RAPPORT
de M. Daniel Marcovitch
au nom de la commission de la production

sur le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau,

Tome 1
Examen des articles
Volume 1

-----------------------------------------------

INTRODUCTION 11

AUDITION DE M. YVES COCHET, MINISTRE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT 21

DISCUSSION GÉNÉRALE 34

EXAMEN DES ARTICLES 35

TITRE IER - PLANIFICATION ET DÉCENTRALISATION EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET DE GESTION DES EAUX 35

Article 1er : Récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau 35

Après l'article 1er 37

Chapitre Ier : PLANIFICATION EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET DE GESTION DES EAUX 37

Article 2 : Schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 38

Article L. 212-1 du code de l'environnement : Définition et contenu des SDAGE 38

Article L.212-2 du code de l'environnement : Elaboration et mise à jour des SDAGE 43

Article additionnel après l'article 2 : Dispositions de coordination 46

Article 3 (article L. 212-3 du code de l'environnement) : Définition, contenu et élaboration des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) 47

Article 4 : Composition des commissions locales de l'eau 49

Article additionnel après l'article 4 : Prise en compte des SAGE par les documents d'urbanisme en cours d'élaboration ou de révision et par les documents de planification environnementale 50

Article additionnel après l'article 4 : Précision relative au contenu des SAGE 51

Article 5 : Programmes pluriannuels de mesures 51

Article 6 : Communauté locale de l'eau 52

Article 7 : Compétence des groupements d'intérêt public, des ententes interdépartementales et des EPTB comme maîtres d'ouvrage du SAGE 54

Article L. 213-10 du code de l'environnement : Possibilité de constituer un GIP pour élaborer un SAGE 55

Article L. 213-11 du code de l'environnement : Compétences des ententes interdépartementales et des EPTB comme maîtres d'ouvrage 57

Article 8 :  Création d'un comité de bassin à Mayotte 58

Chapitre II : ASSAINISSEMENT 58

Article 9 :  Soumission de la collecte des eaux usées des ateliers et manufactures à autorisation préalable 58

Article 10 : Suppression d'une disposition obsolète 59

Article 11 : Contrôle de la conformité des branchements à l'égout par la commune
et suppression de la majoration de 10 % en cas de raccordement
59

Article 12 : Intervention des communes pour des raccordements
à l'égout sous terrain privé
60

Article 13 : Intervention de la commune pour mettre hors d'état les fosses
sous terrain privé
61

Article 14 : Réduction du plafond de la participation au raccordement à l'égout 62

Article 15 (article L. 1331-8 du code de la santé publique) : Pénalités financières en cas de non-respect de leurs obligations en matière d'assainissement par les propriétaires 63

Article 16 : Coordination 65

Article 17 (article L. 1331-10 du code de la santé publique) : Autorisation de déversement d'eaux usées non domestiques 65

Article additionnel après l'article 17 :  Extension à l'ensemble du personnel des réseaux d'assainissement du régime de retraite bénéficiant aux personnes travaillant dans les réseaux souterrains d'égout 67

Article 18 : Suppression d'une disposition obsolète 68

Article 19 : Extension de l'obligation de se doter d'un dispositif de traitement des effluents aux immeubles nouveaux destinés à un usage autre que l'habitat 68

Article 20 (article L. 1331-16 du code de la santé publique) :  Extension du champ de l'assistance technique fournie par les départements aux communes 69

Chapitre III : AMÉNAGEMENT ET GESTION DES COURS D'EAU 70

Article 21 (article L. 211-7 du code de l'environnement) : Entretien et aménagement des cours d'eau par les collectivités locales 70

Article 22 (article L. 214-9 du code de l'environnement) : Affectation du débit 77

Article 23 : Transfert de gestion des cours d'eau domaniaux aux départements et institutions interdépartementales 80

Article 24 (articles 1er, 1-1 [nouveau] et 1-2 [nouveau] du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure) :  Constitution et gestion du domaine public fluvial départemental ou interdépartemental 83

Article 25 :  Déconcentration du classement dans le domaine public fluvial 85

Article 26 (article 4 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure) : Déconcentration du déclassement du domaine public fluvial 86

Article 27 : Adaptation du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure 87

Article 28 (article L. 211-12 [nouveau] du code de l'environnement) :  Servitudes d'utilité publique 89

Article additionnel après l'article 28 : Insertion d'un chapitre « prévention des inondations » 94

Article additionnel après l'article 28 : Création d'un centre national d'études des inondations 94

Article additionnel après l'article 28 : Indemnisation des pertes d'exploitation indirectes 95

Article additionnel après l'article 28 : Prise en charge de l'expert désigné à l'initiative de l'assuré 95

Article additionnel après l'article 28 : Elargissement de la saisine du Bureau central de tarification par les assureurs 95

Article additionnel après l'article 28 : Elargissement de la saisine du Bureau central de tarification au préfet et au président de la Caisse centrale de réassurance 95

Article additionnel après l'article 28 : Plans de prévention des risques naturels et franchises d'assurance 96

Article additionnel après l'article 28 : Augmentation de l'indemnisation au titre des catastrophes naturelles 96

Article additionnel après l'article 28 : Subventions de l'ANAH 96

Après l'article 28 97

Article additionnel après l'article 28 : Elargissement des compétences du « Fonds Barnier » 97

Article additionnel après l'article 28 : Augmentation des ressources du Fonds Barnier 97

Article additionnel après l'article 28 : Elaboration et suivi des PPR 98

Article additionnel après l'article 28 : PPR et gestion de crise 98

Article additionnel après l'article 28 : Commission locale des risques 98

Article additionnel après l'article 28 : Extension de l'application du FCTVA 99

Article additionnel après l'article 28 : Encouragement des mesures agri-environnementales 99

TITRE II : SERVICES PUBLICS DE L'EAU ET DE L'ASSAINISSEMENT 101

Article 29 : Coordination d'un intitulé de section au sein du code général des collectivités territoriales 101

Chapitre Ier : MISSIONS ET ORGANISATION DES SERVICES PUBLICS DE L'EAU ET DE L'ASSAINISSEMENT 101

Article 30 : Définition, missions et organisation des services publics de distribution d'eau et d'assainissement 101

1. Définition des services publics d'assainissement 101

2. Définition des services publics de distribution d'eau 102

3Elargissement des compétences communales facultatives en matière d'assainissement 102

4. Coordination des services de distribution d'eau par les communes 104

5. Échéances s'imposant aux communes en matière de service public d'assainissement 105

6. Gestion des services publics de distribution d'eau et d'assainissement 107

7. Mission des services publics de distribution d'eau et d'assainissement en matière de cohésion sociale et de lutte contre l'exclusion 109

8. Possibilité pour les services de distribution d'eau et d'assainissement de mener des actions de coopération ou humanitaires 114

9. Soumission des établissements publics de coopération intercommunale aux mêmes dispositions que celles s'imposant aux communes en matière d'assainissement et de distribution d'eau 114

Chapitre II : TARIFICATION ET RÈGLEMENTS DES SERVICES 115

Article 31 : Dispositions relatives à la tarification et aux règlements des services publics de distribution d'eau et d'assainissement 115

Article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales : Règlements des services 115

Article L. 2224-12-1 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Principe de facturation de la fourniture d'eau 116

Article L. 2224-12-2 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Modalités d'établissement des redevances de distribution d'eau et d'assainissement 117

Article L. 2224-12-3 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Objet des redevances de distribution d'eau et d'assainissement - exclusion de cautions et de dépôts de garantie 118

Article L. 2224-12-4 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Mode de calcul de la redevance de distribution d'eau 119

Article L. 2224-12-5 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Mode de calcul de la redevance d'assainissement collectif 121

Article L. 2224-12-6 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Mode de calcul des redevances dans les communes connaissant de fortes variations saisonnières de la consommation d'eau 122

Article L. 2224-12-7 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Délais d'application des nouveaux modes de calcul des redevances de distribution d'eau et d'assainissement 124

Article L. 2224-12-8 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Décrets d'application 124

Chapitre III : TRANSPARENCE ET INFORMATION 125

Article 32 (article L. 2224-12-9 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Avis de la commission consultative des services publics locaux en matière de distribution d'eau et d'assainissement 125

Après l'article 32 127

Article 33 : Durée des délégations de service public dans le domaine de l'eau - Renouvellement du patrimoine 128

Article additionnel après l'article 33 : Publicité de la mise à disposition des documents relatifs à l'exploitation des services publics délégués 130

Après l'article 33 130

Chapitre IV : HAUT CONSEIL DES SERVICES PUBLICS DE L'EAU ET DE L'ASSAINISSEMENT 131

Article 34 : Création, missions et fonctionnement du Haut Conseil 131

Article L. 2224-12-10 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Création et missions du Haut Conseil 132

Article L. 2224-12-11 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Composition du Haut Conseil 137

Article L. 2224-12-12 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Rapports entre le Haut Conseil, le Conseil de la concurrence et la Commission des clauses abusives 138

Article L. 2224-12-13 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Communication d'informations au Haut Conseil 139

Article L. 2224-12-14 (nouveau) du code général des collectivités territoriales : Décrets d'application 141

Chapitre V : DISPOSITIONS DIVERSES 141

Article 35 : Dépenses obligatoires des communes en matière d'assainissement 141

Après l'article 35 141

Article additionnel après l'article 35 : Maîtrise d'ouvrage des travaux en cas de transferts de compétences 142

Après l'article 35 142

Article 36 : Comptage individuel d'eau 142

Article additionnel après l'article 36 : Exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les ouvrages d'assainissement 144

Article 37 : Dispositions de coordination 144

Suite de l'examen des articles
Retour au sommaire général


MESDAMES, MESSIEURS,

L'eau est un bien essentiel de notre patrimoine ; c'est également une ressource naturelle dont l'usage quotidien a parfois fait oublier l'importance.

Nous disposons apparemment de cette ressource en abondance, à quelques exceptions près. Ce sont les épisodes de sécheresse, les accidents polluant des rivières ou des sources d'eau destinées à la consommation humaine qui nous font prendre conscience, par intermittence, de son caractère fragile et limité.

Par ailleurs, nos concitoyens se déclarent de plus en plus préoccupés par la qualité de l'eau et leurs préoccupations environnementales rejoignent souvent l'inquiétude de voir notre patrimoine hydraulique définitivement dégradé et impropre à tout usage. Le rôle essentiel de l'eau, pour la vie bien sûr, mais également pour la plupart des activités économiques, conduit à s'interroger sur l'avenir de cette ressource par nature limitée, et menacée par les pollutions de toutes natures et de toutes origines.

Le souci d'encadrer la gestion de la ressource en eau n'est pas nouveau. Deux lois doivent à cet égard être citées, car elles fondent notre système actuel. La loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution en est le premier pilier. Elle a permis l'instauration d'une politique de l'eau plus décentralisée, en affirmant le principe d'une gestion par bassin versant, en concertation avec les usagers.

La création de six agences de l'eau, établissements publics ayant pour objet de faciliter les opérations d'intérêt commun dans leur bassin respectif, est à cet égard déterminant. La loi de 1964 a doté ces agences de moyens d'intervention originaux, dont les plus importants sont les redevances. Celles-ci sont loin d'être négligeables, puisque leur montant annuel brut est de l'ordre de 12 milliards de francs. Enfin, un volet pénal important a été introduit contre les pollueurs.

Mais cette loi s'est, en pratique, révélée insuffisante au regard des nouveaux enjeux : il convenait de lutter contre la pollution de la ressource, mais également de prévenir le manque d'eau, et d'appréhender notre patrimoine hydraulique dans sa globalité, en tenant compte de son insertion dans l'environnement.

D'où l'importance de la notion de « ressource hydraulique », introduite par la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau. Celle-ci a posé le principe de l'unité de la gestion de la ressource, sans distinguer entre eaux de surface et eaux souterraines, ainsi que celui de gestion équilibrée de la ressource. Parallèlement, elle a introduit un régime unique de déclaration et d'autorisation des travaux pouvant avoir une incidence sur la ressource et a organisé la gestion planifiée de celle-ci à l'échelon local. Enfin, elle a renforcé les dispositions relatives à la protection de l'eau et des écosystèmes aquatiques.

Le système français issu de ces deux lois est relativement original et a d'ailleurs suscité l'intérêt de nos voisins européens puisque la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau s'est largement inspirée de notre gestion par bassins versants.

Pour autant, ce système reste perfectible.

En effet, au-delà du principe de « gestion équilibrée de la ressource en eau », qui résonne de manière parfois incantatoire, il convient d'inciter à un partage entre les différents usagers, en permettant à chacun d'intervenir dans sa gestion par la consultation et l'information. Il ne peut être question d'opposer les usages, mais de parvenir à les concilier, en fonction de la nature et de l'état de la ressource.

Nos concitoyens estiment par ailleurs, à juste titre, que le secteur de l'eau (distribution et assainissement) est opaque. Ils ne comprennent pas à quoi correspond leur facture d'eau, tandis que certains errements passés, dans lesquels des grands opérateurs du secteur ont pu être mis en cause, ont contribué à alimenter leur méfiance et leur sentiment d'être parfois abusés.

Quant aux collectivités locales, premiers acteurs responsables dans le domaine de l'eau, elles font valoir leurs difficultés à négocier « à armes égales » avec des délégataires ayant une grande expertise et une surface financière considérable. Elles ont en effet à faire face à un véritable oligopole qui se résume souvent à un simple duopole, et même si de petites régies ou des distributeurs indépendants existent, le secteur de l'eau reste caractérisé par le pouvoir détenu par les grands groupes ; dans ces conditions, les rapports de force sont forcément déséquilibrés, ne serait-ce qu'en raison de l'asymétrie d'informations existant entre les communes et la plupart de leurs délégataires.

D'autres problèmes, plus techniques, nécessitent également de revoir le dispositif actuel. En premier lieu, il convient de mettre un terme au caractère inconstitutionnel des redevances perçues par les agences de l'eau. Le Conseil constitutionnel a en effet considéré, dans une décision du 23 juin 1982, que ces redevances « doivent être rangées parmi les impositions de toute nature dont l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement ».

En second lieu, l'adoption de la directive-cadre précitée rend nécessaire une adaptation de notre cadre juridique, même si elle s'en inspire fortement. Notamment, l'affirmation du principe de récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau et les objectifs environnementaux assignés à la gestion de la ressource en eau doivent être transposés en droit français.

Il était donc temps de mener une réforme de la politique de l'eau qui réponde aux attentes de tous les acteurs concernés.

C'est l'objet du présent projet de loi soumis à notre examen. Celui-ci a fait l'objet d'une concertation approfondie avec l'ensemble des acteurs concernés, tant par le ministère chargé de l'environnement que par votre rapporteur, qui a en effet mené une cinquantaine d'auditions au cours des mois de juillet et septembre 2001 et effectué une dizaine de déplacements en région sur le terrain des acteurs pour recueillir les réactions des parties concernées par ce texte.

A l'évidence, le dialogue mené en amont a porté ses fruits, et a permis de prendre en compte l'ensemble des intérêts en cause. Le projet de loi est, de l'avis de votre rapporteur, globalement équilibré et, même s'il reste perfectible - ce sera la tâche des parlementaires de l'améliorer -, il permet d'affirmer quelques grands principes essentiels qui devront désormais guider la gestion de l'eau.

Ces principes sont les suivants : la démocratie et la décentralisation, la transparence, l'équité et le développement durable.

S'agissant de la démocratie de proximité, le projet de loi confirme le choix d'une gestion décentralisée de l'eau, par grands bassins versants, et conforte le rôle des agences de l'eau.

Le projet de loi ne modifie, en effet, ni les circonscriptions, ni la nature juridique, ni le mode d'administration de ces agences et, quant à leurs missions, il se limite à les élargir, d'une part, aux évolutions réglementaires intervenues depuis leur mise en place dans les années 60, d'autre part, à la prise en compte explicite des préoccupations de « gestion équilibrée de l'eau » largement exprimées depuis lors. Le projet de loi maintient surtout, dans les conseils d'administration des agences, le principe d'une représentation de toutes les parties prenantes et d'une gestion tripartite associant représentants des collectivités territoriales, des usagers de l'eau et de l'Etat, ces derniers n'ayant pas la majorité des sièges. Cette gestion tripartite constitue incontestablement, en effet, depuis la mise en place des agences, une particularité de leur fonctionnement consensuel, qui oblige à des concessions réciproques et à une vision partenariale des problèmes.

Tirant les conséquences de la directive cadre, le projet de loi adapte, par ailleurs, le dispositif de planification locale constitué par les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), afin d'assurer une meilleure participation du public et une plus grande association des acteurs institutionnels concernés, dont les responsabilités en matière de choix de gestion de la ressource en eau sont ainsi accrues. Il tire également les conséquences des dysfonctionnements qui ont pu apparaître : ainsi, les SAGE deviennent facultatifs, tandis que les collectivités souhaitant élaborer un tel document auront le choix entre plusieurs structures porteuses, tels les groupements d'intérêt public libérés de la tutelle de l'Etat, qui leur permettront de mener les études nécessaires. A cet égard, les établissements publics territoriaux de bassin, acteurs incontournables en matière d'aménagement des bassins ou des sous-bassins, voient leur existence enfin reconnue par la loi.

C'est également un souci de proximité, à l'échelon local, qui conduit à la création des offices de l'eau dans les départements d'outre-mer, ce qui permet d'adapter à leurs spécificités le dispositif prévu pour les agences de l'eau en métropole.

La démocratie locale passe également par une représentation des parlementaires au Comité national de l'eau, et une meilleure association et une responsabilisation des usagers en matière de gestion des services publics de distribution d'eau et d'assainissement. Leur information est donc accrue dans ce domaine, notamment par la consultation rendue obligatoire des commissions consultatives des services publics locaux.

Mais la démocratie exige également la transparence : à cet égard, le projet de loi comporte de nombreuses avancées. Les usagers se verront ainsi adresser le règlement de service, ce qui leur permettra de mieux connaître leurs droits et obligations, ainsi que ceux des opérateurs. De plus, la meilleure lisibilité du coût réel passe par l'encadrement de la part fixe, et la suppression des dépôts de garantie et des cautions. Par ailleurs, la qualité des eaux minérales naturelles pourra être justifiée à tout moment, tandis que, plus généralement, des pratiques qui ne sont aujourd'hui plus justifiées sont encadrées ou disparaissent, car elles sont peu protectrices des usagers.

En outre, il est acquis que les élus ont la maîtrise de la politique de l'eau et qu'ils doivent la conserver. A cet égard, la décentralisation de la gestion quotidienne de l'eau est accrue, de plusieurs manières. Les communes et leurs établissements publics locaux se voient clairement reconnaître de nouvelles compétences en matière d'assainissement et leur rôle en matière de distribution d'eau est accru. Ils auront pour mission de coordonner les différents services intervenant sur leur territoire.

Par ailleurs, les départements sont confortés dans leur rôle de gestionnaire des cours d'eau à fort potentiel touristique, rôle qu'ils assurent aujourd'hui déjà largement, mais le plus souvent après que l'Etat ou la région leur ait concédé cette gestion. Dans le cadre du projet de loi, ils sont érigés en collectivité locale de droit commun compétente en matière de voies navigables et non navigables. Ainsi, ils pourront, lorsqu'ils le désirent, demander à l'Etat de leur transférer soit la gestion, soit la propriété, de cours d'eau, canaux, lacs et plans d'eau domaniaux situés sur leur territoire et qu'ils veulent valoriser. Le transfert de compétence ou de propriété est donc facultatif, ce qui le différencie des habituelles mesures de décentralisation. Ils pourront également désormais créer leur propre domaine public fluvial, par transfert du domaine public fluvial de l'Etat. De plus, la possibilité de faire intervenir des institutions interdépartementales, lorsque les cours d'eau concernés intéressent plusieurs départements, constitue une garantie de cohérence. Ces dispositions, par leur grande souplesse, permettront sans aucun doute d'avancer vers une décentralisation raisonnée et adaptée aux spécificités locales, qui sont nombreuses dans le domaine de l'eau.

Afin de renforcer la démocratie de proximité, la déconcentration d'un certain nombre de procédures au niveau du préfet territorialement compétent, notamment en matière de classement ou de déclassement dans le domaine public fluvial, constitue également une avancée importante du projet de loi. Elle permettra une gestion intégrée de l'eau au niveau territorial le plus pertinent.

Enfin, pour que cette décentralisation ne reste pas lettre morte, et que les élus locaux ne soient pas démunis face aux grands groupes intervenant dans le domaine de l'eau, la durée maximale des délégations de service public dans le domaine de l'eau passe de vingt à douze ans. Un Haut Conseil de l'eau et de l'assainissement est créé, afin de les conseiller dans leur gestion et de les informer.

La démocratie passe enfin par la fixation, par le Parlement, de l'assiette, des taux et des modalités de recouvrement des redevances des agences de l'eau. Ce volet central du projet de loi permet ainsi de donner une base légale au système des redevances, tout en appliquant le principe « pollueur-payeur », dont le corollaire est, il convient de le souligner, le principe « non pollueur-non payeur ».

Le Parlement est appelé ainsi à fixer l'assiette des cinq redevances créées par le projet de loi. Trois d'entre elles s'inspirent de techniques déjà existantes, les redevances pour pollutions de l'eau, pour consommation d'eau et pour modification du régime des eaux : les règles d'assiette doivent être nécessairement détaillées et sont par nature complexes. Néanmoins, elles simplifient, affinent et harmonisent pour les six bassins hydrographiques les règles actuelles. Une autre redevance constitue une importante innovation du projet de loi, celle qui pèsera sur les excédents de l'azote utilisé par l'activité agricole, cependant que la redevance pour réseau de collecte viendra se substituer, dans un but là encore de simplification, à un coefficient applicable aux mécanismes actuels.

Le Parlement est appelé également, dans le projet de loi, à fixer les règles du mode de recouvrement des redevances, s'inspirant sur ce point largement des principes posés dans le code général des impôts et, plus encore, le livre des procédures fiscales, mais aussi, dans les textes réglementant le recouvrement des créances des établissements publics administratifs.

Le Parlement doit aussi déterminer les taux des différentes redevances. Son intervention sur ce point passe par la fixation de niveaux maximaux et minimaux, de « fourchettes » des différents taux, les instances des agences (comités de bassin, conseils d'administration) ayant pour leur part la responsabilité de préciser ces taux, en tenant compte des réalités du terrain, celles des différents bassins.

Le Parlement a enfin la responsabilité, selon le projet de loi, d'« encadrer », sans les détailler, les orientations des programmes pluriannuels d'intervention des agences, qui traduisent la politique de gestion de l'eau que celles-ci entendent conduire à moyen terme. Un article du projet de loi fixe ainsi quelques orientations majeures des VIIIèmes programmes pluriannuels des agences pour la période 2003-2008, qui constituent le cadre obligé des initiatives que prendront pour cette période les différentes agences de l'eau.

S'agissant de l'équité, plusieurs points doivent être soulignés. Tout d'abord, le rôle social de l'eau, qui n'est pas un bien comme les autres, est affirmé. Dans un souci de solidarité, le projet de loi prévoit plusieurs dispositifs de solidarité avec les plus démunis, dont l'interdiction de couper l'eau et la mise en place de bornes fontaines.

L'équité passe également par une amélioration de la mutualisation des dépenses et donc des contributions perçues notamment par les agences de l'eau. A cet égard, le projet de loi introduit le principe de récupération des coûts liés à l'usage de l'eau et réforme le système actuel des redevances perçues par les agences de l'eau, selon un principe directeur qu'on ne peut qu'approuver : l'eau doit être partagée entre tous les usagers et doit donner lieu à une gestion collective lorsque sa qualité ou sa quantité sont menacées. Il ne s'agit donc pas d'opposer les usagers les uns aux autres, et, contrairement à ce que certains voudraient laisser croire, le projet de loi n'introduit pas de compétition entre eux. Il se borne à énoncer un principe simple : lorsque la ressource est fragile, quels qu'en soit l'usage ultérieur, il convient d'inciter à une maîtrise de sa consommation, soit par l'effet dissuasif de certaines redevances, soit en encourageant l'association des usagers pour gérer collectivement et de manière équilibrée cette ressource vulnérable.

La mise en place de trois des redevances aux agences de l'eau est particulièrement significative de ce souci d'équité.

L'institution d'une redevance pour excédents d'azote pesant sur les activités agricoles vise à prendre en compte les pollutions engendrées par les excès de l'élevage intensif et de la « sur-fertilisation » des cultures, pollutions très peu taxées dans les mécanismes actuels. Quant à la redevance pour consommation d'eau, par la suppression du coefficient d'usage, elle sera identique pour tous les usagers et tiendra compte à la fois de la fragilité de la ressource et des quantités réellement consommées et non plus simplement prélevées. Les dispositifs mis en place ont pour but ainsi d'instaurer plus d'équité dans la contribution aux mécanismes de redevances, d'accroître la part relative des agriculteurs, aujourd'hui anormalement basse (1 % de l'ensemble pour la période des VIIèmes programmes des agences de l'eau).

De la même façon, l'institution d'une redevance pour modification du régime des eaux a pour objet d'organiser une participation accrue aux redevances, aux côtés des usagers domestiques, des industriels et des agriculteurs, des grands aménagements qui perturbent les équilibres aquatiques et nuisent à la qualité des eaux.

La volonté de justice s'exprime encore dans le fait que les agriculteurs ne sont pas « montrés du doigt » par le projet de loi, celui-ci faisant aussi appel à l'esprit de responsabilité et au sens collectif des exploitants. La redevance pour excédents d'azote sera calculée ainsi à partir d'un bilan azoté de l'exploitation qu'établiront les agriculteurs eux-mêmes et la redevance pour consommation d'eau fera une large place à des protocoles de gestion quantitative qui, conclus entre tous les usagers et garantissant en période d'étiage un bon fonctionnement du milieu aquatique et une réalimentation satisfaisante de la ressource souterraine, s'inspirent de pratiques partenariales connues depuis longtemps dans le monde paysan.

La volonté d'équité se manifeste ainsi au travers de la reconnaissance des efforts accomplis par les agriculteurs eux-mêmes pour une meilleure gestion qualitative et quantitative de l'eau. Ce sont les excès de l'agriculture intensive, longtemps encouragée d'ailleurs par les règles de la politique agricole commune, qui sont seuls stigmatisés. Le projet de loi prévoit certes d'accroître la contribution du monde agricole à la préservation de la ressource-eau, mais il prend acte des initiatives et de l'inventivité des professionnels sur ce point et de l'orientation vers une agriculture plus qualitative menée par les pouvoirs publics et les agriculteurs, depuis plusieurs années et qui se concrétise notamment par le contrat territorial d'exploitation.

L'équité suppose, enfin, que les exploitants ne soient victimes d'aucune mesure administrative arbitraire ou abusive. C'est pourquoi le projet de loi précise les moyens qui permettent à l'administration d'obliger un exploitant à se conformer à ses obligations. On ne peut en effet donner à l'administration le pouvoir de prendre à l'encontre des fautifs des mesures contraignantes, sans passer par le juge, que si ces mesures sont clairement définies et détaillées, et s'intègrent dans une procédure dont le caractère contradictoire est solidement établi.

Enfin, le développement durable est un axe essentiel du projet de loi. Il se traduit par la préoccupation d'assurer un bon état écologique des eaux, en transposition de la directive cadre, mais également par le système des redevances qui incitent à la maîtrise des consommations d'eau, par les dispositions relatives à l'aménagement des cours d'eau ou encore par le renforcement des dispositions relatives à la police de l'eau, afin d'assurer une protection effective des points de captage.

Le projet de loi indique explicitement que l'action des agences des différents bassins hydrographiques doit tendre à une gestion durable des ressources en eau et des milieux aquatiques.

Chacune des redevances dont la mise en place est suggérée par le texte obéit au principe posé dans les années 90 du « pollueur-payeur » et à la volonté de préserver ainsi les ressources existantes pour les générations futures. Cet objectif fort s'exprime particulièrement au travers de la création de la redevance pour excédents d'azote, qui apparaît comme un outil novateur dans la lutte engagée par notre pays depuis plusieurs années pour la préservation des nappes souterraines et la sécurité de l'alimentation en eau potable de nombre de nos régions.

Les dispositions relatives à l'aménagement et à la gestion des cours d'eau introduisent, quant à elles, des novations intéressantes qui permettront enfin aux collectivités locales ou à leurs groupements d'agir sur le long terme, tout en s'assurant de la cohérence territoriale de leur action.

La dégradation de l'entretien des cours d'eau est en effet une réalité préoccupante depuis plusieurs décennies. Ainsi, par exemple, alors que cet entretien incombe en théorie au propriétaire riverain, sur les cours d'eau non domaniaux, celui-ci ne fait souvent plus face à ses obligations. Or, dans une perspective de développement durable, les rivières doivent être régulièrement entretenues, notamment afin d'éviter par la suite des travaux curatifs dommageables pour le milieu aquatique.

Dans ce cadre, l'extension du champ de compétences des collectivités locales ou de leurs groupements aux cours d'eau domaniaux et aux canaux, lacs et plans d'eau domaniaux ou non domaniaux est une avancée importante. C'est également le cas des interventions d'urgence des collectivités locales ou de leurs groupements, notamment en cas de péril imminent, ou des servitudes permanentes de libre passage le long des cours d'eau situés sur leur territoire.

Enfin, l'importance de l'action des collectivités et de leurs groupements en matière de gestion durable de l'eau est également consacrée plus largement dans le projet de loi par la possibilité, qui leur est donnée, de mettre en place et d'exploiter des dispositifs de surveillance de la ressource en eau et des milieux aquatiques. Ceci devrait leur permettre de mieux suivre et analyser les évolutions quantitatives et qualitatives des cours d'eau situés sur leur territoire. En leur donnant également la possibilité de développer l'animation et la concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques, on consacre leur rôle central en matière de développement durable. Elles pourront ainsi développer des actions de sensibilisation de la population à la gestion équilibrée de l'eau.

Il ne serait pas possible d'assurer à notre pays un développement durable, respectueux de l'environnement, sans un dispositif efficace de police de l'eau. Les dispositions contenues dans le projet qui nous est soumis devraient permettre, précisément, d'améliorer cette efficacité. En effet, à la lumière de l'expérience, il est apparu que la loi sur l'eau de 1992 comportait quelques lacunes, qui gagneraient à être comblées.

Ainsi, les périmètres de protection immédiats mais aussi rapprochés seront généralisés autour des points de captage d'eau destinée à la consommation humaine, ce qui n'a malheureusement pas été le cas jusqu'à présent. Une réglementation pourra protéger la qualité de l'eau potable dans les zones de sauvegarde dont la loi sur l'eau n° 92-3 du 3 janvier 1992 a prévu la création. Enfin, en matière d'eaux minérales naturelles, l'instauration d'un régime de déclaration pour certaines activités donnera l'assurance d'un contrôle plus complet mais aussi plus souple.

Par rapport au système actuel, une plus grande souplesse sera permise, grâce à des regroupements et à une harmonisation des procédures, ainsi qu'à la possibilité pour l'administration de transiger en cas d'infraction. Un dispositif adapté permettra par ailleurs d'unifier le régime d'autorisation, tout en validant les droits qui ont été acquis par les exploitants lorsque le droit de l'eau était moins développé.

Toutefois, cette souplesse n'est pas le signe d'une faiblesse à l'encontre des pollueurs. La vigilance de l'administration pourra au contraire être accrue, puisqu'elle aura désormais le droit de s'opposer à une déclaration dans les cas graves, et que les effets cumulés d'opérations successives seront pris en compte pour les seuils d'autorisation. Pendant les opérations, l'administration pourra toujours demander à l'exploitant des précautions supplémentaires, et, lorsqu'une opération aura pris fin, la remise en état du site sera exigée. En outre, le contrôle des infractions aux règles protégeant la ressource aquatique sera renforcé, à la fois sur le plan humain et sur le plan procédural.

Au total, le projet de loi donne à l'administration les moyens de prévenir efficacement les atteintes à la ressource aquatique, grâce à un régime de police de l'eau plus complet et plus précis, ce qui permettra de garantir à nos concitoyens et aux générations futures une eau de qualité.

Ce projet de loi engage donc une réforme de grande ampleur de la politique de l'eau dans son ensemble, réforme que beaucoup appelaient de leurs v_ux.

Si l'on ne peut que saluer les nombreuses avancées qu'il contient, le travail parlementaire doit, sur certains points, enrichir les dispositions prévues, les compléter ou les préciser.

Votre rapporteur se félicite ainsi de l'initiative de certains parlementaires, membres de la commission d'enquête sur les inondations. Celle-ci a achevé ses travaux le 14 novembre 2001 par l'examen et l'adoption à l'unanimité des vingt-quatre propositions du rapport. Les amendements de nos collègues, issus de ces propositions, complètent fort utilement un projet de loi qui était très lacunaire sur ce sujet. Ces dispositions nouvelles permettront notamment d'insérer un volet « prévention des inondations » dans un nouveau chapitre IV du titre I du projet.

Ces amendements visent surtout à assurer une plus grande cohérence des actions des collectivités publiques, de leurs groupements, de leurs établissements publics, des sociétés d'assurances et des particuliers dans la prévention des inondations. Ainsi, une place majeure doit être réservée aux EPTB pour l'élaboration et la mise en _uvre des SAGE, qui doivent devenir les véritables outils de la gestion intégrée de l'eau au niveau d'un bassin ou d'un sous-bassin versant. De même, il convient de reconnaître une compétence explicite aux agences en matière de prévention des inondations et d'élargir l'assiette de la redevance pour modification du régime des eaux, trop peu incitative, en l'état actuel, à la prévention. Par ailleurs, les assurances et les assurés doivent être responsabilisés et jouer un rôle plus actif dans la prévention des inondations. Il convient que chaque acteur se sente impliqué, soit conscient de ses responsabilités et agisse efficacement, de manière à réduire les conséquences dommageables des inondations.

Votre rapporteur propose également d'améliorer ou de compléter les dispositions relatives aux usagers des services de l'eau. Notamment, il souhaite que le rôle social de l'eau soit pleinement reconnu et que soit instaurée une aide à la fourniture d'eau pour les plus démunis, ceux-ci ayant en effet à faire face à des difficultés chroniques pour payer leurs factures. Il souhaite en outre renforcer les pouvoirs du Haut Conseil et garantir son indépendance, cette instance pouvant avoir un rôle majeur de régulation du secteur de l'eau si on lui en donne les moyens.

Ainsi enrichi et complété, le projet de loi devrait mettre en application le principe selon lequel l'eau est un bien vital qui doit être partagé, protégé et géré de manière responsable.

La commission a entendu M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, sur le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau (n° 3205), au cours de sa réunion du mardi 5 décembre 2001.

M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, après avoir souligné son attachement à ce projet de loi qui a été porté avec beaucoup de détermination par Mme Dominique Voynet, a rappelé qu'il avait été adopté en Conseil des ministres le 27 juin 2001, après de longues concertations, le Conseil national de l'eau, le Conseil économique et social et les comités de bassins ayant pu s'exprimer sur ce projet pour aboutir à un texte de compromis qui est très équilibré et sera déterminant pour la poursuite de la politique de l'eau.

Le ministre a rappelé que ses grandes orientations avaient été fixées par Mme Dominique Voynet dès sa communication en Conseil des ministres en mai 1998 et a souhaité présenter les aspects essentiels du projet.

Il a indiqué que ce projet de loi avait tout d'abord pour objectif de renforcer le service public de l'eau en garantissant un accès équilibré à ce service et une plus grande transparence dans sa gestion. S'agissant de la solidarité en faveur des plus démunis, il a précisé que les cautions ou les dépôts de garantie qui peuvent bloquer l'accès à l'eau avant toute consommation seraient supprimés, tout comme seraient interdites les coupures d'eau. Il a aussi relevé que la part fixe de la facture d'eau serait strictement encadrée, le principe étant celui de la facturation proportionnelle à la consommation, ce qui évite de pénaliser les petits consommateurs et incite à gérer l'eau de manière économe.

Concernant l'amélioration de la transparence dans la gestion du service, il a estimé que ce projet avait pour objectif de permettre une meilleure information des consommateurs et de donner aux collectivités locales la capacité d'être mieux à même de négocier les délégations de service public. Il a annoncé que les commissions consultatives des services publics locaux verraient leur rôle renforcé et qu'elles donneraient leur avis sur les règlements des services de distribution d'eau et d'assainissement, les modalités de tarification et le rapport annuel du maire sur les services publics d'eau et d'assainissement. Le ministre a également indiqué qu'un Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement serait créé pour mieux informer les collectivités locales et les citoyens, l'objectif étant de réduire « l'asymétrie d'informations » qui existe entre les groupes privés, d'une part, et les collectivités locales et les usagers, d'autre part.

Il a annoncé que, pour instaurer des relations plus équilibrées entre les collectivités responsables du service public de l'eau et les sociétés concessionnaires, la durée des contrats de délégation de service public serait limitée à douze ans au lieu de vingt actuellement, les conditions de ces délégations seraient mieux encadrées, et que les montants provisionnés par le délégataire pour le renouvellement des réseaux non utilisés pendant la durée des contrats reviendraient au service public en fin de contrat.

Abordant le deuxième objectif de ce projet de loi, qui est de permettre une meilleure application du principe pollueur-payeur, le ministre a précisé que la charge des redevances payées aux agences de l'eau serait plus équitablement répartie et la part payée par les ménages allégée. Il a également indiqué que l'assiette des redevances serait redéfinie afin de mieux refléter le coût des pollutions, cette meilleure application du principe pollueur-payeur au domaine de l'eau devant contribuer à améliorer la qualité de la ressource en eau de notre pays qui est aujourd'hui menacée dans beaucoup d'endroits, ce qui est une préoccupation majeure des Français. Il a souligné que ce projet de loi modifierait de manière importante les redevances de pollution domestique, en faisant obligation aux collectivités responsables de l'assainissement de s'en acquitter car elles sont les seules à prendre des décisions de nature à réduire la pollution et à être en mesure de calculer le montant de la redevance en fonction de la pollution nette rejetée vers le milieu naturel.

Il a expliqué par ailleurs que le coefficient de collecte serait réformé pour devenir une redevance s'appliquant non aux seuls usagers domestiques, mais également aux industriels raccordés, cette redevance ayant vocation à diminuer progressivement, jusqu'à disparition, dans la mesure où elle ne répond pas au principe pollueur-payeur.

Quant aux redevances agricoles, il a souligné que le projet de loi les a établies de manière à ce qu'elles deviennent de véritables incitations à la modification des pratiques agricoles intensives : réduction de la surfertilisation pour la redevance pour excédent d'azote, incitation au respect de protocoles quantitatifs de gestion de l'eau pour la redevance pour consommation d'eau. Il a noté que ces redevances seraient indolores dès lors que des efforts seraient faits par les agriculteurs pour réduire leurs pratiques polluantes et indiqué que ce dispositif avait été retenu en raison de son caractère incitatif et en dépit d'un coût de gestion élevé.

Soulignant que la détermination des assiettes et des taux de ces redevances avait fait l'objet d'un long travail de concertation avec la profession agricole, il a estimé qu'un compromis équilibré avait été trouvé, privilégiant l'efficacité environnementale plutôt que le rendement financier.

Il a également informé les commissaires de la création de nouveaux éléments d'assiette des redevances dans le domaine industriel, comme par exemple pour les rejets de chaleur, ou dans le domaine de la modification du régime des eaux, par la création de redevances pour remblais en zones inondables au-delà de cent hectares ainsi que pour l'imperméabilisation de nouvelles surfaces au-delà d'un hectare.

Constatant qu'à l'heure actuelle les redevances, d'un montant brut de 12 milliards de francs, sont fixées par l'administration, en dehors de tout contrôle parlementaire, contrairement à un principe constitutionnel, le ministre s'est félicité que la loi fixe désormais l'assiette et la fourchette des redevances, conformément au principe démocratique selon lequel les représentants élus du citoyen ont seuls compétence pour fixer l'impôt.

Le ministre a souligné que le troisième objectif de ce texte était de renforcer la décentralisation, ce qui se traduit par un renforcement des moyens d'action des collectivités locales en matière de prévention des inondations et d'aménagement des rivières. Il a précisé que les agences de l'eau pourraient désormais apporter leur concours financier aux collectivités locales par l'intermédiaire du Fonds de prévention des risques naturels majeurs et qu'il serait possible d'instaurer des servitudes d'utilité publique pour aménager des zones naturelles d'expansion des crues pour prévenir les inondations. Il a également indiqué que les communes pourront désormais intervenir dans les domaines privés à la demande des propriétaires pour rénover les dispositifs d'assainissement et faciliter les raccordements des immeubles au réseau de collecte des eaux usées. Il a enfin noté que les départements auront la possibilité de créer leur propre domaine public fluvial par transfert de celui de l'Etat.

Il a indiqué que ce projet était aussi l'occasion d'introduire dans le droit français les ajustements rendus nécessaires par la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Il a précisé que les procédures d'élaboration et d'approbation des schémas directeurs d'aménagement des eaux (SDAGE) seraient modifiées pour y associer davantage le public et que des améliorations seraient apportées aux dispositions relatives aux schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Il a également noté que seraient apportées des modifications à la police de l'eau pour la rendre plus efficace.

Il a conclu son intervention en soulignant qu'il s'agissait d'un grand projet que la discussion parlementaire, fixée au 8 janvier prochain, permettrait d'enrichir encore.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, après avoir exprimé sa satisfaction que le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau donne lieu à un débat en commission, a rappelé que ce dernier avait initialement pour objet de donner une base légale aux redevances perçues par les agences de l'eau. En effet, par décision du 23 juin 1982, le Conseil constitutionnel a jugé que ces redevances étaient des impositions de toute nature, ce qui implique que le Parlement vote leur taux, leur assiette et leurs modalités de recouvrement. Le rapporteur a estimé qu'une telle réforme nécessitait un débat approfondi et ne pouvait donc être engagée par la voie d'un amendement au collectif budgétaire.

Il a rappelé que depuis l'élaboration du premier avant-projet de loi, des modifications étaient en outre intervenues, notamment l'adoption de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Il convenait de transposer cette dernière, ce qui est effectivement l'un des objectifs du projet de loi.

La rapporteur a ensuite souligné que ce projet de loi était particulièrement important car il permettait d'affirmer les grands principes devant guider la politique de l'eau, à savoir les principes de démocratie, d'équité et de développement durable.

Il s'est ainsi félicité que le projet de loi ait conforté le choix d'une décentralisation de la gestion de la ressource en eau par une plus grande association des usagers, même si le maire reste le premier responsable des services publics de l'eau et de l'assainissement. La transposition de la directive-cadre précitée conduit à soumettre les projets de schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) aux observations du public pendant une période d'au moins six mois, au cours de leur élaboration ou de leur mise à jour. Les usagers de l'eau seront donc associés à ces procédures, contrairement à ce qui est le cas actuellement ; en pratique, ils seront surtout associés à la mise à jour des SDAGE, peu de schémas devant être créés dans les années à venir, à l'exception peut-être des schémas de Corse et de Mayotte.

S'agissant des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), le rapporteur a souligné le rôle donné aux établissements publics territoriaux de bassin (EPTB), le projet de loi leur ouvrant désormais la possibilité d'être les maîtres d'ouvrage de ces schémas. Il a par ailleurs émis des réserves sur le caractère désormais facultatif des SAGE, a souhaité que dans certaines zones où la ressource en eau est vulnérable, leur création soit plus qu'incitée, et a évoqué l'idée de schémas obligatoires.

Il a en outre indiqué que le principe de démocratie était largement conforté par l'accroissement des pouvoirs des commissions consultatives des services publics locaux, celles-ci devant être consultées sur les projets de règlement des services de l'eau, ceux relatifs aux modalités de tarification ou encore sur le projet de rapport annuel du maire sur ces services. Il a attiré l'attention sur la nécessité d'annexer les avis de ces commissions aux délibérations du conseil municipal relatives aux services de l'eau et de l'assainissement, sous peine de nullité de ces délibérations, notamment en matière de contrats de délégation de service public ou de tarification des services. Il a enfin insisté sur la responsabilisation des usagers dans leurs comportements de consommation d'eau pouvant résulter de l'instauration, dans les immeubles neufs, de compteurs individuels.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a ensuite abordé les dispositions relatives aux redevances perçues par les agences de l'eau dans le projet de loi, en insistant sur la nécessité d'appréhender le principe pollueur-payeur comme étant en réalité le principe « non pollueur-non payeur », les redevances constituant des incitations à adopter d'autres pratiques. Il a ainsi souligné que la redevance pour consommation d'eau voyait son taux modulé à la baisse, dès lors que toutes les catégories d'usagers s'associaient pour conclure un protocole de gestion quantitative devant permettre un usage raisonné de la ressource en eau, et a jugé que ce dispositif permettrait de responsabiliser les usagers tout en concourant au développement durable, objectif visé par la directive-cadre. Il a en outre précisé que la redevance pour consommation d'eau serait assise sur les volumes effectivement consommés et non sur les volumes prélevés, comme cela est actuellement le cas, et a insisté sur la nécessité de taxer de manière identique des volumes prélevés à la même source, même s'ils sont destinés à des usages différents. Sur ce point, il a d'ailleurs noté que le coefficient d'usage, actuellement en vigueur, était difficilement justifiable.

Evoquant les redevances pour pollution de l'eau, il a noté qu'elles constituaient un moyen pour atteindre en 2015 l'objectif d'un bon état des eaux assigné par la directive-cadre. Il a également souligné la possibilité d'affecter au taux de ces redevances un coefficient de modulation géographique visant à prendre en compte la fragilité des différentes zones constituant un bassin et a appelé l'attention du ministre sur la nécessité d'aménager le dispositif des redevances pour l'aquaculture, faute de quoi cette activité serait fortement pénalisée.

Il a enfin insisté sur le fait que le projet de loi visait à promouvoir une gestion locale collective et concertée de la ressource en eau, sans opposer les différents usagers les uns aux autres, mais au contraire en encourageant un partage équilibré de la ressource.

Puis, le rapporteur a abordé la question des contrats de délégation de service public dans le domaine de l'eau. Il s'est réjoui que le projet de loi pose le principe d'une durée maximale de ces délégations de douze ans, ce qui correspond effectivement à la durée moyenne des contrats actuels, et a rappelé qu'il était possible, en cas d'investissement lourd, de prolonger cette échéance, celle-ci ne pouvant en tout état de cause excéder la durée de l'amortissement financier des équipements. Notant que les services publics de l'eau étaient une compétence communale, il a estimé nécessaire d'ouvrir la possibilité de réviser les contrats de délégation en cas de changement de municipalité.

S'agissant enfin des dispositions relatives au Haut conseil du service public de l'eau et de l'assainissement, il a estimé qu'elles étaient particulièrement innovantes. Notant que l'évolution du prix de l'eau et des divers coefficients intervenant dans son calcul était, pour certains de nos concitoyens, difficilement supportable et justifiable, il a souhaité que les pouvoirs du Haut conseil soient accrus et que ce dernier puisse notamment mener des enquêtes et avoir communication de tous les documents nécessaires à l'exercice de ses missions. Il a également jugé indispensable de prévoir que les membres du Haut conseil ne puissent détenir d'intérêts dans des entreprises intervenant dans le secteur de l'eau et de l'assainissement et a émis le souhait que cet organisme puisse saisir les juridictions concernées. Il a enfin estimé nécessaire d'élargir les cas de saisine du Haut conseil, en donnant cette possibilité à un tiers ou à la moitié des membres des commissions consultatives des services publics locaux.

En conclusion, M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a estimé que ce projet permettrait de mettre en application le principe selon lequel l'eau est un bien vital qui doit être partagé, et a indiqué qu'il proposerait quelques modifications par voie d'amendements.

M. Léonce Deprez, soulignant que la question de l'eau était d'un intérêt fondamental pour la vie du pays et des citoyens, a estimé que la loi devait traduire concrètement les excellentes intentions énoncées par M. Daniel Marcovitch, rapporteur.

M. Léonce Deprez, rappelant que la qualité de l'eau était aujourd'hui une préoccupation essentielle des Français, a souhaité savoir en quoi cet objectif était vraiment au c_ur de la loi.

Puis, il a constaté que le projet de loi avait pour but de transposer en droit français la directive n° 2000-60/CE du 23 octobre 2000. Cette directive s'inspirant elle-même du droit français, il a souhaité que le projet de loi assure, en l'améliorant, la continuité du droit existant.

Après avoir évoqué la question de la durée des contrats de délégation de service public ramenée à douze ans par le projet, ce qu'il a estimé insuffisant pour amortir les investissements, il s'est interrogé sur les conséquences de l'amendement au projet de loi de finances rectificative concernant les redevances perçues par les agences de l'eau adopté par la commission des finances et s'est demandé s'il avait pour vocation de se substituer au projet de loi portant réforme de la politique de l'eau.

S'agissant de la partie fixe de la facture d'eau, il a estimé souhaitable de la maintenir et a pris pour exemple les résidences secondaires dont il a jugé que les propriétaires devaient participer au financement des dépenses d'exploitation des services de l'eau.

Puis, M. Léonce Deprez a abordé la question des coupures d'eau. Il a précisé qu'il comprenait le souci social du projet de loi de ne pas faire subir de coupures à ceux des consommateurs qui n'ont pas les moyens de payer leurs factures, mais a jugé que le projet de loi comportait le risque de favoriser les mauvais payeurs sur lesquels aucune contrainte ne pourrait plus s'exercer.

Il s'est en outre enquis du rôle dévolu au Haut conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement, dont il a craint qu'il ne devienne une autorité de contrôle et non pas seulement un instrument de dialogue et d'information.

M. Jean-Michel Marchand a jugé que ce texte permettrait de répondre à des questions non résolues par la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, qu'il s'agisse de la portée du principe pollueur-payeur, d'une facturation proportionnelle à la consommation d'eau, des sanctions aux infractions, ou encore des périmètres de protection autour des captages.

Il a rappelé que les collectivités locales désiraient que soit confié au Haut Conseil un rôle important de conseil et d'expertise en matière de contrats de délégation de service public et a souhaité que ces contrats puissent être révisés afin que des élus locaux, nouvellement élus, puissent mettre en _uvre des politiques nouvelles et ne soient pas liés pour une période excessivement longue. Il a souhaité que le Haut Conseil puisse donc examiner les contrats en cours.

Concernant le problème de la part fixe, il a estimé nécessaire de maintenir une part fixe minimale, ne serait-ce que pour couvrir les frais de comptage, mais a estimé qu'elle ne pouvait comprendre toutes les charges afférentes aux infrastructures. Déplorant qu'actuellement, la part fixe puisse comprendre les charges liées à l'établissement d'infrastructures surdimensionnées dans les communes soumises à de fortes variations saisonnières de leur population, il a souhaité que certaines taxes, comme la taxe de séjour, puissent être affectées en partie au budget d'assainissement.

Concernant la police des eaux, tout en observant que certaines cultures sensibles, telles que les champignonnières ou les fruits et légumes, posaient des problèmes spécifiques et exigeaient donc des réponses adaptées, il a souhaité que les exploitants n'ayant pas encore satisfait aux nouvelles exigences disposent de délais suffisants pour pouvoir mettre aux normes leurs activités.

Il a enfin demandé s'il ne devrait pas être envisagé d'imposer aux schémas de cohérence territoriale d'être compatibles avec les SDAGE, même si ces deux types de documents de planification correspondent à des périmètres différents.

M. Félix Leyzour a estimé que l'élaboration d'une nouvelle loi sur les problèmes de l'eau était aujourd'hui nécessaire, afin notamment de transposer dans le droit national les dispositions de la directive communautaire n° 2000-60 du 23 octobre 2000 qui a elle-même incorporé certains éléments inclus dans les lois du 16 décembre 1964 et du 3 janvier 1992. Il a indiqué que l'eau, qui, dans certaines régions, est rare, dans d'autres, abondante, doit être aujourd'hui gérée sur les plans quantitatif, qualitatif et de coût.

Il a estimé que la décentralisation et la transparence sont aujourd'hui des démarches nécessaires, étant donné que les problèmes se posent différemment suivant les zones.

Estimant que l'objectif de réduction de la durée des contrats de gestion déléguée de vingt à douze ans était intéressant, M. Félix Leyzour s'est cependant interrogé sur les moyens dont disposeraient les collectivités pour discuter, à armes égales, avec les grands groupes privés. Il a souhaité savoir si l'action du Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement pourrait réellement renforcer l'autorité des collectivités territoriales sur ces questions.

M. Félix Leyzour a abordé également la question de l'incitation donnée par le projet de loi à une bonne gestion environnementale de l'eau et a jugé que les problèmes doivent être abordés de manière équilibrée. Observant que toutes les activités humaines sont polluantes, qu'il s'agisse d'activités domestiques, industrielles, du ruissellement sur les routes ou des pollutions d'origine agricole, il a estimé essentiel de se défaire de l'idée selon laquelle les agriculteurs seraient nécessairement des pollueurs.

M. Félix Leyzour a souhaité enfin savoir si le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau offrait les outils nécessaires pour conduire une véritable politique de lutte contre les inondations, permettant notamment de ralentir les phénomènes de ruissellement ou de réaliser des bassins de décantation ou des retenues d'eau.

M. Robert Galley, s'appuyant sur son expérience de président de comité de bassin, a indiqué tout d'abord que l'aspect le plus significatif de la politique de l'eau résidait sans doute dans les spécificités des différents bassins : les problèmes posés dans le bassin Adour-Garonne diffèrent ainsi sensiblement de ceux de la Somme. Constatant que ces spécificités se traduisent d'ailleurs dans les différences d'objectifs et de redevances que retiennent les différentes agences de l'eau - l'Agence Seine-Normandie, par exemple, a entrepris l'aménagement de barrages réservoirs dans le département de l'Aube permettant d'éviter les crues, alors qu'un tel aménagement n'est pas du tout envisagé dans celui de la Garonne - il a estimé que l'unification des redevances soulèverait des difficultés majeures.

M. Robert Galley a estimé que l'Etat ne devait pas resserrer les taux de redevances appliqués dans les différents bassins hydrographiques, mais au contraire laisser aux comités de bassin un rôle important, consacrant l'approche décentralisée traditionnelle de la politique française de l'eau. Pour ce faire, il a estimé que la fourchette encadrant les taux fixés par le Parlement devait être élargie à 30 %. En ce qui concerne les problèmes de l'agriculture, il a souhaité que la discussion du projet de loi soit l'occasion d'opérer une distinction entre l'eau, outil de travail pour certains - l'eau utilisée pour le maïs, par exemple - et l'eau qui constitue une simple facilité - eau de piscine, par exemple.

Il a demandé ensuite au ministre de ne pas prévoir une réduction trop importante du coefficient de collecte, qui risquerait de nuire à l'entretien des réseaux et a signalé qu'en deçà d'un coefficient de 2,5, les recettes seraient insuffisantes pour assurer l'entretien des réseaux.

M. Robert Galley, après avoir rappelé que les inondations constituaient un sujet de préoccupation important pour la population, a souligné l'apport important de la commission d'enquête sur les inondations dont M. Jean Launay était le rapporteur. Il a souhaité que les suggestions de cette commission soient examinées attentivement, de façon à assurer une politique de prévention efficace.

M. Pierre Ducout a rappelé qu'il avait déjà suivi avec intérêt les débats relatifs à la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau. Il s'est félicité de la concertation préalable à la rédaction du projet de loi actuel, qui constitue un gage de qualité. Il a par ailleurs souligné que, si l'eau est notre patrimoine commun, il convient de prendre en compte la diversité des situations sur le territoire français.

M. Pierre Ducout a ensuite indiqué que quatre aspects importants devaient être évoqués. Premièrement, il convient de conforter et d'adapter ce qui existe déjà et fonctionne bien. C'est le cas de l'organisation par bassin, mise en _uvre depuis la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution. C'est également le cas des schémas existants : les SDAGE (schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux) et les SAGE (schémas d'aménagement et de gestion des eaux) sont opérationnels. 60 SAGE sont aujourd'hui en cours d'élaboration et on définit le périmètre de 36 autres. Enfin, il convient de reconnaître le rôle actif des établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) dans ce domaine.

Deuxièmement, la transparence, la démocratie et la proximité, principes présents dans la loi, doivent également être confortés. Dans ce cadre, le Haut conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement doit avoir plus de pouvoirs. Les possibilités de saisine et d'auto-saisine doivent être élargies. Ainsi, le Haut Conseil doit pouvoir se saisir des cas les plus importants, réaliser un audit et, si nécessaire, permettre la rupture du contrat avant échéance et sans indemnité. Dans ce cadre également, on ne doit plus diaboliser l'agriculture, et notamment l'irrigation. L'agriculture est aujourd'hui très souvent « raisonnée » et l'immense majorité des agriculteurs a un usage raisonnable de l'eau. Il convient donc de rendre le principe « pollueur-payeur » encore plus incitatif au développement de bonnes pratiques et de veiller à l'application progressive des ajustements qui en résultent.

Troisièmement, le renforcement de la police de l'eau est une bonne chose. Il convient de mieux cerner les responsabilités de chacun, notamment en matière d'entretien des cours d'eau, et de conforter le rôle des Missions interservices de l'eau (MISE) dans ce domaine.

Enfin, la lutte contre les inondations doit être mieux intégrée dans le projet de loi. Il convient de mieux utiliser l'outil que constitue le plan de prévention des risques (PPR) et de clairement partager les responsabilités. Chaque acteur a en effet un rôle à jouer : l'Etat, les collectivités locales mais également l'ensemble de nos concitoyens.

M. Jean Launay a rappelé que les travaux de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les inondations s'étaient achevés le 14 novembre 2001 par l'examen et l'adoption des vingt-quatre propositions du rapport à l'unanimité. C'est pourquoi certains membres de la commission d'enquête désirent voir examiner des amendements au projet de loi, permettant de prendre en compte ces propositions en insérant un volet « prévention des inondations » dans un nouveau chapitre IV du titre I du projet.

Sur les vingt-quatre propositions, il a indiqué que quatorze pouvaient être utilement reprises dans le projet de loi sur l'eau. Ces amendements portent, soit sur des articles du projet de loi, soit font l'objet d'articles additionnels.

Ainsi, la proposition n° 22 de la commission d'enquête fait l'objet de plusieurs amendements : le caractère obligatoire des SAGE, que l'article 3 du projet de loi supprimait, doit être maintenu. Il convient également de réserver aux EPTB l'élaboration et la mise en _uvre de ces SAGE, les communautés locales de l'eau n'ayant jamais été mises en _uvre.

De même, la proposition n° 23 relative à la consécration législative des EPTB fait l'objet d'un amendement.

Enfin, la proposition n° 2 relative à l'extension des conditions de mise en _uvre de la procédure d'urgence prévue à l'article 21 du projet de loi fait également l'objet d'un amendement.

Par ailleurs, d'autres propositions de la commission d'enquête pourront être utilement intégrées dans le nouveau chapitre IV du titre I du projet de loi. Elles modifient différents codes et lois, et notamment le code des assurances, concernant le « régime catastrophes naturelles », le code général des collectivités territoriales, le code de la construction et de l'habitation, le code de l'environnement, la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole, concernant les contrats territoriaux d'exploitation (CTE).

Enfin, le titre III du projet de loi, relatif aux agences de l'eau, et notamment ses articles 38, 40 et 41, feront l'objet d'amendements visant notamment à reconnaître une compétence explicite aux agences en matière de prévention des inondations et à élargir l'assiette de la redevance pour modification du régime des eaux, trop peu incitative, en l'état actuel, à la prévention.

M. Jean Launay a conclu en indiquant qu'il avait ainsi brièvement résumé le travail de la commission d'enquête et que ses propositions pourraient être très utilement reprises dans le cadre du projet de loi portant réforme de la politique de l'eau.

M. Jacques Pélissard, après avoir noté que le projet prévoyait l'encadrement de la part fixe des factures d'eau et la limitation de celle-ci aux charges de gestion du comptage, de facturation, d'établissement et de renouvellement des branchements, a souhaité, se faisant l'écho de l'association des maires de France, que cette part fixe comprenne également les coûts fixes d'entretien du réseau. S'agissant de la question des impayés, il a noté que la mise en _uvre de la charte solidarité eau interdisait déjà les coupures d'eau et s'est demandé s'il ne serait pas plus pertinent de financer ces interventions de solidarité en permettant au budget général de la commune d'abonder le budget de l'eau et de l'assainissement. Puis, il a regretté que le projet de loi ramène le plafond de la participation pour raccordement à l'égout de 80 % à 50 % du coût de fourniture et de pose d'une installation d'assainissement non collectif et a émis la crainte que les communes ne compensent cette perte de recettes par un relèvement de leurs redevances d'assainissement ; il a en outre signalé que la suppression de la majoration de 10 % pour frais généraux des dépenses liées aux travaux de raccordement posait un problème similaire. Enfin, il a demandé si le Parlement aurait à examiner le projet de loi, dans l'hypothèse d'une adoption de l'amendement au collectif budgétaire présenté par M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances, visant à donner une base légale aux redevances perçues par les agences de l'eau.

Puis, M. Roger Lestas a déploré que le principe pollueur-payeur soit systématiquement utilisé à l'encontre des agriculteurs. Il a rappelé que leurs pratiques agricoles, si elles étaient effectivement polluantes, avaient été encouragées depuis trente ans afin d'atteindre l'objectif d'autosuffisance et a souligné que les agriculteurs n'ayant pas adopté ces méthodes avaient été contraints à disparaître. Il a également rappelé qu'ils avaient mené une mise aux normes des bâtiments d'élevage, alors même que celle-ci n'a été que partiellement subventionnée. Il a demandé s'il était, en conséquence, prévu que les agriculteurs n'ayant pas procédé à cette mise aux normes en 2000 acquittent des redevances plus élevées que ceux ayant rempli cette obligation.

Abordant la question des espèces nuisibles vivant à proximité des cours d'eau, il a noté que des moyens chimiques étaient souvent utilisés à leur encontre, alors qu'il serait plus pertinent de faire appel à des chasseurs ou d'utiliser des pièges.

M. Pierre Micaux a regretté que le projet de loi ne contienne aucune disposition visant à encourager la coopération des collectivités locales dans le domaine de l'eau, alors qu'elle serait particulièrement intéressante pour les petites communes isolées.

S'agissant du passage de vingt à douze ans de la durée maximale des délégations de service public dans le domaine de l'eau, il a craint que cette disposition n'entraîne des charges supplémentaires pour les entreprises concernées ; il a par ailleurs déploré que les collectivités aient à traiter avec un oligopole, que ce soit dans le domaine de l'eau ou celui des déchets et a dénoncé les ententes ou les répartitions de zones d'intervention opérées par les entreprises constituant cet oligopole. Il a jugé en conséquence que ce projet devait s'attaquer à ce problème en veillant au maintien de la concurrence. S'agissant des comités de bassin, il a plaidé pour que ceux-ci redeviennent l'organe décisionnaire en matière de gestion locale de l'eau et a regretté qu'ils aient du mal à s'affirmer face à la technocratie des agences de l'eau. Enfin, il a craint que le Haut conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement ne constitue qu'une structure supplémentaire dénuée de réel pouvoir et a souhaité que celui-ci puisse veiller à l'application des règles de concurrence dans le domaine de l'eau.

M. Jean-Marie Morisset a souhaité que les outils existants soient rendus plus efficaces pour atteindre les objectifs de reconquête de la qualité de l'eau affichés par le projet de loi.

Il a jugé que les SDAGE, les SAGE, les comités de bassins et les communautés locales de l'eau constituaient de bons outils pour parvenir à une meilleure gestion de la ressource en eau, mais que les moyens financiers alloués à l'assainissement et à la prévention des inondations devaient être accrus.

Constatant que les conventions conclues entre les collectivités locales et le Fonds national d'aide à l'adduction d'eau (FNDAE) n'avaient pas toutes été reconduites, il a déploré que les subventions allouées par ce dernier soient revues à la baisse, ce qui implique un effort financier accru de la part des collectivités et a demandé si le maintien du niveau des subventions leur étant allouées par le FNDAE pouvait être garanti. Il s'est, par ailleurs, étonné que la participation de l'Etat à la mise aux normes des bâtiments d'élevage ait pris la forme de subventions du FNDAE. En conséquence, il a demandé si l'Etat envisageait encore de puiser dans le FNDAE pour assurer cette prise en charge.

M. Serge Poignant s'est inquiété de l'incertitude qui caractérise l'évolution des moyens des agences de l'eau, alors que ces dernières devront faire face à un accroissement des demandes d'aides financières et de leurs coûts de gestion. Concernant les instances de bassins, il a regretté que le principe d'une différenciation des zones en fonction de la fragilité de la ressource n'ait pas été accompagné d'une référence à une péréquation territoriale, pourtant nécessaire.

Il a par ailleurs jugé que le choix d'une future suppression de la redevance pour réseau de collecte était une erreur, compte tenu des travaux de réhabilitation des réseaux à entreprendre.

Concernant l'agriculture, après avoir considéré qu'il ne fallait pas stigmatiser les agriculteurs, il a fait part de ses doutes sur la réalité du consensus annoncé, compte tenu des demandes encore récemment adressées aux parlementaires par les acteurs de ce secteur.

Enfin, il a évoqué les dangers liés à la taxation indifférenciée des surfaces imperméabilisées de plus d'un hectare, soulignant qu'il fallait établir des distinctions en fonction du type de surface considérée ; cette aire a une signification très différente selon qu'il s'agit d'un parking ou au contraire d'une serre, voire des petits tunnels plastiques utilisés par les maraîchers, cette dernière profession, économiquement très fragile, ne pouvant supporter le poids d'une nouvelle taxation de ce type.

En réponse aux différents intervenants, M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, a apporté les précisions suivantes :

- les établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) doivent devenir un instrument privilégié de la politique de l'eau, sans être rendus obligatoires. Les secteurs où les SAGE seraient obligatoires pourraient être définis par les comités de bassin, cette délimitation devant être ensuite approuvée par le préfet de bassin. Dans l'hypothèse de SAGE obligatoires, et en cas de non élaboration de ces schémas, il conviendrait de prévoir un mécanisme visant à accroître les taux pratiqués par les agences, voire un dispositif permettant au préfet de procéder d'office à l'élaboration du schéma ;

- le principe « non pollueur - non payeur » évoqué par le rapporteur est lui aussi au c_ur des dispositions du projet de loi dont le but essentiel est d'éviter le développement de la pollution et non de créer des ressources fiscales supplémentaires ; de nombreuses mesures, contenues dans le projet de loi, visent l'amélioration de la qualité de l'eau ; il en va ainsi notamment de la redevance sur les excédents d'azote, assise sur la pollution nette rejetée par les activités agricoles, qui devrait s'avérer particulièrement efficace ;

- le secteur de l'aquaculture devrait faire effectivement l'objet d'un traitement spécifique sur lequel le Gouvernement va approfondir sa réflexion ;

- l'institution du Haut conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement apparaît comme un élément essentiel du projet de loi et constitue un moyen de renforcer la démocratie. Cette instance n'ayant pour l'instant qu'un rôle de conseil et d'information, il peut être souhaitable de la doter de moyens d'enquête et d'un pouvoir d'auto-saisine. Le Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement aura pour rôle d'améliorer la transparence et de permettre aux collectivités locales de disposer d'informations plus précises pour contrebalancer le pouvoir des grands groupes industriels qui peuvent avoir des pratiques peu respectueuses du droit de la concurrence ; le Gouvernement n'est pas opposé à un renforcement de son rôle ;

- des dérogations à la durée maximale de douze ans pour les contrats de délégation de service public seront possibles au cas par cas. Il convient de noter que la durée moyenne des contrats actuellement observée est de onze ans ;

- l'amendement adopté par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2001, auquel plusieurs membres de la commission ont fait allusion, vise à « constitutionnaliser » le système des redevances des agences de l'eau. Le Gouvernement n'est néanmoins pas favorable à l'adoption de cet amendement qui, en tout état de cause, ne ferait pas obstacle à la discussion du projet de loi ;

- s'agissant de la partie fixe, elle est strictement encadrée, même si des tarifs spéciaux peuvent être institués, notamment dans les communes dont la population saisonnière varie fortement ;

- s'agissant du risque d'avantager les mauvais payeurs par l'interdiction de procéder à des coupures d'eau en cas d'impayés, deux dispositions permettent de le réduire : elles consistent, d'une part, à limiter le débit d'eau, d'autre part, à faciliter les prélèvements sur les comptes bancaires des personnes intéressées.

- s'agissant de la police des eaux, l'idée émise d'affecter pour partie la taxe de séjour au budget d'assainissement est intéressante et sera étudiée. De même, il conviendra de réfléchir, en concertation avec les services du ministère de l'équipement, des transports et du logement, à la possibilité d'imposer aux schémas de cohérence territoriale d'être compatibles avec les prescriptions des SDAGE ;

- s'agissant des inondations, il est vrai que le projet de loi ne les prend pas assez en compte. Il peut être envisagé d'introduire un nouveau chapitre pour mettre en _uvre certaines des propositions formulées par la commission d'enquête parlementaire ;

- concernant les taux des redevances, ils devraient être compris dans une fourchette de 20  % autour des taux pivots définis par le Parlement, 30 % paraissant excessifs ; les agences de l'eau garderont toute latitude pour fixer leurs taux dans cette fourchette. Le projet de loi entend mettre en _uvre une taxation identique pour tous les usagers dès lors qu'ils consomment une eau prélevée dans le même milieu. Il ne se traduira donc pas par une augmentation de l'imposition ; au contraire, les prélèvements seront globalement diminués pour les consommateurs. Quant au coefficient de collecte, il ne devrait pas être supérieur à 2,5 et baissera dans le prochain programme pluriannuel des agences, car il ne répond pas à la logique du projet de loi ;

- s'agissant du passage du taux maximal de la participation pour raccordement à l'égout à 50 %, il est motivé par l'accroissement du coût des installations d'assainissement non collectif. C'est le maintien d'un taux à 80 % qui est aujourd'hui injustifié ;

- les règles actuelles de financement du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) ne seront pas remises en cause ; il convient à cet égard de souligner que Bruxelles a donné son accord au deuxième programme ;

- les moyens des agences de l'eau, stables depuis 1996, ne seront pas menacés. Ils feront toutefois l'objet d'un rééquilibrage et leur répartition sera modifiée.

En conclusion, M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, a rappelé que ce projet de loi était issu d'une concertation déjà engagée par Mme Dominique Voynet, et constituait un compromis équilibré. C'est pourquoi il a réaffirmé sa confiance en l'avenir du projet.

*

* *

Lors de ses réunions du 18 et du 19 décembre 2001, la commission a examiné, sur le rapport de M. Daniel Marcovitch, le projet de loi (n° 3205) portant réforme de la politique de l'eau.

M. Robert Galley s'est inquiété des conséquences de l'adoption de l'amendement sur les redevances aux agences de l'eau présenté par M. Henri Emmanuelli au projet de loi de finances rectificative, l'estimant incompatible avec le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau. Le président Lajoinie et M. Daniel Marcovitch ont répondu en soulignant qu'une loi ultérieure pouvait toujours modifier une disposition précédemment adoptée.

La commission a rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1, puis la question préalable n° 1 de M. Jean-François Mattei..

*

* *

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER

PLANIFICATION ET DÉCENTRALISATION EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET DE GESTION DES EAUX

Article 1er

Récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau

Cet article vise à intégrer dans le code de l'environnement le principe fondamental de récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau, établi par la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau.

Celle-ci, dans le point 1 de son article 9, dispose en effet qu'il revient aux Etats membres de tenir compte « du principe de la récupération des coûts des services liés à l'utilisation de l'eau, y compris les coûts pour l'environnement et les ressources, [...] conformément, en particulier, au principe pollueur-payeur. [...] Ce faisant, les Etats membres peuvent tenir compte des effets sociaux, environnementaux et économiques de la récupération ainsi que des conditions géographiques ou climatiques de la région ou des régions concernées ».

Le principe de récupération des coûts correspond à un élargissement du principe pollueur-payeur à l'ensemble des coûts induits en matière d'environnement. Il vise donc, en matière d'eau :

- les coûts liés à la pollution, comme par exemple le coût induit pour traiter des eaux de mauvaise qualité afin de les rendre potables ;

- les coûts liés aux prélèvements d'eau, comme ceux induits par des retenues de substitution destinées à stocker de l'eau en hiver et compenser des prélèvements opérés en période d'étiage ;

- les coûts induits par la modification du régime des eaux, comme ceux dus à une augmentation des débits minimaux maintenus dans le lit des cours d'eau ou à la limitation des éclusées hydroélectriques ;

- enfin, les coûts liés à tout autre facteur, pour l'instant non pris en compte par les redevances mais susceptible de l'être plus tard.

Le principe de récupération des coûts couvre donc un champ plus large que le principe pollueur-payeur, défini au 3° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement comme celui « selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ». L'institution, à l'article 41 du projet de loi, de redevances pour consommation d'eau et pour modification du régime des eaux, repose donc non sur le principe pollueur-payeur, trop restrictif, mais sur celui de récupération des coûts.

C'est pourquoi le présent article vise à transcrire ce principe dans l'article L. 210-1 du code de l'environnement, qui détermine les principes fondamentaux s'imposant en matière d'eau et de milieux aquatiques. Celui-ci dispose déjà que l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation et que sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable sont d'intérêt général, l'usage de l'eau appartenant à tous dans les conditions fixées par les lois et règlements.

Les dispositions ainsi proposées et visant à établir le principe d'une récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau, ont une rédaction très proche de celle adoptée dans la directive cadre précitée. Pour autant, la référence au principe pollueur-payeur, explicite dans la directive cadre, n'est pas reprise dans la rédaction proposée. Mais, comme on l'a vu, ce principe n'est pas pour autant omis car l'article L. 110-1 du code de l'environnement, relatif aux principes généraux s'imposant à la gestion de l'ensemble des espaces, ressources et milieux naturels, mentionne expressément, dans son 3°, le principe pollueur-payeur. Le principe pollueur-payeur visant l'ensemble des ressources naturelles, il s'applique a fortiori à la ressource en eau. Il n'est donc pas nécessaire de le mentionner explicitement à l'article L. 210-1.

Par ailleurs, la rédaction proposée dans le présent article est plus laconique que celle de l'article 9 de la directive cadre. En effet, celui-ci ne se limite pas à l'affirmation du nouveau principe de récupération des coûts et apporte de nombreuses précisions quant aux modalités d'application de ce dernier. C'est ainsi qu'il impose aux Etats membres de veiller à ce que :

- la politique de tarification de l'eau incite les usagers à utiliser les ressources de façon efficace et contribue à la réalisation d'objectifs environnementaux. Ce point est satisfait par le mécanisme des redevances institué à l'article 41 du présent projet de loi ;

- les différents secteurs économiques, en distinguant au moins le secteur industriel, le secteur des ménages et le secteur agricole, contribuent de manière appropriée à la récupération des coûts des services de l'eau. Ce point est repris plus loin, à l'article 2 du projet de loi, relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux.

La commission a adopté un amendement portant rédaction globale de cet article présenté par M. Jean-Michel Marchand et visant à faire figurer le principe de récupération des coûts des services liés à l'usage de l'eau parmi les grands principes généraux s'imposant à la gestion des ressources naturelles, définis à l'article L. 110-1 du code de l'environnement (amendement n° 106). En conséquence, sont devenus sans objet l'amendement n° 24 de M. Christian Jacob et un amendement identique de M. Claude Gaillard visant à prendre en compte les externalités positives des activités dans l'application du principe de récupération des coûts. Sur ce point, le rapporteur a souligné l'absence de valeur juridique de la notion d'externalité positive et le risque que celle-ci porte atteinte au principe de mutualisation des coûts et des dépenses au niveau du bassin.

La commission a ensuite adopté l'article 1er ainsi modifié.

Après l'article 1er

La commission a examiné l'amendement n° 25 de M. Christian Jacob et un amendement identique de M. Claude Gaillard portant article additionnel après l'article 1er et visant à faire figurer, dans les objectifs généraux de la gestion de l'eau définis à l'article L. 211-1 du code de l'environnement, la création de la ressource en eau. Le rapporteur ayant précisé que la notion de création était déjà contenue dans celle de développement de la ressource en eau, figurant également à l'article L. 211-1 précité, la commission a rejeté ces deux amendements.

Chapitre Ier

PLANIFICATION EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET DE GESTION DES EAUX

La planification en matière d'aménagement et de gestion des eaux n'est pas une nouveauté, mais elle a connu des bonheurs divers. L'article 3 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution imposait déjà d'établir un inventaire des eaux selon leur degré de pollution et fixait pour objectif d'améliorer la qualité du milieu récepteur dans un délai déterminé. Cette disposition n'a toutefois pas rencontré de réel succès. C'est donc la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau qui a instauré une véritable planification de la gestion de la ressource en eau, par la création des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).

Ceux-ci répondent à deux objectifs principaux : organiser une gestion équilibrée de l'eau au niveau d'un bassin ou d'un sous-bassin, c'est-à-dire au plus près de la ressource elle-même, et mener une politique cohérente à moyen et long terme d'aménagement des cours d'eau, dans une optique tant quantitative que qualitative.

Ce dispositif, fondé sur une gestion territorialisée et planifiée de la ressource en eau par bassin versant, constitue une originalité française en voie de se généraliser, puisque ce mode d'organisation est repris par la directive-cadre précitée. La transposition de cette dernière n'exige donc pas de bouleverser le système actuel, mais nécessite quelques aménagements qui sont proposés par l'article 2 du projet de loi relatif aux SDAGE. Quant aux SAGE, qui ont connu un relatif échec puisqu'ils sont seulement au nombre de sept, ils voient leur cadre juridique assoupli, pour tirer les conséquences des dysfonctionnements constatés.

Article 2

Schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE)

Les six schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux, correspondant à six bassins versants (Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée-Corse et Seine-Normandie), sont entrés en vigueur au début de l'année 1997. Par ailleurs, les schémas directeurs de la Guyane et de la Réunion ont été approuvés et ceux de la Martinique et de la Guadeloupe sont en cours d'élaboration.

Les dispositions actuellement applicables aux SDAGE sont contenues dans les articles L. 212-1 et L. 212-2 du code de l'environnement. Ce sont donc ces derniers que le présent article du projet de loi vise à modifier.

Article L. 212-1 du code de l'environnement

Définition et contenu des SDAGE

L'actuel article L. 212-1 du code de l'environnement est relativement bref quant à la définition du contenu des SDAGE, puisqu'il se borne à indiquer, dans son premier alinéa, qu'ils « fixent pour chaque bassin ou groupement de bassins les orientations fondamentales d'une gestion équilibrée de la ressource en eau, telle que prévue à l'article L. 211-1 ».

Cette rédaction est largement reprise dans le paragraphe I du présent article. Il n'y a en effet pas lieu de la modifier, la directive-cadre s'étant largement inspirée du système français, notamment en introduisant la notion de gestion de la ressource en eau, à l'échelle d'un « district hydrographique », par un plan de gestion (article 4 de la directive). Il reviendra à un décret en Conseil d'Etat de définir les périmètres des différents bassins.

Aux termes de l'article 2 de la directive-cadre, le district est défini comme « une zone terrestre et maritime, composée d'un ou plusieurs bassins hydrographiques ainsi que des eaux souterraines et des eaux côtières associées, identifiée [....] comme principale unité aux fins de la gestion des bassins hydrographiques ». Cette notion correspond donc à celle des bassins versants français, unité territoriale de gestion de la ressource en eau.

Seule s'imposait donc la précision, à la dernière phrase de ce paragraphe, que les bassins ou groupements de bassins hydrographiques incluent les eaux souterraines et les eaux côtières.

Ces deux catégories sont ainsi définies par l'article 2 de la directive-cadre :

- les eaux souterraines sont toutes les eaux se trouvant sous la surface du sol dans la zone de saturation et en contact direct avec le sol ou le sous-sol. Selon les informations fournies à votre rapporteur, une nappe d'eau souterraine située sous plusieurs bassins devrait être affectée à un seul d'entre eux ;

- les eaux côtières sont celles situées en deçà d'une ligne dont tout point est situé à une distance d'un mille marin de la ligne de base. Leur définition est donc bien plus restrictive que celle des eaux territoriales, dont la limite est établie à 12 milles marins de la ligne de base.

La commission a donc adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que les bassins ou groupements de bassins hydrographiques incluent « notamment » les eaux souterraines et les eaux côtières, après que le rapporteur eut indiqué qu'il s'agissait ainsi d'intégrer dans le champ des schémas une partie des eaux territoriales, dont la surface est plus étendue que celle des seules eaux côtières, alors que toutes les eaux territoriales entrent dans le champ de la redevance pour pollution de l'eau (amendement n° 107) .

Le paragraphe II de cet article reprend en grande partie le dispositif prévu au deuxième alinéa de l'article L. 212-1 du code de l'environnement, en y intégrant les dispositions du point 1. de l'article  4 de la directive-cadre, relatif aux objectifs environnementaux fixés en matière de gestion de la ressource en eau.

L'actuel article L. 212-1 précise en premier lieu que les SDAGE doivent prendre en compte les principaux programmes arrêtés par les collectivités publiques. Cette disposition disparaît dans la nouvelle rédaction, car elle n'a jamais été suivie d'effet. Elle avait d'ailleurs une valeur plus déclarative que normative, et visait essentiellement à saluer le rôle joué pour les collectivités publiques en matière de gestion de l'eau.

Le dispositif actuel dispose en outre qu'il revient aux SDAGE de définir « de manière générale et harmonisée les objectifs de quantité et de qualité des eaux ainsi que les aménagements à réaliser pour les atteindre ». Cette rédaction est reprise pour partie, la notion d'aménagements étant reportée au paragraphe IV de cet article, et largement complétée pour tenir compte de la directive-cadre.

C'est ainsi que sont définis les objectifs de qualité et de quantité des eaux devant être fixés par les SDAGE, en transcrivant les dispositions de la directive-cadre :

- les eaux de surface (1° de ce paragraphe) doivent atteindre un « bon état », celui-ci étant défini par la directive de manière très vague, comme « l'état atteint par une masse d'eau de surface lorsque son état écologique et son état chimique sont au moins "bons" ». En outre, les masses d'eau artificielles ou fortement modifiées, définies par la directive-cadre comme les masses d'eau de surface créées par l'activité humaine ou qui, par suite d'altérations physiques dues à l'activité humaine, sont fondamentalement modifiées quant à leur caractère, doivent atteindre « un bon potentiel écologique », celui-ci étant défini par la directive en fonction des critères établis par l'annexe V de cette dernière (bilan d'oxygène, débit, température, salinité, etc.). Les eaux de surface de ces masses d'eau doivent également atteindre un « bon état chimique », défini par la directive comme l'état chimique pour lequel les concentrations de polluants ne dépassent pas les normes de qualité environnementale, fixées notamment à son annexe IX ;

- toutes les masses d'eau souterraines (2° de ce paragraphe) doivent atteindre un « bon état chimique », défini par ailleurs à l'annexe V de la directive-cadre, ainsi qu'un équilibre entre les prélèvements et le renouvellement, celui-ci pouvant prendre plusieurs siècles ;

- enfin, des objectifs spécifiques de qualité et de quantité des eaux (3° de ce paragraphe) doivent être fixés par les SDAGE pour les « zones protégées », définies au paragraphe VIII du présent article comme celles où la protection des eaux, ou la conservation des habitats et d'espèces directement dépendants de l'eau font l'objet de dispositions législatives ou réglementaires particulières. Il s'agit, par exemple, des zones « Natura 2000 » ou des périmètres de protection de captages. Des objectifs spécifiques devront également être fixés par les SDAGE pour les zones de sauvegarde mentionnées l'article L. 211-3 du code de l'environnement. Il s'agit de zones déclarées d'utilité publique pour l'approvisionnement actuel ou futur en eau potable et dans lesquelles des prescriptions particulières peuvent être imposées aux installations et activités faisant usage de l'eau, par décrets en Conseil d'Etat afin de protéger leur qualité. Le projet de loi précise que les objectifs ainsi fixés par les SDAGE doivent notamment viser à réduire le traitement des eaux nécessaire à la production d'eau potable, comme le prévoit d'ailleurs le point 3 de l'article 7 de la directive-cadre.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 108).

L'article 4 de la directive cadre prévoit, par ailleurs, que les « Etats membres peuvent viser à réaliser des objectifs environnementaux moins stricts [...] lorsque la réalisation des objectifs [initiaux] serait impossible ou d'un coût disproportionné ». Cette disposition est transposée au paragraphe III du présent article qui vise uniquement les eaux de surface et les eaux souterraines non comprises dans une zone protégée ou de sauvegarde. Il revient alors au SDAGE d'indiquer et de motiver les objectifs retenus.

Quant au paragraphe IV de cet article, il est relatif au délai imparti pour respecter les objectifs de qualité et de quantité précédemment cités. La directive-cadre fixe cette échéance à quinze ans après sa date d'entrée en vigueur, soit le 22 décembre 2015. C'est la date retenue par le projet de loi qui précise, comme l'y autorise l'article 4 de la directive-cadre, que l'échéance peut être reportée, ces reports étant limités à un maximum de deux mises à jour du SDAGE. Par ailleurs, il ne peut y avoir de report que si les objectifs de qualité et de quantité des eaux de surface et souterraines ne peuvent être « raisonnablement réalisés dans le délai fixé ». Il reviendra à un décret d'encadrer ces cas de dérogations, en précisant ce qu'il convient d'entendre par la formule « raisonnablement réalisés », celle-ci étant effectivement très vague. Au total, compte tenu des possibilités de reports, la date ultime pour atteindre les objectifs précédemment énumérés est fixée au 22 décembre 2027. Il convient de noter que les Etats membres sont tenus d'informer la Commission européenne de leurs décisions de report ; il est probable que la motivation de ces décisions sera examinée par cette dernière avec la plus grande attention.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que le report des échéances pour atteindre les objectifs fixés par le SDAGE est déterminé par ce dernier et non par décret - les décrets déterminant seulement les conditions dans lesquelles ce report peut intervenir -, et incluant dans les objectifs dont le respect est soumis à échéance les objectifs environnementaux moins stricts visés au paragraphe III de l'article, pouvant être fixés par le SDAGE (amendement n° 109). La commission a ensuite adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 110).

Le paragraphe V de cet article précise que les SDAGE doivent rendre compte de l'application du principe de récupération des coûts par grand secteur économique, en distinguant au moins le secteur industriel, le secteur agricole et les usagers domestiques. Il transpose ainsi le point 1 de l'article 9 de la directive-cadre, comme on l'a vu précédemment à l'article 1er du projet de loi.

Cette nouvelle disposition s'oppose de manière assez sensible au principe de mutualisation des coûts qui caractérise le système actuel et devrait aller dans le sens d'une plus grande transparence. En effet, si le fascicule jaune budgétaire relatif aux agences de l'eau et transmis chaque année au Parlement rend compte de la ventilation des recettes des agences et donc des contributions des grands secteurs économiques, les méthodes employées par les six agences diffèrent. Il reviendra donc à un décret de préciser la méthodologie à employer pour ventiler les coûts par grandes catégories d'usagers et d'harmoniser la présentation des comptes des agences sur ce point.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand, visant à préciser que le SDAGE doit faire état des modalités d'application - et non « rendre compte » - des principes généraux de la politique environnementale définis par l'article L. 110-1 du code de l'environnement, du principe pollueur-payeur et du principe de récupération des coûts. Le rapporteur ayant indiqué sa préférence pour une formulation plus légère, M. Jean-Michel Marchand a rectifié son amendement en conséquence. La commission a adopté l'amendement ainsi rectifié de M. Jean-Michel Marchand (amendement n° 111).

En conséquence, le rapporteur a retiré un amendement satisfait par l'adoption de l'amendement précédent et devenu sans objet. L'amendement identique n° 26 de M. Christian Jacob, ainsi qu'un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à préciser que le SDAGE définit les modalités d'application des principes généraux de la politique environnementale sont également devenus sans objet. La commission a ensuite adopté un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à préciser explicitement que le SDAGE, lors de sa révision et de sa mise à jour, rend compte de l'application du principe de récupération des coûts (amendement n° 112).

S'agissant du paragraphe VI, il reprend les dispositions existantes, aux termes desquelles les SDAGE doivent déterminer d'une manière générale et harmonisée les aménagements à réaliser pour atteindre les objectifs de quantité et de qualité des eaux. Elles sont en outre complétés, d'une part, en précisant que les SDAGE déterminent également les dispositions nécessaires pour prévenir la détérioration, protéger ou améliorer la qualité des eaux et des milieux aquatiques (ce qui correspond à l'article 1 de la directive cadre), d'autre part, en prévoyant une analyse économique préalable des aménagements et de leur impact environnemental (article 9 et annexe III de la directive cadre).

On doit noter que si ces dispositions laissent à penser que les SDAGE n'ont à traiter que des questions environnementales se rapportant à la gestion de l'eau, il n'en est rien en réalité. En effet, ils s'inscrivent dans le champ plus large de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, aux termes duquel les SDAGE doivent avoir pour objet une « gestion équilibrée » de la ressource en eau, celle-ci visant notamment à assurer « le développement et la protection de la ressource en eau » ainsi que la « valorisation de l'eau comme ressource économique et la répartition de cette ressource ». Les SDAGE auront donc à traiter de la question de la gestion quantitative de l'eau.

La commission a adopté un amendement du rapporteur de clarification rédactionnelle et précisant que les objectifs environnementaux moins stricts susceptibles d'être fixés par les SDAGE doivent être également atteints (amendement n° 113).

Le paragraphe VII reprend intégralement les règles existantes en matière de compatibilité des SDAGE avec d'autres actes et qui sont décrites au dernier alinéa de l'article L. 212-1 du code de l'environnement. Ainsi, la compatibilité des programmes et des décisions administratives dans le domaine de l'eau avec les SDAGE est exigée, alors que seule la prise en compte des SDAGE par les autres décisions administratives est requise, ce qui est moins contraignant. Ainsi, les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d'urbanisme n'auront qu'à prendre en compte les SDAGE.

La commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant que les documents d'urbanisme en cours d'élaboration ou de révision ainsi que les documents de planification environnementale doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les SDAGE (amendement n° 114). En conséquence, M. Jean-Michel Marchand a retiré un amendement, partiellement satisfait ; un amendement du même auteur visant à imposer aux décisions administratives n'intervenant pas dans le domaine de l'eau d'être compatibles avec les SDAGE est devenu sans objet. Sur ce dernier point, le rapporteur a estimé qu'une telle disposition serait extrêmement contraignante.

Le paragraphe VIII de cet article introduit, quant à lui, une disposition totalement nouvelle, qui résulte de l'article 6 de la directive-cadre. Celui-ci impose en effet aux Etats membres d'établir, dans chaque district, un ou plusieurs registres de toutes les zones nécessitant une protection spéciale au titre d'une législation communautaire spécifique concernant les eaux de surface ou souterraines, ou encore la conservation des habitats et des espèces directement dépendants de l'eau. La directive précise en outre que dans chaque district, ces registres, qui doivent être établis au plus tard le 22 décembre 2004, doivent être régulièrement réexaminés et mis à jour.

Ces dispositions sont intégralement reprises dans le projet de loi. Comme on l'a vu plus haut, ces registres auront à répertorier les zones « Natura 2000 », dont les zones de protection spéciale ou encore les zones spéciales de conservation. En revanche, les zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique n'auront pas à figurer sur les registres car elles ne sont pas de nature réglementaire.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer le renvoi à un décret pour déterminer la liste des catégories de zones protégées, une telle disposition étant en effet inutile puisque ces zones font déjà l'objet de dispositions législatives ou réglementaires particulières (amendement n° 115). Elle a également adopté un amendement du même auteur précisant qu'une synthèse des registres des zones protégées doit être annexée au SDAGE, ce qui devrait permettre une meilleure information du public (amendement n° 116).

Enfin, le paragraphe IX renvoie les conditions d'application de cet article à un décret en Conseil d'Etat.

Article L.212-2 du code de l'environnement

Élaboration et mise à jour des SDAGE

L'actuel article L. 212-2 du code de l'environnement précise la procédure d'élaboration et de révision des SDAGE, celle-ci se déroulant selon les étapes suivantes :

- sur l'initiative du préfet coordonnateur de bassin (1), le SDAGE est élaboré par le comité de bassin ;

- lors de l'élaboration du schéma par ce dernier, sont associés les représentants de l'Etat, des conseils régionaux et des conseils généraux ;

- le comité de bassin arrête un projet de schéma ;

- il recueille l'avis des conseils régionaux et généraux sur ce projet, ces avis étant réputés favorables à l'expiration d'un délai de quatre mois ;

- le SDAGE est adopté par le comité de bassin ;

- le préfet coordonnateur de bassin approuve le SDAGE ;

- le SDAGE est tenu à la disposition du public.

La procédure de révision est similaire à la procédure d'élaboration du schéma directeur.

Le paragraphe I de l'article L. 212-2 du code de l'environnement proposé par le projet de loi reprend intégralement ces dispositions, en limitant toutefois leur champ à la seule procédure d'élaboration des schémas directeurs. On peut en outre noter que le projet de loi prévoit que le SDAGE est désormais approuvé par le préfet coordonnateur de bassin et non plus par « l'autorité administrative ». Cette légère modification rédactionnelle ne change rien à la pratique déjà établie, mais permet d'affirmer plus nettement le rôle du préfet coordonnateur, conformément aux dispositions de l'article 3 de la directive cadre, relatif aux autorités de districts hydrographiques.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à associer à l'élaboration du SDAGE des représentants des chambres consulaires, des syndicats de personnels, des établissements publics concernés ainsi que des fédérations d'associations de protection de la nature et des consommateurs. Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement et a fait valoir que ne pouvaient être associés à l'élaboration des SDAGE que des représentants des élus, les autres personnes pouvant être consultées ultérieurement une fois que le projet de schéma est arrêté - ce projet de schéma doit en effet être mis à disposition du public pendant une période ne pouvant être inférieure à six mois. Le rapporteur a indiqué qu'il présentait lui-même un amendement visant à associer à l'élaboration des schémas les représentants des chambres consulaires, ces dernières étant des établissements publics de l'Etat, composées de personnes élues. Après que M. Serge Poignant eut estimé souhaitable que soient également associés les établissements publics concernés, M. Pierre Micaux s'est déclaré opposé à l'amendement de M. Jean-Michel Marchand, seuls les élus devant être, à ses yeux, associés à l'élaboration du SDAGE.

M. Jean-Michel Marchand a alors rappelé les avancées réalisées dans le projet de loi relatif à la démocratie de proximité en matière de participation du public, et a estimé nécessaire, dans un souci de cohérence, d'associer en conséquence plus étroitement le monde associatif à l'élaboration des SDAGE. M. Robert Galley, rappelant son expérience de président de comité de bassin, a souligné combien il était actuellement difficile d'élaborer ces schémas et n'a pas estimé utile d'y associer les personnes proposées par M. Jean-Michel Marchand, celles-ci pouvant être consultées une fois le projet de schéma arrêté. Puis, M. Claude Gatignol a regretté que soient exclus de la procédure d'association les syndicats chargés de la gestion de l'eau. M. Serge Poignant ayant estimé intéressant d'associer à l'élaboration des schémas l'ensemble des collectivités concernées, y compris les communes, le rapporteur a indiqué qu'une telle disposition supposerait de consulter l'ensemble des communes, soit environ 6 000 par bassin, ce qui semble difficilement praticable ; il a rappelé que celles-ci pouvaient en tout état de cause être consultées une fois le projet de schéma arrêté. Suivant son rapporteur, la commission a rejeté cet amendement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à inclure dans les personnes associées à l'élaboration du SDAGE les chambres consulaires, après que M. Claude Gatignol eut déclaré se rallier pleinement à ce dispositif (amendement n° 117).

Les paragraphes II à VIII de cet article traitent, quant à eux, de la procédure de mise à jour des schémas directeurs. Celle-ci est paradoxalement plus lourde et plus complexe que la procédure d'élaboration, notamment en raison de la part faite aux observations du public. Une telle dissymétrie des procédures n'étant pas justifiée, votre rapporteur présente des amendements visant à « calquer » la procédure d'élaboration des SDAGE sur celle de leur mise à jour, plus complète et garante d'une meilleure participation du public.

En conséquence, la commission a examiné deux amendements du rapporteur visant à aligner les règles d'élaboration des SDAGE sur celles, plus contraignantes, prévues pour leur révision. Après que le rapporteur eut indiqué que ces dispositions pourraient notamment s'appliquer en Corse qui n'est pas encore dotée d'un SDAGE, la commission a adopté ces deux amendements (amendements n°s 118 et 119).

S'agissant des SDAGE existant à la date de la publication de la présente loi (paragraphe II), il est prévu une mise à jour de leur contenu, par le comité du bassin, à l'initiative du préfet coordonnateur de bassin.

Celle-ci devra intervenir au plus tard le 22 décembre 2009 et être précédée, au plus tard le 22 décembre 2004, d'une analyse du bassin et d'une analyse économique des utilisations de l'eau, cette tâche revenant aux comités de bassin.

D'après les informations fournies à votre rapporteur, ces analyses, proches d'un « état des lieux », devraient débuter dès le début de l'année 2002 et seront annexées aux SDAGE mis à jour.

Conformément aux dispositions de l'article 13 de la directive cadre, le paragraphe III de cet article prévoit que les SDAGE doivent être mis à jour tous les six ans, alors qu'actuellement, la révision des schémas directeurs n'est soumise à aucune condition de délai. Le même paragraphe précise en outre que les analyses précitées sont remises à jour, si le préfet coordonnateur de bassin l'estime nécessaire, trois ans au moins avant chaque mise à jour des SDAGE.

S'agissant de la procédure de mise à jour proprement dite, elle intègre l'ensemble des dispositions prévues à l'article 14 de la directive cadre et se déroulera selon les étapes suivantes dès lors que le préfet coordonnateur de bassin aura pris l'initiative d'une mise à jour du SDAGE :

- le comité de bassin associe à la mise à jour du SDAGE les mêmes personnes que pour l'élaboration (représentants de l'Etat, des conseils régionaux et généraux), ainsi que les chambres consulaires (paragraphe IV) ;

- le comité de bassin soumet aux observations du public un calendrier et un programme de travail trois ans aux moins avant la date prévisionnelle d'approbation du schéma mis à jour, une synthèse des questions importantes se posant dans le bassin au moins deux ans avant la même date et un projet de SDAGE un an au moins avant la même date (paragraphe V) ;

- après information par voie de presse, ces documents sont mis à disposition du public, qui peut formuler des observations, pendant au moins six mois (paragraphe VI). Cette disposition étant pour une grande part redondante avec celle prévue par le paragraphe précédent, il semble peu justifié de les distinguer. En conséquence, la commission a adopté trois amendements du rapporteur visant à fusionner, dans le paragraphe V de cet article, les dispositions de celui-ci et celles du paragraphe VI, ce dernier étant pour sa part supprimé, dans un souci de clarification rédactionnelle (amendements nos 120, 121 et 122)

- à l'issue du délai de six mois, le projet peut être éventuellement modifié pour tenir compte des observations du public. Le projet ainsi modifié est arrêté par le comité de bassin, puis soumis pour avis aux conseils régionaux et généraux et aux chambres consulaires, ces avis étant réputés favorables à l'expiration d'un délai de quatre mois (paragraphe VII) ;

- le SDAGE mis à jour est enfin adopté par le comité de bassin puis approuvé par le préfet coordonnateur de bassin. On notera que contrairement à ce qui est prévu pour la procédure d'élaboration, il n'est pas précisé que le SDAGE mis à jour est tenu à la disposition du public.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à préciser que le schéma directeur évalue l'application de ses propres objectifs ainsi que les autres décisions concernant le domaine de l'eau. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, ayant estimé qu'un tel dispositif était trop contraignant et qu'il proposait par ailleurs un amendement visant à instituer, au sein du comité de bassin, un débat annuel sur l'application du SDAGE, la commission a rejeté cet amendement. Puis, elle a adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que le SDAGE mis à jour doit être tenu à la disposition du public (amendement n° 123).

Enfin, le paragraphe IX de cet article prévoit qu'il revient au comité de bassin de surveiller la mise en _uvre du SDAGE, ce qui constitue une nouveauté, aucune disposition de ce type n'existant actuellement. Il semble pourtant légitime que l'organe ayant élaboré le SDAGE puisse s'assurer des conditions d'application de ce document. Le projet de loi introduit donc une avancée qu'il convient de saluer, mais également de renforcer. La commission a donc adopté un amendement du rapporteur précisant qu'un débat annuel est organisé, au sein du comité de bassin, sur les conditions de mise en _uvre du SDAGE (amendement n° 124).

Les modalités d'application de l'article L. 212-2 du code de l'environnement sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat (paragraphe X).

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 2

Dispositions de coordination

La commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 2 et visant à modifier les dispositions du code de l'urbanisme relatives aux schémas de cohérence territoriale, aux plans locaux d'urbanisme et aux cartes communales, afin de préciser que ces documents, lorsqu'ils sont en cours d'élaboration ou de révision, doivent être rendus compatibles avec les dispositions du SDAGE et celles du SAGE (amendement n° 125).

Article 3

(article L. 212-3 du code de l'environnement)

Définition, contenu et élaboration des schémas d'aménagement
et de gestion des eaux (SAGE)

L'actuel article L. 212-3 du code de l'environnement prévoit que les SAGE sont élaborés « dans un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins correspondant à une unité hydrographique ou à un système aquifère ». Leur périmètre est déterminé par les SDAGE ou à défaut par le préfet, après consultation ou sur proposition des collectivités territoriales et après consultation du comité de bassin. Les SAGE sont donc obligatoires. Ils ont à fixer les objectifs généraux d'utilisation, de mise en valeur et de protection quantitative et qualitative des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques, ainsi que de préservation des zones humides, celles-ci étant clairement définies à l'article L. 211-1 du code de l'environnement (2).

L'article du projet de loi reprend l'ensemble des dispositions existantes relatives au contenu des SAGE, ainsi que le principe d'une adéquation entre SAGE et unité hydrographique, reconnu par ailleurs par le Conseil d'Etat dans son arrêt Union juridique Rhône Méditerranée du 30 juillet 1997.

Deux modifications de taille sont toutefois apportées au dispositif actuel. En premier lieu, l'élaboration de SAGE devient facultative, afin de tirer les conséquences du manque de succès de ces documents, puisqu'on ne compte que sept schémas approuvés, cinquante-trois en cours d'élaboration et seulement cinq en instance d'approbation préfectorale. En second lieu, il ne revient plus au comité de bassin de fixer le périmètre des SAGE, cette compétence étant désormais dévolue au préfet. Ce dernier arrête donc le périmètre du SAGE, à son initiative ou sur proposition des collectivités territoriales, après consultation des collectivités territoriales intéressées et du comité de bassin.

L'initiative d'élaborer un schéma n'est pourtant pas partagée entre le préfet coordonnateur de bassin et les collectivités locales intéressées. En effet, actuellement, le préfet ne prend l'initiative de délimiter le périmètre du SAGE qu'en accord avec le président de l'association départementale des maires et du conseil général (article 3 du décret n° 92-1042 du 24 septembre 1992). En outre, seule la commission locale de l'eau est responsable de l'élaboration du SAGE et celle-ci ne peut être mise en place que si les élus manifestent la volonté de créer un schéma, le préfet n'ayant pas le pouvoir de désigner d'office les membres de cette commission ou de leur enjoindre d'élire un président.

Votre rapporteur s'interroge sur la pertinence du choix qui a été fait dans le projet de loi, de donner un caractère facultatif aux SAGE, ces derniers pouvant se révéler des instruments bien adaptés de la gestion locale de la ressource en eau, notamment dans les zones sensibles (qu'il s'agisse de risques d'inondations ou de problèmes de rareté ou de fragilité de la ressource). Il peut être souhaitable, dans certains cas, de systématiser le recours aux SAGE, ce qui est exclu par la rédaction actuelle du projet de loi.

La commission a examiné un amendement de M. Jacques Fleury tendant à maintenir la rédaction actuelle du premier alinéa de l'article L. 212-3 du code de l'environnement afin que l'élaboration de schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) soit obligatoire et non pas facultative.

M. Jacques Fleury a précisé que la commission d'enquête sur les causes des inondations répétitives ou exceptionnelles et sur les conséquences des intempéries avait conclu à l'utilité des SAGE, là où ils existent, et qu'il convenait donc non de renoncer à ces instruments mais de tirer les conséquences des difficultés empêchant leur création, dont la cause principale est l'absence de structure porteuse chargée de leur élaboration. Il a ajouté que cet amendement ne remettait en revanche pas en cause la nouvelle procédure de délimitation du périmètre des SAGE par le préfet proposée par le projet de loi.

Après que le rapporteur eut estimé que l'amendement suivant, présenté par M. Jean-Michel Marchand, permettait de prendre en compte la préoccupation exprimée par M. Jacques Fleury en conservant une plus grande souplesse, M. Jacques Fleury a retiré son amendement.

La commission a ensuite été saisie d'un amendement de M. Jean-Michel Marchand qui, d'une part, précise que la délimitation du périmètre du SAGE par le préfet n'est possible que sur la proposition de collectivités territoriales et qui, d'autre part, permet au SDAGE ou au préfet, après avis du comité de bassin, de déterminer les sous-bassins ou les groupements de sous-bassins pour lesquels un SAGE est nécessaire. Cet amendement permet également au préfet de soumettre à la procédure d'approbation un projet de SAGE lorsque celui-ci a été considéré comme nécessaire et n'a pas été élaboré dans le délai imparti.

M. Jean-Michel Marchand a précisé que cet amendement allait dans le même sens que celui proposé précédemment par M. Jacques Fleury et permettait notamment de maintenir le caractère obligatoire de l'élaboration des SAGE, là où ils sont nécessaires.

Après que M. Félix Leyzour s'est interrogé sur les causes de l'échec des SAGE, M. Pierre Ducout a douté de la portée pratique d'une disposition rendant l'élaboration de ces schémas obligatoire, en mettant l'accent sur la diversité des situations locales.

Le rapporteur a souligné l'intérêt de l'amendement de M. Jean-Michel Marchand qui permet à la fois de rendre l'élaboration des SAGE obligatoire là où ils sont nécessaires et de donner au préfet des pouvoirs dans l'hypothèse où cette élaboration tarderait.

Après que M. Jean Launay eut précisé que l'essentiel lui paraissait de préserver la possibilité de rendre l'élaboration de ces schémas obligatoire, la commission a adopté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand (amendement n° 126).

La commission a ensuite adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4

Composition des commissions locales de l'eau

Ainsi que le précise l'actuel article L. 212-4 du code de l'environnement, les commissions locales de l'eau, créées par le préfet, sont chargées de l'élaboration, de la révision et du suivi de l'application des SAGE.

Aux termes du même article, elles sont actuellement composées :

- pour moitié, de représentants des collectivités territoriales et d'établissements publics locaux, ces derniers pouvant donc être des établissements publics territoriaux de bassin ;

- pour un quart, de représentants des usagers, des propriétaires riverains, des organisations professionnelles et des associations concernées, celles-ci devant exister depuis au moins cinq ans à la date de la création de la commission ;

- pour un quart, de représentants de l'Etat et de ses établissements publics.

On a vu précédemment que seulement sept SAGE ont été élaborés ; cette situation n'est pas sans lien avec les difficultés rencontrées pour constituer des commissions locales de l'eau, même si aujourd'hui celles-ci sont environ au nombre de soixante. Afin de rendre le recours aux SAGE plus simple et pour rendre ces derniers plus attractifs, cet article du projet de loi vise à assouplir les règles de composition de ces commissions, dont la constitution est obligatoire préalablement à l'élaboration des schémas, en modifiant le paragraphe II de l'article L. 212-4 du code de l'environnement.

Ainsi, la ventilation des membres de la commission par catégorie est revue, le dernier alinéa de cet article se bornant à préciser que les catégories ne représentant pas l'Etat et ses établissements publics détiennent au moins trois quarts du nombre total des sièges.

Par ailleurs, de légères modifications sont apportées. Il est précisé que les établissements publics locaux pouvant désigner des représentants sont situés en tout ou partie dans le périmètre du SAGE, ce qui lève toute ambiguïté. Il est également précisé que seuls les établissements publics à caractère administratif de l'Etat peuvent désigner des représentants, cette faculté n'étant pas accordée aux établissements publics à caractère industriel et commercial, qui sont en réalité des usagers et doivent, à ce titre, désigner leurs représentants dans la catégorie correspondante.

Il est souhaitable que les établissements publics territoriaux de bassin (EPTB), acteurs incontournables en matière d'aménagement et de gestion de la ressource en eau, puissent désigner des représentants au sein de la commission locale de l'eau. Or, la rédaction proposée permet aux seuls établissements publics locaux d'avoir de tels représentants, ce qui exclut les EPTB ayant pris la forme d'une entente interdépartementale.

La commission a donc adopté un amendement du rapporteur étendant la composition des commissions locales de l'eau aux représentants des ententes interdépartementales afin que les établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) puissent être représentés, quelle que soit leur forme juridique (amendement n° 127) ; elle a également adopté un amendement rédactionnel du même auteur (amendement n° 128).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Félix Leyzour étendant la composition des commissions locales de l'eau aux représentants des personnels assurant le service public de l'eau.

M. Félix Leyzour a précisé qu'il lui paraissait utile d'assurer la présence dans ces organismes de salariés qui ont une bonne connaissance des problèmes de terrain.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a rappelé que les commissions locales de l'eau assuraient l'élaboration, la révision et le suivi de l'application des SAGE et devaient donc prendre en compte l'ensemble des problématiques liées à l'eau. Il a donc estimé qu'il n'était pas souhaitable d'associer à ces commissions les seuls salariés participant à la mise en _uvre du service public de l'eau dont il a jugé qu'ils avaient plutôt leur place au sein des commissions consultatives des services publics locaux.

M. Félix Leyzour a réaffirmé son attachement à cet amendement en notant que la rédaction actuelle du projet de loi permettait la représentation d'intérêts très divers au sein des commissions locales de l'eau et qu'il ne lui paraissait donc pas légitime d'en exclure les salariés.

Le rapporteur, rejoint par M. Pierre Ducout, a précisé que les salariés assurant le service public de l'eau n'étaient pas les seuls concernés par la gestion de cette ressource et a cité l'exemple des salariés travaillant dans des barrages hydroélectriques. Il a donc proposé un amendement permettant la représentation des organisations syndicales de salariés au sein des commissions locales de l'eau.

Après que le président eut indiqué qu'il était favorable à cet amendement, la commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 129) et M. Félix Leyzour a en conséquence retiré son amendement.

La commission a ensuite adopté l'article 4 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 4

Prise en compte des SAGE par les documents d'urbanisme
en cours d'élaboration ou de révision et par les documents
de planification environnementale

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 4, disposant que les documents d'urbanisme en cours d'élaboration ou de révision ainsi que les documents de planification environnementale doivent être rendus compatibles avec le SAGE (amendement n° 130).

Article additionnel après l'article 4

Précision relative au contenu des SAGE

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand portant article additionnel après l'article 4 et visant à préciser le contenu des SAGE en prévoyant que ces schémas analysent les modalités de réalisation des actions qu'ils prévoient, évaluent les moyens techniques et financiers nécessaires et établissent les indicateurs permettant l'évaluation des actions prévues (amendement n° 131).

Article 5

Programmes pluriannuels de mesures

L'article 11 de la directive cadre impose aux Etats membres d'élaborer « pour chaque district hydrographique [...] un programme de mesures » afin d'atteindre les objectifs fixés à l'article 4 de la même directive, à savoir ceux relatifs à la qualité et à la quantité des eaux, qui ont été assignés aux SDAGE par l'article 2 du projet de loi (voir plus haut).

La directive précise en outre que ces programmes de mesures doivent être établis au plus tard neuf ans après sa date d'entrée en vigueur, soit le 22 décembre 2009, puis réexaminés et, si nécessaire, mis à jour tous les six ans.

Cet article du projet de loi vise à introduire ces nouvelles dispositions dans l'article L. 213-3 du code de l'environnement, relatif aux compétences et aux conditions d'intervention des préfets coordonnateurs de bassins. Aux termes de ce nouvel alinéa, il reviendra donc à ces derniers d'élaborer et adopter, au plus tard le 22 décembre 2009, après avis du comité de bassin, un programme pluriannuel de mesures. Comme le requiert la directive cadre, ce programme devra contribuer à la réalisation des objectifs fixés par les SDAGE et être mis à jour tous les six ans.

On peut noter que la directive cadre ne précise pas quelle est l'autorité en charge de l'élaboration des programmes de mesures. Le projet de loi fait le choix d'une extension des compétences des préfets coordonnateurs de bassin, qui correspondent aux « autorités de district hydrographique » dont la directive exige l'institution. L'esprit de la directive cadre est ainsi bien traduit, puisque dans son article 3, elle précise qu'il revient aux « autorités de district » d'appliquer les règles qu'elle prévoit, au sein de chaque district hydrographique. L'institution de ces programmes de mesures devrait utilement compléter les programmes d'interventions des agences de l'eau, et permettre une meilleure application des dispositions contenues dans les SDAGE.

La commission a été saisie d'un amendement de M. Jean-Michel Marchand fixant au 22 décembre 2004 la date limite d'adoption d'un ou des programmes de mesures contribuant à la mise en _uvre des SDAGE par le préfet coordonnateur de bassin.

M. Jean-Michel Marchand a indiqué que cet amendement visait à transposer l'article 6 de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau qui prévoit l'adoption de ces programmes avant 2004. Il a en outre précisé qu'une adoption précoce de ces programmes était opportune tant pour mettre en _uvre rapidement le principe pollueur-payeur et le principe de récupération des coûts des services liés à l'utilisation de l'eau, que pour permettre leur évaluation aussi rapidement que possible.

Le rapporteur a rappelé que l'article 5 du projet de loi concernait les programmes de mesures mettant en _uvre les SDAGE dont la directive cadre impose l'adoption avant le 22 décembre 2009 et non les registres des zones protégées, visés à l'article 6 de la directive et dont l'élaboration est imposée avant le 22 décembre 2004, disposition d'ailleurs transposée par le paragraphe VIII de l'article L. 212-1 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de l'article 2 du projet de loi. Il a donc indiqué qu'il était défavorable à l'adoption de cet amendement, que la commission a en conséquence rejeté.

Puis, elle a adopté quatre amendements identiques, l'amendement n° 27 de M. Christian Jacob et trois amendements respectivement déposés par le rapporteur, M. Claude Gaillard et Mme Marcelle Ramonet prévoyant la consultation des conseils généraux, des conseils régionaux et des chambres consulaires sur les programmes pluriannuels de mesures mettant en _uvre les SDAGE (amendement n° 132).

La commission a ensuite adopté l'article 5 ainsi modifié.

Article 6

Communauté locale de l'eau

L'actuel article L. 213-9 du code de l'environnement prévoit que « pour faciliter la réalisation des objectifs » prévus par le SAGE, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer une communauté locale de l'eau. Celles-ci ne peuvent donc être constituées qu'après approbation du schéma. Ces communautés sont des établissements publics régis par les titres Ier et II du livre II et des livres IV et VII de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales.

Elles peuvent donc prendre la forme d'établissements publics de coopération intercommunale tels que des syndicats de communes, d'institutions interdépartementales, ou encore de syndicats mixtes. Leur périmètre d'intervention est limité à celui du SAGE.

Ces dispositions n'ont pas connu d'application effective, puisqu'aucune communauté locale de l'eau n'a été créée à ce jour ; on ne compte que deux projets de communautés à l'étude et quelques syndicats de rivières envisagent par ailleurs de modifier leurs statuts pour se constituer en communautés locales de l'eau.

L'article 6 du projet de loi modifie l'article L. 213-9 du code de l'environnement, afin de permettre la constitution d'une communauté locale de l'eau dès la fixation du périmètre du SAGE par le préfet, la communauté pouvant ainsi avoir pour mission de faciliter non seulement la réalisation des objectifs arrêtés dans un SAGE, mais également l'élaboration du schéma et le suivi de son application.

Elle interviendra ainsi davantage en amont, et en sa qualité de maître d'ouvrage des études nécessaires à l'élaboration du SAGE, devrait rendre ce dernier plus attractif. En effet, les collectivités ont parfois du mal à élaborer un tel document ; en outre, la commission locale de l'eau n'a pas de personnalité juridique et ne peut donc être maître d'ouvrage de l'élaboration du SAGE. Celle-ci doit donc identifier une « structure porteuse », étape qui est souvent source de retard. La possibilité offerte de constituer une communauté locale de l'eau dès l'adoption du périmètre du SAGE devrait donc faciliter sensiblement la tâche de la commission locale de l'eau.

Comme cela est déjà le cas, il est prévu que la communauté locale de l'eau pourra, après approbation du SAGE, exercer tout ou partie des compétences énumérées à l'article L. 211-7 du code de l'environnement.

C'est ainsi qu'elle pourra utiliser les articles L. 151-36 à L. 151-40 du code rural, c'est-à-dire prescrire ou exécuter des travaux ayant un caractère d'intérêt général ou d'urgence, et visant l'aménagement d'un bassin ou d'un sous-bassin, l'entretien et l'aménagement d'un cours d'eau non domanial et de ses accès, l'approvisionnement en eau, la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, la défense contre les inondations et contre la mer, la lutte contre la pollution, la protection et la conservation des eaux superficielles et souterraines, la protection et la restauration des sites, écosystèmes et zones humides, et enfin les aménagements hydrauliques concourant à la sécurité civile. La communauté locale de l'eau sera donc un maître d'ouvrage « à part entière », disposant d'un champ étendu de compétences, de l'élaboration du SAGE jusqu'à la réalisation des aménagements qu'il préconise.

Conformément à l'avis du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury supprimant la possibilité de créer une communauté locale de l'eau pour élaborer ou mettre en _uvre les SAGE, après que son auteur eut précisé que cet amendement traduisait l'une des propositions de la commission d'enquête sur les inondations - celle-ci a en effet constaté que cette possibilité n'avait jamais été utilisée et a estimé préférable de réserver l'élaboration et la mise en _uvre des SAGE aux établissements publics territoriaux de bassin (amendement n° 133).

Puis, la commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article 7

Compétence des groupements d'intérêt public, des ententes interdépartementales et des EPTB comme maîtres d'ouvrage du SAGE

Cet article du projet de loi tire les conséquences de l'inadaptation des dispositions prévues aux actuels articles L. 213-10 et L. 213-11 du code de l'environnement aux besoins des collectivités territoriales.

Ceux-ci prévoient que peuvent être créés des établissements publics à vocation de maîtrise d'ouvrage, auxquels il n'a jamais été recouru en pratique, notamment en raison de la lourdeur de leur procédure de constitution.

En effet, ceux-ci sont des établissements publics à caractère administratif, placés sous la tutelle de l'Etat, et sont créés par décret en Conseil d'Etat, « après consultation des personnes publiques et privées intéressées ». En outre, ces établissements ne peuvent être créés qu'après consultation des conseils généraux intéressés si une majorité des communes concernées émet un avis défavorable. Des règles strictes s'imposent quant à la composition de leur organisme directeur, qui doit comprendre « des représentants de toutes les catégories de personnes publiques et privées intéressées à l'accomplissement de son objet ».

L'ensemble de ces contraintes a totalement découragé les initiatives pour créer de tels établissements. En revanche, de nombreux établissements publics « autoproclamés » établissements publics territoriaux de bassin (EPTB), ont été créés dans le but d'intervenir dans le domaine de la gestion et de l'aménagement des cours d'eau, sur la base des dispositions prévues dans le code général des collectivités territoriales (syndicats mixtes, ententes ou institutions interdépartementales...).

Le présent article du projet de loi tire les conséquences du manque de succès des établissements publics à vocation de maîtrise d'ouvrage et vise à remplacer les dispositions qui y sont relatives par un dispositif autorisant le recours à des groupements d'intérêt public (GIP).

C'est ainsi que dans son paragraphe I il procède à une redénomination de la section 6 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de l'environnement, afin de faire désormais référence à des « organismes à vocation de maîtrise d'ouvrage ».

C'est son paragraphe II qui introduit la possibilité, pour les collectivités territoriales, de constituer un GIP, par une rédaction globale de l'article L. 213-10 du code de l'environnement. Par ailleurs, il permet aux ententes interdépartementales et aux EPTB de réaliser des études et recherches préalables au SAGE pour la commission locale de l'eau, par une rédaction globale de l'article L. 213-11 du code de l'environnement.

Article L. 213-10 du code de l'environnement

Possibilité de constituer un GIP pour élaborer un SAGE

Le premier alinéa de cet article ouvre la possibilité aux communes et aux groupements de communes concernés par le périmètre ou les domaines d'intervention du SAGE de créer un groupement d'intérêt public, sur le modèle du groupement d'intérêt public de développement local prévu par l'article 25 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. La rédaction retenue dans le présent article est d'ailleurs identique à celle qui avait été adoptée alors.

Le GIP créé ne doit donc pas être confondu avec le GIP prévu à l'article L. 131-8 du code de l'environnement, dit GIP « Barnier ». En effet, ce dernier peut être constitué entre personnes de droit public ou de droit privé, pour exercer des activités dans le domaine de l'environnement. Le GIP visé par le présent article ne peut, quant à lui, être constitué qu'entre collectivités locales et/ou groupements de collectivités.

Créé par convention, après avis de la commission locale de l'eau, il a pour objet de « réaliser les études et les recherches nécessaires à l'élaboration » du SAGE, et ne peut donc intervenir qu'en amont du schéma, contrairement aux communautés locales de l'eau. Il a donc vocation à être une structure plus légère, puisqu'il ne peut intervenir en tant que maître d'ouvrage d'aménagements préconisés par le SAGE, et plus souple, puisqu'il est soumis à des règles constitutives et de fonctionnement moins contraignantes que pour un établissement public.

Cette nouvelle disposition offre donc une alternative à la constitution d'associations « loi 1901 », solution parfois mise en _uvre par les collectivités locales alors qu'elle comporte de réels risques de gestion de fait. La possibilité de recourir à un GIP devrait désormais assurer une plus grande sécurité juridique aux études réalisées en amont et donc au schéma d'aménagement et de gestion des eaux lui-même.

Le deuxième alinéa du présent article reprend intégralement les dispositions prévues pour les GIP de développement local précités. Ainsi, la convention constitutive du GIP, qui doit être approuvée par le préfet, règle son organisation, ses conditions de fonctionnement ainsi que les modalités de participation de ses membres et les conditions d'accueil de nouveaux membres.

De même que les GIP de développement local, il ne comprend pas de commissaire du Gouvernement et obéit aux règles de la comptabilité publique. Enfin, comme le prévoyait l'article 25 de la loi du 25 juin 1999, ses actes sont exécutoires dès leur transmission au préfet, qui peut, dans les deux mois, les déférer au tribunal administratif lorsqu'il les estime contraires à la légalité (troisième alinéa).

Il revient à un décret en Conseil d'Etat de déterminer les conditions d'application de cet article (quatrième alinéa)

La commission a été saisie de deux amendements, l'amendement n° 3 de M. Jacques Fleury et un amendement de M. Jean-Michel Marchand.

M. Jacques Fleury a expliqué que l'amendement n° 3 traduisait une proposition de la commission d'enquête sur les inondations et visait à donner une consécration législative aux établissements publics territoriaux de bassin (EPTB). Il a précisé que cet amendement permettrait de faire des EPTB les maîtres d'ouvrages privilégiés de la gestion de l'eau au niveau des bassins versants et des sous-bassins en supprimant la possibilité ouverte par le projet de loi de confier cette tâche à des groupements d'intérêt public. Il a ajouté que l'amendement confiait au préfet coordonnateur de bassin le soin de délimiter le périmètre de l'EPTB et qu'il garantissait en outre la préservation de la diversité d'organisation des EPTB existants en faisant référence aux dispositions concernant les ententes interdépartementales, les institutions ou organismes interdépartementaux et les syndicats mixtes.

M. Jean-Michel Marchand a indiqué que son amendement prévoyait le soutien, par les collectivités territoriales, des organismes constitués pour effectuer l'entretien et la gestion douce des cours d'eau et de leurs bassins versants, en précisant que ceux-ci pouvaient se constituer en sociétés coopératives d'intérêt collectif, formule juridique issue du monde de l'économie solidaire dont il a jugé que le développement devait être encouragé.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a exprimé ses réserves sur la portée normative de l'amendement de M. Jean-Michel Marchand et son avis favorable à l'adoption de l'amendement n° 3 en soulignant que les EPTB avaient fait la preuve de leur efficacité.

M. Pierre Ducout a admis que les EPTB pouvaient constituer un instrument efficace mais a jugé qu'il fallait préserver la possibilité de recourir à d'autres types de structures là où la situation locale le justifiait. Il a, en conséquence, jugé opportun que l'amendement n'impose pas la création de ces établissements publics mais se borne à ouvrir la possibilité qu'ils soient mis en place.

M. Jean Launay a rappelé que la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre la pollution prévoyait la création d'établissements publics à vocation de maîtrise d'ouvrage, en pratique jamais mis en place, aux côtés des agences financières de bassin et des comités de bassin et qu'il convenait de rétablir l'équilibre envisagé par cette loi en confiant cette mission aux EPTB dont l'expérience a montré l'efficacité, là où ils existent.

M. Pierre Ducout a mis l'accent sur la diversité des situations possibles le long d'un fleuve et a jugé qu'une structure adaptée sur un segment d'un cours d'eau n'était pas nécessairement la plus pertinente sur une autre portion de celui-ci.

La commission ayant adopté l'amendement n° 3, l'amendement de M. Jean-Michel Marchand est devenu sans objet.

Article L. 213-11 du code de l'environnement

Compétences des ententes interdépartementales et des EPTB
comme maîtres d'ouvrage

Cet article vise à permettre aux EPTB de s'impliquer, lorsqu'ils existent, dans l'élaboration des SAGE, ce qui n'est actuellement pas le cas. Or, ces organismes ont su faire la preuve de leur efficacité et sont aujourd'hui des acteurs majeurs dans la gestion et l'aménagement des cours d'eau. Il convenait donc de reconnaître leur rôle en la matière.

C'est ce que fait cet article, en prévoyant que la commission locale de l'eau peut confier la réalisation d'études, de recherches et d'actions nécessaires à l'élaboration et au suivi des SAGE, à des ententes interdépartementales ou à des EPTB constitués « en application des articles L. 5421-1 à  5421-6 ou des articles L. 5721-1 à L. 5721-1 » du code général des collectivités territoriales.

La mention explicite des EPTB dans le projet de loi n'en fait pas pour autant une nouvelle catégorie d'établissements publics, au sens de l'article 34 de la Constitution, en raison de la référence aux articles précités du code général des collectivités territoriales. Ainsi, il est établi que les EPTB, notion pour l'instant non définie, peuvent prendre la forme d'institutions interdépartementales ou de syndicats mixtes, ce qui est effectivement le cas aujourd'hui. La référence complémentaire aux ententes interdépartementales dans le même article permet ainsi de couvrir l'ensemble des formes juridiques prises par les EPTB, désormais expressément reconnus dans la loi.

Rien n'est dit sur le périmètre couvert par les EPTB. En effet, ils peuvent couvrir un territoire plus étendu que le périmètre d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux ; cela s'explique notamment par le fait qu'ils ont été le plus souvent constitués pour assurer la maîtrise d'ouvrage de travaux d'aménagement de grands fleuves.

La commission a examiné l'amendement n° 4 de M. Jacques Fleury prévoyant que la commission locale de l'eau peut confier l'élaboration ou la mise en _uvre du SAGE à un EPTB et, lorsqu'il n'en existe pas ou que le périmètre de celui-ci n'est pas pertinent, demander au préfet coordonnateur de bassin de délimiter le périmètre d'un nouvel établissement ou de modifier le périmètre de l'établissement existant.

Après que son auteur l'eut présenté en précisant qu'il mettait en _uvre l'une des propositions de la commission d'enquête sur les inondations, la commission a adopté l'amendement n° 4 conformément à l'avis du rapporteur.

La commission a ensuite adopté l'article 7 ainsi modifié.

Article 8

Création d'un comité de bassin à Mayotte

Le paragraphe I de l'actuel article L. 652-1 du code de l'environnement énumère l'ensemble des articles de ce code applicables à Mayotte.

Le présent article du projet de loi vise à compléter cette énumération par une référence à l'article L. 213-4 du code de l'environnement, qui dispose que « dans chaque département d'outre-mer, un comité de bassin [...] est associé à la mise en place des structures administratives qui se révèleraient nécessaires » pour la gestion de la ressource en eau. Il s'agit donc de créer un comité de bassin à Mayotte. Ce dispositif se révèle inutile, la modification proposée ayant déjà été retenue à l'article 51 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte.

Le rapporteur ayant indiqué que les dispositions de cet article figuraient à l'article 51 de la loi du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, la commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant cet article (amendement n° 134).

Chapitre II

ASSAINISSEMENT

Article 9

Soumission de la collecte des eaux usées des ateliers et manufactures
à autorisation préalable

L'actuel article L. 1311-5 du code de la santé publique prévoit que les dispositions contenues dans le livre III de la première partie de ce code, relatives à la protection de la santé et à l'environnement, ne sont pas applicables aux ateliers et manufactures, à l'exception des articles L. 1331-17 à L. 1331-24, qui traitent de l'insalubrité des locaux.

Le présent article du projet de loi complète ces dispositions, pour appliquer également aux ateliers et manufactures les dispositions de l'article L. 1331-10 du code de la santé publique. Celui-ci soumet à autorisation préalable de la collectivité propriétaire des ouvrages empruntés par les eaux usées, tous les déversements d'eaux usées. L'autorisation ainsi délivrée fixe les caractéristiques que doivent présenter ces eaux pour être reçues et peut être subordonnée à la participation de l'auteur du déversement aux dépenses de premier établissement, d'entretien et d'exploitation entraînées par la réception de ces eaux.

Il s'agit ainsi de réintégrer les ateliers et manufactures dans le droit commun afin de permettre aux collectivités locales de contrôler la qualité et la nature de leurs déversements dans leurs réseaux et leurs stations d'épuration. Tel n'est pas le cas aujourd'hui, ce qui n'est pas sans poser problème pour certaines installations, comme les stations d'épuration biologiques, dont le fonctionnement peut être sensiblement dégradé par certains déversements non contrôlés. La soumission de ces derniers à autorisation préalable constitue donc une réelle avancée.

La commission a adopté l'article 9 sans modification.

Article 10

Suppression d'une disposition obsolète

L'article L. 1331-1 du code de la santé publique prévoit que le raccordement des immeubles aux égouts est obligatoire dans un délai de deux ans à compter de la mise en service de l'égout et autorise les maires, par arrêté « approuvé par le représentant de l'Etat dans le département », à accorder des prolongations de délais.

L'approbation par le préfet d'un arrêté du maire ayant été supprimée par les lois de décentralisation, le présent article du projet de loi en supprime l'exigence dans l'article L. 1331-1 du code de la santé publique.

La commission a adopté l'article 10 sans modification.

Article 11

Contrôle de la conformité des branchements à l'égout par la commune
et suppression de la majoration de 10 % en cas de raccordement

L'actuel article L. 1331-2 du code de la santé publique dispose que pour les immeubles édifiés postérieurement à la mise en service d'un égout, la commune peut se charger, à la demande des propriétaires, de l'exécution de la partie des branchements située sous la voie publique. Il précise que dans ce cas, « ces parties de branchements sont incorporées au réseau public, propriété de la commune qui en assure désormais l'entretien et en contrôle la conformité ».

Cette rédaction a posé certains problèmes, le contrôle de conformité s'étant souvent limité à un contrôle de la conformité des installations aux réglementations en vigueur dans ce domaine ; les communes ne se sentaient en effet pas fondées à contrôler la conformité de l'exécution des branchements aux règles de l'art. Le paragraphe I de cet article du projet de loi vise à leur permettre, désormais, d'exercer un contrôle de la bonne exécution des travaux et de réduire ainsi tout risque de dysfonctionnement ultérieur, susceptible de dégrader leurs propres installations.

Le même article du code de la santé publique prévoit, par ailleurs, que la commune est autorisée à se faire rembourser par les propriétaires « tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux, suivant des modalités à fixer par délibération du conseil municipal ».

La pratique a montré que certaines communes majoraient systématiquement les dépenses à rembourser, sans motivation satisfaisante. Le paragraphe II du présent article vise à éviter tout risque de telles dérives, en supprimant la possibilité donnée à la commune d'opérer cette majoration de 10 % pour frais généraux, ce qui va dans le sens d'une plus grande transparence dans un secteur considéré comme trop souvent opaque.

La commission a été saisie d'un amendement du rapporteur permettant de fixer forfaitairement, et sans tenir compte de la longueur du branchement, le montant du remboursement dû par chaque propriétaire bénéficiant de travaux de raccordement aux égouts lorsque plusieurs branchements sont réalisés au cours d'une même opération. Le rapporteur a précisé que cet amendement visait, dans un souci de sécurité juridique, à donner une base légale à une pratique répandue. M. Serge Poignant ayant jugé que cette possibilité était déjà couverte par les dispositions en vigueur et que cet amendement était donc inutile, le rapporteur a indiqué que cette pratique était admise par la jurisprudence mais qu'en lui donnant une base légale, cet amendement apporterait une plus grande sécurité juridique.

M. Claude Gatignol, après avoir rappelé que la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains prévoyait que toute extension des réseaux de collecte des eaux usées devait être payée par la collectivité territoriale compétente, a souligné les difficultés en résultant dans les zones rurales. Le rapporteur a précisé que son amendement concernait les branchements aux réseaux existants et non l'extension de ceux-ci. M. Pierre Ducout a par ailleurs souligné que la disposition évoquée par M. Claude Gatignol avait donné lieu à une application parfois trop « tatillonne » sur le terrain, ce qui ne devait pas faire oublier les éléments de souplesse prévus par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. La commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 135).

Puis, elle a adopté l'article 11 ainsi modifié.

Article 12

Intervention des communes pour des raccordements
à l'égout sous terrain privé

L'actuel article L. 1331-4 du code de la santé publique met à la charge exclusive des propriétaires les ouvrages nécessaires pour amener leurs eaux usées à la partie publique du branchement et prévoit en outre qu'il revient à la commune de contrôler « la conformité des installations correspondantes ».

Le paragraphe I du présent article modifie cette rédaction, afin de permettre aux communes de contrôler « la bonne qualité d'exécution et le maintien en bon état de fonctionnement » des installations qui incombent aux particuliers. Il répond donc au même souci que l'article 11 du projet de loi, en étendant les compétences des communes au contrôle de la conformité des travaux aux règles de l'art, ce qui permet d'éviter tout dysfonctionnement ultérieur. Cette disposition permet en outre de procéder au contrôle de toutes les installations, qu'elles soient d'assainissement collectif ou non. En effet, à l'heure actuelle, seuls les dispositifs d'assainissement non collectif peuvent donner lieu à un contrôle, par la commune, de leur maintien en bon état, en application de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales.

La commission a adopté un amendement du rapporteur disposant que la commune peut fixer des prescriptions techniques aux ouvrages permettant d'amener les eaux usées à la partie publique des réseaux de collecte (amendement n° 136).

Quant au paragraphe II de cet article, il complète l'article L. 1331-4 du code de la santé publique, afin de donner une base légale à des pratiques relativement répandues, mais qui ne font pas partie des compétences communales expressément prévues par la loi.

Il permet donc aux communes ou à leur délégataire, lorsque le contrat de délégation de service public le prévoit, de réaliser ou faire réaliser, à la demande des propriétaires, les travaux de construction et de remise en état des branchements sous terrain privé jusqu'à la partie publique du branchement. Dans ce cas, la commune ou son délégataire se fait rembourser intégralement par le propriétaire les frais supportés, auxquels sont déduites les subventions éventuellement obtenues.

La mise en _uvre de ce dispositif n'est pas obligatoire mais facultative, la commune n'étant pas tenue de déférer à la demande du propriétaire. On peut penser qu'il sera néanmoins dans son intérêt de réaliser ou faire réaliser les travaux demandés, afin d'éviter toute erreur de branchement, toute fuite ou autres dysfonctionnements pouvant altérer la qualité du réseau public.

Cette nouvelle compétence devra être solidement encadrée, la commune ayant à intervenir en terrain privé. Ainsi, les travaux donneront lieu à la signature d'une convention entre la commune et le particulier intéressé, qui restera propriétaire des ouvrages. Il conviendra également d'encadrer les conditions d'intervention de la commune, en précisant que celle-ci agit dans le cadre du code des marchés publics, car il est probable que dans la plupart des cas elle fera appel à des entreprises pour effecteur les travaux.

La commission a donc adopté un amendement du rapporteur en ce sens (amendement n° 137).

La commission a ensuite adopté l'article 12 ainsi modifié.

Article 13

Intervention de la commune pour mettre hors d'état les fosses
sous terrain privé

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 1331-5 du code de la santé publique impose aux propriétaires de mettre hors d'état de servir ou de créer des nuisances les fosses septiques et les installations de même nature, dès lors que l'immeuble est raccordé au réseau public d'assainissement.

Or, en pratique, peu nombreux sont les propriétaires qui respectent cette obligation, ce qui n'est pas sans créer des nuisances parfois considérables.

Le présent article vise donc à compléter ce dispositif, sur le modèle du précédent article du projet de loi, en créant une nouvelle compétence communale facultative.

Il complète donc l'article L. 1331-5 du code de la santé publique, pour prévoir que la commune, agissant dans le cadre fixé par le code des marchés publics, ou son délégataire lorsque le contrat conclu avec lui le prévoit, peut faire réaliser, à la demande des propriétaires, les travaux de mise hors d'état des fosses. Comme cela a été prévu à l'article précédent, la commune ou son délégataire se fait rembourser intégralement par le propriétaire les frais entraînés, auxquels sont déduites les subventions éventuellement obtenues.

Il est probable qu'en pratique, la commune fera appel à des prestataires extérieurs pour effectuer ces travaux. Mais il convient également de prévoir les cas où elle se chargerait elle-même de cette opération. C'est pourquoi il conviendrait de préciser que la commune peut réaliser les travaux précités.

En conséquence, la commission a adopté un amendement du rapporteur ayant cet objet (amendement n° 138).

Puis, elle a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Article 14

Réduction du plafond de la participation au raccordement à l'égout

L'actuel article L. 1331-7 du code de la santé publique offre la possibilité aux communes d'astreindre les propriétaires d'habitations édifiées postérieurement à la mise en service de l'égout à verser une participation s'élevant aux maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose d'une installation d'assainissement individuel. Cette disposition est motivée par la prise en compte de l'économie ainsi réalisée par les propriétaires, qui évitent d'acquérir une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle.

Il revient au conseil municipal de déterminer les conditions de perception et le taux de la participation, qui dans la pratique, est parfois fixé à son plafond, soit 80 %, sans réel motif lorsque le réseau d'assainissement collectif existe depuis longtemps. En effet, dans un tel cas, la participation demandée excède largement les dépenses réelles pour la collectivité et peut être relativement élevée (24 000 francs en moyenne). En outre, cette participation peut s'ajouter au remboursement total ou partiel des travaux de raccordement prévu par l'article L. 1331-2 du code de la santé publique et précédemment évoqué à l'article 11 du projet de loi. Si la participation au raccordement à l'égout était tout à fait justifiée à l'époque où les communes devaient financer l'extension de leurs réseaux d'assainissement collectif, tel n'est plus le cas aujourd'hui, la plupart des réseaux d'assainissement collectif ayant vu leur périmètre se stabiliser.

Afin d'éviter ces pratiques malheureuses, le paragraphe I de cet article abaisse de 80 % à 50 % le taux plafond de la participation au raccordement à l'égout. Cette disposition permet en outre de prendre en compte l'augmentation du coût des installations d'assainissement non collectif qui ne justifiait plus un taux maximal de 80 %.

La commission a été saisie d'un amendement de M. Pierre Micaux visant à supprimer le premier paragraphe de cet article qui réduit le plafond de la participation au raccordement à l'égout que les communes peuvent exiger des propriétaires d'habitations édifiées postérieurement à la mise en service de l'égout.

M. Pierre Micaux a estimé que diminuer la participation pouvant être exigée des propriétaires d'habitations nouvelles revenait mécaniquement à accroître la redevance d'assainissement pesant sur les autres usagers.

Le rapporteur a rappelé que le coût des travaux de raccordement pouvait être répercuté sur leurs bénéficiaires et que la participation, dont le projet de loi prévoyait d'abaisser le plafond, lui semblait, d'une part, discutable sur le principe et, d'autre part, potentiellement excessive puisque calculée sur la base du coût d'une installation d'assainissement individuel qui a fortement augmenté. M. Jean-Claude Robert a estimé que l'assiette d'un prélèvement étant aussi importante que son taux, la modification de celui-ci n'avait qu'une portée limitée. La commission a rejeté l'amendement.

Par ailleurs, le paragraphe II supprime la disposition aux termes de laquelle une délibération du conseil municipal détermine les conditions de perception de cette participation. Cette précision est en effet inutile, car elle figure déjà à l'article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction prévue à l'article 31 du projet de loi (voir plus loin).

La commission a adopté l'article 14 sans modification.

Article 15

(article L. 1331-8 du code de la santé publique)

Pénalités financières en cas de non-respect de leurs obligations
en matière d'assainissement par les propriétaires

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 1331-8 du code de la santé publique prévoit que les propriétaires ne s'étant pas conformés à leurs obligations en matière de raccordement au réseau d'assainissement collectif ou en matière d'assainissement autonome sont astreints au paiement d'une somme au moins équivalente à la redevance qu'ils auraient payée au service public d'assainissement si leur immeuble avait été raccordé au réseau ou équipé d'une installation d'assainissement autonome réglementaire. Cette somme peut être majorée dans une proportion fixée par le conseil municipal, dans la limite de 100 %.

Ce dispositif s'est révélé, dans la pratique, peu dissuasif, notamment s'agissant du non-respect par les propriétaires de leurs obligations en matière d'assainissement autonome. En effet, la pénalité prévue est peu significative, car la redevance de contrôle des installations individuelles est relativement peu élevée.

C'est pourquoi le projet de loi procède à une réécriture globale de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique, en distinguant deux cas :

- si l'immeuble est raccordable mais non raccordé au réseau d'assainissement collectif, ou a été raccordé dans des conditions non conformes, la pénalité financière est au moins équivalente « à la redevance que le propriétaire aurait payée si son immeuble avait été régulièrement raccordé et peut être majorée dans la limite de 300 % ». Le relèvement du plafond de la majoration à 300 % devrait se révéler plus dissuasif que le dispositif actuel, sans pour autant être abusif. Il permettra en outre aux services d'assainissement de percevoir des recettes supplémentaires, ce qui pourrait compenser le passage de 80 à 50 % du taux plafond de la participation pour raccordement à l'égout, évoqué à l'article 14 du projet de loi ;

- si l'immeuble relève de l'assainissement non collectif, la pénalité représente 3 à 10 % du coût de fourniture et de pose d'une installation d'assainissement autonome réglementaire. La base de calcul de la pénalité a donc été modifiée, afin de la rendre plus significative. En effet, alors que la base actuelle de la pénalité pour installation d'assainissement autonome non réglementaire s'élève à quelques centaines de francs, parfois moins, le coût d'une telle installation s'élève à environ 40 000 francs. La somme à payer sera donc plus élevée et incitera donc les propriétaires à engager rapidement les travaux de mise en conformité, plutôt que d'être astreints à un paiement « à fonds perdus ».

Il est enfin précisé que ces sommes sont recouvrées comme les redevances dues par les usagers des services d'assainissement, c'est-à-dire comme des redevances pour services rendus, les communes pouvant donc établir le même rôle.

La commission a adopté un amendement de précision du rapporteur disposant que la pénalité financière susceptible d'être infligée aux propriétaires ne s'étant pas conformés à leurs obligations en matière d'assainissement n'est exigible, d'une part, que pour les immeubles ne bénéficiant pas d'une exonération à l'obligation de raccordement et, d'autre part, seulement au terme du délai de deux ans dans lequel le raccordement au réseau public doit être effectué lorsqu'il est possible (amendement n° 139).

La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur précisant que le produit des pénalités financières exigibles des propriétaires ne se conformant pas à leurs obligations d'assainissement est versé au budget d'assainissement. Le rapporteur a indiqué que cet amendement visait à préciser que ces sommes n'étaient pas perçues au profit du budget général de la commune. M. Serge Poignant a jugé que la séparation des budgets étant par ailleurs organisée, cet amendement était inutile et M. Jacques Pélissard a également estimé que cette disposition était superfétatoire. La commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 140)

Puis, elle a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Article 16

Coordination

L'actuel article L. 1331-9 du code de la santé publique dispose que sont recouvrées comme en matière de contributions directes les sommes dues par le propriétaire en vertu des articles L. 1331-2 (remboursement des travaux de branchement sous domaine public pris en charge par la commune), L. 1331-3 (remboursement des travaux de branchement, par l'intermédiaire d'une voie privée, pris en charge par la commune), L. 1331-6 (prise en charge, par le propriétaire, des frais occasionnés par les travaux d'office auxquels la commune a procédé pour le raccorder ou pour mettre hors d'état ses fosses), et L. 1331-7 (participation pour raccordement à l'égout).

Le paragraphe I du présent article vise à réparer un oubli en complétant cette énumération par les sommes mentionnées à l'article L. 1331-10 du code de la santé publique, c'est-à-dire celles dues pour participation, par l'auteur d'un déversement d'eaux usées non domestiques dans le réseau public d'assainissement, aux dépenses de premier établissement entraînées par la réception de ces eaux.

Par ailleurs, le paragraphe II de cet article supprime une disposition obsolète, aux termes de laquelle « les réclamations sont présentées et jugées comme en matière de contributions directes », pour préciser que les redevances et sommes citées plus haut sont établies par délibération du conseil municipal ou de l'assemblée délibérante de l'établissement public et sont soumises à l'avis de la commission consultative des services publics locaux.

La commission a adopté un amendement du rapporteur rectifiant une référence erronée (amendement n° 141).

Puis, elle a adopté l'article 16 ainsi modifié.

Article 17

(article L. 1331-10 du code de la santé publique)

Autorisation de déversement d'eaux usées non domestiques

Aux termes de l'actuel article L. 1331-10 du code de la santé publique, les déversements d'eaux usées non domestiques (par exemple celles des établissements publics, collectivités locales, agriculteurs et autres) dans les égouts publics doivent être préalablement autorisés par la collectivité propriétaire des « ouvrages qui seront empruntés par ces eaux usées avant de rejoindre le milieu naturel ». Cette disposition, qui a pour but de permettre aux collectivités de contrôler les effluents déversés pour protéger leurs stations d'épuration, se révèle en pratique inadaptée. En effet, dans certains cas, les effluents transitant par le réseau d'une collectivité peuvent être déversés dans le réseau d'une collectivité, avant de parvenir à la station d'épuration d'une troisième collectivité et enfin d'être rejetés dans le milieu naturel. Ces phénomènes « en cascade » ne sont pas pris en compte par le dispositif actuel et ne permettent pas aux communes de contrôler effectivement les effluents empruntant leurs réseaux respectifs.

Le présent article du projet de loi procède à une réécriture globale de l'article L. 1331-10 du code de la santé publique pour remédier à cette insuffisance.

Ainsi, il est précisé dans le premier alinéa de cet article, que l'autorisation préalable émane de la « collectivité chargée de la collecte des eaux usées à l'endroit où a eu lieu le déversement », ce qui permettra d'assurer un contrôle plus strict des effluents. Pour renforcer la portée de cette disposition, le deuxième alinéa prévoit en outre que l'autorisation ne peut être délivré qu'après l'avis des collectivités intervenant en aval dans la collecte et le transport des eaux usées ou dans l'épuration et l'élimination des boues, ce qui donne à ces dernières un « droit de regard » sur les effluents qui emprunteront leur réseau. Afin d'éviter tout blocage institutionnel, il est prévu que l'avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois.

Le troisième alinéa de cet article introduit une disposition totalement nouvelle, qui permet d'éviter l'octroi trop laxiste d'autorisations de déverser. Il prévoit en effet que ne peuvent être autorisés les déversements pouvant nuire à la santé du personnel d'exploitation, à la conservation des ouvrages d'assainissement, au fonctionnement du système de traitement ou à la destination des boues produites. Une telle disposition devrait ainsi « responsabiliser » les communes lors de leur examen des demandes d'autorisation de déverser.

Quant au quatrième alinéa, il prévoit d'encadrer strictement la durée de l'autorisation dans le temps, celle-ci ne pouvant couvrir une période de plus de dix ans. Les communes seront ainsi tenues d'opérer un contrôle périodique des effluents non domestiques, dont la nature ou la composition sont fortement susceptibles de changer dans le temps. Or, à l'heure actuelle, les communes ne suivent pas forcément ces évolutions ou n'en sont pas forcément informées, ce qui est regrettable. Cette nouvelle disposition constitue donc une réelle avancée.

Le même alinéa précise, par ailleurs, que l'autorisation préalable doit fixer les caractéristiques que doivent présenter les eaux usées pour être déversées, ce qui est déjà le cas actuellement, et ajoute à cette obligation celle de déterminer les conditions de surveillance de ces caractéristiques. Le suivi des effluents et de leur nature est donc désormais imposé. Il est en outre prévu que les conditions de déversement peuvent être précisées par une convention passée entre la ou les collectivités concernées et l'auteur du déversement. De telles conventions existent à l'heure actuelle ; mais, à la différence du dispositif proposé par le projet de loi, certaines conventions peuvent être conclues sans que la commune se soit prononcée explicitement sur l'autorisation de déverser, ce qui semble pour le moins paradoxal.

Le cinquième alinéa de cet article reprend, en grande partie, des dispositions déjà prévues par l'article L. 1331-10 : l'autorisation préalable peut être subordonnée à la participation de l'auteur du déversement aux dépenses de premier établissement entraînées par la réception des eaux. Il n'est plus fait mention d'une participation aux dépenses d'entretien et d'exploitation, le choix ayant été fait de soumettre l'auteur du déversement au paiement de la redevance d'assainissement prévue à l'article L. 2224-12-5 du code général des collectivités territoriales (voir l'article 31 du projet de loi), et non L. 2224-12-6 comme le précise, par erreur, le présent article.

Enfin, comme cela est actuellement le cas, le dernier alinéa de cet article précise que cette participation s'ajoute à la perception des sommes pouvant être dues au titre des travaux de branchement sous terrain privé, de mise hors d'état des fosses ou du raccordement à l'égout.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que l'autorisation de déversement d'eaux usées non domestiques dans les égouts publics peut être renouvelée (amendement n° 142). La commission a également adopté un amendement du rapporteur disposant que cette autorisation fixe les mesures à prendre en période de fortes précipitations ou lorsque le système de traitement des eaux, le réseau public d'assainissement ou le dispositif de prétraitement des eaux déversées ne fonctionnent pas normalement (amendement n° 143). Puis, elle a adopté un amendement du même auteur corrigeant une référence erronée (amendement n° 144).

La commission a ensuite adopté l'article 17 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 17

Extension à l'ensemble du personnel des réseaux d'assainissement du régime de retraite bénéficiant aux personnes travaillant dans les réseaux souterrains d'égout

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 17 et tendant à étendre à l'ensemble du personnel des réseaux d'assainissement le régime de retraite applicable aux personnes travaillant dans les réseaux souterrains d'égout (amendement n° 145), après que le rapporteur eut précisé que, même si la recevabilité financière de cet amendement pouvait sembler incertaine, il lui paraissait nécessaire d'attirer l'attention du Gouvernement sur cette revendication forte des personnels concernés. Ceux-ci demandent en effet légitimement l'extension du régime de l'insalubrité qui n'est réservé aux personnes travaillant dans les réseaux souterrains que pour des raisons historiques.

Article 18

Suppression d'une disposition obsolète

L'article L. 1331-12 du code de la santé publique prévoit que les dispositions relatives à l'assainissement, contenues dans ce code, sont applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics ; il dispose en outre que lorsque la collectivité ou l'établissement a pu prendre la décision de ne pas les appliquer avant le 31 décembre 1958 à la collectivité intéressée, celle-ci peut être abrogée à tout moment.

Cette dernière disposition étant manifestement obsolète, le présent article vise à la supprimer.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 19

Extension de l'obligation de se doter d'un dispositif
de traitement des effluents aux immeubles nouveaux
destinés à un usage autre que l'habitat

L'actuel article L. 1331-15 du code de la santé publique institue, pour les immeubles et installations existants destinés à un usage autre que l'habitat, non soumis à autorisation ou à déclaration au titre de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ou de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, une obligation de traitement des eaux rejetées par un dispositif adapté à l'importance et à la nature de l'activité et assurant une protection suffisante du milieu naturel.

Cette disposition est donc limitée aux seuls immeubles existants, ce qui semble extrêmement restrictif compte tenu de son objectif qui est d'assurer efficacement et de manière pérenne la protection du milieu naturel.

Afin de renforcer cette protection et de la rendre plus efficace, le présent article étend cette disposition à l'ensemble des immeubles destinés à un usage autre que l'habitat, existants ou non.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 20

(article L. 1331-16 du code de la santé publique)

Extension du champ de l'assistance technique fournie
par les départements aux communes

L'article L. 1331-16 du code de la santé publique prévoit actuellement que le département peut mettre à la disposition des communes ou de leurs groupements un « service d'assistance technique aux stations d'épuration publiques » (SATESE), dirigé par un comité associant l'Etat et ses établissements publics s'ils participent à son financement.

Les SATESE ont fait la preuve de leur efficacité et de leur utilité pour les nombreuses communes n'ayant pas les moyens techniques et humains nécessaires pour assurer le suivi du fonctionnement et de l'entretien des stations d'épuration. Aujourd'hui, ces communes expriment également le besoin d'un appui dans d'autres domaines, également très techniques, tels que le contrôle ou l'entretien des dispositifs d'assainissement non collectif, la collecte et l'épuration des eaux pluviales et de ruissellement, ou la protection des captages d'eau potable et le suivi des périmètres de protection. Certains départements proposent d'ailleurs déjà une assistance technique dans le domaine de l'assainissement non collectif, mais celle-ci est dépourvue de toute base légale.

Pour répondre aux nouvelles attentes des communes, le présent article étend les possibilités d'intervention des SATESE à l'ensemble des domaines énumérés plus haut. Il ne s'agit pas d'un transfert de compétences, mais d'une simple assistance technique, comme le permet d'ailleurs l'article L. 3233-1 du code général des collectivités territoriales, qui dispose que « le département apporte aux communes qui le demandent son soutien à l'exercice de leurs compétences ».

Comme cela est déjà le cas actuellement, il est prévu que ces services sont dirigés par un comité auquel sont associées les personnes publiques qui participent à leur financement ; il s'agira donc des communes, des agences de l'eau, de l'Etat ou de toute autre personne publique concernée.

Enfin, le dernier alinéa de cet article prévoit que dans les départements d'outre-mer, l'assistance technique est fournie par les offices de l'eau ; cette disposition permettra d'éviter la multiplication des structures dans le domaine de l'eau.

La commission a examiné deux amendements identiques respectivement déposés par MM. Jean Proriol et Pierre Micaux prévoyant d'étendre à l'ensemble des collectivités territoriales, aux établissements publics de coopération intercommunale et aux syndicats mixtes la possibilité ouverte par le projet de loi aux départements d'apporter aux communes et à leurs groupements une assistance technique dans différents domaines liés à la gestion de l'eau.

M. Pierre Micaux a rappelé qu'à l'heure actuelle les départements n'étaient pas les seuls à apporter aux communes une assistance technique dans le domaine de l'eau et qu'il convenait de conserver aux autres acteurs publics locaux la possibilité d'intervenir dans ce domaine.

Le rapporteur a précisé que le projet de loi ne visait pas à faire obstacle à l'aide que peuvent s'apporter des collectivités locales mais simplement à reconnaître et à souligner le rôle dans ce domaine des services d'assistance technique aux stations d'épuration publiques (SATESE) qui ont fait la preuve de leur efficacité et dont il convient d'étendre le champ d'intervention. M. Félix Leyzour a souligné l'importance de l'action des SATESE, notamment dans les départements ruraux, et a souhaité que leur rôle soit souligné dans le projet de loi sans faire obstacle toutefois à l'intervention d'autres acteurs publics locaux. M. Jean-Claude Robert a attiré l'attention des commissaires sur le risque d'une lecture restrictive du texte, notamment par les chambres régionales des comptes, qui conduirait à rendre illégales les interventions d'autres collectivités publiques que les départements. Puis, la commission a rejeté les amendements de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux.

Elle a ensuite adopté, conformément à l'avis du rapporteur, deux amendements identiques, respectivement déposés par MM. Jean Proriol et Pierre Micaux, visant à supprimer l'alinéa disposant que les services d'assistance technique des départements sont dirigés par un comité (amendement n° 146), après que M. Pierre Micaux eut rappelé que les services d'une collectivité territoriale devraient être dirigés par le chef de son exécutif.

Puis, la commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Chapitre III

AMÉNAGEMENT ET GESTION DES COURS D'EAU

Article 21

(article L. 211-7 du code de l'environnement)

Entretien et aménagement des cours d'eau
par les collectivités locales

L'article 21 du projet de loi comporte trois paragraphes consacrés à l'entretien et à l'aménagement des cours d'eau par les collectivités locales. Il modifie l'article L. 211-7 du code de l'environnement.

Les compétences des collectivités locales en matière de travaux d'intérêt général ou d'urgence et d'aménagement et d'entretien des cours d'eau avaient déjà été rationalisées et accrues par la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, notamment dans son article 31, devenu article L. 211-7 précité.

Ces compétences peuvent être exercées par les collectivités locales ou leurs groupements, par des syndicats mixtes (créés en application de l'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales) ou concédées à des sociétés d'économie mixte. Dans le cadre de l'actuel article L. 211-7 précité, ces personnes publiques sont habilitées à entreprendre l'étude, l'exécution et l'exploitation de différents travaux, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence : aménagement d'un bassin ou d'une fraction de bassin ; entretien et aménagement d'un cours d'eau non domanial ; approvisionnement en eau ; maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, défense contre les inondations et contre la mer ; lutte contre la pollution ; protection et conservation des eaux superficielles et souterraines ; protection et restauration des sites, des écosystèmes aquatiques, des zones humides et des formations boisées riveraines ; aménagements hydrauliques concourant à la sécurité civile.

A l'heure actuelle, les collectivités ne peuvent intervenir que sur les cours d'eau non domaniaux, c'est-à-dire appartenant à des propriétaires privés. Par ailleurs, la mise en _uvre de ces compétences doit obligatoirement être précédée d'une enquête publique, préalable à la reconnaissance de l'intérêt général ou de l'urgence de l'intervention.

Pour autant, l'intervention des collectivités n'est pas subordonnée à la carence des riverains dès lors que ces travaux ont été considérés comme présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence. Toutefois, ces dispositions ne contraignent en aucun cas les collectivités à intervenir. Elles leur confèrent uniquement une habilitation à agir si elles le jugent opportun.

L'article 21 du projet de loi sur l'eau introduit un certain nombre d'avancées qui devraient permettre une intervention plus rapide et plus efficace des collectivités, sur des zones plus cohérentes.

Plusieurs raisons militent en effet pour un regroupement des compétences dans ce domaine au profit des collectivités locales et de leurs groupements. En premier lieu, la dégradation de l'entretien des cours d'eau est réelle depuis quelques décennies. Cet entretien incombe en théorie au propriétaire riverain du cours d'eau, mais celui-ci ne fait plus face à ses obligations. Or les rivières doivent être régulièrement entretenues, notamment afin de prévenir les inondations, et d'éviter par la suite des travaux curatifs dommageables pour le milieu aquatique. En second lieu, certaines collectivités veulent pouvoir mieux tirer parti de leur patrimoine hydraulique, par exemple en développant le tourisme fluvial, et, plus largement, en aménageant les cours d'eau, canaux, lacs et plans d'eau situés sur leur territoire, qui peuvent avoir un intérêt historique aussi bien que touristique ou sportif. Enfin, cette extension des compétences attribuées aux collectivités locales s'inscrit dans la logique actuelle d'une décentralisation croissante.

Les modifications proposées ont donc pour objet de remédier aux lacunes actuelles constatées dans la définition du champ et des modalités d'application de l'article L. 211-7 précité.

Le paragraphe I introduit dans le paragraphe I de l'article L. 211-7 précité de nouvelles dispositions élargissant le champ d'action des collectivités locales.

Actuellement, le champ d'action privilégie les travaux neufs, alors que l'intervention des collectivités publiques est tout aussi importante en matière de gestion et d'entretien courant. Le deuxième alinéa ajoute donc le mot « actions » à la liste actuelle, qui ne comprend que les « travaux, ouvrages ou installations ». La notion « d'actions », plus large, devrait permettre aux collectivités d'agir avec une certaine continuité, d'exercer une surveillance permanente de leur patrimoine hydraulique, et non uniquement pour des travaux lourds.

Par ailleurs, le champ géographique actuel ne couvre que les cours d'eau non domaniaux, alors que l'intérêt général de l'intervention des collectivités publiques peut être également reconnu sur les cours d'eau domaniaux, les canaux, les lacs et les plans d'eau. Le troisième alinéa permet aux collectivités d'intervenir sur tout cours d'eau, canal, lac ou plan d'eau, qu'ils soient domanial ou non. En effet, par exemple, sur les cours d'eau et canaux domaniaux rayés de la nomenclature (qui ne sont donc plus navigables), l'Etat est uniquement tenu d'assurer le libre écoulement des eaux. Il opère donc le plus souvent un entretien a minima, délaissant des ouvrages (écluses, maisons, etc.) qui ont parfois un intérêt historique et que la commune ou le département voudraient conserver.

Enfin, les cinquième, sixième et septième alinéas précisent les nouvelles actions que pourront entreprendre les collectivités dans les zones précitées. Ces trois alinéas consacrent dans la loi des interventions collectives souvent déjà ponctuellement mises en _uvre par les collectivités locales, mais dans un cadre juridique flou. Par ailleurs, l'extension du champ de l'article L. 211-7 précité devrait faciliter les actions collectives nécessaires à l'amélioration de la gestion et de la protection de la ressource en eau. Il est en effet difficile d'obtenir en ce domaine une action groupée des propriétaires privés et publics concernés.

Le cinquième alinéa habilite les collectivités à intervenir, lorsque l'intérêt général ou l'urgence aura été reconnu, pour exploiter, entretenir et aménager des ouvrages hydrauliques existants. Elles pourront ainsi se substituer aux associations syndicales ou aux propriétaires riverains dans l'entretien de digues de protection contre les crues, qui sont aujourd'hui souvent pas ou mal entretenues, aggravant de ce fait les conséquences des inondations au lieu de les diminuer. Elles pourront également se substituer à l'Etat pour entretenir des canaux et des écluses d'intérêt historique, et valoriser ainsi leur patrimoine touristique.

Elles pourront également mettre en place et exploiter des dispositifs de surveillance quantitative et qualitative de la ressource en eau et des milieux aquatiques, comme le précise le sixième alinéa. Cette disposition devrait, par exemple, leur permettre de mieux surveiller les cours d'eau, tant en matière de débit d'étiage qu'en période de crue, et d'améliorer la qualité des eaux sur leur territoire.

Elles auront enfin la possibilité de développer l'animation et la concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques, selon le septième alinéa. Ceci devrait leur permettre de développer les actions de sensibilisation de leur population à la gestion équilibrée de l'eau, dans ses différents aspects, qualitatifs et quantitatifs, et d'organiser, par exemple, des expositions relatives au risque en matière d'inondations, afin de développer une véritable culture du risque dans les zones les plus sensibles.

La commission a examiné deux amendements de M. Christian Jacob et de M. Claude Gaillard, défendus par M. Serge Poignant, visant à consulter la chambre d'agriculture concernée préalablement à l'habilitation d'une collectivité locale pour entreprendre l'étude, l'exécution et l'exploitation de tous travaux, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence.

M. Serge Poignant a précisé que la consultation de la profession agricole était indispensable sur ces questions qui la touchaient de près.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur a indiqué que cet amendement était satisfait par la rédaction actuelle du texte, qui prévoit une enquête publique avant toute habilitation, et donc la consultation des différentes parties intéressées. La commission a rejeté ces amendements.

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel de coordination du rapporteur (amendement n° 147).

Puis, elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur concernant les périmètres sur lesquels les collectivités sont compétentes pour développer l'animation et la concertation dans le domaine de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques et visant à assurer la coordination avec la rédaction retenue pour les SAGE (amendement n° 148).

Elle a également examiné un amendement du rapporteur visant à reconnaître le rôle des EPTB.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a précisé que son amendement permettait d'intégrer les établissements publics territoriaux de bassin dans l'article L. 211-7 et, donc, de les rendre compétents, au même titre que les collectivités, pour entreprendre l'étude, l'exécution et l'exploitation de tous travaux, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence. Il a souligné que, contrairement à l'amendement de M. Jacques Fleury, après l'article 28, son amendement n'instaurait pas un régime dérogatoire pour les EPTB, mais les réintégrait dans le droit commun.

M. Jacques Fleury a indiqué qu'il approuvait cette modification. Il a par conséquent annoncé qu'il retirerait son amendement après l'article 28.

La commission a alors adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 149).

Puis, elle a été saisie d'un amendement de M. Damien Alary, permettant de confier tout ou partie des interventions énumérées au paragraphe I à des sociétés d'aménagement régional.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, ayant indiqué que cet amendement posait un certain nombre de problèmes, liés notamment à l'inapplication du code des marchés publics à ces sociétés, la commission a rejeté cet amendement.

Le paragraphe II de cet article procède à une renumérotation de coordination, afin de prendre en compte les nouveaux paragraphes insérés à l'article L. 211-7 précité.

Le paragraphe III insère quatre nouveaux paragraphes (IV à VII) à l'article L. 211-7 précité.

En matière d'interventions urgentes, l'exigence actuelle d'une enquête publique préalable à l'intervention des collectivités locales leur interdit d'agir dans l'urgence, notamment pour remédier aux conséquences de catastrophes naturelles (tempêtes, glissements de terrains, inondations, etc.). Le deuxième alinéa, introduisant un paragraphe IV à l'article L. 211-7 précité, propose de supprimer cette exigence pour faire face à des « situations de péril imminent », lorsque l'opération ne nécessite aucune expropriation et que la collectivité n'envisage pas de faire participer financièrement les bénéficiaires de ces interventions d'urgence.

Cette notion de « péril imminent » est identique à la notion « d'extrême urgence » déjà présente dans l'article 34 du décret n° 93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau. L'utilisation de la procédure dérogatoire est possible en cas de danger grave, notamment pour la sécurité publique (rupture d'une digue, d'un pont, pollution accidentelle, etc.). Elle ne s'applique qu'aux urgences liées à des circonstances de fait indépendantes de la volonté et du pouvoir de décision des différents acteurs. En l'absence de ces circonstances exceptionnelles, la responsabilité de l'Etat pourrait être engagée s'il autorise malgré tout les travaux. L'appréciation du « péril imminent » est du ressort du préfet, qui doit rendre ses décisions au cas par cas.

Lorsque le « péril imminent » est reconnu, il est procédé en suivant les règles édictées par la loi du 29 décembre 1892 sur les dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics. L'intervention est ainsi assimilée à une occupation temporaire de terrain privé : elle doit être autorisée par arrêté du préfet, qui indique de façon précise les travaux qui vont être réalisés, les surfaces concernées, la nature et la durée de l'occupation et la voie d'accès. Le maire notifie l'arrêté au propriétaire du terrain, ou, si celui-ci n'est pas domicilié dans la commune, au fermier, locataire, gardien ou régisseur de la propriété. Lorsque le propriétaire n'est pas connu, l'arrêté est consultable en mairie. Dix jours au moins après cette notification, un état des lieux est réalisé, en présence du propriétaire ou de son représentant. Si le propriétaire ou son représentant ne sont pas présents, le maire désigne d'office un représentant afin de pouvoir réaliser un état des lieux contradictoire. Cet état des lieux aboutit à l'établissement d'un procès-verbal. Si le propriétaire ou son représentant accepte de le signer, les travaux peuvent commencer. Dans le cas contraire, dès le début de la procédure ou au cours de celle-ci, le président du tribunal administratif peut désigner un expert, qui dresse ce procès-verbal. Lorsque celui-ci est déposé, les travaux peuvent commencer. En cas de désaccord persistant d'une des parties, celle-ci peut saisir le tribunal administratif, mais cette saisine ne fait pas obstacle à la continuation des travaux.

L'arrêté préfectoral autorisant les travaux est réputé caduc s'il n'est pas suivi d'exécution dans les 6 mois. Par ailleurs, l'occupation temporaire ne peut excéder 5 ans.

Les dommages de travaux publics qui pourraient résulter de cette occupation temporaire (destructions de clôtures, de plantations, etc.) sont indemnisables dans des conditions de droit commun. Toutefois, si l'exécution des travaux procure une augmentation de valeur « immédiate et spéciale » à la propriété (article 14 de la loi du 29 décembre 1892 précitée), cette augmentation doit être prise en compte dans l'évaluation du montant de l'indemnité. Par ailleurs, si des constructions, plantations et améliorations ont été réalisées, en raison de l'époque où elles ont été réalisées, dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée, elles ne donnent lieu à aucune indemnité.

La mise en _uvre de cette procédure simplifiée devrait notamment permettre de remédier aux carences les plus flagrantes dans l'entretien des cours d'eau non domaniaux, dans les cas où ces carences mettent en danger les vies humaines (ainsi lorsqu'il y a constitution d'embâcles ou rectification et rehaussement du lit).

La commission a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement de M. Jacques Fleury visant à étendre la procédure d'urgence prévue au deuxième alinéa du III de cet article, de manière à pouvoir la mettre en _uvre dans les trois ans qui suivent une inondation déclarée catastrophe naturelle, sur les cours d'eau couverts par un SAGE (amendement n° 150).

Le troisième alinéa introduit un paragraphe V à l'article L. 211-7 précité. Celui-ci doit permettre de consolider les possibilités d'intervention des personnes publiques sur des terrains privés en instituant des servitudes de libre passage « permanentes » pour la mise en _uvre des compétences énumérées dans cet article. Ces servitudes permettent le passage des engins de curage et de faucardement et des personnes habilitées à surveiller et à entretenir les berges et le lit des cours d'eau, canaux, lacs et plans d'eau. Dans ce cadre, l'enquête publique effectuée au titre de l'article L. 211-7 tient lieu d'enquête publique pour l'instauration de la servitude.

En effet, à l'heure actuelle, les collectivités tentent toujours d'obtenir l'accord amiable du propriétaire avant de pénétrer sur son terrain. Celui-ci est généralement obtenu, mais l'opposition d'un ou plusieurs riverains peut conduire à rompre la continuité de ce passage et donc nuire à l'efficacité de l'action de la collectivité. La possibilité d'instaurer une servitude permettra d'éviter de telles situations.

Par ailleurs, il est précisé que l'indemnité à laquelle peut donner droit l'institution de cette servitude tient compte de l'avantage procuré au propriétaire soumis à cette servitude (les travaux, actions, ouvrages et installations précités permettent par exemple de limiter l'ampleur des crues sur son terrain. Ils participent donc à sa revalorisation).

A la différence de la servitude prévue à l'article L. 215-19 du code de l'environnement qui est une servitude temporaire (pendant la durée des travaux de curage et d'entretien), la servitude de libre passage du paragraphe V de l'article L. 211-7 est permanente et autorise une surveillance constante du bon état du cours d'eau, du canal, du lac ou de toute autre zone concernée par l'action de la collectivité. Elle intéresse par ailleurs toutes les compétences facultatives des collectivités énumérées à l'article L. 211-7 précité et non les seules opérations de curage et de faucardement (coupe des végétaux aquatiques), comme c'était précédemment le cas dans le cadre du décret n° 59-96 du 7 janvier 1959 relatif aux servitudes de libre passage sur les berges des cours d'eau non navigables ni flottables.

Par ailleurs, cette servitude permet également de contrôler la construction de clôtures fixes ou de plantations empêchant l'utilisation de la servitude temporaire. En effet, aucune servitude, qu'elle soit temporaire (article L. 215-19 du code de l'environnement) ou permanente (nouvel article L. 211-7) ne peut être instaurée sur un terrain bâti ou clos de murs. Elle ne peut également pas s'appliquer aux cours et jardins attenants à des habitations. L'instauration de la servitude permanente avant que le terrain ne soit clos ou bâti permet d'assurer une certaine continuité de l'entretien et de la surveillance.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur visant à alléger la rédaction de la deuxième phrase du troisième alinéa du III de cet article (amendements nos 151 et 152).

La commission a ensuite adopté trois amendements identiques de M. Christian Jacob, M. Claude Gaillard et Mme Marcelle Ramonet, défendus par M. Serge Poignant, qui autorisent l'indemnisation des occupants des terres grevées d'une servitude de libre passage, et non uniquement celle des propriétaires de ces terres (amendement n° 153).

M. Serge Poignant a précisé que les occupants subissant des dommages dus à la servitude de passage devaient pouvoir prétendre à indemnisation.

Le quatrième alinéa introduit un paragraphe VI à l'article L. 211-7 précité. Il permet de valider les servitudes de libre passage existantes, qui avaient été instaurées par le décret n° 59-96 du 7 janvier 1959 précité. Ce décret a en effet été annulé par un arrêt du Conseil d'Etat du 22 mai 1996 (Mme Perreaut, n° 144821), au motif que les dispositions portant atteinte au droit de propriété doivent faire l'objet d'une loi depuis 1958, en vertu de l'article 34 de la Constitution. Or, cette possibilité avait été utilisée par de nombreuses communes et par leurs syndicats qui tentaient d'assurer une surveillance et un entretien réguliers des cours d'eau traversant leur territoire. Afin que les préfets ne soient pas contraints de demander le retrait d'arrêtés devenus illégaux, la validation législative permet de conforter un dispositif indispensable.

Le cinquième alinéa introduit un paragraphe VII à l'article L. 211-7 précité. Ce nouveau paragraphe permet de soumettre l'intervention de l'Etat aux mêmes règles que celle des autres collectivités publiques. En effet, à l'heure actuelle, à la différence des interventions des collectivités locales et de leurs groupements, l'Etat conserve la possibilité d'intervenir dans les domaines énumérés à l'article L. 211-7 précité sans que son intervention ne soit soumise à une reconnaissance d'intérêt général après enquête publique. Or, rien ne justifie une telle différence en matière de gestion et d'aménagement des cours d'eau.

La commission a adopté l'article 21 ainsi modifié.

Article 22

(article L. 214-9 du code de l'environnement)

Affectation du débit

L'article 22 du projet de loi comporte trois paragraphes relatifs aux modalités d'affectation du débit artificiel d'un cours d'eau. Il modifie l'article L. 214-9 du code de l'environnement.

En l'état actuel, l'article L. 214-9 précité permet d'affecter tout ou partie du débit artificiel d'un cours d'eau non domanial à certains usages. Le débit artificiel d'un cours d'eau est le débit obtenu grâce à des travaux d'aménagement hydraulique (barrages, détournement de canaux, ouvrages de rétention). Ces travaux permettent soit de réguler un débit fluctuant (trop important en hiver et par assez en été, par exemple) soit d'augmenter le débit en période d'étiage. Ces dispositifs sont majoritairement présents dans le sud de la France, où les étiages sont les plus sévères. L'affectation du débit permet donc, dans les zones où elle est réalisée, de prévoir qu'une partie de la ressource supplémentaire engendrée par le stockage sera affectée à un usage prioritaire (eau potable, agriculture, etc.).

Le cas classique d'application du « débit affecté » est celui de la construction d'un barrage réservoir par une collectivité locale pour soutenir l'étiage d'un cours d'eau et satisfaire les usages de l'eau existants ou futurs plusieurs kilomètres ou dizaines de kilomètres à l'aval du cours d'eau. L'affectation de ce débit est réalisée sur une section déterminée du cours d'eau, et pour une durée déterminée, par déclaration d'utilité publique.

L'actuel article L. 214-9 ne s'applique pas aux travaux d'aménagement hydraulique concédés ou autorisés en application de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'énergie hydraulique, c'est-à-dire aux ouvrages hydroélectriques.

Il exclut donc de son champ les ouvrages hydroélectriques et, par ailleurs, ne s'applique pas aux cours d'eau domaniaux. Ces deux restrictions lui enlèvent la plus grande partie de son intérêt. En effet, selon le ministère de l'Environnement, les ouvrages hydroélectriques stockent globalement plus de 75% des eaux stockées dans les retenues d'eau artificielles. De plus, les débits délivrés par les retenues d'eau artificielles transitent dans la majorité des cas sur des cours d'eau domaniaux. De ce fait, l'article L. 214-9 du code de l'environnement est aujourd'hui peu utilisé.

Le paragraphe I procède à la réécriture du I de l'article L. 214-9 précité, afin d'étendre les possibilités d'affectation du débit aux ouvrages hydroélectriques et aux cours d'eau domaniaux.

L'extension de champ permettra une meilleure gestion des débits délivrés par les retenues d'eau artificielles pour les besoins des usagers situés à l'aval des retenues, quelles qu'elles soient, et que ces riverains se situent sur des cours d'eau non domaniaux ou domaniaux.

Après qu'un débat se soit engagé entre le rapporteur, M. Serge Poignant et M. Pierre Micaux sur l'intérêt de la mention expresse des sociétés d'économie mixte comme bénéficiaires potentielles de la concession, la commission a adopté un amendement du rapporteur rectifiant un amendement présenté par M. Damien Alary et indiquant que, dans tous les cas prévus à l'article L. 214-9 du code de l'environnement, et non uniquement dans le cas des aménagements hydroélectriques, les collectivités bénéficiaires de la déclaration d'utilité publique peuvent concéder la gestion du débit affecté, notamment à des sociétés d'économie mixte (amendement n° 154).

Le paragraphe II de cet article procède à une renumérotation de coordination, afin de prendre en compte le nouveau paragraphe inséré à l'article L. 214-9 précité.

Le paragraphe III insère un nouveau paragraphe (III) à l'article L. 214-9 précité.

Ce paragraphe précise les conditions dans lesquelles le débit artificiel des ouvrages hydroélectriques concédés ou autorisés en application de la loi du 16 octobre 1919 précitée peut être affecté à certains usages. En effet, dans le cas de l'hydroélectricité, le barrage-réservoir existe déjà et a été construit pour un usage unique, l'hydroélectricité. L'exploitant (le plus souvent, EDF ou la SHEM, filiale de la SNCF) n'a pas vocation à soutenir les étiages. C'est une collectivité locale qui s'en chargera.

Le deuxième alinéa aligne le régime des ouvrages hydroélectriques sur celui des autres aménagements hydrauliques mais introduit une condition, puisque l'affectation de tout ou partie du débit ne peut être demandée que dans la mesure où elle est compatible avec « la destination de l'aménagement et l'équilibre financier du contrat de concession ». L'affectation du débit ne saurait en effet remettre en cause la destination première de tels ouvrages, qui est de produire de l'électricité (un débit suffisant doit donc être maintenu pour cette mission) et d'en produire suffisamment pour dégager des bénéfices.

Le troisième alinéa précise que le bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique est le maître d'ouvrage de l'affectation du débit, c'est-à-dire une collectivité locale, un groupement de collectivités ou un syndicat mixte.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer la mention des communautés locales de l'eau dans cet article, par coordination avec leur suppression opérée par un amendement à l'article 7 (amendement n° 155).

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 156).

Les quatrième, cinquième, sixième, septième et huitième alinéas précisent le contenu de la déclaration d'utilité publique. Celle-ci fixe le niveau du débit affecté, qui doit être compatible avec l'usage premier de l'ouvrage (l'hydroélectricité), les usages auxquels est destiné le débit affecté, puisqu'ils sont différents de l'usage initial de la retenue, les conditions de passage de ce débit affecté et les conditions dans lesquelles la collectivité, le groupement de collectivités ou le syndicat mixte peut faire contribuer les usagers du débit (le plus souvent, particuliers, agriculteurs ou industriels) aux dépenses engagées.

Le neuvième alinéa prévoit le versement d'une indemnité compensatoire par la collectivité bénéficiaire au gestionnaire de l'ouvrage lorsque l'affectation du débit porte préjudice à son activité économique. Cette indemnité doit couvrir la perte économique liée à l'affectation d'une partie du débit : ce débit, relâché le plus souvent en été pour soutenir les étiages, alors que le prix du kilowattheure est moins élevé qu'en hiver, constitue une perte économique pour le gestionnaire de l'ouvrage. L'indemnisation court tant que la concession hydroélectrique n'est pas arrivée à échéance.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand, subordonnant le versement de l'indemnité compensant la perte économique subie par le gestionnaire de l'ouvrage, du fait de l'affectation d'une partie du débit, au respect du débit réservé, défini à l'article L. 432-5 du code de l'environnement et limitant l'indemnisation aux seuls volumes artificiels excédant cette norme.

M. Jean-Michel Marchand a précisé qu'il convenait que cette norme environnementale, protectrice des milieux et de la biocénose aquatiques, applicable depuis 1984, soit enfin respectée. Après avis favorable du rapporteur, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 157).

Le dixième alinéa précise que le gestionnaire de l'ouvrage et le bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique doivent passer une convention, approuvée par le préfet, qui règle les modalités de gestion du débit affecté. Il est en effet impossible d'annexer des prescriptions à une déclaration d'utilité publique, ce qui conduit à recourir à une procédure contractuelle. Ainsi, par exemple, sur la Garonne, la collectivité bénéficiaire passera un accord avec EDF ou la SHEM pour « réserver » une partie des volumes d'eau disponibles dans les barrages hydroélectriques pyrénéens, pour la relâcher en été à l'aval, dans la Garonne, afin de compenser les prélèvements excessifs opérés par l'eau potable et l'agriculture.

Le onzième alinéa permet au bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique de concéder la gestion du débit affecté. Le concessionnaire, qui est par exemple une société d'économie mixte, peut percevoir directement les contributions prévues au 4° du III (nouveau) de l'article L. 214-9 précité.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur visant à alléger la rédaction de la dernière phrase du dernier alinéa du III de cet article (amendement n° 158).

La commission a ensuite adopté l'article 22 ainsi modifié.

Article 23

Transfert de gestion des cours d'eau domaniaux aux départements et institutions interdépartementales

L'article 23 du projet de loi comporte un paragraphe consacré à la décentralisation de la gestion du domaine public fluvial de l'Etat au profit des départements et institutions interdépartementales. Il modifie l'article 5 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, et érige le département en collectivité locale de droit commun compétente en matière de voies navigables et non navigables.

La loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 précitée reconnaît compétence à la région pour créer des canaux et des ports fluviaux (à l'exception de ceux d'intérêt national) et pour aménager et exploiter les voies navigables et des ports fluviaux (à l'exception de ceux d'intérêt national). La gestion de ceux-ci lui est transférée par décret en Conseil d'Etat sur proposition du conseil régional.

Lorsque ce transfert est réalisé, la région peut concéder l'aménagement et l'exploitation des canaux, voies navigables et ports fluviaux à des personnes de droit public (des chambres de commerce et d'industrie ou des départements par exemple), des sociétés d'économie mixte ou des associations.

Ainsi, dès 1989, les Pays de la Loire ont, entre autres, reçu, par transfert de l'Etat, la gestion du Canal de Nantes à Brest sur 95 km, de l'Erdre sur 6 km, de la Sèvre nantaise sur 21,5 km. Tous ces cours d'eau et canaux ont été concédés aux départements concernés. Il en est de même en région Bretagne pour le canal d'Ille et Rance, une partie de la Vilaine, le canal de Nantes à Brest entre Saint Nicolas de Redon et le barrage de Guerlédan, une partie de l'Oust, l'Aff, le Blavet canalisé et une partie de l'Aulne.

Dans la Somme, selon les mêmes modalités, la région Picardie a reçu en 1992 par transfert de l'Etat la gestion d'une partie du canal de la Somme, qu'elle a concédé au département de la Somme, pour lequel cette section de canal avait un fort intérêt touristique.

L'article 33-1 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, modifiant l'alinéa 1er de l'article 5 de la loi n° 83-663 précitée, avait établi une nouvelle possibilité de transfert de gestion au profit de toutes les collectivités locales (départements, régions, communes), de leurs groupements, des syndicats mixtes, ainsi que de la communauté locale de l'eau, pour aménager, entretenir et exploiter les cours d'eau, canaux, lacs et plans d'eau domaniaux rayés de la nomenclature (c'est-à-dire devenus non navigables) ou n'y ayant jamais figuré. Ces transferts pouvaient être réalisés sous réserve de l'existence d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), sur proposition de l'assemblée délibérante de la collectivité concernée. Les collectivités bénéficiaires du transfert pouvaient concéder les compétences qui leur étaient transférées, à des personnes de droit public, des sociétés d'économie mixte ou des associations.

L'article 26 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 (2ème alinéa de l'actuel article 5 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 précitée) a supprimé les possibilités de tels transferts aux régions et aux communes en recentrant celles-ci au profit du seul département. Par ailleurs, l'existence préalable d'un SAGE n'est plus exigée. Toutefois, à ce jour, aucun département n'a sollicité de transfert.

Dans ce cadre, l'Etat demeure malgré tout responsable de l'exercice des polices spéciales (police de la conservation du domaine public, de l'eau, de l'énergie, de la pêche et des règles de sécurité) sur l'ensemble du domaine transféré. En effet, le pouvoir de police ne se concède pas.

Ainsi, les dispositions existantes en matière de décentralisation de la gestion du domaine public fluvial de l'Etat sont incohérentes et rendent impossible toute évolution rationnelle. Par exemple, lorsqu'un cours d'eau comporte des tronçons navigables et non navigables, il est impossible d'effectuer un transfert de compétences cohérent puisque la région et le département sont compétents. De même, quand un département veut rendre navigable un cours d'eau non navigable dont il assure la gestion, il doit se dessaisir de cette gestion au profit de la région, qui ne désire généralement pas gérer les cours d'eau, et va donc concéder de nouveau cette gestion au département. La lourdeur du dispositif nuit à l'efficacité de ces dispositions décentralisatrices.

En modifiant l'article 5 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 précitée, le projet de loi a pour objectif de donner compétence au seul département, lorsque celui-ci en fait la demande, et non automatiquement, tout en prévoyant l'intervention d'institutions interdépartementales pour les cours d'eau intéressant plusieurs départements. Ceci devrait permettre de valoriser des éléments du domaine public fluvial dont l'Etat se désintéresse aujourd'hui, compte tenu de l'absence d'enjeux nationaux sur ces cours d'eau. A l'opposé, les départements qui ont déjà initié des opérations de valorisation sur certains de ces cours d'eau, notamment en matière de développement du tourisme fluvial, pourront ainsi les pérenniser.

Le deuxième alinéa regroupe les compétences de gestion du domaine public fluvial (navigable ou rayé de la nomenclature) auprès du département et des institutions interdépartementales. La gestion peut leur en être transférée, mais uniquement à leur demande, par l'Etat ou une collectivité locale bénéficiaire de ce transfert dans le passé (le plus souvent la région, mais également par la suite le département ou l'institution interdépartementale qui voudrait se dessaisir). Ce transfert de compétence est donc seulement facultatif. Il est subordonné à une demande du département ou de l'institution interdépartementale, et à l'accord du préfet. Le transfert est opéré par arrêté du préfet, ou arrêté inter-préfectoral si plusieurs départements sont concernés, après consultation des collectivités et du comité de bassin concernés.

Cet avis du comité de bassin permettra d'éviter tout risque de « balkanisation » du domaine public fluvial, comme le craignent certains. En effet, celui-ci dispose d'une vision cohérente du bassin versant et pourra éclairer le préfet sur la pertinence du découpage retenu. Si le préfet estime que le transfert n'est pas pertinent en l'état, il pourra ainsi le refuser ou demander un redécoupage du périmètre. Ce transfert est opérationnel jusqu'à ce que cesse l'affectation prévue par le bénéficiaire du transfert.

La commission a adopté un amendement du rapporteur indiquant que le transfert de compétence de l'Etat vers un département ou une institution interdépartementale doit rester une faculté pour l'Etat, et non pas être une obligation (amendement n° 159).

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur visant à remplacer le terme d'autorité locale par celui de « collectivité territoriale », plus normatif (amendement n° 160).

Les troisième et quatrième alinéas précisent les conséquences de ce transfert de compétences.

Le troisième alinéa dispose que le bénéficiaire du transfert, département ou institution interdépartementale, devient de ce fait titulaire des droits et obligations du propriétaire, notamment en matière de gestion et de conservation du domaine, de délivrance des autorisations d'occupation du domaine. Il peut, en tant que titulaire de ces droits et obligations, percevoir les redevances correspondantes. En pratique, selon le ministère de l'Environnement, ces ressources doivent être suffisantes pour assurer une gestion efficace de ce domaine.

Le département ou l'institution interdépartementale bénéficiaire de ce transfert sera également compétent pour délivrer les autorisations de voirie (article L. 29 du code du domaine de l'Etat), pour exercer les droits de pêche et de chasse au gibier d'eau sur ce domaine et pour percevoir la redevance pour prise d'eau (article 35 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure), comme le précise le quatrième alinéa.

Les régions qui avaient bénéficié d'un transfert préalable à l'entrée en vigueur de cette loi (elles sont trois) demeurent compétentes, mais uniquement en matière d'aménagement et de gestion, et non de création de voies navigables et de ports fluviaux, comme indiqué au cinquième alinéa. Elles pourront cependant transférer leurs compétences à un département, comme prévu au deuxième alinéa de ce même paragraphe.

Le sixième alinéa précise que les cours d'eau, canaux, lacs, plans d'eau et ports fluviaux reconnus d'intérêt national par décret, demeurent de la compétence exclusive de l'Etat. Dans la rédaction actuelle de l'article 5 précité, cela ne concerne que les ports fluviaux d'intérêt national. Il est apparu pertinent, dans le cadre du projet de loi sur l'eau, d'indiquer plus précisément que l'Etat devait également garder la maîtrise des cours d'eau, canaux, lacs et plans d'eau d'intérêt national, afin de garantir une gestion cohérente du réseau à grand gabarit, qui est le principal concerné par cette disposition.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur visant à supprimer des précisions inutiles (amendements nos 161 et 162).

Elle a ensuite adopté l'article 23 ainsi modifié.

Article 24

(articles 1er, 1-1 [nouveau] et 1-2 [nouveau] du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure)

Constitution et gestion du domaine public fluvial départemental ou interdépartemental

L'article 24 du projet de loi comporte deux paragraphes consacrés à la création d'un domaine public fluvial départemental ou interdépartemental, à sa constitution et à sa gestion. Il modifie l'article 1er du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure et introduit deux nouveaux articles après l'article 1er, les articles 1-1 et 1-2. Il offre aux collectivités le choix entre le transfert de compétence prévu l'article 23 du projet de loi et un transfert de propriété du domaine concerné, plus lourd à gérer, mais qui laisse à la collectivité une plus grande marge de man_uvre, par la possibilité qui lui est donnée de créer son propre domaine public fluvial.

Depuis l'édit de Moulins de février 1566, les rivières navigables ou flottables font partie du domaine public fluvial de l'Etat. Or, aujourd'hui, seul le grand gabarit conserve un intérêt national pour le transport fluvial et un grand nombre de rivières et canaux ont été ou vont être rayés de la nomenclature des voies navigables. Sur ces cours d'eau, l'Etat n'assure plus qu'un entretien minimum, c'est-à-dire qu'il s'assure du libre écoulement des eaux.

En revanche, un certain nombre de départements souhaitent développer la navigation touristique, aménager certains ouvrages sur les cours d'eau (barrages, ports de plaisance, par exemple).

Dans le cadre actuel, il est parfois difficile de leur faire accepter de financer l'amélioration du domaine de l'Etat, moyennant un simple transfert de gestion, comme il est prévu à l'article 23 du projet de loi. En outre, lorsqu'un département réalise des travaux sur le domaine public fluvial de l'Etat, l'imbrication des responsabilités qui en découle peut soulever des difficultés, même si la navigation est normalement réalisée aux risques et périls des navigants.

La constitution de leur propre domaine public fluvial permettra aux départements et institutions interdépartementales d'agir sur leur domaine, alors que l'article L. 211-7 du code de l'environnement leur permet certes d'intervenir, mais sur des propriétés privées ou sur le domaine de l'Etat, avec les contraintes liées aux autorisations ou décisions d'occupation temporaire nécessaires. Elle permettra également aux départements de classer les cours d'eau non domaniaux dont ils sont propriétaires (ou dont ils acquièrent la propriété) dans leur propre domaine public.

Le paragraphe I procède à la modification de l'article 1er du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure, afin de prendre en compte la création d'un domaine public fluvial départemental et interdépartemental et de l'inclure dans l'énumération de ce qui constitue le domaine public fluvial.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 163). Puis elle a adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 164).

Le paragraphe II procède à l'insertion de deux nouveaux articles après l'article 1er du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure, les articles 1-1 et 1-2. L'article 1-1 fait l'objet des deuxième, troisième et quatrième alinéas du paragraphe et l'article 1-2 des deux derniers alinéas.

Compte tenu de la lourdeur des investissements potentiellement réalisables, du fait que la navigation touristique ne fait pas partie des compétences de l'Etat mais de celle des départements et compte tenu de la nécessité de partager clairement rôles et responsabilités, le deuxième alinéa propose qu'il soit possible de transférer la propriété et la gestion de ce domaine, sauf voies d'eau, canaux, lacs, plans d'eau et ports fluviaux d'intérêt national, aux départements qui en font la demande. Les départements pourront également élargir leur domaine public fluvial en procédant à des acquisitions de cours d'eau non domaniaux, par voie amiable ou par expropriation. Cette dernière possibilité est cependant limitée à la mise en _uvre des dispositions de l'article L. 211-7 (1° à 4°) du code de l'environnement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur permettant d'étendre à la protection contre les inondations les cas pour lesquels un département qui constitue son domaine public fluvial peut exproprier (amendement n° 165).

Dans le cas de cours d'eau, canaux, lacs, plans d'eau et ports fluviaux intéressant plusieurs départements, l'intervention d'une institution interdépartementale est possible. Elle est hautement souhaitable car elle permettra d'assurer une certaine cohérence dans la gestion de ces cours d'eau, canaux, lacs, plans d'eau et ports fluviaux.

Dans le cas de cours d'eau, canaux, lacs, plans d'eau et ports fluviaux d'intérêt national, au sens de l'article 5 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 précitée, le transfert de propriété est impossible, tout comme l'était le transfert de gestion à l'article précédent.

D'après les termes du troisième alinéa, ce transfert du domaine public fluvial de l'Etat vers celui d'un département ou d'une institution interdépartementale est opéré à titre gratuit.

La commission a adopté un amendement, de conséquence, du rapporteur indiquant que le transfert de propriété de l'Etat vers un département ou une institution interdépartementale n'est pas obligatoire (amendement n° 166).

Ces dispositions ont l'avantage, par rapport au simple transfert de gestion opéré à l'article 23 du projet de loi, de faire coïncider compétences de gestion et propriété publique. Cela a par contre l'inconvénient de mettre définitivement à la charge de la collectivité bénéficiaire du transfert ce domaine public, contrairement au simple transfert de compétence, qui cesse dès lors que l'affectation au profit de laquelle il a été réalisé cesse d'exister. Par exemple, un cours d'eau dont la gestion a été transférée à un département pour une mise en valeur dans un but de navigation de plaisance revient dans le domaine de l'Etat dès lors que le département ne valorise plus ce cours d'eau. A l'opposé, lorsque le département est propriétaire de ce cours d'eau, la propriété perdure même lorsque l'affectation change ou disparaît.

Le cinquième alinéa (article 1-2 du code précité) précise les droits et obligations afférents au domaine et dévolus au conseil général ou à l'institution interdépartementale : conservation et gestion du domaine, pouvoirs de police y afférents. Il affirme clairement la persistance des pouvoirs de police du maire et ceux de l'Etat en matière de police de l'eau, de réglementation générale de la navigation et d'utilisation de l'énergie hydraulique. Ainsi, par exemple, la police de la navigation est du ressort du département, mais la limitation de vitesse reste du ressort de l'Etat, comme en matière de police routière.

La commission a adopté l'article 24 ainsi modifié.

Article 25

Déconcentration du classement dans le domaine public fluvial

L'article 25 du projet de loi déconcentre la procédure de classement dans le domaine public fluvial de l'Etat et institue une procédure analogue pour le domaine public fluvial du département ou de l'institution interdépartementale. Il modifie le premier alinéa de l'article 2-1 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure.

En l'état actuel de la législation, le classement dans le domaine public de l'Etat, est fondé sur l'intérêt général (alimentation en eau des voies navigables, besoins en eau de l'agriculture ou de l'industrie, alimentation en eau des populations, protection contre les inondations). Les différents motifs de classement sont énumérés au septième alinéa de l'article 1er du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure. Le classement est prononcé, après enquête publique, par décret en Conseil d'Etat. Il constitue un acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir. Les indemnités pouvant être dues en raison de ce classement sont fixées comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, compensation faite des avantages que les intéressés peuvent en retirer.

Dans le cadre du projet de loi sur l'eau, et plus largement dans le cadre du mouvement de déconcentration des procédures au niveau le plus pertinent, la procédure pour le domaine public fluvial de l'Etat est déconcentrée au niveau du préfet territorialement compétent, comme le précise le deuxième alinéa de l'article. Cette procédure concerne tous les cas visés à l'article 1er du code précité, et non plus seulement les motifs énumérés à l'avant-dernier alinéa de cet article. Cela pose d'ailleurs le problème de l'alinéa ajouté à cet article 1er par l'article 24 du projet de loi sur l'eau.

La création d'un domaine public fluvial départemental ou interdépartemental à l'article 24 du projet de loi impose de prévoir le même type de procédure pour le domaine public fluvial des départements et institutions interdépartementales. Ainsi, le classement dans ce domaine public est également effectué après enquête publique, par le préfet territorialement compétent, mais après avis des collectivités locales concernées et du comité de bassin.

Cette déconcentration des procédures, et l'avis du comité de bassin dans le cas du domaine public fluvial des départements et institutions interdépartementales, permettra une gestion plus pertinente des cours d'eau, au niveau le plus approprié, sans perdre de vue la cohérence de bassin versant.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 167 et 168), puis elle a adopté un amendement du rapporteur permettant de prendre en compte la possibilité que plusieurs personnes, et non une seule, soient propriétaires d'un lac (amendement n° 169).

Puis la commission a adopté un amendement du rapporteur visant à assurer la coordination avec la rédaction retenue précédemment à l'article 2-1 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure en matière de classement dans le domaine public fluvial de l'Etat (amendement n° 170).

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du même auteur (amendement n° 171).

Elle a également adopté un amendement du rapporteur permettant de préciser que seul l'avis des assemblées délibérantes est requis en matière de classement dans le domaine public fluvial départemental ou interdépartemental, et non celui des assemblées consultatives de ces collectivités (conseils économiques et sociaux régionaux, par exemple) (amendement n° 172).

La commission a enfin adopté un amendement du rapporteur, harmonisant la rédaction retenue pour le domaine public fluvial départemental et interdépartemental avec celle retenue pour le domaine public fluvial de l'Etat (amendement n° 173).

La commission a ensuite adopté l'article 25 ainsi modifié.

Article 26

(article 4 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure)

Déconcentration du déclassement du domaine public fluvial

L'article 26 du projet de loi déconcentre la procédure de déclassement du domaine public fluvial de l'Etat, et celle du département ou de l'institution interdépartementale. Il procède à la réécriture de l'article 4 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure afin de déconcentrer la procédure de déclassement du domaine public fluvial au niveau du préfet pour le domaine de l'Etat alors qu'elle faisait auparavant l'objet d'un décret en Conseil d'Etat, ou au niveau du président du conseil général ou du conseil d'administration de l'institution interdépartementale, pour le domaine du département ou de l'institution interdépartementale.

Le déclassement du domaine public fluvial de l'Etat sera désormais opéré par le préfet après enquête publique et consultation des conseils généraux intéressés, comme indiqué au deuxième alinéa. En effet, ceux-ci peuvent, dans ce cadre, demander un transfert de propriété à leur profit ou à celui d'une institution interdépartementale, afin d'éviter que le déclassement d'un cours d'eau, d'une section de cours d'eau, d'un canal ou d'un lac n'entraîne une dégradation de son entretien et sa non-navigabilité.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, visant à harmoniser les différentes rédactions retenues en matière de classement et de déclassement pour les deux catégories de domaine public fluvial (amendements nos 174 et 175).

Le déclassement du domaine public fluvial de l'Etat emporte radiation de la nomenclature des voies navigables ou flottables, ce qui signifie que le cours d'eau devient non navigable, comme le précise le troisième alinéa.

La commission a adopté un amendement du rapporteur qui prévoit que la décision de transfert de propriété de l'Etat vers un département ou une institution interdépartementale emporte à la fois radiation de la nomenclature et déclassement du domaine public fluvial de l'Etat (amendement n° 176).

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a précisé que le déclassement d'un cours d'eau, d'une section de cours d'eau, d'un canal, d'un lac ou d'un plan d'eau devant être exprès, cet amendement permettait de simplifier les procédures de transfert.

Le quatrième alinéa s'applique au déclassement du domaine public fluvial d'un département ou d'une institution interdépartementale, qui est opéré par le président du conseil général ou du conseil d'administration de l'institution interdépartementale, après enquête publique et consultation des collectivités concernées. Cette absence de parallélisme avec le déclassement du domaine public fluvial de l'Etat est lié au fait que le préfet ne peut opérer un déclassement sur un domaine qui n'appartient plus à l'Etat, mais à un département ou une institution interdépartementale.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 177).

Elle a ensuite adopté l'article 26 ainsi modifié.

Article 27

Adaptation du code du domaine public fluvial
et de la navigation intérieure

L'article 27 du projet de loi est composé d'un paragraphe comportant différentes mesures d'adaptation du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure. Il modifie les articles 7, 10, 14, 16, 35, 37, 39 et 41 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure afin de les adapter aux mesures de décentralisation et de déconcentration introduites aux articles 23, 24, 25 et 26 projet de loi.

Le abroge l'article 7, au motif que les dispositions subsistantes sont de nature réglementaire. Pour autant, il conviendrait de conserver, tout en l'adaptant, le septième alinéa de cet article qui dispose que « les voies déclassées sont placées pour les parties naturelles du lit, dans la catégorie des cours d'eau et lacs non domaniaux et, pour les autres parties, dans le domaine privé de l'Etat ». Etant donné la création d'un domaine public fluvial départemental et interdépartemental, les voies non naturelles déclassées seront placées soit dans le domaine privé de l'Etat, soit dans celui du département ou de l'institution interdépartementale, selon le cas.

La commission a donc adopté deux amendements du rapporteur visant à conserver, en l'actualisant, le septième alinéa de l'article 7 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure (amendements nos 178 et 179)

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a précisé la disposition en cause était de nature législative et toujours mise en _uvre, puisqu'elle indique que les cours d'eau naturels déclassés deviennent des cours d'eau non domaniaux alors que les cours d'eau artificiels déclassés vont dans le domaine privé de l'Etat, du département ou de l'institution interdépartementale.

Les autres dispositions abrogées qui pourraient encore s'appliquer, notamment aux huitième et neuvième alinéas de l'article 7 précité, ne sont pas de nature législative, mais réglementaire.

Au , l'article 10 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure qui concerne la propriété des alluvions, relais, atterrissements, îles et îlots des cours d'eau domaniaux, est adapté afin de tenir compte de la création d'un domaine public fluvial départemental et interdépartemental.

Au , le premier alinéa de l'article 14 est également adapté afin de tenir compte de la création d'un domaine public fluvial départemental et interdépartemental. Le curage des cours d'eau domaniaux est à la charge de leur propriétaire, Etat, département ou institution interdépartementale.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur visant à supprimer une disposition devenue obsolète (amendement n° 180).

Au , le deuxième alinéa de l'article 16 est adapté afin de tenir compte de la déconcentration des procédures. C'est une décision de l'autorité gestionnaire, et non plus un arrêté interministériel, qui est nécessaire pour réduire les distances de la servitude de marchepied.

Il convient par ailleurs d'étendre cette adaptation au 1er alinéa de l'article 16, qui concerne la servitude de halage, afin de tenir compte de la déconcentration des procédures.

La commission a donc adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 181).

Au , l'article 35 est adapté pour permettre au département ou à l'institution interdépartementale d'établir et de percevoir la redevance pour prise d'eau sur son domaine public fluvial.

La commission a adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 182, 183 et 184).

Au , l'article 37 est adapté afin de permettre aux départements et institutions interdépartementales de concéder le droit d'endigage, les accrues, atterrissements et alluvions des cours d'eau faisant partie de leur domaine respectif.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 185).

Au , l'article 39 est adapté afin de tenir compte de la création d'un domaine public fluvial départemental et interdépartemental. Les dépenses du propriétaire du domaine public fluvial, quel qu'il soit, et des propriétaires de moulins ou d'usines sur ce domaine, engagées pour entretenir ou réparer les ouvrages (levées, barrages, écluses) auxquels ils ont un intérêt ou dont ils usent, sont réparties par décret.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 186).

Au , l'article 41 est adapté pour permettre aux fonctionnaires des départements ou des institutions interdépartementales, tout comme aux fonctionnaires de l'Etat, de constater les infractions à la police de leur domaine.

Etant donné que les agents de la navigation intérieure, les commissaires de police et les gendarmes sont des fonctionnaires de l'Etat, il convient par ailleurs de supprimer leur mention dans cet article.

La commission a donc adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer la mention exprès des agents de la navigation intérieure, des commissaires de police et de la gendarmerie à l'article 41 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure (amendement n° 187).

La commission a ensuite adopté l'article 27 ainsi modifié.

Article 28

(article L. 211-12 [nouveau] du code de l'environnement)

Servitudes d'utilité publique

L'article 28 du projet de loi comporte un paragraphe consacré à l'institution de servitudes d'utilité publique au bénéfice de collectivités territoriales ou, éventuellement, de l'Etat. Il introduit un nouvel article L. 211-12 dans le code de l'environnement, composé de dix paragraphes.

Ces servitudes ont trois fonctions : garantir le bon fonctionnement d'aménagements destinés à la rétention temporaire d'eaux de crue, permettre le déplacement naturel du lit mineur ou garantir le maintien d'une couverture végétale (bandes herbées) le long des cours d'eau.

En effet, une gestion plus efficace et plus rationnelle des cours d'eau nécessite parfois de limiter les utilisations possibles des terrains publics et privés riverains. Les servitudes d'utilité publique existantes ne permettent pas d'imposer ce type de limitations dans les trois cas évoqués ci-dessus. Seule une expropriation, longue, lourde à mettre en _uvre, coûteuse et souvent inutile lorsqu'une servitude suffit, permet à l'heure actuelle de créer des polders, d'assurer la libre circulation des cours d'eau dans leur lit mineur et d'instaurer des couvertures végétales pérennes sur les rives des cours d'eau.

Le paragraphe I de l'article L. 211-12 (nouveau) précise quelles sont les zones où l'on peut instaurer de telles servitudes - sur des terrains riverains ou situés à proximité de cours d'eau ou de dérivation de cours d'eau - et les bénéficiaires de l'instauration de ces servitudes - collectivités locales ou leurs groupements et Etat.

Le paragraphe II de cet article liste les objets potentiels de ces servitudes en les regroupant sous trois catégories, comme indiqué précédemment. Elles peuvent uniquement ou concurremment :

- permettre la création de « zones de rétention des crues », qui sont des zones artificiellement sur-inondées. On accroît leurs capacités de stockage des eaux de crue par des aménagements spécifiquement conçus à cette fin (digues, remblais, fossés, etc.). Ainsi, ces zones retiennent artificiellement et de manière temporaire - en période de crue - une partie des eaux dont l'écoulement pourrait provoquer des dommages graves sur les zones aval urbanisées. De telles zones existent déjà sur le Rhin, notamment à Erstein, où 600 hectares de forêt alluviale ont été transformés en zone de rétention des crues, en application de l'article 7 de la convention signée le 6 décembre 1982 entre l'Allemagne et la France. Elles ont été instituées par les articles 10 et suivants de la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 portant dispositions diverses en matière de transports.

- permettre le déplacement naturel des cours d'eau, lorsque ce déplacement est nécessaire à l'alimentation du débit solide entraîné par le cours d'eau et au maintien de son équilibre morphologique. Les servitudes ainsi instaurées sont appelées « zones de mobilité d'un cours d'eau ». Cette disposition doit permettre au cours d'eau de se « réapproprier » son lit naturel, trop souvent artificialisé par des ouvrages qui le canalisent (digues, remblais, enrochement, etc.). La restauration du lit naturel et l'alimentation naturelle du débit solide qui en découlera doivent permettre d'éviter les phénomènes dommageables d'érosion observés sur les cours d'eau artificialisés.

- assurer une couverture végétale pérenne sur les rives des cours d'eau, sur une largeur pouvant atteindre, d'après les informations fournies par le ministère de l'Environnement, 15 à 30 mètres. Cette disposition a pour but d'éviter la dégradation de la qualité des eaux des cours d'eau dans les zones les plus fragiles ou les plus polluées.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand, visant à interdire ou soumettre à prescriptions certains aménagements et activités dans le lit majeur d'un cours d'eau afin de préserver les zones d'expansion des crues ou de préserver ou restaurer ses caractères hydrologiques, géomorphologiques et écologiques ainsi que ceux de sa nappe d'accompagnement.

M. Jean-Michel Marchand a précisé qu'il convenait d'assurer une protection plus large du lit majeur, notamment dans les zones urbaines. Il a souligné qu'il convenait d'être particulièrement vigilant concernant la préservation de zones d'expansion des crues, qu'elles soient naturelles ou artificielles, car celles-ci sont un instrument de prévention des inondations très efficaces.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, ayant indiqué que cet amendement était déjà partiellement satisfait par la législation existante, et que les dispositions déjà prévues au II assureraient une protection très satisfaisante de ces zones, la commission a rejeté cet amendement. Elle a en conséquence également rejeté le deuxième amendement présenté par M. Jean-Michel Marchand au même article.

Le paragraphe III de l'article L. 211-12 (nouveau) précise que les zones concernées sont délimitées par arrêté préfectoral, pris après enquête publique. Cette enquête est menée comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

La commission a examiné deux amendements identiques de Mme Marcelle Ramonet et de M. Claude Gaillard, qui précisent que, suite à l'enquête publique, le préfet doit également recueillir l'avis du conseil général, du conseil régional et de la chambre d'agriculture avant de délimiter par arrêté les zones soumises aux servitudes.

Le rapporteur ayant indiqué que ces amendements étaient satisfaits par la rédaction actuelle du texte, qui prévoit une enquête publique avant toute délimitation de périmètre, et donc la consultation des différentes parties intéressées, la commission a rejeté ces amendements.

La commission a ensuite adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 188 et 189).

Les obligations particulières des propriétaires et exploitants inclus dans une zone de rétention des crues sont précisées au paragraphe IV de cet article. Est ainsi interdit tout acte de nature à nuire au bon fonctionnement, à l'entretien et à la conservation des ouvrages permettant l'inondation de la zone. Par ailleurs, tout projet de digue, de remblai, de dépôt, de clôture, de plantation, de construction et tout ouvrage susceptible de diminuer ou d'annuler l'efficacité de la servitude doit faire l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'administration. Cette dernière a la possibilité, dans un délai de trois mois, de s'opposer à ces projets ou de demander certaines modifications facilitant l'écoulement ou le stockage des eaux. Enfin, l'administration peut prescrire l'évacuation de tout engin mobile (véhicule ou autre) qui pourrait provoquer ou subir des dégâts en cas de crue.

La commission a examiné un amendement de Mme Marcelle Ramonet, visant à supprimer la disposition prévue au 2° du IV de l'article L. 211-12 (nouveau) soumettant les projets de construction ou d'ouvrage susceptibles de faire obstacle à l'écoulement des eaux à une déclaration préalable et à une autorisation.

Mme Marcelle Ramonet a indiqué qu'il n'était pas souhaitable que l'institution d'une servitude d'utilité publique soit doublée d'un régime de déclaration préalable et d'autorisation préfectorale puisque c'est en effet à l'enquête publique de déterminer les limitations au droit de propriété, indépendamment de l'identité des personnes concernées et a souligné que le dispositif prévu par le texte contient un risque d'inégalité de traitement puisqu'il reconnaît au préfet la possibilité d'autoriser une opération et d'en refuser une autre.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a précisé que c'était l'objectif même de l'instauration d'une servitude d'utilité publique que de pouvoir limiter ou interdire certaines pratiques et estimé que le régime de déclaration préalable et d'autorisation préfectorale garantit l'efficacité de la mise en _uvre de la servitude, dans le respect de l'intérêt général, et non selon le fait du prince. La commission a alors rejeté l'amendement.

Elle a ensuite adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 190 et 191).

Les obligations des propriétaires et exploitants inclus dans une zone de mobilité d'un cours d'eau sont précisées au paragraphe V de l'article L. 211-12 (nouveau) précité. Dans ces zones, sont interdits les travaux de protection des berges, les remblais, les endiguements et affouillements, les constructions ou installations et, plus généralement, tous les travaux ou ouvrages qui pourraient empêcher le déplacement naturel du cours d'eau. Par ailleurs, toute modification ou tout projet de travaux sur un ouvrage existant doit faire l'objet d'une autorisation de l'administration.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer la possibilité de créer des ouvrages dans les zones de mobilité d'un cours d'eau après que le rapporteur eut souligné que compte tenu de l'interdiction de réaliser tous travaux ou ouvrages susceptibles de faire obstacle au déplacement naturel du cours d'eau dans ces zones de mobilité, la déclaration d'une « création d'ouvrage » n'avait pas lieu d'être (amendement n° 192).

Elle a ensuite rejeté deux amendements de Mme Marcelle Ramonet visant à supprimer les dispositions de l'article L. 211-12 précité, qui instaurent un régime de déclaration et d'autorisation dans les zones de mobilité d'un cours d'eau et dans les bandes de protection, pour les mêmes raisons que celles évoquées à l'amendement précédent de Mme Marcelle Ramonet.

Les obligations des propriétaires et exploitants inclus dans une bande de protection sont précisées au paragraphe VI de cet article. Les retournements de prairies doivent faire l'objet d'une déclaration et peuvent être interdits sur ces zones, de même que l'épandage de certaines matières fertilisantes ou produits phytosanitaires.

Dans les cas visés aux paragraphes IV, V et VI, les travaux prévus par les propriétaires ou les exploitants et soumis à déclaration ou à autorisation ne peuvent débuter avant la décision du préfet, qui intervient au plus tard trois mois après le dépôt de la demande.

Le paragraphe VII de l'article L. 211-12 (nouveau) précise que l'arrêté préfectoral identifie, lorsqu'ils existent, les ouvrages, constructions ou aménagements existants qui diminuent ou annulent les effets de la servitude. Il prescrit leur suppression ou leur modification. Les travaux consécutifs sont à la charge financière de la collectivité bénéficiaire de l'institution de la servitude.

Puis, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 193).

La commission a ensuite examiné un amendement de Mme Marcelle Ramonet qui précise que l'arrêté préfectoral qui liste les prescriptions retenues dans ces zones de servitudes doit être pris après avis du conseil général, du conseil régional et de la chambre d'agriculture concernés.

Le rapporteur a indiqué que cet amendement était satisfait par la rédaction actuelle du texte, qui prévoit une enquête publique avant toute création de servitude, enquête publique qui donne lieu à consultation des différentes parties intéressées. La commission a rejeté cet amendement.

Le paragraphe VIII de l'article L. 211-12 (nouveau) instaure une servitude de libre passage sur le périmètre de la servitude, au profit des agents chargés de la mise en place, de l'entretien et de la surveillance de cette servitude.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 194 et 195).

Le paragraphe IX de l'article L. 211-12 (nouveau) précité prévoit le versement d'une indemnisation destinée à réparer les préjudices subis par les propriétaires des terrains grevés par ces servitudes. A l'heure actuelle, la nécessité de procéder à une expropriation rend l'instauration de zones de rétention des crues très coûteuse. L'indemnisation de la servitude permettra le développement de telles zones à moindre coût, puisque l'on indemnisera uniquement les contraintes liées à la servitude (terrain inutilisable à telle période de l'année, ou seulement une fois tous les deux ou trois ans, impossibilité de mettre en _uvre certaines pratiques culturales, etc.), tout en permettant le maintien de l'usage économique de ces terrains, qui sont la plupart du temps des terrains agricoles.

Par ailleurs, le coût de l'institution de la servitude peut également être atténué pour la collectivité si elle s'inscrit dans le cadre d'une opération menée en application de l'article L. 211-7 du code de l'environnement. Dans les cas énumérés par cet article, la collectivité peut demander la participation des bénéficiaires des travaux, actions, ouvrages ou installations.

Enfin, cette indemnisation ne fait pas obstacle à ce que les terrains soumis à la servitude fassent l'objet d'une convention entre le propriétaire ou l'occupant et le bénéficiaire de l'instauration de la servitude, convention permettant de contractualiser la gestion spécifique du terrain moyennant rémunération du service rendu.

La commission a adopté trois amendements identiques de M. Christian Jacob, M. Claude Gaillard et Mme Marcelle Ramonet, défendus par M. Serge Poignant, autorisant l'indemnisation des occupants des terres grevées d'une servitude d'utilité publique, et non uniquement celle des propriétaires de ces terres (amendement n196).

Le paragraphe X de l'article L. 211-12 (nouveau) précité prévoit que les propriétaires des terrains grevés par la servitude peuvent demander au bénéficiaire de la servitude d'acquérir ces terrains ainsi que ceux dont l'exploitation est compromise par l'instauration de la servitude (du fait, par exemple, d'un accès difficile en période de crue). La procédure suit les règles de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

La commission a adopté un amendement rédactionnel de clarification du rapporteur (amendement n° 197).

Elle a ensuite adopté l'article 28 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 28

Insertion d'un chapitre « prévention des inondations »

Après avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à créer un chapitre additionnel au titre I du projet de loi, afin de rassembler les dispositions relatives à la prévention des inondations (amendement n° 198).

Article additionnel après l'article 28

Création d'un centre national d'études des inondations

La commission a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à créer un centre national d'études des inondations (amendement n° 6).

M. Jacques Fleury a précisé que cet amendement mettait en _uvre une proposition de la commission d'enquête, déjà présente dans le rapport Dauge remis au Premier ministre. Ce centre pourra rassembler toutes les informations disponibles sur les inondations, les analyser et les diffuser.

Article additionnel après l'article 28

Indemnisation des pertes d'exploitation indirectes

Après que le rapporteur se soit prononcé favorablement, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à modifier l'article L. 125-1 du code des assurances afin de permettre l'indemnisation des pertes d'exploitation indirectes lors d'une inondation ou de toute autre catastrophe naturelle, c'est-à-dire lorsque l'entreprise n'a pas été directement touchée par la catastrophe mais a subi des pertes de ce fait (amendement n° 199).

Article additionnel après l'article 28

Prise en charge de l'expert désigné à l'initiative de l'assuré

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à compléter l'article L. 125-4 du code des assurances afin d'étendre la garantie du régime d'indemnisation contre les catastrophes naturelles à la rémunération de l'expert désigné à l'initiative de l'assuré, comme c'est le cas dans les autres régimes d'assurance (amendement n° 200).

Article additionnel après l'article 28

Elargissement de la saisine du Bureau central de tarification
par les assureurs

Après que le rapporteur se soit prononcé favorablement, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à modifier l'article L. 125-6 du code des assurances afin d'élargir les conditions de saisine du BCT par les assureurs, en supprimant la référence aux plans de prévention des risques et au non-respect des mesures qu'ils peuvent édicter (amendement n° 201).

M. Jacques Fleury a précisé que les conditions actuelles de saisine, trop restrictives, ne permettaient pas de solutionner les cas les plus critiques de non-respect du principe de précaution par les assurés.

Article additionnel après l'article 28

Elargissement de la saisine du Bureau central de tarification au préfet
et au président de la Caisse centrale de réassurance

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à modifier l'article L. 125-6 du code des assurances afin de permettre au préfet, garant de l'intérêt général, ou au président de la Caisse centrale de réassurance, garant de l'équilibre financier du régime des catastrophes naturelles, de saisir le BCT des cas les plus discutables de reconstruction à l'identique sans aucune mesure de précaution (amendement n° 202).

Article additionnel après l'article 28

Plans de prévention des risques naturels et franchises d'assurance

Après que le rapporteur se soit prononcé favorablement, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à modifier l'article L. 125-7 du code des assurances afin d'autoriser un triplement du montant des franchises lorsque l'assuré ne se sera pas conformé aux mesures prescrites par le plan de prévention des risques dans le délai qu'il fixe (amendement n° 203).

M. Jacques Fleury a précisé que cet amendement avait pour but, comme les précédents concernant le régime d'indemnisation, de responsabiliser les assurés, de manière beaucoup plus efficace que par de simples sanctions pénales, qui existent mais ne sont pas dissuasives.

Article additionnel après l'article 28

Augmentation de l'indemnisation au titre des catastrophes naturelles

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à créer un article L. 125-8 dans le code des assurances afin de permettre une indemnisation supérieure au montant des dommages subis par l'assuré suite à une catastrophe naturelle, lorsque celui-ci s'engage à respecter des normes de reconstruction établies par les assureurs et l'Etat et visant à diminuer les conséquences dommageables d'une nouvelle catastrophe (amendement n° 204).

Article additionnel après l'article 28

Subventions de l'ANAH

La commission a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à modifier l'article L. 321-3 du code de la construction et de l'habitation afin d'autoriser l'ANAH à subventionner les travaux portant sur des habitations lorsque ceux-ci mettent en _uvre les prescriptions d'un PPR destinées à réduire la vulnérabilité des biens, après que M. Jacques Fleury eut précisé que cette disposition était la juste contrepartie de l'augmentation des franchises d'assurance en cas de non-respect de ces dispositions, les subventions versées par l'ANAH ayant pour but de favoriser les bonnes pratiques et de dissuader les comportements irresponsables (amendement n° 205).

Après l'article 28

Un amendement de M. Jacques Fleury visant à affirmer le rôle des EPTB a été retiré en raison de l'adoption d'un amendement du rapporteur ayant le même objet à l'article 21.

Article additionnel après l'article 28

Elargissement des compétences du « Fonds Barnier »

La commission a examiné un amendement de M. Jacques Fleury modifiant l'article L. 561-1 du code de l'environnement afin d'élargir les possibilités d'intervention du fonds de prévention des risques naturels majeurs aux cas où les vies humaines ne sont pas en danger.

M. Jean-Michel Marchand s'est interrogé sur les compétences actuelles de ce fonds.

M. Jacques Fleury a précisé que le Fonds Barnier indemnisait actuellement uniquement les expropriations rendues nécessaires par un risque naturel mettant en danger les vies humaines (risque d'éboulement par exemple), lorsque cette expropriation était moins coûteuse que la modification de l'habitat. Il a indiqué que les conditions de sa mise en _uvre étaient trop restrictives dans le cas d'inondations. Après l'intervention de MM. Pierre Ducout, Claude Gaillard et Jean-Marc Nudant et avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté l'amendement (amendement n° 23).

Article additionnel après l'article 28

Augmentation des ressources du Fonds Barnier

La commission a examiné un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 visant à modifier l'article L. 561-3 du code de l'environnement afin de doubler les ressources du fonds de prévention des risques naturels qui passeraient ainsi de 2 à 4 % du montant des surprimes perçues au titre du régime des catastrophes naturelles.

M. Pierre Ducout a souligné les risques liés à un élargissement trop important des compétences de ce fonds, qui donnerait l'impression aux sinistrés de pouvoir bénéficier facilement d'un relogement dans une zone moins sensible aux inondations.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a indiqué qu'il convenait de prendre fermement position sur le problème des inondations, quitte à affiner le dispositif en deuxième lecture.

M. Jacques Fleury a indiqué que cet amendement permettrait de régler un certain nombre de situations dramatiques et, à l'heure actuelle, le plus souvent insolubles.

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté l'amendement (amendement n° 11).

Article additionnel après l'article 28

Elaboration et suivi des PPR

La commission a examiné un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28, modifiant l'article L. 562-1 du code de l'environnement afin de retirer au préfet le pouvoir d'élaborer le PPR, cette mission étant confiée à une commission locale des risques par un autre amendement.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a indiqué qu'il convenait que l'Etat reste compétent pour l'élaboration et la mise en application des PPR, même si la concertation doit être accrue. Il a donc proposé une modification de l'amendement de M. Jacques Fleury, que celui-ci a accepté.

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté l'amendement ainsi modifié (amendement n° 206).

Article additionnel après l'article 28

PPR et gestion de crise

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à modifier l'article L. 562-1 du code de l'environnement afin que les PPR intègrent également les mesures destinées à améliorer l'information et l'alerte des populations, à renforcer leur sécurité et à organiser leur évacuation en cas de catastrophe naturelle, après que son auteur eut précisé que les PPR devaient porter sur toutes les dimensions du risque, y compris la préparation à la gestion de la crise (amendement n° 207).

Article additionnel après l'article 28

Commission locale des risques

La commission a examiné l'amendement n° 14 rectifié de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et modifiant l'article L. 562-3 du code de l'environnement afin de confier à une commission locale des risques, composée de représentants des collectivités, de l'Etat et des propriétaires, l'élaboration, la révision et le suivi des PPR.

Comme pour l'amendement précédent, M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a indiqué qu'il convenait que l'Etat reste compétent pour l'élaboration et la mise en application des PPR, même si la concertation doit être accrue. Il a donc proposé une modification de l'amendement de M. Jacques Fleury afin que la commission ne soit plus seule compétente mais participe à l'élaboration de ces PPR, tout en excluant les représentants de l'Etat de sa composition. M. Jacques Fleury a accepté ces modifications.

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté l'amendement ainsi modifié (amendement n° 208).

Article additionnel après l'article 28

Extension de l'application du FCTVA

La commission a examiné un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à modifier l'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales afin d'étendre l'application du fonds de compensation de la TVA aux travaux d'entretien des cours d'eau réalisés dans le cadre d'un SAGE.

M. Jean Launay a indiqué qu'un hiatus juridique existait de longue date dans ce domaine. Certains travaux d'entretien sont en effet considérés comme des dépenses de fonctionnement et ne sont donc pas éligibles à ce fonds.

MM. Robert Galley et Pierre Ducout ont souligné qu'il conviendrait peut-être de clarifier la notion de travaux d'entretien, ambiguë, en parlant plutôt de « travaux de prévention des inondations » pour écarter les travaux d'entretien courant.

M. Jacques Fleury ayant indiqué qu'il acceptait la modification proposée et avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté l'amendement ainsi modifié (amendement n° 209).

Article additionnel après l'article 28

Encouragement des mesures agri-environnementales

Avec l'avis favorable du rapporteur, la commission a adopté un amendement de M. Jacques Fleury portant article additionnel après l'article 28 et visant à modifier l'article 1er de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole afin de compléter l'énumération des objectifs de la politique agricole par l'entretien des cours d'eau et la prévention des inondations, son auteur ayant indiqué qu'il s'agissait de favoriser la mise en _uvre de mesures agri-environnementales, dans le cadre de contrats territoriaux d'exploitation, notamment dans les zones les plus sensibles aux inondations (amendement n° 210).

TITRE II

SERVICES PUBLICS DE L'EAU ET DE L'ASSAINISSEMENT

Article 29

Coordination d'un intitulé de section au sein du code général
des collectivités territoriales

La section 2 du chapitre IV du titre II du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est intitulée « Assainissement ». Or, les articles suivants du projet de loi visent à introduire dans ce code des dispositions relatives aux services publics de distribution d'eau. Par coordination, le présent article du projet de loi modifie l'intitulé de la section précitée pour la dénommer « Dispositions relatives aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement ».

La commission a adopté l'article 29 sans modification.

Chapitre Ier

MISSIONS ET ORGANISATION DES SERVICES PUBLICS DE L'EAU
ET DE L'ASSAINISSEMENT

Article 30

Définition, missions et organisation des services publics
de distribution d'eau et d'assainissement

Le code général des collectivités territoriales contient peu de dispositions relatives à la distribution d'eau, à l'exception de celles traitant de la tarification de ces services.

Le présent article du projet de loi vise à mieux définir les notions de service public de distribution d'eau ainsi que d'assainissement et précise les compétences communales en la matière. Pour ce faire, il crée dans la section 2 du chapitre IV du titre II du livre II de la deuxième partie du code précité une sous-section 1 intitulée : « Définitions et dispositions générales ». Elle contient les articles L. 2224-7 à L. 2224-11, modifiés par le projet de loi, ainsi que les nouveaux articles L. 2224-11-1 à L. 2224-11-3.

1. Définition des services publics d'assainissement

L'actuel article L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales définit les services d'assainissement comme « tout service chargé en tout ou partie de la collecte, du transport ou de l'épuration des eaux usées ».

Or, l'article L. 2224-8 du même code définit de manière beaucoup plus large le champ des compétences communales en matière d'assainissement, puisqu'il prévoit que « les communes prennent obligatoirement en charge les dépenses relatives aux systèmes d'assainissement collectif, notamment aux stations d'épuration des eaux usées et à l'élimination des boues qu'elles produisent, et les dépenses de contrôle des systèmes d'assainissement non collectif ». L'ensemble de ces domaines devrait donc relever des services publics d'assainissement. Il est en outre prévu que les communes exercent une compétence facultative en matière d'entretien des systèmes d'assainissement non collectif.

Afin d'éviter toute contradiction entre les deux dispositifs, le paragraphe I du présent article du projet de loi procède à une rédaction globale de l'article L. 2224-7, qui définit, de manière très laconique, les services d'assainissement, désormais qualifiés de « publics », comme « tout service assurant tout ou partie des prestations prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 2224-8 ».

Ces deux alinéas sont, pour leur part, réécrits par le paragraphe III du présent article. Constituent donc désormais des services publics d'assainissement les services assurant des prestations d'assainissement collectif des eaux usées, qui comprennent leur collecte, leur transport, leur épuration et l'élimination des boues produites, ainsi que le contrôle des installations d'assainissement non collectif.

Comme on le verra plus loin, les compétences communales facultatives en matière d'assainissement non collectif sont étendues par le projet de loi, puisqu'elles comportent l'entretien des installations d'assainissement non collectif, mais également la remise en état ou la création de ces dernières.

2. Définition des services publics de distribution d'eau

A l'heure actuelle, le code général des collectivités territoriales ne fournit aucune définition des services publics de distribution d'eau, alors que ceux-ci y sont mentionnés par deux fois, aux articles L. 2224-2 et L. 2224-6.

Le paragraphe II de cet article du projet de loi vise à introduire, dans le code précité, un nouvel article L. 2224-7-1 définissant clairement les services publics de distribution d'eau qui ont donc expressément la nature de services publics industriels et commerciaux. Constitue donc, aux termes de ce nouvel article, un service public de distribution d'eau, tout service assurant tout ou partie de la production d'eau par captage ou pompage, de la protection du point de prélèvement, du traitement, du transport, du stockage et de la distribution d'eau destinée à la consommation humaine.

3. Élargissement des compétences communales facultatives en matière d'assainissement

Comme on l'a vu, l'actuel article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, notamment dans ses deux premiers alinéas, définit les missions de la commune en matière d'assainissement en précisant qu'il lui revient de « prendre en charge les dépenses » relatives aux systèmes d'assainissement collectif, (stations d'épuration et élimination des boues comprises), ainsi que les dépenses de contrôle des systèmes d'assainissement non collectif. En outre, il prévoit que les communes peuvent prendre en charge les dépenses d'entretien des systèmes d'assainissement non collectif.

Le paragraphe III du présent article réécrit ces deux alinéas en y introduisant les modifications suivantes :

- il est désormais disposé que les communes « assurent » l'assainissement collectif ainsi que le contrôle des installations d'assainissement non collectif. Elles ne se bornent donc plus à « prendre en charge » les dépenses y afférentes. Cette dernière formulation était en effet trop réductrice, la commune étant responsable de l'assainissement ; elle était en outre incompatible avec les autres dispositions du projet de loi qui prévoient la prise en charge, par les particuliers, de certaines dépenses engagées par les communes, notamment pour des travaux de raccordement ;

- par ailleurs, le champ de compétences des communes est clarifié. Il couvre l'assainissement collectif, composé de la collecte, du transport, de l'épuration et de l'élimination des boues produites, ainsi que le contrôle des installations d'assainissement non collectif. Sur le fond, les compétences obligatoires des communes restent donc inchangées ;

- les compétences facultatives des communes sont par ailleurs étendues. Elles recouvrent la possibilité, actuellement existante, d'entretenir les systèmes d'assainissement non collectif. Il est toutefois précisé que cette faculté est exercée à la demande des propriétaires, par la commune agissant dans le cadre fixé par le code des marchés publics ou par les délégataires lorsque les contrats de délégation de service public le prévoient, ce qui permet de mieux encadrer et donc de « sécuriser » cette possibilité.

Une nouvelle compétence facultative est en outre introduite : la commune ou son délégataire peut désormais, dans les mêmes conditions que celles décrites plus haut, faire assurer la remise en état de ces installations, ou leur création pour les immeubles existants qui en sont dépourvus. Cette disposition permet de donner une base légale à des pratiques existantes et répond en outre à une réelle demande des élus locaux, qui ont à satisfaire les attentes des usagers dans ce domaine. Les dispositifs existants devraient en outre voir leur qualité améliorée par une mise en conformité facilitée.

Enfin, le dernier alinéa de l'article L. 2224-8 du code précité est modifié. Il soumet actuellement l'ensemble des prestations des « services d'assainissement municipaux » au respect d'échéances fixées par voie réglementaire, aux articles R. 2224-11 et suivants du code général des collectivités territoriales, en application de la directive 91/271/CEE du Conseil du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires. Or, celle-ci ne vise que les systèmes d'assainissement collectif, et non l'ensemble des services d'assainissement municipaux, qui recouvrent également les installations d'assainissement non collectif. Il convenait donc de lever toute ambiguïté en ne soumettant que les seuls services d'assainissement collectif au respect des échéances réglementaires, ce qui est l'objet du dernier alinéa du paragraphe III de l'article 30 du projet de loi.

La commission a adopté deux amendements du rapporteur visant à introduire la possibilité, pour les communes, d'une part d'assurer elles-mêmes l'entretien des installations d'assainissement non collectif et, d'autre part, d'assurer elles-mêmes la remise en état ou la création de telles installations (amendements nos 211 et 212).

4. Coordination des services de distribution d'eau par les communes

On a vu précédemment que les services publics de distribution d'eau seront désormais définis par la loi, ce qui n'est aujourd'hui pas le cas. Pour autant, la distribution de l'eau, à la différence de l'assainissement, ne constitue pas une compétence communale obligatoire.

Il convenait donc de prévoir, dans les cas où la distribution de l'eau est assurée par un service privé, que les communes ont un droit de regard sur l'organisation de ce dernier, et même qu'elles sont tenues de connaître les distributeurs et les modalités de leur intervention.

C'est l'objet du paragraphe IV de cet article du projet de loi, qui introduit un nouvel article L. 2224-8-1 dans le code général des collectivités territoriales. Prenant acte que la distribution de l'eau n'est pas une compétence communale obligatoire, il dispose que là où les communes n'assurent pas ce service, elles sont tenues de veiller « à la coordination des différents services qui peuvent exister sur leur territoire ».

Afin d'éviter toute confusion, il est en outre précisé que la personne qui assure le service reste soumise aux dispositions de l'article L. 1321-1 du code de la santé publique. C'est donc le distributeur, et non le maire, qui, en tant que « personne qui offre au public de l'eau en vue de l'alimentation humaine à titre onéreux » est tenu « de s'assurer que cette eau est propre à la consommation ». La nouvelle mission de coordination des services de distribution d'eau par les communes n'emporte donc pas de transfert de responsabilité du distributeur vers ces dernières, la distribution de l'eau ne figurant pas au rang de leurs compétences obligatoires.

La commission a examiné un amendement présenté par M. Jean-Michel Marchand visant à créer un fonds de solidarité des communes sur la gestion de l'eau, destiné à apporter une compensation financière aux communes sur le territoire desquelles des captages et des forages sont opérés pour prélever de l'eau.

M. Jean-Michel Marchand a rappelé que la plupart des captages étaient réalisés sur le territoire de communes rurales ou de montagne afin d'alimenter en eau la population de communes urbaines qui sont les plus fortes consommatrices. M. Jean-Michel Marchand a estimé qu'il était nécessaire, au même titre que la dotation de solidarité urbaine, d'instituer un mécanisme de solidarité entre ces deux catégories de communes, le développement des communes rurales étant souvent contraint par les servitudes et les prescriptions existant autour des points de captage

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a estimé pour sa part que la création d'un tel fonds, destiné aux communes rurales, n'était pas opportune alors que le projet de loi visait à l'inverse à rééquilibrer les usages de l'eau entre ville et milieu rural. Il a souligné qu'en outre, des indemnisations pour la mise en place de servitudes et de zones de protection de captage pouvaient être instituées. Il s'est également étonné que M. Jean-Michel Marchand souhaite par ailleurs supprimer le Fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE).

M. Jean-Michel Marchand a précisé que le FNDAE n'avait pas le même objet que le fonds dont il proposait la création. Après que M. Jean-Marc Nudant eut rappelé qu'un mécanisme de péréquation existait déjà pour la taxe professionnelle, M. Pierre Ducout a estimé qu'un problème identique se posait dans les zones de protection des forages et approuvé le principe de la péréquation. Il a toutefois estimé que celle-ci devait plutôt s'inscrire dans le cadre plus local des SAGE et non au plan national.

M. Félix Leyzour ayant souhaité savoir comment seraient affectées les sommes composant le fonds proposé, M. Jean-Michel Marchand a précisé qu'elles devraient être versées aux communes sur le territoire desquelles des périmètres de protection des captages sont définis. Il a par ailleurs indiqué que dans les périmètres élargis de protection, les pratiques des exploitants agricoles peuvent aujourd'hui être soumises à certaines contraintes, qui s'apparentent parfois à des « v_ux pieux » ; il a souhaité que dans ces périmètres, les agriculteurs soient incités à adopter des pratiques plus respectueuses de l'environnement et que les surcoûts parfois élevés ainsi provoqués puissent être compensés par le fonds. M. Robert Galley a déclaré rejoindre M. Jean-Michel Marchand sur ce point.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'est alors déclaré favorable au principe d'une péréquation mais a jugé nécessaire de prolonger la réflexion sur ses modalités de mise en _uvre. M. Jean-Michel Marchand, sur proposition du rapporteur, a alors retiré son amendement.

5. Échéances s'imposant aux communes en matière de service public d'assainissement

L'actuel article L. 2224-9 du code général des collectivités territoriales dispose que l'ensemble des prestations prévues à l'article L. 2224-8 du même code doit être assuré sur la totalité du territoire au plus tard le 31 décembre 2005. Rappelons que ces prestations couvrent l'assainissement collectif et, de manière facultative, l'entretien des systèmes d'assainissement non collectif.

Or, le paragraphe III du présent article a modifié l'article L. 2224-8 précité, afin d'introduire une nouvelle compétence facultative de remise en état ou de création d'installations d'assainissement non collectif, qui n'a donc pas à être visée par l'échéance du 31 décembre 2005.

Par voie de conséquence, le paragraphe V du présent article modifie la rédaction de l'article L. 2224-9, en distinguant deux cas :

- en matière d'assainissement non collectif, seules les prestations de contrôle des installations doivent être assurées sur la totalité du territoire au plus tard le 31 décembre 2005 ;

- s'agissant de l'assainissement collectif, il revient à un décret en Conseil d'Etat de déterminer les prestations qui doivent être assurées sur la totalité du territoire à la même échéance (d'après les informations fournies à votre rapporteur, il s'agit des prestations assurées sur le territoire des communes de plus de 2 000 habitants).

Le paragraphe  VI du présent article procède, quant à lui, à des ajustements rédactionnels de l'article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, qui a suscité de nombreuses interrogations.

Celui-ci dispose en effet que les communes ou leurs établissements publics délimitent, après enquête publique, « les zones d'assainissement collectif où elles sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation de l'ensemble des eaux collectées ». Il prévoit par ailleurs que les communes doivent délimiter « les zones relevant de l'assainissement non collectif où elles sont seulement tenues [...] d'assurer le contrôle des dispositifs d'assainissement ». Or, en application de l'article L. 2224-8, les communes ont pour obligation de contrôler toutes les installations d'assainissement autonome, y compris celles situées dans des zones d'assainissement collectif. Cette précision est apportée par le premier alinéa du présent paragraphe, afin d'éviter toute incertitude.

Par ailleurs, l'actuel article L. 2224-10 définit les zones d'assainissement non collectif comme celles où les communes sont seulement tenues d'assurer le contrôle des installations d'assainissement autonome et, « si elles le décident, leur entretien ». L'entretien de ces installations n'étant pas une compétence obligatoire mais facultative, il est inutile de le mentionner ; c'est pourquoi le deuxième alinéa de ce paragraphe supprime cette référence.

Enfin, son dernier alinéa vise à mieux définir les zones délimitées par les communes pour y prévoir des installations de collecte, de stockage et de traitement des eaux pluviales et de ruissellement. Aux termes de l'actuel article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, ces zones doivent être délimitées lorsque la pollution apportée par les eaux pluviales « risque de nuire gravement à l'efficacité des dispositifs d'assainissement ». Le projet de loi prévoit qu'elles doivent également être délimitées lorsque cette pollution risque de nuire gravement à la qualité du milieu aquatique, dans un souci de gestion qualitative de la ressource en eau.

6. Gestion des services publics de distribution d'eau et d'assainissement

L'actuel article L. 2224-11 du code général des collectivités territoriales se limite à disposer que les services publics d'assainissement sont « financièrement gérés » comme des services à caractère industriel et commercial. Cette formulation ne qualifie pas expressément ces services de services à caractère industriel et commercial, alors que cette nature leur a été reconnue par une jurisprudence abondante (3).

Afin de lever toute ambiguïté, le paragraphe VII du présent article du projet de loi procède à une rédaction globale de cet article, aux termes de laquelle les services publics d'assainissement sont expressément qualifiés de services à caractère industriel et commercial, cette qualification étant en outre étendue aux services publics de distribution d'eau (premier alinéa).

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour visant à maintenir la définition actuelle des services publics d'eau et d'assainissement, en précisant qu'ils sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial. Après que M. Félix Leyzour eut précisé qu'il s'agissait ainsi de préserver le statut des personnels relevant de la fonction publique territoriale, M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a souligné que la jurisprudence reconnaissait aujourd'hui aux services de distribution d'eau et d'assainissement le caractère de services publics industriels et commerciaux, même si l'article L. 2224-11 du code général des collectivités territoriales se borne à préciser qu'ils sont simplement « financièrement gérés » comme de tels services. Il a donc estimé que la nouvelle définition donnée par le projet de loi ne menaçait en rien le statut de leur personnel. M. Félix Leyzour ayant réaffirmé son attachement à cet amendement, le rapporteur a exprimé un avis favorable à cette disposition, et la commission a adopté cet amendement (amendement n° 213).

Cet article est en outre largement complété pour préciser les modalités de gestion de ces services, selon deux axes :

- il est précisé, au deuxième alinéa, que la section d'investissement du budget peut être votée en excédent, pour permettre les travaux d'extension ou d'amélioration des services arrêtés par le conseil municipal ou l'assemblée délibérante de l'établissement public, dans le cadre d'une programmation pluriannuelle des travaux. On ne peut que se féliciter de cette disposition, qui évitera des augmentations brutales du prix de l'eau pour financer des travaux. Elle offrira en outre une alternative aux collectivités qui, pour éviter cette augmentation subite du prix de l'eau, se tournent vers la délégation de service ou accroissent sensiblement leur fonds de roulement, ce qui n'est pas toujours bien perçu par les trésoriers payeurs généraux ou par les usagers des services ;

- le dernier alinéa renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de déterminer le régime des redevances dues aux communes en raison de l'occupation de leur domaine public par des ouvrages de distribution d'eau et d'assainissement.

De telles redevances peuvent être demandées par des communes à leurs délégataires ; or, leur montant n'est pas encadré et elles peuvent parfois apparaître comme des ersatz de droits d'entrée, qui ont par ailleurs été interdits par la loi n° 95-127 relative aux marchés publics et délégations de service public. Cette pratique peut alors conduire à des transferts de charges entre les usagers et le budget communal et à une augmentation sensible des factures des abonnés, jusqu'à 5 % par an.

Pour éviter que cette charge ne pèse trop sur les usagers, le dernier alinéa de l'article L. 2224-11, dans sa nouvelle rédaction, prévoit donc d'encadrer le régime de ces redevances par décret en Conseil d'Etat, comme cela est d'ailleurs déjà le cas en matière de réseaux d'électricité, de gaz ou de télécommunications. D'après les informations fournies à votre rapporteur, le décret prévoirait un plafonnement de la redevance en fonction de la population de la commune où se trouvent les ouvrages. Ainsi, la redevance due à une commune de 10 000 habitants serait plafonnée à 17 100 francs, soit 1,71 franc par habitant et environ 4 francs par facture et par an. D'après les estimations du ministère chargé de l'environnement, sur la base de 800 000 kilomètres de canalisations de distribution d'eau et d'assainissement, dont les deux tiers donnent lieu à une délégation de service public, le montant global des redevances pour occupation du domaine public devrait être de 80 millions de francs par an, soit 0,1 % des dépenses du secteur de la distribution d'eau et de l'assainissement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que les redevances pour occupation du domaine public ne sont pas obligatoires mais facultatives (amendement n° 214). La commission a ensuite examiné deux amendements identiques de MM. Pierre Micaux et Jean Proriol, visant à compléter l'article L. 2224-1 du code général des collectivités territoriales pour prévoir que les dotations budgétaires affectées aux dépenses d'investissement des services publics à caractère industriel et commercial peuvent comprendre des autorisations de programme et des crédits de paiement. Après que M. Serge Poignant eut souligné les avantages en matière de transparence et d'efficacité d'un tel dispositif, M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'y est déclaré défavorable en raison de son caractère très général, puisqu'il ne se limite pas aux seuls services publics de distribution d'eau et d'assainissement. M. Jean-Claude Robert a indiqué que l'obligation imposée aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement d'établir un budget en équilibre pénalisait fortement les régies, ce qui a incité le Gouvernement à introduire, dans le projet de loi, la possibilité de voter la section d'investissement du budget en excédent. Il a noté que des collectivités locales de taille importante pouvaient toutefois être désireuses d'avoir recours à des autorisations de programme et des crédits de paiement. Le rapporteur ayant proposé aux auteurs des deux amendements d'envisager une rédaction plus restrictive afin de limiter le dispositif proposé au seul domaine de l'eau, MM. Pierre Micaux et Jean Proriol ont retiré leur amendement respectif.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Claude Gaillard visant à étendre l'exonération de la redevance due en raison de l'occupation du domaine public de l'Etat à l'ensemble des services publics de distribution d'eau et d'assainissement, quel que soit leur mode de gestion. Le rapporteur s'y est déclaré défavorable et a indiqué que l'amendement procédait à une unification incomplète du régime de ces redevances, puisqu'il ne traitait pas la question des régies qui n'acquittent actuellement pas de redevances pour occupation du domaine public des communes. Suivant son rapporteur, la commission a rejeté cet amendement.

7. Mission des services publics de distribution d'eau et d'assainissement en matière de cohésion sociale et de lutte contre l'exclusion

L'eau n'est pas seulement une ressource naturelle à protéger ou un bien économique soumis aux seules lois du marché. C'est également un bien social, qui a d'ailleurs été implicitement reconnu comme tel par l'article 136 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la loi contre les exclusions qui a institué le mécanisme de la « Charte solidarité eau ».

Le paragraphe VIII du présent article vise à conforter le rôle social de l'eau, en introduisant un nouvel article L. 2224-11-1 dans le code général des collectivités territoriales qui définit les missions des services publics de distribution d'eau et d'assainissement en matière de cohésion sociale et de lutte contre l'exclusion.

Il est tout d'abord disposé, dans le deuxième alinéa (1°) de ce nouvel article, qu'il leur revient de « faciliter l'accès des usagers domestiques » aux services, dans les conditions prévues par l'article 31 du projet de loi et qui sont relatives :

- à l'envoi d'un règlement de service à l'usager ou à l'abonné (article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales) ;

- au mode de calcul de la redevance du service de distribution d'eau (article L. 2224-12-4) et de la redevance de service d'assainissement collectif (article L. 2224-12-5), y compris celui appliqué aux communes dans lesquelles la consommation d'eau connaît de fortes variations saisonnières (article L. 2224-6).

Le troisième alinéa (2°) de cet article constitue plus un rappel des dispositifs existant en faveur des personnes se trouvant en situation de précarité qu'une réelle nouveauté.

En effet, l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles dispose déjà que toute personne ou famille, éprouvant des difficultés particulières du fait d'une situation de précarité, a droit à une aide de la collectivité pour « accéder ou pour préserver son accès à une fourniture d'eau », le maintien de la fourniture d'eau étant garanti, en cas de non paiement des factures, jusqu'à l'intervention du dispositif prévu à l'article L. 261-4 du même code, à savoir la Charte solidarité eau.

Celle-ci correspond au « dispositif national d'aide et de prévention » mentionné à l'article L. 261-4 de ce même code et qui fait l'objet d'une convention nationale entre l'Etat et les distributeurs d'eau, afin de définir notamment le montant et les modalités de leur concours financier respectif. Des conventions sont en outre passées dans chaque département entre le préfet, chaque distributeur d'eau et chaque collectivité territoriale ou groupement de collectivités qui le souhaite et, le cas échéant, avec chaque centre communal ou intercommunal d'action sociale, les organismes de protection sociale et les associations de solidarité. Elles doivent notamment déterminer les conditions d'application des conventions nationales et les actions préventives à mener en matière de maîtrise d'eau.

Le dispositif de la Charte solidarité eau, qui repose sur un mécanisme d'abandon de créances, a dans les faits connu peu de succès. Rappelons qu'elle a été signée le 6 novembre 1996 par l'Etat (ministère de l'emploi et de la solidarité), la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, l'Association des maires de France et le syndicat professionnel des distributeurs d'eau, mais n'a été mise en place que dans quelques départements. La principale difficulté semble avoir résidé dans la complexité des factures d'eau et d'assainissement et dans la multiplicité des intervenants. En effet, le système d'abandon de créances nécessite l'adhésion de chacun des 34 000 services de distribution d'eau et d'assainissement aux conventions départementales. Dans les faits, il semble que lorsqu'une convention départementale existe, seules quelques collectivités (souvent les plus importantes) l'aient signée.

Afin de rendre ce dispositif plus opérationnel, une nouvelle convention solidarité eau a d'ailleurs été conclue en avril 2000. Le dispositif a été amélioré, en instaurant en soutien de l'Etat à hauteur de 30 millions de francs pour la prise en charge des redevances (cas de collectivités refusant de contribuer) et la gestion des dossiers (150 francs en moyenne par dossier). Un engagement d'abandon de créance par les délégataires a également été pris, pour un maximum de 20 millions de francs par an. Fin 2000, on recensait 25 conventions départementales signées pour un engagement financier de 16,5 millions de francs répartis entre l'Etat (47 %), le syndicat professionnel des distributeurs d'eau (21 %), les conseils généraux (7 %), les communes (6 %), les Assedic (5 %), les régies (1 %) et autres (13 %). Le montant moyen des aides accordées est de 600 francs et 22 000 dossiers ont été traités en 2000. D'après le ministère de l'emploi et de la solidarité, 73 % des départements seraient couverts par une convention au 31 décembre 2001.

La seule existence de la Charte solidarité-eau montre que les services publics de distribution et d'assainissement doivent concourir à la cohésion sociale, leurs prestations étant indispensables à la vie et au bien-être de leurs usagers.

Le projet de loi confirme qu'une telle mission est assignée à ces services, en disposant qu'il leur revient d'assurer à toute personne en situation de précarité, usager du service, un « accès à l'eau suffisant pour assurer sa santé et son bien-être et ceux de sa famille » (troisième alinéa du nouvel article L. 2224-11-1 du code général des collectivités territoriales). Le droit d'accès à l'eau est ainsi affirmé.

Il est en outre précisé, dans le même alinéa, que ce droit est notamment assuré par la mise en _uvre de la Charte de solidarité eau, en liaison avec les services sociaux des départements et des communes, ainsi qu'avec les organismes de sécurité sociale. En pratique, ce sont surtout les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale qui sont ainsi visés. Cette précision est utile, car le dispositif actuel ouvre un droit aux plus démunis mais ne précise pas que sa mise en _uvre par ces centres est obligatoire.

Par ailleurs, le quatrième alinéa de ce nouvel article renforce la protection des locataires d'habitations situées dans un immeuble collectif, en prévoyant que dans le cas d'un contrat collectif de fourniture d'eau à un tel immeuble, le service de distribution d'eau, le propriétaire ou le gestionnaire de l'immeuble ne peuvent interrompre la fourniture d'eau, sauf si tous les occupants légaux y consentent ou si l'immeuble est déclaré insalubre avec interdiction d'habiter, après le départ de tous les occupants. Cela constitue une réelle avancée que votre rapporteur salue, car elle est extrêmement protectrice des usagers les plus démunis.

Quant au cinquième alinéa de ce nouvel article, il prévoit qu'en cas d'abonnement individuel pour un immeuble d'habitation à usage de résidence principale, et en cas d'impayé de la facture d'eau, le service public de distribution d'au doit informer l'abonné des modalités d'application de la Charte solidarité eau, ce qui va là encore dans le bon sens, de nombreuses familles n'ayant pas connaissance de ce mécanisme.

Il est en outre prévu, au même alinéa, qu'à la demande des services sociaux des collectivités publiques, le service est tenu de suspendre l'engagement des poursuites pendant une période de trois mois, renouvelable une fois ; cette disposition devrait permettre aux usagers en situation précaire de bénéficier d'un délai supplémentaire pour régulariser leur situation.

Enfin, le même alinéa précise qu'en l'absence de mise en _uvre de la Charte solidarité eau, le service public de distribution d'eau doit assurer le maintien d'un débit minimal de fourniture d'eau. Là encore, cette disposition constitue une avancée en matière de protection des populations les plus démunies. Mais elle peut également être à l'origine d'un moindre taux de paiement des factures, ce risque pouvant concerner 5 % du montant des factures d'eau. Cette charge pèsera donc sur les distributeurs d'eau.

Votre rapporteur ne souhaite pas que ce dispositif soit détourné de son objectif initial et avantage les mauvais payeurs ne se trouvant pas dans une situation de précarité. En effet, l'équilibre financier de certains services, et notamment des petites régies, pourrait être gravement menacé.

C'est pourquoi votre rapporteur estime nécessaire que soit instituée une aide directe à la fourniture d'eau sur le modèle de l'aide personnalisée au logement. Les personnes les plus démunies ayant souvent, voire systématiquement, à recourir au mécanisme de la Charte solidarité eau, il serait en effet plus simple de considérer que ce dernier ne doit intervenir que pour régler des problèmes de paiement ponctuels, mais non des difficultés financières chroniques, qui seraient couvertes par cette aide directe.

Par voie de conséquence, il conviendrait d'encadrer la fourniture du débit minimal d'eau, afin d'éviter de favoriser les mauvais payeurs.

S'agissant du dernier alinéa de ce nouvel article, il ouvre la possibilité à l'autorité administrative d'imposer la mise en place d'une distribution d'eau par borne fontaine. Cette disposition permettra ainsi de renforcer la salubrité publique dans les immeubles ou quartiers particulièrement dégradés.

La commission a adopté un amendement de coordination présenté par le rapporteur lié à un amendement ultérieur visant à instituer une aide à la fourniture d'eau (amendement n° 215). Elle a également adopté un amendement du même auteur visant à corriger une erreur de référence (amendement n° 216).

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour visant à préciser que pour les usagers dont les revenus sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond, les tarifs appliqués aux usagers domestiques dans le domaine de l'eau doivent tenir compte du caractère indispensable de ce bien en instaurant pour une tranche de leur consommation une tarification spéciale « produit de première nécessité ». M. Félix Leyzour a indiqué que cet amendement reprenait une disposition similaire existant pour le service public de l'électricité et a souligné l'importance sociale de cette disposition. Reconnaissant qu'il était peut-être difficile de mettre en _uvre une telle tarification, il a estimé indispensable de laisser la possibilité aux plus démunis de bénéficier d'un droit à l'eau.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a signalé qu'il présentait également un amendement visant à instituer une aide à la fourniture d'eau, afin de tirer la conséquence du caractère inadapté de la « charte solidarité eau », pour l'instant mal appliquée. Soulignant qu'il était difficile d'instaurer, selon la composition des familles, des tarifications différentes, il a attiré l'attention sur le fait que la consommation d'eau des personnes les plus démunies était souvent très élevée en raison des fuites ou de la vétusté de leurs appareils électroménagers. Il a estimé qu'il était préférable d'instaurer une aide permanente à la fourniture d'eau, financée par le Fonds de solidarité pour le logement, afin que le droit à l'eau soit enfin reconnu, la « charte solidarité eau » ne devant intervenir que pour régler des « accidents de vie » ponctuels. Il a souhaité également que ce dispositif soit limité aux personnes qui en ont réellement besoin.. Il s'est enfin déclaré conscient des problèmes posés par ces amendements au regard de l'article 40 mais a souhaité susciter un débat sur le rôle social de l'eau, pour l'instant négligé par le projet de loi, et alerter le Gouvernement sur ce point. Il a donc proposé qu'une réflexion de l'ensemble des commissaires soit menée sur ce sujet afin que ceux-ci proposent conjointement un amendement lors de l'examen du projet de loi en séance publique.

M. Jean-Michel Marchand a estimé que l'amendement soumis à l'examen de la commission suscitait un véritable débat de fond et a déclaré son attachement à l'affirmation d'un droit à l'eau. Estimant que l'amendement du rapporteur était intéressant, mais pouvait être délicat à mettre en _uvre, il a également souhaité qu'un débat en séance publique ait lieu et que les commissaires émettent des propositions conjointes. M. André Lajoinie, président, a indiqué que le mécanisme existant en matière d'électricité s'était révélé efficace pour régler des situations très délicates et a souligné qu'une aide permanente ne permettrait pas de régler tous les problèmes, les situations familiales pouvant évoluer rapidement dans le temps, ce qui dans certains cas nécessite des mesures immédiates.

M. Pierre Ducout a alors estimé qu'il pourrait être intéressant de mener une réflexion sur l'institution de tarifs dégressifs pour une quantité maximale consommée, sous conditions de ressources. M. Robert Galley a déclaré rejoindre M. Félix Leyzour, le dispositif existant en matière d'électricité pouvant être utilement étendu au domaine de l'eau. Il s'est toutefois affirmé confiant quant à la capacité du rapporteur à proposer un amendement répondant à l'ensemble des préoccupations exprimées par les commissaires et a annoncé qu'il s'y montrerait favorable.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, après avoir rappelé qu'il avait proposé un amendement instituant la gratuité de la première tranche d'eau consommée lors de l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre les exclusions, a indiqué qu'il avait depuis longuement travaillé sur ce thème et conclu que l'application de la « charte solidarité eau » aux individus et non aux immeubles collectifs, ne constituait pas une bonne solution pour mettre en place un droit à l'eau effectif. M. Félix Leyzour a alors indiqué qu'il retirait son amendement et qu'il souhaitait mener une réflexion conjointe avec le rapporteur pour proposer un amendement sur cette question en séance publique.

La commission a ensuite examiné deux amendements identiques de MM. Pierre Micaux et Jean Proriol visant à préciser que le maintien d'un débit minimal de fourniture d'eau ne constitue qu'une faculté du service public de distribution d'eau. Après que M. Robert Galley eut indiqué qu'il s'agissait ainsi de permettre à ces services d'assurer le maintien d'un débit minimal dans de bonnes conditions, le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement, celui-ci ouvrant en effet la possibilité aux services intéressés de décider de couper l'eau, ce qui lui a semblé trop radical. En conséquence, la commission a rejeté ces deux amendements puis, elle a adopté un amendement du rapporteur visant à préciser que les conditions d'installation et le volume du débit minimal de fourniture d'eau doivent être déterminés par le règlement de service (amendement n° 217). M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a indiqué qu'il s'agissait ainsi de mieux encadrer la notion de débit minimal, en confiant cette mission aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement, le règlement de service étant par ailleurs soumis à l'avis de la commission consultative des services publics locaux.

Puis, la commission a examiné un amendement du rapporteur visant à préciser que les départements de la région parisienne ont compétence pour assurer tout ou partie de l'assainissement collectif des eaux usées, dans des conditions fixées par conventions avec les communes concernées. Le rapporteur a indiqué qu'il s'agissait de donner une base légale à une pratique vieille de plus de trente ans ; M. André Lajoinie, président, ayant noté que cet amendement permettait de régler une situation délicate sans procéder au démantèlement de structures existantes, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 218). Puis, le rapporteur a retiré un amendement visant à instituer une aide à la fourniture d'eau, financée par le Fonds de solidarité pour le logement et versée sous condition de ressources et en fonction du nombre de personnes habitant le logement, par la Caisse nationale d'allocations familiales au propriétaire, au locataire du logement, ou au distributeur d'eau lui-même, selon des cas définis par décret. Cet amendement prévoit en outre qu'en cas de versement au propriétaire, le montant de l'aide est déduit des charges dues par le locataire ; en cas de versement au service public de distribution d'eau, ce montant est déduit de la facture que l'usager aurait à acquitter.

8. Possibilité pour les services de distribution d'eau et d'assainissement de mener des actions de coopération ou humanitaires

Certains services de distribution d'eau ou d'assainissement participent à des actions de coopération décentralisée avec les acteurs concernés de pays en développement, afin d'aider ces derniers à mettre en place une politique de l'eau potable et de l'assainissement. Ils participent également à des actions humanitaires dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement.

Prenant acte de ces pratiques, pour l'instant dépourvues de base légale, le paragraphe VIII de cet article du projet de loi introduit un nouvel article L. 2224-11-2 dans le code général des collectivités territoriales, qui ouvre explicitement la possibilité, pour les gestionnaires de ces services publics, de participer à de telles actions. Il est précisé que celles-ci doivent s'inscrire dans le cadre des engagements internationaux de la France et peuvent être menées tant par les collectivités locales que par les délégataires de ces services.

9. Soumission des établissements publics de coopération intercommunale aux mêmes dispositions que celles s'imposant aux communes en matière d'assainissement et de distribution d'eau

Le dernier alinéa du paragraphe VIII de cet article du projet de loi introduit un nouvel article L. 2224-11-3 dans le code général des collectivités territoriales, pour préciser que les dispositions de ce code relatives aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement s'appliquent aux établissements publics de coopération intercommunale et aux syndicats mixtes lorsque les communes leur ont transféré leurs compétences en la matière. Cette « disposition-balai » permet ainsi de couvrir les nouveaux champs de compétences facultatives introduits par le projet de loi en matière de distribution d'eau et d'assainissement.

La commission a adopté l'article 30 ainsi modifié.

Chapitre II

TARIFICATION ET RÈGLEMENTS DES SERVICES

Article 31

Dispositions relatives à la tarification et aux règlements
des services publics de distribution d'eau et d'assainissement

Cet article vise à introduire, dans la section 2 (dispositions relatives aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement) du chapitre IV (services publics industriels et commerciaux) du titre II du livre II du code général des collectivités territoriales une nouvelle sous-section 2, relative à la tarification et aux règlements de services. Elle contient l'article L. 2224-12 et les nouveaux articles L. 2224-12-1 à L. 2224-12-8.

Article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales

Règlements des services

L'actuel article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions dans lesquelles sont instituées, recouvrées et affectées les redevances dues par les usagers pour les services de distribution d'eau et d'assainissement.

Le paragraphe I de l'article 31 du projet de loi procède à une réécriture globale de cet article, dont les dispositions sont reprises ultérieurement, à l'article L. 2224-12-8 créé par le paragraphe II de cet article du projet de loi.

Le secteur de la distribution d'eau et de l'assainissement fait l'objet de critiques récurrentes en raison de l'opacité de son fonctionnement et du manque d'information des usagers, qui connaissent souvent mal l'impact de leur consommation sur leur facture et ne sont pas incités à maîtriser cette consommation.

Pour assurer une plus grande transparence et faciliter les démarches entreprises par les usagers, la nouvelle rédaction de l'article L. 2224-12 impose aux services de distribution d'eau et d'assainissement d'adresser à l'usager ou à l'abonné et, le cas échéant, au propriétaire du fonds de commerce ou au propriétaire de l'immeuble, un règlement de service. Le contenu de celui-ci est précisé : il doit définir « les obligations respectives du gestionnaire, des abonnés et des usagers », en fonction des « conditions de réalisation du service », c'est-à-dire, selon les informations fournies à votre rapporteur, en fonction de la nature du service ou d'autres paramètres comme les conditions géographiques. Les règlements de service n'ont donc pas vocation à être uniformes et peuvent être adaptés à des circonstances particulières ; ils concernent à la fois les prestations de distribution d'eau, celles d'assainissement collectif et celles d'assainissement non collectif.

Il est en outre prévu que le destinataire du règlement de service doit en accuser réception. Si votre rapporteur souscrit pleinement à la démarche d'une information systématique des usagers, il est plus réservé quant à cette dernière disposition, qui pourrait conduire à une sécurité juridique moindre des services publics n'ayant pas obtenu d'accusé de réception.

La commission a examiné deux amendements de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux en discussion commune visant, d'une part, à préciser que les règlements de service sont élaborés par les collectivités et non par les exploitants, d'autre part, à faciliter l'envoi des règlements en permettant l'utilisation d'une solution électronique et, enfin, d'éviter que l'application de ces règlements ne soit paralysée par l'exigence d'un accusé de réception de la part des abonnés.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a estimé que la procédure ainsi proposée était trop lourde et a souligné qu'un de ses amendements visait à ce que seuls les abonnés reçoivent les règlements de service et en accusent réception, ces documents étant toutefois obligatoirement tenus à la disposition des usagers.

M. Pierre Micaux a déclaré rejoindre le rapporteur sur ce point, mais a souhaité connaître sa position concernant l'élaboration des règlements de service par les collectivités.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a alors précisé qu'il avait déposé à l'article suivant un amendement visant à ce que le Haut conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement élabore un modèle de règlement de service ; il s'est en outre engagé à préciser par un amendement ultérieur que le règlement de service est élaboré par les collectivités et non par les exploitants.

La commission a rejeté l'amendement de M. Jean Proriol et M. Pierre Micaux a retiré son amendement. Puis, elle a adopté un amendement du rapporteur, tendant à faire accuser réception du règlement de service par l'abonné et à tenir ce règlement à la disposition des usagers (amendement n° 219).

Article L. 2224-12-1 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Principe de facturation de la fourniture d'eau

Déjà, en 1997, un rapport de la Cour des comptes relatif à la gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement relevait, comme une anomalie, l'absence de facturation de la consommation d'eau des services publics locaux. En effet, les consommations d'eau de bâtiments communaux devraient être financées par le budget général de la commune, et donc par l'impôt, et non par le budget du service public de l'eau.

C'est pourquoi le nouvel article L. 2224-12-1 dispose que, quel qu'en soit le bénéficiaire, la fourniture d'eau fait l'objet d'une facturation. Seules les consommations publiques liées à la lutte contre l'incendie sont gratuites, en raison des difficultés rencontrées pour les mesurer. Les communes ont pour obligation de mettre fin, avant le 1er janvier 2005, à toute disposition ou stipulation contraire au principe de facturation de toute consommation. Cette échéance étant relativement éloignée, les services concernés disposeront d'une durée suffisante pour s'adapter à la nouvelle législation, notamment par la recherche des conventions déjà passées et qui peuvent être relativement anciennes, ou par la pose de compteurs.

D'après les estimations du ministère chargé de l'environnement, la facturation de leur consommation d'eau aux organismes publics pourrait conduire à une baisse de la facture d'eau pour les usagers, certes parfois imperceptible, mais pouvant aller, dans certaines villes, jusqu'à 5 à 10 %. En outre, cette disposition incitera les collectivités publiques à maîtriser leur consommation d'eau, celles-ci présentant un potentiel d'économie de 20 à 30 % des volumes consommés, d'après le ministère chargé de l'environnement.

La commission a examiné, en discussion commune, un amendement du rapporteur visant à préciser qu'à compter du 1er janvier 2005, tout abonné qui en fera la demande pourra payer les factures relatives à la fourniture d'eau potable et à l'assainissement, au moyen de prélèvements effectués chaque mois sur un compte ouvert à son nom dans un établissement habilité et, deux amendements identiques de MM. Pierre Micaux et Jean Proriol prévoyant une telle faculté à compter du 1er janvier 2003. Le rapporteur ayant indiqué que la date de 2005 lui semblait préférable, M. Pierre Micaux a retiré son amendement pour se rallier à celui du rapporteur. La commission a ensuite adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 220) et rejeté celui de M. Jean Proriol.

Article L. 2224-12-2 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Modalités d'établissement des redevances de distribution d'eau
et d'assainissement

L'article L. 2331-2 du code général des collectivités territoriales mentionne, parmi les recettes non fiscales de la section de fonctionnement du budget communal, « le produit des concessions d'eau et de l'enlèvement des boues » ; il en ressort que les tarifs des services publics de l'eau et de l'assainissement doivent être fixés par délibération du conseil municipal, ou de l'assemblée délibérante de l'établissement public lorsque celui-ci a bénéficié d'un transfert de compétences.

Il n'était pourtant pas établi expressément que les règles relatives aux redevances de distribution d'eau et d'assainissement sont fixées par ces délibérations, alors que tel est le cas en pratique. Dans un souci de clarification, cette précision est apportée par le nouvel article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales, introduit par cet article du projet de loi.

Il étend en outre cette disposition aux sommes prévues par les articles L. 1331-1 à L. 1331-10 du code de la santé publique (sommes dues par les propriétaires pour leur raccordement au réseau public), conformément à l'article 16 du projet de loi (voir plus haut).

Article L. 2224-12-3 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Objet des redevances de distribution d'eau et d'assainissement -
exclusion de cautions et de dépôts de garantie

Les services publics d'assainissement sont aujourd'hui considérés, de fait, comme des services publics à caractère industriel et commercial, en application de l'actuel article L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales. En tant que tels, ils perçoivent des redevances qui doivent être proportionnées aux services rendus et qui doivent, par ailleurs, couvrir l'ensemble des charges qu'ils supportent afin d'assurer leur équilibre budgétaire. On a vu précédemment qu'actuellement, le code général des collectivités territoriales ne contient pas de dispositions qualifiant les services de distribution d'eau de services publics industriels et commerciaux. Pourtant, en pratique, ils sont gérés comme tels depuis la Libération, les redevances de distribution d'eau étant établies comme les redevances d'assainissement et devant couvrir les charges du service.

La premier alinéa de ce nouvel article vise à définir expressément les charges devant être couvertes par ces deux redevances, ce qui permettra ainsi de les encadrer afin qu'elles soient strictement proportionnées au service rendu. Il est donc précisé qu'elles ont à couvrir « les charges d'investissement, de fonctionnement, de gestion et de renouvellement nécessaires à la réalisation du service », ainsi que « les charges et impositions de toute nature afférentes à leur exécution », cette dernière expression visant les redevances dues aux agences de l'eau. C'est la commune qui est explicitement désignée comme redevable des agences ; les redevances dues à ces dernières seront donc incluses dans les charges payées par les services publics de distribution d'eau et d'assainissement. Il reviendra donc à la collectivité de répercuter ces charges sur les redevances de distribution d'eau et d'assainissement acquittées par les usagers ; rappelons qu'actuellement, cette charge est également répercutée sur les usagers.

Quant au deuxième alinéa de cet article, il introduit une nouveauté qui constitue, aux yeux de votre rapporteur, une véritable avancée, puisqu'il interdit les demandes de caution solidaire et de versement par l'abonné d'un dépôt de garantie ou d'avances. Il précise en outre que les services ayant recours à ces pratiques peu justifiées et qui limitent l'accès à l'eau pour les personnes les plus modestes devront rembourser les sommes antérieurement perçues dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la loi portant réforme de la politique de l'eau.

D'après les estimations du ministère chargé de l'environnement, sur la base d'un million de déménagements par an et d'un service sur deux facturant des frais de dossiers évalués à 400 francs, la recette engendrée par cette pratique serait de 200 millions de francs par an. Ces sommes devront désormais être intégrées au prix de l'eau, en étant répercutée sur les redevances de distribution d'eau et d'assainissement. D'après les mêmes estimations, les dépôts de garantie représenteraient une somme de 1 à 2 milliards de francs, dont plus de 75 % ont été perçus par des délégataires.

Article L. 2224-12-4 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Mode de calcul de la redevance de distribution d'eau

L'article L. 214-15 du code de l'environnement, issu de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, dispose que toute facture d'eau comprend un montant calculé en fonction du volume d'eau réellement consommé par l'abonné et peut, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment de ce volume, compte tenu des charges fixes et des caractéristiques du branchement.

Ce principe d'une facturation proportionnelle au volume consommé vise à maîtriser ce dernier en responsabilisant les usagers. Il est actuellement souvent remis en cause par l'application de parties fixes importantes et par l'adoption de tarifs dégressifs. Ainsi, selon les estimations du ministère chargé de l'environnement, la part fixe représente en moyenne 18 % d'une « facture-type » de 120 mètres cubes d'eau consommés (soit 350 francs), mais fluctue de manière importante selon les services, le recouvrement d'une part fixe relevant davantage d'une tradition tarifaire et traduisant le souci des petits services de sécuriser une partie de leurs recettes. Cette pratique conduit à une opacité de la facture d'eau, les usagers ne sachant pas quelles sont les charges couvertes par la partie fixe ; il convenait donc de mieux encadrer cette dernière, dans un souci de transparence et de protection des consommateurs.

C'est pourquoi le premier alinéa de ce nouvel article réaffirme le principe d'une facturation de la distribution d'eau proportionnelle au volume prélevé sur le réseau de distribution, en assortissant ce principe de la possibilité d'instaurer une part fixe désormais bien encadrée. En effet, il est précisé que celle-ci doit correspondre aux « charges de gestion du comptage et de facturation ainsi qu'à tout ou partie des charges d'établissement et de renouvellement des branchements ». Votre rapporteur se réjouit de cet encadrement mais ne le juge pas assez restrictif. En effet, la part fixe ne doit avoir vocation qu'à couvrir les charges fixes du service. Or, les charges d'établissement et de renouvellement des branchements ne répondent pas à cette définition car il s'agit de charges d'investissement. En conséquence, un amendement du rapporteur vise à les exclure du champ de la part fixe pour les réintégrer dans les redevances conformément à l'article L. 2224-12-3 ci-dessus analysé.

Quant au deuxième alinéa de cet article, il introduit une réelle nouveauté en instaurant la possibilité, pour le conseil municipal ou l'assemblée délibérante de l'établissement public, de définir un tarif progressif par tranche de consommation. Il s'agit donc d'inciter à une bonne gestion de l'eau, notamment dans les zones où la ressource est la plus rare ou la plus fragile. Cette possibilité est bien encadrée et ne devrait pas a priori pouvoir être utilisée abusivement. Il est en effet prévu que ces tarifs progressifs ne peuvent être définis que pour des motifs d'intérêt général et après avis de la commission consultative des services publics locaux. En conséquence, la délibération intervenue sans satisfaire ces deux conditions pourra être annulée par le juge.

Le même alinéa précise en outre que dans le cas où des tarifs progressifs sont institués, un barème spécifique tenant compte du nombre de logements est défini pour l'abonnement des immeubles collectifs, ce qui devrait éviter un surcroît de charge trop important pour les particuliers. Ce barème devrait être fixé au vu des charges réelles et des modalités de réalisation du service.

Le troisième alinéa de cet article ouvre en outre la possibilité d'instaurer des tarifs spéciaux, « pour tenir compte des coûts différents du service de l'eau du fait des caractéristiques techniques ou temporelles de sa distribution ». Cette disposition vise notamment les activités industrielles pour lesquelles il est possible de stocker de l'eau lorsque la charge du service de distribution n'est pas trop lourde, de nuit par exemple. Elle évitera ainsi de pénaliser trop fortement ces établissements par la mise en place d'un tarif progressif et les incitera, sinon à améliorer leurs performances pour consommer moins d'eau, du moins à adapter leur mode de production.

Enfin, le dernier alinéa de cet article exclut la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon du champ d'application de ces règles de tarification ; en effet, en raison des conditions climatiques rigoureuses, les compteurs d'eau ne peuvent y fonctionner. La règle sera donc celle d'une tarification forfaitaire.

La commission a examiné deux amendements identiques de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux tendant à supprimer l'article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales, au motif qu'il est préférable de favoriser la concertation locale plutôt que la réglementation. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'étant déclaré opposé à ces amendements supprimant les dispositions fixant le mode de calcul des redevances de distribution d'eau, la commission les a rejetés.

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à supprimer la possibilité pour les redevances de distribution d'eau de comporter une part fixe. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a estimé préférable de mieux encadrer la part fixe et a présenté un amendement visant à supprimer la faculté d'intégrer dans cette dernière les charges relatives à l'établissement et au renouvellement des branchements, dont il a estimé qu'elles relevaient de l'investissement. M. Jean-Michel Marchand a retiré son amendement et la commission a adopté l'amendement présenté par le rapporteur ainsi qu'un amendement identique de M. Jean-Michel Marchand (amendement n° 221).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Claude Gaillard, défendu par M. Pierre Micaux, prévoyant que la part fixe de la facture d'eau peut également couvrir les charges d'amortissement des installations mais ne peut excéder 25 % du montant de la facture annuelle. Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement, celui-ci étendant en effet le champ des charges couvertes par la part fixe. Il a en outre souligné que deux logiques s'opposaient, soit récupérer une grande part des coûts fixes dans la part fixe, ce qui conduirait à des montants très élevés de cette dernière, soit privilégier une approche environnementaliste visant à économiser la ressource en eau en augmentant la part variable de la facture, en fonction du volume consommé. Après qu'il eut jugé cette seconde démarche plus pertinente, la commission a rejeté cet amendement.

Article L. 2224-12-5 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Mode de calcul de la redevance d'assainissement collectif

La partie variable de la redevance d'assainissement collectif, définie par l'article R. 2333-123 du code général des collectivités territoriales, est actuellement déterminée en fonction du « volume d'eau prélevé par l'usager sur le réseau public de distribution ou sur toute autre source, dont l'usage génère le rejet d'une eau usée collectée par le service d'assainissement ».

Le paragraphe I de ce nouvel article reprend cette définition, en la précisant. Le principe est le suivant : la redevance d'assainissement collectif est proportionnelle au volume d'eau prélevé. Le mode de calcul de la partie variable de la redevance d'assainissement sera donc désormais fixé par la loi, comme cela est le cas pour la redevance de distribution d'eau, et non plus par décret.

S'agissant de la partie fixe de la redevance, son mode de calcul est lui aussi précisé. Alors que l'article R. 2333-123 précité se borne à énoncer que celle-ci « est calculée pour couvrir tout ou partie des charges fixes du service d'assainissement », le même paragraphe prévoit qu'elle correspond aux charges de facturation et, s'il y a lieu, de relevés des compteurs ainsi qu'à tout ou partie des charges d'établissement et de renouvellement des branchements. Comme cela a été le cas pour la redevance de distribution d'eau, votre rapporteur se félicite de cet encadrement de la partie fixe, mais souhaiterait limiter cette dernière aux seules charges fixes du service. En conséquence, il propose de supprimer la référence aux charges d'établissement et de renouvellement des branchements, qui constituent des dépenses d'investissement.

Il est à noter que l'encadrement de la part fixe de la redevance d'assainissement devrait avoir des incidences moins importantes pour les communes qu'en matière de distribution d'eau, puisque 55 % des services n'ont pas recours à une telle pratique ; en outre, la moyenne nationale de la part fixe ne représente que 5 % d'une facture-type, soit environ 100 francs.

Pour les mêmes raisons que celles évoquées lors de l'examen du nouvel article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales, ces dispositions ne sont pas applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon.

S'agissant des déversements d'eaux usées autres que domestiques dans le réseau public d'assainissement, ils donnent actuellement lieu au paiement d'une redevance d'assainissement dont l'assiette, fixée par l'article R. 2333-127 du code général des collectivités territoriales, est :

- soit une évaluation spécifique à partir de critères définis par le conseil municipal et prenant en compte l'importance, la nature et les caractéristiques du déversement, ainsi que, s'il y a lieu, la quantité d'eau prélevée ;

- soit fonction du volume d'eau prélevé sur le réseau public de distribution, par mesure directe ou sur la base de critères permettant d'évaluer le volume d'eau prélevé, pour la partie variable de la redevance, celle-ci pouvant être corrigée pour tenir compte du degré de pollution, de la nature du déversement ainsi que de l'impact réel de celui-ci sur le service d'assainissement.

Le paragraphe II de ce nouvel article redéfinit le mode de calcul de la redevance d'assainissement collectif pour usages autres que domestiques, en lui donnant ainsi valeur législative. Seuls sont retenus comme éléments d'assiette, dans un souci d'harmonisation, l'importance, la nature et les caractéristiques du déversement, critères déjà fixés par l'article R. 2333-127 précité.

Quant au paragraphe III de cet article, il a trait au remboursement des travaux engagés par les communes pour assurer la remise en état ou la création d'installations d'assainissement non collectif.

Cette disposition s'applique à la nouvelle compétence facultative pour les communes, instituée par l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales tel que modifié par l'article 30 du projet de loi, en matière de remise en état des dispositifs d'assainissement non collectif.

Comme cela a été prévu aux articles L. 1331-4 et L. 1331-5 du code de la santé publique relatifs respectivement au branchement au réseau d'assainissement ou à la mise hors d'état d'installations d'assainissement non collectif, le principe est celui d'un remboursement intégral, par le propriétaire, des frais entraînés par les travaux, diminués des subventions éventuellement obtenues.

La commission a examiné deux amendements identiques de MM. Jean Proriol, et Pierre Micaux, visant à supprimer les dispositions relatives au mode de calcul des redevances d'assainissement. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'étant déclaré défavorable à ces amendements, la commission les a rejetés.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur de référence (amendement n° 222).

Puis, M. Jean-Michel Marchand a retiré un amendement visant à supprimer la part fixe de la redevance d'assainissement et la commission a adopté deux amendements identiques du rapporteur et du même auteur visant à exclure de cette part fixe les charges d'établissement et de renouvellement des branchements, après que le rapporteur eut signalé qu'en matière d'assainissement, les communes pouvaient déjà mettre à la charge des abonnés les frais de branchement (amendement n° 223).

Article L. 2224-12-6 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Mode de calcul des redevances dans les communes connaissant
de fortes variations saisonnières de la consommation d'eau

L'encadrement de la part fixe des redevances de distribution d'eau et d'assainissement obéit à un objectif de transparence et de protection des usagers. Mais il peut avoir des effets indésirables dans les communes qui connaissent des variations saisonnières importantes des consommations d'eau, celles-ci ayant en effet à effectuer des investissements lourds qui, ne pouvant être financés par la part fixe, conduiraient à une forte élévation du prix du mètre cube d'eau.

Afin d'éviter cet « effet pervers », ce nouvel article prévoit donc que dans de telles communes, la part fixe des redevances d'assainissement collectif pour usage domestique et de distribution d'eau peut inclure tout ou partie des surcoûts des investissements réalisés pour faire face à ces variations, en matière d'installations de production, de stockage et de traitement. Ainsi que le souligne le ministère chargé de l'environnement, cette augmentation de la part fixe permettra de faire participer les résidents non permanents au financement des travaux qu'ils rendent nécessaires, ce qui va dans le sens d'une répartition plus équitable des charges. Quant aux critères d'appréciation de l'existence de « fortes variations saisonnières », ils seront fixés par voie réglementaire, afin d'éviter tout recours abusif à cette notion.

La commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux visant à supprimer les règles de calcul des redevances dans les communes caractérisées par de fortes variations saisonnières de la consommation d'eau.

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à affecter, par délibération du conseil municipal, une part de la taxe de séjour au budget de l'eau et de l'assainissement. M. Jean-Michel Marchand a rappelé que dans les communes touristiques, les surcoûts dus aux infrastructures nécessaires pour la fréquentation saisonnière étaient supportés par les résidents permanents. Il a estimé qu'il était donc nécessaire de permettre aux organes délibérants des collectivités d'affecter une partie de la taxe de séjour à leur financement. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'est déclaré d'accord sur le fond mais a estimé que le produit de la taxe de séjour était trop faible et qu'il était souhaitable de prélever également une part des taxes foncière et d'habitation portant sur les résidences secondaires, afin de les affecter au budget de l'eau. Il a en outre estimé nécessaire de donner un caractère facultatif à cette disposition. Après que M. Jean-Michel Marchand eut jugé qu'il serait difficile d'établir un suivi des résidences secondaires, M. Robert Galley a rappelé qu'il existait aussi des variations saisonnières non pas liées au tourisme mais, par exemple, à l'activité agricole, comme dans les régions viticoles où la consommation d'eau est triplée lors des vendanges. Notant que l'amendement de M. Jean-Michel Marchand ne permettait pas de traiter ce type de situations, il a déclaré qu'il présenterait un amendement sur ce point lors de la séance publique. M. Jean-Michel Marchand a estimé qu'il n'y avait pas besoin d'installations supplémentaires dans ce cas car il existe déjà des tarifications différenciées et M. Pierre Ducout a souligné qu'il était nécessaire de définir le seuil des variations saisonnières, ce que le rapporteur a approuvé. M. Serge Poignant a précisé qu'il convenait aussi de se préoccuper des centres de vacances et de loisirs. Sur proposition du rapporteur, M. Jean-Michel Marchand a retiré son amendement au bénéfice de l'examen d'un amendement ultérieur répondant à l'ensemble des préoccupations exprimées.

Article L. 2224-12-7 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Délais d'application des nouveaux modes de calcul des redevances
de distribution d'eau et d'assainissement

Ce nouvel article fixe à trois ans, à compter de la promulgation de la loi portant réforme de la politique de l'eau, la durée dont disposeront les communes pour appliquer les nouveaux modes de calcul des redevances de distribution d'eau et d'assainissement, ce qui semble effectivement suffisant pour leur permettre de s'adapter aux nouvelles dispositions.

La commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux visant à supprimer l'obligation pour les communes de se mettre en conformité avec les règles relatives aux redevances de distribution d'eau et d'assainissement, au plus tard trois ans après la promulgation de la loi portant réforme de la politique de l'eau.

Article L. 2224-12-8 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Décrets d'application

Ce nouvel article renvoie à des décrets en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions d'institution, de recouvrement et d'affectation des redevances et des sommes dues par les propriétaires non raccordés ou par les usagers non domestiques devant participer aux dépenses de premier établissement entraînées par la réception de leurs eaux usées.

Par ailleurs, s'agissant de la redevance d'assainissement collectif pour usages domestiques, on a vu que son assiette est constituée par le volume d'eau prélevé sur le réseau de distribution d'eau potable ou sur tout autre source dont l'usage entraîne le rejet d'une eau usée collectée par le réseau d'assainissement. Il reviendra aux décrets précités de prévoir, le cas échéant, l'obligation pour les usagers d'installer un compteur de l'eau prélevée sur les sources autres que le réseau de distribution (comme les puits) et de justifier des quantités d'eau, quelle qu'en soit la source, dont l'usage n'entraîne pas le rejet d'une eau usée dans le réseau d'assainissement (par exemple, l'arrosage de jardins).

La commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Pierre Micaux et Jean Proriol visant à supprimer le renvoi à des décrets en Conseil d'Etat de la fixation des modalités d'application de la redevance d'assainissement pour usage domestique.

Puis, la commission a adopté l'article 31 ainsi modifié.

Chapitre III

TRANSPARENCE ET INFORMATION

Article 32

(article L. 2224-12-9 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)

Avis de la commission consultative des services publics locaux
en matière de distribution d'eau et d'assainissement

Le présent projet de loi vise à une plus grande transparence du secteur de l'eau, considéré comme opaque par les usagers qui ont du mal à identifier les différentes contributions qui leur sont demandées. Pour remédier à cette situation, on a vu que l'article 31 du projet de loi redéfinit le mode de calcul des redevances de distribution d'eau et d'assainissement.

Mais l'opacité du secteur est également largement liée au manque d'information des usagers sur la gestion des services publics de l'eau. Le présent article du projet de loi vise à pallier cette insuffisance en créant un nouvel article L. 2224-12-9 inséré dans une sous-section 3 « Transparence et régulation » de la section 2 du chapitre IV du titre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales.

Ce nouvel article vise à renforcer l'information des usagers dans le domaine de l'eau, en s'appuyant sur les commissions consultatives des services publics locaux. Rappelons qu'aux termes de l'article L. 2143-4 du code précité, ces commissions, obligatoires dans les communes de plus de 3 500 habitants, sont compétentes « pour un ou plusieurs services publics locaux exploités en régie ou dans le cadre d'une convention de gestion déléguée ». Elles doivent comprendre parmi leurs membres des représentants d'usagers des services concernés et sont présidées par le maire. Ces commissions sont des outils particulièrement bien adaptés pour associer les usagers à la gestion de leurs services publics locaux. Or, en pratique, elles ont rarement été mises en place.

Afin de leur donner un rôle plus actif et surtout pour favoriser leur création, ce nouvel article dispose qu'avant présentation à l'assemblée délibérante, le maire ou le président de l'établissement public compétent doit soumettre à l'avis de la commission les projets de règlements des services publics de distribution d'eau et d'assainissement, les projets relatifs aux modalités de tarification de ces services, le projet de rapport annuel du maire sur la qualité et le prix de ces services ainsi que les projets de programmes pluriannuels de travaux.

Ainsi, en l'absence de commission consultative et donc sans avis de cette dernière, les délibérations du conseil municipal sur ces projets seront frappées de nullité. Cette disposition permet donc de réaffirmer le caractère obligatoire de ces commissions, dans un souci de démocratie locale accrue.

Par ailleurs, cet article prévoit que le maire est tenu d'informer la commission de toute question relative à l'organisation, au prix et à la qualité de ces services, l'assemblée délibérante devant être tenue informée des avis rendus par la commission. Un « porter-à-connaissance » continu doit donc être organisé, afin d'informer aussi complètement que possible les usagers.

Votre rapporteur ne peut que souscrire à cette approche ; il convient en effet de renforcer le rôle des commissions consultatives. Il estime même qu'il faudrait aller plus loin, en prévoyant que le rapport annuel du délégataire, prévu à l'article L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales, est également soumis à l'avis de ces commissions ; il présente donc un amendement en ce sens que la commission a adopté (amendement n° 225), après avoir également adopté un amendement rédactionnel du même auteur (amendement n° 224).

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur visant à renforcer le rôle de ces commissions en précisant qu'elles sont tenues informées et consultées, préalablement aux délibérations du conseil municipal, sur toute question relative à l'organisation des services, à leur prix et à leur qualité (amendement n° 226). Puis elle a adopté un amendement de précision rédactionnelle présenté par le rapporteur (amendement n° 227).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que lorsque le prix de l'eau est supérieur de 30 % à celui de la moyenne nationale, le gestionnaire doit justifier ce dépassement auprès des conseils municipaux des communes concernées, de la commission consultative des services publics locaux et auprès du Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement, cette justification devant être publiée dans le bulletin d'information générale. M. Félix Leyzour a indiqué que cet amendement, ainsi que ses deux amendements suivants, avait pour objectif d'accroître la transparence et l'information s'agissant de la formation du prix de l'eau. Notant que les services publics de distribution d'eau et d'assainissement étaient extrêmement nombreux et les prix souvent très hétérogènes, il a estimé indispensable de mieux informer les communes, démunies face au pouvoir de fait de leurs délégataires.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'est interrogé sur le choix d'un seuil de 30 % et s'est inquiété du caractère arbitraire et restrictif de cette disposition, soulignant qu'il est souhaitable que le rapport du maire et celui du délégataire apportent des précisions sur la composition du prix de l'eau, quel que soit ce dernier.

M. Jean-Michel Marchand s'est déclaré très favorable à l'amendement de M. Félix Leyzour et a jugé que les prix de l'eau étant hétérogènes, il est indispensable que le gestionnaire justifie les tarifs pratiqués par rapport aux tarifs appliqués dans d'autres collectivités.

M. Serge Poignant a fait remarquer que les rapports du maire et du délégataire sur la gestion des services publics de l'eau étaient déjà obligatoires et recevaient une large publicité permettant aux usagers d'être amplement informés sur les modalités de facturation de l'eau. De plus, il a souligné que des tarifs élevés peuvent très bien être justifiés, notamment en raison de la longueur du réseau de distribution, en zone rurale par exemple.

M. Pierre Ducout a reconnu la nécessité de porter une attention particulière à la question du prix de l'eau, afin de garantir une plus grande transparence, mais il a mis en garde contre le danger de diaboliser les gestionnaires qui pratiqueraient des prix élevés alors qu'ils peuvent être, dans certains cas, tout à fait adaptés aux circonstances locales. Il a estimé préférable de préciser que le gestionnaire doit expliciter, et non justifier, les prix pratiqués, et a proposé un sous-amendement en ce sens.

M. Robert Galley a jugé que l'amendement était intéressant mais qu'il pouvait avoir des effets pervers, les collectivités locales pratiquant des prix très en dessous de la moyenne nationale pouvant être tentées d'augmenter leurs tarifs.

M. Félix Leyzour a souligné que si la fixation d'un prix unique de l'eau est difficilement praticable, il n'en demeure pas moins que les écarts de prix constatés sont souvent considérés comme une anomalie par les usagers, et que les communes doivent être réellement informées sur les pratiques des grands groupes intervenant dans le domaine de l'eau.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a estimé pour sa part que le niveau des prix n'était pas un critère pertinent car des tarifs peu élevés peuvent parfois s'expliquer par une faible qualité du service, notamment en matière d'investissements et d'entretien du réseau d'assainissement, ce qui explique la nécessité de prévoir l'information des commissions consultatives des services publics locaux sur la décomposition des prix et le niveau d'entretien des réseaux.

La commission a adopté le sous-amendement de M. Pierre Ducout visant à substituer au terme « justifier », le terme « expliciter », puis l'amendement ainsi sous-amendé (amendement n° 228).

La commission a également adopté un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant la publication, dans le bulletin d'information générale publié par la collectivité locale, des avis de la commission consultative des services publics locaux ainsi que des informations apportées à cette dernière sur les questions relative à l'organisation, au prix et à la qualité des services publics de l'eau (amendement n° 229).

La commission a adopté l'article 32 ainsi modifié.

Après l'article 32

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour portant article additionnel après l'article 32 et visant à préciser le contenu du rapport du délégataire présenté au maire. M. Daniel Marcovitch, rapporteur a signalé qu'un amendement de M. Jean-Michel Marchand à l'article 33 poursuivait le même objectif et qu'il proposerait lui-même de sous-amender ce dernier afin d'intégrer les préoccupations des deux auteurs. En conséquence, M. Félix Leyzour a retiré son amendement.

Article 33

Durée des délégations de service public dans le domaine de l'eau -
Renouvellement du patrimoine

L'actuel article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales pose le principe selon lequel les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée, celle-ci ne pouvant excéder vingt ans dans le domaine de l'eau potable, de l'assainissement, des ordures ménagères et autres déchets ; toutefois, il peut être dérogé à cette limite après examen par le trésorier-payeur général, à l'initiative de l'autorité délégante, des justificatifs de dépassement. Cet examen ne porte alors ni sur l'opportunité de l'acte, ni sur sa légalité, mais apporte des éléments d'analyse et permet de formuler un avis économique et financier.

Au vu des pratiques actuelles, et compte tenu de l'asymétrie d'informations existant dans le domaine de l'eau où les collectivités locales ont à traiter avec un véritable oligopole, il est apparu nécessaire de réduire la durée maximale des contrats de délégation de service public ; il n'est en effet pas souhaitable que les collectivités soient « captives » de contrats conclu pour des durées pouvant aller jusqu'à vingt ans et plus en cas de dérogation ; en effet, en cas de changement d'équipe municipale, toute réforme de la politique locale de l'eau ou du mode de gestion est impossible.

C'est pourquoi le paragraphe I de cet article procède à une réécriture du premier alinéa de l'article L. 1411-2 précité, afin de limiter à douze ans la durée maximale des contrats de délégation de service public dans le domaine de l'eau potable et de l'assainissement, cette durée restant par ailleurs toujours fixée à vingt ans dans le domaine des déchets. Cette limitation ne fait que prendre acte des pratiques actuelles : d'après le ministère chargé de l'environnement, la durée moyenne des six cents contrats de délégation renégociés en 1998 a été de 11 ans (80 % ont été renégociés pour une durée de 12 ans). L'abaissement à 12 a ns de la durée maximale des contrats ne devrait donc pas pénaliser outre mesure les délégataires, d'autant que la possibilité d'y déroger après examen préalable du trésorier-payeur général est maintenue. En revanche, par une remise en concurrence plus fréquente des délégataires lors des renégociations, cette disposition devrait contribuer à rééquilibrer les rapports de force entre ceux-ci et les collectivités locales, qui pourront par ailleurs adopter plus facilement une gestion en régie.

La commission a examiné un amendement de M. Claude Gaillard visant à maintenir la durée maximale de vingt ans pour les délégations de service public dans le domaine de l'eau. M. Pierre Micaux, défendant cet amendement, a souligné que limiter cette durée à douze ans priverait en effet les collectivités locales d'un paramètre important de négociation et pourrait conduire les délégataires à réaliser des profits au plus tôt en demandant des prix de l'eau plus élevés. Il a également déploré la confusion existant entre la durée d'amortissement des investissements et la durée des contrats de délégation de services publics. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a reconnu qu'une clarification était nécessaire sur ce point et a indiqué qu'il proposerait un amendement, visant à préciser que la durée maximale des délégations est de 12 ans ou égale à la durée d'amortissement des investissements si elle lui est supérieure, en ce sens lors de la réunion de la commission en application de l'article 88 du Règlement. Il est cependant nécessaire, a-t-il souligné, de fixer la durée maximale des délégations à douze ans, ce qui permettra aux collectivités de modifier plus facilement leur mode de gestion des services de l'eau, notamment en cas de changement de majorité politique de l'équipe municipale. M. André Lajoinie, président, a pour sa part estimé que maintenir la durée maximale des délégations de service public à vingt ans serait largement favorable aux délégataires, et non aux collectivités.

Après que M. Robert Galley eut exprimé son accord avec la position du rapporteur, tout en estimant qu'elle ne correspondait pas à la lettre du texte, M. Pierre Ducout a souligné que le but recherché n'était pas d'augmenter le prix de l'eau et qu'il faudrait éviter, dans l'amendement qui serait présenté par le rapporteur en application de l'article 88 du Règlement, d'employer le terme « déroger ».

M. Pierre Micaux a insisté pour que la future rédaction établisse une distinction claire entre la durée du contrat de délégation et la durée d'amortissement des investissements.

Puis, la commission a rejeté l'amendement de M. Claude Gaillard.

Quant au paragraphe II de cet article, il a trait au renouvellement du patrimoine. Actuellement, d'après le ministère chargé de l'environnement, les dépenses de renouvellement des ouvrages représentent 10 à 20 % du coût des services publics d'eau et d'assainissement. Les délégataires pouvant se voir confier le renouvellement et les réparations des ouvrages mis à leur disposition par les communes, ils constituent des provisions allant jusqu'à 4 milliards de francs, soit 12 % de leur chiffre d'affaires, le montant des travaux réalisés étant de l'ordre de 2 à 3 milliards de francs par an. Ces provisions doivent servir à couvrir une obligation contractuelle ; il ne peut donc être envisagé qu'elles constituent une garantie contre le risque d'exploitation.

Afin d'assurer à la commune que tel n'est pas le cas, ce paragraphe introduit donc deux nouveaux alinéas dans l'article L. 1411-2 précité, aux termes desquels un programme prévisionnel des travaux doit être annexé au contrat de délégation de service public lorsque celui-ci met à la charge du délégataire le renouvellement des ouvrages ou les grosses réparations. A la fin du contrat, la somme correspondant aux travaux prévus mais non réalisés doit être versée par le délégataire au délégant, afin que celui-ci réalise ou fasse réaliser ces travaux. Cette disposition permettra ainsi d'assurer un meilleur suivi des travaux envisagés par les collectivités, et un plus grand contrôle des opérations menées par les délégataires.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 230), puis a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à préciser le contenu du rapport du délégataire et à fixer la date de remise de ce dernier à l'autorité délégante au 30 mars et non au 1er juin comme cela est actuellement le cas. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a proposé un sous-amendement visant d'une part, à porter l'échéance prévue au 30 avril, la date du 30 mars pouvant poser problème puisque c'est également à cette date que les entreprises doivent délivrer leurs comptes et d'autre part, à définir le contenu du rapport en intégrant les dispositions proposées après l'article 32 par M. Félix Leyzour.

M. François Brottes ayant fait remarquer que la date du 30 avril ne permettrait pas de disposer d'éléments d'informations pour le vote du budget annexe de l'eau par le conseil municipal, M. Pierre Ducout a précisé que le rapport du maire contenait déjà des informations financières, notamment en matière de provisions, et il a indiqué qu'il était d'accord avec la rédaction proposée par le rapporteur. La commission a adopté le sous-amendement du rapporteur, puis l'amendement ainsi sous-amendé (amendement n° 231).

Puis, la commission a adopté l'article 33 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 33

Publicité de la mise à disposition des documents relatifs
à l'exploitation des services publics délégués

La commission a adopté un amendement de M. Félix Leyzour portant article additionnel après l'article 33 et prévoyant que la mise à disposition des documents relatifs à l'exploitation des services publics délégués est annoncée dans le bulletin d'information générale lorsqu'il existe (amendement n° 232).

Après l'article 33

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour portant article additionnel après l'article 33 et prévoyant qu'un résumé des documents relatifs à l'exploitation des services publics délégués, approuvé par le conseil municipal, est inséré dans le bulletin d'information générale lorsqu'il existe. Après que le rapporteur eut indiqué qu'il était défavorable à cet amendement, car il était préférable que le public ait connaissance de l'intégralité de ces documents, M. Félix Leyzour a retiré son amendement.

Chapitre IV

HAUT CONSEIL DES SERVICES PUBLICS DE L'EAU
ET DE L'ASSAINISSEMENT

Article 34

Création, missions et fonctionnement du Haut Conseil

On a déjà évoqué plus haut l'asymétrie d'informations et l'opacité caractérisant le secteur de la distribution d'eau et de l'assainissement. Au-delà de l'information des usagers par une réforme de la facturation ou par l'avis des commissions consultatives des services publics locaux, il convient d'épauler les collectivités locales dans leur choix de gestion de l'eau et dans leurs négociations avec les grands groupes intervenant dans ce secteur. C'est l'objet de cet article du projet de loi, qui crée dans la section 2 du chapitre IV du titre II du code général des collectivités territoriales une sous-section 4 instituant une nouvelle autorité, le « Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement », et comprenant les nouveaux articles L. 2224-12-10 à L. 2224-12-14 du code général des collectivités territoriales.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand portant rédaction globale de cet article et visant à renforcer largement les missions du Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement. M. Jean-Michel Marchand a indiqué qu'il convenait de doter cette instance de réels pouvoirs et notamment de pouvoirs juridictionnels, limités toutefois à la modification des conventions de délégation de service public portant atteinte à l'économie générale des services publics de l'eau et de l'assainissement. Il a indiqué qu'il s'agissait également de permettre au Haut Conseil de s'autosaisir et d'être saisi par des associations et des collectivités locales, enfin, de lui confier un rôle d'expertise indépendante sur les contrats de délégation.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'est déclaré défavorable à la transformation du Haut Conseil en instance juridictionnelle et a souligné les risques de dilution de ses compétences par une trop large extension de ses missions. Notant que dans certains domaines, tels que les télécommunications ou l'audiovisuel, des autorités indépendantes pouvaient être dotées de pouvoirs très étendus, il a estimé un tel dispositif inapplicable dans le domaine de l'eau, caractérisé par la multitude des services publics locaux et des usagers. Il a donc estimé préférable de conforter le rôle assigné au Haut Conseil, tout en le dotant d'un pouvoir d'injonction bien encadré, comme le propose un amendement ultérieur de M. Pierre Ducout. Après que M. André Lajoinie, président, se fut déclaré favorable à un renforcement des prérogatives du Haut conseil, la commission a rejeté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand.

La commission a ensuite adopté un amendement de coordination du rapporteur visant à harmoniser la dénomination du Haut Conseil (amendement n° 233).

Article L. 2224-12-10 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Création et missions du Haut Conseil

Le premier alinéa de ce nouvel article pose le principe de la création du Haut Conseil des services publics de l'eau et de l'assainissement et définit sa mission générale : contribuer à la régulation des services publics de l'eau et de l'assainissement, par l'analyse du prix, de la qualité et de la performance des services. Bien qu'il ne soit pas explicitement qualifié comme tel, le Haut Conseil devrait avoir la forme d'autorité administrative indépendante, en raison de sa mission de régulation. Mais force est de constater que le dispositif prévu manque d'ambition en la matière, cette nouvelle instance se bornant en réalité à avoir un rôle d'information et de conseil. On est donc loin des autorités administratives indépendantes dotées d'un pouvoir de sanction ou quasi réglementaire, comme cela peut être le cas pour la Commission des opérations de Bourse ou le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Sans chercher a doter le Haut Conseil de pouvoirs similaires, votre rapporteur estime indispensable de renforcer son rôle, afin d'assurer un véritable conseil aux collectivités ; il présentera donc des amendements en ce sens.

La commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur (amendement n° 234), ainsi qu'un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à préciser le caractère d'autorité administrative indépendante du Haut Conseil, conformément à l'avis du rapporteur qui a jugé cette disposition très importante (amendement n° 235).

La commission a ensuite adopté un amendement de coordination rédactionnelle du rapporteur (amendement n° 236).

Puis, elle a été saisie d'un amendement de M. Félix Leyzour disposant que chaque agence de l'eau transmet au Haut Conseil, au moins une fois par an, une étude détaillée afin de l'éclairer dans l'exercice de ses missions. M. Félix Leyzour a estimé nécessaire pour l'efficacité de l'action du Haut Conseil, structure nationale, de renforcer les liens l'unissant aux agences de l'eau qui ont fait la preuve de leur efficacité et qui peuvent lui apporter, au niveau local, un appui déterminant.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement. Il a rappelé que l'article L. 2224-12-13 du code général des collectivités territoriales, créé par le projet de loi, permettait au Haut Conseil de recueillir toutes les informations qui lui sont nécessaires auprès de tout organisme public ou privé agissant dans son domaine de compétence. Il a donc jugé inopportun de mettre l'accent spécifiquement sur les agences de l'eau qui ont leurs missions propres.

M. Pierre Ducout a estimé qu'il serait sans doute plus pertinent de faire référence aux agences de l'eau à l'article L. 2224-12-13 du code général des collectivités territoriales.

M. André Lajoinie, président, a jugé fondamentale l'action des agences de l'eau et estimé souhaitable de souligner leur rôle dans le projet de loi.

M. Robert Galley a également mis l'accent sur l'efficacité de l'action des agences de l'eau, en particulier pour conseiller les collectivités locales, et a jugé qu'il convenait de mettre ce point en valeur dans le projet de loi.

Le président et M. Pierre Ducout ont suggéré au rapporteur de préparer, pour l'examen du projet de loi en séance publique, un amendement traduisant cette préoccupation, ce que M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a accepté.

M. Félix Leyzour ayant indiqué qu'il était prêt à se rallier à une rédaction alternative reprenant l'esprit de son amendement, a retiré celui-ci. Il a également retiré, pour les mêmes raisons, un amendement précisant que le Haut Conseil exerce ses missions en liaison avec les agences de l'eau.

Le deuxième alinéa de cet article donne au Haut Conseil compétence pour « veiller à la transparence des services publics de distribution d'eau et d'assainissement », cette formulation assez vague étant par la suite précisée : il peut apporter son concours, de sa propre initiative, aux services de l'Etat et aux collectivités locales pour « améliorer les conditions de fonctionnement » des services concernés et peut rendre compte de l'accomplissement des missions de ces services.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand élargissant les missions du Haut Conseil à l'évaluation des dispositifs publics relatif au cycle de gestion de l'eau.

Après que M. Jean-Michel Marchand eut précisé que cet amendement s'inscrivait dans une volonté de renforcer le rôle du Haut Conseil, le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement en soulignant qu'il comportait le risque d'une dilution des compétences du Haut Conseil qui le rendrait pour partie redondant avec le Conseil national de l'eau et ferait en pratique obstacle à un exercice efficace de sa mission première en matière de transparence des services publics de l'eau.

La commission a rejeté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand.

M. Félix Leyzour a ensuite retiré un amendement disposant que le Haut Conseil remet au Parlement un rapport annuel sur la base des données qui lui sont transmises par les agences de l'eau et par les comités de bassin, dans l'attente d'un amendement du rapporteur précisant les relations entre le Haut Conseil et ces organismes.

Il revient également au Haut Conseil de « contribuer à l'information » des élus locaux, des usagers, des associations, des opérateurs et des services de l'Etat (troisième alinéa), ce qui permettra une meilleure régulation du secteur par la diffusion de données.

La commission a été saisie d'un amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant que le Haut Conseil rend compte, chaque année, devant le Parlement de la situation nationale en matière de respect des normes de qualité de l'eau. Le rapporteur a jugé inopportun de confier au Haut Conseil une telle mission, la gestion de la ressource globale relevant d'autres instances et la commission a rejeté cet amendement.

La Haut Conseil doit également « veiller à la transparence du secteur du conseil aux collectivités » en matière de distribution d'eau (quatrième alinéa). Ce dernier point est capital : il s'agit de permettre aux collectivités locales de mieux connaître les organismes de conseil intervenant dans le domaine de l'eau, ceux-ci pouvant en effet appartenir en tout ou partie à un grand groupe du secteur de l'eau. Il conviendrait donc que les collectivités connaissent la structure de leur capital pour mieux les identifier ; sur ce point, le Haut Conseil pourrait être particulièrement utile. C'est pourquoi il est prévu que celui-ci puisse émettre des recommandations sur les informations à fournir aux collectivités locales par ces organismes de conseil, leur subordination juridique ou financière à un grand groupe intervenant dans le domaine de l'eau constituant un critère important dans l'appréciation du service qu'ils fournissent.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand disposant que le Haut Conseil a un rôle d'expert auprès des collectivités locales pour l'analyse des contrats. Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement en raison des ambiguïtés entourant la notion d'expertise. Il a jugé qu'il n'appartenait pas au Haut Conseil d'analyser de manière précise chaque contrat, tâche qu'exercent des ingénieurs-conseils spécialisés et, dans certains cas, les agences de l'eau. Le rapporteur a, en outre, précisé qu'il entendait en revanche confier au Haut Conseil, en concertation avec les personnes intéressées, l'élaboration d'un modèle de contrat ne constituant pas un contrat-type mais dont les collectivités locales pourraient s'inspirer lors de la passation des contrats de délégation des services publics de distribution et d'assainissement d'eau. M. André Lajoinie, président, ayant déclaré partager l'analyse du rapporteur, la commission a rejeté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand.

Il est par ailleurs prévu, au cinquième alinéa, que les avis et rapports du Haut Conseil doivent être rendus publics, ce qui lui permettra d'alerter les autorités compétentes (dont, éventuellement, le Conseil de la concurrence), en tant que de besoin.

Comme cela est le cas pour certaines instances dans leur domaine de compétences (l'Autorité de régulation des télécommunications, par exemple), le sixième alinéa prévoit que le Haut Conseil est consulté sur les projets de loi, de décrets et d'actes réglementaires relatifs à l'organisation des services publics de l'eau et de l'assainissement.

S'agissant des modalités de saisine du Haut Conseil, elles sont fixées au septième alinéa de cet article, aux termes duquel le Haut Conseil, qui peut s'auto-saisir, peut également être saisi par les ministres concernés, des collectivités territoriales, des associations agréées de défense des consommateurs ou de protection de la nature, des chambres consulaires ou les instances socioprofessionnelles concernées. Votre rapporteur estime indispensable d'introduire également cette possibilité pour un tiers des membres d'une commission consultative des services publics locaux.

Ces saisines doivent avoir pour objet l'émission, par le Haut Conseil, d'avis et de recommandations pour la mise en _uvre et l'amélioration de la réglementation dans le domaine des services publics de l'eau, ces avis étant rendus publics, sous réserve des dispositions de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public. Cette dernière précision, traditionnelle en matière d'avis rendus publics par des autorités indépendantes, exclut donc de cette publicité les informations couvertes par le secret des délibérations du Gouvernement ou de la défense nationale ou celles pouvant porter atteinte à la sûreté de l'Etat, au déroulement des procédures juridictionnelles, au secret de la vie privée et autres secrets protégés par la loi.

La commission a adopté un amendement du rapporteur permettant au tiers des membres d'une commission consultative des services publics locaux de solliciter un avis ou une recommandation du Haut Conseil (amendement n° 237). Elle a également adopté un amendement de M. Félix Leyzour supprimant la disposition prévoyant que la publicité des avis et des recommandations du Haut Conseil est réalisée dans le respect des secrets protégés par la loi, après que son auteur eut indiqué que cette précision était inutile (amendement n° 238).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand disposant que le Haut Conseil peut s'auto-saisir ou être saisi pour la révision des contrats par des collectivités ou des associations selon des modalités définies par décret.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement en indiquant qu'il serait partiellement satisfait par un amendement ultérieur de M. Pierre Ducout, entourant la saisine de Haut Conseil de davantage de garanties. M. Jean-Michel Marchand ayant souligné l'intérêt de permettre au Haut Conseil de se saisir des contrats en cours de révision, le rapporteur a rappelé le grand nombre de contrats concernés et la difficulté pratique que rencontrerait le Haut Conseil pour exercer cette prérogative faute d'être informé de la révision des contrats. Il a jugé plus efficace un dispositif reposant sur une faculté de saisine offerte au tiers des membres de chaque commission consultative des services publics locaux, puisque celles-ci seront obligatoirement consultées sur la révision des contrats. La commission a alors rejeté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand.

Enfin, le dernier alinéa de cet article a trait au rôle de conseil exercé par cette nouvelle instance, qui peut être consultée par une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale ou un syndicat mixte sur des projets de clauses contractuelles ou sur toute question d'ordre général préalablement à sa décision de déléguer le service. Tel devrait être le rôle essentiel du Haut Conseil ; on pourrait d'ailleurs utilement préciser que celui-ci peut élaborer des contrats-types de délégation de service public dans le domaine de l'eau, ce qui correspondrait à un besoin réel des collectivités locales.

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand ouvrant aux collectivités locales, aux établissements publics de coopération intercommunale et aux syndicats mixtes la possibilité de consulter le Haut Conseil sur les questions relatives aux contrats de délégation des services publics locaux, permettant au tiers des membres d'une commission consultative des services publics locaux d'exiger cette consultation et offrant aux autorités juridictionnelles la faculté de consulter le Haut Conseil sur des pratiques contractuelles dont elles sont saisies (amendement n° 239).

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Pierre Ducout disposant que le Haut Conseil peut examiner à son initiative ou à la demande de collectivités territoriales concernées ou du préfet du département, les conventions de délégation de service de distribution d'eau et d'assainissement. Cet amendement prévoit également que le Haut Conseil peut enjoindre aux parties de négocier un avenant de mise en conformité avec les règles en vigueur dont il estime qu'elles ne sont pas respectées et ouvre à l'autorité délégante la faculté de demander au juge administratif la déchéance du délégataire refusant de négocier cet avenant. Enfin, l'amendement précise que les injonctions de négocier du Haut Conseil sont susceptibles de recours devant la juridiction administrative.

M. Pierre Ducout a estimé que cet amendement permettait de renforcer le pouvoir de contrôle du Haut Conseil et a indiqué qu'il souhaitait le rectifier afin de supprimer la disposition prévoyant que les décisions du Haut Conseil sont susceptibles de recours devant la juridiction administrative.

Le rapporteur a jugé que cet amendement constituait une solution équilibrée pour renforcer les pouvoirs du Haut Conseil et a proposé de le sous-amender afin d'ouvrir la saisine du Haut Conseil au tiers des membres d'une commission consultative des services publics locaux.

La commission a adopté le sous-amendement puis l'amendement de M. Pierre Ducout rectifié et ainsi sous-amendé (amendement n° 240).

La commission a également adopté un amendement du rapporteur disposant que le Haut Conseil élabore, en association avec les personnes intéressées, un modèle de règlement de service pour les services publics de distribution d'eau et d'assainissement ainsi qu'un modèle de contrat de délégation de ces services (amendement n° 241).

Puis, la commission a été saisie d'un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que le Haut Conseil peut être saisi par une association agréée de défense des consommateurs ou de protection de l'environnement ou par une association pouvant être représentée au sein d'une commission locale de l'eau, de réclamations sur le fonctionnement et la tarification du service de distribution d'eau et d'assainissement d'une commune.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement en rappelant que les associations concernées pouvaient être représentées au sein des commissions consultatives des services publics locaux et que ses amendements avaient ouvert la possibilité de saisir le Haut Conseil au tiers des membres de ces commissions.

M. Jean-Michel Marchand a souligné la nécessité de faire vivre la démocratie locale dont les associations sont des acteurs essentiels, conformément aux objectifs du projet de loi relatif à la démocratie de proximité. Le rapporteur, soutenu par M. Serge Poignant, a estimé nécessaire de filtrer les demandes susceptibles d'être adressées au Haut Conseil afin de lui permettre de les traiter avec efficacité. La commission a rejeté l'amendement de M. Félix Leyzour.

Article L. 2224-12-11 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Composition du Haut Conseil

Alors que les règles relatives à la composition et au mode de nomination des membres d'autorités administratives indépendantes sont généralement très précises, ce nouvel article reste très laconique sur la composition du Haut Conseil. Celui-ci comprend six membres, nommés pour six ans, en raison de leur qualification dans les domaines juridiques, techniques et de l'économie des services publics de l'eau. Trois membres, dont le président, sont nommés par décret ; les trois autres membres sont nommés respectivement par le président de l'Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique et social. Il est en outre prévu que la durée du mandat des premiers membres du Haut Conseil peut être inférieure à six ans, afin d'éviter un renouvellement de tous les membres au même moment ; le décret d'application pourrait en effet préciser qu'un tiers des membres sera nommé pour deux ans, un autre tiers pour quatre ans et le dernier tiers pour six ans, afin d'instaurer par la suite un renouvellement par tiers. Enfin, il est précisé que les membres de cette instance ne peuvent être nommés au-delà de soixante-cinq ans, disposition traditionnelle en matière d'autorité indépendante.

Il semble néanmoins nécessaire de renforcer les obligations pesant sur les membres du Haut Conseil. Ainsi, votre rapporteur estime-t-il nécessaire de préciser que leur mandat est non renouvelable et incompatible avec l'exercice de fonctions ou la détention d'intérêts dans des entreprises intervenant dans le domaine de l'eau, afin de garantir une véritable indépendance à cette institution et donc assurer sa crédibilité.

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant d'élargir la composition du Haut Conseil à un représentant désigné par chaque comité de bassin et par chaque agence de l'eau et à des représentants des usagers nommés par décret.

M. Félix Leyzour ayant souligné la nécessité d'assurer des liens étroits entre le Haut Conseil et les institutions gérant la ressource sur le terrain que sont les agences de l'eau et les comités de bassin, le rapporteur a mis l'accent sur la nécessité de maintenir une distinction claire des rôles entre le Haut Conseil, compétent en ce qui concerne les services publics de l'eau et de l'assainissement, et le Conseil national de l'eau dont les missions sont plus larges.

La commission a rejeté l'amendement de M. Félix Leyzour, puis un second amendement du même auteur élargissant la composition du Haut Conseil à un représentant désigné par chaque comité de bassin et chaque agence de l'eau.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur précisant qu'en cas de partage des voix au sein du Haut Conseil, celle du président est prépondérante, après que le rapporteur eut précisé que cette disposition était nécessaire, le Haut Conseil comptant un nombre pair de membres (amendement n° 242).

La commission a également adopté deux autres amendements du même auteur, le premier disposant que le mandat des membres du Haut Conseil n'est pas renouvelable, le rapporteur ayant souligné que cette précision conforterait l'indépendance des membres de l'institution (amendement n° 243), et le second édictant les incompatibilités applicables aux membres du Haut Conseil et disposant qu'il ne peut être mis fin aux fonctions de membre du Haut Conseil qu'en cas de démission ou d'empêchement constaté par le Haut Conseil et enfin précisant que les membres de cette institution ne reçoivent d'instruction d'aucune autorité dans l'exercice de leurs fonctions (amendement n° 244).

Article L. 2224-12-12 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Rapports entre le Haut Conseil, le Conseil de la concurrence
et la Commission des clauses abusives

Par sa mission même, le Haut Conseil peut être amené à constater des pratiques ne respectant pas les règles de la concurrence. Parallèlement, il sera un véritable expert dans le domaine de la distribution d'eau et de l'assainissement et pourra donc disposer d'informations précieuses pour le Conseil de la concurrence.

Ce nouvel article vise à coordonner les rapports entre ces deux instances et à organiser leur complémentarité.

D'une part, il prévoit que le Haut Conseil doit communiquer au Conseil de la concurrence les informations dont il dispose sur les pratiques entravant le libre jeu de la concurrence dans le secteur de l'eau. Le Haut Conseil peut également soumettre au Conseil de la concurrence toute question relevant de la compétence et pouvant faire l'objet d'un avis de ce dernier.

D'autre part, le Conseil de la concurrence peut saisir le Haut Conseil sur toute question se rapportant aux services de l'eau.

Enfin, le Haut Conseil peut saisir la Commission des clauses abusives qui, en application de l'article L. 132-2 du code de la consommation, « connaît des modèles de conventions habituellement proposés par les professionnels à leurs contractants non professionnels ou consommateurs » et « est chargée de rechercher si ces documents contiennent des clauses qui pourraient présenter un caractère abusif ».

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour disposant que le Conseil de la concurrence, les collectivités territoriales et les associations d'usagers peuvent saisir pour avis le Haut Conseil sur toute question se rapportant aux services d'eau et d'assainissement. Le rapporteur lui ayant indiqué que son amendement était globalement satisfait, M. Félix Leyzour a accepté de le retirer.

Puis, la commission a été saisie d'un amendement du même auteur ouvrant au Haut Conseil la faculté de saisir, d'une part, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale et, d'autre part, la ou les chambres régionales des comptes compétentes.

M. Félix Leyzour ayant souligné la nécessité d'élargir les prérogatives du Haut Conseil pour lui permettre de jouer un rôle plus important en matière sanitaire et financière, le rapporteur a rappelé qu'il ne souhaitait pas charger le Haut Conseil d'une mission générale de surveillance de la qualité de la ressource qui relève d'autres institutions et qu'il ne lui paraissait donc pas opportun de lui donner des prérogatives en matière sanitaire. Il a, en revanche, jugé qu'il appartenait effectivement au Haut Conseil de porter à la connaissance des chambres régionales des comptes les irrégularités qu'il constaterait.

Après que M. Léonce Deprez eut jugé opportun que le Haut Conseil évoque les questions liées à la qualité des eaux qui sont au premier rang des préoccupations des citoyens, la commission a rejeté l'amendement de M. Félix Leyzour.

Article L. 2224-12-13 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Communication d'informations au Haut Conseil

Pour l'exercice de ses missions, il est indispensable que le Haut Conseil puisse avoir communication de toutes les informations pouvant l'éclairer ; c'est ce que prévoit ce nouvel article.

D'une part, le Haut Conseil pourra recueillir auprès des collectivités territoriales ainsi que de tout organisme ayant une activité ou ayant conclu une convention dans le domaine des services publics de l'eau et de l'assainissement toutes les informations relatives au fonctionnement de ces services, à leur prix, leur coût, leur qualité ainsi que celles ayant trait aux caractéristiques des ouvrages et des prestations. Le champ couvert est donc relativement large, afin de garantir un pouvoir d'investigation au Haut Conseil.

D'autre part, il est prévu que tout service de distribution d'eau et d'assainissement, tout organisme intervenant ou ayant conclu une convention dans le domaine de l'eau et de l'assainissement est tenu d'adresser au Haut Conseil l'ensemble des données relatives à son activité, dès lors qu'elles sont nécessaires à l'exercice des missions de cette instance. Il reviendra à un arrêté du ministre chargé de l'environnement de définir la liste des données à fournir. D'après les informations fournies à votre rapporteur, ces données devraient être relatives :

- à la structure tarifaire adoptée pour une « consommation-type » de 120 mètres cubes par an (prix global, part fixe, part variable, tarifs spéciaux par exemple) ;

- à la qualité du service à l'usager (interruptions de la fourniture, dépassement de normes, etc.) ;

- à la gestion du patrimoine (par exemple, la politique de renouvellement de ce dernier) ;

- aux contrats de délégation de service public (durée, échéance).

Enfin, toujours afin de garantir un véritable pouvoir d'investigation du Haut Conseil, il est prévu que celui-ci peut demander toute précision lui paraissant utile.

La commission a adopté un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que le Haut Conseil recueille les informations qui lui sont nécessaires auprès des agences de l'eau (amendement n° 245) ; elle a également adopté un amendement du rapporteur précisant que les informations recueillies par le Haut Conseil peuvent concerner les performances des ouvrages et des prestations (amendement n° 246).

La commission a examiné un amendement du rapporteur précisant que le Haut Conseil dispose de services placés sous l'autorité de son président et prévoyant qu'il peut également faire appel aux services de l'Etat ainsi qu'à des personnes privées, les personnes participant à l'exercice des missions du Haut Conseil étant astreintes au secret professionnel. Après que M. Robert Galley eut exprimé la crainte de voir les moyens nécessaires au fonctionnement de cette institution pris sur les ressources attribuées aux agences de l'eau, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 247).

Puis, la commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Pierre Ducout précisant que les données transmises au Haut Conseil lui sont adressées à sa demande (amendement n° 248).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand disposant que tout organisme public ou privé exerçant une activité dans le domaine de compétence du Haut Conseil est tenu d'adresser à celui-ci toutes les données relatives à son activité nécessaires à l'accomplissement de ses missions, la liste des données concernées et des personnes devant les fournir étant fixée et régulièrement remise à jour par le Haut Conseil.

Le rapporteur s'est déclaré favorable à cet amendement sous réserve d'un sous-amendement rédactionnel.

La commission a adopté le sous-amendement rédactionnel du rapporteur puis l'amendement de M. Jean-Michel Marchand ainsi sous-amendé (amendement n° 249).

Puis, la commission a également adopté un amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant les prérogatives des agents du Haut Conseil procédant aux enquêtes et contrôles nécessaires à l'accomplissement des missions de celui-ci (amendement n° 250).

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que six mois au moins avant l'expiration d'une convention de délégation de service public de l'eau, la collectivité transmet les informations relatives au fonctionnement de ce service à l'agence de l'eau qui, après avoir réalisé une expertise et émis des recommandations, les transmet au Haut Conseil ; celui-ci rend alors dans un délai ne pouvant excéder un mois avant la fin du contrat, un avis rendu public.

M. Daniel Marcovitch, rapporteur, s'est déclaré défavorable à cet amendement et a estimé que les agences de l'eau ne devaient pas se substituer au Haut Conseil. Il a en outre souligné que ce dispositif s'appliquait, dans la rédaction proposée, à l'ensemble des contrats, alors que tous ne posent pas problème. Après qu'il eut souligné que les agences de l'eau n'auraient pas les moyens d'assurer une telle mission et que, par ailleurs, les conventions de délégation étaient transmises au préfet qui exerce un contrôle de légalité, la commission a rejeté cet amendement.

Article L. 2224-12-14 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Décrets d'application

Ce nouvel article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions d'application des dispositions relatives au Haut Conseil.

Puis, la commission a adopté l'article 34 ainsi modifié.

Chapitre V

DISPOSITIONS DIVERSES

Article 35

Dépenses obligatoires des communes en matière d'assainissement

L'actuel article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales établit la liste des dépenses obligatoires des communes. Dans son 16°, il dispose que sont obligatoires « les dépenses relatives au système d'assainissement collectif mentionnées au premier alinéa de l'article L. 2224-8 » du même code.

Cette rédaction ne prend pas en compte les modifications apportées par la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, qui a introduit, parmi les compétences obligatoires des communes en matière d'assainissement, le contrôle des dispositifs d'assainissement non collectif. Il est donc trop restrictif de viser, dans les dépenses obligatoires, celles relatives à l'assainissement collectif.

Le présent article vise à réparer cette erreur, afin de viser, dans les dépenses obligatoires des communes, l'ensemble des missions obligatoires de celles-ci en matière d'assainissement.

La commission a adopté cet article sans modification.

Après l'article 35

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour portant article additionnel après l'article 35 et visant, d'une part, à mettre à la charge du Fonds national de développement des adductions d'eau le financement des acquisitions foncières nécessaires à la création de périmètres de protection des captages et, d'autre part, à affecter au Fonds national de solidarité pour l'eau une contribution égale à 0,2 % du chiffre d'affaires réalisé par les entreprises délégataires de services publics de l'eau, au titre des délégations conclues avec les collectivités territoriales.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement et a rappelé que les agences de l'eau finançaient déjà pour partie de telles opérations ; il a également indiqué que l'institution d'une contribution égale à 0,2 % de leur chiffre d'affaires conduirait mécaniquement les entreprises délégataires à relever le prix de l'eau. La commission a rejeté cet amendement.

Article additionnel après l'article 35

Maîtrise d'ouvrage des travaux en cas de transferts de compétences

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 35 et visant à préciser que les collectivités locales ayant reçu des transferts de compétences tels que la distribution d'eau potable et l'assainissement, assurent la maîtrise d'ouvrage des travaux en se substituant aux collectivités propriétaires des installations, et non concurremment à ces collectivités (amendement n° 251).

Après l'article 35

La commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Jean Proriol et Pierre Micaux portant article additionnel après l'article 35 et prévoyant que le statut de la fonction publique territoriale s'applique aux personnes nommées dans un emploi public d'une régie dotée de la seule autonomie financière ou d'une régie simple ou directe.

Article 36

Comptage individuel d'eau

Le comptage individuel des consommations d'eau est un élément essentiel de gestion rationnelle de la ressource en eau par les usagers. Votre rapporteur a d'ailleurs pris l'initiative d'introduire, par voie d'amendement, l'article 93 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Rappelons que ce dernier a pour but d'encourager la pose de compteurs individuels dans les immeubles collectifs d'habitation et les ensembles immobiliers de logements, en disposant que les services publics de distribution d'eau sont tenus de procéder à l'individualisation des contrats de fourniture d'eau, dès lors que le propriétaire en fait la demande.

Ces dispositions ne s'appliquent qu'aux logements existants. Il était souhaitable de généraliser, par ailleurs, les compteurs individuels dans les logements neufs. C'est l'objet du présent article.

Dans son paragraphe I, il procède à une coordination de l'intitulé du titre III du livre Ier du code de la construction et de l'habitation, en y introduisant une référence à la fourniture d'eau et en y mentionnant la lutte contre les termites (cette dernière précision visant à prendre en compte l'introduction dans ce titre d'un chapitre III traitant de cette question, par la loi n° 99-471 du 8 juin 1999 tendant à protéger les acquéreurs et propriétaires d'immeubles contre les termites et autres insectes xylophages).

Le chapitre Ier du même titre voit également son intitulé modifié par coordination, par le paragraphe II de cet article, afin d'y introduire une référence à la fourniture d'eau des immeubles.

Quant au paragraphe III, il introduit dans le chapitre Ier du titre III du code précité un nouvel article L. 131-7 relatif au comptage individuel. Celui-ci dispose en effet que toute nouvelle construction d'immeuble à usage principal de logement doit comporter une installation permettant de déterminer la quantité d'eau froide fournie à chaque local occupé à titre privatif et, le cas échéant, aux parties communes. Cette disposition devrait ainsi permettre que pour les logements neufs, les travaux de pose d'un système permettant de déterminer la quantité d'eau froide fournie soient pris en compte dès la construction du bâtiment. Ce système devra donc permettre l'abonnement direct de chaque local à usage d'habitation, ou, si l'immeuble reste abonné au service, la juste répartition des charges d'eau entre les copropriétaires ou les locataires.

Sont exclus de ce dispositif les logements-foyers (maisons de retraite, foyers de jeunes travailleurs par exemple). Il reviendra à un décret en Conseil d'Etat de déterminer les conditions d'application de ce nouvel article, et donc de dresser la liste des catégories d'immeubles étant des logements -foyers.

Quant aux paragraphes IV et V du présent article du projet de loi, ils visent à modifier en conséquence le code de la construction et de l'habitation afin que le défaut de pose des installations permettant de déterminer la consommation individuelle d'eau soit sanctionné.

Ainsi, l'article L. 152-1 de ce code s'appliquera désormais dans un tel cas de figure : l'infraction sera donc constatée par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre concerné, les procès-verbaux dressés par ces agents faisant foi jusqu'à preuve du contraire.

De même, les dispositions de l'article L. 152-4 du même code seront applicables : l'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance de l'obligation imposée par le nouvel article L. 131-7 sera punie d'une amende de 300 000 francs, portée à 500 000 francs en cas de récidive et pouvant alors être assortie d'une emprisonnement de six mois. En outre, le tribunal pourra ordonner, aux frais du condamné, la publication de sa décision et la diffusion d'un message dans la presse.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant que des actions de sensibilisation doivent être engagées par le recours à des économes de flux et imposant aux collectivités territoriales, aux bailleurs sociaux et aux associations spécialisées d'employer des personnes qualifiées pour contribuer aux économies d'eau. M. Daniel Marcovitch, rapporteur, a déclaré partager le souci ainsi exprimé mais n'a pas souscrit au caractère obligatoire de ces dispositions ; il a en outre souligné que les programmes d'intervention des agences de l'eau devraient permettre à ces dernières de mener de telles actions. Suivant son rapporteur, la commission a rejeté cet amendement.

Puis, elle a adopté l'article 36 sans modification.

Article additionnel après l'article 36

Exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties
pour les ouvrages d'assainissement

La commission a examiné trois amendements identiques du rapporteur, de M. Pierre Micaux et M. Jean Proriol, portant article additionnel après l'article 36 et visant à exonérer les ouvrages d'assainissement des collectivités de la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Après que le rapporteur eut indiqué qu'une telle exonération existait déjà pour les ouvrages de distribution d'eau, la commission a adopté ces amendements portant article additionnel après l'article 36 (amendement n° 252).

Article 37

Dispositions de coordination

Le paragraphe II du présent article vise à introduire, dans le code de l'environnement, un nouvel article L. 214-15-1 précisant, d'une part, que les dispositions relatives aux services publics de distribution d'eau sont fixées par l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales et la section 2 du chapitre IV du titre II du livre II de la deuxième partie du même code, d'autre part, que les dispositions relatives à la qualité de l'eau destinée à l'alimentation humaine sont fixées à l'article L. 211-11 du code de l'environnement. Ce nouvel article répond donc à un souci « pédagogique ».

Par coordination, le paragraphe I de cet article du projet de loi modifie l'intitulé de la section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code de l'environnement, afin qu'il fasse référence à la distribution de l'eau et non au seul prix de l'eau.

La commission a adopté l'article 37 sans modification.

______________

N°3500-Rapport de M. Daniel Marcovitch, au nom de la commission de la production, sur le projet de loi (n° 3205), portant réforme de la politique de l'eau.

() Le préfet coordonnateur de bassin est défini, à l'article L. 213-3 du code de l'environnement, comme le préfet de la région où le comité de bassin à son siège. S'il lui revient d'animer et de coordonner la politique de l'Etat en matière de police et de gestion des ressources en eau, ce sont les préfets de chaque département couvert par le SDAGE qui sont chargés de l'application de ce dernier.

() « On entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ».

() Voir par exemple l'arrêt « Compagnie des eaux et de l'ozone contre SA Etablissements Vétillard » du Tribunal des Conflits, en date du 12 janvier 1987.


© Assemblée nationale