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le 12 novembre 2003
N° 1110 - 2ème partie
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003.
RAPPORT - 2ème partie
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2004 (n° 1093),
PAR M. GILLES CARREZ,
Rapporteur Général,
Député.
--
ANNEXE N° 43
TRÉSOR ET ENTREPRISES PUBLIQUES
Rapporteur spécial : M. Michel DIEFENBACHER
Député
____
Economie - Finances publiques.
PREMIÈRE PARTIE : LES COMPTES GÉRÉS PAR LE MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE
I.- COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR ET BUDGET DE L'ETAT
A.- LE NOUVEAU PÉRIMÈTRE FIXÉ PAR LA LOI ORGANIQUE
1.- Une architecture proche du cadre actuel
2.- Les premières adaptations des comptes d'affectation spéciale
B.- UNE CONTRIBUTION POSITIVE À L'ÉQUILIBRE DU BUDGET DE L'ETAT
1.- Un excédent de 1,3 milliard d'euros en 2002
2.- Une réduction des excédents en 2003 et en 2004
II.- L'ÉVOLUTION DES COMPTES GÉRÉS PAR LE TRÉSOR ENTRE 2002 ET 2004
A.- LES COMPTES DE CONCOURS FINANCIERS
1.- les comptes d'avances : la fin des excédents exceptionnels du compte d'avance des impositions locales
2.- Une diminution significative des crédits des comptes de prêt
B.- LES COMPTES D'OPÉRATIONS MONÉTAIRES
1.- Les évolutions erratiques du compte d'émission des monnaies métalliques
2.- Les opérations de change et des relations avec le FMI
2ème partie du rapport
DEUXIÈME PARTIE : LES ENTREPRISES PUBLIQUES 7
I.- UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI RESTE PRÉOCCUPANTE 9
II.- LA POLITIQUE DE L'ETAT ACTIONNAIRE EN 2003 19
A.- DEUX GRANDS CHANTIERS DE MODERNISATION EN 2003 19
1.- Le redressement de France Télécom 19
2.- La préparation de La Poste à l'ouverture à la concurrence 21
B.- UNE POLITIQUE PATRIMONIALE ACTIVE 26
1.- Une politique résolue et pragmatique de cessions d'actifs 26
2.- Une clarification de la politique des dotations en capital 31
III.- LES ENJEUX LIÉS A L'ADOPTION DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES ET AU FINANCEMENT DES CHARGES DE RETRAITES 35
A.- L'ADOPTION DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES 35
B.- LE FINANCEMENT DES CHARGES DE RETRAITES 39
EXAMEN EN COMMISSION 45
Article 52 : Modification de la nomenclature des dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24 "Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés". 49
L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre 2003.
À cette date, 38% des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial.
DEUXIÈME PARTIE : LES ENTREPRISES PUBLIQUES
L'année 2003 constitue une étape importante dans la réforme des structures et des méthodes de l'Etat actionnaire. Les résultats très dégradés des entreprises publiques en 2002 ont rendu nécessaire une réflexion approfondie sur les causes des déconvenues en matière d'expansion internationale et sur les modalités de l'action de l'Etat. Au terme d'auditions minutieuses de dirigeants d'entreprises publiques et de responsables de la politique de l'Etat actionnaire, la Commission d'enquête sur la gestion des entreprises publiques () a rendu ses conclusions le 15 juillet 2003. Constatant des défaillances importantes dans le processus de décision, liées notamment à un suivi insuffisant des risques, à une association incomplète du conseil d'administration à la définition des grandes décisions stratégiques et à des contournements répétés de l'actionnaire public, la Commission a en outre dû regretter les insuffisances trop fréquentes de l'Etat, contrôleur tatillon mais défaillant, intervenant trop souvent au coup par coup, sans réelle coordination de ses services et surtout souvent sans vision stratégique. Elle a par conséquent proposé de nombreuses réformes inspirées par la volonté de :
- responsabiliser les entreprises publiques en assurant un suivi régulier des performances des présidents à partir d'objectifs stratégiques clairement déterminés et en favorisant l'émergence de réels contre-pouvoirs au sein des entreprises, via le renforcement des pouvoirs, de la responsabilité et de l'efficacité des conseils d'administration et le développement de comités spécialisés aux compétences élargies ;
- clarifier les missions de l'Etat actionnaire, en le dotant d'une structure nouvelle, l'Agence des participations de l'État (APE), chargée de mieux prendre en compte la dimension patrimoniale de la gestion des entreprises publiques, en rationalisant les processus de coordination des divers intérêts de la puissance publique et en simplifiant les procédures de contrôle et en les adaptant à la dimension de plus en plus concurrentielle et internationale de l'activité des entreprises.
Il est encore tôt pour mesurer les progrès induits par ces réflexions en matière de gestion des participations publiques. 2004 sera à cet égard l'année de la rénovation de l'exercice par l'Etat de sa mission d'actionnaire : dès le 1er janvier, l'agence des participations de l'Etat, dirigée par M. Denis Samuel-Lajeunesse, sera pleinement opérationnelle, renforcée par des recrutements de haute qualité tant dans l'administration que dans le monde des affaires. Sa première mission sera de finaliser la rédaction d'une charte régissant les rapports de l'actionnaire public et des entreprises. Cette première étape sera ensuite complétée par une réforme du cadre législatif et réglementaire entourant les modalités d'action de l'Etat actionnaire.
I.- UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI RESTE PRÉOCCUPANTE
Les tableaux ci-après détaillent l'évolution de la rentabilité et de la structure financière des six principales entreprises publiques entre 2000 et 2002.
RENTABILITÉ DES OPÉRATEURS HISTORIQUES | |||||
(en millions d'euros) | |||||
2000 |
2001 |
2002 | |||
EDF |
Résultat net |
en montant |
1.166 |
848 |
415 |
en % du chiffre d'affaires |
3,39% |
2,08% |
0,86% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
874 |
1.637 |
1.551 | |
en % du chiffre d'affaires |
2,54% |
4,02% |
3,21% | ||
France Télécom |
Résultat net |
en montant |
3.608 |
- 8.994 |
- 20.906 |
en % du chiffre d'affaires |
10,71% |
- 20,90% |
- 44,83% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
4.856 |
5.200 |
6.808 | |
en % du chiffre d'affaires |
14,42% |
12,09% |
14,60% | ||
SNCF |
Résultat net |
en montant |
296 |
- 210 |
93 |
en % du chiffre d'affaires |
1,49% |
- 1,04% |
0,42% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
407 |
20 |
183 | |
en % du chiffre d'affaires |
2,05% |
0,10% |
0,83% | ||
La Poste |
Résultat net |
en montant |
144 |
- 92 |
35 |
en % du chiffre d'affaires |
0,90% |
- 0,54% |
0,20% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
420 |
182 |
100 | |
en % du chiffre d'affaires |
2,62%) |
1,07% |
0,58% | ||
Gaz de France |
Résultat net |
en montant |
483 |
954 |
838 (1) |
en % du chiffre d'affaires |
4,31%) |
6,64% |
25,13% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
875 |
1.637 |
1.551 | |
en % du chiffre d'affaires |
7,80% |
11,40% |
10,66% | ||
Air France |
Résultat net |
en montant |
425 |
156 |
124 |
en % du chiffre d'affaires |
3,46% |
1,25% |
0,98% | ||
Résultat opérationnel |
en montant |
355 |
157 |
162 | |
en % du chiffre d'affaires |
2,89% |
1,25% |
1,28% | ||
(1) Hors rachat du réseau de transport de gaz (voir plus bas). |
STRUCTURE FINANCIÈRE DES OPÉRATEURS HISTORIQUES (en millions d'euros) | ||||
2000 |
2001 |
2002 | ||
EDF |
Capitaux propres (A) |
13.526 |
13.711 |
13.883 |
Dette financière (B) |
17.560 |
22.209 |
25.829 | |
Ratio dette sur capitaux propres (C) |
1,30 |
1,62 |
1,86 | |
France Télécom |
(A) |
33.157 |
21.087 |
- 9.951 |
(B) |
60.998 |
63.423 |
68.019 | |
(C) |
1,84 |
3,01 |
- 6,84 | |
SNCF |
(A) |
4.351 |
4.216 |
4.280 |
(B) |
7.903 |
8.719 |
8.234 | |
(C) |
1,82 |
2,07 |
1,92 | |
La Poste |
(A) |
1.621 |
1.630 |
1.646 |
(B) |
2.522 |
2.254 |
2.258 | |
(C) |
1,56 |
1,38 |
1,37 | |
Gaz de France |
(A) |
5.050 |
5.962 |
9259 |
(B) |
2.853 |
2.894 |
3.874 | |
(C) |
0,56 |
0,49 |
0,42 | |
Air France |
(A) |
3.875 |
3.961 |
3.994 |
(B) |
2.915 |
2.953 |
2.915 | |
(C) |
0,75 |
0,75 |
0,73 |
Les résultats nets se sont fortement dégradés en 2002, la perte cumulée des six principales entreprises publiques passant de - 7.338 millions d'euros en 2001
à - 16.584 millions d'euros (et même - 19.401 millions d'euros en excluant le profit exceptionnel de GDF lié au rachat des réseaux nationaux de transports).
Par conséquent, leurs capitaux propres ont très fortement régressé, se situant à 23.111 millions d'euros, en retrait de 54,3 % par rapport à 2001 et de 62,5 % par rapport à 2000. Cette évolution résulte principalement de l'effondrement des fonds propres de France Télécom (de 21.087 millions d'euros en 2001 à
- 9.951 millions d'euros en 2002), partiellement compensé par une forte progression des capitaux de GDF (de 5.962 à 9.259 millions d'euros). Ce dernier phénomène est dû à l'acquisition par le gazier français de réseau de transport de gaz, la loi rectificative pour 2001 ayant substitué au système de concession prévalant jusqu'alors un régime de propriété et d'autorisation, afin de placer GDF dans une situation comparable à celle de ses concurrents européens ().
Parallèlement, la dette financière a poursuivi sa progression (+ 8,5 %) pour atteindre 111.129 millions d'euros. Dès lors, le ratio endettement sur fonds propres des grands opérateurs historiques français dépasse 4,8, contre 1,5 deux ans plus tôt.
· La cause principale de cette dégradation réside dans la nécessité apparue en 2002 de solder les mécomptes d'une expansion internationale parfois imprudente.
Concernant France Télécom, les pertes attribuables aux provisions et amortissements exceptionnels liés aux acquisitions de la période 1998-2002 se sont établies à 18,3 milliards d'euros en 2002 après 10,2 milliards d'euros en 2001. Votre Rapporteur spécial rappelle que ces lourdes pertes ont résulté :
- de la constatation de deux sinistres, Mobilcom pour 7,3 milliards d'euros (11,2 milliards d'euros de pertes provisionnés au total entre 2001 et 2002) et NTL pour 1,6 milliard d'euros (soit 7,6 milliards d'euros au total) ;
- du provisionnement d'engagements passés au titre de l'accumulation de montages financiers complexes et risqués différant la charge pour l'entreprise d'une vague d'acquisition excessivement rapide () ;
- enfin, il convient de souligner le poids des charges financières liées à l'explosion de l'endettement du groupe (de 14,6 milliards d'euros début 2000 à 68 milliards d'euros en 2002). Ces frais, qui sont passés de 0,7 milliard d'euros en 1999 à 4,0 milliards d'euros en 2002, grèvent ainsi presque le tiers du résultat d'exploitation.
Si la situation d'EDF est sans commune mesure, ses filiales étrangères ont cependant pesé sur ses résultats nets en 2002, leurs pertes consolidées atteignant, en 2001 et 2002, 2,7 milliards d'euros dont 2,4 milliards d'euros en 2001 répartis entre des pertes de changes à hauteur de 1,2 milliard d'euros et des résultats nets fortement négatifs de 1,2 milliard d'euros, principalement pour les filiales en Amérique latine (- 1,173 milliard d'euros), mais aussi pour les participations européennes (contribution négative de 172 millions d'euros d'EnBW en Allemagne et perte de 697 millions d'euros d'Edison en Italie).
La situation au premier semestre 2003 ne permet pas encore de lever les incertitudes relatives aux perspectives internationales du groupe, bien qu'EDF, sous l'impulsion de son actionnaire majoritaire, se soit engagée dans une politique de ralentissement de l'expansion à l'étranger (le groupe a décidé de réduire en définitive à 15 milliards d'euros l'enveloppe de ses investissements à l'étranger sur la période 2001/2003 contre 19 milliards d'euros prévus dans le contrat de plan) et de consolidation de ses activités internationales.
Depuis le début de l'année, des négociations sont menées avec les autorités locales et les banques afin de remédier à la grave crise de liquidité de Light au Brésil dont la structure financière continue de se dégrader sous l'effet de la baisse de la consommation d'électricité et de la dévaluation du real. De même, un plan de redressement de la filiale argentine Edenor est en cours d'élaboration, afin d'obtenir des hausses tarifaires significatives et de restructurer la dette. Les enjeux de ces négociations sont à la mesure des risques portés par les participations américaines : l'endettement net de Light atteignait 920 millions d'euros fin 2002, et celui d'Edenor plus de 610 millions d'euros.
En Europe, EDF a donné une impulsion décisive à la consolidation de ses participations, avec notamment la poursuite du plan de redressement d'Edison (dont l'endettement net est passé au premier semestre 2003 de 6,5 milliards d'euros à 4,1 milliards d'euros grâce à des cessions significatives, et dont le chiffre d'affaires des activités énergétiques a progressé de 30 %). De même, la rationalisation du périmètre d'activité d'EnBW a été engagée (notamment avec la cession de l'activité chaussure Salamander début 2003) tandis qu'un nouveau plan d'affaires recentrant le groupe sur les activités énergétiques est en cours de discussion.
D'autres entreprises publiques ont accusé en 2002 des pertes liées à leurs acquisitions internationales. A titre d'exemple, les filiales de distribution de GDF au Mexique ont dégagé un excédent brut d'exploitation négatif et constaté des provisions importantes liées notamment au risque de versement de pénalités à la Commission de régulation mexicaine pour non respect du plan de développement. Sa filiale de service Cofathec a également pâti de la dégradation des comptes de ses participations italiennes.
Si ces résultats décevants conduisent à s'interroger sur les modalités de mise en _uvre des stratégies d'expansion internationale, ils ne doivent pas pour autant remettre en cause la nécessité d'un développement des activités des entreprises publiques à l'étranger.
L'ouverture des marchés exerce en effet une pression extrêmement forte sur le chiffre d'affaires des opérateurs traditionnels, et l'ampleur comme la rapidité des pertes de marché inévitablement induites par la disparition des monopoles rendent indispensable la découverte de relais de croissance à l'étranger.
CONSÉQUENCE DE L'OUVERTURE DES MARCHÉS
SUR L'ACTIVITÉ DES OPÉRATEURS HISTORIQUES FRANÇAIS
Opérateur |
Étapes de l'ouverture des marchés |
Évolution des parts de marché | ||||
2000 |
2001 |
2002 |
2003 (1er semestre) | |||
France Télécom |
Ouverture des marchés |
interurbain |
73% |
65,3% |
64,3% |
nd |
international |
71% |
67,4% |
66% |
nd | ||
local |
97,6% |
95,7% |
80,9% |
nd | ||
fixes à mobiles |
90,7% |
78,8% |
74,1% |
nd | ||
mobile |
48% |
47,9% |
50% |
49,2% | ||
EDF |
- ouverture de 30% du marché français (seuil d'éligibilité de 16 GWh) en 2001 - ouverture de 37% du marché (abaissement du seuil d'éligibilité à 7 GWh - ouverture totale à la concurrence du marché des professionnels à partir de juillet 2004 et de celui des particuliers en juillet 2007 |
marché des clients éligibles |
97,6% |
88,9% |
83,2% |
82,3% |
GDF |
- ouverture de 20% du marché en 2000 - ouverture de 37% - ouverture de 70% |
marché des clients éligibles |
pertes de parts de marché évaluées à 20% fin 2002 | |||
SNCF |
- ouverture du réseau transeuropéen de fret - ouverture du réseau de fret en 2008 - annonce pour fin 2003 de la publication d'un troisième « paquet ferroviaire » par la Commission concernant notamment le transport de passager |
non encore significatif | ||||
La Poste |
- au 1er janvier 2003, ouverture à la concurrence du secteur des courriers de plus de 100 grammes et 3 fois le tarif d'affranchissement de base (0,50 euro) - au 1er janvier 2006, courriers de plus de 100 grammes et 2,5 fois le tarif d'affranchissement de base - au 1er janvier 2009, ouverture totale envisagée après la présentation par la Commission européenne d'un bilan de la libéralisation, notamment sur le service universel |
La Poste conserve 95% de parts de marché des activités courrier ouvertes à la concurrence |
Les opérateurs historiques perdent environ 20% de parts des marchés éligibles à la concurrence en moyenne dans les deux années suivant l'ouverture des secteurs en monopole. Cela implique par conséquent un effort de diversification des métiers et des marchés, dont le tableau ci-après détaille les progrès selon les opérateurs.
ÉVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRES DES OPÉRATEURS HISTORIQUES (en millions d'euros) | ||||
2000 |
2001 |
2002 | ||
EDF |
Chiffre d'affaires |
34.424 |
40.716 |
48.359 |
Dont réalisé à l'étranger |
8.025 (23%) |
13.907 (34%) |
21.089 (44%) | |
France Télécom |
Chiffre d'affaires |
33.674 |
43.026 |
46.630 |
Dont réalisé à l'étranger |
8.688 (26%) |
15.400 (36%) |
19.227 (41%) | |
SNCF |
Chiffre d'affaires |
19.839 |
20.129 |
22.176 |
Dont réalisé à l'étranger |
3.709 (19%) |
3.925 (20%) |
4.890 (22%) | |
La Poste |
Chiffre d'affaires |
16.020 |
17.028 |
17.332 |
Dont réalisé à l'étranger |
nd |
nd |
nd | |
Gaz de France |
Chiffre d'affaires |
11.211 |
14.357 |
14.546 |
Dont réalisé à l'étranger |
901 (8%) |
1.493 (10%) |
1.830 (13%) | |
Air France |
Chiffre d'affaires |
12.280 |
12.528 |
12.687 |
Dont réalisé à l'étranger |
6.094 (50%) |
6.242 (50%) |
6.570 (52%) |
On remarque notamment qu'en 2002, GDF, confronté aux premières étapes de l'ouverture de son marché protégé, s'est engagé dans une expansion internationale importante, à laquelle il a consacré 2,0 milliards d'euros contre 0,6 milliard d'euros en 2001. Ces prises de participations industrielles recouvrent notamment l'acquisition de 24,5 % de la société slovaque SPP (pour 1,5 milliard d'euros) qui possède un réseau de transport apte à acheminer 20 % des approvisionnements de l'Europe de l'Ouest et exergue des activités d'achats et de distribution au profit de 1,3 million de clients. En outre, GDF a poursuivi sa stratégie d'accroissement en ressources propres de gaz en consacrant 313 millions d'euros aux dépenses d'exploration et de production principalement au Royaume-Uni (la société Cal Energy doublant sa production dès 2003) et en Norvège (acquisition de 15 % du gisement de Fram). Enfin, GDF a renforcé sa présence sur les marchés porteurs de l'Union européenne en achetant une participation de 33 % dans la société italienne de distribution Arcalgaz, puis 40 % des activités gazières d'Italcogim, quatrième distributeur italien, et en acquérant début 2003 les actifs allemands de Preussag Energie pour 1 milliard d'euros. Dès lors, l'entreprise publique devrait produire désormais environ 10 % de ses ventes (5,2 Gm3 sur 51 Gm3) et disposer de réserves de gaz de 25 milliards d'euros de m3. Cependant, cet effort de diversification devra être approfondi, pour que le chiffre d'affaires réalisé à l'étranger (13 % début 2003) compense la perte des parts du marché domestique (d'ores et déjà 20 % du marché ouvert).
● Les résultats pour 2002, comme ceux du premier semestre 2003, trahissent, par ailleurs, une rentabilité parfois insuffisante s'agissant des métiers traditionnels des entreprises. Deux exemples permettent de mesurer l'ampleur des progrès à réaliser.
Les résultats d'EDF sur le marché domestique restent décevants. L'activité de production du groupe, qui constitue le c_ur de son métier, s'est caractérisée par une croissance de la valeur ajoutée limitée à 2 %. Il convient de remarquer que le tassement du résultat d'exploitation des comptes sociaux du groupe (3,8 milliards d'euros en 2002, - 2 %) est atténué par de très importants éléments non récurrents qui masquent en partie la dégradation des résultats depuis 2000. Les changements comptables ont conduit à une amélioration du résultat de 688 millions d'euros avant impôts et de 444 millions d'euros après impôts en 2002. Par conséquent, l'insuffisance de rentabilité sur le marché domestique est indéniable.
Les résultats du premier semestre (résultat net part du groupe de 728 millions d'euros) ne marquent pas une réelle inflexion de tendance. Il est vrai cependant que le budget prévisionnel du groupe tablait sur une augmentation de 4,8 % des tarifs réservés au 1er avril 2003 tandis que la hausse s'est limitée à 3 % au 1er juillet. Il faut, en outre, souligner que l'effet de cette augmentation tarifaire sur le chiffre d'affaires sera compensé par les surcoûts d'exploitation liés à la canicule, évalués à 300 millions d'euros.
La situation est encore plus inquiétante s'agissant de la SNCF, dont le résultat net, très modestement positif en 2002 (+ 63 millions d'euros), est entièrement attribuable à des plus-values de cessions d'actifs (pour 186 millions d'euros) et une reprise de provision (de 159 millions d'euros) liée à la mise en place du plan de restructuration du Sernam. Hors ces éléments exceptionnels, le résultat serait proche du déficit constaté en 2001. Les pertes courantes au premier semestre 2003 (- 257 millions d'euros) conduisent à envisager un résultat net pour l'année déficitaire de 300 millions d'euros, sous l'effet en particulier des mouvements sociaux du deuxième trimestre qui devraient coûter 270 millions d'euros au groupe. Pour atténuer l'impact financier des grèves, la SNCF a mis en place un plan de redressement de ses comptes (« plan STAR-TER ») ayant pour objectif de diminuer les frais de fonctionnement de l'entreprise de 100 millions d'euros.
Votre Rapporteur spécial rappelle l'urgence et l'ampleur des efforts que devra fournir l'opérateur pour réussir l'ouverture à la concurrence. Or, le poids des charges de personnel (56 % du chiffre d'affaires en 2002, contre 47 % par exemple pour la Deutsche Bahn en Allemagne), et la situation dégradée du fret (28 % du chiffre d'affaires mais - 87 millions d'euros d'excédent brut d'exploitation en 2002 après - 37 millions d'euros en 2001, dans un contexte de réduction de 4 % de l'activité de transport de marchandise) constituent autant de handicaps que l'entreprise devra combler à brève échéance.
La situation financière des entreprises publiques est par ailleurs dépendante de l'avenir de diverses procédures d'enquête ouvertes par la Commission européenne pour s'assurer de la compatibilité d'un certain nombre d'opérations financières avec les dispositions communautaires relatives aux aides d'Etat.
Bien que les positions des autorités françaises soient solides, et permettent d'envisager avec confiance l'issue de ces procédures, il convient d'examiner au cas par cas les enjeux et les étapes des principales d'entre elles.
● S'agissant de France Télécom, le 30 janvier 2003, la Commission a notifié à l'Etat français sa décision d'ouvrir une procédure formelle d'enquête portant sur d'éventuelles aides d'Etat dont aurait bénéficié l'opérateur au titre, d'une part, du régime de taxe professionnelle spécifique applicable à l'entreprise jusqu'en 2003, et d'autre part des mesures financières prises par I'Etat en 2002 et 2003 en soutien à France Télécom.
- La décision d'ouverture d'une enquête relative à la fiscalité locale dérogatoire du groupe a fait suite à la plainte d'une association de collectivités locales en date du 13 mars 2001 (). La Commission a adressé à la France une première demande d'information le 28 juin 2001, en réponse à laquelle les autorités françaises lui ont fait parvenir en septembre 2001 des premiers éléments d'information relatifs au régime de taxe professionnelle de France Télécom, puis le 4 avril 2003, un premier complément d'analyse de la charge fiscale que France Télécom aurait dû acquitter entre 1991 et 2002 si elle avait été assujettie, au cours de cette période, aux règles fiscales de droit commun.
Cette analyse a été achevée mi-mai par les résultats d'une étude plus complète qui remplace les éléments provisoires qui lui ont été adressés le 4 avril. Cette analyse définitive, sous réserve de l'examen des dossiers de la Commission et des observations des tiers, confirme que France Télécom n'a pas bénéficié, au titre du régime fiscal qui lui a été appliqué entre 1991 et 2002, d'avantage susceptible de constituer une aide d'Etat. En effet, loin d'avoir bénéficié d'une aide d'Etat au titre de ce régime spécifique d'imposition, France Télécom a au contraire acquitté une imposition significativement supérieure de 1,4 milliard d'euros (hors actualisation) à celle qu'elle aurait supportée si elle était soumise à la fiscalité de droit commun de 1991. Les autorités françaises ont donc invité la Commission à clore la procédure en constatant l'absence d'aide d'Etat.
- En outre, suite aux difficultés financières rencontrées par France Télécom en 2002, l'Etat, en sa qualité d'actionnaire majoritaire, a décidé en septembre la nomination d'une nouvelle équipe dirigeante chargée de préparer un plan de redressement et a indiqué qu'il était disposé à participer à hauteur de sa part de capital, au renforcement des fonds propres de l'opérateur. Le plan mis au point par la nouvelle équipe a été présenté le 4 décembre 2002 au conseil d'administration, qui l'a approuvé et rendu public. Il prévoyait 15 milliards d'euros de refinancement de la dette de l'opérateur, 15 milliards d'euros d'augmentation de capital et 15 milliards d'euros de résultats supplémentaires dégagés par l'entreprise en trois ans, grâce à un plan d'excellence opérationnelle (baptisé « programme TOP »). Le même jour, l'Etat a indiqué son soutien à ce plan, confirmé son intention de participer à l'augmentation de capital à hauteur de sa part de capital (soit 9 milliards d'euros), et indiqué qu'il pourrait le cas échéant anticiper sa participation par une avance d'actionnaires. L'ERAP, établissement public à caractère industriel et commercial bénéficiant de la garantie explicite de l'Etat en application de la loi de finances pour 2003, était chargé d'émettre des emprunts obligataires à hauteur des montants nécessaires pour souscrire à la part revenant à l'Etat dans l'augmentation de capital, et le cas échéant mettre en place l'avance d'actionnaire.
De fait, la mise en place de cette avance n'a pas été nécessaire. France Télécom a opéré avec succès les deux premiers volets de son plan (refinancement en décembre et janvier, augmentation de capital en mars et avril), et met en _uvre son programme de performance opérationnelle avec des résultats satisfaisants, confirmés par les comptes du premier semestre 2003.
L'enquête ouverte par la Commission a pour objet de déterminer si le comportement de l'Etat actionnaire comporte des éléments d'aide d'Etat en faveur de France Télécom. L'Etat a transmis à la Commission ses observations sur la décision d'ouverture d'enquête le 4 avril 2003. La Commission européenne a ensuite adressé aux autorités françaises le 16 mai 2003 les observations formulées par les tiers au sujet du comportement de l'Etat français. Ce dernier a adressé à la Commission ses réponses le 28 juillet 2003. La Commission devait nommer dans le courant de l'été un prestataire afin de l'assister dans la détermination de la nature des mesures adoptées par l'Etat français au regard des règles relatives aux aides d'Etat. Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, au début du mois de septembre, la France n'avait toujours pas été informée de la nomination de ce prestataire.
Dans les deux notes du 4 avril et du 28 juillet 2003, les autorités françaises ont fait valoir que le Gouvernement considère avoir agi en tant qu'actionnaire majoritaire avisé en investissant à hauteur de sa part de capital, concomitamment à des investisseurs privés, dans une entreprise qui avait présenté une stratégie de redressement crédible, présentant de fortes perspectives de rentabilité et permettant aux autorités françaises de compter sur un retour sur investissement au moins comparable à celui qui est pratiqué par les investisseurs privés.
● Les procédures engagées par la Commission s'agissant d'EDF concernent principalement deux mesures qui selon la Commission seraient constitutives d'une aide d'Etat contraire à l'article 87 du Traité instituant les Communautés européennes :
- le fait que certains emprunts d'EDF aient été garantis par l'Etat, sans contrepartie financière (la « garantie explicite ») ;
- le fait qu'EDF bénéficierait sur tous ses engagements d'une garantie illimitée de l'Etat liée à son statut d'EPIC : la « garantie illimitée ».
Le 16 octobre 2002, la Commission a ainsi décidé de proposer, au titre des « mesures utiles », d'une part, la suppression de la garantie illimitée de l'Etat liée au statut d'EPIC et, d'autre part, qu'EDF paie une prime au prix du marché en contrepartie de la garantie existante sur la portion des emprunts non encore amortie et, enfin, d'enjoindre à la France de lui fournir les éléments toujours manquants. Par suite, 2 avril 2003, la Commission a ouvert une procédure formelle d'examen concernant « la garantie illimitée liée au statut actuel d'EDF comme mesure d'aide d'Etat existante ».
- S'agissant de la procédure relative à la garantie explicite sur certains emprunts, la Commission remarque que des emprunts obligataires d'EDF émis en 1966, 1982, 1984 et 1989 l'ont été avec une garantie explicite de 1'Etat sans que l'établissement public n'ait à acquitter de prime en contrepartie de cette garantie. Elle considère que l'avantage financier que représentent ces garanties serait égal à la prime qu'une institution financière commerciale aurait normalement facturée à l'entreprise. Au titre des mesures utiles, elle propose donc qu'EDF paie, sur la portion des emprunts obligataires non encore amortie, une prime au prix du marché, et qu'il lui soit appliqué le régime d'insolvabilité et de faillite du droit commun.
A l'inverse, les autorités françaises soulignent que les dispositions communautaires prévoient explicitement que l'aide doit être appréciée au moment où la garantie est offerte et non au moment où elle est mobilisée. Or, EDF n'a pas bénéficié de nouvelle garantie depuis 1990, bien avant l'ouverture du marché de l'électricité. Il n'est donc pas démontré que l'avantage présumé dont aurait bénéficié EDF aurait affecté les échanges intracommunautaires. De plus, la garantie explicite donnée par l'Etat sur ces emprunts a compensé des obligations particulières d'intérêt général imposées par l'actionnaire public. En l'espèce, ces emprunts ont été rendus nécessaires par l'absence de participation de l'État au financement de la construction du parc nucléaire, via des apports en capital. Enfin, et à titre subsidiaire, les autorités françaises soulignent le caractère disproportionné des mesures proposées par la Commission, dans la mesure où l'essentiel des emprunts a été remboursé (soit, à fin 2001 : 99,68 % des montants empruntés) et où la Commission n'a pas retenu des critères aussi sévères à l'égard des emprunts en cours des institutions publiques allemandes (précédent dont elle se prévaut).
- S'agissant de la procédure relative à la garantie illimitée de l'Etat liée au statut d'EPIC, la Commission considère qu'EDF bénéficie d'une garantie illimitée de l'Etat sur tous ses engagements, compte tenu de son statut d'EPIC. En accordant ce statut, l'Etat a rendu inapplicables à EDF les dispositions du code de commerce régissant l'insolvabilité et la faillite et annulé par conséquent le risque de défaillance sur tous ses engagements. Cette situation permet à EDF d'obtenir un rating de très bon niveau et donc diminue le coût de ses emprunts, par rapport à celui de ses concurrents. Par conséquent, la Commission a demandé que la France supprime la garantie illimitée dont bénéficie EDF en vertu de son statut d'EPIC.
Là encore, les autorités françaises contestent la qualification d'aide d'Etat, née d'une garantie implicite liée au statut d'EPIC d'EDF. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie souligne ainsi « l'obligation de respecter le principe de l'égalité de traitement entre entreprises publiques et privées défini par l'article 295 du Traité instituant les Communautés européennes ». En outre, il rappelle avoir « indiqué à la Commission son intention de modifier la forme juridique d'EDF (et de Gaz de France) et considère de ce fait que la procédure est de toute façon sans objet ».
II.- LA POLITIQUE DE L'ETAT ACTIONNAIRE EN 2003
L'Etat actionnaire a joué un rôle décisif dans le rétablissement de la situation financière de France Télécom. Votre Rapporteur spécial rappelle en effet que le programme présenté par la nouvelle direction du groupe le 5 décembre 2002 et élaboré en étroite liaison avec l'actionnaire majoritaire, s'est révélé d'une très grande efficacité et crédibilité, contribuant à restaurer la confiance des marchés dans l'entreprise. Il a rencontré d'importants succès dans chacun de ses trois aspects (un plan de refinancement de la dette de 15 milliards d'euros, une augmentation de capital d'un même montant et un plan opérationnel visant à générer 15 milliards d'euros supplémentaires de trésorerie libre destinés à désendetter l'entreprise).
● Dans un premier temps, afin de lever les inquiétudes relatives à la liquidité du groupe, l'entreprise a pu dès le 11 décembre 2002 lancer son plan de rééchelonnement de la dette par une émission obligataire de 2,5 milliards d'euros. Cette opération a été suivie le 15 janvier 2003 du lancement d'un nouvel emprunt obligataire qui a permis de lever 5,9 milliards d'euros dans des conditions très satisfaisantes :
- l'offre initiale (5,5 milliards d'euros) a été couverte plus de 2 fois (12,9 milliards d'euros de demande) ;
- 4,5 milliards d'euros ont été émis avec une maturité de 10 ans ou plus (dont 1 milliard d'euros à 30 ans), ce qui témoigne d'une confiance dans la qualité du crédit du groupe (bien qu'avec une prime importante de 300 et 325 points de base par rapport aux obligations d'Etat).
Enfin à la suite du succès de ces deux opérations France Télécom a pu négocier, le 10 février 2003, le renouvellement de la tranche de 5 milliards d'euros d'un crédit syndiqué de 15 milliards d'euros qui arrivait à échéance.
● Dans un second temps, le 25 février 2003, l'assemblée générale extraordinaire du groupe a approuvé le principe d'une augmentation de capital par attribution de bons de souscriptions d'action (BSA) suivie d'un placement des bons non exercés, qui a été lancée par le conseil d'administration le 24 mars 2003. Cette opération définitivement clôturée le 15 avril 2003 a rencontré un large succès. Le titre France Télécom a progressé de 12 % pendant la période de souscription, dans des volumes soutenus (plus de 2,9 fois la moyenne quotidienne entre le 1er et le 24 mars). Les BSA qui avaient été remis aux actionnaires de France Télécom et qui leur permettaient de souscrire à des actions nouvelles pour 14,5 euros ont été exercés à 93 % (). Le cours des BSA a progressé pendant la période de souscription de plus de 59 % par rapport à sa valeur théorique de 2,68 euros pour s'élever à 4,26 euros le 4 avril, dernier jour de souscription. Au total, 98,3 millions d'actions ont été demandés dans le cadre du placement pour 69,6 millions d'actions allouées correspondant aux BSA non exercés. Le taux de souscription s'est donc élevé à 141 %, 100 % pour les particuliers et 71 % pour les institutionnels. Le placement s'est déroulé entre le 8 et le 10 avril au prix de 19 euros par action, soit une décote de seulement 3 % par rapport au cours de clôture du 10 avril au soir (19,61 euros). Il a permis de lever 1,32 milliard d'euros et est à ce titre le placement le plus important réalisé en Europe. Le prix de rachat des BSA de 4,275 euros apparaît très satisfaisant puisqu'il comporte une prime de 25 % par rapport au cours moyen du bon pendant sa cotation de 3,42 %. Conformément à la loi cette augmentation de capital a été suivie en juin 2003 d'une opération réservée aux salariés, aux termes de laquelle 7,2 millions d'actions nouvelles supplémentaires ont été émises.
L'Etat a pleinement assumé son rôle d'actionnaire dans cette opération en contribuant à l'augmentation de capital via l'ERAP (). Pour ce faire, l'ERAP, EPIC bénéficiant de toutes les garanties inhérentes à la signature de la République française et donc d'une notation maximale, s'est endetté directement sur les marchés financiers (emprunts à 5 ans dont le rendement est de 6 à 10 points de base au-dessus de l'OAT) à hauteur de 9 milliards d'euros.
Votre Rapporteur souligne la cohérence du recours à un établissement public pour identifier la contribution de l'Etat au redressement du groupe. A terme, les charges financières annuelles dues au titre des emprunts contractés par l'ERAP seront en effet couvertes par les dividendes de France Télécom. Le niveau de dividende correspondant aux frais financiers de l'ERAP sera de 500 millions d'euros environ par an, soit la moitié seulement de la moyenne du dividende versé par France Télécom entre 1998 et 2001. Remarquons qu'en 2004, le dividende anticipé de France Télécom (134 millions d'euros prévus dans le projet de loi de finances) représente d'ores et déjà presque la moitié de la dotation en capital de l'Etat à l'ERAP anticipée à 350 millions d'euros. Le remboursement du principal de l'emprunt sera assuré, à terme, par une ouverture du capital de l'opérateur.
● En dernier lieu, la crédibilité du plan de redressement s'appuie sur son troisième volet, l'amélioration des performances opérationnelles. A travers ce programme TOP (Total Operational Performance), France Télécom vise à dégager 15 milliards d'euros de liquidité de 2003 à 2005.
L'effort porte principalement sur les activités fixes (40/45 % des économies) et sur Orange (35/45 %), les autres segments, confrontés à une vive concurrence (Equant) ou dans une situation plus fragile (Wanadoo) étant relativement épargnés. Le principal poste de réduction des coûts est, à hauteur de 40/45 % des économies, les investissements, que le groupe ambitionne de réduire de 16 à 13 % du chiffre d'affaires, soit la moyenne des opérateurs européens, avec notamment une meilleure utilisation du réseau longue distance de France Télécom par Orange et Equant et un lancement plus sélectif de l'UMTS. En revanche, les dépenses de recherche et développement sont préservées (elles représentaient 576 millions d'euros en 2002). Les autres économies portent, à hauteur de 35/40 %, sur les coûts opérationnels avec, concernant les achats, une attitude plus sélective dans le choix des fournisseurs (750 aujourd'hui), une réduction substantielle des coûts d'informatique (gains espérés de 700 millions d'euros) et de marketing et de communication (500 millions d'euros). Enfin, 20 à 25 % des économies, une optimisation du besoin en fonds de roulement, notamment à travers la titrisation des créances (1,05 milliard d'euros de créances cédées depuis décembre 2002).
Mis en _uvre au 1er janvier 2003, le plan TOP a produit des résultats très satisfaisants sur le premier semestre 2003 qui se traduisent par une augmentation de la rentabilité de l'entreprise et des flux de trésorerie provenant de l'exploitation (le groupe peut désormais anticiper une génération de liquidité de 4 milliards d'euros en 2003 hors cession d'actifs). Ces bons résultats ont permis le lancement d'un programme dit « TOP line » destiné, par 50 initiatives ciblées, à accélérer la croissance du groupe.
En outre, le plan d'action repose sur une coordination plus forte des différentes activités du groupe et sur le rétablissement des équilibres financiers de France Télécom, objectifs dont la mise en _uvre a connu une nouvelle étape significative dans le lancement le 1er septembre 2003 d'une offre publique d'échange simplifiée amicale sur Orange.
La Commission d'enquête sur la gestion des entreprises publiques s'était inquiétée de la situation préoccupante de La Poste, affaiblie par un retard dans la diversification de ses métiers, une compétitivité insuffisante et un bilan financier fragile.
Le projet de contrat de groupe entre l'Etat et l'opérateur, rendu public le 21 octobre 2003, vise à répondre aux principaux défis qui se présentent à l'entreprise publique.
● En terme d'évolution de l'activité, La Poste, dont le chiffre d'affaires n'a progressé entre 1997 et 2001 que de 5,6 % par an contre 12,5 % pour TPG (TNT Post Group, poste néerlandaise) et 24 % pour Deutsche Post, ses deux principaux concurrents, souffre d'une dépendance excessive à l'activité courrier. Cette dernière est cependant vouée au ralentissement () en raison des phénomènes croissants de substitution vers d'autres formes d'échanges (courriers électroniques), de la rationalisation de la gestion des courriers par les entreprises (85 % des clients de La Poste) et surtout de l'ouverture progressive à la concurrence. Ainsi, le courrier représentait en 2002 encore 59,1 % du chiffre d'affaires de La Poste (65,9 % en 1997), contre 34,7 % pour TNT Post (47,1 % en 1997) et seulement 30,8 % pour Deutsche Post (75 % en 1997), comme l'illustre le tableau ci-après.
RÉPARTITION DU CHIFFRE D'AFFAIRES PAR ACTIVITÉ (1997 ET 2001)
(en pourcentage)
Courrier |
Colis/express |
Logistique |
Services financiers | |||||
1997 |
2001 |
1997 |
2001 |
1997 |
2001 |
1997 |
2001 | |
La Poste |
66 |
59 |
10 |
17,5 |
- |
- |
23,5 |
23 |
Deutsche Post |
75 |
31 |
25 |
18,5 |
- |
27 |
- |
23 |
TPG |
47 |
35 |
40 |
37 |
13 |
28,5 |
- |
- |
Source : La Poste.
S'agissant des services financiers, La Poste, dont la part de marché dans l'épargne française est passée de 13,6 % en 1981 à 8,9 % en 2002, court le risque de la marginalisation. En effet, le caractère restreint de la gamme des services qu'elle est habilitée à offrir () réduit sa capacité à satisfaire une population jeune et active. Remarquons que 40 % des encours de La Poste sont détenus par des clients âgés de plus de 70 ans. Les coûts de gestion élevés induits par l'utilisation du Livret A comme porte-monnaie les populations les plus démunies, ou les lourdeurs de gestion et les handicaps commerciaux liés à l'indisponibilité de la plus grande partie des fonds collectés et la maîtrise incomplète des conditions d'offre (par exemple l'absence de maîtrise des taux des prêts immobiliers aidés) contribuent aussi à exposer l'entreprise à un déclin de ses services financiers.
Le projet de contrat de groupe donne à La Poste les moyens de retrouver dans les services financiers un des relais de croissance dont elle a besoin :
- il prévoit la création en 2005 d'un établissement de crédit permettant à l'opérateur de distribuer des crédits immobiliers sans épargne préalable, tout en respectant les contraintes prudentielles et organisationnelles du droit commun bancaire. A cet effet, l'établissement utilisera les moyens en personnel de La Poste dans le cadre de conventions de service excluant toute distorsion de concurrence ;
- il offre à La Poste une plus grande maîtrise des produits d'épargne qu'elle collecte pour la Caisse nationale d'épargne.
● De manière plus essentielle encore, le projet de contrat apporte des innovations susceptibles de remédier au retard de compétitivité qui affecte l'entreprise. Votre Rapporteur général rappelle en effet que le résultat net annuel moyen entre 1997 et 2001 de La Poste, à 78 millions d'euros, s'avère très nettement inférieur à celui de ses concurrents néerlandais (442 millions d'euros) et allemand (832 millions d'euros). L'écart est encore plus important en termes de marge opérationnelle. Le résultat d'exploitation de l'opérateur français, qui ne dépasse pas 1,1 %, de son chiffre d'affaires, est très inférieur à ceux des deux principaux concurrents européens qui bénéficient de marges atteignant 10 % pour TNT Post et 7,6 % pour Deutsche Post.
Le projet de contrat de groupe s'attaque aux trois principales causes de ces performances médiocres.
- En premier lieu, il donne les moyens à La Poste de mener une politique salariale compétitive et responsable. Votre Rapporteur spécial rappelle que les charges de personnel de La Poste représentent 65 % de son chiffre d'affaires (contre 35 % pour TNT Post et 34 % pour Deutsche Post) () et 87 % de sa valeur ajoutée. Les grandes mutations du secteur postal () n'ont eu que des conséquences limitées tant sur les effectifs que sur les statuts des personnels postaux français, à la différence de ce qui s'est passé à l'étranger. En effet, tandis que l'ensemble des opérateurs postaux européens réduisaient leur masse salariale de 15 à 25 %
(- 100.000 emplois dans l'Allemagne réunifiée, - 30.000 emplois en Italie, - 30.000 emplois au Royaume-Uni, - 6.000 emplois sur 32.000 en Autriche), La Poste gardait des effectifs pratiquement stables, comme l'illustre le tableau ci-après.
ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA POSTE
1995 |
1997 |
1999 |
2001 | |
Effectifs |
317.496 |
306.589 |
312.439 |
323.115 |
Fonctionnaires |
- |
- |
230.579 |
221.759 |
CDD |
- |
- |
24.112 |
29.142 |
CDI |
- |
- |
57.748 |
72.214 |
Equivalent agents/année |
285.279 |
278.932 |
280.281 |
295.814 |
De surcroît, l'application de la réduction du temps de travail (), malgré les efforts de La Poste pour réaliser la réforme à effectifs constants (), a entraîné une création nette de 14.000 emplois (équivalents agents année).
Il est indispensable de renverser cette tendance, en tirant partie des nombreux départs à la retraite prévus d'ici 2010.
EFFECTIFS DES DÉPARTS À LA RETRAITE DE LA POSTE
Année de départ |
Effectif |
Nombre de départs |
|||
Réalisé |
2001 |
6.795 |
6.778 | ||
2002 |
7.423 |
6.778 | |||
Prévision |
2003 |
8.604 |
9.065 | ||
2004 |
9.253 |
9.065 | |||
2005 |
9.339 |
9.065 | |||
2006 |
10.153 |
10.177 | |||
2007 |
10.364 |
10.177 | |||
2008 |
1.268 |
10.177 | |||
2009 |
10.149 |
10.177 | |||
2010 |
9.951 |
10.177 | |||
Totaux 2003/2010 |
2003/2010 |
69.081 |
|||
Source : La Poste. |
Pour réussir l'adaptation des compétences et des structures dans un contexte de renouvellement partiel des effectifs, le projet de contrat de groupe prévoit une rénovation de la politique de gestion du personnel, appuyée notamment sur l'adaptation des dispositifs de promotion interne, sur la constitution de projets professionnels pour chaque salarié, sur la mise en _uvre d'un droit à la validation des acquis professionnel, sur un élargissement du champ du dialogue social et sur la création d'instances de concertation au niveau décentralisé.
- Le second handicap de La Poste est la qualité insuffisante de son appareil de production : tandis que TPG et DPWN ont déjà industrialisé leur parc (respectivement 6 et 83 centres de tri), l'opérateur français ne rénove aujourd'hui que 1 à 2 de ses 130 centre de tris chaque année. Ce retard explique la faiblesse des performances industrielles de l'entreprise, dont le tableau ci-après donne la mesure.
QUALITÉ DES PERFORMANCES INDUSTRIELLES (2001)
(en pourcentage)
La Poste |
Deutsche Post |
TPG | |
Taux d'automatisation des lettres |
55 |
85 |
90 |
Qualité du service (fréquence du courrier distribué à J+1) |
77 |
95 |
95 |
Source : La Poste.
Afin d'atteindre d'ici 2010 des niveaux de performance parmi les meilleurs d'Europe, le projet de contrat de groupe prévoit la mise en _uvre, par autofinancement, du plus grand programme d'investissement jamais consenti par La Poste. L'opérateur devrait consacrer 1,5 milliard d'euros sur la période à l'automatisation du tri. Remarquons que la revalorisation du prix du timbre début 2003 de 0,46 à 0,50 euro, qui rapproche les tarifs français des moyennes européennes (le tarif du timbre en France était stable depuis 1996 tandis qu'il augmentait de 24 % en moyenne dans l'Union européenne), devrait permettre à l'entreprise de mobiliser les ressources nécessaires à cet effort.
- En dernier lieu, le projet de contrat de groupe tend à préciser la compensation des charges imposées par les pouvoirs publics à l'opérateur, parfois au péril de son équilibre économique.
A cet égard, il maintient l'abattement d'impôts locaux () (314 millions d'euros en 2002) dont bénéficie La Poste en contrepartie de sa contribution à l'aménagement du territoire via l'entretien d'un réseau exceptionnellement accessible. Votre Rapporteur spécial rappelle en effet que la France dispose d'un point de contact postal pour 3.400 habitants, contre un pour 6.100 habitants en Allemagne. Il est clair que la structure du réseau obéit à des critères autres que de rentabilité : 10.217 points de contact sur 17.028 sont dans des communes de moins de 2.000 habitants, tandis que 1.700 bureaux situés dans les grandes villes concentrent 53 % du chiffre d'affaires. Pour l'avenir, le projet de contrat prévoit une rationalisation de ce réseau, qui sera désormais concentré autour de « bassins de vie » correspondant à des unités cohérentes d'un point de vue économique et démographique. Il annonce, d'autre part, l'engagement d'une réflexion sur le dispositif d'abattement d'impôts locaux, afin de garantir une meilleure adéquation entre l'effort public et l'adaptation au niveau local de la présence postale, dans le respect d'une concertation approfondie avec les élus locaux.
En outre, le projet de contrat prévoit de s'appuyer sur les recommandations de M. Henri Paul, conseiller maître à la Cour des comptes, s'agissant de l'équilibre économique du service obligatoire du transport et de l'acheminement de la presse, qui entraîne, malgré l'augmentation des participations de l'Etat et de la presse déterminée par les accords dits Galmot (), un déficit annuel de l'ordre de 480 millions d'euros à la charge de La Poste.
Enfin, le projet met fin, à partir du 1er janvier 2006, à l'exclusion, totalement exorbitante du droit commun, de l'opérateur du bénéfice des allègements de cotisations sociales sur les bas salaires. La situation prévalant jusqu'alors était d'autant plus surprenante que l'activité postale est très intensive en main-d'_uvre peu qualifiée (90 % des salaires versés par l'opérateur pourraient être éligibles aux dispositifs) et que 57,5 % du chiffre d'affaires du groupe étaient ouverts à la concurrence. Votre Rapporteur spécial remarque que le manque à gagner résultant de l'exclusion des contractuels de La Poste (100.000 personnes environ) du dispositif représentait à lui seul environ 150 millions d'euros par an.
● La loi de finances initiale estimait à 8 milliards d'euros les recettes de cessions de titre en 2003. Comme l'avait souligné votre Rapporteur spécial à l'occasion de l'examen de l'évolution des comptes spéciaux du Trésor à l'automne 2002, cet objectif constituait moins une obligation de résultat que la manifestation d'une volonté politique visant à :
- permettre le développement des entreprises publiques et notamment, lorsque cela s'avère nécessaire, d'augmenter leurs fonds propres d'un montant supérieur aux capacités d'apports de l'Etat, de consolider leurs alliances et de nouer des partenariats, ou de ne pas handicaper leur expansion internationale par des contraintes statutaires trop lourdes ;
- et affirmer la vocation de l'Etat de se dégager du secteur concurrentiel sauf lorsque des intérêts stratégiques sont en jeu.
Dans le respect de ces principes, la démarche du Gouvernement est emprunte de pragmatisme. Les projets d'ouverture de capital ou de privatisations tiennent essentiellement compte de l'intérêt des entreprises concernées et des perspectives d'alliances, tout en garantissant le respect des principes du service public et des intérêts des salariés. De même, l'intérêt patrimonial de l'Etat implique d'être attentif dans la détermination du calendrier des opérations de cessions de titres de la réceptivité des marchés financiers.
Ces divers éléments expliquent l'écart entre le montant des recettes inscrites dans la loi de finances initiale pour 2003 et le niveau des ressources du compte d'affectation spéciale n° 902-24 à la dernière date disponible. En effet, les marchés financiers se sont révélés instables et, dans l'ensemble, peu porteurs depuis l'automne 2002. Mais surtout, le Gouvernement s'est attaché à préparer avec rigueur et minutie, en tenant pleinement compte de l'intérêt économique et social des entreprises et des réactions de leurs salariés, les évolutions statutaires préalables aux principales ouvertures de capital.
Ainsi, conformément aux principes dégagés par le Premier ministre dans son discours de politique générale du 3 juillet 2002, les premières étapes de l'ouverture du capital d'EDF et de GDF ont été franchies en 2003, avec une consultation approfondie avec les agents des entreprises et de leurs représentants.
De même, la loi relative aux entreprises de transport aérien (n° 2003-322 du 9 avril 2003) a entouré l'opération de privatisation d'Air France de toutes les garanties nécessaires à la stabilité de son actionnariat, en lui accordant les moyens de remédier à une évolution de la détention de son capital susceptible de lui faire perdre sa licence d'exploitation et ses droits de trafic. La loi maintient en outre les droits des salariés, avec notamment la représentation dans le conseil d'administration de l'entreprise des différentes catégories de personnel.
Enfin, le projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom, actuellement en discussion devant le Sénat, rénove l'environnement juridique du secteur en prenant en compte les mutations intervenues depuis sa libéralisation. Il offre un cadre propice à une évolution optimale de l'opérateur historique en permettant à l'Etat, le cas échéant, de descendre en dessous de 51 % de son capital si l'intérêt économique de l'entreprise le justifie. Il maintient les garanties statutaires des personnels fonctionnaires indépendamment de l'évolution du secteur des télécommunications.
● Pour autant, malgré ces incertitudes boursières et le temps nécessaire à la préparation des opérations majeures voulues par la nouvelle majorité, le Gouvernement a su faire preuve, depuis l'été 2002, de dynamisme dans la gestion des participations de l'Etat, faisant montre d'un réel sens de l'opportunité dans le choix et le calendrier des cessions de participations minoritaires jugées non stratégiques, afin de maximiser le gain patrimonial pour l'État. Les opérations réalisées se sont caractérisées par une grande rapidité d'exécution, une réelle maîtrise des processus de mise sur le marché et une attention vigilante portée à l'intérêt économique des entreprises concernées.
Le 24 novembre 2002, l'Etat a cédé sa participation résiduelle de 10,9 % au capital du Crédit Lyonnais.
L'opération s'est révélée transparente et ouverte. En effet, les enchères annoncées le vendredi 22 novembre 2002 à 20 heures étaient accessibles à l'ensemble des institutions financières, qui pouvaient se porter candidates à la reprise de tout ou partie de l'ensemble des titres mis en vente. En outre, l'Etat annonçait clairement sa décision de fonder sa décision sur le seul critère du prix proposé, se réservant la possibilité d'organiser un second tour parmi les meilleures offres dans des conditions permettant d'assurer une parfaite égalité de concurrence entre les participants.
En outre, la cession a tenu compte des intérêts stratégiques du Crédit Lyonnais comme de l'ensemble des marchés financiers. Ainsi, l'opération a été concentrée sur un week-end afin que le déroulement des enchères ne perturbe pas la bourse. En outre, l'Etat s'est réservé la possibilité de déclarer la procédure infructueuse, à tout moment et pour tout ou partie, afin de veiller à ce que la cession s'inscrive dans le cadre d'un projet industriel cohérent. La cession à BNP-Paribas de 10,9 % du capital du Crédit Lyonnais a ainsi permis de donner une impulsion décisive à la stabilisation et à l'avenir du groupe.
Enfin, l'opération a été conforme aux intérêts patrimoniaux de l'Etat. En effet, l'offre de la BNP-Paribas, de 58 euros par action, s'est avérée très sensiblement supérieure au cours de clôture du vendredi 22 novembre 2002. Par conséquent, l'Etat a perçu 2.207 millions d'euros de la vente de 38 millions d'actions, contre une valorisation boursière la semaine précédant le lancement de l'enchère de 1.482 millions d'euros.
Rapidité d'exécution et recours à des techniques novatrices propres à optimiser la gestion patrimoniale de l'Etat ont de même présidé à la cession d'une participation de 8,5 % dans le capital de Renault, le 28 juillet 2003, pour une recette de 1.191 millions d'euros. Tirant partie de la confiance des investisseurs dans la stratégie de développement de l'industriel français, et notamment de la solidité de son alliance industrielle avec Nissan, l'Etat a bénéficié de cours favorables (49,15 euros) pour mener avec succès un placement institutionnel accéléré. Des actions seront ultérieurement offertes par l'Etat aux salariés et anciens salariés de Renault à des conditions préférentielles. Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, cette offre portera sur environ trois millions d'actions et permettra de renforcer l'association des salariés de Renault au développement de leur groupe.
Au terme d'une opération financière de même nature, l'Etat a cédé, le 3 septembre 2003, l'intégralité de sa participation (15,74 % du capital) dans l'éditeur de logiciels Dassault Systèmes, dans des conditions de marché très favorables, le titre ayant progressé de 60 % depuis le 1er janvier 2003. Plus de quatre fois souscrite, cette cession a permis d'encaisser 601 millions d'euros, tout en permettant à l'entreprise de diversifier et d'élargir son actionnariat afin de conforter son développement.
Le tableau ci-après résume ces évolutions en détaillant les recettes du compte n° 902-24 à la dernière date disponible.
RECETTES DU COMPTE N° 902-24 AU 1ER OCTOBRE 2003
(en millions d'euros)
Recettes |
|
Fonds de soutien des rentes (liquidation) |
100,0 |
SGGP |
100,0 |
BRL (cession de titres) |
4,8 |
FCPR (liquidation de participations) |
15,7 |
Hervet 3ème échéance salariés |
2,0 |
TSA (dividendes et précompte) |
100,0 |
DCN international (cession de titres DCN) |
189,0 |
SEMMARIS (5ème annuité de remboursement de l'avance d'actionnaire) |
2,3 |
SOFIRAD (remboursement de l'avance d'actionnaire) |
12,2 |
RENAULT (PGG : cession de 24.224.755 titres) |
1.190,6 |
RENAULT (PGG : exercice de la greenshoe) |
119,1 |
TOTAL |
2.337,7 |
Recettes prévisionnelles |
|
RENAULT (salariés) |
24,6 |
Dassault Systèmes (compte d'imputation provisoire) |
601,5 |
SDC Outre-Mer (cession de la Sofideg) |
2,4 |
TOTAL |
628,4 |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Pour 2004, les estimations de recettes ont été prudemment fixées à 4 milliards d'euros. Elles seront dépendantes, comme de coutume, de l'évolution des marchés financiers, de l'intérêt industriel des entreprises concernées et de l'état d'avancement des évolutions statutaires indispensables à leur réalisation.
Le tableau ci-après permet de mesurer la très grande cyclicité de la valorisation boursière des participations de l'Etat, et donne ainsi la mesure de la difficulté intrinsèque à l'évaluation de la valeur réelle des actifs ainsi détenus et à la détermination du moment opportun pour leur mise sur le marché. En outre, et c'est évidemment l'essentiel, le succès de toute opération de privatisation dépend avant tout de la pertinence de la stratégie proposée pour l'entreprise concernée.
VALORISATION BOURSIÈRE DES PARTICIPATIONS COTÉES DE L'ETAT
29 décembre 2000 |
30 septembre 2001 |
30 septembre 2002 |
1er septembre 2003 | |||||||||||
Cours du jour en euros |
Part de l'État |
Valorisation de la participation de l'Etat |
Cours du jour en euros |
Part de l'État |
Valorisation de la participation de l'Etat |
Cours du jour en euros |
Part de l'État |
Valorisation de la participation de l'Etat |
Cours du jour en euros |
Part de l'État |
Valorisation de la participation de l'Etat | |||
France Télécom |
92 |
56% |
58.909 |
35 |
55,5% |
22.180 |
7 |
56% |
4.662 |
22 |
59% |
28.650 | ||
Air France |
25 |
56% |
3.074 |
12 |
55,9% |
1.475 |
7 |
54% |
873 |
14 |
54% |
1.706 | ||
ASF |
27 |
50% |
3.142 |
26 |
50% |
3.043 | ||||||||
EADS |
24 |
17% |
3.181 |
12 |
16,7% |
1.593 |
11 |
15% |
1.319 |
16 |
15% |
1.906 | ||
Crédit Lyonnais |
37 |
13% |
1.605 |
35 |
11,6% |
1.379 |
33 |
11% |
1.260 |
- |
- |
- | ||
TMM |
50 |
38% |
5.015 |
22 |
38,0% |
2.163 |
16 |
21% |
936 |
17 |
21% |
977 | ||
Thalès (ex TCSF) |
51 |
33% |
2.861 |
40 |
32,7% |
2.191 |
27 |
33% |
1.481 |
27 |
32% |
1.475 | ||
Renault |
56 |
44% |
5.885 |
32 |
44,2% |
3.393 |
44 |
26% |
3.218 |
54 |
17% |
2.557 | ||
Dassault-Systèmes |
73 |
16% |
1.297 |
33 |
15,6% |
596 |
16 |
16% |
278 |
- |
- |
- | ||
Bull |
5 |
17% |
136 |
0,8 |
16,3% |
22 |
0,4 |
16% |
11 |
1 |
16% |
20 | ||
CNP |
43 |
1% |
72 |
34 |
1,2% |
58 |
34 |
1% |
54 |
38 |
1% |
62 | ||
Péchiney |
49 |
0,1% |
3 |
42 |
0,1% |
2 |
27 |
0,1% |
1 |
46 |
0,1% |
2 | ||
Sacilor (ex Usinor) |
14 |
0,1% |
2 |
9 |
0,1% |
1 |
10 |
0,0% |
1 |
12 |
0,0% |
2 | ||
Total |
- |
- |
82.038 |
- |
- |
35.053 |
- |
- |
17.236 |
- |
- |
40.400 | ||
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. |
● Votre Rapporteur spécial avait souligné, à l'occasion du débat budgétaire pour 2003 comme dans les conclusions de la Commission d'enquête sur la gestion des entreprises publiques, qu'il est essentiel que les dotations en capital versées à partir du compte n° 902-24 s'insèrent dans un réel processus de valorisation patrimoniale, et ne se contentent pas de constituer des aides récurrentes consenties à des organismes de défaisance (l'EPFR) ou gérant une dette lourde (RFF), ou à des entreprises fragiles dans des secteurs sinistrés (GIAT, Charbonnages de France).
L'examen des dotations reçues par ces derniers organismes éclaire ce propos.
L'ensemble des dotations en capital versées depuis 1997 à Réseau ferré de France (RFF) s'est élevé à 8.909 millions d'euros. Ces dotations étaient inscrites à l'actif du bilan de l'établissement public, dans la rubrique « dotation complémentaire en capital ». Conjuguées à la dotation initiale en capital, constituée à la création de l'entreprise (856 millions d'euros), elles couvraient à peine le report à nouveau négatif de 9.167 millions d'euros. Ainsi, la réalisation par l'Etat de ses actifs financiers et l'affectation à RFF d'une partie de leur produit ne servait qu'à maintenir le niveau des capitaux propres aux environs de 2 milliards d'euros c'est-à-dire, en fait, à couvrir les pertes récurrentes de l'entreprise tout en se contentant de stabiliser la dette financière (27,9 milliards d'euros au 31 décembre 2002 après 28,5 milliards d'euros en 2001 et 27,3 milliards d'euros en 2000 ()). En d'autres termes, l'Etat baptisait « dotation en capital » ce qui n'est que la compensation, bon an mal an, des charges financières nettes supportées par RFF. Or, tant que la dette ne se réduisait pas - ce qui nécessiterait de dégager un résultat d'exploitation structurellement et fortement positif - ce dispositif de vases communicants pouvait durer sans limite... tout au moins tant que l'Etat dispose d'actifs financiers susceptibles d'être vendus. Le maintien du système dans sa forme actuelle aurait abouti à appauvrir progressivement, sans grand profit pour la collectivité, le patrimoine de l'Etat que constituent ses participations publiques, sans pour autant dégager l'horizon financier de RFF et donner à cet organisme de véritables capacités de développement.
Une logique similaire est à l'_uvre pour ce qui concerne Charbonnages de France, bien que les mécanismes soient légèrement différents. Comme l'indique le rapport d'activité pour 2002, « les besoins de financements sont couverts par [des subventions, des cessions d'actifs, etc. et] des dotations en capital dont le montant est calculé pour couvrir la perte courante de l'activité houille et les charges de restructuration (hors Provence) ». Cette simple phrase suffit à montrer combien la pratique s'écarte de la vocation naturelle d'une dotation en capital. De plus, le montant effectif de la dotation versée par l'Etat est susceptible d'être modulé en fonction des perspectives financières de l'exercice. Ainsi, la dotation en capital prévue au titre de 2001 n'a pas été versée en totalité en 2001 : 404 millions d'euros ont été payés par l'Etat le 24 avril 2002 seulement. Compte tenu d'encaissements liés à certaines cessions d'actifs, le groupe Charbonnages de France a pu réduire ses dettes financières, de 5.458 millions d'euros au 31 décembre 2001 à 5.163 millions d'euros au 31 décembre 2002. Mais, souligne le rapport d'activité, « cette amélioration aurait été plus forte si la dotation en capital prévue pour 2002 avait été versée à Charbonnages de France ». Tout se passe donc comme si l'Etat jugeait inutile de grever ses dépenses budgétaires par des dotations en capital « excessives », dès lors que la dette financière de Charbonnages de France apparaît pouvoir être stabilisée de façon autonome.
Un dernier exemple de « dotation récurrente » peut être tiré de l'organisme chargé, en application de la loi du 28 novembre 1995, de gérer le soutien financier apporté par l'Etat au Crédit Lyonnais. Rappelons qu'antérieurement à la privatisation intervenue en 1999, et avec l'aval de la Commission européenne, les 28,97 milliards d'euros d'actifs compromis du Crédit Lyonnais ont été transférés à une société de cantonnement, le Consortium de réalisation (CDR), qui assure le recouvrement des créances et la réalisation ou la cession des actifs, et gère l'ensemble des contentieux du Crédit Lyonnais en en supportant les risques. L'Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR) a pour objet d'assurer le financement du cantonnement, tout en couvrant par une dotation spécifique les frais généraux du CDR, en contrepartie de quoi il se voit en contrepartie reverser le résultat net consolidé part du groupe. Ainsi, l'apport des cessions de titres constitue un premier mode de financement de l'EPFR, complété par un emprunt contracté auprès du Crédit Lyonnais, qui fait l'objet d'un remboursement jusqu'en 2014. L'Etat, qui a ainsi privilégié une solution d'échelonnement en raison de contraintes budgétaires, doit donc couvrir le remboursement du capital et le paiement du prêt par des dotations annuelles.
Dès lors que le stock d'actifs à réaliser par le CDR s'est considérablement réduit, les ressources de l'EPFR pour faire face aux échéances du prêt du Crédit Lyonnais sont désormais quasi-exclusivement le produit des dotations consenties par l'Etat.
Le tableau ci-après met en évidence le montant des dotations à l'EPFR depuis 1998 et les décaissements annuels afférents aux besoins de financement de l'établissement.
(en milliards d'euros)
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | |
Dotations de l'État reçues par l'EPFR |
1,98 |
0,81 |
0,69 (1) |
0,87 (2) |
0,95 (3) |
0 |
Intérêts payés |
2,77 |
1,05 |
0,42 |
0,41 |
0,28 |
0,14 (4) |
Capital amorti |
0 |
6,85 |
0,67 |
0,67 |
0,67 |
1,62 |
Solde des emprunts à rembourser |
16,9 |
10,1 |
9,43 |
8,76 |
8,09 |
6,46 |
(1) Dont un montant de 0,23 milliard d'euros versé en 2001.
(2 Montant versé en 2002.
(3) Montant versé en 2003.
(4) Au 30 septembre 2003.
Source :Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
● Votre Rapporteur spécial constate cependant que des progrès ont été réalisés dans la politique d'investissements industriels de l'Etat.
Le principal d'entre eux tient à la budgétisation des concours financiers de l'Etat à RFF. En effet, le projet de loi de finances pour 2004 dispose que les contributions versées à l'établissement (800 millions d'euros au titre de la stabilisation de la dette et 675 millions d'euros consacrés au relèvement des investissements de régénération ferroviaire) apparaissent dans le budget de l'Etat et non dans le compte d'affectation spéciale n° 902-24, ce qui implique qu'elles ne grèvent plus désormais les ressources dégagées de la vente d'actifs publics. Il convient de constater que cette réforme s'inspire de la logique de la décision d'Eurostat en mars 2003 de reclasser en terme de comptabilité communautaire les « dotations en capital » à RFF en subventions sans contrepartie. L'organisme européen avait en effet estimé que ces contributions publiques n'étaient pas assorties de perspectives crédibles de rentabilité dans le futur.
Compte tenu des enjeux que représente l'entreprise pour l'économie française, l'Etat a par ailleurs consenti un effort financier significatif dans le cadre du plan de redressement financier d'Alstom arrêté avec la société et ses banques le 20 septembre 2003. Il s'est en effet engagé à souscrire à une émission de titres subordonnés à durée déterminée remboursables en actions pour un montant de 300 millions d'euros. Le remboursement en actions sera naturellement conditionné à l'accord de la Commission européenne qui contrôle la conformité du dispositif aux règles européennes en matière d'aides d'Etat. En outre, l'Etat s'est engagé à souscrire à une émission de titres subordonnés à durée déterminée pour un montant de 200 millions d'euros. Enfin, il a déclaré son intention de participer au prêt subordonné à durée déterminée consenti à Alstom à hauteur de 300 millions d'euros. La souscription des deux premiers titres subordonnés sera financée, pour un total de 500 millions d'euros, à partir du compte d'affectation spéciale. En revanche, la participation au prêt sera effectuée par l'intermédiaire d'un organisme bénéficiant de la garantie de l'Etat.
L'article 52 du projet de loi de finances pour 2004 propose en outre d'ouvrir la faculté au compte d'affectation spéciale de financer, par des dotations en capital, les fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche, de façon à leur permettre de réunir un capital suffisant pour engager rapidement le financement d'actions significatives (). Un montant maximum de 150 millions d'euros pourrait être consacré à ces actions.
Enfin, la Direction des chantiers navals (DCN) a bénéficié de deux contributions dans le cadre de son changement de statut. Tout d'abord, 140 millions d'euros ont été versés au titre de la première tranche de sa dotation en capital. Votre Rapporteur spécial rappelle qu'en application de l'article 78 de la loi de finances rectificatives pour 2001, la DCN est devenue une société anonyme, ce qui lui apporte la souplesse statutaire nécessaire à sa modernisation et lui permet de participer au mouvement de consolidation européen de l'industrie navale. Afin de lui donner les moyens de renforcer sa compétitivité, la société a été capitalisée à hauteur de 560 millions d'euros, libérés par tranche d'ici 2007. Concomitamment, les titres de la société de commercialisation à l'export DCN International lui ont été apportés, soit une dotation de 287 millions d'euros comptabilisée dans le compte d'affectation spécial. Ces deux investissements participent d'une politique patrimoniale cohérente. En effet, en contrepartie, le contrat d'entreprise 2003-2008 signé avec l'Etat prévoit que l'entreprise réduira ses coûts de production de 12 % sur la période, ses coûts d'achats de 3,6 % et ses frais généraux de 8, tandis que les effectifs (13.300 personnes début 2003) seront ajustés par le biais de départs à la retraite ou par des reclassements concertés avec l'Etat.
Le tableau ci-après détaille la nature des principales dotations en capital accordées aux entreprises en 2003, et présente les prévisions transmises à votre Rapporteur spécial par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
DOTATIONS EN CAPITAL À PARTIR DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE N° 902-24 EN 2003 ET 2004
(en millions d'euros)
Prévisions de dépenses 2003 |
|
Dépenses effectuées |
733,8 |
DCN (première tranche de la dotation en capital) |
140,0 |
DCN (apport en numéraire pour l'acquisition des titres de DCN I) |
189,0 |
GIAT (solde recapitalisation décidée en 2001) |
286,6 |
Caisse de la dette publique (dotation initiale) |
100,0 |
Décisions et engagements pris |
663,7 |
Alstom (achats de titres à l'émission) |
500,0 |
Dassault systèmes (frais liés à la cession de titres dans le cadre du PGG) |
8,2 |
Dassault systèmes (frais liés à l'exercice de la greenshoe) |
0,8 |
Divers (IDES - dotation en capital, 2ème tranche de la dotation en capital au port autonome du Havre) |
95,0 |
SNCM |
49,7 |
SIGUY (apport) |
10,0 |
Dotations envisagées aux entreprises publiques |
- 1.700,0 |
TOTAL |
3.097,5 |
Prévisions de dépenses 2004 |
|
Désendettement et/ou Fonds de réserve des retraites |
1.200,0 |
EPFR |
700,0 |
ERAP |
350,0 |
CDF |
1.044,0 |
GIAT |
300,0 |
EMC |
126,0 |
Autres |
50,0 |
Frais |
80,0 |
Fondations du secteur de la recherche |
150,0 |
TOTAL |
4.000,0 |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
III.- LES ENJEUX LIÉS A L'ADOPTION DES NORMES COMPTABLES INTERNATIONALES ET AU FINANCEMENT DES
CHARGES DE RETRAITES
L'adoption des normes comptables internationales, obligatoire pour les entreprises cotées de l'Union européenne en application du règlement 1606/2002/CE du 19 juillet 2002, mais à laquelle se préparent les grands établissements publics faisant publiquement appel à l'épargne par d'importantes émissions obligataires, représente une opportunité considérable pour permettre aux entreprises publiques de mieux retranscrire dans leurs comptes la nature de leur activité et de disposer d'un cadre d'analyse adapté aux modalités de plus en plus internationales de leurs activités.
Votre Rapporteur spécial rappelle que le règlement n° 1606/2002/CE précité impose l'utilisation des normes internationales (IAS) par les sociétés faisant appel public à l'épargne à partir de 2005 tout en laissant trois décisions à l'appréciation des Etats membres :
- la possibilité de reporter le délai de 2005 à 2007 pour les sociétés émettant seulement des obligations sur un marché réglementé d'un Etat membre ou pour celles dont les titres sont admis à la vente directe au public dans un pays tiers et qui utilisent à cet effet des normes acceptées sur le plan international ;
- la possibilité d'autoriser ou obliger les sociétés faisant appel public à l'épargne à établir leurs comptes annuels (individuels) selon les normes IAS ;
- la possibilité d'autoriser ou obliger les sociétés ne faisant pas appel public à l'épargne à établir leurs comptes consolidés et/ou leurs comptes annuels (individuels) selon les normes IAS, laissant de fait toute latitude aux Etats membres d'interdire ou obliger les entreprises de faire ou de laisser le libre choix aux entreprises.
Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « les services du ministère et ceux de la Chancellerie conduisent actuellement des travaux, en concertation avec le conseil national de la comptabilité (CNC), pour arrêter les choix sur les options offertes par le règlement européen afin de les soumettre au vote du Parlement. Lors de sa réunion du 21 octobre 2003, l'assemblée plénière du CNC va examiner ces options.
En conséquence, les sociétés cotées telles que France Télécom, ASF, AREVA, Air France, sociétés cotées établiront, dès 2005, leurs comptes consolidés selon les normes internationales adoptées par la commission européenne dans les conditions de l'article 3 du règlement du 19 juillet 2002. Pour ce qui concerne les autres sociétés publiques faisant appel public à l'épargne, elles établiront leurs comptes consolidés selon les normes internationales au plus tôt en 2005 et, si la loi leur offre cette faculté, au plus tard en 2007 : dès lors que leurs ressources le leur permettront, elles seront incitées à appliquer par anticipation les normes IAS.
Dans la continuité de la démarche traditionnelle de leur rapprochement avec les sociétés commerciales, le régime comptable des établissements publics établissant des comptes consolidés s'alignera sur celui de ces dernières : il sera proposé au Parlement que les établissements émettant des obligations établissent leurs comptes consolidés selon les normes IAS au plus tard à la date retenue pour les sociétés se trouvant dans les mêmes conditions.
Quant aux sociétés et établissements publics ne faisant pas appel public à l'épargne, si la loi leur laisse la latitude d'établir leurs comptes consolidés selon les normes internationales, ils seront encouragés à le faire puisque l'établissement de comptes consolidés participera à une plus grande transparence financière et à une meilleure comparabilité des groupes.
La plupart des grandes entreprises publiques faisant appel public à l'épargne se sont engagées dans le processus de passage aux normes internationales pour leurs comptes consolidés ».
Force est cependant de constater qu'en l'état actuel des travaux qu'elles conduisent pour intégrer les normes internationales, les entreprises publiques, à l'image des sociétés privées, ne sont pas encore en mesure de fournir tous les éléments permettant d'évaluer l'incidence de l'application de ces normes. Selon les informations fournies à votre Rapporteur spécial, les entreprises publiques qui se sont engagées dans le processus de transition vers les normes internationales présentent toutefois aux membres de leur comité d'audit et de leur conseil d'administration des points d'étape périodiques relatifs à l'avancement des travaux de transition. En outre, au plus tard lors de l'arrêté des comptes 2003, toutes les entreprises impliquées dans cet exercice devront présenter un état des lieux de ces travaux.
Ces difficultés d'adaptation tiennent principalement à la nature même des normes à transposer. Votre Rapporteur spécial rappelle qu'en application du règlement précité, pour être mises en _uvre, ces normes doivent être adoptées par la Commission après avoir été soumises à l'avis du comité de réglementation comptable. L'autorité communautaire a publié récemment le premier règlement portant adoption de certaines normes comptables internationales (règlement n° 1725/2003 du 29 septembre 2003) qui inclut toutes les normes et les interprétations en vigueur au 14 septembre 2002 à l'exception des normes IAS 32 et 39.
Ces deux dernières normes, ainsi que la norme IAS 19, sont celles qui auront les conséquences les plus importantes pour les entreprises publiques.
La norme IAS 19, qui traite des avantages du personnel des entreprises, impose en effet un provisionnement intégral des charges de retraite induites par les systèmes à prestations définies - c'est-à-dire les régimes pour lesquelles les prestations sont définies, et dont les entreprises assument seules le financement et l'équilibre. La démarche fondamentale de cette norme consiste à reconnaître expressément que l'entreprise qui établit les comptes s'est engagée à payer les retraites et dispose des actifs nécessaires au paiement. Le tableau ci-après permet de mesurer la situation des principales entreprises publiques au regard de la transposition de ce nouveau référentiel comptable.
SITUATION AU REGARD DE LA TRANSITION AU RÉFÉRENTIEL INTERNATIONAL S'AGISSANT DES ENGAGEMENTS DE RETRAITES ET AVANTAGES ASSIMILÉS
Entreprises |
Etablissement de comptes consolidés |
Situation au regard de la transition au référentiel IAS/IFRS |
Traitement comptable des engagements |
ADP |
Pas de comptes consolidés Emission d'obligations |
Etablissement de premiers comptes consolidés probablement en 2004 sur la base de l'article 13 de la loi du 3 janvier 1985 modifié par la loi de sécurité financière. Début de réflexion sur l'établissement des comptes consolidés selon les normes IAS/IIFRS |
Application de l'IAS 19 dans les comptes sociaux Externalisation partielle Montant externalisé évalué : 25,8 M€ Montant provisionné : 165,8 M€ |
Air France |
Comptes consolidés Société cotée |
Travaux en cours pour être prêt en 2005 |
Application de l'IAS 19 Externalisation partielle Montant externalisé évalué au 31/03/2003=371M€ Montant net provisionné au 31/03/2003 = 269 M€ |
AREVA |
Comptes consolidés Société cotée |
Travaux en cours pour être prêt en 2005 |
Provisionnement sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Externalisation partielle : 399 M€ Montant provisionné : 288 M€ |
CDF/HBL/HBCM |
Comptes combinés des trois EPIC |
Travaux non pertinents compte tenu de la dissolution, en 2007, de l'EPIC Charbonnages de France après fusion des trois EPIC |
Evaluation des avantages en nature sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Montant figurant en engagements = 7.660 M€ (valeur actualisés 5.738 M€) |
Française des jeux |
Comptes consolidés |
Travaux en cours afin d'être prêt en 2005 |
Provisionnement en appliquant de la recommandation 1.23 des commissaires aux comptes Montant provisionné = 3,2 M€ |
France Télécom |
Comptes consolidés Société cotée |
Travaux en cours afin d'être prêt en 2005 |
Provisionnement sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Montant provisionné = 406 M€ hors congé de fin de carrière (3.910 M€) |
France Télévision |
Comptes consolidés |
Travaux en cours afin d'être prêt en 2005 |
Provisionnement sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Montant provisionné = 55,1M€ |
Gaz de France |
Comptes consolidés |
Travaux en cours afin d'être prêt en 2005 |
Evaluation des engagements de retraites sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation. Provisionnement partiel et externalisation partielle Montant provisionné = 0,14 Md€ Montant externalisé = 1,25 Md€ Engagement hors provision et externalisation = 13,6 Md€ |
Entreprises |
Etablissement de comptes consolidés |
Situation au regard de la transition au référentiel IAS/IFRS |
Traitement comptable des engagements |
GIAT |
Comptes consolidés |
Réflexions très préliminaires à ce stade |
Provisionnement sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Montant provisionné = 17,4 M€ |
La Poste |
Comptes consolidés |
Travaux en cours pour être prêt en 2005 |
Evaluation des engagements de retraites sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Engagements de retraites en hors bilan = 57 Md€ Analyse en cours sur les autres avantages sociaux |
Radio France |
Comptes sociaux |
Réflexions très préliminaires dans l'attente du dispositif français ayant trait aux comptes individuels |
Provisionnement sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Montant au 31/12/2002 : 17,15 M€ |
RATP |
Comptes consolidés |
Travaux en cours pour être prêt en 2007 |
Engagements estimés sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation Engagements de retraites estimés = 17,2 Md€ |
RFF |
Comptes sociaux |
Réflexions très préliminaires dans l'attente du dispositif français ayant trait aux comptes individuels |
Aucune information communiquée dans les comptes 2002 car non significative |
SNECM |
Comptes consolidés |
Application des normes IAS compatibles avec normes françaises en 2004 Travaux en cours pour être prêt en 2005 même si non APE |
Provisionnement des engagements nés en France sans faire référence explicitement à une norme ou à une recommandation et couverture par des actifs des engagements nés à l'étranger Montant des retraites et avantages sociaux provisionné = 349 M€ Insuffisance de couverture des engagements nés à l'étranger non provisionnée = 75 M€ |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. |
Les secondes normes dont l'adoption, toujours en débat, revêt une importance fondamentale, les normes IAS 32 et 39, traitent des écarts d'acquisition.
Ces écarts, appelés « goodwill » ou survaleur, représentent la différence entre le prix d'acquisition d'un actif et la valeur vénale des éléments de l'actif net acquis. Cette différence est amortie sur une durée en général de 15 à 20 ans en prenant en compte l'intérêt stratégique de l'entreprise acquise. Cependant, l'inscription du goodwill dans l'actif du groupe signifie d'un point de vue économique que l'écart d'acquisition est un investissement qui sera intégralement rentabilisé. S'il apparaît que le surcoût payé par l'entreprise acquéreuse n'a pas vocation à être couvert dans l'avenir par une progression de la valeur de l'actif acquis, il est nécessaire de constater cette perte de valeur par une provision pour amortissement de survaleur. Afin de déterminer chaque année si le goodwill représente bien un actif qui sera couvert à l'avenir, les entreprises, sous le contrôle des commissaires aux comptes, procèdent à l'évaluation de la « valeur actuelle » - c'est-à-dire actualisée - de l'actif concerné. La nécessité de constater une perte de valeur par une provision pour amortissement du goodwill est appréciée par la comparaison entre la valeur comptable consolidée de l'actif et sa « valeur actuelle ».
L'enjeu principal est ainsi de déterminer cette « valeur actuelle ». Il existe à cet égard deux types d'évaluation :
- l'une, privilégiée par les législations comptables continentales, est la méthode des flux de trésorerie actualisés, c'est-à-dire les liquidités générées à terme par l'actif concerné actualisé à un taux approprié à la nature des activités (ainsi, lorsque le risque de l'activité est élevé, le taux d'actualisation doit être plus fort afin de refléter le caractère incertain des résultats prévisionnels). Bien entendu, cette méthode repose sur les plans d'affaires présentés par l'entreprise sur un horizon approprié (en général 5 à 10 ans), au-delà duquel les flux sont extrapolés par application d'un taux de croissance perpétuelle spécifique à chaque activité. Son principal défaut est de reposer sur des analyses relativement subjectives (les plans d'affaires) et de rendre complexe les comparaisons entre entreprises concurrentes (qui peuvent retenir des hypothèses divergentes relatives à ces plans d'affaires).
- l'autre méthode est celle de la fair value qui prévaut notamment aux Etats-Unis d'Amérique. La valeur actuelle y est évaluée aux prix instantanés du marché (c'est-à-dire la valorisation boursière si l'actif est coté).
C'est cette dernière méthode que semblent retenir les normes IAS 32 et 39. Votre Rapporteur spécial constate que ce choix serait préoccupant. D'une part, la très forte volatilité des marchés financiers serait ainsi répercutée sur les comptes et le bilan des entreprises, et, dans la mesure où les amortissements exceptionnels de survaleur réduisent les résultats nets, donc in fine les capitaux propres, rendraient illisibles les bilans financiers. D'autre part, elle aurait incontestablement un effet procyclique puisqu'elles obligeraient les entreprises à faire apparaître des pertes plus grandes quand le marché est mauvais.
Votre Rapporteur spécial remarque en outre que le rapprochement des normes internationales des pratiques américaines serait préjudiciable aux grandes entreprises publiques françaises ou européennes, qui, pour faire face à l'ouverture de leur monopole à la concurrence, ont dû réaliser des opérations de croissance externe très importantes dans des délais très brefs, accumulant à cette occasion des écarts d'acquisition élevés.
Les débats relatifs à l'impact de l'adoption des normes comptables internationales sur l'équilibre financier des grands opérateurs français mettent en évidence la nécessité de clarifier l'avenir financier des régimes spécifiques de retraite propres à certaines entreprises publiques.
Le problème est réel s'agissant d'entreprises qui, de manière directe ou indirecte, et pour tout ou partie, assument de manière autonome, à la différence des entreprises relevant du régime général, l'équilibre économique des retraites de leurs salariés.
- Ainsi La Poste emploie-t-elle certes des agents de droit privé, soumis aux régimes généraux, mais aussi et surtout des fonctionnaires soumis au code des pensions civiles et militaires. Dès lors, si elle s'acquitte normalement, comme toute entreprise, des cotisations retraites de ses agents de droit privé, elle doit en revanche rembourser à l'Etat les charges de pension de ses agents fonctionnaires, conformément à l'article 30 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service publique des postes et télécommunications. De fait, elle doit ainsi assumer l'équilibre du régime de retraite de ses fonctionnaires.
Il est vrai qu'en application du contrat de groupe signé en 1998, l'Etat assume désormais presque seul l'augmentation de cette charge. Reste que la contribution de La Poste, plafonnée au niveau de 1997 (ajusté de l'évolution des prix), représentait 2.066 millions d'euros en 2002, soit 45,5% de sa masse salariale. Au regard de l'évolution démographique des effectifs fonctionnaires de l'opérateur, les charges de pension s'élèveraient à 3.300 millions d'euros en 2017. Même avec le maintien du dispositif actuel de compensation par l'Etat, les cotisations acquittées par La Poste dépasseraient 55% de sa masse salariale, conduisant à provisionner, dans le respect de la norme IAS 19 décrite plus haut, 57 milliards d'euros au titre de ses engagements de retraites.
- La situation est légèrement différente s'agissant d'EDF et de GDF, dont le régime de retraite est commun à l'ensemble des entreprises du secteur de l'énergie (industries énergétiques et gazières, IEG). Son financement est assuré par les cotisations des salariés (7,85% du salaire hors primes), très inférieures à celles versées par les salariés du régime général (12% environ en équivalent salaire hors primes) et par une contribution des entreprises de la branche, déterminée au prorata de leur masse salariale, qui a pour objet d'équilibrer chaque année les charges de retraite du régime (« contribution d'équilibre »).
Ce mode de financement des retraites est spécifique au secteur des IEG puisque dans les régimes français de droit commun, la cotisation patronale n'a pas pour objet, comme dans le régime des IEG, d'équilibrer annuellement le régime de chaque branche. En effet, dans le régime de droit commun, la cotisation patronale est libératoire, c'est-à-dire qu'elle dispense les entreprises de toute obligation de provisionner les charges en question. Le taux de cotisation est prédéfini et ne fait pas l'objet d'un ajustement annuel pour équilibrer le régime.
Le régime spécial de retraite des IEG compte au 1er janvier 2002 environ 140.000 bénéficiaires se répartissant en un peu moins de 100.000 retraités de droits directs et un peu plus de 40.000 titulaires de droits dérivés (pensions de réversion et d'orphelin) à rapproche de 150.000 actifs seulement, soit un ratio démographique (actifs sur retraités de droit direct) de l'ordre de 1,5, légèrement inférieur à celui du régime général (1,7). Dès lors, pour l'ensemble du secteur IEG, les cotisations salariales étaient en 2002 de l'ordre de 330 millions d'euros et la contribution d'équilibre de l'ordre de 2,4 milliards d'euros soit environ 54% des rémunérations hors primes.
Cette situation apparaît incompatible avec l'intérêt économique à long terme des entreprises. En effet, l'évolution démographique implique qu'en l'absence de réforme, les charges de retraite passeraient, pour la seule EDF, de 2,6 milliards d'euros en 2002 (dont 1,9 milliard d'euros de contribution d'équilibre) à 4 milliards d'euros en 2020, la contribution d'équilibre représentant 90% de la masse salariale du groupe à cette date. En outre, en l'état, il serait nécessaire de provisionner de l'ordre de 50 milliards d'euros pour couvrir ces engagements.
- La SNCF possède pour sa part une caisse de retraite propre dotée de l'autonomie comptable et financière contrairement aux autres régimes spéciaux d'entreprise. Son financement repose sur trois ressources.
Tout d'abord, les salariés et l'entreprise acquittent des cotisations salariales et patronales dont les taux résultent de la combinaison de deux critères. Un premier taux est égal à celui que supporterait un employeur du secteur privé affiliant ses personnels au régime général de sécurité sociale et aux régimes complémentaires ARRCO et AGIRC. Un taux supplémentaire correspond aux avantages de retraite spécifiques du régime spécial, mais uniquement sur une population « normalisée » de cheminots ayant une structure démographique comparable à celle du privé. Au total, depuis 1997, le taux de cotisation global s'établit à 32,2% du salaire brut (7,85% pour les agents, 24,4% pour la SNCF) ;
Par ailleurs, la SNCF acquitte une contribution supplémentaire correspondant au surcoût pour la caisse de retraites des nouveaux avantages accordés aux retraités depuis le 1er janvier 1990. Cette contribution s'établit à 3,97% des salaires. Elle est essentiellement liée aux intégrations successives de l'indemnité de résidence dans l'assiette des retraites, afin de maintenir le pouvoir d'achat des retraités.
Enfin, l'Etat verse une « garantie d'équilibre financier », correspondant au déséquilibre démographique résultant du passé, inscrite chaque année dans la loi de finances.
Le tableau ci-après met en évidence la lourdeur des charges de retraite induite par le régime spécifique de la SNCF. Elles représentaient en 2002 15% des charges de personnel de l'entreprise (hors contribution d'équilibre de l'Etat). En intégrant l'effort de l'Etat, les retraites des agents couvrent 46% des charges de personnel.
FINANCEMENT DE LA CAISSE DE RETRAITE DE LA SNCF EN 2002
(en millions d'euros)
Contribution d'équilibre de l'Etat |
2.935 |
Cotisations des agents |
332 |
Cotisations de la SNCF |
1.196 |
Produits divers |
187 |
Total |
4.488 |
Au regard de l'évolution prévisible de la masse des pensions (+ 34% d'ici 2040), les engagements actualisés au titre des retraites, en l'absence de réforme, représentent 4,6 milliards d'euros.
- Le régime spécial de retraite de la RATP ne s'applique qu'aux agents ayant plus de 15 ans d'ancienneté et ayant le statut de personnel permanent. En outre, s'agissant des emplois d'exploitation et de maintenance, des anticipations d'âge et des réductions de durée de service ont été mises en place pour compenser des tâches jugées plus pénibles (travail en roulement, horaires décalés, service sous des tunnels). Ces anticipations permettent des départs après 25 années de service à l'âge de 50 ans s'agissant des agents d'exploitation ou 55 ans pour ceux de la maintenance.
Le financement du régime est assuré par les cotisations sur les salaires des actifs (le taux de cotisation est de 7,85% pour les agents et de 15,34% pour l'entreprise), par des contributions publiques (contribution versée à la RATP par le Syndicat des transports de l'Ile-de-France) et par la solidarité entre les régimes de retraites. Le coût global du régime de retraite de la RATP s'est élevé à 682 millions d'euros en 2002. Il a été couvert à hauteur de 266 millions d'euros par les cotisations patronales et ouvrières auxquelles il convient d'ajouter 7 millions d'euros perçus au titre de la compensation vieillesse entre les régimes spéciaux. Le solde net du régime vieillesse RATP s'est donc élevé à - 409 millions d'euros couverts par la contribution forfaitaire du Syndicat des transports de l'Ile-de-France (STIF).
Au regard de l'évolution démographique prévisible, les engagements de l'entreprise au titre des retraites s'élèvent à 17 milliards d'euros.
· Comme on le voit, il est urgent de clarifier les modalités de financement des régimes spécifiques, de façon à réduire le désavantage concurrentiel qu'induisent des charges de retraites très supérieures à celles acquittées par les entreprises privées. La voie choisie par le Gouvernement a été celle d'un rapprochement des cotisations vers le droit commun, en préalable à toute réflexion sur la nature des prestations garanties par les régimes spécifiques.
- Ainsi, s'agissant d'EDF et GDF, les partenaires sociaux se sont entendus en janvier 2003 sur une adaptation des modalités de financement du régime de retraite des IEG.
L'ensemble des charges de retraites serait transféré à une Caisse de retraite, organisme de sécurité sociale de droit privé géré paritairement par les partenaires sociaux.
Les droits équivalents à ceux qui seraient normalement servis par les régimes de base et complémentaire de la sécurité sociale seraient servis par le régime général, afin de diversifier les sources de financement par une large mutualisation sur le plan économique et financier conforme aux principes de la sécurité sociale. Cette solution impliquerait cependant d'harmoniser le niveau de cotisation des salariés et des employeurs sur les conditions de droit commun (cotisations salariales de 12% et patronales d'environ 20%). En outre, il serait sans doute nécessaire de compenser cette nouvelle charge pour le régime général, l'AGIRC et ARRCO, par, le cas échéant, le versement par les entreprises d'une « soulte ».
Les droits spécifiques au régime des IEG devraient pour leur part faire l'objet d'un financement propre, assuré par la Caisse de retraite. Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « un système de financement est actuellement à l'étude. Il n'aura en tout état de cause aucune conséquence sur le niveau global des tarifs de l'énergie qui intègrent d'ores et déjà les coûts liés aux charges de retraite ».
- Une démarche comparable a été engagée pour La Poste. Le projet de contrat de groupe, qui maintient de manière transitoire le système de financement par l'Etat de la progression des charges de retraite, prévoit cependant l'élaboration d'un nouveau dispositif de traitement global du financement des charges de retraites de La Poste à l'horizon de l'entrée en vigueur des normes IAS en 2005. Le document précise que « le nouveau dispositif comprendra notamment un dispositif de cotisation libératoire pour La Poste », tout en étant « bien sûr sans effet sur les droits à retraites des postiers ».
Votre Rapporteur spécial estime qu'il sera utile, dans la définition de ce nouveau régime, de s'inspirer de la réforme du financement des retraites de France Télécom réalisée en 1996. Rappelons que son objet était précisément de ramener les cotisations de retraites et autres charges sociales payées par France Télécom à un niveau comparable à celui supporté par les autres opérateurs de télécommunications opérant en France, sans modifier les avantages reçus par les fonctionnaires y compris leurs retraites.
Le dispositif retenu a conduit à ce que France Télécom verse à l'Etat depuis le 1er janvier 1997 une contribution « libératoire » mensuelle, égale à un certain pourcentage du montant total du traitement de base versé aux agents fonctionnaires, l'Etat prenant à sa charge le financement des retraites. Ce pourcentage est fixé chaque année afin d'égaliser le niveau général des charges sociales entre France Télécom et les opérateurs privés de télécommunications opérant en France (37,7% en 2002 et 37,6% en 2003). Il convient par ailleurs de rappeler que, de façon à compenser l'effort financier assumé par l'Etat, France Télécom lui a versé une contribution forfaitaire exceptionnelle de 5,72 milliards d'euros en 1997.
La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de votre Rapporteur spécial, les crédits des comptes spéciaux du Trésor et des entreprises publiques.
Votre Rapporteur spécial a tout d'abord indiqué que le périmètre des comptes spéciaux est plus restreint en 2004. La loi organique impose en effet un lien direct entre l'objet des comptes d'affectation spéciale et les recettes qui les alimentent. Le projet de loi de finances pour 2004 en tire les premières conséquences en proposant la suppression du Fonds national de l'eau (FNE) et du Fonds national pour le développement de la vie associative (FNDVA), tous deux alimentés par une partie du prélèvement sur les paris mutuels. D'ici la loi de finances pour 2006, deux comptes devront soit trouver une ressource alternative, soit être clos. Il s'agit du Fonds national pour le développement du sport (FNDS), alimenté également par les paris mutuels et du Fonds de provisionnement des charges de retraites financé par la redevance sur le chiffre d'affaires des licences UMTS. La suppression du compte spécial ne veut pas, pour autant, dire que la dépense disparaît. Elle subsiste, mais elle est financée par les ressources du budget et non plus par une recette affectée.
Votre Rapporteur spécial a ensuite évoqué la réduction des excédents des comptes spéciaux qui, après avoir atteint près de 800 millions d'euros en 2002 et doivent s'établir à plus d'un milliard d'euros en 2003, ne devraient dégager qu'un modeste excédent de 313 millions d'euros en 2004, soit une réduction des deux tiers. Cette diminution du solde global s'explique principalement par les évolutions anticipées du compte d'avances sur le produit des impositions locales, qui a été constamment excédentaire depuis 1996, et qui devrait cependant être marqué par un léger déficit en 2004. Il faut rappeler que le compte est le plus important en volume, représentant à lui seul les deux tiers du revenu global des comptes spéciaux.
Après cinq années durant lesquelles son excédent a atteint 500 millions d'euros par an en moyenne, le compte devrait basculer en 2004 en accusant un déficit de 62 millions d'euros. Ce phénomène s'explique par deux éléments. D'une part l'augmentation des impôts locaux induira une croissance des avances versées par le compte de 5,7% en 2004. D'autre part, du côté des recettes, le projet de loi de finances prend acte du ralentissement des gains de productivité en matière de recouvrement d'impôts locaux. Au-delà des prévisions budgétaires pour 2004, le compte d'avances sur le produit des impositions locales pourrait faire l'objet d'une enquête de la Cour des comptes qui porterait utilement sur les causes des excédents apparus dans la période récente, sur l'évolution des coûts de recouvrement des impôts locaux assumés par l'Etat et, parallèlement, sur la pertinence de l'évaluation forfaitaire à 4,4% des frais d'assiette et de recouvrement, et enfin sur l'ensemble des bénéfices tirés par l'Etat de la gestion de la trésorerie des collectivités territoriales.
Abordant les entreprises publiques, votre Rapporteur spécial a, en premier lieu, déploré la forte dégradation de leur situation financière, marquée en 2002, s'agissant des grands opérateurs historiques, par la constatation de 20 milliards d'euros de pertes, par la diminution de plus de moitié des capitaux propres par rapport à 2001 et par l'explosion de leur dette, désormais près de cinq fois plus élevée que leurs fonds propres, contre un ratio dette sur fonds propres de 1,5 en 2000.
Deux causes permettent d'expliquer cette situation. D'une part, la rentabilité des grandes entreprises est encore insuffisante. D'autre part et surtout, l'expansion internationale a été insuffisamment maîtrisée, conduisant à des pertes liées aux acquisitions extérieures atteignant 18 milliards d'euros pour France Télécom et 2,4 milliards d'euros pour EDF.
Il faut pourtant remarquer que de réels efforts de modernisation ont été engagés en 2003. Cela est vrai pour France Télécom, qui a bénéficié du grand succès du plan défini et mis en _uvre par la nouvelle équipe de Thierry Breton, en étroite collaboration avec l'Etat. Cela est aussi vrai pour La Poste à laquelle le nouveau projet de contrat de groupe donne les moyens de la modernisation, en encourageant la diversification de ses activités en matière financière, notamment, en mettant à niveau son appareil industriel - 1,5 milliard d'euros doivent permettre l'automatisation du tri d'ici 2010- et en favorisant la maîtrise de ses dépenses de personnel. Ce dernier enjeu est essentiel : les charges de personnel de La Poste représentent 65% de son chiffre d'affaires, contre des ratios de 35% environ pour les postes hollandaises et allemandes.
Votre Rapporteur spécial a conclu en décrivant les efforts de modernisations engagés en 2003 par l'Etat actionnaire. Tout d'abord, la ligne de conduite de l'Etat, s'agissant de la gestion des participations minoritaires dans l'économie concurrentielle, a été clarifiée : la puissance publique n'a pas vocation à rester dans des secteurs ouverts ne relevant pas du service public. En application de cette ligne claire, et malgré un contexte boursier dans l'ensemble peu porteur en 2003, le Gouvernement a su concilier l'intérêt patrimonial de l'Etat avec l'intérêt économique des entreprises concernées en retirant trois milliards d'euros environ des cessions engagées depuis novembre 2002 à travers la mise sur le marché de participations résiduelles dans le Crédit Lyonnais, Renault et Dassault système. Les prévisions de recettes de privatisation pour 2004 ont été déterminées de manière très réaliste, à quatre milliards d'euros.
L'Etat a su en outre conduire une politique patrimoniale cohérente, en mettant progressivement en place des réformes de structure aptes à renforcer la dimension d'actionnaire de la puissance publique, notamment avec la création de l'Agence des participations de l'Etat. En outre, la politique de dotations en capital s'oriente désormais vers des investissements de qualité patrimoniale comme Alstom. Il est en effet fondamental que les dotations ne servent pas exclusivement à apurer de lourds passifs (EPFR, organisme finançant le cantonnement des mauvaises créances du Crédit Lyonnais), mais permettent d'engager des politiques pérennes de consolidation industrielle.
M. Alain Rodet a fait trois observations :
- la comparaison de la part des dépenses en personnel à La Poste en France et aux Pays-Bas n'est pas pertinente étant donné les situations totalement différentes, au regard des activités postales, entre les deux pays ;
- quels éléments expliquent les difficultés rencontrées par EDF : l'atonie économique justifie-elle les reculs d'EDF sur les marchés domestiques ? Doit-on invoquer le poids des charges liées aux obligations imposées à l'opérateur au titre du développement durable ? Ces performances décevantes trahissent-elles une baisse de la compétitivité d'EDF, dont les pertes de parts de marchés sont supérieures aux prévisions ?
- où en est-on de la clarification des comptes d'EDF ? Il est fréquemment avancé que le rallongement de la durée d'amortissement des centrales permettrait de substantiellement renforcer le compte d'exploitation de l'opérateur. Cette possibilité a d'ailleurs été évoquée lors du débat sur l'énergie initié par le ministère de l'industrie. On sait qu'aux Etats-Unis la durée d'amortissement est actuellement allongée de quarante à soixante ans. Est-il opportun de suivre ce modèle ?
Votre Rapporteur spécial a apporté les éléments de réponses suivants :
- s'agissant des charges de personnels de La Poste, il est important d'établir d'ores et déjà des comparaisons au niveau européen étant donné que les postes vont être mis en concurrence, à l'horizon 2009, sur l'ensemble des marchés nationaux. Les facteurs de compétitivité constitueront donc des critères déterminants à brève échéance. Il convient d'assurer à La Poste dès à présent des conditions optimales qui lui permettront de faire face à cette concurrence de la façon la plus efficace possible. A cet égard, un travail de benchmarking réalisé par la Cour des comptes en liaison avec ses homologues européens pourrait être utile ;
- EDF a perdu environ 20% de ses parts de marché sur le marché intérieur ouvert à la concurrence. Il faut également noter que l'entreprise a subi des pertes liées aux conséquences de la canicule de cet été, certaines centrales nucléaires n'ayant pas pu fonctionner dans des conditions normales au cours de cette période ;
- il est en effet opportun de rallonger la durée d'amortissement des centrales dont la durée de vie s'avère plus longue que ce que l'on pensait initialement. Bien que ce travail ait été entamé en 2003, toutes ses conséquences n'ont pas encore été tirées.
M. Christian Cabal a rappelé que la décision de prolonger de dix ans la durée d'amortissement avait été prise à l'occasion de l'établissement des comptes 2002 d'EDF, améliorant ainsi mécaniquement les résultats du groupe.
La Commission a adopté, sur proposition de votre Rapporteur spécial, les crédits du Trésor et des entreprises publiques.
Modification de la nomenclature des dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24 "Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés".
Texte du projet de loi :
Le dernier alinéa de l'article 71 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) est remplacé par les dispositions suivantes :
« - en dépenses, les dépenses afférentes aux achats et aux ventes de titres, de parts ou de droits de sociétés, les dotations en capital, avances d'actionnaire et autres apports aux entreprises publiques et aux établissements publics, les dotations en capital initiales aux fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche, les investissements réalisés directement ou indirectement par l'État dans des fonds de capital-investissement, les versements au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, les reversements au budget général et les versements à la Caisse de la dette publique. ».
Exposé des motifs du projet de loi :
La mesure proposée actualise la rédaction des dispositions relatives aux dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24 « Compte d'affectation des produits de cession de titre, parts et droits de sociétés ».
Elle permet d'ouvrir la possibilité pour l'État de verser des dotations en capital à des fondations de recherche reconnues d'utilité publique.
En effet, compte tenu de son rôle déterminant dans la croissance économique, le Gouvernement a décidé de dynamiser la politique de recherche de notre pays afin de porter les dépenses intérieures de recherche à 3 % du PIB à l'horizon 2010. Dans cette perspective, et au-delà de l'effort à accomplir par les entreprises, il apparaît souhaitable d'accroître le rôle des organismes à but non lucratif, en particulier les fondations, dans le financement de la recherche. Ceux-ci ne représentent en effet qu'une source de financement négligeable en France, contrairement à d'autres pays comparables. Cette évolution doit ainsi permettre de faciliter la levée de capitaux privés.
Afin d'accélérer la création de nouvelles fondations dans le secteur de la recherche, qui requiert la mobilisation de capitaux particulièrement importants, il est opportun que l'État puisse leur apporter, au côté de donateurs privés, une contribution financière initiale leur permettant de réunir un capital suffisant pour engager rapidement le financement d'actions significatives. Un montant maximum de 150 millions € pourrait être consacré en 2004 à des dotations de l'État en faveur de nouvelles fondations de recherche reconnues d'utilité publique, à partir des recettes du compte d'affectation spéciale n° 902-24.
Observations et décision de la Commission :
Le présent article a pour objet d'actualiser les dispositions relatives aux dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24 « Produits de cession de titres, parts et droits de sociétés » dont dispose le dernier alinéa de l'article 71 modifié de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992).
A cet égard, les versements au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale ne seront plus désormais limités a priori dans leur montant, la rédaction actuelle de l'article 71 précité résultant de l'article 10 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2007-1576 du 31 décembre 2002) ayant introduit la limite d'un montant cumulé de 1,6 milliards d'euros. En outre, la rédaction proposée permet de tenir compte de la création de la Caisse de la dette publique par l'article 125 de la loi de finances initiale pour 2003 (2002-1575 du 30 décembre 2002), qui a confié à cet organisme diverses facultés d'intervention sur les marchés financiers concernant les titres de « dette publique » auparavant réparties entre la CADEP et le Fonds de soutien des rentes (FSR). Les mots « versements au Fonds de soutien des rentes » sont ainsi remplacés par les mots « versements à la Caisse de la dette publique ».
En outre, l'article propose d'étendre le champ des dépenses du compte de privatisation aux dotations en capital initiales aux fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche.
Il apparaît en effet nécessaire de renforcer l'effort de recherche de notre pays. A ce titre, force est de constater que les organismes à but non lucratif ne participent pas en France au financement de la recherche dans des proportions comparables à celles de nos principaux partenaires économiques. Ainsi, on recensait en 2001 à peine plus de 1.000 fondations en France, dont 473 d'utilité publique. A l'inverse, les fondations américaines sont au nombre de 12.000 et les « charity trust » britannique 3.000. Ce retard est d'autant plus problématique que les fondations d'utilité publique dans le secteur de la recherche présente l'avantage d'être ciblées et réactives, puisqu'elles mobilisent des ressources d'origine privée au profit de projets précis et souvent complémentaire aux investissements de recherche des entreprises.
· Afin de dynamiser la politique de recherche, le Gouvernement a fait le choix de s'appuyer sur les fondations. Plusieurs dispositifs adoptés en 2003 ont eu pour objet commun d'accélérer le rythme de leur création et de renforcer leurs moyens, au service notamment de la recherche fondamentale et appliquée privée.
A cet effet, la loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations (n° 2003-709 du 1er août 2003) ainsi que les nouveaux statuts types validés par le Conseil d'Etat depuis avril 2003 ont considérablement assoupli le régime juridique des fondations reconnues d'utilité publique afin d'encourager leur développement en simplifiant leur modalité de création et de fonctionnement.
La procédure de reconnaissance d'utilité publique, qui implique le ministère de l'Intérieur (bureau des groupements et associations) et le Conseil d'État (Section de l'intérieur), a été accélérée de façon à ne plus excéder 6 mois.
Les conditions de création ont été assouplies.
Rappelons que l'article 18 de la loi du 23 juillet 1987 modifié définit, dans son premier alinéa, la fondation comme « l'acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d'une _uvre d'intérêt général et à but non lucratif ». La dénomination de « fondation » est strictement protégée : l'article 20 de la loi précitée précise que « seules les fondations reconnues d'utilité publique peuvent faire usage, dans leur intitulé, leurs statuts, contrats, documents ou publicité, de l'appellation de fondation ». Dans le respect de ces principes, deux assouplissements ont été adoptés. D'une part, le choix a été ouvert d'une création de fondation avec conseil d'administration ou avec conseil de surveillance ou directoire (seule les premières étaient jusqu'ici autorisées). D'autre part, la représentation du Gouvernement peut désormais être assurée par un commissaire du Gouvernement à voix délibérative plutôt que par des membres du conseil d'administration à voix délibératives.
En outre, les règles relatives au montant du capital initial ont été modifiées. La loi de 1987 précitée imposait un capital initial minimum de 762.245 euros et obligeait les fondations à « assurer l'immobilisation d'un capital qui doit pouvoir générer, sur la durée, les revenus annuels nécessaires à la poursuite de leur objet ». Désormais, le montant du capital initial n'est plus fixé, et il peut être apporté sur dix ans. En outre, les « fondations à capital consomptible » sont désormais admises. Elles permettent à une fondation destinée à financer un projet déterminé de consommer son capital, en non seulement les revenus de son capital, puis de se dissoudre lorsque le projet est réalisé.
· Cependant, dans le secteur de la recherche, le développement des fondations reconnues d'utilité publique est obéré par la difficulté de mobiliser les capitaux considérables nécessaires à leur création.
L'article propose par conséquent de permettre à l'Etat de participer, au côté des donateurs privés, à la dotation initiale des fondations. La mobilisation des ressources du compte d'affectation spéciale n° 902-24 est cohérente dans la mesure où le compte a vocation à incarner la dimension patrimoniale de l'action de l'Etat au profit de l'ensemble de l'économie.
Il est précisé que les versements en 2004 interviendront dans la limite de 150 millions d'euros, portant la progression des moyens de la recherche dans le projet de loi de finances pour 2004 à 3,9%. Il convient pourtant de préciser que la modification législative induite par l'article n'introduit aucune limite financière ou temporelle aux versements effectués au profit des fondations.
Votre Rapporteur spécial s'interroge cependant sur l'opportunité de limiter les versements du compte d'affectation spéciale aux seules « dotations en capital initiales » aux fondations. Il est vrai que cette disposition est cohérente avec l'ensemble des dispositions adoptées en 2003 pour dynamiser la création de nouvelles fondations. Cependant, au regard des délais nécessaires à l'obtention de la reconnaissance d'utilité publique, et en considération de l'importance des recherches financées par les fondations actuellement existantes, en particulier dans le domaine de la santé (fondations Pasteur et Curie notamment), il eût sans doute été préférable de permettre au compte d'affectation spéciale de financer non seulement les dotations initiales, mais aussi plus généralement toute forme de versements à des fondations reconnues d'utilité publique.
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Votre Rapporteur spécial a expliqué que cet article avait pour objet d'actualiser les dispositions relatives aux dépenses du compte d'affectation spéciale n° 902-24, « produits de cession de titres, parts et droits de sociétés ». Les versements au fonds de réserve pour les retraite, mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale ne seront plus désormais limités, a priori, dans leur montant. La rédaction proposée permet de tenir compte de la création de la Caisse de la dette publique dans l'article 125 de la loi de finances initiale pour 2003 qui a confié à cet organisme diverses facultés d'intervention sur les marchés financiers concernant les titres de « dette publique » entre la CADEP et le Fonds de soutien des rentes.
Enfin, cet article propose d'étendre le champ des dépenses du compte des privatisations aux dotations en capital initiales aux fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche.
Après que votre Rapporteur spécial a regretté que les dispositions de l'article excluent du champ des dotations les fondations existantes dont le travail est pourtant remarquable, la Commission a adopté un amendement de votre Rapporteur spécial prévoyant que le Gouvernement présente, simultanément au dépôt du projet de loi de règlement pour 2004, un rapport au Parlement étudiant la possibilité d'étendre aux fondations d'utilité publique dans le secteur de la recherche, existantes au 1er janvier 2004, le bénéfice des dotations en capital versées à partir du compte d'affectation spéciale n° 902-24 précité.
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La Commission a adopté l'article 52, ainsi modifié.
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Rapport spécial n° 1110 annexe 43 de M. Michel Diefenbacher sur les crédits du trésor et des entreprises publiques du projet de loi de finances pour 2004
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() Rapport n° 1004. Président : M. Philippe Douste-Blazy. Rapporteur : M. Michel Diefenbacher.
() Cette opération s'est traduite par le versement à l'Etat de 109 millions d'euros, la différence entre le prix de rachat du réseau (5.42 millions d'euros) et l'indemnité de résiliation des concessions dues par l'Etat à GDF (4.933 millions d'euros). En outre, l'actif que représente désormais le réseau pour l'entreprise a pour contrepartie un relèvement des fonds propres.
() 2,1 milliards d'euros de provision au titre de l'engagement de racheter en juin 2004 aux actionnaires minoritaires d'Equant leurs titres à un cours très supérieur à l'évolution prévisible du titre, 0,6 milliard d'euros pour couvrir l'engagement pris lors de l'acquisition d'une participation majoritaire dans TPSA de racheter la participation du partenaire polonais Kulczyk Holding, diverses provisions pour dépréciation d'actifs concernant principalement Wind, Orange Suisse et des participations dans les pays émergents.
() Association des Collectivités Territoriales pour le retour de la Taxe Professionnelle de France Télécom et de la Poste dans le droit commun.
() Y compris l'exercice de ses bons par l'État.
() La loi n° 2003-290 du 31 mars 2003 modifiant l'article 1er de la loi du 2 juillet 1990 relative au service public des postes et télécommunications précisant que la détention majoritaire du capital, à laquelle l'État est tenu, peut être directe ou indirecte.
() La Poste a retenu l'hypothèse d'une diminution de 10 % des volumes transportés d'ici 2007 - à titre de comparaison, TNT Post table sur un recul de 6 à 18 % de l'activité courrier dans les cinq prochaines années.
() Limitée aux comptes courants postaux, aux livrets d'épargne liquides, à l'épargne logement et aux plans d'épargne populaire, aux dépôts à terme, aux placements de titres et aux produits d'assurance.
() Il convient néanmoins de nuancer ces comparaisons, les compétiteurs de La Poste ayant eu recours de manière intensive à la filialisation et à la sous-traitance des activités, ce qui limite certes les charges de personnel mais augmente les charges externes.
() L'apparition de gains de productivité potentiels extrêmement élevés, en particulier par l'automatisation des tâches de tri postal et de traitement des chèques postaux, le passage d'un statut d'administration publique gérant un monopole à celui d'entreprises intégrées dans la compétition internationale.
() Accord-cadre signé le 17 février 1999.
() Une application mécanique des 35 heures aurait conduit à une augmentation des effectifs de 24.000 emplois.
() En application de l'article 21 de la loi du 2 juillet 1990 précitée, les bases d'imposition de La Poste font l'objet d'un abattement égal à 85 % de leur montant.
() Conclus les 4 juillet 1996 et 10 janvier 1997 et s'étant traduit par une revalorisation des contributions de l'Etat (290 millions d'euros en 2002) et de la presse (environ 850 millions d'euros).
() Chiffres 2001 et 2000 établis pro forma 2002, selon les informations communiquées par RFF à l'occasion de la présentation de ses résultats, le 15 avril 2003.
() Voir commentaire plus bas de l'article 52 du projet de loi de finances pour 2004.