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Session ordinaire de 2001-2002 - 46ème jour de séance, 107ème séance

2ème SÉANCE DU MERCREDI 9 JANVIER 2002

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

        POLITIQUE DE L'EAU (suite) 2

        ART. 30 10

        APRÈS L'ART. 30 15

        ART. 31 15

        ORDRE DU JOUR DU JEUDI 10 JANVIER 2002 22

La séance est ouverte à vingt et une heures.

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POLITIQUE DE L'EAU (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant réforme de la politique de l'eau.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur de la commission de la production - Je laisse à M. Fleury le soin de défendre l'amendement 198.

M. Jacques Fleury - Les amendements 198 et 5 visent à créer un chapitre IV intitulé « Prévention des inondations ».

M. Serge Poignant - L'amendement 575 vise également à reprendre cette proposition qui a été faite par la commission d'enquête sur les inondations.

M. le Rapporteur - La commission est évidemment favorable à ces amendements.

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Les inondations reconnues comme catastrophes naturelles représentent plus de la moitié des dommages indemnisés au titre de la surprime des contrats d'assurance. J'espère que la Somme et la Bretagne seront épargnées cette année, même si le niveau atteint par les nappes phréatiques est préoccupant. Faisons des v_ux pour qu'il ne pleuve pas trop, et associons chacun au nécessaire effort de prévention. Je salue le travail de votre commission d'enquête. Je suis très favorable à l'insertion de ce nouveau chapitre.

Les amendements 198, 5 et 575, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jacques Fleury - L'amendement 199, également issu d'une proposition de la commission d'enquête, vise à permettre l'indemnisation des pertes d'exploitation indirectes subies par les entreprises qui, sans être touchées par la catastrophe naturelle, pâtissent durablement de ses conséquences. Le cas est fréquent dans la Somme.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. Serge Poignant - L'amendement 577 a le même objet et prévoit en outre la prise en charge des honoraires d'expert assuré.

M. le Ministre - Sur le principe, je ne suis pas hostile à ces amendements, mais je leur préfère la rédaction du 687, qui prévoit qu'une entreprise dont les voies d'accès ont été coupées par les effets d'une catastrophe naturelle, mais qui n'a pas subi elle-même de dommages directs, peut être indemnisée si elle a souscrit un contrat d'assurance qui le prévoit.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné. Il convient de le rectifier pour faire référence à l'alinéa précédent et non suivant.

M. le Ministre - D'accord.

M. le Rapporteur - Comme les deux autres amendements, il couvre les pertes d'exploitation indirectes, même s'il n'y a pas eu d'atteinte aux biens.

Toutefois, parler d'une « mesure raisonnable » permettant la réouverture des voies ne me paraît guère normatif.

M. Jacques Fleury - Pour ma part, je trouve cet amendement trop restrictif car la garantie n'interviendrait que si l'entreprise n'a pu être desservie faute de voies ouvertes. Or, même quand les voies sont ouvertes, il peut y avoir perte d'exploitation, je pense par exemple à une société de plaisance fluviale qui n'a pu exercer son activité pendant deux mois, bien qu'elle ait toujours eu accès au canal de Somme.

M. le Ministre - Je partage la préoccupation de M. Fleury, mais je trouve sa rédaction trop large. Il est notamment difficile d'évaluer la perte d'exploitation lorsque l'entreprise n'a pas été inondée. C'est pourquoi il me semble nécessaire de soumettre l'indemnisation à la souscription préalable d'un contrat d'assurance couvrant ce risque.

M. Jean-Marie Geveaux - Je partage l'avis de M. Fleury : il ne faut pas poser des conditions trop restrictives à l'indemnisation.

M. Jacques Fleury - Si l'on rectifiait mon amendement afin de faire référence à un tel contrat d'assurance, il me semble que nous aurions, le ministre comme nous-mêmes, satisfaction. À défaut, je crains que des entreprises qui ont été victimes de la catastrophe mais que l'on peut joindre par la route soient exclues de l'indemnisation.

Mme la Présidente - Nous faisons là un véritable travail de commission et je n'ai même pas cette proposition de rectification par écrit. Si j'ai bien compris, il s'agit d'ajouter, à la fin de l'amendement 199, « s'il a souscrit un contrat d'assurance qui le prévoit » (Assentiment).

M. le Ministre - Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Serge Poignant - Je ne comprends pas pourquoi l'Assemblée ne se prononce pas plutôt sur mon amendement 577, qui prévoit également la rémunération des experts, laquelle fera l'objet du prochain amendement de M. Fleury.

L'amendement 199 rectifié, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - En conséquence, les amendements 577 et 687 tombent.

M. Jacques Fleury - L'amendement 200 vise à étendre la garantie à la rémunération de l'expert de l'assuré.

M. le Ministre - Je n'y suis pas favorable. L'idée est sympathique mais elle pourrait conduire à un recours systématique à l'expertise, qui retarderait l'indemnisation. Elle présente aussi le risque de multiplier les contre-expertises, ce qui entraînerait une diminution de l'offre des assureurs et une augmentation des primes que nous estimons de l'ordre de 5 %.

M. Serge Poignant - Je ne puis que répéter que le vote de mon amendement précédent nous aurait fait gagner du temps... Cela dit, je me rallie à l'amendement 200.

M. Jean-Marie Geveaux - Il n'y a pas forcément contre-expertise, Monsieur le ministre. Dans le cas d'une expertise conjointe, le délai n'est pas plus long.

M. le Ministre - Les risques d'allongement des délais et de renchérissement me paraissent bien réels.

M. Jacques Fleury - Les arguments du ministre ne m'ont pas convaincu.

Les sinistrés se trouvent matériellement et psychologiquement dans une situation difficile, ils ont besoin d'être épaulés. Dans certains cas, il y a même eu des expertises gratuites.

On sait, par ailleurs, que les assureurs arrivent avec une proposition d'indemnisation et la font accepter au motif que les choses iront plus vite ainsi, mais ceux qui signent se demandent parfois ensuite s'ils n'ont pas signé trop vite...

L'amendement 200, mis aux voix, est adopté.

M. le Ministre - L'amendement 689 tend, dans les communes dotées d'un PPR, qui sont déjà quelque 3 000 soit dit en passant, à limiter la saisine du BCT aux cas où le bien n'est pas mis en conformité aux prescriptions du PPR dans un délai de cinq ans compter de l'approbation de celui-ci.

M. Jacques Fleury - Les amendements 201 et 7, 2ème correction, visent à faciliter la saisine du BCT, car le système actuel, nous l'avons constaté, incite les sinistrés à reconstruire à l'identique sans prendre de précautions supplémentaires. Nous avons renoncé, en revanche, à moduler la surprime, car les calculs seraient à la fois complexes et contestables - sans que l'efficacité soit au rendez-vous, étant donné la modicité des primes elles-mêmes.

M. Serge Poignant - L'amendement 578 est semblable. J'observe que celui du Gouvernement va dans un tout autre sens.

M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné, mais il est vrai qu'il maintient la référence au délai de cinq ans, que suppriment les deux amendements identiques adoptés par elle. Celui de M. Poignant, par contre, n'a pu être retenu, en raison d'une légère erreur de référence.

M. le Ministre - Le Gouvernement préfère son propre amendement, qui repose sur l'idée simple que, partout où il y a un PPR, celui-ci doit s'appliquer.

M. le Rapporteur - J'ai le sentiment que les deux rédactions ne sont pas exclusives, mais complémentaires, et que nous devrions tenter d'en faire la synthèse.

Mme la Présidente - Sans doute ne serions-nous pas en présence de cette difficulté rédactionnelle si la commission avait été saisie en temps utile de l'amendement du Gouvernement. Il vous sera loisible de la résoudre en seconde délibération ou en deuxième lecture.

L'amendement 689, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 201 et 7, 2ème correction, mis aux voix, sont adoptés. En conséquence, l'amendement 578 tombe.

M. Jacques Fleury - Les amendements 202 et 8 tendent à permettre au préfet ou au président de la caisse centrale de réassurance de saisir le BCT « lorsque les conditions dans lesquelles un bien ou une activité bénéficie de la garantie prévue à l'article L. 125-1 leur paraissent injustifiées eu égard au comportement de l'assuré ou à l'absence de toute mesure de précaution de nature à réduire leur vulnérabilité ».

M. Serge Poignant - L'amendement 579 a le même objet.

M. le Rapporteur - La commission lui a préféré ceux que vient d'exposer M. Fleury.

Les amendements 202 et 8, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés. En conséquence, l'amendement 579 tombe.

M. Jacques Fleury - Les amendements 203 et 9 triplent les franchises en cas de non-respect des prescriptions du PPR.

M. Serge Poignant - L'amendement 580 procède du même esprit.

M. le Rapporteur - Il est, hélas, entaché, lui aussi, d'une petite erreur de référence.

L'amendement 580 est retiré.

Les amendements 203 et 9, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jacques Fleury - L'amendement 204 permet l'indemnisation au-delà de la valeur du bien sinistré si l'assuré, plutôt que de reconstruire à l'identique, s'engage à respecter des normes plus exigeantes.

M. le Ministre - La commission d'enquête avait raison de se préoccuper de réduire la vulnérabilité des bâtiments et je suis donc favorable à l'amendement 204, sous réserve toutefois que soit adopté le sous-amendement 690 qui supprime la référence à une reconstruction : il ne faudrait pas laisser penser qu'on pourrait reconstruire entièrement une maison très partiellement endommagée. D'autre part, les normes de reconstruction ne peuvent être édictées par les assureurs : leur définition doit être renvoyée à un décret en Conseil d'Etat.

M. le Rapporteur - Le sous-amendement paraît sage et, à titre personnel, j'y souscris.

Le sous-amendement 690, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 204 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Fleury - L'amendement 209 vise à étendre le champ d'intervention du FCTVA aux travaux de prévention des inondations réalisés sur des cours d'eau dans le cadre d'un SAGE. Actuellement, ces travaux sont classés en dépenses de fonctionnement, mais il vaudrait mieux à tous égards considérer qu'il s'agit de dépenses d'investissement.

M. Serge Poignant - La même explication vaut pour l'amendement 586.

M. le Rapporteur - La commission a adopté l'amendement 209 et M. Poignant s'y est rallié, renonçant alors au sien...

M. le Ministre - Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements. En effet, les travaux d'entretien courant ne sont pas éligibles au FCTVA. S'agissant des travaux de restauration des cours d'eau ayant la nature d'investissement, ils peuvent l'être à titre dérogatoire, en vertu de l'article 60 de la loi de finances pour 1999, codifié à l'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales, mais à raison des dépenses d'investissement présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence. La compensation de TVA se fait donc en fonction de la nature des travaux, non de la mise en _uvre ou non d'un SAGE.

L'amendement 586 est retiré.

L'amendement 209, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Launay - L'amendement 485 tend à ajouter un article 14 bis au code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure. Cet article précise que l'entretien des cours d'eau domaniaux a pour objet d'assurer la conservation de la capacité d'évacuation des crues, ce qui nécessite « une politique structurelle d'entretien permanent », définie à l'échelle de chaque bassin versant ou sous-bassin. Il pose également qu'il appartient au propriétaire du domaine public fluvial ou à son affectataire de veiller à la réparation des outrages du temps et de l'usure due à l'action des éléments.

Pendant des siècles, la définition du domaine public fluvial a reposé sur le critère matériel de la navigation. Mais, depuis 1910, ce critère matériel a été abandonné au profit d'un critère formel, le classement. Pourtant, le régime juridique applicable à ce domaine n'a pas été modifié. L'amendement vise à le redéfinir en prenant en compte l'impératif de prévention des inondations.

M. le Rapporteur - La commission a présenté un sous-amendement 640 de précision : l'entretien ne peut viser seulement à conserver la capacité d'évacuation des crues.

M. le Ministre - Il existe déjà une jurisprudence assez complète sur les obligations de l'Etat, s'agissant de l'entretien de ces cours d'eau domaniaux. D'autre part, si, parmi ceux-ci, certains présentaient, en raison de leur contribution au transport de marchandises, un caractère d'intérêt national qu'ils ont maintenant perdu, nous en avons tiré les conséquences : le projet autorise à transférer la pleine propriété du domaine public fluvial, à certaines exceptions près, aux départements et institutions départementales qui le souhaitent. L'amendement et le sous-amendement n'ajoutent donc rien, ni à la jurisprudence, ni au présent texte.

Le sous-amendement 640, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 485 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Serge Poignant - L'amendement 582 reprend une autre proposition de la commission d'enquête sur les inondations. Afin de garantir l'entretien des cours d'eau non domaniaux, les établissements territoriaux de bassin seront habilités à prélever sur les riverains une taxe assise sur la longueur de ces cours d'eau, ainsi que sur la nature de leur entretien. Les riverains pourront toutefois s'en exonérer, dans des conditions fixées par l'ETPB, s'ils procèdent à l'entretien dans le cadre d'une organisation syndicale ou d'un plan de gestion.

M. le Rapporteur - Cette disposition figure déjà à l'article 21, qui a fait entrer les ETPB dans le droit commun.

M. le Ministre - Non seulement l'amendement est satisfait mais, s'il était adopté, on aboutirait à une situation curieuse : l'ETPB pourrait percevoir une taxe forfaitaire pour un entretien qu'il ne serait pas tenu d'effectuer ! La solution que nous avons retenue, celle d'une redevance pour service rendu, semble plus appropriée.

L'amendement 582, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jacques Fleury - Le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, est destiné à financer l'expropriation de biens exposés à des risques « menaçant gravement les vies humaines » : en raison de cette condition restrictive, il ne peut être mobilisé que dans les zones de crues torrentielles, de type cévenol, alors que des expropriations pourraient se révéler justifiées dans des zones de plaine aussi. Il est en effet parfois moins onéreux d'exproprier que de procéder à des indemnisations répétées. D'où l'amendement 23.

M. Serge Poignant - L'amendement 583 se justifie par les mêmes raisons.

Monsieur le rapporteur, vous avez dit tout à l'heure que j'avais retiré un amendement en commission. Or il me semble qu'un amendement déposé en commission ne peut être retiré qu'en séance publique...

M. le Rapporteur - Avis favorable aux deux amendements, identiques.

M. le Ministre - Avis défavorable ! Ces amendements étendraient considérablement le champ d'intervention du fonds Barnier et il en résulterait des charges d'indemnisation élevées. Or, si l'expropriation se justifie lorsque des vies humaines sont menacées, il n'en va pas de même pour les crues de nappe, qui ne touchent en général que les biens et pour lesquelles on dispose de moyens de prévention.

M. Jean Launay - Notre commission d'enquête avait pour mission d'analyser les causes et les conséquences des inondations « exceptionnelles ou répétitives ». Nous avons donc légitimement recherché les moyens de ne plus multiplier les remboursements au titre de catastrophes à répétition, ne serait-ce que pour éviter le gonflement des primes d'assurance. L'amendement est incontestablement utile de ce point de vue.

M. le Ministre - L'expropriation est une procédure longue et lourde à laquelle on peut préférer dans ce cas l'aide au relogement.

Les amendements 23 et 583, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jacques Fleury - L'amendement 11, conséquence du précédent, double les ressources du fonds de prévention des risques naturels majeurs.

M. le Rapporteur - La commission y est favorable plutôt qu'au 22 de M. Fuchs, lequel serait d'ailleurs satisfait par l'adoption du 11.

Mme la Présidente - En effet, si l'amendement 11 est adopté, le 22 tombera.

M. le Ministre - Le fonds disposant actuellement de réserves très importantes, il me serait pour le moins prématuré d'augmenter le taux de la redevance.

L'amendement 11, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Fleury - L'amendement 206 privilégie l'approche par bassin ou sous-bassin versant dans l'élaboration des PPR inondations, celles-ci ignorant les limites communales.

M. Serge Poignant - L'amendement 573 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement 573 au profit du 206 qui a le même objet mais est plus précis.

M. le Ministre - Ces deux amendements ne sont pas du tout équivalents. Pour ce qui est du 206, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. Faut-il légiférer encore sur des dispositions déjà très largement appliquées, d'autant que des dérogations peuvent être nécessaires, notamment pour ce qui concerne les risques liés au ruissellement pluvial en zone urbaine ?

En revanche, je suis tout à fait défavorable à l'amendement 573 qui ôterait à l'Etat le soin d'élaborer les PPR. Il s'agit là d'une fonction régalienne qui doit le demeurer.

L'amendement 573 est retiré.

L'amendement 206, mis aux voix, est adopté.

M. Serge Poignant - Conformément à une recommandation de la commission d'enquête, l'amendement 574 précise que les PPR détaillent en annexe les mesures à prendre afin d'améliorer l'alerte des populations, de renforcer leur sécurité, d'organiser leur évacuation en cas de catastrophe naturelle.

M. Jacques Fleury - Les amendements 207 et 13, identiques, visent à compléter les PPR de la même façon que le 574.

M. le Rapporteur - Ces trois amendements ont le même but. La rédaction retenue par les 207 et 13 est meilleure.

M. le Ministre - Avis défavorable à tous ces amendements. On ne peut bien sûr qu'être d'accord sur l'objectif mais les PPR, relevant de mon ministère, et les plans de secours spécialisés, relevant du ministère de l'intérieur, correspondent à deux démarches et deux expertises différentes. Les confondre dans un seul document alourdirait au contraire les procédures et ferait perdre en efficacité. Le préfet assure bien entendu la cohérence de l'ensemble mais les services spécialisés sont garants de la pertinence de chacun de ces plans.

L'amendement 574, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 207 et 13, mis aux voix, sont adoptés.

M. Serge Poignant - L'amendement 585 s'inspire pour l'élaboration des PPR de la procédure prévue pour celle des SAGE : création d'une commission locale des risques, puis consultation des conseils municipaux et recueil des remarques du public pendant deux mois, et enfin, adoption par arrêté préfectoral, étant entendu que les études préalables relèvent de la responsabilité de l'Etat.

M. le Ministre - La mise en place d'une commission locale spécifique pour chaque PPR doit être exclue, pour des raisons d'efficacité même. C'est pourquoi l'amendement 688 du Gouvernement prévoit, pour sa part, la création d'une commission au niveau départemental.

M. Jacques Fleury - Notre souci est que les populations locales se sentent réellement concernées par les PPR et les fassent leurs, alors qu'aujourd'hui ces documents administratifs restent pour elles très lointains. La création d'une commission départementale n'atteindrait pas cet objectif. Une commission locale des risques serait beaucoup plus pertinente. Tel est l'objet de l'amendement 208.

M. le Rapporteur - Le sous-amendement 654 à l'amendement 208 - mais qui pourrait tout aussi bien trouver sa place dans l'amendement gouvernemental - précise utilement que le projet de PPR, élaboré ou révisé par le préfet avec la participation de la commission locale des risques, est soumis à l'avis des conseils municipaux concernés.

La commission a repoussé l'amendement 585 : l'Etat doit en effet conserver toute compétence dans l'élaboration et la mise en _uvre des PPR, lesquelles relèvent donc du préfet. Elle a adopté l'amendement 208, considérant elle aussi pertinente la création d'une commission locale des risques, constituée par bassin versant et répondant à une cohérence hydrologique plutôt qu'administrative.

M. le Ministre - Avis défavorable à l'amendement 585 : l'élaboration et la mise en _uvre des PPR doit rester de la compétence de l'Etat, et de lui seul.

Pour ce qui est du 208, il m'inquiète quelque peu. Les procédures sont déjà lourdes et longues. Si le dispositif est trop local, il risque de se vider de sa substance. Je préférerais que l'Assemblée adopte l'amendement du Gouvernement, que je voudrais par ailleurs rectifier : au lieu de « l'article L. 562-3 du code de l'environnement est ainsi rédigé », il faudrait écrire « l'article L. 562-3 du code de l'environnement est complété par cinq alinéas ainsi rédigés ».

M. le Rapporteur - Monsieur le ministre, rien n'interdit que la commission locale soit départementale : tout dépend de l'extension du PPR.

M. Jean Launay - Dans mon département, il y a deux rivières : le Lot et la Dordogne. Le préfet a donc fait réaliser deux PPR. Il serait bon que les commissions soient conformes au zonage des PPR.

M. Léonce Deprez - Par respect pour ceux qui ont souffert des inondations, je n'ai pas voulu intervenir dans ce débat. Je souhaite tout de même poser une question de principe.

Entre l'Etat et l'échelon local, les communautés de communes me semblent avoir des responsabilités importantes en matière d'aménagement du territoire et de prévention des crues. Le ministre a raison, les préfets doivent conserver leurs responsabilités. Cependant, si les élus de l'intercommunalité ne se saisissent pas des leurs en matière d'aménagement du territoire, nous manquerons un rendez-vous important. Ce sont eux qui doivent se mobiliser pour prévenir les inondations.

M. le Ministre - Je vous propose de rectifier mon amendement, la commission « départementale » devenant « locale ». Mais il ne faut pas supprimer l'enquête publique ni le recueil d'avis des conseils municipaux.

Mme la Présidente - Cette nouvelle rectification devra être faite deux fois : à la première ligne et dans le dernier alinéa.

M. Jean Launay - L'amendement 208 est retiré.

M. le Rapporteur - Dans ce cas, le sous-amendement 654 doit porter sur l'avant-dernier alinéa de l'amendement du Gouvernement.

L'amendement 585, mis aux voix, n'est pas adopté.

Le sous-amendement 654, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 688, 2ème rectification, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 210 de la commission vise à ajouter, parmi les objectifs de la politique agricole, l'entretien des cours d'eau. C'est une mesure recommandée par la commission d'enquête sur les inondations.

M. Jacques Fleury - Mon amendement 15 est identique.

M. Serge Poignant - Mon amendement 584 est identique.

M. le Ministre - Avis favorable. S'il y avait plus de vers de terre dans certains sols, il y aurait moins d'inondations.

M. François Sauvadet - Voilà une maxime qui restera !

Les amendements 210, 15 et 584, mis aux voix, sont adoptés.

M. André Vauchez - Mon amendement 390 nous fait quitter la basse vallée pour nous intéresser à l'ensemble du bassin versant. On ne peut en effet gérer les crues avec les seuls bassins écréteurs. On vient de voir, dans le Territoire-de-Belfort, des bassins qui avaient coûté 71 millions s'ouvrir le jour même de leur inauguration, ce qui s'est traduit par une inondation dans les villages qu'ils devaient protéger. Il faut agir là où le ruissellement naît. Or, depuis des décennies, tout concourt à accélérer le ruissellement : les routes, les parkings, les lotissements... C'est pourquoi je propose que tout aménagement de l'espace naturel sur le bassin versant doive être suivi par des travaux permettant de rétablir le régime hydraulique antérieur. J'accepte, par ailleurs, le sous-amendement de la commission.

M. le Rapporteur - Le sous-amendement 639 de la commission vie à substituer au mot « antérieur » le mot « naturel ».

M. François Sauvadet - Tout en comprenant le souci d'éviter l'accélération de la montée des eaux, évidemment, je m'interroge néanmoins sur la portée juridique d'un tel dispositif. À qui incombera la responsabilité des travaux exigés ?

M. André Vauchez - Quand on détourne un cours d'eau, il faut laisser s'écouler la même quantité d'eau. C'est une obligation légale. S'il pleut, ne faudrait-il pas tâcher de maintenir le régime normal ? Au moyen de petites retenues, on peut faire en sorte que les eaux mettent douze heures à s'écouler au lieu de deux.

M. le Rapporteur - Cet amendement, Monsieur Sauvadet, n'a pas de portée normative. Mais il est important d'affirmer que les travaux qui accélèrent ou augmentent le débit des eaux doivent être compensés localement.

M. le Ministre - Je suis favorable à cet amendement de principe, plus réservé sur le sous-amendement. Si l'état antérieur de l'écoulement des eaux est bien connu, la référence à l'état naturel risque de nous ramener très loin en arrière...

M. François Sauvadet - Cet amendement sera source de contentieux !

M. le Rapporteur - Je retire le sous-amendement 639.

L'amendement 390, mis aux voix, est adopté.

M. Serge Poignant - L'amendement 576 reprend la proposition de la commission d'enquête de créer un Centre national d'études sur les inondations, qui pourra conseiller les collectivités locales en matière de prévention.

M. le Rapporteur - Le sous-amendement 629 opère la synthèse de l'amendement précédent et de l'amendement 6 de M. Fleury.

M. Jacques Fleury - Je retire mon amendement au profit du sous-amendement du rapporteur.

M. le Ministre - J'apprécie l'intention, mais la mémoire des inondations me paraît relever de l'échelon local.

Nous mettons en place un service national de prévision hydro-météo pour améliorer les modèles en la matière, rattaché à l'administration centrale pour éviter la création d'un nouvel établissement public.

L'amendement qui élargit la compétence des agences en matière de prévention leur permettra d'ailleurs d'organiser cette mémoire.

M. Léonce Deprez - Gardons-nous de multiplier les organismes ! Nos concitoyens le comprennent mal, et nous autres élus nous en souffrons. Et gardons-nous de vider la politique de l'aménagement du territoire de son contenu. Les inondations résultent souvent hélas d'une absence de volontarisme dans ce domaine. Il faut restituer le problème dans la perspective de l'aménagement du territoire.

M. Jacques Fleury - Cette proposition de la commission d'enquête figurait déjà dans le rapport de notre collègue Yves Dauge. La mémoire peut certes être entretenue par les agences de bassin, mais il paraît nécessaire qu'un lieu de mémoire tire les leçons de certaines expériences d'envergure au niveau national. La gestion de la crise de la Somme, par exemple, doit avoir valeur de modèle.

M. Germain Gengenwin - L'élaboration d'un plan local d'urbanisme implique un bilan des inondations sur un siècle : les services nécessaires existent, laissons-les fonctionner au lieu de diluer les responsabilités.

M. Serge Poignant - On oublie vite les catastrophes... Ce centre me paraît utile pour entretenir la mémoire et assurer la diffusion des expériences, sans empiéter sur l'aménagement du territoire.

Le sous-amendement 629, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 576, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article 29, mis aux voix, est adopté.

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ART. 30

M. Jean Launay - Les amendements 376 et 377 sont défendus.

Les amendements 376 et 377, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Ministre - L'amendement 691 corrigé est de coordination.

M. le Rapporteur - Avis personnel favorable.

L'amendement 691 corrigé, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 211 précise que la commune peut entretenir elle-même son réseau.

L'amendement 211, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Avec l'amendement 212, il s'agit de préciser que les communes peuvent faire assurer ou assurer elles-mêmes.

L'amendement 212, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Yves Tavernier, rapporteur pour avis de la commission des finances - Dès lors que les communes doivent veiller à la coordination des services privés de l'eau, l'amendement 61 oblige ces services à leur fournir l'information qu'elles-mêmes transmettront aux usagers.

L'amendement 61, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Félix Leyzour - L'amendement 213, que la commission a adopté, précise qu'il s'agit de services à caractère industriel et commercial financièrement gérés par les communes, ce qui n'est pas sans incidence, notamment pour les personnels mis à disposition.

L'amendement 213, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 214 précise que les redevances pour occupation du domaine public municipal ne sont pas obligatoires, mais qu'elles peuvent simplement être prélevées.

L'amendement 214, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Par l'amendement 626, je propose que cette redevance ne soit plus versée au budget général, mais au budget de l'eau et de l'assainissement. Cela poserait un principe qui vaudrait aussi pour d'autres réseaux, cela éviterait une distorsion avec les régies, qui ne supportent pas cette redevance, cela éviterait enfin qu'elle ait un poids trop important sur les factures d'eau.

M. le Ministre - Je suis d'autant plus favorable à cet amendement que l'impact de ces redevances sur la facture serait ainsi, en effet, allégée.

L'amendement 626, mis aux voix, est adopté.

M. Léonce Deprez - Dès lors que ce projet vise à faciliter le choix des collectivités, il convient de dissocier cette redevance et les modes de gestion. Tel est l'objet de l'amendement 385.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Avec l'amendement que nous venons d'adopter, la redevance, désormais réinjectée dans le budget de l'eau, devient neutre.

J'ajoute que l'égalité de traitement entre les modes de gestion est un leurre puisqu'une nouvelle équipe municipale peut instantanément supprimer une régie pour passer à une délégation, mais que l'inverse est impossible.

L'amendement 385, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Sauvadet - L'amendement 405 est défendu.

M. Claude Gaillard - L'amendement 506 vise à étendre le dispositif des autorisations de programme et des crédits de paiement aux petites communes, afin d'assurer une plus grande transparence, en particulier pour le financement des travaux.

M. le Rapporteur - Avis défavorable à l'amendement 405 et favorable au 506, sous réserve de l'adoption du sous-amendement 657, de cohérence rédactionnelle.

M. le Ministre - Je ne veux pas déplaire à M. Gaillard, mais je crois que son amendement est inutile. En effet, aux termes du code des collectivités territoriales, le régime des AP-CP s'applique aux communes de plus de 3 500 habitants, comme à leurs établissements publics administratifs, aux EPIC, Je souhaite donc le retrait de cet amendement et je ne puis, bien sûr, être favorable au sous-amendement 657.

M. François Sauvadet - Je crois que vous n'avez pas bien saisi que cet amendement porte sur les investissements et sur les travaux d'assainissement dans les communes de moins de 3 500 habitants. Il aurait ainsi une portée bien réelle pour celle de Vitteaux, dont je suis maire.

L'amendement 405, mis aux voix, n'est pas adopté.

Le sous-amendement 657, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 506, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. François Sauvadet - L'amendement 507 est défendu.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Ministre - Retrait, sinon rejet.

L'amendement 507, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Je retire l'amendement 215. Le 216 corrige une erreur rédactionnelle.

L'amendement 216, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Félix Leyzour - L'amendement 425 vise à instaurer, pour les plus démunis, une tranche de consommation à tarification spéciale. Il s'agit, sur le modèle de ce que nous avons adopté dans la loi de modernisation du service public de l'électricité - et je ne doute pas que le décret d'application sortira bientôt - d'éviter que se reproduisent sans cesse ces situations d'impayés et de coupures qui conduisent si souvent les élus locaux à intervenir.

L'eau est un service public, il est donc normal d'en garantir l'accès aux plus démunis. Le fonds national de l'eau pourrait jouer là un rôle important car, si l'on a beaucoup parlé de la qualité et de la quantité, nous devons aussi nous préoccuper du problème social et assurer à tout être humain une consommation minimale d'eau.

Je suis persuadé que le Gouvernement fera des propositions de son côté...

M. le Rapporteur - Comment garantir le droit à l'eau potable ? La réponse n'est pas simple. Il y a la charte solidarité eau, mais elle est mal appliquée sur le terrain, notamment là où les consommations ne sont pas individualisées. Je ne crois pas, pour autant, que la solution préconisée par M. Leyzour soit la meilleure : l'exemple de l'électricité montre les limites d'une telle approche. C'est au Gouvernement qu'il appartient de nous proposer, d'ici la prochaine lecture, une solution réaliste.

M. le Ministre - L'objectif que recherche M. Leyzour est partagé par tous, y compris, naturellement, par le Gouvernement, mais appliquer un tarif réduit à la tranche de consommation la plus basse aurait pour effet de renchérir les autres, au détriment, par exemple, des familles nombreuses. Je serais plus favorable à une meilleure prise en charge des impayés, notamment grâce au fonds de solidarité.

M. Félix Leyzour - Avant d'invoquer le contre-exemple de l'électricité, attendons de voir les décrets d'application de la loi, qui vont bientôt sortir : je ne doute pas que l'on finisse par trouver une solution, si l'on le veut vraiment. Quant au fonds de solidarité, pourquoi ne pas l'alimenter par une taxe de 0,2 % sur le chiffre d'affaires des grandes compagnies de distribution ? Je tiens à ce que nous posions dès aujourd'hui un principe, quitte à ce que le Gouvernement affine le dispositif en deuxième lecture, si toutefois elle a lieu...

M. le Ministre - Elle aura lieu !

M. Claude Gaillard - D'ici là, nous aurons amplement eu le temps de la réflexion... Pour ma part, je ne crois pas, contrairement à d'autres, que nous soyons tous d'accord, y compris sur l'objectif. Cent vingt mètres cubes par an, cela fait cinq francs par jour, c'est-à-dire moins que ce que coûte le pain - autre bien de première nécessité. Va-t-on faire payer aux gens leur pain en fonction de leur feuille d'impôts ? Notre préférence va à une politique d'élévation générale du pouvoir d'achat, plutôt qu'à une démarche consistant à maintenir un niveau de vie faible et des prix subventionnés : on a vu ce que cela donnait dans d'autres pays ! J'ajoute qu'il y a fort à parier, hélas, à vous entendre que le fonds de solidarité sera progressivement détourné de son objet, qui est la péréquation territoriale, au profit d'une péréquation sociale qui est du ressort de l'Etat.

M. Alfred Recours - M. Leyzour soulève un vrai problème, mais n'apporte pas la bonne réponse. Les communes ont déjà la possibilité de pratiquer des tarifs dégressifs : c'est ce que fait la mienne, avec cet avantage supplémentaire que cela incite à consommer moins. Je suggérerais, pour ma part, qu'on leur permette de subventionner le prix de l'eau pour les catégories les moins favorisées : la solidarité passerait alors par l'impôt.

M. Félix Leyzour - L'opposition nous prendra difficilement en défaut sur la question des bas salaires et du pouvoir d'achat ! (Interruptions sur les bancs du groupe UDF) La principale caractéristique du système français est la faiblesse des services publics locaux face aux grands groupes qui ont la mainmise sur la distribution, d'où notre suggestion de taxer le chiffre d'affaires de ces derniers.

M. le Rapporteur - M. Gaillard a au moins raison quand il relève notre désaccord avec lui. Je ne puis le suivre, en revanche, quand il dénonce les aides en tout genre : faut-il supprimer les aides au logement, les tarifs sociaux des cantines scolaires ? Dans mon arrondissement, les familles les plus défavorisées paient 1 F par repas, et ce repas est souvent le seul vrai repas que prennent leurs enfants. Cinq francs par jour, cela paraît peu, mais pour une famille de six personnes, cela fait en réalité trente francs par jour, près de mille francs par mois ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF)

M. Claude Gaillard - Mais non ! Il s'agissait de 120 mètres cubes par foyer et par an !

M. le Rapporteur - Certaines familles nombreuses sont obligées de consommer plus, surtout si elles habitent des logements vétustes aux canalisations en mauvais état.

M. Claude Gaillard - Alors, augmentez plutôt les allocations familiales, au lieu de détourner l'argent des caisses pour financer les 35 heures ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Rapporteur - Ne m'obligez pas à citer les propos tenus naguère par une certaine personnalité, et récemment rappelés par Karl Zéro dans son émission dominicale, sur les familles d'immigrés qui toucheraient 50 000 F d'allocations familiales par mois !

M. Claude Gaillard - N'ai-je pas le droit de m'exprimer comme je l'entends à propos des allocations familiales ?

M. Léonce Deprez - Monsieur Leyzour, nous avons comme vous le souci d'aider ceux qui ne peuvent acquitter leurs factures, mais nous ne pensons pas, nous, que cette charge doive incomber aux entreprises d'eau ou d'électricité. C'est, comme vous l'avez d'ailleurs dit, au Gouvernement ou aux maires de prendre des mesures à caractère social - et cela ne peut se faire au moyen de la présente loi.

M. Félix Leyzour - Il faut lire entièrement notre amendement ! « Les tarifs aux usagers domestiques tiennent compte, pour les usagers dont les revenus sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond, du caractère indispensable de l'eau en instaurant pour une tranche de leur consommation une tarification spéciale « produit de première nécessité ». Un décret précise les conditions d'application du présent alinéa dans le cadre des dispositions de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles. »

Nous pouvons diverger sur les solutions mais je pense que nous ouvrons là au Gouvernement toute possibilité de nous faire des propositions dans le cadre de cette loi !

L'amendement 425, mis aux voix, est adopté.

M. Félix Leyzour - Très bien !

M. François Sauvadet - L'amendement 510 est défendu.

Mme Marcelle Ramonet - Il existe des organismes sociaux qui ont vocation à s'occuper des personnes en situation précaire et, dès lors, il ne se justifie pas de garantir la fourniture d'eau à tout occupant d'un immeuble. Ce serait favoriser les installations illégales et, au surplus dangereuses puisqu'il s'agit en l'espèce d'immeubles déclarés insalubres. D'où l'amendement 613, qui ajoute « ayant un titre de propriété ou un bail ».

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Certains occupants de bon droit peuvent ne pas bénéficier d'un bail, pour toutes sortes de raisons : peut-on accepter qu'ils soient privés d'eau sur décision du seul propriétaire ? On sait qu'il s'agit d'un moyen de pression classique pour faire évacuer un immeuble.

Les amendements identiques 510 et 613, repoussés par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Léonce Deprez - Toutes les communes de France agissent en faveur de ceux qui ne sont pas en mesure d'acquitter leurs factures d'eau ou d'électricité, mais il ne conviendrait pas que les bons payeurs soient pénalisés par les mauvais payeurs. Seules les personnes reconnues en difficulté doivent pouvoir continuer à bénéficier de l'eau en cas d'impayé. Maintenir la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa reviendrait à encourager les gens qui refusent de payer de mauvaise foi : l'amendement 508 tend donc à la supprimer.

M. le Rapporteur - Rejet. Vous voulez revenir sur le principe du débit minimum garanti à chaque usager, mais un tel débit ne saurait suffire aux besoins de quelqu'un qui aurait les moyens de payer sa facture, alors qu'il est vital pour les autres. Nous avons donc toutes les raisons de le préserver.

M. le Ministre - Avis défavorable également. Cette garantie de débit minimal pour satisfaire aux besoins vitaux répond tout simplement à une exigence de dignité.

M. Jean-Pierre Brard - M. Deprez intervient toujours avec componction mais, derrière ce ton onctueux, le propos est passablement inique ! Nos collègues de droite voudraient priver les plus pauvres du droit à l'eau...

M. François Sauvadet - Oh !

M. Jean-Pierre Brard - Vos « Oh ! » me font penser à Tartufe : « Cachez ce sein que je ne saurais voir... » ! Mais nous ne jouons pas dans la même cour : vous êtes, vous, les fondés de pouvoir des privilégiés et vous ne vous préoccupez que d'eux. Tout le reste n'est qu'habillage, travestissement... Mais si nous comparons ce que touche annuellement un RMiste et ce que possède Mme Bettencourt - qui vient de recevoir la légion d'honneur, on se demande bien pourquoi...

M. Germain Gengenwin - Il y avait longtemps !

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur Gengenwin, je sais qu'elle habite vos pensées ! (Sourires)

Eh bien, le montant que mentionnait tout à l'heure M. Gaillard représente un quatorzième du revenu annuel d'un Rmiste et un trente-millionième de la fortune de Mme Bettencourt - encore que je ne pense pas qu'elle se contente de 5 F d'eau par jour, avec toute sa domesticité ! Voilà exactement l'écart entre les intérêts que nous défendons : vous êtes du côté de ceux qu'on appelait jadis les 200 familles, nous sommes du côté de leurs victimes.

M. Serge Poignant - Cessons ces caricatures et revenons aux réalités. Que les communes soient de droite ou de gauche, les CCAS se préoccupent de ceux à qui l'on coupe l'eau parce qu'ils n'ont pas les moyens de la payer.

L'amendement 508, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Proriol - Les cas visés par l'amendement 406 sont ceux d'impayés, mais du fait de personnes qui ne relèvent pas de l'action sociale : il vise à responsabiliser le service de l'eau, chargé de garantir un débit minimal, en remplaçant, dans la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa, le mot « assure » par « peut assurer ». Cette modification permettra de maintenir une certaine pression sur des familles qui ne paient pas alors qu'elles en auraient les moyens. Si, au contraire, on leur assure quoi qu'il arrive une fourniture minimale, elles continueront de faire traîner les factures, prenant de fâcheuses habitudes.

M. Jean-Pierre Brard - On ne trouve pas les Chouans qu'en Vendée !

M. François Sauvadet - L'amendement 509 corrigé, identique, se fonde avant tout sur la notion de responsabilité. J'écoutais M. Brard avec un peu de tristesse : lui et ses pareils auraient le monopole du c_ur tandis que nous serions incapables de prendre en compte la détresse sociale ! Piètre conception de l'action publique ! Nous divergeons sur les réponses à apporter, certes, mais ces sorties laisseront un goût amer à tous ceux qui essaient d'aider les personnes en difficulté.

Nous nous interrogeons comme vous, Monsieur Brard, sur les moyens à employer pour remédier à la précarité mais nous serions gravement et collectivement responsables si nous ne réservions pas notre solidarité à ceux qui en ont réellement besoin.

Le débat était d'ailleurs le même, s'agissant de la part fixe et de la facturation proportionnelle. Il n'est pas cohérent de se poser en défenseurs des familles nombreuses et de vouloir réduire une part fixe qui assure un certain partage du fardeau, indépendamment de la consommation. N'ajoutons pas à la loi, Monsieur le rapporteur, de simples déclarations d'intention qui ne feront que compliquer notre recherche d'une politique garantissant une eau de qualité au plus grand nombre !

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces deux amendements identiques.

Monsieur Sauvadet, famille nombreuse ne va pas nécessairement de pair avec précarité ni misère. Je connais beaucoup de familles très nombreuses qui vivent très bien, sans les allocations familiales d'ailleurs...

Quand il s'agit de dignité humaine, mieux vaut qu'un règlement de service prévoie dès le départ le débit minimal à garantir en tout état de cause plutôt que de laisser le service distributeur en décider seul. Tel est l'objet de l'amendement 217, auquel j'invite MM. Proriol et Sauvadet à se rallier.

M. le Ministre - Avis défavorable aux amendements 406 et 509 corrigé, mais favorable au 217. Nous sommes très attachés à la garantie d'un débit minimal vital. Que ses modalités soient prévues dans un règlement de service, comme le propose l'amendement 217, ne peut que nous satisfaire.

M. François Sauvadet - Cette assurance étant donnée et dans la mesure où, en dépit de divergences d'approche, nous partageons le même objectif, nous pouvons retirer nos deux amendements au profit du 217.

Les amendements 406 et 509 corrigé sont retirés.

M. le Rapporteur - J'ai déjà présenté l'amendement 217. Le règlement de service, décidé en concertation entre les usagers, la collectivité et le service distributeur, définira le débit minimal, les modalités d'installation et le coût des compteurs vissés nécessaires.

M. le Ministre - Avis favorable, comme je l'ai déjà dit.

M. Léonce Deprez - Si tout risque d'abus est écarté, nous ne pouvons qu'être favorables à cette disposition. Voyez-vous, Monsieur Brard, je suis depuis trente ans l'un des maires qui sont le plus souvent intervenus pour qu'on rétablisse l'eau à des foyers aux ressources trop modestes pour la payer. Si vous vous délectez, vous, à évoquer Mme Bettencourt, sachez que c'est avec réalisme et certainement autant de c_ur que vous et tous les autres députés ici présents que je parle des ménages en difficulté.

L'amendement 217, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur pour avis - L'amendement 60 précise les conditions dans lesquelles le maire ou, à défaut, le préfet, peut exiger la mise en place d'une borne fontaine.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 60, mis aux voix, est adopté.

L'article 30 modifié, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 30

M. le Rapporteur - La loi SRU a prévu l'installation de compteurs d'eau individuels dans les copropriétés mais des blocages demeurent, que l'amendement 620 devrait permettre de lever. Il inclut en effet les travaux nécessaires à l'individualisation de la fourniture d'eau dans la liste des décisions pouvant être prises à la majorité simple des copropriétaires.

M. le Ministre - Avis favorable.

L'amendement 620, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 621 corrige une erreur à l'article 93 de la loi SRU, où il convient de supprimer une référence au code des marchés publics qui ne se justifie pas dans la gestion des compteurs d'eau.

M. le Ministre - Sagesse.

L'amendement 621, mis aux voix, est adopté.

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ART. 31

M. Stéphane Alaize - Le coût de l'eau peut aussi faire obstacle à son accès. Il arrive qu'en raison de contraintes géographiques, ou d'une densité particulièrement faible de population, un service public de distribution d'eau soit contraint de pratiquer des prix au mètre cube très supérieurs à la moyenne nationale. J'avais déposé un amendement, auquel a malheureusement été opposé l'article 40, permettant qu'en ce cas le fonds national de solidarité pour l'eau aide le service à ramener son prix au niveau du prix moyen.

J'appelle l'attention du Gouvernement sur cet épineux problème en zone rurale. Quelques éléments chiffrés comparatifs permettront de mieux le comprendre. Prenons un secteur diffus rural et une ville moyenne de 30 000 habitants ayant une consommation d'eau comparable d'un peu plus de deux millions de mètres cubes pour, soit dit au passage 19 200 abonnés pour le premier, 9 700 pour la seconde. Dans le cas du secteur rural, il faut entretenir 1 100 km de réseau contre 207 en ville, 242 réservoirs contre 11, pratiquer 2 789 analyses contre 876, employer 27 personnes contre six, et dépenser plus de 800 000 F d'énergie électrique contre un peu plus de 200 000 F, ce qui aboutit à un prix de 18,23 F le mètre cube contre 7,51 F en ville. Si l'on inclut les dépenses d'assainissement, les prix respectifs s'établissent à 28 F contre moins de 11 F ! Tout est dit dans ces chiffres. Il faut trouver une solution : l'Etat doit aider les services distributeurs des petites communes concernées, qu'il s'agisse de régies ou de services publics délégués - car aucun grand distributeur d'eau n'est présent dans ces secteurs difficiles... Il est tout de même impensable que certaines communes, comme cela arrive dans ma circonscription, ne puissent pas alimenter en eau potable tous leurs foyers.

M. François Sauvadet - L'amendement 511 précise que les règlements de service sont élaborés par les collectivités et non par les exploitants, qu'ils peuvent être adressés par voie électronique, et que les abonnés n'ont pas à en accuser réception, car beaucoup d'entre eux probablement ne le feront pas.

M. Jean Proriol - L'amendement 407 est très voisin. Nous avions en effet été très surpris que l'élaboration des règlements de service soit confiée aux exploitants eux-mêmes. Cela manquait pour le moins de cohérence avec l'objectif poursuivi !

M. le Ministre - Avis défavorable aux deux amendements. Le Gouvernement avait déposé un sous-amendement 692, mais il va le retirer au profit de l'amendement 219 de la commission.

M. le Rapporteur - Notre amendement 219 propose que les abonnés accusent réception du règlement de service et que celui-ci soit tenu à la disposition de tous les usagers qui en font la demande. Il n'est pas possible de l'adresser directement aux usagers pour la simple raison que les services distributeurs n'ont que la liste des abonnés, non celle des usagers.

Je ne vois pas d'autre solution. Je maintiens mon amendement, mais il faudra supprimer dans le projet la référence aux usagers.

M. Jean Proriol - Je demande l'absolution du rapporteur : si j'ai utilisé le mot « usagers », c'est parce qu'il figurait dans le texte du Gouvernement. Ne nous imputez pas la faute initiale, si vous m'autorisez ce vocabulaire un peu ecclésiastique (Sourires).

Ce sont les politiques qui rédigent le règlement de service, mais cela n'apparaît nulle part. Je l'inscris dans mon amendement. En revanche, ce sont les exploitants qui adressent le document aux abonnés et qui paient le timbre, puisque ce sont eux qui encaissent les recettes.

Je ne comprends pas la position du Gouvernement, et comprends encore moins celle de la commission.

M. François Sauvadet - Je maintiens mon amendement.

S'agissant des destinataires, je me range à l'avis du rapporteur. En revanche, je ne le suis pas au sujet de l'établissement du règlement de service. Il est d'ailleurs curieux que le Gouvernement dépose un sous-amendement pour le retirer aussitôt.

En faisant appel au Haut Conseil et à des règlements-types, vous risquez d'uniformiser ces documents. Or, nous souhaitons qu'on respecte l'autonomie des collectivités locales et des gestionnaires.

Si vous acceptiez de sous-amender mon amendement, nous pourrions trouver une rédaction qui convienne à tous.

M. le Rapporteur - Je ne vois pas d'inconvénient à préciser qui établit le règlement de service et qui l'envoie. Quant au Haut Conseil, il peut établir un modèle de règlement, comme modèle de contrat, que les communes pourront adapter ensuite.

Il faudrait mixer tous ces amendements, afin de supprimer la référence aux usagers et préciser d'autre part que ce sont les communes, les établissements intercommunaux et les syndicats intercommunaux qui établissent le règlement de service ; et d'autre part que les exploitants l'expédient. De la sorte, nous parviendrons à une rédaction qui satisfera tout le monde.

M. François Sauvadet - Parfait !

M. le Ministre - L'amendement de M. Proriol apporte des précisions importantes. Si c'est possible, je souhaiterais rétablir le sous-amendement du Gouvernement.

Mme la Présidente - On ne peut légiférer ainsi. Je suspends la séance pour vous permettre de trouver une rédaction commune.

La séance, suspendue à 23 heures 50, est reprise le jeudi 10 janvier 2002 à 0 heure 10.

Mme la Présidente - Je suis saisie par MM. Marcovitch, Sauvadet et Proriol d'un amendement 700 qui se substitue aux amendements 511, 407 et 219 et rédige ainsi l'article 31 : « Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes établissent, pour chaque service de distribution d'eau ou d'assainissement dont ils sont responsables un règlement de service définissant, en fonction des conditions locales, les obligations respectives de l'exploitant, des abonnés, des usagers et des propriétaires. Les exploitants adressent les règlements de service à chaque abonné intéressé, ainsi que, le cas échéant, au propriétaire du fonds de commerce ou au propriétaire de l'immeuble, par courrier postal ou électronique. Les exploitants rendent compte des dispositions qu'ils prennent pour s'assurer de l'effectivité de la diffusion des règlements de service. Les abonnés accusent réception des règlements de service à l'occasion du paiement de la facture. Le règlement de service est tenu à disposition des usagers. ».

L'amendement 700, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Les amendements 511, 407 et 219 tombent.

M. Jean Proriol - L'amendement 408 vise à permettre le paiement mensuel des factures relatives à la fourniture d'eau potable et à l'assainissement, le cas échéant par prélèvement bancaire. Cela facilitera la gestion des charges pour de nombreux abonnés.

M. le Rapporteur - L'amendement 220 est quasiment identique : la différence de rédaction est mineure.

M. Claude Gaillard - L'amendement 512 a le même objet. Il importe d'autant plus d'aider les abonnés à programmer leur dépense que le coût de l'eau devient significatif.

M. le Rapporteur - La rédaction de l'amendement 220 me paraît préférable.

M. le Ministre - Avis favorable aux trois amendements.

L'amendement 408, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 220, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - L'amendement 512 est satisfait.

M. Jean-Pierre Brard - L'accès à l'eau potable est une nécessité vitale pour chaque individu. Pour que ce principe trouve une application concrète, je propose, par l'amendement 426, que l'on garantisse à chacun une quantité d'eau gratuite. Il serait assez facile, Monsieur le ministre, par exemple par le biais de la taxe d'habitation, de savoir combien de personnes vivent dans un foyer.

Bien sûr, cela aurait un coût pour l'opérateur, mais il pourrait être compensé en majorant la facturation au-delà d'un certain seuil de consommation, ce qui inciterait en outre à économiser une ressource rare et précieuse.

Nous n'avons pas le monopole du c_ur, et je suis sûr que MM. Deprez, Sauvadet, Gaillard prennent en compte, dans leurs communes, la situation des plus défavorisés. Mais comment ne voient-ils pas que les responsables de cette situation, de ces plaies qu'ils doivent soigner, ce sont les privilégiés, ces majors de l'eau qu'ils défendent bec et ongles, comme l'a fait hier M. Galley ?

M. François Sauvadet - Vous oubliez que vous êtes dans la majorité depuis cinq ans...

M. Jean-Pierre Brard - C'est vrai, et nous avons adopté des mesures extrêmement positives comme les 35 heures, les emplois-jeunes, la CMU et bien d'autres. Le reproche que l'on pourrait peut-être faire au Gouvernement ce serait de ne pas être allé assez loin dans le combat contre vos thèses, dans la lutte pour plus d'égalité.

C'est pourquoi il nous faut aujourd'hui reconnaître le droit à l'eau, après le droit à la santé, le droit à l'électricité et avant le droit à d'autres produits et services de première nécessité demain.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. On voit mal comment s'assurer de la situation sociale des abonnés. Il faudrait donc distribuer une certaine quantité d'eau gratuite à tout le monde et ce sont ceux qui ont les moyens qui en profiteraient le plus. Ainsi, je suis sûr que Mme Bettencourt a des machines à laver économes en eau, des toilettes à double chasse d'eau, ce qui n'est bien sûr pas le cas des familles défavorisées.

Contentons-nous donc du tarif social qui vient d'être adopté, à l'initiative de M. Leyzour, par tous les députés de gauche.

M. le Ministre - Même avis. La proposition de M. Brard serait difficile à mettre en pratique. Elle supposerait notamment la constitution d'un fichier des usagers, à laquelle je ne suis pas sûr qu'il soit favorable.

Au reste, la Flandre, qui avait décidé d'allouer gratuitement, chaque année, 5 mètres cubes par personne, a constaté que le prix de l'eau avait augmenté de 30 %, que les puits privés se développaient et que la consommation ne se réduisait pas, en raison d'une véritable incitation au gaspillage. Les Flamands reviennent aujourd'hui en arrière. C'est bien parce que la gratuité entraîne la hausse des tarifs et déresponsabilise les consommateurs que je suis défavorable à cet amendement.

M. Jean-Pierre Brard - Les difficultés d'organisation ne tiennent pas si on a une volonté politique. L'ENA produit assez de cerveaux brillants pour qu'on trouve des solutions... quant à la Flandre, est-ce là que la gauche doit prendre ses exemples ?

Et même si comparaison n'est pas raison, je n'ai pas le sentiment que la CMU incite au gaspillage en matière de santé.

Mais puisqu'une disposition positive a déjà été adoptée à l'initiative de M. Leyzour, puisqu'il convient de laisser la réflexion se poursuivre afin de trouver la formule la mieux adaptée à l'objectif, je retire pour l'instant mon amendement.

L'amendement 426 est retiré.

M. le Rapporteur pour avis - L'amendement 62 vise à éviter que les distributeurs créent de nouvelles formes de frais d'accès, comme un droit d'abonnement ou de clôture d'abonnement.

L'amendement 63 est de coordination.

M. le Rapporteur - Favorable.

M. le Ministre - Ces amendements s'inscrivent pleinement dans l'esprit du projet, qui est de supprimer tous les frais d'accès aux services publics de l'eau et de l'assainissement. Avis favorable.

L'amendement 62, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 63.

M. Jean Proriol - Les amendements 549 et 409 tendent à supprimer l'article L. 224-12-4 du code général des collectivités territoriales, qui encadre la facturation de l'eau et qui impose aux communes un cheminement obligatoire.

La question du prix de l'eau doit être résolue par le dialogue et la démocratie locale, pas par une réglementation bureaucratique qui sera très complexe à mettre en _uvre et qui entraînera, nous en prenons le pari, des hausses de prix pour les familles !

M. François Sauvadet - Absolument !

M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements, qui visent à supprimer tout encadrement de la part fixe comme des tarifs spéciaux. Je ne me considère pas comme un bureaucrate centralisateur, mais comme un député qui vote des lois ayant vocation à encadrer les pratiques sur l'ensemble du territoire. S'il doit y avoir des tarifs spéciaux, que ce soit dans le cadre de la loi, et avec l'accord de la commission consultative !

M. le Ministre - Les modalités de calcul de la part fixe et des tarifs spéciaux sont l'un des piliers de la transparence que réclament toutes les associations de consommateurs. Il est établi qu'une part fixe trop élevée encourage les consommations excessives et déresponsabilise les usagers. Quant aux tarifs spéciaux, qui bénéficient aux usages professionnels plutôt que domestiques, ils devront être justifiés.

M. Claude Gaillard - La part fixe représente, en moyenne nationale, quelque chose comme 16 % du montant des factures ; cela paraît raisonnable. Les tarifs sont peut-être obscurs à Paris, mais en province ils sont discutés sur la place publique. Faisons plutôt confiance aux collectivités territoriales et au débat démocratique local !

M. Jean Proriol - La position du Gouvernement et du rapporteur est un acte de défiance envers les collectivités locales. Le tarif « binôme » est pourtant une tradition fort ancienne, et si le projet ne l'interdit pas, la tentation a été forte. Je me demande, d'ailleurs, si les collectivités pourront continuer à proposer à ceux pour qui l'eau est un outil de travail - je pense notamment aux industries agro-alimentaires - des tarifs dégressifs.

M. le Rapporteur - Etant donné que les tarifs progressifs font l'objet de l'article précédent du code général des collectivités territoriales, il paraît évident que les tarifs « spéciaux » sont des tarifs dégressifs...

Les amendements 409 et 549, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Claude Gaillard - Les amendements 515 et 514 sont défendus.

M. Léonce Deprez - L'objet de mon amendement 382 est de faire contribuer les résidents secondaires aux dépenses d'investissement, afin que celles-ci n'incombent pas à la seule population permanente, laquelle comprend nombre de foyers modestes.

M. le Rapporteur - Le cas des communes touristiques est traité à l'article suivant. Il est vrai que les coûts fixes représentent environ 80 % du coût total de l'eau, mais nous ne pouvons nous en tenir, s'agissant d'une ressource aussi fragile, à des considérations purement comptables : il nous faut adopter une démarche environnementale, et inciter nos concitoyens à modérer leur consommation. Quant aux familles nombreuses, qu'invoquent certains, elles sont loin d'être toutes démunies : les veuves qui n'ont que la pension de réversion de leur mari, les jeunes chômeurs qui vivent seuls ou en couple connaissent souvent de plus grandes difficultés.

M. le Ministre - Défavorable. Dans le dernier numéro de la revue d'une grande association de consommateurs, qui publie d'ailleurs une interview de M. Tavernier, la part fixe est estimée à 20 % en moyenne -  et cela peut aller jusqu'à 37 %, pour une consommation annuelle de 120 mètres cubes. Cette association considère qu'un encadrement plus strict constituerait un progrès par rapport à la situation actuelle. Le Gouvernement a retenu, pour sa part, une définition très stricte des services pouvant être facturés au titre de la part fixe.

M. François Sauvadet - Je comprends que le rapporteur nous oppose la nécessité d'inciter les usagers à modérer leur consommation, mais cela relève plus de l'éducation dès le plus jeune âge, me semble-t-il, que de la tarification. Celle-ci pose un véritable problème de fond : celui de la part respective du service offert et de l'usage qui en est fait.

Vous vous référez constamment à Paris, Monsieur le rapporteur, mais ce n'est pas toute la France ! À côté des zones agglomérées, il faut aussi tenir compte du secteur rural diffus. Dans ma terre d'élection, qui compte 344 communes,...

M. Jean Proriol - Et de bonnes communes !

M. François Sauvadet - ...les investissements sont nécessairement lourds, d'autant plus que, dans ces villages, il existe des résidents temporaires mais qui n'utiliseraient même pas partiellement leur maison si les services faisaient défaut. La question que vous posez est donc capitale : on ne peut « modéliser » la France.

Il faudrait d'ailleurs poursuivre la réflexion jusqu'à son terme : comment allons-nous gérer demain les ordures ménagères ? Le problème se posera dans les mêmes termes. J'ai écouté le ministre et je me suis engagé dans le tri sélectif : mon canton de 3 300 habitants compte donc deux déchetteries, ce qui entraîne des coûts fixes importants. Quid des résidents qui ne viennent que pour un ou deux jours ? Certains m'ont soutenu qu'ils remportaient leurs ordures en ville !

Comment concilier la recherche d'une harmonisation avec la reconnaissance, tout aussi nécessaire, de la diversité territoriale ? L'élu rural que je suis, néanmoins attentif aux problèmes des villes et agglomérations, ne peut que vous mettre en garde : à trop réglementer, vous risquez de vous engager dans un engrenage préjudiciable au monde rural.

M. Stéphane Alaize - Je ne crois pas qu'il faille trop demander aux habitants, fût-ce au niveau d'un bassin, ni à la part fixe et, pour compenser les handicaps géographiques, je suis plutôt partisan d'un mécanisme national de solidarité, d'une péréquation - ce pourrait être par exemple le rôle du fonds national de solidarité sur l'eau. Je n'ai toutefois pu mener ma réflexion à son terme et n'ai donc pas déposé d'amendement.

M. Pierre Ducout - Après le long débat que nous avons eu en commission, j'estime qu'il est normal de chercher à combattre les exagérations constatées à propos de la part fixe, comme le souhaitent les consommateurs, sans toutefois aller trop loin. Nous devons notamment prendre des positions claires sur deux points. S'agissant des tarifs spéciaux du troisième alinéa de l'article L. 2224-12-4, le rapporteur s'est nettement prononcé pour leur dégressivité en fonction des coûts différents des services, sachant que, s'il en était autrement, des entreprises agro-alimentaires, par exemple, pourraient procéder à des forages, ce à quoi la collectivité ne gagnerait évidemment pas. En ce qui concerne l'article L. 2224-12-6, nous avons souligné en commission que les communes soumises à fortes variations ne sont pas seulement les stations touristiques : ce peuvent être aussi des communes rurales comptant de nombreuses résidences secondaires. Resterait à préciser ce qu'on entend par « fortes variations » : on pourrait considérer que ce sont des variations de l'ordre de 10 à 20 %, mais il serait bon que le ministre le précise pour qu'ensuite, dans nos collectivités, nous puissions éviter des parties fixes excessives tout en nous réservant les moyens de gérer correctement les services.

Mme la Présidente - Je dois lever la séance à 1 heure : si vous continuez à ce rythme, nous n'aurons alors même pas achevé l'examen de la première partie de l'article 31.

M. Léonce Deprez - Je suis heureux des précisions données par M. Ducout. Le niveau de vie s'élevant, les résidences secondaires tendent à se multiplier, et cela dans toutes les régions. Il faut donc que ceux qui ont les moyens d'en acquérir participent aux investissements, dont on ne peut laisser la charge aux plus modestes. Tel est le sens de mon amendement 328.

M. Serge Poignant - Progressivité ou dégressivité des tarifs : les deux écoles existent. Les partisans de la première soutiennent qu'elle permettra de réduire la consommation d'eau. Personnellement, je suis plutôt pour la dégressivité, pensant que des tarifs progressifs conduiront au résultat inverse de ce qu'on recherche, certains forant des puits pour y échapper.

D'autre part, une métropole peut se permettre de réduire la part fixe mais, je le vois bien dans mon département, ce n'est pas le cas des zones rurales. On arrive ainsi à des tarifs différents. Si donc un plafonnement est indispensable, cette part fixe ne l'est pas moins pour concilier partout prix supportables et investissement.

M. Jean-Michel Marchand - Au lieu de discuter d'une dizaine d'amendements et de plusieurs sujets en même temps, revenons à la part fixe. C'est un choix politique que nous avons fait en tranchant pour un abonnement, et ce choix, nous devons l'assumer tout en veillant à ce que la part fixe ne comporte que ce qui est indispensable au service de l'eau. Pour le reste, je suis partisan de tarifs proportionnels aux volumes consommés, pour inciter à consommer moins, tout en reconnaissant que certaines activités nécessitent des quantités importantes d'eau et appellent donc un traitement distinct.

S'agissant des infrastructures, nous avons proposé que les résidences secondaires soient concernées et, personnellement, j'ai même suggéré de prendre sur la taxe de séjour.

Je pense donc que nous nous sommes dotés des outils nécessaires à une bonne distribution de l'eau. Reste peut-être à poursuivre la réflexion sur la solidarité entre la ville et la campagne, sachant qu'on puise le plus souvent l'eau à la campagne pour la distribuer à la ville !

Les amendements 514, 515 et 382, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

La suite de la discussion est renvoyée à une séance ultérieure.

Prochaine séance ce matin, jeudi 10 janvier, à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Louis REVAH

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ORDRE DU JOUR
DU JEUDI 10 JANVIER 2002

À NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE

Suite de la discussion de la proposition de loi (n° 3431) de MM. Jean-François MATTEI, Jean-Louis DEBRÉ, Philippe DOUSTE-BLAZY et plusieurs de leurs collègues relative à la solidarité nationale et à l'indemnisation des handicaps congénitaux.

    M. Jean-François MATTEI, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 3462)

Discussion, après déclaration d'urgence, de la proposition de loi (n° 3520) de MM. Jean LE GARREC, Jean-Marc AYRAULT et Claude EVIN portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie.

    M. Claude EVIN, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Rapport n° 3524)

Discussion de la proposition de loi organique, adoptée par le Sénat (n° 3396), portant validation de l'impôt foncier sur les propriétés bâties en Polynésie française.

    M. Jérôme LAMBERT, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 3456)

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi (n° 3521) relatif à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'État.

    Mme Véronique NEIERTZ, rapporteure au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 3523)

Suite de la discussion du projet de loi (n° 3205) portant réforme de la politique de l'eau.

    M. Daniel MARCOVITCH, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges. (Rapport n° 3500)

    M. Yves TAVERNIER, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Avis n° 3517)

À QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.

À VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE

Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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