N° 1112

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TOME III

AGRICULTURE ET PÊCHE

PÊCHE

PAR M. AIMÉ KERGUERIS,

Député.

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INTRODUCTION 5

I.- L'AUGMENTATION SENSIBLE DU BUDGET DE LA PÊCHE ET DES CULTURES MARINES 7

A.- L'ACCROISSEMENT SALUTAIRE DES CRÉDITS DU MINISTÈRE 7

1. L'amélioration de l'assistance technique aux professionnels 7

2. La transformation des soutiens destinés aux entreprises de pêche et d'aquaculture 9

3. L'augmentation des subventions d'équipement 10

B.- LE SOUTIEN ACCORDÉ AUX ACTIONS PRIORITAIRES 11

1. Les multiples aides à l'installation des jeunes 11

2. Les aides à la construction et à la modernisation des navires 12

3. Les mesures destinées à améliorer la sécurité des marins pêcheurs 13

II.- LES CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE 15

A.- UNE RÉFORME LARGEMENT AMENDÉE 15

1. Le projet initial de la Commission européenne n'était pas acceptable 15

2. Les textes adoptés le 20 décembre 2002 préservent les intérêts français 16

B.- LES CONSÉQUENCES POUR LA PÊCHE MARITIME FRANÇAISE 17

III.- L'ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION FRANÇAISE FACE À LA CONCURRENCE INTERNATIONALE 18

A.- LES DIFFICULTÉS DE LA PÊCHE FRANÇAISE 18

1. La réduction progressive de la flotte de pêche 18

2. Les évolutions contrastées du marché 19

3. La fragile amélioration de la situation financière des entreprises 19

4. L'instabilité structurelle du revenu des pêcheurs 20

B.- LA COMPÉTITIVITÉ DE L'AQUACULTURE 20

1. L'expansion de la conchyliculture 20

2. La déstabilisation récente de la pisciculture marine 21

3. Les nouveaux défis imposés aux piscicultures continentales 22

IV.- LES INCERTITUDES RELATIVES À L'ETAT DE LA RESSOURCE 23

A.- L'IMPORTANCE STRATÉGIQUE DE L'ÉVALUATION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES POUR LES PRODUCTEURS FRANÇAIS 23

B.- LE DIAGNOSTIC PROVISOIRE DES SCIENTIFIQUES 24

EXAMEN EN COMMISSION 27

La France, dotée de multiples façades maritimes, bénéficie d'atouts géographiques considérables pour faire prospérer les activités de pêche et d'aquaculture sur ses côtes. Dès lors, la persistance d'un important déficit commercial dans ce secteur, ou encore la diminution de la flotte française peuvent paraître surprenantes. Votre rapporteur reste convaincu que la pêche et les cultures marines françaises disposent d'un important potentiel de développement et doivent, à ce titre, recevoir les encouragements de la collectivité nationale.

Le projet de loi de finances pour 2004, particulièrement favorable à la pêche et à l'aquaculture, s'inscrit précisément dans cette démarche audacieuse. En effet, dans un contexte budgétaire très contraignant, les crédits du ministère consacrés à ces dépenses bénéficient d'une progression de 23,5 % par rapport à l'année précédente et atteignent 34,3 millions d'euros. Cette évolution permettra notamment d'accroître les actions structurelles en faveur de la pêche et de développer les subventions d'équipement permettant de renouveler la flotte française. Par ailleurs, les diverses mesures dont bénéficient les jeunes pêcheurs, auxquels un grand investissement de départ est demandé, seront maintenues, tandis que l'effort pour moderniser les navires et accroître la sécurité des marins sera poursuivi.

Votre rapporteur ne peut manquer de rappeler les négociations décisives intervenues cette année au niveau communautaire. Ainsi, la Commission européenne avait proposé en mai 2002 une réforme de la politique commune de la pêche particulièrement radicale, qui lui transférait le pouvoir de déterminer l'importance des captures autorisées et empêchait dès 2003 toute aide publique à la construction de navires. La France, grâce au soutien des pays du sud de l'Europe, a obtenu sur ces enjeux, ainsi que sur la question de l'effort de pêche, des concessions suffisantes pour préserver ses intérêts économiques, ce qui a permis au Conseil des ministres de l'Union européenne de voter la réforme le 20 décembre 2002.

Par ailleurs, l'analyse de la situation économique de la pêche et de l'aquaculture montre que les professionnels doivent être soutenus pour satisfaire une demande intérieure en expansion continuelle. La population vieillissante des pêcheurs français, qui sont confrontés à une réduction progressive de leur flotte et aux conséquences des variations du prix des carburants, peut légitimement attendre un effort de solidarité de nos concitoyens. De même, l'intérêt national commande d'aider l'aquaculture française, qui se caractérise par un bon niveau de compétitivité et une croissance soutenue, mais fait face à des contraintes normatives excessives, à une concurrence étrangère accrue et à de nouvelles exigences sociales.

Enfin, votre rapporteur tient à rappeler les enjeux économiques attachés à l'évaluation des stocks halieutiques, ainsi que le caractère encore incomplet du diagnostic scientifique réalisé. La participation des professionnels de la pêche à ces analyses permettrait d'en enrichir le contenu et d'en améliorer la fiabilité, sans remettre en cause l'objectif largement partagé d'une gestion durable des ressources disponibles.

La prise en compte de l'ensemble des efforts réalisés et planifiés par le Gouvernement dans ces divers domaines, et surtout le caractère prometteur de ce volet du projet de loi de finances pour 2004, amènent votre rapporteur à inviter la représentation nationale à adhérer pleinement au budget de la pêche et des cultures marines qui lui est soumis.

I.- L'AUGMENTATION SENSIBLE DU BUDGET DE LA PÊCHE ET DES CULTURES MARINES

Le projet de loi de finances pour 2004, élaboré dans un contexte budgétaire difficile, préserve largement l'avenir des producteurs français en matière de pêche et de cultures marines. L'évolution des crédits dont ils bénéficient et les nombreuses actions entreprises par le Gouvernement en leur faveur témoignent d'un effort particulier de la puissance publique pour favoriser une exploitation durable des ressources halieutiques et valoriser les productions françaises.

Le budget consacré par le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales à la gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture connaît une hausse sensible en 2004, illustrant l'intérêt porté par le Gouvernement à la situation de ce secteur d'activité. Certes, les autorisations de programme, qui représentent 4,5 millions d'euros, enregistrent un léger recul de 1,6 %. Toutefois, les crédits de paiement retraçant l'ensemble des versements qui pourront être véritablement effectués en 2004 par le ministère s'accroissent de 23,5 % et atteignent 34,3 millions d'euros.

Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit une progression de 19,6 % des dépenses de fonctionnement relevant de la pêche et de l'aquaculture, qui passent de 1,72 millions d'euros en 2003 à 2,06 millions d'euros en 2004.

* En premier lieu, cette évolution très favorable profite bien sûr aux établissements publics subventionnés, dont la dotation augmente de 1,8 % et atteint 1,53 millions d'euros (chapitre 36-22, article 14).

Ces subventions concernent deux catégories d'établissements, soumis à une convention annuelle avec l'Etat :

- les premiers, auxquels le ministère chargé de la pêche accordera une subvention de 533 259 euros en 2004, sont chargés de recueillir les données statistiques relatives aux activités de pêche.

Il s'agit bien sûr de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) qui contribue au recueil, à la validation et au traitement des données relatives aux captures effectuées en métropoles par les pêcheurs français, conformément à nos engagements communautaires. L'IFREMER consacrera 18 enquêteurs à cette tâche et recevra à ce titre 518 000 euros.

Il s'agit aussi du Muséum d'histoire naturelle, qui effectue le même travail dans l'Océan indien et auquel sera attribuée une modeste subvention de 7 624 euros.

Il convient également de mentionner l'Institut de recherche et de développement (IRD), auquel une mission plus ciblée est confiée : évaluer les captures des navires thoniers français dans l'océan atlantique et l'océan indien. Cet établissement recevra lui aussi une subvention de 7 624 euros en 2004.

- les seconds, auxquels le même ministère accordera en 2004 une subvention de 994 610 euros, doivent assurer le suivi sanitaire des mollusques et coquillages.

Il s'agit d'abord de participer aux frais de fonctionnement du Laboratoire national de référence (LNR) mis en place en 2003 pour contrôler les contaminations bactériennes et virales des mollusques bivalves, conformément à la décision 1 999/313/CE du Conseil des ministres de l'Union européenne en date du 29 avril 1999. L'IFREMER, retenu pour prendre en charge cette mission, doit à ce titre comparer et coordonner les activités de l'ensemble des laboratoires qui procèdent à des analyses bactériologiques et virales des coquillages de pêche et d'élevage à tous les stades de la production et de la commercialisation.

Il s'agit aussi de financer, à hauteur de 900 000 euros, le suivi sanitaire des coquillages, effectué par le ministère avec le soutien technique de l'IFREMER, aussi bien dans les zones de production (régulièrement surveillées et classées en fonction de leur degré de salubrité) que lors de l'expédition puis de la mise sur le marché de ces denrées. Le coût de ces contrôles, qui reposent sur des prélèvements périodiques le long des côtes et peuvent conduire à suspendre la commercialisation des coquillages, est d'autant plus élevé aujourd'hui que de nouvelles biotoxines sont apparues et que la réglementation communautaire a renforcé ses exigences.

* Cette progression des crédits profite surtout aux actions structurelles en faveur de la pêche, de l'aquaculture, de la transformation et de la commercialisation des produits de la mer, actions auxquelles seront consacrés 531 000 euros en 2004, contre 221 500 euros en 2003. L'augmentation spectaculaire de cette dotation, supérieure de 140 % à celle de l'année précédente, est essentiellement destinée au financement du contrôle des pêches, qui reçoit 450 000 euros, tandis que les crédits d'assistance technique affectés à l'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP) s'élèvent à 81 000 euros. Il convient de rappeler que les crédits d'assistance technique consacrés à l'IFOP constituent la contrepartie nationale du financement communautaire de cette politique, et sont plus particulièrement destinés à des actions d'évaluation, de gestion et d'information du programme IFOP pour la période 2000-2006.

Les missions de contrôle des pêches prennent une importance croissante du fait de l'évolution de la politique commune des pêches. La réglementation communautaire rend en effet obligatoire l'embarquement d'observateurs à bord des navires qui exploitent des stocks faisant l'objet de mesures spécifiques. A titre d'exemple, le règlement CE n° 973/2001 du Conseil des ministres de l'Union européenne interdit d'utiliser des dispositifs concentrateurs de poissons pour pêcher de grands migrateurs comme le thon tropical. Ce règlement prévoit l'intervention d'observateurs, mandatés pour vérifier pendant trois mois le respect de cette règle et pour s'assurer du recueil de données biologiques. De même, du fait de l'imposition, depuis juin 2002, de quotas limitant la pêche de certaines espèces vivant en eau profonde, telles que le grenadier ou l'empereur, le règlement 2002/C151E/08 prescrit la présence d'observateurs scientifiques à bord des navires pêchant les stocks d'eau profonde.

Par ailleurs, la dégradation biologique de certains stocks halieutiques pourrait conduire à l'avenir à un renforcement de la politique de contrôle de l'activité des navires, qui est appliquée par les services déconcentrés des affaires maritimes mais élaborée et suivie par l'administration centrale du ministère chargé de la pêche.

Si les dépenses d'intervention en faveur de la pêche et de l'aquaculture connaissent globalement une progression soutenue (les crédits passant de 25,5 millions d'euros en 2003 à 30,8 millions d'euros en 2004, soit une hausse de 20,8 %), la répartition interne de ces soutiens évolue fortement et conduit à des évolutions contrastées.

* Ainsi, le budget proposé pour les subventions en faveur des professionnels de la pêche et de l'aquaculture est réduit de 23,2 %, passant de 23,78 millions d'euros en 2003 à 18,25 millions d'euros en 2004.

Cette diminution sensible provient essentiellement de la réduction des crédits consacrés aux interventions en faveur des entreprises de pêche et d'aquaculture, qui ne s'élèvent plus qu'à 8,25 millions d'euros en 2004, alors qu'ils atteignaient 12,78 millions d'euros en 2003. Ces crédits financent les caisses chômage-intempéries des pêcheurs, à hauteur de 6,86 millions d'euros, ainsi que les actions inscrites aux contrats de plan Etat-régions, à hauteur de 1,38 million d'euros.

Ce budget ne tient plus compte de la dotation réservée à l'ajustement des efforts de pêche (sorties de flotte), qui s'élève à 15 millions d'euros pour les années 2003 et 2004 mais a été entièrement mobilisée dès 2003 pour indemniser les pêcheurs. Ceux-ci doivent en effet recevoir au plus vite les indemnisations compensant la réduction de 3 % de la capacité globale de pêche française décidée en décembre 2002 par le Conseil des ministres de l'Union européenne dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche (voir II).

Par ailleurs, la subvention de l'Etat à l'Office interprofessionnel des produits de la mer (OFIMER) passe de 11 millions d'euros en 2003 à 10 millions d'euros en 2004. Cette baisse de 9,1 % des crédits qui lui sont alloués vise à ajuster la subvention aux besoins réels de l'OFIMER tels qu'ils ont été constatés depuis plusieurs années, et anticipe une plus forte mobilisation des fonds communautaires de l'IFOP en faveur des organisations de producteurs. Cette subvention permettra à l'OFIMER de poursuivre et de renforcer les principales actions qu'il a engagées :

- en confortant le rôle des organisations de producteurs pour améliorer la connaissance et le fonctionnement des marchés ;

- en aidant les investissements dans les criées et en soutenant la modernisation de l'aval de la filière ainsi que le secteur de l'aquaculture, de façon à moderniser les outils de commercialisation et de promotion des produits de la mer ;

- en lançant des opérations collectives de recherche, d'expérimentation et d'innovation, et en favorisant les actions professionnelles développant la qualité, la traçabilité et l'identification des produits, afin de mieux valoriser la production halieutique et aquacole.

Ces restrictions budgétaires, en réalité modérées, sont plus que compensées par l'apparition d'un nouvel article (article 30) au sein du chapitre consacré aux charges de bonification (chapitre 44-42). Cet article prévoit l'attribution de 10,5 millions d'euros aux pêcheurs français sous la forme de bonifications accordées dans le cadre des prêts à la pêche. Ces crédits, relevant, jusque-là, de la direction du Trésor du ministère des finances, ont vocation à couvrir le différentiel entre les taux d'intérêt du marché et ceux des prêts bonifiés accordés à la pêche.

Les crédits destinés à favoriser les investissements des professionnels de la pêche et de l'aquaculture connaissent incontestablement une évolution favorable dans le projet de loi de finances pour 2004. Certes, les autorisations de programme enregistrent un très léger recul de 1,6 %, passant de 4,57 millions d'euros en 2003 à 4,5 millions d'euros en 2004. Toutefois, les sommes qui pourront réellement être utilisées au cours de l'année, les crédits de paiement, enregistrent une progression de 53,1 % et atteignent 3,5 millions d'euros en 2004 (contre 2,29 millions d'euros l'année précédente).

Votre rapporteur se réjouit de cette augmentation substantielle, qui permettra d'aider l'ensemble des producteurs à adapter leurs équipements aux nouvelles exigences techniques, sécuritaires et sanitaires.

Ces crédits sont en effet utilisés traditionnellement pour accompagner le renouvellement de la flottille, favoriser la valorisation qualitative des produits, par exemple par l'aménagement des cales en froid, et améliorer la sécurité à bord des navires. Ils contribuent aussi à améliorer la qualité des productions aquacoles, notamment par l'entretien des parcs conchylicoles et l'amélioration de la qualité des eaux. Enfin, ces sommes jouent un rôle déterminant pour les investissements réalisés à terre, qu'ils soient destinés à adapter les criées aux normes sanitaires ou à améliorer l'équipement des ports de pêche.

Il a été indiqué à votre rapporteur que les crédits totaux consacrés au financement du plan de modernisation de la flotte de pêche, qui ne figurent pas dans le projet de loi de finances pour 2004, seraient inscrits dans le projet de loi de finances rectificatives pour 2003, à hauteur de 5 millions d'euros en crédits de paiement (10 millions d'euros en autorisations de programme).

Le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales contribuera en 2004 à la gestion durable des pêches maritimes en poursuivant plusieurs actions prioritaires, qui concernent l'installation des jeunes, sans lesquels l'avenir de la pêche française ne serait plus assuré, mais aussi l'état de la flotte et la sécurité des personnes à bord des navires.

Plusieurs mesures concernant le secteur de la pêche partent de ce constat : il est indispensable de favoriser l'installation des jeunes pêcheurs pour assurer le renouvellement de la profession. Le jeune pêcheur qui souhaite s'installer est en effet confronté à d'importantes contraintes financières, qui tiennent en particulier au prix élevé des navires neufs - un chalutier de 24 mètres coûte 1,5 million d'euros -, à l'inflation des prix de l'occasion et au plafonnement des aides par l'IFOP. Les pouvoirs publics apportent donc à ces jeunes professionnels de multiples soutiens pour alléger leur charge financière.

Il s'agit d'abord des « Sofipêches », aides fiscales mises en place par la loi du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines pour favoriser la création de sociétés de financement de la pêche artisanale. Les souscriptions en numéraire au capital de la Sofipêche bénéficient ainsi d'une déductibilité fiscale. Ce dispositif permet de financer l'achat en copropriété de navires neufs ou d'occasion qui seront exploités de façon directe et continue par un jeune pêcheur âgé de moins de 40 ans, ayant suivi une formation et présenté un plan d'installation. Les parts acquises par les Sofipêches, qui doivent dans un délai de dix ans être transférées aux artisans pêcheurs ou sociétés de pêche artisanale participants, ont à ce jour permis l'acquisition de 112 navires de pêche, pour la plupart d'occasion (le financement global des Sofipêches a atteint 44 millions d'euros).

La loi précitée a également mis en place un abattement de 50 % sur le bénéfice imposable, pendant les cinq premières années d'activité, pour les jeunes artisans pêcheurs (âgés de moins de 40 ans). Le bénéfice de cette mesure est soumis à une obligation de formation dite « module d'installation à la pêche » d'une durée de 160 heures, ce qui paraît légitime compte tenu de la technicité croissante des compétences attendues d'un pêcheur.

A ces aides d'origine nationale s'ajoute une aide cofinancée à 50 % par l'IFOP pour accompagner la première installation des jeunes pêcheurs. Cette aide, plafonnée à 50 000 euros, peut être accordée à des jeunes de moins de 35 ans qui deviennent pour la première fois propriétaires ou copropriétaires en acquérant un navire d'occasion dans un cadre non familial. Cette aide, mise en place à la demande de la France dans le cadre de la programmation 2000-2006 de l'IFOP, est cumulable avec les aides consenties par les collectivités locales pour l'acquisition de navires d'occasion. Au 31 décembre 2002, plus de 850 000 euros avaient été engagés sur cette mesure au titre de l'IFOP, aidant 81 marins pour un coût total éligible de 20,67 millions d'euros.

L'installation des jeunes pêcheurs est en outre favorisée prioritairement en ce qui concerne la dimension de l'installation : le décret modifié n° 2000-249 du 15 mars 2000 relatif au permis de mise en exploitation des navires de pêche donne la priorité à la création d'entreprises et lutte contre la spéculation sur le marché de l'occasion. De même, les conditions d'accès à la propriété sont facilitées dans le cadre de l'enveloppe annuelle de prêts bonifiés (voir I A 2), ainsi que par l'adaptation des modalités d'emprunt, qui facilitent le remboursement des prêts.

Le cadre des aides à l'investissement dans la flotte de pêche, régi notamment par le règlement CE n° 2792/99 du 17 décembre 1999 relatif aux actions structurelles dans le secteur de la pêche, a été profondément modifié depuis décembre 2002.

Ainsi, les aides publiques à la construction s'arrêteront le 31 décembre 2004 et, entre le 1er janvier 2002 et cette date, la France ne pourra accorder les aides au renouvellement qu'à condition de réduire de 3 % la taille de sa flotte. Par ailleurs, la création de capacité ne peut être aidée que si elle s'accompagne d'un retrait de capacité, dont l'importance est fonction de la taille des bateaux concernés. Enfin, les aides à la modernisation sont maintenues jusqu'au 31 décembre 2006, à l'exception de celles qui concernent la remotorisation ou la coque qui sont désormais exclues.

En 2002, l'enveloppe de puissance ouverte par le ministère en charge de la pêche pour la délivrance des permis de mise en exploitation a permis 146 constructions neuves et 62 opérations de modernisation.

La participation de l'IFOP à l'équipement des pêcheurs, qui s'élève à 15 % des dépenses (contre 12,5 % pour la part de l'Etat), représentera au total 225 millions d'euros pour la période 2000-2006, dont 55 millions d'euros pour les opérations de renouvellement et de modernisation de la flotte. Cet important soutien permettra d'accompagner plus d'un milliard d'euros d'investissements dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture. Il convient de rappeler que les projets sont sélectionnés et approuvés par une instance de programmation dans un cadre déconcentré, la Commission régionale de modernisation et de développement de la flotte de pêche artisanale et des cultures marines (COREMODE), qui est une structure paritaire créée en 1985 et comprenant des représentants de l'Etat, de la région et des professionnels.

Votre rapporteur estime d'ores et déjà possible d'effectuer un premier bilan de la mise en _uvre de ce programme.

Entre janvier 2000 et décembre 2002, les projets de construction de nouveaux navires ont reçu 1,99 million d'euros d'aide IFOP et 1,95 million d'aide nationale, tandis que les projets de modernisation de la flotte de pêche ont donné lieu au versement de 1,37 millions d'euros d'aide IFOP et de 1,34 millions d'aide nationale.

Si la programmation a été plutôt faible au début de la période, du fait d'une approbation tardive des régimes d'aides publiques par les services de la Commission européenne, une accélération a lieu depuis 2002 en raison d'une amélioration des résultats d'exploitation des pêcheurs. Ce rattrapage a permis d'atteindre à la fin de l'année 2002 des taux de réalisation qui s'élèvent à 52,8 % pour les aides au renouvellement et 44,5 % pour les aides à la modernisation.

En revanche votre rapporteur constate que le taux de réalisation des paiements reste très modeste : 5,86 % pour les aides au renouvellement et 6,83 % pour les aides à la modernisation. Il est donc essentiel de poursuivre le mouvement qui s'amorçait à la fin de l'année 2002 pour liquider plus rapidement les sommes auxquelles les projets programmés donnent droit.

Sensible aux risques importants encourus par les professionnels lorsqu'ils sont en mer, le ministre chargé de la pêche a décidé de poursuivre le plan gouvernemental pour la sécurité des marins-pêcheurs mis en place en décembre 2001.

Ce plan vise d'abord à encourager la mobilisation des marins en faveur de la sécurité. Pour ce faire, la formation initiale de tous les élèves des lycées maritimes et aquacoles inclut désormais un module de formation sanctionné par un « certificat de base à la sécurité », tandis que le certificat d'initiation nautique (CIN, dont sont titulaires la moitié des entrants dans la profession de marin pêcheur) est proposé depuis la rentrée 2003 sous la forme de l'alternance dans quatre lycées professionnels maritimes (Boulogne, Cherbourg, La Rochelle, Sète) afin de faire connaître les gestes pratiques de sécurité. Par ailleurs, tous les marins pêcheurs en exercice doivent suivre, au minimum tous les cinq ans, une journée spécifique de formation aux problèmes de sécurité (lutte contre les incendies et les voies d'eau, règles de barre et de route, techniques de survie et de secourisme). En outre, la création de comités portuaires interentreprises d'hygiène et de sécurité est encouragée et la création d'un organisme paritaire envisagée.

Le plan gouvernemental se fixe ensuite l'objectif d'améliorer et de promouvoir les équipements de sécurité pour les hommes et les navires. Afin de généraliser le port permanent de vêtements de travail à flottabilité intégrée, chaque marin-pêcheur doit recevoir, sur une période de trois ans, une prime forfaitaire plafonnée à 76 euros. A ce jour, 4 500 vêtements de ce type ont donné lieu au versement de cette aide, ce qui représente une aide publique de 381 000 euros. Toutefois, votre rapporteur observe qu'après un début de programme encourageant, le rythme d'exécution de ce volet du plan s'est fortement ralenti depuis le début de l'année 2003 ; cette évolution devra être corrigée par une communication adaptée vers les professionnels ayant jusqu'ici peu sollicité le bénéfice de cette aide.

D'autre part, la Commission centrale de sécurité a décidé le 4 juin 2003 que les navires de petite taille (moins de 12 mètres), qui sont les plus exposés aux accidents, seraient dorénavant équipés de radeaux de sauvetage gonflables, de largueurs hydrostatiques des radeaux, ainsi que de radio-balises de localisation des sinistres. A cet effet, la Commission européenne a accepté en avril 2003 la mise en place d'une aide financière, qui s'élèvera à 40 % des sommes investies pour les démarches individuelles (15 % par l'IFOP et 25 % par les collectivités territoriales), et à 35 % de l'investissement pour les dossiers portés par une structure associative (17,5 % par l'IFOP et 17,5 % par l'Etat). Plus de 4 000 navires devraient pouvoir bénéficier de ces mesures, auxquelles l'Etat consacrera 1,4 millions d'euros sur trois ans.

Enfin, le même plan doit conduire à adapter les contrôles et renforcer les moyens d'intervention, ce qui suppose une réforme des visites annuelles de sécurité effectuées sur les navires, en mettant l'accent sur la validation des connaissances de l'équipage en matière de prévention et de gestion des risques.

II.- LES CONSÉQUENCES DE LA RÉFORME DE LA POLITIQUE COMMUNE DE LA PÊCHE

L'examen du budget de la pêche et des cultures marines doit naturellement permettre de revenir sur les événements et décisions essentiels survenus au cours de l'année écoulée. A ce titre, votre rapporteur tient à souligner l'importance de la réforme de la politique commune de la pêche adoptée en décembre dernier, en raison de son impact prévisible sur l'activité des pêcheurs français.

Alors que le projet de réforme présenté le 28 mai 2002 par la Commission européenne avait suscité les plus grandes réserves du Gouvernement français, qui l'estimait trop défavorable à l'activité économique des pêcheurs, une réforme plus équilibrée a finalement pu être adoptée par le Conseil des ministres de l'Union européenne le 20 décembre 2002.

La réforme de la politique commune de la pêche proposée par la Commission européenne reposait sur un diagnostic très critique de l'activité des pêcheurs dans l'Union européenne. Le « livre vert » établi par ses services insistait ainsi sur l'état alarmant de nombreux stocks halieutiques, constatait une surcapacité des flottes de pêches communautaires au regard de la ressource disponible, remarquait un déficit de gouvernance et soulignait la fragilité économique du secteur comme la faiblesse de la politique de contrôle.

Ce constat négatif n'était pas véritablement injustifié, la capacité communautaire de pêche étant effectivement excessive compte tenu des ressources halieutiques disponibles. La situation actuelle résulte d'un certain laxisme des Etats membres dans l'application et le contrôle des règlements existants, en particulier pour la bonne application des quotas de pêche, des mesures techniques et des tailles minimales de commercialisation des poissons, ainsi que pour le respect de l'objectif de stabilisation voire de diminution des capacités de pêche de la flotte.

Toutefois, la méthode retenue par la Commission européenne, brutale et technocratique, n'était pas acceptable sur le plan politique et devait en conséquence être substantiellement amendée. Aussi le Gouvernement français a-t-il fait part de ses plus grandes réserves lors du Conseil des ministres de l'Union européenne du 11 juin 2002.

Le texte rendu public proposait de transférer à la Commission européenne les pouvoirs jusque-là détenus par le Conseil des ministres de l'Union européenne pour la fixation des autorisations de capture et de mesures techniques, et de mettre en place des plans de gestion pluriannuels (PGP) déterminant par avance le volume d'effort de pêche. Il prévoyait aussi la suppression, dès le 1er janvier 2003, de l'ensemble des aides publiques à la construction et à la modernisation des navires, ainsi qu'une réduction des capacités de pêche conduisant à la démolition de 8 000 navires de pêche environ, dont 900 pour la France.

Sur le fond, le Gouvernement français a souligné le déséquilibre évident, dans le projet de la Commission européenne, entre la nécessaire protection de la ressource et l'indispensable prise en compte de la dimension sociale, économique et territoriale de l'activité des pêcheurs. Il a regretté le manque de concertation avec les professionnels et a estimé que l'application des mesures préconisées pourrait conduire à la perte de 28 000 emplois et à une réduction de 30 à 60 % de la flotte européenne.

Seule l'alliance solide nouée avec les pays du sud de l'Union européenne (Espagne, Portugal, Italie et Grèce) ainsi qu'avec l'Irlande a permis à la France, en maintenant une « minorité de blocage », d'infléchir la volonté de la Commission européenne.

A l'issue de négociations acharnées, le Conseil des ministres de l'Union européenne a adopté, après les avoir considérablement modifiés, les trois projets de règlements que la Commission européenne avait présentés le 28 mai 2002.

Le premier projet de règlement concerne la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques. Il introduit un nouvel instrument de régulation des captures, qui s'ajoute au système des totaux admissibles de captures (TAC) et des quotas : l'effort de pêche, qui correspond à la durée d'activité des navires. Cet instrument doit obligatoirement être appliqué pour les stocks dont l'état biologique justifie un plan de reconstitution (en France, le cabillaud, le merlu et la sole). Il reste en revanche d'application facultative pour les autres stocks halieutiques, qui peuvent faire l'objet de plans de gestion pluriannuels destinés à limiter les variations des possibilités de pêche d'une année à l'autre.

Les second et troisième projets de règlements modifient le règlement CE 2 792/99 relatif aux aides structurelles au secteur de la pêche, en supprimant :

- les aides publiques à la construction des navires de pêche, à compter du 1er janvier 2005 (soit deux ans plus tard que la proposition initiale de la Commission) ;

- les plans d'orientation pluriannuels (POP) et la segmentation des flottilles qui leur était attachée. Dorénavant, l'encadrement de la flotte de chaque Etat membre se fera globalement, les limites de puissance établies au 1er janvier 2003 étant réduites automatiquement du montant des capacités sorties avec aides publiques.

Par ailleurs, afin d'accompagner socialement la mise en place des plans de reconstitution, les Etats membres pourront majorer de 20 % les primes maximales de sortie de flotte pour les navires dont l'activité serait réduite de plus de 25 % en raison de ces plans.

La Commission doit compléter au cours des prochains mois sa proposition globale de réforme de la politique commune de la pêche, en publiant des documents relatifs à l'aquaculture, à la pêche en Méditerranée, aux avis scientifiques et à la politique de contrôle, au volet externe de la politique commune de la pêche et aux impacts socio-économiques. La France a en particulier demandé la reconnaissance des besoins spécifiques des départements d'Outre-Mer et des pêcheries méditerranéennes.

Votre rapporteur estime que les dispositions réglementaires adoptées le 20 décembre 2002 sont conformes aux grands intérêts de la pêche française. En effet, les règles de gestion des stocks halieutiques reconnaissent le principe de la pluriannualité, ainsi que la distinction entre les stocks menacés biologiquement et les autres, pour lesquels l'instrument de l'effort de pêche n'est pas obligatoire. En outre, les compétences relatives à la fixation des autorisations de capture et des mesures techniques restent attribuées au Conseil des ministres de l'Union européenne et non à la Commission européenne. Enfin, les aides à la construction et à la modernisation des navires doivent être supprimées deux ans plus tard qu'initialement prévu.

La restructuration de la flotte de pêche française ne sera pas seulement la conséquence de textes communautaires mais avant tout le résultat d'une réalité économique et biologique : la France dispose d'une surcapacité structurelle en matière de pêche par rapport à la disponibilité des ressources halieutiques.

Aussi un budget de 30 millions d'euros sera-t-il consacré par l'Etat et l'IFOP au financement de sorties de pêche, parallèlement au plan de modernisation de la flotte de pêche lancé par le Gouvernement. Les primes proposées seront modulées pour encourager prioritairement à sortir de flotte les navires pêchant sur les stocks pour lesquels la France dispose des quotas les plus limités (cabillaud, merlu, baudroie, sole et langoustine). Cette politique incitative pourrait, si elle est couronnée de succès, alléger les contraintes découlant de la mise en place des schémas d'effort de pêche prévus dans les plans de reconstitution.

Par ailleurs, la suppression d'ici 2005 des aides nationales et communautaires à la construction et à la modernisation des navires pourrait provoquer une certaine déstructuration de la flotte française, notamment au détriment des petites unités artisanales. Toutefois, il est également possible d'espérer que ce mouvement dissuadera les armateurs d'investir de façon disproportionnée, dans un contexte marqué par la raréfaction de certains stocks halieutiques.

Enfin, votre rapporteur considère que la réforme de la politique commune de la pêche pourrait conduire à d'importantes évolutions dans les modalités de gestion de la ressource halieutique. Il pourrait par exemple s'agir de mettre en place progressivement des quotas non transférables mais alloués individuellement, par navire ou par groupe de navires, ce qui permettrait de gérer équitablement les stocks disponibles pour la pêche.

III.- L'ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION FRANÇAISE FACE À LA CONCURRENCE INTERNATIONALE

Le rapport annuel présenté par votre rapporteur fournit aussi l'occasion de dresser un bilan économique des filières de la pêche et de l'aquaculture. En effet la situation de ces secteurs d'activité détermine largement le contenu de la politique financée par les crédits du ministère chargé de la pêche.

Les pêcheurs français sont confrontés à de nombreuses exigences, parfois contradictoires, telles que la réduction progressive de leur flotte de pêche, qui résulte d'engagements communautaires, et la nécessité de satisfaire une consommation intérieure croissante. Les efforts entrepris par les professionnels pour répondre à ces attentes et adapter leurs équipements leur ont permis d'améliorer la situation financière de leurs entreprises au cours des dernières années. Toutefois, ce mouvement demeure fragile et le revenu des pêcheurs reste structurellement instable.

La flotte de pêche française a connu une forte diminution au cours des cinq dernières années. Ainsi, 5 712 navires étaient présents en métropole au 31 décembre 2002, contre 6 254 navires au 31 décembre 1997. Cette diminution de 8,7 % du nombre d'unités s'est accompagnée d'une contraction de 5,22 % de la puissance totale de notre flotte (la Bretagne totalise à elle seule près de 40 % de la puissance totale des navires).

Un mouvement comparable existe dans le reste de l'Union européenne, la puissance totale de la flotte européenne ayant diminué de 7,6 % entre 1997 et 2002 (seules les flottes belge, portugaise et irlandaise ont connu une augmentation globale de puissance pendant cette période). Votre rapporteur remarque que la flotte française n'a pas été l'objet d'une réduction plus importante que celle des autres Etats membres de l'Union européenne et se félicite de cet équilibre, qui devra être maintenu à l'avenir.

Sur le plan des effectifs, une quasi-stabilité des emplois de marins-pêcheurs semble prévaloir depuis plusieurs années. Ainsi, le nombre de marins embarqués à la pêche plus de trois mois en cours d'année a presque cessé de baisser depuis l'année 2002, et s'élève à 26 033 en 2002 (contre 26 130 en 2001, soit une diminution de 0,4 % seulement). Alors que la pêche côtière a accru ses effectifs au cours de l'année 2002, ceux de la petite pêche ont été réduits en métropole mais progressent dans les DOM-TOM, les effectifs restant stables dans les autres genres.

Il est toutefois probable que la suppression, avant 2005, de l'ensemble des aides à la construction et à la modernisation, décidée dans le cadre de la réforme de la politique commune de la pêche votée en décembre 2002 par le Conseil des ministres de l'Union européenne, entraînera une nouvelle diminution de la puissance de la flotte française et des effectifs embarqués. Ce mouvement, qui semble inéluctable pour éviter une surexploitation des ressources halieutiques (voir IV), devra donc s'accompagner de la mise en place d'aides spécifiques pour traverser cette période transitoire sans provoquer de crise sociale chez les marins pêcheurs.

La quantité de produits de la mer pêchés par les navires métropolitains, en légère augmentation depuis plusieurs années, atteint 630 000 tonnes en 2002, contre 586 620 tonnes en 1998. Les principaux lieux de pêche se situent dans l'océan atlantique et l'océan indien, la mer Méditerranée venant en troisième position. Les espèces ayant fait l'objet de la plus grande pêche sont le thon, la sardine, le lieu noir, le hareng, le maquereau, le chinchard et l'anchois.

Toutefois, les évolutions sont contrastées selon les espèces : entre 2001 et 2002, les quantités pêchées de poulpes, de bonite à ventre rayé et de calamars ont augmenté de 35 à 47 %, tandis que celles de sardinelle, d'empereur, de sébastes et de siki ont diminué de 42 à 99 %.

Les ventes ont, quant à elles, tendance à croître régulièrement en valeur, passant de 950 millions d'euros en 1997 à 1,13 milliards d'euros en 2002. Cette évolution favorable de la consommation des produits de la mer concerne tant les poissons que les crustacés, coquillages et céphalopodes, ou encore la pêche congelée ou transformée. Seul le chiffre d'affaire des ventes d'algues, déjà très modeste, a reculé de façon sensible, passant de 3,8 millions d'euros à 2,9 millions d'euros sur la période.

S'agissant des ventes en criée, votre rapporteur constate une évolution négative du chiffre d'affaires, qui a diminué de 3 % en 2002 par rapport à l'année précédente. Cette évolution s'est accompagnée d'une nouvelle progression du prix moyen en première vente, qui a cru de 4 % par rapport à 2001.

Enfin, le déficit structurel du commerce extérieur des produits de la mer s'est aggravé entre 2000 et 2001, passant de 2 à 2,24 millions d'euros, du fait d'une diminution de 8 % du volume des exportations et d'une augmentation de 8 % du volume des importations. La France continue à importer principalement des crevettes et des saumons, tout en exportant prioritairement des thons. Ces échanges sont réalisés dans leur très grande majorité avec les voisins européens de la France, la Scandinavie et la Côte d'Ivoire.

Après la crise brutale provoquée de 1992 à 1994 par la baisse généralisée des prix liée aux dévaluations compétitives de l'Espagne, de l'Italie et du Royaume-Uni, le redressement des cours a permis d'améliorer le résultat des entreprises françaises depuis la fin de l'année 1996.

Toutefois, la santé des entreprises de pêche reste étroitement dépendante de l'évolution du prix du carburant, comme en témoignent les difficultés ponctuelles ressenties au cours de l'année 2000. D'un point de vue structurel, la rentabilité des entreprises de pêche françaises pourrait s'amoindrir, à long terme, du fait du relatif vieillissement de la flotte et de l'augmentation générale de l'âge moyen des populations maritimes.

Votre rapporteur tient à souligner la grande sensibilité de ces entreprises aux allègements de charges sociales - ces dernières s'élèvent en moyenne à 6 ou 7 % du chiffre d'affaires. De telles mesures, indispensables pour compenser les surcoûts d'exploitation lorsque les cours mondiaux du pétrole s'envolent, devraient par conséquent être envisagées dès que le contexte budgétaire le permettra.

Le mode de rémunération des marins-pêcheurs est très spécifique : il s'effectue le plus souvent « à la part », ce qui signifie que le marin-pêcheur reçoit une part du montant des ventes, après déduction des frais communs (en pêche industrielle, des conventions collectives permettent de concilier ce système original et le versement d'un salaire minimum garanti).

Après la grave crise déjà évoquée, le revenu des pêcheurs s'est stabilisé depuis le milieu des années 1990, du fait d'une progression régulière du chiffre d'affaire pour le secteur de la pêche. Toutefois, la rémunération des professionnels de la pêche reste largement déterminée par l'évolution des frais communs, au premier rang desquels le prix des carburants. Ainsi, une hausse de 0,15 euro du prix du litre de gazole entraîne en moyenne une baisse de 4 à 16 % du « reste à partager » sur les navires.

L'aquaculture, qui regroupe deux secteurs bien différenciés, l'aquaculture marine (comprenant la conchyliculture et la pisciculture) et la pisciculture continentale, est une activité économique dans laquelle la France maintient un bon niveau de compétitivité.

La culture des coquillages (huîtres creuses ou plates, moules et, dans une moindre mesure, palourdes et coques) est une activité traditionnelle qui s'exerce sur le domaine public maritime. La production française, soumise à d'importants contrôles sanitaires, s'est élevée en 2001 à 187 420 tonnes, dont 109 040 tonnes d'huîtres (creuses à plus de 98 %), 73 220 tonnes de moules et 5 150 tonnes d'autres coquillages.

Alors que la production d'huîtres plates a été presque entièrement anéantie par des épizooties, la production d'huîtres creuses est globalement stable depuis le début des années 1990 et permet de répondre à la demande. En revanche, la production mytilicole, malgré une progression régulière, ne permet pas encore de satisfaire la demande nationale. Il convient donc de développer cette production, en améliorant la productivité des sites traditionnels d'élevage et en créant de nouvelles zones d'élevage.

D'un point de vue commercial, la situation de la conchyliculture française apparaît très contrastée : ainsi, alors que les échanges d'huîtres (marginaux au regard de la production et de la consommation intérieure) ont dégagé en 2001 un excédent commercial qui s'élève à 12,2 millions d'euros, le commerce extérieur des moules reste déficitaire à hauteur de 62,4 millions d'euros. Ce constat plaide, là encore, pour une croissance accrue de la production nationale de moules et une structuration plus forte de la profession - la production est peu concentrée puisqu'elle concerne près de 4 000 entreprises. A cet égard, les accords conclus en 2003 pour améliorer l'organisation de la commercialisation des huîtres ouvrent des perspectives encourageantes.

Le secteur d'activité de la pisciculture marine, apparu au début des années 1970, a réalisé en 2001 un chiffre d'affaires qui s'élève à 46,8 millions d'euros. Les 52 producteurs concernés, qui emploient 512 personnes - contre plus de 10 000 pour la conchyliculture -, élèvent essentiellement les espèces suivantes :

- le bar, dont la production dépasse 3 000 tonnes par an ;

- la daurade royale, dont la production atteint 1 200 tonnes par an ;

- le turbot, dont la production s'élève à 900 tonnes par an.

Bien que les entreprises concernées bénéficient d'une réelle avance technologique sur leurs concurrentes étrangères, le commerce extérieur français est fortement déficitaire dans ce secteur d'activité : en 2001, environ 2 800 tonnes ont été exportées, tandis que plus de 7 500 tonnes étaient importées (daurades et bars, en provenance de Grèce essentiellement).

La croissance de ce secteur de production a été soutenue jusqu'en 1995 mais est ralentie, depuis lors, par l'absence de création de nouvelles unités. Ce blocage regrettable s'explique par la rareté des sites disponibles et par la concurrence des autres activités littorales, en particulier touristiques. En conséquence, le nécessaire développement de cette production suppose à la fois le repérage des sites propices à ces cultures (un inventaire a été réalisé à cet effet par l'IFREMER en 2000) et l'appel à de nouvelles techniques (mise en place d'unités « off shore » et d'exploitations en circuit fermé).

Par ailleurs, les filières du bar et de la daurade sont confrontées depuis le second trimestre 2001 à une crise due aux arrivages massifs sur le marché français de produits grecs et turcs à bas prix. En effet, la production grecque de bars et de daurades d'élevage ne cesse de progresser et atteint aujourd'hui respectivement 23 000 et 34 000 tonnes. Cette évolution, qui fait l'objet d'un audit entrepris par la Commission européenne depuis mai 2003, pourrait probablement être atténuée par un recours plus important à la labellisation des produits, sur le modèle du Label rouge existant déjà pour le bar d'élevage méditerranéen ainsi que pour le turbot.

Enfin, votre rapporteur se félicite des progrès enregistrés dans la structuration du secteur des piscicultures marines. En effet, depuis 2002 une circulaire du ministère chargé de la pêche permet la création d'organisations de producteurs dans ce secteur d'activité. Le même état d'esprit a conduit en 2002 les piscicultures marines à rejoindre l'interprofession aquacole, permettant ainsi aux pouvoirs publics d'étendre, en août 2003, l'accord interprofessionnel déjà conclu.

La production des piscicultures continentales françaises, qui s'élevait en 2001 à 41 000 tonnes, concerne avant tout la truite. La France est en effet le troisième producteur mondial de truites après le Chili et la Norvège. Ce secteur, où l'essentiel de la production est effectué par 19 entreprises, emploie près de 1 600 personnes.

La production des piscicultures continentales stagne depuis plusieurs années, ce qui s'explique principalement par la raréfaction des sites disponibles. La balance commerciale française n'en demeure pas moins positive dans ce secteur d'activité, puisque les exportations, principalement destinées à la Belgique et à l'Allemagne, représentaient en 2002 près de 5 200 tonnes, tandis que les importations, en provenance d'Espagne notamment, restaient inférieures à 3 000 tonnes.

Outre la recherche de nouveaux sites de production - qui nécessitera sans doute un aménagement de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral -, l'un des principaux défis que devront relever les piscicultures continentales au cours des prochaines années consistera à satisfaire les nouvelles attentes de la société. Les associations de consommateurs et de protection animale exigent en effet des efforts particuliers en matière d'alimentation des poissons d'élevage (recours à des farines utilisant le moins possible les poissons sauvages et limitant les rejets polluants), de bien-être animal (conditions d'abattage optimales) ou encore de santé animale et de sécurité alimentaire (mise en place de guides de bonnes pratiques).

Enfin, votre rapporteur estime nécessaire, dès lors qu'une norme AFNOR a été élaborée en 2000 pour la truite, de développer une certification de conformité afin d'offrir au consommateur une garantie de qualité. Cette démarche, si elle s'accompagne d'actions de promotion auprès du grand public et d'une meilleure structuration de l'interprofession, permettra à ce secteur d'activité de conquérir la confiance des consommateurs et de renouer avec une forte croissance.

IV.- LES INCERTITUDES RELATIVES À L'ETAT DE LA RESSOURCE

Les mesures élaborées au niveau communautaire pour réduire la capacité de pêche des Etats membres de l'Union européenne reposent sur un constat simple en apparence : l'insuffisance des stocks de pêche disponibles. Or, l'évaluation des ressources halieutiques, qui revêt une importance stratégique pour l'avenir des pêcheurs français, nécessite une approche scientifique à part entière. A cet égard, votre rapporteur rappelle que les diagnostics réalisés ne sont encore que provisoires et mettent en évidence une situation contrastée.

Le réforme de la politique commune de la pêche adoptée en décembre 2002, en prévoyant l'élaboration de plans de gestion et de plans de récupération, conduira à instituer des règles pluriannuelles pour fixer les niveaux des totaux admissibles de capture (TAC).

Le niveau d'activité économique et de revenu des pêcheurs français dépend étroitement de la quantité de poissons qu'ils sont autorisés à pêcher ; la vitalité de la pêche française sera donc d'autant plus grande que les TAC seront élevés. Toutefois, les données biologiques doivent aussi être prises en compte, car, à long terme, un éventuel épuisement de la ressource halieutique (remise en cause de la pérennité de certaines espèces) irait à l'encontre des intérêts économiques des pêcheurs. Il est donc essentiel de fixer les TAC au niveau le plus adapté, ce qui ne peut être effectué que sur la base d'une analyse scientifique objective de l'état actuel des stocks disponibles.

En 2003, les quotas français ont globalement connu une meilleure stabilité que l'année précédente, même si certains d'entre eux ont fortement diminué. Ils ont atteint, pour les eaux communautaires, près de 250 000 tonnes, les transferts d'autres Etats membres permettant de relever les possibilités de captures à plus de 265 000 tonnes. Les quotas les plus consommés sont ceux de la sole, du maquereau, du cabillaud, du merlan, de la langoustine et du thon rouge.

La plupart des TAC concernent des stocks se trouvant dans les eaux communautaires. Leur niveau est donc fixé par le Conseil des ministres de l'Union européenne. Néanmoins, certains stocks sont partagés avec des pays tiers ou sont gérés dans le cadre d'organisations régionales de pêche (cas par exemple en Mer du Nord et dans l'Atlantique du Nord-Est). Le niveau des TAC est alors décidé dans le cadre de négociations bilatérales ou par les organisations régionales compétentes, la part revenant à l'Union européenne étant ensuite avalisée par le Conseil des ministres.

Le niveau d'un TAC est arrêté sur la base d'un avis scientifique, qui évalue les conditions d'un renouvellement des stocks compatible avec une exploitation durable de la ressource. Pour la majorité des stocks de l'Atlantique du Nord Est, cette évaluation est effectuée par le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM), organisation scientifique réunissant 19 pays riverains de l'Atlantique Nord. Dans les autres cas, l'avis est, en règle générale, délivré par le comité scientifique de l'organisation régionale de pêche compétente.

Au niveau communautaire, les avis du CIEM sont validés par le Comité scientifique, technique et économique des pêches (CSTEP), comité d'experts chargé de conseiller la Commission européenne et de donner les orientations à suivre. Le Conseil des ministres chargés de la pêche au sein de l'Union européenne décide alors du niveau du TAC, en tenant compte à la fois des avis scientifiques et du contexte économique et social.

Cette procédure montre bien l'importance du diagnostic scientifique relatif à l'état de la ressource halieutique. Votre rapporteur estime indispensable d'associer les professionnels de la pêche à cette évaluation, afin que celle-ci intègre leur expérience de terrain et ne conduise pas à des décisions qui, par leur caractère trop radical, mettraient en danger l'avenir de la « filière pêche ».

L'essentiel des scientifiques français participant aux travaux du CIEM en matière d'évaluation des ressources halieutiques sont des chercheurs de l'Institut de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER). Les avis du CIEM et des principales organisations régionales de pêche pour l'année 2004 n'étant pas encore disponibles, seuls peuvent être présentés les diagnostics réalisés à la fin de l'année 2002.

Les avis scientifiques tendent à montrer, depuis plusieurs années, la fragilité biologique de nombreux stocks de poissons, dans les eaux communautaires de la façade Ouest de l'Union européenne ainsi que dans la Mer du Nord. Cette fragilité, variable selon les espèces, doit conduire dans certains cas à diminuer l'effort de pêche pour favoriser une reconstitution des stocks, favorable à une exploitation durable des ressources halieutiques. Dans d'autres cas, en revanche, il n'est pas nécessaire d'imposer aux pêcheurs des restrictions ou précautions particulières.

Une classification simple de l'état des stocks, faisant l'objet d'un consensus scientifique, permet de donner une vision synthétique du diagnostic provisoire établi l'an dernier. Cette classification, résumée dans le tableau ci-après, conduit à distinguer quatre catégories en fonction du degré de fragilité de la ressource :

- catégorie 1 : stocks dont le niveau de biomasse est gravement insuffisant (niveau historiquement bas) et pourrait conduire à un effondrement total du stock du fait de la diminution du « recrutement », qui est le nombre de jeunes poissons venant abonder le stock chaque année ;

- catégorie 2 : stocks dont le niveau de biomasse est jugé insuffisant et impose des précautions, malgré l'existence d'incertitudes ;

- catégorie 3 : stocks dont la pérennité n'est pas menacée à court ou moyen terme, mais dont le niveau d'exploitation est excessif (une exploitation plus limitée permettrait d'augmenter les captures sur le long terme et d'accroître ainsi le profit des pêcheurs) ;

- catégorie 4 : stocks dont la situation est jugée satisfaisante (biomasse de reproducteurs suffisamment élevée et niveau d'exploitation raisonnable, pouvant être maintenu sur le long terme).

Zone géographique

Catégorie 1

Catégorie 2

Catégorie 3

Catégorie 4

Etat mal connu

Ouest Ecosse

Cabillaud

Merlan

Merlu (Ouest Ecosse, Mer Celtique et Golfe de Gascogne)

 

Eglefin

Merlan bleu

   

Mer du Nord

Cabillaud

Plie

Sole

Merlan

Eglefin

Lieu noir

Hareng

 

Manche

Cabillaud Manche Est (cf. Mer du Nord)

Sole Manche Ouest

Plie Manche Est

Plie Manche Ouest

Cabillaud Manche

Ouest (cf. Mer Celtique)

Maquereau (Atlantique Nord-Est)

Sole Manche Est

Merlan Manche Ouest (cf. Mer Celtique)

 

Mer d'Irlande

Cabillaud

     

Eglefin

Merlan

Mer Celtique

Golf de Gascogne

Merlu (Ouest Ecosse, Mer Celtique et Golfe de Gascogne)

Sole du Golfe de Gascogne

Baudroie commune de Mer Celtique et du Golfe de Gascogne (baudroie blanche)

Cabillaud de Mer Celtique

Sardine de Mer Celtique et du Golfe de Gascogne

Maquereau (Atlantique Nord-Est)

Merlan bleu

Merlan de Mer Celtique

Baudroie noire de Mer Celtique et du Golfe de Gascogne

Langoustine de Mer Celtique

Langoustine d'Ouest Irlande

Chinchard

Anchois

 
   

Langoustine du Golfe de Gascogne

   

Espèces profondes (Ouest des îles britanniques)

 

Lingue bleue

Empereur d'Ouest Ecosse

   

Sabre noir

Grenadier

Requins profonds

Empereur dans les autres zones

Thonidés de l'Atlantique et de la Méditerranée

 

Thon rouge de l'Atlantique et de la Méditerranée

Thon obèse (patudo) de l'Atlantique tropical

 

Germon de l'Atlantique nord

Albacore de l'Atlantique tropical

Listao de l'Atlantique tropical

 

Thonidés de l'Océan indien

 

Thon obèse (patudo) de l'océan Indien

 

Albacore de l'océan Indien

Listao de l'océan Indien

Espadon de l'océan Indien

Terres australes et antarctiques françaises

 

Légine

     

Il convient de préciser que la qualité du diagnostic précédemment exposé varie d'un stock à l'autre. Ainsi, le diagnostic concernant le cabillaud de la Mer du Nord est certainement très sûr, alors que celui concernant le stock de sole de l'ouest de la Manche semble aujourd'hui encore très incertain. Par ailleurs, les informations relatives à la situation biologique du thon rouge et des espèces profondes sont encore très parcellaires.

D'une manière générale, votre rapporteur constate que les ressources exploitées par les flottilles françaises se retrouvent de façon équilibrée dans les différentes catégories, ce qui conduit à nuancer, selon les espèces, l'idée d'une situation inquiétante de la ressource halieutique.

·

· ·

L'ensemble de ces éléments positifs amène votre rapporteur à inviter la représentation nationale à adopter le budget de la pêche et des cultures marines pour 2004.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 16 octobre 2003, la commission a entendu M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, sur les crédits de son département pour 2004.

Le ministre a d'abord évoqué la modernisation de la flotte de pêche française et le soutien aux entreprises de pêche. Il a rappelé que les négociations ayant abouti, en décembre 2002 à Bruxelles, à une réforme de la politique commune de la pêche, permettaient de maintenir provisoirement les aides à la modernisation de la flotte de pêche.

Il a donc annoncé que le ministère en charge de la pêche mènerait une action intensive en faveur de cet effort de modernisation, s'agissant tant des aides aux sorties de flottes que des crédits d'investissement destinés aux opérations de modernisation. Il a précisé que les crédits du ministère seraient, à cet effet, abondés dans la loi de finances rectificative pour 2003 à hauteur de 5,6 millions d'euros en crédits de paiement et 11,2 millions d'euros en autorisations de programme.

Il a enfin ajouté que l'enveloppe destinée aux prêts bonifiés à la pêche s'élevait désormais à 10,5 millions d'euros.

Puis, M. Aimé Kerguéris, rapporteur pour avis des crédits de la pêche, a rappelé que, tout en bénéficiant d'atouts géographiques considérables pour faire prospérer les activités de pêche et d'aquaculture sur ses côtes, la France était pourtant confrontée à la persistance d'un important déficit commercial dans ce secteur. Il a considéré que la politique de la pêche devait s'assigner comme objectif le comblement de ce déficit et le maintien de la puissance de la flotte de pêche française.

Il a noté que le projet de loi de finances pour 2004 s'inscrivait précisément dans cette démarche, les crédits de paiement du ministère consacrés à la pêche et à l'aquaculture bénéficiant d'une progression de 23,5 % par rapport à l'année précédente et atteignant 34,3 millions d'euros en 2004, tandis que les autorisations de programme fléchissent légèrement.

Il a salué la mise en place de plusieurs mesures favorables à l'investissement des jeunes pêcheurs et a félicité le ministre pour son habilité lors des difficiles négociations relatives à la réforme de la politique commune de la pêche. Il a rappelé à ce propos que les propositions initiales présentées par le commissaire européen chargé de la pêche, M. Franz Fischler, étaient catastrophiques, dangereuses et inacceptables en l'état pour la France. Il a souligné que la France était alors placée dans une position délicate, dans la mesure où elle n'avait pas respecté ses engagements de réduction de la flotte.

Il a estimé que la possibilité, offerte à la France, de maintenir ses aides à la construction de bateaux neufs jusqu'au 31 décembre 2004 devrait lui permettre de poursuivre la modernisation de sa flotte de pêche, de façon à améliorer les conditions de sécurité des marins et à rendre espoir aux jeunes pêcheurs à la recherche d'outils de travail performants.

Il a ajouté qu'il était impossible d'assurer la pérennité des activités de pêche sans disposer d'une bonne connaissance de l'état de la ressource. Il a jugé que l'effort effectué pour contrôler la pêche était significatif mais a souligné la persistance de controverses entre les professionnels et les scientifiques s'agissant de l'état de la ressource, en dépit de progrès indéniables. Il a précisé que la classification des stocks de pêche en quatre catégories donnait une première idée de l'état de la biomasse des différentes espèces. Il a souhaité savoir si le Gouvernement envisageait, afin d'éviter l'effondrement total de certains stocks, d'instituer un repos biologique en faveur de certaines espèces, et, dans l'affirmative, quelles formes d'indemnisation des pêcheurs étaient envisagées.

S'agissant des dispositions fiscales, il a signalé que deux mesures étaient particulièrement attendues par les professionnels : le maintien du système des Sofipêches d'une part, la création d'une dotation pour aléas, comme il en existe en agriculture, d'autre part. Il a indiqué qu'une augmentation de 0,15 euro du prix du litre de gazole entraînait en moyenne, mécaniquement, une diminution de 4 à 16 % du revenu partagé entre les pêcheurs, et a rappelé que la hausse des cours des carburants en 2000 avait causé de grandes difficultés aux entreprises de pêche. Il a donc souhaité savoir s'il était possible de convaincre le ministère des finances de la nécessité de mettre en place cette dotation pour aléas, essentielle pour l'activité des pêcheurs.

Il a enfin signalé que la réduction de la dotation budgétaire de l'Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) risquait d'être mal comprise par les professionnels, au moment où est recherchée une augmentation de la valeur ajoutée dans la commercialisation des produits de la mer.

M. Jacques Le Guen a souhaité savoir si des mesures de soutien à la pisciculture seraient mises au point après la sécheresse estivale, cette dernière ayant entamé le potentiel de production pour les prochaines années.

M. Edouard Leveau s'est inquiété des nouvelles règles de calcul concernant le déchirage et a souhaité savoir si la période retenue serait celle de l'intention de déchirer ou du déchirage réel. Il a ajouté que la réduction programmée de la flotte, en conduisant à réduire la largeur des navires, allait à l'encontre de la sécurité des marins, et que les conditions de calcul de la puissance de la flotte, par référence aux moteurs des navires, étaient défavorables à la France.

En réponse aux différents intervenants, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a apporté les précisions suivantes :

- un travail tripartite, mené conjointement par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), les professionnels de la mer et le ministère chargé de la pêche, doit permettre de dépasser les débats stériles concernant l'appréciation de l'état de la ressource halieutique. Dans ce domaine, il convient d'éviter l'angélisme mais aussi le catastrophisme, comme cela avait été le cas lorsque la disparition de l'anchois du Golfe de Gascogne avait été prédite - alors que l'on constate aujourd'hui une tendance inverse. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit des dotations en faveur de la modernisation de la flotte de navires à la pêche, ainsi que des crédits pour permettre aux marins-pêcheurs de s'équiper en vêtements de sécurité ;

- l'analyse de M. Aimé Kerguéris concernant les Sofipêches est tout à fait pertinente. Il sera nécessaire, dans ce domaine, de convaincre le ministère de l'économie et des finances ;

- le gazole est aujourd'hui détaxé pour les marins-pêcheurs. Toute augmentation, même légère, du prix de ce carburant aurait un impact économique significatif pour le monde de la pêche. C'est pourquoi une réflexion est aujourd'hui conduite au sein du Comité national des pêches, récemment renouvelé, sur la possibilité de mettre en place une « déduction pour aléa ». Notons que jusqu'en 2000, il était possible à l'Etat d'aider les marins-pêcheurs en cas de fluctuation des prix du carburant ; cette pratique a néanmoins été condamnée par la Commission européenne. Il est donc aujourd'hui nécessaire de trouver une autre solution ;

- l'Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture (OFIMER) est aujourd'hui confronté au même problème que l'Agence de développement agricole et rural (ADAR) concernant son financement. Il est en effet financé par une taxe parafiscale, qui doit disparaître en vertu de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. A compter de 2004, l'OFIMER devrait bénéficier d'une taxe fiscale affectée, dont l'assiette et le taux seront identiques à ceux de l'ancienne taxe parafiscale. Les moyens de l'OFIMER seront donc maintenus, ce qui lui permettra de mener sa mission essentielle de promotion des produits de la mer ;

- les chiffres relatifs aux déchirages secs ont fait l'objet d'annonces contradictoires, mais une clarification devrait intervenir dans les prochains jours. Les questions liées à la sécurité méritent une approche globale prenant en considération les effets des mesures communautaires dans ce domaine. Il y a effectivement un problème s'agissant de la puissance hélice-moteur, une harmonisation rapide étant souhaitable en la matière.

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Puis la Commission a examiné les crédits de la pêche pour 2004.

Conformément aux conclusions de M. Aimé Kergueris, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'agriculture et de la pêche : pêche pour 2004.

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N°1112 tome III : Avis de M. Aimé Kergueris sur le projet de loi de finances pour 2004 - Pêche


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