprise ou dans le groupe - ce qui supposera d'aller contre la liberté de recrutement des autres chefs d'entreprise de ce groupe ! Enfin, et c'est peut-être le point qui me choque le plus car je pensais que les communistes avaient le souci du travail bien fait, ces employeurs ne pourront prendre en compte les qualités professionnelles pour déterminer l'ordre de licenciement (Exclamations sur les bancs du groupe communiste). Le pouvoir de décision des entrepreneurs se trouve ainsi sérieusement entamé. Or la Cour de justice des Communautés européennes a reconnu formellement le principe de ce pouvoir de gestion, notamment dans ses arrêts relatifs à la directive de 1975, refondue en 1998, qui visait précisément à encadrer les licenciements collectifs.

Deuxième grief à l'encontre de ce texte : il fera planer sur les entreprises un aléa redoutable dans la mesure où il obligera à réintégrer des salariés, éventuellement en nombre et plusieurs années après leur licenciement, dès lors que celui-ci aura été entaché de quelque irrégularité. Jusqu'ici, une telle décision ne pouvait intervenir que si un statut d'ordre public avait été méconnu. Elle sera désormais la sanction de droit commun d'une irrégularité de forme ! Le changement ainsi apporté à notre droit du travail est d'autant plus fâcheux que rien n'est plus gênant pour un chef d'entreprise que l'incertitude. On aurait pu faire l'économie de cette dernière si la majorité plurielle avait accepté que le plan social puisse faire l'objet, au sein du comité d'entreprise, d'un accord fixant la situation juridique des uns et des autres. Mais la gauche ne veut pas de tels accords, pourtant couramment pratiqués en Allemagne et prévus par la directive européenne.

M. Maxime Gremetz - C'est dans le texte : relisez-le !

Mme Nicole Catala - Ce n'est pas dans le projet !

Cette obligation de réintégration porte également atteinte à un principe constitutionnel : celui de la liberté contractuelle, proclamé à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel - dès 1998, celui-ci a interdit au législateur de porter aux conventions légalement conclues des atteintes méconnaissant manifestement l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme.

Le Conseil constitutionnel a réaffirmé cette position dans ses décisions du 23 juillet 1999 et du 19 décembre 2000, et a conclu en outre, dans sa décision du 9 novembre 1999 relative au Pacs, à la faculté pour tout cocontractant de se dégager à tout moment d'un contrat à durée indéterminée. Or, l'obligation de réintégration porte atteinte à ce principe, et sera donc censurée ipso facto.

A l'heure où les licenciements se multiplient, la majorité plurielle voudrait faire croire qu'elle peut arrêter par la loi la dégradation du marché de l'emploi, et qu'elle contribue, ce faisant, à la construction de l'Europe sociale. Mais cette loi, chacun en est conscient, n'empêchera pas les réductions d'effectifs là où les contraintes économiques les imposeront : elle ne fera que les rendre plus longues, plus coûteuses, plus aléatoires. Etant donné que les investisseurs comparent désormais, outre les régimes fiscaux, les législations sociales nationales, il s'ensuivra des conséquences très défavorables pour notre pays, qui deviendra une sorte d'exception dans le mauvais sens du terme. Je m'étonne de l'aveuglement du Gouvernement, qui paraît ignorer les contraintes de la compétition internationale : le dispositif fonctionnerait peut-être si la France était un bocal à l'abri de toutes les tempêtes, mais ce n'est pas le cas !

La législation européenne n'a pas choisi de limiter les pouvoirs des chefs d'entreprise, de les enserrer dans des contraintes étatiques ou administratives, mais seulement d'imposer des procédures préalables de consultation et de négociation. La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, constante depuis 1985, est que la directive sur les licenciements collectifs a pour objet d'harmoniser partiellement les procédures, et non de restreindre la liberté, pour l'employeur, d'aménager la collaboration de son personnel de la façon la plus conforme à ses besoins.

Parce que ce projet est lourd de conséquences pour l'investissement et l'emploi dans notre pays, je demande à l'Assemblée de voter son renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Gérard Terrier, rapporteur - J'ai eu le sentiment d'entendre, non une motion de renvoi, mais une exception d'irrecevabilité. La réintégration ne porte nullement atteinte à la liberté contractuelle : elle est la simple conséquence du fait qu'un licenciement décidé sans respecter les conditions légales est nul et de nul effet. Il est toujours loisible à chacun de rompre un contrat, mais encore faut-il suivre les procédures prévues et en assumer les conséquences : on ne peut, par exemple, se dégager du jour au lendemain des liens du mariage (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR).

M. Bernard Accoyer - Cela n'a rien à voir !

M. Jean Ueberschlag - Vous dites n'importe quoi !

M. Gérard Terrier, rapporteur - J'invite l'Assemblée à repousser la motion de renvoi.

M. Philippe Nauche, rapporteur - J'observerai, pour ma part, que Mme Catala n'a rien trouvé à redire aux dispositions du titre premier, et j'en conclus que nous pouvons compter sur le soutien de l'opposition à l'instauration du projet social d'établissement dans les hôpitaux, des pharmacies à usage intérieur, du laboratoire français du fractionnement sanguin et des biotechnologies... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR)

M. Bernard Accoyer - Vous prouvez vous-même que ce texte est un fourre-tout !

M. Philippe Nauche, rapporteur - Quant au dialogue social, que d'aucuns prônent en sautant comme des cabris (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR), rappellerai-je que c'est sur leur saisine que le Conseil constitutionnel avait censuré une disposition relative au conventionnement médical qui résultait d'un accord de l'ensemble des partenaires concernés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Germain Gengenwin - Il peut sembler paradoxal de renvoyer en commission un texte qui a déjà fait l'objet de sept lectures, Assemblée et Sénat confondus ; c'est pourtant ce que nous entendons faire. De 70, en effet, le nombre d'articles est passé à 224, et ce ne sont pas des dispositions mineures ! Les entreprises ont avant tout besoin de stabilité juridique, et c'est une mauvaise action, ce nous semble, que de bouleverser le droit du licenciement à seule fin de permettre au parti communiste de parader sous les préaux... On fait forcément du mauvais travail quand on légifère sous le coup de l'émotion, sans prendre le temps d'analyser les réalités ni même de consulter les partenaires sociaux, qui n'ont appris le contenu du nouveau dispositif que par la presse !

M. Bernard Accoyer - Le groupe RPR votera la motion de renvoi, excellemment développée par Mme Catala. En écoutant attentivement sa démonstration, j'étais peiné que nous en soyons arrivés là, que le Gouvernement ait choisi, par démagogie, par facilité, par renoncement, de céder à des demandes qui sont hors du temps. Notre pays va en effet se trouver complètement décalé par rapport à ses partenaires de l'Union européenne et aux autres pays développés, avec lesquels, que nous le veuillons ou non, nous sommes en compétition. Cette loi est un mauvais coup porté, plus encore qu'aux entreprises, aux salariés, et l'on commence déjà à en percevoir les conséquences sur l'investissement étranger en France et sur l'investissement des entreprises françaises hors de France. Le chômage, hélas, s'en trouvera encore aggravé.

Cette série de renoncements constitue le bilan noir de M. Jospin, qui a pourtant bénéficié d'une période de croissance sans précédent, après la difficile récession pendant laquelle ses prédécesseurs ont dû « ramer » pour qualifier la France pour l'euro et permettre le retour de la croissance (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Néri - Ils ont tellement ramé qu'ils ont coulé !

M. Bernard Accoyer - Or, cette croissance, vous l'avez gaspillée. Qu'avez-vous fait pour moderniser notre système de santé ? De retraite ? Rien ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Le Gouvernement s'est acharné sur une mesure dogmatique : les 35 heures obligatoires. Le résultat est là : contrairement à vos allégations mensongères, la France est le pays européen qui a le moins réduit le chômage (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste).

La France est dans la rue. Les salariés réalisent que leur pouvoir d'achat est bridé et qu'ils subissent une nouvelle pression : ils savent que l'on ne peut gagner davantage et garantir sa protection sociale en travaillant moins. Le Conseil constitutionnel vient encore de vous sanctionner lourdement (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste). Permettez-moi, Monsieur le président, de communiquer cette nouvelle à nos collègues : le budget de la nation a contracté une dette supplémentaire de 16 milliards envers la sécurité sociale. La décision du Conseil constitutionnel n'est que justice : M. Jospin a voulu faire payer les 35 heures par l'argent de la protection sociale, le voici sanctionné pour cette malversation.

Le Conseil constitutionnel a également sanctionné une disposition qui tourne le dos aux principes élémentaires du dialogue social : celle que Mme Guigou a osé baptiser « amendements d'esquisse », comme elle a prétendu s'être concertée avec des professions de santé qui sont descendues dans la rue, considérant qu'on les obligeait à négocier le fusil sur la tempe ! Notre conception du dialogue social est autre (« Juppé ! »sur les bancs du groupe socialiste). Le Conseil constitutionnel a dénoncé un autre détournement : un hold-up de 6,5 milliards sur les caisses d'allocations familiales. Devant un tel mépris de l'avenir de notre protection sociale, et ce nouveau coup porté à notre droit du travail, nous ne pouvons que nous associer à la motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Maxime Gremetz - Vous ne serez pas étonnés d'apprendre que nous ne voterons pas cette motion. Et je mets quiconque au défi de saisir le Conseil constitutionnel sur ce texte.

Madame Catala, vous êtes déçue par les communistes qui, dites-vous, aiment pourtant le travail bien fait. C'est vrai. Mais un travail bien fait suppose des salariés correctement traités, formés et payés (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste), détenteurs de droits, (« Absolument ! » sur les bancs du groupe socialiste) qui participent à la réflexion sur les finalités de l'entreprise. J'en entends de ces jeunes ingénieurs de Valeo qui se plaignent de n'être jamais entendus et encore moins écoutés ! L'insuffisance de notre productivité tient à celle de la formation, des rémunérations, des droits des salariés. Vous parlez de stabilité pour les entreprises. Et les salariés ? N'ont-ils pas le droit de vivre sans la menace du licenciement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste) Vous vous inquiétez de la réintégration d'un salarié licencié : mais elle n'a lieu que s'il est prouvé que le contrat de travail a été rompu illégalement. Comment accepter l'illégalité ?

Lorsque j'étais délégué du personnel au comité d'hygiène et de sécurité chez Valeo, j'ai été licencié contre l'avis du comité d'entreprise et de l'inspecteur du travail, pour avoir refusé une promotion qui me séparait de mes copains. Le ministre du travail de l'époque, M. Gilbert Grandval, qui était des vôtres, a autorisé le licenciement et j'ai connu plusieurs années de chômage. De telles injustices appartiennent heureusement au passé. Nous avons les prud'hommes, qui sont une particularité française. Pourquoi devrions-nous nous aligner sur ce qui se fait ailleurs ? Ne sommes-nous pas la patrie des droits de l'homme ? Soyons aussi celle des droits du travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

Mme Hélène Mignon - Le groupe socialiste ne votera pas le renvoi en commission. Vous avez mis en exergue le dialogue social et la qualité des relations sociales en Allemagne. Mais ceux-ci reposent sur les droits et les devoirs respectifs des différents acteurs. Les salariés ont un droit à la considération, il est bien reconnu que c'est de leur travail que dépend la compétitivité de l'entreprise. Vous dites que ce texte va accroître le chômage. Mais celui-ci a augmenté dans de nombreux pays qui n'ont ni gouvernement Jospin, ni loi de modernisation sociale. Je regrette enfin la décision du Conseil constitutionnel : les 35 heures et la création de crèches et de structures de petite enfance sont des mesures sociales qui relèvent pleinement du budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe communiste).

La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.

M. le Président - La commission mixte paritaire n'étant pas parvenue à l'adoption d'un texte commun, l'Assemblée est appelée à se prononcer sur le dernier texte voté par elle.

Je vais l'appeler à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.

Conformément aux articles 45, alinéa 4, de la Constitution, et 114, alinéa 3, du Règlement, ceux-ci reprennent des amendements adoptés par le Sénat en nouvelle lecture.

M. Philippe Nauche, rapporteur - L'amendement 1 est de codification.

L'amendement 1, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Gérard Terrier, rapporteur - Même chose pour les amendements 2 et 3.

Les amendements 2 et 3, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Gérard Terrier, rapporteur - L'amendement 4 est rédactionnel.

L'amendement 4, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Nous avons achevé l'examen des amendements.

Je vous rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi auraient lieu demain, après les questions au Gouvernement.

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ACTION SOCIALE ET MÉDICO-SOCIALE (CMP)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire.

M. Francis Hammel, rapporteur de la commission mixte paritaire - Ce texte résulte de cinq années de réflexion et de concertation.

Ce processus a été initié par le rapport de Mme Join-Lambert, en 1995, qui reconnaissait l'inadaptation de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Ce rapport décisif a posé les grands principes de la refonte de la loi de 1975.

Le secteur des personnes handicapées et des personnes âgées, mais aussi celui des enfants et des familles vulnérables ou frappés d'exclusion, est très important, on compte près de 24 500 établissements et services correspondant à plus d'un million de lits ou de places, plus de 400 000 salariés, et des financements publics conséquents de l'assurance maladie, des départements et de l'Etat.

Cet ensemble témoigne également d'un savoir-faire et d'une technicité reconnus par tous. Toutefois, si les grands principes de solidarité qui ont motivé la loi de 1975 restent d'actualité, il n'en demeure pas moins que la législation actuelle est largement obsolète, d'où ce texte.

Garantir le droit des usagers et promouvoir l'innovation sociale et médico-sociale, tels sont les grands principes que cette réforme vise à concilier.

Ce texte définit les droits des bénéficiaires et il en précise les modalités d'exercice. Il élargit aussi les missions de l'action sociale et médico-sociale ; il diversifie les modalités de prise en charge, à domicile et en institution, à temps plein ou à temps partiel ; il développe toutes les solutions favorables au maintien en autonomie ou en intégration en milieu de vie ordinaire pour les handicapés, au maintien à domicile pour les personnes âgées, à l'insertion sociale pour tous.

Afin que chacun exerce ses responsabilités dans la transparence, la réforme des procédures de pilotage favorisera la coordination entre l'Etat et les conseils généraux et améliorera le contrôle des établissements et des services. L'analyse des besoins, l'évaluation de la qualité du service rendu seront renforcées pour mieux répondre aux attentes d'un secteur en constante évolution.

Tel est le texte que l'Assemblée a adopté à l'unanimité en première lecture. Son passage au Sénat a été un peu plus compliqué, la question de l'autorisation de renouvellement de fonctionnement des établissements constituant un point de désaccord non négligeable entre les deux assemblées. La discussion a néanmoins été fructueuse et la CMP a pu aboutir.

Nous avons ainsi retenu une durée d'autorisation de quinze ans au lieu de dix, le renouvellement s'effectuant de manière tacite sauf demande expresse de l'autorité administrative. En outre, deux évaluations seront obligatoirement conduites par un organisme extérieur au cours de cette période. Les critères fondant le renouvellement de l'autorisation ont également été précisés. Je félicite enfin l'administration pour l'important travail de codification accompli. Ainsi corrigé et enrichi, le projet de loi de rénovation de l'action sociale et médico-sociale va enfin répondre aux fortes attentes de cet important secteur. Notre pays reconnaît ainsi véritablement les droits de tous nos concitoyens quels que soient leur vulnérabilité, leurs difficultés ou leur handicap.

J'attends le même vote unanime qu'en première lecture. Je serai bien sûr attentif, Madame la ministre, à une sortie rapide des décrets d'application et au financement des mesures liées à ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées - Je me réjouis de l'accord intervenu en commission mixte paritaire. Ce projet de loi s'inscrit dans la volonté du Gouvernement de lutter contre toutes les formes d'exclusion et de reconnaître à chacun une égale dignité.

Trois principes majeurs ont présidé à l'élaboration de cette réforme : garantir les droits des usagers de ce secteur, promouvoir l'innovation sociale et médico-sociale, responsabiliser l'ensemble des décideurs et des acteurs en organisant leurs relations avec plus de transparence et de rigueur.

Lors de la première lecture du projet de loi par votre assemblée, qui a donné lieu à un vote unanime, vous avez sensiblement enrichi le texte initial. Reconnaissant le droit des usagers, vous avez introduit la participation directe de l'intéressé à son projet d'accueil et d'accompagnement en créant un conseil de la vie sociale. A l'initiative de Pascal Terrasse, vous avez créé un Conseil supérieur des établissements et services sociaux et médico-sociaux et vous avez complété les formules d'association entre établissements et services grâce aux syndicats interétablissements et aux groupements de coopération sociaux et médico-sociaux. Vous avez aussi renforcé les démarches d'évaluation de la qualité des prestations délivrées par nos établissements et services, notamment en instituant l'obligation d'une évaluation par des organismes indépendants. Vous avez conféré une base légale au financement des foyers à double tarification et à l'accueil temporaire, mode de prise en charge tant attendu. Vous avez institué aussi des comités techniques d'établissement, garantissant ainsi une meilleure participation et représentation des personnels. Vous avez élargi le régime des incapacités professionnelles aux personnes condamnées pour crime sexuel ou atteintes aux personnes.

Les sénateurs ont sensiblement amélioré la codification complète du projet, mieux défini les organismes gestionnaires publics et privés d'établissements et de services, précisé le contenu du contrat de séjour et du projet d'établissement. Ils ont approuvé un sous-amendement du Gouvernement prévoyant une information annuelle des partenaires sociaux sur les orientations en matière de politique salariale. Ils ont enfin accepté les propositions du Gouvernement qui permettent aux pouvoirs publics de se doter d'outils de lutte contre les actes de maltraitance en établissements et contre les indélicatesses financières de certains gestionnaires.

Dorénavant, les organismes gestionnaires devront définir, au sein d'une charte nationale, les principes éthiques et déontologiques portés par le secteur social et médico-social. Le projet prévoit aussi des procédures plus efficaces de fermeture des établissements pour des raisons tenant à l'atteinte au bien-être physique ou moral des personnes, ainsi que des modes de transfert des autorisations et des financements des établissements définitivement fermés au bénéfice d'autres personnes morales, afin que l'activité puisse être poursuivie dans les meilleures conditions. Sur ces points, la commission mixte a trouvé un bon compromis.

Le Gouvernement approuve le rétablissement des fenêtres de dépôt et d'examen des projets de création portant sur des établissements et des services de même nature. Le Gouvernement approuve également le rétablissement des autorisations à durée déterminée, même si la durée de 15 ans paraît un peu longue.

La commission mixte paritaire a également mieux précisé et distingué les critères liés à l'autorisation et à son renouvellement de cette autorisation. Ce dispositif épargnera la constitution de dossiers inutiles, il facilitera aussi la tâche des services de l'État et des services départementaux.

La commission mixte paritaire a enfin rétabli l'habilitation par le seul préfet des établissements accueillant des mineurs au titre de l'assistance éducative prescrite par le juge.

Avec ces nouvelles dispositions, c'est la vie quotidienne de plusieurs centaines de milliers de nos concitoyens qui va être améliorée. Cette loi était attendue par tous les acteurs du secteur social et médico-social. C'est un succès pour le Parlement que d'avoir répondu à ces attentes, d'avoir fait prévaloir l'intérêt général, sans arrière-pensées politiques, d'avoir reconnu les apports de ces institutions à la cohésion de notre pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-François Chossy - Je ne laisserai pas plus longtemps le rapporteur dans l'angoisse : le groupe UDF donnera son accord plein mais pas tout à fait entier à ce texte, en regrettant l'absence de dispositions concrètes en faveur de l'intégration des handicapés.

Ce projet marque de nombreuses avancées, par exemple sur la suppression de toute limite d'âge pour l'accueil des handicapés, l'amélioration des procédures d'évaluation, ce qui évitera sans doute quelques maltraitances, l'intégration des foyers de jeunes travailleurs dans le champ de la loi, la mise en place des schémas départementaux, la reconnaissance de l'accueil temporaire. Notre groupe a beaucoup contribué à l'amélioration des dispositions sur ce dernier point, même si les différents modes d'accueil doivent encore être précisés. Je souhaite à ce propos, Madame la ministre, que les décrets d'application soient préparés en concertation avec les associations. J'ose également espérer, comme notre rapporteur, que ces décrets permettront une application rapide du texte.

Dans ce dernier, malgré le travail du Parlement et de la CMP, d'importantes lacunes demeurent. La plus importante, à nos yeux, est le refus du Gouvernement de reconnaître dans la loi le rôle et l'action du secteur associatif concerné par le domaine social et médico-social. Nous avons eu ce débat très longuement en première lecture, sans succès. Le texte n'apporte pas plus de réponses que le manque cruel de structures d'accueil, sur les complexités administratives qui apparentent souvent les démarches à un parcours du combattant, ou sur les déficiences de l'intégration, notamment en matière scolaire - souvent appelée « inclusion » : on puise dans le vocabulaire pour dire, finalement, que le jeune handicapé n'est pas encore pleinement admis dans la société. Pas de réponses non plus sur le manque de formation en direction des familles, des accompagnants et des professionnels.

Au total, en reconnaissant les avancées du projet et en restant mobilisé sur les objectifs qu'il ne prend pas en compte, le groupe UDF approuvera le travail de la CMP.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Chacun s'est félicité, avec raison, du vote unanime de notre assemblée sur ce texte, du succès de la CMP, et du travail conséquent et intelligent de ses deux rapporteurs, Francis Hammel et Paul Blanc. Devons-nous pour autant nous reposer sur nos lauriers et tenir le dossier pour clos ? Certes non ! Nous n'avons qu'à peine effleuré le problème. Qu'attend en effet le secteur social et médico-social ? Une loi de vraie rénovation ; une loi de clarification ; une loi de programmation.

Une loi de vraie rénovation : le présent texte ne fait que ravauder un maillage vieux de plus de vingt-cinq ans et qui a bien vieilli. Depuis lors nous avons connu l'allongement de la durée de la vie, l'explosion des nouvelles technologies, la modification profonde de l'approche de certains handicaps comme l'autisme ou le polyhandicap, de nouvelles approches plus globales des publics exclus, une volonté accrue des personnes âgées ou handicapées de vivre à domicile ; nous voyons émerger chez les aidés et les aidants le désir d'une démarche plus citoyenne et plus respectueuse.

Tout cela requiert de repenser la philosophie fondatrice de la loi d'orientation. C'est au milieu de la réflexion que certains ont soudain découvert ce préalable... On nous dit - comme M. Le Garrec lors de la CMP - que le travail de rénovation de la loi de 1975 est en cours : tant mieux. Mais il reste circonscrit à des cercles très restreints... Aucune des organisations du secteur n'a été conviée à une concertation structurée, comme l'avait fait Jacques Barrot de 1995 à 1997. Nous connaissons déjà beaucoup des sillons qu'il nous faudra creuser : souplesse des prises en charge, droit à compensation, droit à l'innovation, devoir d'évaluation, coordination avec le secteur sanitaire, exigence de planification...

En second lieu, il faudra une clarification des compétences, que notre travail a soigneusement évitée. En première lecture, j'avais fait, avec d'autres, le bilan de l'invraisemblable maquis juridique et administratif qui résulte de l'empilement des textes sans mise en cohérence. Ce maquis touffu, paradoxalement, laisse subsister des béances, dont quelques-unes seulement ont été comblées par notre travail. On me dit que la réforme de l'Etat sera au programme des candidats à l'élection présidentielle : nous verrons bien...

Rénovation, clarification, oui, mais ne rêvons pas. Nous ne pourrons nous contenter de remodeler les architectures et de désigner enfin un pilote dans l'avion médico-social. Notre récent débat sur les regrettables arrêts de la Cour de cassation a au moins permis un point de consensus, et j'ai encore en mémoire l'émouvante intervention de notre rapporteur : notre politique sociale et médico-sociale n'est plus à la hauteur des enjeux. J'ai entendu Mmes les ministres vanter leur politique, selon une figure imposée ; et bien sûr des choses ont été faites par les gouvernements successifs. Je ne mets en doute la bonne volonté, ni même le volontarisme de personne. Mais comment ne pas le voir ? Nous n'avons pas les places nécessaires pour les handicapés vieillissants, les personnes atteintes de démence sénile, les polyhandicapés, les autistes, les cérébro-lésés, les handicaps rares... Le tarif interministériel des prestations sanitaires est obsolète au point que 90 % des nouvelles aides techniques du salon Autonomie ne sont pas prises en charge. Le nombre des auxiliaires de vie est dramatiquement insuffisant, tout comme les aides à l'adaptation des logements, et je pourrais multiplier les exemples...

C'est donc à un effort collectif considérable que nous sommes conviés. Aujourd'hui nous raccommodons quelques-uns des démaillages les plus criants. Demain s'imposera une réforme de grande ampleur. Je milite depuis des années pour une cinquième branche de la sécurité sociale consacrée à la perte d'autonomie. Son financement serait assis sur la solidarité nationale : on éviterait ainsi une situation injuste où des collectivités territoriales à faible potentiel fiscal doivent prendre en charge plus de personnes fragiles que d'autres plus riches. La gestion financière de cette branche serait l'occasion d'un paritarisme rénové donnant enfin sa place au monde associatif. Sa gestion de proximité ferait une large part au conventionnement avec les collectivités, les associations, les établissements...

Une telle architecture mettra seule la personne au centre de notre dispositif législatif. Jusqu'à présent nous construisons des cases pour y faire entrer à toute force des personnes, et en faire sortir d'autres, par exemple pour raison d'âge, même si ces cases leur convenaient : quel gâchis...

Ce texte, Monsieur le rapporteur, a inauguré une nouvelle méthode de travail, fondée sur le dialogue et l'écoute mutuelle. Cette méthode ne doit pas être réservée à un travail législatif a minima. Le plus dur est devant nous (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Patrice Carvalho - Ce texte est attendu. Il vient après cinq ans de réflexion. En 1995, le rapport de l'IGAS, sous la direction de Mme Join-Lambert, a montré l'inadaptation de certaines dispositions de la loi de 1975 et proposé des pistes de réforme. Puis notre collègue Pascal Terrasse a remis sa contribution en mars 2000 à notre commission des affaires sociales. Enfin, le Premier ministre a déclaré, devant le Conseil national consultatif des personnes handicapées, qu'il était temps de légiférer.

Parmi les innovations de ce projet, l'une a particulièrement retenu l'attention des députés communistes : c'est la garantie des droits des usagers du secteur social et médico-social. Inspirées des principes généreux de la solidarité, les lois de 1975 faisaient pourtant l'impasse sur ces droits, et les modifications de 1982, 1983 et 1986 n'y ont guère remédié. La force du présent texte est d'affirmer les droits des bénéficiaires et de leur entourage. Il définit non seulement les droits fondamentaux des personnes, mais leurs modalités d'exercice : charte de la personne accueillie, contrat de séjour, recours possible à un médiateur, projet d'établissement, participation à des conseils d'établissement rénovés... Il faudra examiner le fonctionnement de ces innovations à l'épreuve des faits ; au moins nous voyons combler un vide de la législation actuelle, qui oublie que la personne prise en charge demeure un citoyen.

Un second élément a aussi retenu notre attention : c'est la volonté d'élargir les missions de l'action sociale et médico-sociale et de diversifier les modalités de prise en charge. Il importe de se donner les moyens d'alterner des prises en charge à domicile et en institution, à temps plein et à temps partiel, et de favoriser par tous les moyens le maintien en autonomie ou l'intégration en milieu de vie ordinaire pour les handicapés, le maintien à domicile pour les personnes âgées, l'insertion sociale pour tous.

En liaison avec cette exigence de demeurer citoyen, nous voyons grandir depuis vingt ans l'aspiration à repousser toujours plus loin les frontières de la dépendance.

Un dernier élément a retenu notre attention : c'est le souci de favoriser la concertation et la coordination entre les décideurs, notamment l'Etat et les conseils généraux, mais aussi les régions, ainsi que les communes et leurs groupements.

A présent, reste à s'interroger sur la mise en _uvre de ces mesures dans la réalité. Une personne confrontée au handicap d'un enfant ou à la perte d'autonomie d'un parent est engagée dans une véritable course d'obstacles. Il faut trouver la structure adaptée. Souvent les places manquent et il faut attendre ; ou bien elle est très éloignée... On sait d'autre part à quelles difficultés se heurte l'intégration à l'école d'un enfant handicapé. On arrive souvent à l'âge de dix ans avant que la CDES se prononce sur un placement. Les CLIS sont une bonne chose, mais elles sont souvent surchargées. Dès l'école maternelle, il faut développer ce type de classes.

Je pourrais évoquer encore bien des problèmes que les députés connaissent bien, car c'est dans nos permanences qu'en dernier recours les familles désemparées viennent demander de l'aide. Je n'en prendrai qu'un exemple. Dans ma circonscription, certains cantons bénéficient de services de soins à domicile assurés par des associations. D'autres en sont dépourvus. J'essaie de les en pourvoir ; mais, si j'obtiens les autorisations administratives, je n'ai pas les financements...

Il nous faut assurer le maillage du territoire en services et établissements diversifiés. Mais pouvons-nous le faire en restant dans la logique de gestion comptable, initiée en son temps par M. Juppé, qui continue de présider à nos lois de financement de la sécurité sociale ?

A la lecture de ce projet, j'ai le sentiment que pour une fois, nous abordons les problèmes en termes d'investissement. Encore faut-il que les financements suivent.

La mise en _uvre de la loi accroîtra les besoins en personnels. Il est donc urgent d'ouvrir des places supplémentaires en instituts de formation, ainsi que de créer un revenu minimum de formation. Par ailleurs, il convient de donner plus de place à l'expression de tous les acteurs de la filière sociale.

Pour terminer, je voudrais évoquer brièvement plusieurs sujets de préoccupations.

Un rapport de nos collègues de la MEC a mis en lumière l'inadaptation des COTOREP. Il serait urgent de les réformer.

Les CAT et ateliers protégés, qui jouent un rôle essentiel dans l'intégration sociale de la personne handicapée, ne sont pas exempts de dysfonctionnements ; et le fait pour eux d'être confrontés à la loi du marché a des conséquences sur la rémunération du travail effectué. Il est nécessaire de prendre des dispositions dans ce domaine.

Enfin, près de 40 % des entreprises assujetties à l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés, posée par la loi du 10 juillet 1987, ne la respectent pas. En la matière, la fonction publique ne montre guère l'exemple. Nous ne pouvons pas continuer à tolérer cette situation.

Nous ne pouvons pas non plus, en ce qui concerne les ressources des handicapés, accepter que l'allocation compensatrice et l'allocation pour adulte handicapé demeurent aussi dérisoires ; et nous souhaitons que les allocataires ne soient plus exclus du bénéfice de la CMU.

Tout en saluant l'ambition de ce projet, je souhaite que notre débat nous permette d'éclairer ces zones d'ombre (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. Georges Colombier - Nous voici enfin arrivés au terme de la révision de la première loi de 1975, relative aux institutions sociales et médico-sociales, mise en chantier il y a six ans.

En première lecture, le Gouvernement avait déclaré que le Parlement serait prochainement amené à réviser la seconde loi de 1975, mais force est de constater que nous n'en aurons pas le temps avant les prochaines élections... Les consultations qui ont été engagées risquent de ne pas avoir de suite.

Je regrette que le sujet n'ait pas été traité de façon globale ; cela crée des risques d'incohérence. Comment expliquer, par exemple, que la réforme de l'accueil familial des personnes âgées et des handicapés soit abordée dans le projet de modernisation sociale ?

Je regrette également que nous ne disposions pas de statistiques précises dans le domaine de l'action sociale et médico-sociale. Le Conseil économique et social a d'ailleurs souligné récemment qu'il était difficile de recenser le nombre de personnes handicapées selon les types de déficiences. Les chiffres sont éparpillés entre différents services.

On estime à 3,5 millions le nombre des personnes handicapées ; 10 % sont accueillies en institution. Les efforts d'adaptation des logements et des transports publics sont insuffisants, l'accès à l'éducation pour les enfants reste difficile, faute de personnel d'encadrement.

Quant aux sans domicile fixe, ils vivent en situation de totale exclusion. On leur propose le placement en établissement médico-social, mais souvent ils préfèrent continuer à vivre dans la rue plutôt que d'intégrer une institution dans laquelle ils se sentiraient encore exclus...

Beaucoup de familles envisageraient pour les personnes handicapées un maintien à domicile sous leur responsabilité, mais elles se heurtent à l'insuffisance des services d'aide à domicile et des prestations.

Madame la ministre, une société se juge à la façon dont elle traite les plus faibles et les aînés des siens. Nous ne pouvons qu'accueillir favorablement le texte de la CMP. Depuis la première lecture, de nombreuses améliorations ont été apportées à ce texte, et nous nous réjouissons que certaines propositions des sénateurs aient été reprises. Au registre des regrets, je citerai le fait que la question du devenir des COTOREP n'ait pas été abordée, le manque d'innovation en termes de décentralisation, et l'absence de mesures précises, dans le cadre du projet d'établissement, pour améliorer la qualité de vie des personnes accueillies.

Le Gouvernement propose un cadre juridique de référence qui offre toutes les garanties aux personnes accueillies ; mais il faut laisser la place à l'innovation : il serait navrant que les bonnes volontés se heurtent à des rigidités excessives. Il conviendrait en particulier de faciliter la mise en place de petites structures.

Mme la Secrétaire d'Etat - C'est prévu.

M. Georges Colombier - Très bien. En dépit de ces problèmes en suspens, le groupe DL soutient donc ce texte, qui est porteur d'espoir pour le secteur social et médico-social (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

La discussion générale est close.

M. le Rapporteur - Je me réjouis que sur un grand sujet comme celui-ci, nous parvenions, au-delà des clivages politiques, à nous mettre d'accord. Je remercie tous ceux qui ont participé au travail d'amélioration du texte initial.

Je veux également remercier pour leur contribution, qui a été précieuse, les associations et les familles de handicapés. Nous n'avons pas la prétention d'avoir produit un texte parfait, bien sûr, mais, même si le chemin à parcourir reste long, l'avancée sera considérable pour les personnes handicapées, pour les personnes âgées et pour les exclus. Je me bornerai donc, pour l'heure, à inviter Mme la secrétaire d'Etat à publier au plus vite les décrets nécessaires et à veiller au bon financement de ces mesures (Applaudissements sur tous les bancs).

Mme la Secrétaire d'Etat - La préparation de plusieurs décrets est déjà largement avancée, Monsieur le rapporteur. Tous seront élaborés en concertation, dans le cadre d'ateliers organisés par la direction générale de l'action sociale, et les plus déterminants paraîtront avant la fin du premier semestre de 2002 : ce sont ceux qui concerneront les droits des usagers, l'organisation des nouveaux conseils, le nouveau régime d'autorisation, les procédures budgétaires et comptables et la tarification des modes de prise en charge innovants - en particulier de l'accueil temporaire.

M. Jean-François Chossy - Merci !

Mme la Secrétaire d'Etat - Madame Bachelot-Narquin, lorsqu'il s'agit d'aider les personnes handicapées, âgées dépendantes, exclues ou fragiles, le plus dur est toujours devant soi ! Une loi ne témoigne que d'une intention, tout le travail se fait sur le terrain. La souffrance, la dignité à défendre ne cesseront d'être une invite à se passionner, à se mobiliser, à surmonter des difficultés toujours renaissantes.

Cela dit, si j'ai été sensible à votre propos, je ne puis laisser dire que nous négligerions les personnes les plus en difficulté. Un plan pluriannuel a été lancé en faveur des établissements hébergeant des personnes âgées, qui recevront ainsi plus de 6 milliards cependant qu'1,2 milliard ira aux services de maintien à domicile : un tel effort n'a pas de précédent. N'oubliez pas non plus le plan triennal en faveur des handicapés, ni le dernier projet de loi de financement qui consacre 50 millions aux autistes, autant aux polyhandicapés et 30 millions aux personnes lourdement handicapées.

D'autre part, qu'il s'agisse du sujet évoqué ici la semaine dernière, à propos de deux arrêts de la Cour de cassation, ou de l'allocation personnalisée d'autonomie, Mme Royal a engagé un travail de fond qui marquera profondément ce secteur et permettra certainement de rénover dans de meilleures conditions la deuxième loi. Simplement, auparavant, le réalisme commandait de donner aux institutions d'accueil et d'accompagnement du handicap sous toutes ses formes les moyens d'innover et de coopérer pour répondre à l'évolution de la demande. La rénovation de cette première loi était donc prioritaire.

Pour conclure, je vous exprime à tous ma reconnaissance, avec une mention toute spéciale pour le rapporteur qui a travaillé avec passion au service de toutes les personnes en difficulté, en sachant les écouter. Au nom du Gouvernement et en mon nom propre, qu'il en soit remercié ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

L'ensemble du projet de loi, mis aux voix compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité, comme prévu !

Prochaine séance demain, mercredi 19 décembre, à 15 heures.

La séance est levée à 23 heures 35.

            Le Directeur du service
            des comptes rendus analytiques,

            Louis REVAH

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ORDRE DU JOUR
DU MERCREDI 19 DECEMBRE 2001

A QUINZE HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

1. Questions au Gouvernement.

2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de modernisation sociale, en lecture définitive.

3. Discussion, soit du texte élaboré par la commission mixte paritaire, soit en nouvelle lecture, du projet de loi de finances rectificative pour 2001 (n° 3472).

4. Eventuellement, discussion, en lecture définitive, du projet de loi de finances pour 2002.

5. Eventuellement, discussion, en lecture définitive, du projet de loi de finances rectificative pour 2001.

A VINGT-ET-UNE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne trois heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr


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