- - Rapport sur l'aval du cycle nucléaire Chapitre II (partie III) III. Les différentes filières de production de lélectricité : réexamen des coûts et perspectives 111 A. Le nucléaire : des coûts correctement évalués et des perspectives encourageantes 117 1. Les dépenses de R & D prises en compte 119 2. Les dépenses dinfrastructure 122 3. Les coûts du retraitement 123 4. La rentabilité discutée du Mox 126 5. Les dépenses dentreposage ou de stockage des déchets et des combustibles 129 6. Les prévisions du coût du démantèlement confirmées par le retour dexpérience 133 7. Les provisions dEDF 138 8. Le coût dassurance 141 9. Récapitulation des coûts Digec 142 10. Les perspectives de marché pour le nucléaire 143 11. Pour la commande dun EPR à 1 495 MWe 144 III. Les différentes filières de production de lélectricité : réexamen des coûts et perspectives Lavenir des différentes filières de production de lélectricité ne saurait être indépendant des réserves mondiales en énergie. Celles-ci évoluent à la hausse mais leurs limites doivent toutefois être considérées avec attention. Le progrès technique et lévolution des prix sur les marchés mondiaux entraînent une augmentation quasiment régulière des réserves mondiales. Dune part, de nouveaux gisements sont découverts grâce à de nouvelles techniques dexploration. Dautre part des gisements difficiles à exploiter peuvent devenir accessibles grâce à des percées technologiques. Enfin, les conditions techniques peuvent baisser les seuils de rentabilité en diminuant les prix de revient. Ou bien les prix du marché en évoluant à la hausse peuvent conférer une rentabilité à des gisements auparavant trop chers à exploiter. Cest pourquoi les données concernant les réserves doivent être considérées comme ayant une valeur momentanée et non pas définitives. Les ordres de grandeur sont toutefois à prendre en compte, ainsi que cela est fait dans la figure suivante. Tableau : Réserves de combustibles fossiles évolution des estimations depuis 19761 Les réserves mondiales de charbon sont évaluées à 442 milliards de tonnes. Cette estimation varie peu depuis quelques années et ne devrait pas être sensiblement modifiée à lavenir. Lappréciation que lon a des réserves mondiales de pétrole et de gaz naturel est quant à elle en hausse constante. Le cas du pétrole est frappant. Entre 1976 et 1996, pour chaque tonne de pétrole consommée, on a découvert 2 tonnes de pétrole, avec un renforcement des anticipations pour le Moyen Orient. Des réserves supplémentaires de gaz ont également été découvertes sur la même période au Moyen Orient et en Russie. Les réserves actuelles duranium sont estimées à 75 milliards de tonnes équivalent pétrole, dans lhypothèse de lutilisation des seuls réacteurs à eau légère. Dans le cas du recours à la filière des réacteurs à neutrons rapides, qui permettent de valoriser la totalité du contenu énergétique de luranium, ces mêmes réserves sont multipliées par 50. Les ordres de grandeur du nombre dannées de consommation, toutes choses égales par ailleurs, sont de plus de deux cents ans pour le charbon, dun siècle et demi pour luranium et dun demi-siècle pour les hydrocarbures. Tableau : Estimations de 1996 pour les réserves mondiales, en années de consommation 19962, 3 Dans cette prospective sur les ressources énergétiques à long terme, lUnion européenne napparaît pas bien placée. Le rythme de découverte des réserves dhydrocarbures en Europe est en effet plus lent que celui de la consommation. Figure : Evolution des estimations de réserves de pétrole entre 1976 et 1996 La position du Moyen Orient était en 1976 prédominante pour les réserves pétrolières, avec 54 % des réserves mondiales. Cette position sest renforcée, puisque la part du Moyen Orient est passée à 65 % en 1996. Les découvertes les plus importantes de la période 1976-1996 ont en effet été faites en Amérique latine (Mexique, Venezuela) et au Moyen Orient (Irak, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis). Sagissant du gaz, les découvertes majeures de gisements de gaz ont eu lieu durant la période considérée en Russie et au Moyen Orient (Iran, Qatar) et non pas en Europe. Tableau : Evolution des réserves de gaz entre 1976 et 1996 Deux zones géographiques concentrent les réserves de gaz les plus importantes, la Russie et le Moyen Orient. Lépuisement au début du siècle prochain des gisements de gaz de la mer du Nord contraindra lEurope à se tourner vers des approvisionnements extérieurs. Or les principaux gisements extérieurs se trouvent dans des zones sujettes à des aléas politiques majeurs. De fait, les prévisions sur lévolution du taux dindépendance énergétique sur les vingt années à venir ne sont pas encourageantes. Le Royaume Uni devrait voir, toutes choses égales par ailleurs, son indépendance énergétique passer de 96,6 % en 1990 à 55,6 % en 2020, en raison de lépuisement progressif des gisements de Mer du Nord. Figure : Evolution et prévision de lindépendance énergétique de lUnion européenne4, 5, 6, 7 LAllemagne connaîtra une baisse dactivité programmée de ses mines de charbon et divisera par deux son taux dindépendance 52,3 % en 1990 et 23,9 % en 2020. Au total, le taux dindépendance énergétique de lUnion européenne évoluera de 53,4 % en 1990 à 35,1 % en 2020. Figure : Prévision de lévolution du taux dindépendance énergétique de lUnion européenne entre 1995 et 2020, pour les différents combustibles fossiles8, 9 En réalité, lUnion européenne ajoutera, dans les prochaines années, une dépendance gazière à une dépendance pétrolière, tandis que le charbon, lui-même, verra sa production décroître, ainsi que lillustre la figure ci-dessus. Cest dans ce contexte européen dappauvrissement en ressources fossiles propres et de diminution de lindépendance énergétique que se pose la question du choix des filières de production de lélectricité. A. Le nucléaire : des coûts correctement évalués et des perspectives encourageantes en Asie Lun des atouts du nucléaire est labondance des réserves duranium et leur bonne répartition géographique, ainsi que la figure suivante lillustre. Figure : Répartition mondiale des réserves duranium en kt duranium estimées en 199610, 11 Lévolution des prix est également satisfaisante, grâce à lexistence dimportants stocks. Figure : Production et consommation duranium naturel dans le monde à économie de marché12 Il en résulte une évolution favorable des prix, qui semblent durablement bas. Figure : Evolution des prix de luranium selon les types de contrats13 Les études conduites sur les coûts de production du kWh nucléaire concluent à sa compétitivité. On examine en détail ci-après les différents postes de coût, afin de déterminer si les bases actuelles sont exhaustives et si au total la compétitivité du nucléaire est fondée. 1. Les dépenses de R & D prises en compte Létude Digec impute les charges de recherche et développement au coût du kWh nucléaire. La question qui se pose est donc de savoir si le coût de la R & D actuelle correspond aux dépenses nécessaires au renouvellement du parc. La recherche sur le nucléaire civil, dans le but du renouvellement du parc, est effectuée en interne par EDF et en externe par le CEA, sur la base de contrats financés par EDF. · La recherche et développement à EDF, correctement prise en compte La recherche et le développement sur la filière REP prise en charge par EDF se retrouve dans les coûts de production du kWh de deux façons. La première imputation dans lexercice Digec « coûts de référence » de la production délectricité correspond, à hauteur de 0,36 cF/kWh, aux recherches effectuées en interne ou dans le cadre de contrats passés avec le CEA. La deuxième imputation est indirecte dune part à travers la redevance de sûreté nucléaire, elle-même imputée sur les charges dexploitation, qui finance certains travaux de lIPSN sur la sûreté et dautre part à travers la R & D des fournisseurs que sont Framatome et Cogema. Les charges dexploitation sont bien entendu prises en compte dans les coûts Digec. Tableau : Comptabilisation des dépenses de R & D dEDF
La figure suivante montre que ces dépenses directes de R & D sont relativement stables, entre 1,2 et 1,3 milliard de francs par an. Figure : Estimation des dépenses de R & D dEDF pour les réacteurs REP Limputation de 0,36 cF/kWh au coût du kWh semble en tout état cause bien refléter la réalité. · Les subventions de lEtat à la R & D nucléaire Toutefois, les dépenses de recherche financée par lEtat que lon peut évaluer à environ six cent millions de francs par an, ne sont pas pour le moment imputées et devraient lêtre. Les sommes allouées par le CEA à la recherche sur le nucléaire civil ne recoupent pas en effet totalement le montant des versements dEDF. Une partie de la recherche dans le domaine nucléaire est financée par lEtat. Tableau : Budget du CEA - Ressources 199815
Tableau : Budget du CEA Emplois 1998
· les coûts de la loi du 30 décembre 1991 Il semble que le total des dépenses de recherche et développement correspondant à la loi du 30 décembre 1991 sélève à environ 1,2 milliard de francs en 1998. Rapporté à lélectricité produite, ces dépenses de recherche ont une incidence de 0,3 cF / kWh. Tableau : Estimation des dépenses relatives à la loi du 30 décembre 1991 sur la gestion des déchets radioactifs de haute activité
Tableau : Dépenses de lAndra relatives à laxe 2 de la loi de 1991
A cet égard, il faut remarquer que les coûts des laboratoires souterrains ont été surestimés dans létude Digec 1997 « coûts de référence » de la production électrique. En effet, cest un coût total détude et de construction de 11 milliards de francs qui est prévu pour trois laboratoires. Les décisions prises par le Gouvernement en décembre 1998 laissent penser que deux laboratoires profonds et un laboratoire de sub-surface seront construits. La diminution de coûts par rapport aux prévisions initiales devrait donc être sensible. On peut donc estimer en première approximation que le coût des recherches de la loi de 1991 est compensé par la réduction du coût des laboratoires. 2. Les dépenses dinfrastructure On entend par dépenses dinfrastructure les dépenses de fonctionnement et dinvestissement de lappareil administratif de contrôle de la sûreté des installations nucléaires et de la radioprotection. Tableau : Coût de lappareil administratif de contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection
Deux remarques sont nécessaires. La première est que les travaux de lOPRI et de lIPSN ne concernent pas tous lélectronucléaire. La deuxième est que les travaux réalisés par des établissements publics comme lAdeme, lIFP, lIneris ou par les pouvoirs publics comme la DGS ou la DRT ne sont pas imputés au coût du kWh des autres filières que le nucléaire. Il semble que la subvention de lEtat pour lensemble de lappareil de contrôle représente un coût spécifique de fonctionnement du nucléaire. Ce coût ne serait pas imputé au nucléaire dans létude Digec. Le montant correspondant, soit environ 1 milliard de francs par an, représente 0,2 cF / kWh, une fois rapporté à lélectricité produite annuellement. Le coût du retraitement est une question sensible pour les industriels et controversée dans le public. Les informations sont peu nombreuses. La structure du marché lexplique. Il existe en effet peu dacteurs sur ce marché et une concurrence qui ne prédispose pas à la transparence. La tableau suivant indique quelles sont les capacités de retraitement de combustibles nucléaires usés. Tableau : Capacités industrielles de retraitement dans le monde19
· Léquivalence des coûts du stockage direct et du retraitement La principale source dinformation concernant la comparaison du retraitement et du stockage direct est constituée par létude OCDE davril 199420. La problématique de cette étude est la suivante. La première option est celle qui consiste à considérer le combustible comme un déchet et donc à lentreposer en attente dun conditionnement et dun stockage définitif. La deuxième option est de faire retraiter le combustible pour valoriser luranium et le plutonium contenus dans le combustible. Lensemble des conséquences sur le cycle du combustible sont comparées. En particulier, le recyclage économise de luranium naturel et du travail denrichissement. Lécart de coût total entre les deux options, rapporté au kWh nucléaire, est faible. Il est de lordre de 10 % au plus lorsquun taux dactualisation de 5 % est appliqué. Le tableau suivant indique quels sont les différents modes de gestion des combustibles usés, les volumes en cause et les coûts du retraitement de source OCDE/ Tableau : Différents modes de gestion des combustibles usés pour un réacteur de 1000 MWe
Tableau : Détail du coût de la fin du cycle du combustible selon lAEN-OCDE
· Le coût du retraitement et du stockage selon la Digec et EDF Le retraitement a dune part un fonction de récupération des matières énergétiques non consommées et dautre part une fonction de séparation et de conditionnement de déchets aux propriétés très différentes. Lanalyse de son coût doit donc intégrer ces deux dimensions. Létude « coûts de référence » 1997 de la production électrique publiée par la Digec comprend une estimation du coût du retraitement. Cette estimation est faite dans le cadre dune hypothèse pénalisante pour ce dernier, puisque la valorisation de luranium de retraitement et du plutonium récupéré ne vient pas en diminution du coût mais est déduite du coût du Mox. Au demeurant, la conclusion de la Digec est que le coût actualisé du retraitement est de 1 à 1,2 centime par kWh. Selon la même source, le coût actualisé du stockage ressort à 0,3 centime par kWh. Il y a donc convergence entre ces résultats et ceux de létude OCDE. Daprès la Lettre du Parc nucléaire déjà citée21, EDF estime à 6 centimes par kWh ses charges de combustible nucléaire. La consommation de combustible représente 3,3 centimes. Les provisions pour les dépenses totales et indissociables de retraitement et de stockage des déchets représentent quant à elles 2,7 centimes par kWh. 4. La rentabilité discutée du Mox a) Le Mox, lotage de polémiques nationales ou internationales Le Mox fait lobjet dun débat important. Ceci ne doit pas étonner : lavenir du nucléaire à long terme passe par le plutonium. Son intérêt est encore plus grand à long terme quà court terme. Dans 30 ou 40 ans, alors que la raréfaction du gaz et du pétrole se fera sentir, on aura besoin de brûler tout luranium et non pas seulement sa partie fissile qui ne représente que 0,7 %. Or on peut brûler tout luranium en passant par le plutonium. Le plutonium de qualité isotopique satisfaisante servira à la fabrication du Mox. Le plutonium dégradé par la montée des isotopes pairs pourrait servir de combustible aux RNR qui constituent le complément à long terme indispensable des réacteurs à eau pressurisée. Eliminer le Mox, ce serait tuer lavenir du nucléaire et cest donc compromettre le présent du nucléaire. Mais le Mox est également au centre de la négociation qui se déroule actuellement entre EDF et Cogema sur le retraitement dont les contrats français viennent à échéance prochainement. Sont en cause bien évidemment les volumes à retraiter à lavenir. La limitation de ceux-ci aux trois quarts des combustibles déchargés chaque année par EDF ne peut satisfaire Cogema, non plus que labsence de perspective de multirecyclage, lélectricien nétant pas intéressé à moyen terme par le retraitement du Mox. Un autre point de la négociation porte sur les quantités de Mox à fabriquer. Cogema plaide pour une production maximale dans son usine de Melox, afin de bénéficier déconomies déchelle. Cogema a intérêt à utiliser au mieux sa capacité totale de production . Avec les 8,5 à 11 tonnes de plutonium récupérées, Cogema peut fabriquer annuellement 140 à 180 t de Mox. Là aussi, son produit marginal est optimisé avec la capacité maximale. UP2 800 permet le retraitement de 850 t par an. La Hague avec UP3 pourrait absorber la totalité des 1150 t déchargées des réacteurs EDF. Dans la négociation, le jeu dEDF est bien entendu de relativiser lintérêt de ce combustible. Le Mox est aussi lobjet dun débat international avec la politique américaine qui rejette le retraitement et le recyclage du plutonium et les exigences de la Russie dans les négociations du désarmement. Le devenir du plutonium issu de la démilitarisation des armes nucléaires russes préoccupe les Etats-Unis. Or la Russie, dont les deux derniers responsables ministériels de lénergie atomique sont de formation scientifique, nentend pas considérer le plutonium comme autre chose quune précieuse ressource énergétique, sous forme de Mox ou comme nouveau type de combustible pour ses réacteurs à neutrons rapides qui, au demeurant, fonctionnent pour le moment à luranium enrichi. Les Etats-Unis envisagent daffecter les deux tiers des stocks de plutonium issu du démantèlement de leurs propres armes nucléaires à la production de Mox et de neutraliser le dernier tiers en le mélangeant à des produits de fission et en noyant le tout dans des verres. Cette thèse est fermement repoussée par la Russie qui entend ne pas se priver du contenu énergétique du plutonium. Or il est nécessaire pour la démilitarisation du plutonium dinstaurer un strict parallélisme entre les Etats-Unis et la Russie. b) La compétitivité du Mox destinée à croître fortement à lavenir Le Mox a commencé dêtre utilisé en France en 1987. Son usage sest étendu assez vite, 17 tranches sur 20 autorisées terme étant chargées à la fin 1998 et 28 prévues au total. Par ailleurs, des recherches sont en cours au CEA pour faire passer progressivement le taux de combustion des 37 000 MWj/t autorisés actuellement à 60 000, voire plus. Par ailleurs, le Mox pourrait jouer un rôle accru selon plusieurs scénarios, schématisés dans le tableau ci-après. Tableau 1 : Recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau pressurisée : les différents modes possibles
Pour le moment, le Mox est un combustible sur lequel lexpérience et les connaissances sont encore réduites, comparées à celles accumulées pour le combustible à loxyde duranium. Tout laisse penser quavec le temps, la compétitivité du Mox augmentera considérablement. Seule EDF possède à la fois des informations de première main sur le Mox et une vue densemble des coûts, depuis lextraction du minerai jusquau stockage des déchets en passant par les coûts dentreposage à ne pas négliger. Certes il semble que le prix du Mox « dans son ensemble » soit actuellement voisin du prix du combustible normal. Mais de multiples facteurs laissent penser que lintérêt du Mox devrait croître fortement à lavenir. Leffet déchelle est à lheure actuelle défavorable au Mox, fabriqué à hauteur de 120 t par an contre 1200 t par an pour le combustible uranium, pour ce qui concerne les fabrications françaises. Laugmentation des quantités produites devrait mécaniquement faire baisser son coût. Avec 28 réacteurs prévus à terme, il faudrait étendre la capacité de production de Melox, ce qui permettrait de gagner en facteur déchelle, cest-à-dire de bénéficier des effets favorables de la courbe dexpérience et damortir les coûts fixes sur des volumes plus élevés. Par ailleurs, laugmentation prévisible des taux de combustion sur le Mox devrait améliorer sensiblement la rentabilité du Mox. Il paraît normal que la DSIN procède au coup par coup pour autoriser le relèvement des taux de combustion. Ceux-ci sont actuellement nettement plus faibles pour le Mox que ceux du combustible uranium 37 000 MWj/t contre 52 000 MWj/t. Dans un avenir relativement proche, les deux types de combustibles devraient toutefois atteindre 60 000 MWj/t. Le gain relatif pour le Mox sera beaucoup plus important que pour le combustible UO2. Le coût du Mox devrait par ailleurs bénéficier du fait que pour atteindre un tel niveau dirradiation, il est nécessaire daugmenter sa teneur en plutonium. Au contraire, le combustible UO2 doit, lui, avoir une teneur en U235 supérieure aux 4 % actuel, ce qui entraîne un surcoût denrichissement de luranium. Il y a donc lieu dêtre optimiste sur léconomie du Mox à lavenir, dautant que deux éléments supplémentaires jouent en sa faveur. Le premier élément provient du fait que la gestion du coeur et le temps de présence en réacteur, diffèrent pour les assemblages Mox et pour les assemblages UO2. Il en résulte pour le moment une complication accrue des arrêts pour rechargement qui obère les coûts. La parité de performances pour les deux types de combustibles entraînera de facto des économies de gestion. Le Mox présente enfin lavantage de permettre des économies dentreposage. Il faut le plutonium extrait de 7 assemblages UO2 irradiés pour fabriquer un assemblage Mox vierge. Dune manière générale, le retraitement permet une meilleure gestion des déchets ultimes. Les gains proviennent non seulement dune meilleure qualité de la gestion mais aussi dune réduction des volumes des déchets. Lévaluation de la compétitivité du Mox nécessite en tout état de cause que tous les paramètres soient pris en compte : le coût de luranium, le coût de lenrichissement, le taux de combustion, leffet déchelle, le coût de lentreposage en piscine, le coût de transport, etc. Lapproche en termes de coûts complets doit être exhaustive : il est indispensable de considérer des coûts complets « complets ». 5. Les dépenses dentreposage ou de stockage des déchets radioactifs et des combustibles irradiés Les dépenses de stockage des déchets radioactifs sont prises en compte dans létude Digec, à hauteur de 70 milliards de francs pour un éventuel centre de stockage profond. Le coût actualisé du stockage sélève au total à 0,3 centime par kWh. Une autre option doit aussi être examinée, celle de lentreposage en surface ou en sub-surface. Lentreposage de longue durée est un mode de gestion déjà opérationnel en ce qui concerne les déchets de haute activité à vie longue22. Les concepts et les réalisations concrètes existent par exemple à La Hague pour les verres des déchets C et à Marcoule pour les déchets B. Seulement la durée dexploitation des installations correspondantes est limitée à 50 ans environ. Il est à noter dailleurs que les installations de Marcoule, mises en service en 1960 atteindront les 50 ans de durée de vie en 2010 et délivreront des enseignements très utiles. Deux approches sont possibles pour lentreposage de très longue durée23. Dune part, on peut imaginer que les installations soient remplacées en fin de vie ce sont les autorités de sûreté qui définissent la durée de celle-ci . Cest loption de lentreposage indéfiniment renouvelé. Dautre part, on peut aussi concevoir dentrée des installations pour une durée de 200 à 300 ans. A cet égard, les données de base existent avec le retour dexpérience sur les entreposages en service. Mais en tout état de cause, il ne semble pas possible daller au-delà de 200-300 ans, en partant de résultats sur 50 ans. Les études du CEA se sont focalisées en 1997 et au début 1998 sur les combustibles irradiés, en intégrant dune part le cas des combustibles Mox irradiés qui posent un problème particulier en raison de leur puissance thermique résiduelle et de la lenteur de la décroissance de cette dernière et dautre part le cas des verres (déchets C). Il faut noter à cet égard que les combustibles usés ne disposent pas à lheure actuelle dun conditionnement fiable à long terme A partir doctobre 1998, lentreposage des déchets B a commencé dêtre étudié en détail. Ces déchets présentent la caractéristique de dégager peu de chaleur comparativement aux déchets C mais dêtre volumineux. Les infrastructures doivent donc offrir des structures daccueil de grande taille. Le CEA a notamment étudié le concept dentreposage en sub-surface intitulé « SUB-1 ». Il sagit dun entreposage en bordure de relief, en loccurrence une couche calcaire située entre deux couches argileuses et au dessus du niveau hydrostatique, à une profondeur moyenne de 10 à 100 mètres. Les galeries dentreposage se répartissent en « arêtes de poisson » autour des galeries secondaires. Le CEA na pas encore réalisé destimations des dépenses correspondantes, qui permettraient une comparaison avec les coûts du stockage profond. Toutefois, quelques éléments dinformation existent, provenant dexpériences françaises ou étrangères. · Les références étrangères pour les coûts Les estimations relatives aux coûts des installations dentreposage de longue durée (stockage réversible) sont rares. On en trouve toutefois dans les publications techniques ainsi quindiqué dans le tableau suivant. Tableau : Références de coûts pour lentreposage24
Lune des plus intéressantes estimations dont on dispose provient du CLAB en Suède, une installation pour lentreposage des combustibles irradiés. Il sagit dune piscine située en sub-surface à une trentaine de mètres de profondeur. Les ordres de grandeur sont indiqués dans les deux tableaux suivants. Tableau : Ordres de grandeur des coûts du CLAB (Suède)25
Tableau : Coûts révisés du CLAB sur la base dune extension à 9800 tonnes de métal lourd26
Dautres références existent, cette fois non pas dans le domaine nucléaire, mais dans le domaine industriel. Pour les entrepôts industriels classiques en surface, la valeur moyenne pour le coût dinvestissement est de lordre de 0,4 à 0,7 million de francs par tonne de métal lourd. Or une tonne de métal lourd correspond à 2 m3. On peut donc en déduire un coût dinvestissement de 0,2 à 0,35 million de francs par m3 pour les colis de verre. Le CEA parvient en conséquence aux estimations indiquées dans le tableau suivant pour les coûts dinvestissement. Tableau : Comparaison des coûts dinvestissement pour la surface et la sub-surface
Le CEA dispose avec linstallation Cascad de Cadarache dune expérience qui est loin dêtre négligeable. Cette installation dispose de 315 puits dentreposage pour des combustibles irradiés. Le coût de construction aurait été de lordre de 0,6 million de francs par tonne de métal lourd. Mais lexpérience acquise permettrait sans doute de faire sensiblement baisser le coût dinvestissement. Il reste que les frais dexploitation de Cascad ne semblent pas négligeables et pourraient atteindre cinq millions de francs par an, la main doeuvre de manutention, dentretien et de surveillance représentant près de la moitié de ce montant. Ce chiffre devrait pouvoir être diminué, sauf à rendre non compétitive la solution de lentreposage de surface. En tout état de cause, des conclusions définitives sur les coûts ne peuvent être tirées pour le moment. 6. Les prévisions du coût du démantèlement confirmées par le retour dexpérience Trois types de question se posent à propos du démantèlement. La première est celle de la date optimale de programmation du démantèlement. Doit-il intervenir rapidement après la fermeture de linstallation ou au contraire après un délai de viduité pour bénéficier de la décroissance de la radioactivité ? La deuxième question est celle des évaluations du coût du démantèlement. Les évaluations actuelles sont-elles confirmées par les premières expériences en vraie grandeur ? La troisième question porte sur linfluence éventuelle de la date du démantèlement par rapport au coût de celui-ci. · Le démantèlement des installations nucléaires françaises La référence en matière de démantèlement est la pratique internationale définie par lAIEA en 198027. Conformément aux indications de lAIEA, la France a défini une séquence de trois phases de démantèlement. a) niveau 1 : fermeture sous surveillance de l'installation Dans cette première étape des travaux de démantèlement, les éléments combustibles sont dabord retirés et les circuits de refroidissement vidangés, en vue de la cessation définitive d'exploitation (CDE). Un dossier de sûreté doit être soumis à la DSIN 6 mois avant la fin prévue de ces opérations. A l'issue des opérations précédentes, la mise à l'arrêt définitif (MAD) est prononcée par décret après consultation de la CNIIB et l'avis du ministère de la Santé. Mais d'autres opérations sont nécessaires pour parvenir au niveau 1 selon l'AIEA. Ces opérations sont en particulier lévacuation des déchets d'exploitation et des produits toxiques, le confinement du ou des bâtiments contenant les matériels et les matériaux radioactifs, la mise en place d'un contrôle de la centrale dans les mêmes conditions que l'exploitant, le démontage des équipements non nucléaires non nécessaires à la sûreté. Généralement les opérations correspondant au niveau 1 durent 10 ans. b) niveau 2 : libération partielle et conditionnelle du site Cette étape a pour objectifs le resserrement de la zone contenant des matériaux activés, le démontage des bâtiments nucléaires annexes au réacteur (gestion des effluents et gestion des combustibles). Le confinement entraîne le changement de statut dINB (installation nucléaire de base) en INBE (installation nucléaire de base d'entreposage). Cette étape est prévue à léchéance dune période de 40 ans. c) niveau 3 : libération totale et inconditionnelle du site Au début de cette phase, un décret doit autoriser la déconstruction totale du site. · Les opérations de démantèlement en cours en France Actuellement la déconstruction à EDF concerne les prototypes. Chinon A1 (1963-1973) a atteint le niveau 1. Chinon A2 (1965-1985) a atteint le niveau 2 et est une INB-E. Chinon A3 (1966-1990) est au milieu de l'étape 2 et devrait être classée INB-E en 1999. Saint Laurent A1 (1969-1990) et A2 (1971-1992) sont en cours détape 1, ainsi que Bugey 1 (1971-1992). Brennilis (prototype à eau lourde arrêté en 1985) est en cours d'étape 2. Chooz A (prototype filière REP (1967-1991)) est en cours d'étape 1. · Les deux voies du démantèlement en Allemagne Les opérations de démantèlement sont régies en Allemagne par la Loi atomique (article 7 et article 9 relatif au stockage des déchets). Loriginalité allemande dans ce domaine est que deux grandes stratégies génériques sont possibles28. Elles doivent être proposées par l'exploitant et chiffrées, la décision revenant aux Länder. a) le démantèlement différé La première stratégie est celle du démantèlement différé, les opérations s'étalant sur 40 années. Deux à trois années après l'arrêt de l'exploitation, l'installation est confinée pendant 25 ans afin de bénéficier de la diminution naturelle de la radioactivité, mais, avec, en contrepartie, la nécessité coûteuse d'observer et de maintenir le site pendant cette période. A l'issue des 25 ans, le démantèlement est effectué sur une période de 12 à 14 ans, en intégrant les éventuels progrès technologiques enregistrés en matière de démontage et de réhabilitation du site. b) le démantèlement immédiat La deuxième stratégie est dite immédiate. Deux à trois années après l'arrêt de l'exploitation, un démantèlement complet et immédiat commence et dure de 12 à 14 ans. L'avantage est que l'on évite ainsi la détérioration éventuelle des installations usagées. Linconvénient est que les intervenants ne bénéficient pas de la décroissance de la radioactivité des équipements irradiés. c) le passage d'une stratégie à une autre Le passage dune stratégie de démantèlement différé à une stratégie de démantèlement différé, et réciproquement, est possible. Ainsi, pour le réacteur refroidi au gaz KKN de Niederaichbach, dont le démantèlement a été décidé en 1979, la stratégie du démantèlement différé avait été choisie initialement. Mais pour satisfaire l'opinion publique et tenir compte des caractéristiques des installations, on a choisi finalement le démantèlement direct et immédiat, avec un réhabilitation complète achevée en 1995. Il en a été de même avec le RNR inachevé SNR 300. d) le financement des opérations de démantèlement : pas de différence significative entre le démantèlement immédiat et le démantèlement différé Le démantèlement des installations publiques est financé par le BFMT sur son budget courant. Le démantèlement des installations privées est financé par les entreprises elles-mêmes, grâce aux provisions annuelles effectuées pendant 19 ans, sur des bases constamment réévaluées et actualisées. En 1992, des chiffrages ont été effectués sur la base d'un démantèlement immédiat. Le coût pour un réacteur à eau bouillante de 900 MW atteignait 600 millions de marks et pour un réacteur à eau pressurisée de 1300 MW atteignait 520 millions de marks. Avec un démantèlement "long", le coût était légèrement supérieur dans le premier cas et pratiquement identique dans le deuxième cas. · Les résultats de létude Digec en matière de démantèlement des réacteurs nucléaires Létude Digec procède à une analyse serrée de la question du coût du démantèlement. Le coût de 15 % du montant de linvestissement est pris en compte dans le calcul du coût du kWh selon le tableau suivant. Tableau : Incidence du coût du démantèlement sur le coût dinvestissement du nucléaire programme de 10 tranches et taux dactualisation de 5 %.
Au total, le coût du démantèlement est pris en compte dans le coût dinvestissement à hauteur de 210 francs / kWh environ, avec un taux dactualisation de 5 %. Pour le moment, rien ne laisse penser que ce coût prévisionnel ne corresponde pas à la réalité. En tout état de cause, le financement du démantèlement est provisionné à hauteur de 15 % du coût complet d'investissement, par un prélèvement de 0,97 centime par kWh consommé. Au total, le coût estimé de déconstruction totale du parc EDF est estimé à 100 milliards de francs. 37 milliards étaient provisionnés fin 1996, 41 milliards fin 1997. · Le démantèlement des installations du cycle du combustible Selon ses dirigeants, Cogema possède une grande expérience des opérations de démantèlement dinstallations du cycle du combustible. Ne serait-ce quà La Hague, Cogema a déjà procédé au démantèlement de latelier de dissolution des combustibles de la filière uranium-graphite-gaz, à celui de la piscine de stockage des mêmes combustibles et à celui du premier atelier plutonium. a) le démantèlement dUP1 Le démantèlement de lusine UP1 de Marcoule va représenter dans les prochaines années la première opération dimportance pour Cogema. Grâce à lexpérience acquise lors de la montée en puissance de La Hague, ces opérations de démantèlement dUP1 ont pu être chiffrées avec une précision qui na pas été démentie par des contre-expertises. Le démantèlement proprement dit de lusine UP1 de Marcoule est évalué à 10 milliards de francs29. La reprise des déchets de la filière graphite-gaz coûtera 20 milliards de francs. Enfin, le stockage par lAndra de ces déchets conditionnés représentera une dépense de 6 milliards de francs. Compte tenu du fait que lusine UP1 a assuré le retraitement du combustible de la filière nationale graphite-gaz et lextraction du plutonium pour les besoins de la défense, un GIE a été formé entre le CEA, Cogema et EDF. Selon la Cour des Comptes30, Cogema devrait financer 10 % des travaux correspondants. La divergence entre lévaluation du coût de la reprise des déchets dUP1 figurant au rapport de la Cour, soit 40 milliards de francs 1997 et le montant de 20 milliards énoncés plus haut provient de lactualisation effectuée dans le second cas. b) les autres opérations de démantèlement Le démantèlement des autres installations du cycle du combustible possédées par Cogema fait lobjet de provisions constituées annuellement à partir des recettes tirées du retraitement. c) montant des charges futures et provisions Les charges futures de démantèlement des installations sont évaluées par Cogema à 25 milliards de francs. A la fin 1997, un montant de 13,8 milliards de francs avait été provisionné. Tableau : Charges futures de démantèlement et provisions de Cogema31
Les charges futures de démantèlement font lobjet de provisions importantes de la part dEDF. La tableau suivant en donne les montants au 31/12/1997. La question de lensemble des provisions constituées par EDF est traitée dans le paragraphe suivant. Tableau : Charges futures de démantèlement et provisions dEDF32
La question des charges de démantèlement des installations du CEA est relativement délicate, dans la mesure où il sagit déquipements à finalité militaire pour certains et de recherche pour dautres. Labsence de comptabilité patrimoniale rend encore plus difficile lévaluation. Tableau : Charges futures de démantèlement et provisions du CEA34
La Cour des Comptes, dans son rapport public 1998, a proposé des voies de réflexion pour la mise en place, qui lui semble indispensable, de mécanismes financiers durables, permettant une pérennité et une disponibilité à long terme des provisions constituées pour le démantèlement des installations nucléaires. En tout état de cause, il napparaît pas que les évaluations des provisions à constituer et leur incidence sur le coût du kWh doivent pour le moment être révisées. Compte tenu de leur ampleur, les provisions constituées par EDF méritent un examen approfondi que lentreprise nationale a bien voulu faire pour les Rapporteurs. a) Les provisions couvrant les charges générées au fur et à mesure de lexploitation Ces provisions correspondent dune part aux charges pour défauts génériques et dautre part aux charges de combustible. a-1 défauts génériques Le premier type de charges générées au fur et à mesure de lexploitation correspond aux grosses réparations de défauts génériques, cest-à-dire concernant un ensemble de réacteurs de mêmes caractéristiques. A cet égard, EDF a passé des provisions pour gros entretien sur les générateurs de vapeur, en prévoyant le remplacement de 10 tranches dici à 2002, à raison dune tranche par an à partir de 1993. EDF a par ailleurs provisionné le remplacement des couvercles de chaudières. Les fissures sur les couvercles des chaudières, décelées en 1991, constituent un défaut générique. a-2 charges relatives au cycle du combustible Les règles comptables exigent quEDF provisionne à la production du KWh lensemble des charges futures afférentes à la consommation de combustible et donc à lirradiation en cours. Le prix de vente du kWh doit couvrir ces charges futures et celles-ci doivent être provisionnées à due concurrence. Le coût du retraitement couvre les opérations de réception et de stockage des assemblages irradiés en piscine dans lusine de La Hague, de retraitement et de récupération du plutonium et de luranium, de conditionnement des produits de fission et de lensemble des déchets issus du retraitement, et dévacuation des déchets immédiatement évacuables et dentreposage des autres déchets non immédiatement évacuables dans lusine de La Hague. Les coûts de gestion et de stockage des déchets radioactifs couvrent les opérations de conditionnement pour lentreposage de longue durée puis le stockage des déchets. Les charges concernant le devenir à long terme des déchets sont affectées de fortes incertitudes et résultent destimations forfaitaires. Fin 1997 le montant des provisions pour le retraitement atteignaient 62 milliards de francs et celles pour le stockage des déchets sélevaient à 32 milliards de francs. a-3 autres évacuation et stockage de matériels EDF passe des provisions au titre des curs REP non entièrement irradiés en fin de cycle, de lévacuation et du stockage des grappes de contrôle et dautres postes. Tableau : Provisions constituées par EDF pour le cycle nucléaire
b) Provisions pour les charges futures La provision pour démantèlement est constituée depuis 1979 sur la base dhypothèses définies par la commission Peon, à hauteur de 15 % des dépenses dinvestissement ramenées à la Puissance Continue Nette. b-1 les installations prises en compte Les installations pour lesquelles EDF fait des provisions pour démantèlement sont les réacteurs UNGG et REP. Le démantèlement et lassainissement de lusine UP1 du site de Marcoule et des centres civils du CEA sont également provisionnés, avec un montant de 4 milliards à la fin 1997. b-2 les 15 % confirmés Les évaluations les plus récentes du coût du démantèlement sur la base des éléments de retour dexpérience et des études disponibles aujourdhui confirment lordre de grandeur du coût sur lequel est calé le montant de la provision. La dotation est étalée sur la durée de vie de linstallation 30 ans pour les REP et 20 ans pour les UNGG. Cette durée est cohérente avec la durée damortissement des centrales. b-3 lintégration au coût du kWh La valeur retenue dans létude « coûts de référence » 1997 de la production électrique est de 1640 F/kW pour le palier N4. La dépense est supposée concentrée dix ans après larrêt définitif de la tranche. Elle est actualisée à la date de la mise en service industriel et incorporée au coût dinvestissement, ce qui donne 76 F / kW pour un taux dactualisation de 8 %. La Convention internationale de Paris et Bruxelles, ratifiée par la France, régit la responsabilité nucléaire. En application de cette convention, EDF se couvre à hauteur de 600 millions de francs pour le risque daccident nucléaire. Les primes dassurance, pour les risques relatifs à lexploitation des tranches EDF ou des filiales et au transport, sélevaient globalement à 41,5 millions de francs pour 1997. Le montant pour 1998 était du même ordre de grandeur. La Convention de Paris et Bruxelles devrait être renégociée en 1999. La hauteur de couverture devrait être réévaluée à la hausse. La combinaison des textes concernés prévoit une répartition à trois niveaux des dommages causés par un accident nucléaire. Le premier niveau est celui de lexploitant nucléaire, responsable à concurrence du montant fixé par la législation nationale et variant entre 0 et 600 millions de francs. La loi française fait obligation à lexploitant nucléaire de se couvrir pour un montant de 600 millions de francs. Le deuxième niveau est celui de lEtat, sur le territoire duquel se trouve linstallation nucléaire de lexploitant. Les dommages de 600 à 1500 millions sont couverts par lEtat national. Les dommages de 1,5 à 2,5 milliards de francs sont enfin couverts par lensemble des Etats signataires de la convention, selon une clé de répartition prévue par celle-ci. 9. Récapitulation des coûts Digec Les considérations précédentes sont récapitulées dans le tableau suivant. Elles conduisent éventuellement, en premier lieu, à réévaluer les dépenses de R & D prises en compte dans le coût du kWh du nucléaire. Mais on peut se demander sil ne serait pas plus logique dexclure la totalité de ces dépenses, dans la mesure où seul les évaluations du nucléaire les prennent en compte. Tableau : Récapitulation des ajustements de coûts éventuels à confirmer
Par ailleurs, les dépenses dites dinfrastructure correspondent à la mission de contrôle de la sûreté nucléaire remplie par lEtat. Le traitement du nucléaire est là aussi asymétrique. Le raisonnement pourrait consister aussi à imputer au kWh produit avec des combustibles fossiles des charges dintérêt général comme celles correspondant à la lutte entendue au sens large contre les émissions de polluants divers et de CO2. Cest pourquoi lapproche de la Digec semble, dans le cadre posé, répondre dune manière satisfaisante à lévaluation des coûts du nucléaire. Les principaux résultats en sont donc donnés ci-dessous. Tableau : Caractéristiques générales des réacteurs nucléaires étudiés dans létude « coûts de référence » de la production électrique Digec 1997
Des hypothèses détaillées dévolution des prix du combustible sont posées, en prenant deux valeurs du taux de change dollar/franc (5,0 et 6,5 francs pour un dollar). Tableau : Hypothèses sur le prix du combustible
· Un coût de référence Le coût du kWh produit avec une centrale nucléaire est en conclusion, selon la Digec, compris entre 16,6 et 17,1 centimes. Tableau : Coûts du kWh produit avec un cycle combiné à gaz taux dactualisation de 5 %
Ce coût présente une sensibilité faible vis-à-vis du prix de luranium importé. Un autre facteur de sensibilité est le rendement de linstallation. Une variation de 1 % du rendement entraîne une variation denviron 0,15 centime sur le prix du kWh. 10. Les perspectives de marché pour le nucléaire Dans les pays occidentaux, des programmes massifs déquipement en réacteurs nucléaires, pour des raisons de suffisance voire de surcapacité, ne sont pas prévus dans l'immédiat ou au moins avant 2005-201035. En revanche, les pays asiatiques: la Chine, la Corée du Sud, le Japon et l'Inde, ainsi que la Russie envisagent d'importants investissements dans le secteur nucléaire d'ici à 2015. Ainsi, l'on comptait en 1998, 71 réacteurs en constructions ou en commande, soit environ 53 000 MWe nets, toutes filières confondues. La Russie devrait achever trois tranches dans un an ou deux, et construire 5 autres tranches d'ici 2010. Cependant, ces projets, retardés par manque de financements, ont malgré tout de bonnes chances d'être concrétisés si la situation économique de la Russie s'améliore. En Asie, la Chine construit actuellement 8 tranches, dont les deux tranches de Ling Ao avec les entreprises françaises EDF, Framatome et Alstom. Le 10ème Plan quinquennal, qui couvrira la période 2000-2004, prévoit également de nouvelles tranches nucléaires. On peut estimer que 15 à 20 nouvelles tranches seront construites ou en construction d'ici 2010-2015. En Corée du Sud, 2 réacteurs ont été raccordés au réseau en 1997, 6 tranches sont en construction et 10 unités de plus sont prévues d'ici 2015. Afin d'honorer les engagements pris lors de la Conférence de Kyoto en décembre 1997, le Japon a annoncé qu'il serait nécessaire de construire 20 tranches nucléaires supplémentaires. D'ores et déjà, le programme actuel du MITI prévoit une dizaine de réacteurs supplémentaires d'ici à 2010. L'on peut également citer d'importants programmes indiens, iraniens et pakistanais. En ce qui concerne ces pays, la Russie est très présente et réalise ou va réaliser une dizaine de réacteurs de 1000 Native d'ici à 2005-2007. Toutes ces constructions de réacteurs, actuelles ou en projet, ouvrent des possibilités de marchés pour les entreprises françaises à chaque étape du cycle nucléaire, aussi bien pour l'exploitant EDF, les constructeurs Framatome et Alstom, que pour la Cogema. 11. Pour la commande dun EPR à 1 495 MWe Lavant projet détaillé dun réacteur EPR dune puissance de 1495 MWe fait ressortir un coût du kWh de 20 centimes. A la demande des électriciens, des travaux doptimisation du réacteur ont été lancés en vue dabaisser ce coût à 18 centimes. La solution actuellement retenue pour parvenir à ce résultat est de porter la puissance à 1750 MWe voire à 1800 MWe. Cette voie ne paraît pas bonne pour plusieurs raisons. Elle reviendrait à pousser jusquà leurs limites de dimensionnement des équipements prévus pour une puissance inférieure. Les marges dutilisation réelles avec la puissance actuelle disparaîtraient. Par ailleurs, lexpérience au demeurant difficile à acquérir avec le palier N4 ne serait daucun secours, ce qui obligerait pour de nombreux équipements à repartir dune feuille blanche. Enfin, une puissance de 1750 MWe ne saurait être considérée comme correspondant à la demande de clients étrangers. Cest pourquoi les Rapporteurs estiment que loptimisation devrait être obtenue plutôt par une amélioration des rendements que par une augmentation de puissance. Cliquer ici pour accéder à la suite de la partie III du
chapitre II: Cliquer ici pour retourner au sommaire général 3 Source : CEA, SEE-DSE, janvier 1999 4 Le taux dindépendance énergétique est le rapport de la production à la consommation dénergie 5 Selon le scénario « sagesse conventionnelle » de la DG XVII, Commission européenne, 1996. 6 Allemagne : pour 1990, y compris lex-RDA 8 taux dindépendance énergétiques : rapport production / consommation 9 Source : CEA-DSE, daprès « LEurope de lénergie en 2020 », Commission européenne, DG XVII. 10 Réserves entendues comme la somme des ressources raisonnablement assurées et connues (RRA), des ressources supplémentaires estimées et connues et des ressources supplémentaires non découvertes (estimation ou spéculation) 11 Source : AEN-OCDE, cité dans Le contexte énergétique, CEA-SEE/DSE, janvier 1999. 12 Source : Cogema dans lindustrie mondiale du cycle du combustible, Cogema, Direction de la Communication, Paris, 1998. 13 Source : Cogema dans lindustrie mondiale du cycle du combustible, Cogema, Direction de la Communication, Paris, 1998. 15 CEA, Dcom, latome de la recherche à lindustrie, 1997. 17 y compris la qualification de sites 18 y compris la réalisation du bâtiment daccueil du public. 19 Source : Cogema dans lindustrie mondiale du cycle du combustible nucléaire, mars 1998. 20 Comparaison économique du retraitement et du stockage direct, AEN/OCDE, Paris, 1994. 21 La Lettre dinformation du Parc nucléaire, EDF, n°24, juillet/août 1996. 22 Source : CEA, audition du 12 novembre 1998 23 CEA, Auditions des 5 et 12 novembre 1998. 24 CEA, Analyse globale de la faisabilité dun entreposage en subsurface, 17/11/1998. 26 CEA, Analyse globale de la faisabilité dun entreposage en subsurface, 17/11/1998. 28 Ulrich-André Renaudon, Technologies internationales, 1/10/1998. 29 Source : Cogema, audition du 7 janvier 1999. 30 Le rapport public 1998, Cour des Comptes, Paris, 7 janvier 1999. 31 Le rapport public 1998, Cour des Comptes, Paris, 7 janvier 1999. 32 Le rapport public 1998, Cour des Comptes, Paris, 7 janvier 1999. 34 Le rapport public 1998, Cour des Comptes, Paris, 7 janvier 1999. 35 D. Maillard, DGEMP, audition du 21 janvier 1999.
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