Document mis en
distribution le
20 octobre 2003
N° 1112
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2004 (n° 1093),
TOME II
AGRICULTURE ET PÊCHE
AGRICULTURE
PAR M. ANTOINE HERTH,
Député.
--
Voir le numéro : 1110 (annexe 8)
Agriculture - Pêche.
INTRODUCTION 5
I.- L'IMPORTANCE DES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS À L'AGRICULTURE 7
A.- LA PRÉSERVATION DU BUDGET DU MINISTÈRE 7
1. La maîtrise des dépenses de fonctionnement 7
2. Le soutien à l'enseignement agricole et à la recherche 9
a) Le renforcement de la formation des agriculteurs 9
b) Le maintien de l'effort public en faveur de la recherche 10
3. La poursuite des actions prioritaires 12
a) Les incitations à l'installation des jeunes 12
b) La régulation des marchés et la valorisation des produits 13
c) Le développement des soutiens à l'agriculture extensive 13
d) Le maintien de la vigilance sanitaire 15
e) La poursuite des efforts pour gérer durablement une forêt fragilisée 18
4. Les changements de périmètre 19
a) Le service public de l'équarrissage 19
b) L'agence pour le développement agricole et rural (ADAR) 20
B.- LES AUTRES CONTRIBUTIONS AU DÉVELOPPEMENT AGRICOLE 20
II.- DES PRATIQUES AGRICOLES EN MUTATION 23
A.- LA PRISE EN COMPTE CROISSANTE DES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX 23
1. La mise en place des contrats d'agriculture durable (CAD) 23
2. Le nouveau programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) 26
3. Le développement de l'agriculture biologique 28
4. L'émergence d'une « agriculture raisonnée » 30
B.- LA SOLIDARITÉ NATIONALE FACE AUX CONSÉQUENCES AGRICOLES DE LA SÉCHERESSE 31
III.- L'IMPACT DES NÉGOCIATIONS INTERNATIONALES SUR L'AVENIR DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE 35
A.- UNE RÉFORME DE LA PAC CONFORME AUX ASPIRATIONS FRANÇAISES 35
1. Des aides partiellement « découplées » de la production 35
2. Le renforcement des soutiens au développement rural 37
B.- L'AJOURNEMENT DES DISCUSSIONS À L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE 38
EXAMEN EN COMMISSION 43
MESDAMES, MESSIEURS,
La place originale de l'agriculture dans le monde rural et la société française justifie une attention particulière. Bien qu'elle ne représente plus aujourd'hui qu'environ 2 % du produit intérieur brut et n'occupe plus que 4 % de la population active, l'agriculture demeure une activité vitale pour notre pays. Parce qu'elle détermine l'alimentation de nos concitoyens et contribue au dynamisme économique des territoires fragiles, elle doit être encouragée. Dans un contexte international marqué par une importante réforme de la politique agricole commune (PAC) et des négociations commerciales difficiles, il est de la responsabilité des pouvoirs publics de favoriser l'adaptation des exploitations agricoles.
L'engagement du Gouvernement en faveur du développement des territoires ruraux a pris la forme d'un projet de loi, présenté le 3 septembre dernier en Conseil des ministres et bientôt soumis à la représentation nationale. Même s'il s'est accompagné de nombreux textes réglementaires visant à simplifier les démarches des agriculteurs et à les encourager, cet important signal politique ne peut combler à lui seul les attentes des professionnels, qui sont aussi financières. Aussi l'examen du budget de l'agriculture pour 2004 requiert-il toute la vigilance des parlementaires.
L'Etat consacrera en 2004 près de 5 milliards d'euros à l'agriculture, une somme qui, à périmètre constant, est presque identique à celle du budget précédent. Cette stabilité, dans un contexte budgétaire particulièrement tendu, doit être saluée et constitue en elle-même la traduction d'une mobilisation nationale en faveur du monde agricole. La maîtrise des dépenses de fonctionnement et la disparition progressive des crises sanitaires permettent de dégager des marges de man_uvre en faveur des espaces défavorisés et de l'installation des jeunes. Dans le même temps, le budget communautaire, qui représente environ 10 milliards d'euros pour la France, contribue toujours de façon décisive à la promotion des activités agricoles.
Ces efforts financiers permettront aux pouvoirs publics d'accompagner la transformation progressive des pratiques agricoles, inéluctable mais coûteuse. Ainsi, l'élaboration des contrats d'agriculture durable (CAD), qui remplacent les anciens contrats territoriaux d'exploitation (CTE), la mise en place du nouveau plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) et le développement de filières d'agriculture plus écologiques révèlent une prise en compte croissante des enjeux environnementaux. Par ailleurs, les conséquences agricoles de la sécheresse estivale sont surmontées grâce à l'implication spontanée des professionnels et aux soutiens accordés par l'Etat.
Enfin, l'examen des crédits de l'agriculture doit être l'occasion de revenir sur l'actualité internationale de l'agriculture, particulièrement chargée au cours de l'année écoulée. En effet, l'avenir de l'agriculture française est largement déterminé, à long terme, par les négociations communautaires et internationales. Il apparaît que la réforme de la PAC, assise sur un « découplage » partiel des aides et un meilleur soutien au développement rural, prend correctement en compte les besoins de l'agriculture française. En revanche, votre rapporteur tient à souligner les risques que l'échec des négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) fait peser sur le modèle agricole européen, qui doit trouver une stratégie adaptée face au manque de régulation de la concurrence internationale.
Dans un contexte international difficile et malgré une forte contrainte budgétaire, le projet de loi de finances pour 2004 préserve l'avenir de l'agriculture française en assurant la stabilité globale des crédits, en finançant les priorités du secteur et en favorisant l'adaptation des pratiques agricoles aux nouvelles exigences de la société. Votre rapporteur invite donc l'Assemblée nationale à l'approuver sans réserve.
I.- L'IMPORTANCE DES MOYENS BUDGÉTAIRES CONSACRÉS À L'AGRICULTURE
L'ampleur de l'effort financier de la puissance publique en faveur de l'agriculture est à la mesure des efforts demandés aux professionnels et des difficultés auxquelles ils sont confrontés.
Les crédits directement gérés par le ministère de l'agriculture, de la pêche, de l'alimentation et des affaires rurales connaissent une apparente stabilité à environ 5 milliards d'euros. D'autre part, l'ensemble des contributions au développement agricole, qu'elles soient communautaires, fiscales, sociales ou territoriales, évoluent favorablement et représentent environ 28 milliards d'euros en 2004.
Le budget attribué au ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales par le projet de loi de finances pour 2004 représente 4,98 milliards d'euros, contre 5,18 milliards d'euros en 2003, ce qui se traduit d'un point de vue comptable par une baisse de 3,9 % des crédits. Toutefois, si l'on tient compte du changement de périmètre résultant de la création d'une taxe sur l'équarrissage, l'effort national en faveur de l'agriculture atteindra 5,14 milliards d'euros en 2004 et ne connaîtra donc qu'une réduction marginale de 0,9 %.
Les dépenses ordinaires inscrites au budget de l'agriculture pour 2004 s'élèvent à 4,77 milliards d'euros, en baisse de 3,7 % par rapport à l'année précédente. Cette diminution reflète l'implication de ce département ministériel dans l'effort général de maîtrise de la dépense publique, qui conduit notamment à ne plus remplacer les fonctionnaires partant en retraite que lorsque l'utilité de leur emploi est avérée.
Ainsi, les effectifs budgétaires du ministère passent de 31 098 à 30 800, en baisse de moins de 1 %. Cette légère réduction des effectifs pourra être obtenue grâce au non-remplacement de 323 emplois sur les 767 emplois libérés par les départs en retraite prévus en 2004. Votre rapporteur note que les suppressions correspondent à l'objectif budgétaire général annoncé par le Gouvernement, imposant le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique. Les suppressions d'emplois concernent essentiellement les services déconcentrés, où elles atteignent le nombre de 161, ainsi que l'enseignement agricole (139 emplois), l'administration centrale n'étant touchée que par 23 suppressions d'emplois, ce qui est conforme à la répartition des effectifs au sein du ministère - l'administration centrale emploie sept fois moins de personnels que les services déconcentrés.
Malgré cette rigueur retrouvée, les effectifs restent nettement supérieurs à leur niveau de 1990 (29 537 emplois). Il convient de rappeler qu'une importante évolution dans la répartition des effectifs a eu lieu ces quinze dernières années au sein du ministère : alors que, depuis 1991, l'administration centrale a perdu 304 emplois, les services déconcentrés en ont gagné 642 et le secteur de l'enseignement et de la recherche 913. Cette réorganisation de la présence territoriale du ministère permet à ses agents d'être au plus proche du terrain et d'améliorer leur connaissance des difficultés rencontrées par les professionnels.
La maîtrise des dépenses de fonctionnement résulte également de mesures de simplification et d'allègement des structures du ministère, prises au cours de l'année écoulée. Ainsi, à compter du 13 mars 2003, deux directions qui partageaient la charge des politiques en faveur du monde agricole et rural (la direction de l'espace rural et de la forêt d'une part, la direction des exploitations, de la politique sociale et de l'emploi d'autre part) ont été fusionnées en une unique direction générale de la forêt et des affaires rurales.
Ce regroupement contribuera à accroître la lisibilité de l'action du ministère en faveur du monde rural, et permettra de disposer d'une structure unique en charge de la programmation, de la mise en _uvre, du suivi et de l'évaluation de l'ensemble du règlement communautaire de développement rural (RDR), des programmes d'initiative communautaire (PIC) et des contrats de plan Etat-région (CPER). Sur le plan pratique, la fusion permet de rationaliser les structures administratives internes en mutualisant les moyens et en créant de nouvelles synergies : alors que le périmètre de la réforme incluait 2 directions, 8 sous-directions et 27 bureaux, la nouvelle direction ne comporte plus que 6 sous-directions et 21 bureaux.
Par ailleurs, le budget de l'agriculture pour 2004 poursuit l'effort de résorption de l'emploi précaire au sein du ministère. Alors que 788 emplois budgétaires avaient été inscrits dans les lois de finances initiales pour 2001 et 2002 au titre de cette action, près de 3 000 agents auront été déprécarisés à la fin de l'année 2003 si l'on tient compte des réussites aux concours internes.
Certes, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit que le nombre des fonctionnaires titulaires diminue de 256 et celui des contractuels de 42 par rapport à l'année précédente. Toutefois, le recours aux contractuels sera réduit en administration centrale, puisque le nombre de titulaires y passera de 1 864 à 1 876 (le nombre de contractuels passant quant à lui de 146 à 118). Certains corps bénéficient d'un renforcement substantiel de leurs effectifs de fonctionnaires titulaires en administration centrale, puisque 15 emplois d'attachés d'administration centrale et 7 emplois d'ingénieurs des travaux agricoles sont créés - ce qui représente une hausse des effectifs qui s'élève respectivement à presque 10 et 20 %.
Enfin, les rémunérations des agents publics du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ne pâtissent pas injustement de la rigueur budgétaire. Les crédits de rémunération y augmentent en effet de 2,8 % et atteignent 1,62 milliard d'euros, ce qui semble assez favorable au pouvoir d'achat des fonctionnaires compte tenu de la faible inflation actuelle. Cette hausse porte tant sur les charges sociales, chapitre évaluatif structurellement sous-doté et dont la dotation progresse de 13,9 %, que sur les rémunérations principales, qui augmentent de 1,4 %, ou les crédits indemnitaires, qui s'accroissent de 2,2 %.
Votre rapporteur rappelle que l'analyse des documents budgétaires du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales doit cette année intégrer une modification de présentation, qui résulte de l'expérimentation de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) n° 2001-692 du 1er août 2001 en matière d'enseignement agricole. En effet les crédits de rémunération et de fonctionnement des établissements publics et privés ont été regroupés sur un seul chapitre du titre III (moyens des services), pour plus de clarté. Ce changement, qui facilitera au cours des prochaines années la lecture des documents budgétaires, complique de nombreuses comparaisons entre 2003 et 2004 pour les crédits du titre III et du titre IV (interventions publiques).
Malgré les modifications de présentation budgétaire précédemment mentionnées, l'analyse de l'agrégat consacré à la formation, à la recherche et au développement agricole fait apparaître une stabilité globale des crédits accordés au titre du ministère de l'agriculture. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit d'y consacrer 1,23 milliard d'euros en crédits de paiement, ce qui représente une baisse insignifiante de 0,8 % par rapport au budget précédent.
Si les dépenses ordinaires diminuent de 1,1 % pour atteindre 1,21 milliard d'euros, en revanche les dépenses en capital, d'un montant beaucoup plus modeste de 21,7 millions d'euros, enregistrent une forte progression de 12,4 % en crédits de paiement, indiquant une priorité accordée au long terme dans ce budget.
Les crédits consacrés à la formation des agriculteurs, dont l'importance est déterminante pour l'avenir de la profession, sont pour l'essentiel reconduits en 2004 sur les bases de 2003. Il convient toutefois de remarquer une légère progression des crédits de l'enseignement technique et de l'aide sociale aux élèves.
Les effectifs de l'enseignement technique représentaient pour l'année scolaire 2002-2003 plus de 172 000 élèves, un chiffre en baisse pour la troisième année consécutive (réduction de 0,5 % par rapport à l'année scolaire 2001-2002), essentiellement en raison de l'évolution démographique.
Le budget de l'enseignement technique secondaire, qui préserve l'emploi en milieu rural, totalise près de 80 % des crédits de l'enseignement agricole. Ce budget est constitué essentiellement des dépenses de personnel de l'enseignement technique public, où 15 060 agents encadrent près de 68 000 élèves (effectifs en baisse de 1,8 % par rapport à l'année précédente), et des rémunérations et subventions de fonctionnement des établissements techniques privés, qui perçoivent 455,4 millions d'euros de financements et scolarisent plus de 104 000 élèves (effectifs en hausse de 0,3 % par rapport à l'année précédente). Votre rapporteur se félicite de la création annoncée en 2004 de 399 nouveaux postes d'assistants d'éducation pour remplacer les maîtres d'internat, surveillants d'externat et emplois jeunes. Par ailleurs, les sommes consacrées à l'aide sociale aux élèves et aux bourses à l'étranger restent élevées et atteignent 77,7 millions d'euros.
Le budget de l'enseignement supérieur représente quant à lui 14 % des crédits, répartis entre 26 établissements d'enseignement supérieur (écoles supérieures d'agronomie, écoles vétérinaires, école nationale du génie rural, des eaux et forêts, parmi lesquelles 7 établissements privés sous contrat avec l'Etat) qui forment 12 300 cadres des professions agricoles. Les crédits de personnel et de fonctionnement des établissements publics atteignent à eux seuls 138 millions d'euros et ceux attribués aux établissements privés 18,6 millions d'euros. Enfin, l'aide sociale aux étudiants s'élève à 6,3 millions d'euros.
S'agissant des crédits dédiés à l'apprentissage, à la formation professionnelle continue et à la mise en _uvre des autres missions de l'enseignement agricole, le montant relativement modeste des crédits nationaux, qui atteignent 22 millions d'euros, ne doit pas faire oublier l'importance des versements européens au titre du Fonds social européen (FSE) et du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA).
Au niveau national, certaines actions sont destinées à favoriser l'installation de jeunes agriculteurs qualifiés (stages de 40 heures pour 7 300 personnes, stages de six mois pour 5 100 personnes, et programme de développement de l'individualisation dans les formations) et recevront en 2004 une dotation budgétaire de 12,03 millions d'euros, contre 13,03 millions d'euros en 2003. D'autres visent à développer l'apprentissage, auquel sera consacré en 2004 un budget de 2,62 millions d'euros, comme l'année précédente. Par ailleurs, les formations à distances doivent être développées, en particulier grâce à l'utilisation de nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Enfin, les crédits alloués à la formation et à l'information des cadres syndicaux et professionnels de l'agriculture enregistreront en 2004 une hausse sensible de 17,7 %, passant de 5,64 à 6,64 millions d'euros. Votre rapporteur salue cette évolution, rendue indispensable par la complexité de la réglementation comme des techniques et, partant, l'importance croissante de la fonction de conseil en agriculture. Il ne fait guère de doute qu'une réflexion approfondie et une meilleure maîtrise des pratiques agricoles portent en germe d'importants gains de productivité pour l'agriculture française.
Les crédits publics de recherche réservés à l'agriculture, en hausse de 2 %, atteindront 794,1 millions d'euros en 2004, l'essentiel de ce budget provenant des crédits du ministère en charge de la recherche. Dans cet ensemble, les sommes consacrées à la recherche par le ministère en charge de l'agriculture, si l'on excepte le budget civil de recherche et de développement technologique (BCRD), atteindront 35,7 millions d'euros en 2004, en diminution de 3,3 % par rapport à 2003.
Les crédits consacrés aux dépenses ordinaires des principaux organismes de recherche sont orientés à la hausse pour 2004 et se répartissent de la manière suivante :
* L'Institut national de la recherche agronomique (INRA) recevra 476,7 millions d'euros pour les dépenses ordinaires, qui sont en hausse de 1,05 %, et 75,1 millions d'euros pour les dépenses en capital, qui restent stables.
L'INRA orientera ses recherches en 2004 dans cinq directions principales : les sciences de l'environnement (gestion et protection des milieux naturels, valorisation des ressources biologiques, étude des systèmes agraires et forestiers, appui à l'évaluation des politiques publiques), les biotechnologies (étude des gènes et des protéines en particulier), la bioinformatique, l'alimentation humaine et la sécurité sanitaire des aliments, et enfin l'implication renforcée des sciences sociales.
* Le Centre national du machinisme agricole du génie rural, des eaux et des forêts (CEMAGREF) recevra 41,4 millions d'euros pour les dépenses ordinaires, en hausse de 1,7 %, et 6,2 millions d'euros pour les dépenses en capital, en baisse de 0,8 %.
Les priorités du CEMAGREF pour 2004 seront l'étude du fonctionnement des hydrosystèmes de surface (ressources, milieux, usages, gestion de l'eau) ainsi que les recherches relatives aux technologies et services disponibles pour l'eau et les déchets.
* L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) recevra 35,1 millions d'euros (hausse de 12,4 %) pour les dépenses ordinaires et 1,5 million d'euros pour les dépenses en capital (équipement des laboratoires et gros investissements immobiliers). A ces crédits, il convient d'ajouter, au titre du BCRD, 6,3 millions d'euros de dépenses ordinaires et 2,7 millions d'euros de dépenses en capital (voir ci-après).
Créée par la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et au contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, l'AFSSA joue un rôle de veille et d'alerte en matière de sécurité sanitaire et alimentaire, en émettant des avis, en formulant des recommandations et en accomplissant des recherches. Elle ne dispose pas d'un pouvoir de contrôle direct, sauf dans le domaine du médicament vétérinaire, mais fournit au Gouvernement l'expertise et l'appui scientifique et technique nécessaires pour évaluer correctement les risques sanitaires et nutritionnels, de façon à éclairer ses décisions.
Le nombre global d'emplois sera légèrement réduit, passant de 11 633 en 2003 à 11 532 en 2004. En effet, la hausse de 1,2 % des effectifs de l'AFSSA, portés à 681, ne compensera pas entièrement la réduction des effectifs de l'INRA et du CEMAGREF, qui emploieront respectivement 8 580 et 896 personnes en 2004.
Par ailleurs, il convient d'ajouter aux crédits précédemment mentionnés ceux du BCRD, qui contribuent, sur le budget du ministère en charge de l'agriculture, à favoriser le développement de la recherche, en matière agronomique, sanitaire et agro-alimentaire notamment. L'Etat engagera à ce titre en 2004 24,6 millions d'euros en dépenses ordinaires et crédits de paiement, afin de poursuivre les actions engagées antérieurement qui ont démontré leur efficacité.
Le Gouvernement, constatant qu'une forte proportion d'agriculteurs proches de la retraite ne disposent pas de successeurs au sein de leur famille, souhaite aider à s'installer un nombre croissant de jeunes, qui ne sont pas forcément issus du monde rural ou agricole mais souhaitent réellement diriger des exploitations. En effet, si de telles reprises peuvent être facilitées par des conditions de transmission plus favorables, le nombre d'exploitations viables perdues fautes de successeur sera certainement réduit.
La forte hausse des crédits consacrés à l'installation des jeunes agriculteurs témoigne d'une réelle mobilisation du Gouvernement en faveur de cette action, qui permet de garantir l'avenir de l'agriculture française et de limiter les risques de désertification des territoires ruraux. Ainsi, ce budget enregistrera en 2004 une hausse de 9,8 % par rapport à l'année précédente et atteindra ainsi 74,7 millions d'euros.
Ces crédits alimenteront notamment, à hauteur de 10 millions d'euros, le fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA), créé en 2003 pour soutenir des opérations de terrain qui n'étaient plus financées depuis 1999 (cessions d'exploitation hors cadre familial, location par des propriétaires fonciers de leurs terres à des jeunes en installation, animation et communication pour rapprocher les cédants potentiels des candidats à l'installation). Ils permettront également de verser en une seule fois la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), aide en capital destinée à répondre aux besoins de trésorerie des agriculteurs au cours de leur première année d'activité. Cette innovation attendue permettra d'améliorer fortement la situation financière des jeunes au moment de leur installation, cette dernière exigeant d'importants investissements de départ.
Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit de proroger l'abattement de 50 % sur le bénéfice réel imposable des jeunes agriculteurs au cours de leurs cinq premières années d'activité. Enfin, votre rapporteur remarque que le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, présenté le 3 septembre dernier en Conseil des ministres, prévoit de soustraire la DJA de l'assiette des cotisations sociales, afin d'alléger le poids des charges pesant sur des exploitations auxquelles il faut donner toutes leurs chances.
Ces mesures s'ajouteront aux nombreux avantages déjà accordés aux jeunes agriculteurs en matière fiscale et sociale (exonération partielle de cotisations sociales, réduction de la taxe départementale de publicité foncière sur l'acquisition d'immeubles ruraux, dégrèvement de 50 % de la taxe foncière sur les propriétés non bâties pour une durée de 5 ans), mais aussi en matière de taux bonifiés pour les investissements de modernisation, d'aides à l'investissement, ou d'accès prioritaire à la propriété foncière et aux droits à produire.
La régulation des marchés agricoles et la promotion de la production des agriculteurs, qui constituent l'un des principaux volets de la politique agricole commune, demeurent au c_ur des actions conduites par le ministère chargé de l'agriculture. Ces dernières consistent en effet à favoriser le développement économique des exploitations agricoles et des entreprises agro-alimentaires et à orienter la production vers une haute qualité, dans un contexte où une concurrence internationale accrue aggrave l'instabilité de filières déjà fragiles.
Le projet de loi de finances pour 2004 attribue 712,4 millions d'euros au budget des aides aux produits et à la régulation des produits, ce qui représente une diminution de 4,7 % par rapport à l'année précédente. Dans ce cadre budgétaire limité, la dotation des offices agricoles, qui avait chuté de 70 millions d'euros entre 2002 et 2003, est très largement préservée, puisque son montant en 2004, qui atteindra 386 millions d'euros, sera presque équivalent à celui de l'année précédente (395,2 millions d'euros). Il convient de rappeler que les offices sont des établissements publics associant étroitement les professionnels et intervenant sur les marchés de chaque secteur productif (céréales, viandes, fruits et légumes, vin ou lait par exemple), en assurant la promotion des produits et en facilitant leur commercialisation.
Le budget réservé aux industries agro-alimentaires et à la promotion de la qualité, après une forte baisse entre 2001 et 2002 (de 66 à 42 millions d'euros), poursuit son repli à un rythme moins soutenu et atteindra 37 millions d'euros en 2004.
Votre rapporteur constate une légère réduction de 1,4 % de la subvention de fonctionnement réservée à l'Institut national des appellations d'origine contrôlées (INAO), qui passera de 14,09 millions d'euros en 2003 à 13,89 millions d'euros en 2004. Il est pourtant essentiel pour la France de protéger et de valoriser ses productions agricoles spécifiques, face à des concurrents étrangers (Brésil, Argentine, Inde, Afrique du Sud) dont les coûts de production sont bien inférieurs.
L'effort pour améliorer la compétitivité des produits agricoles français et pour éviter les crises de surproduction tout en assurant un revenu équitable aux exploitants devra donc être poursuivi au cours des prochaines années, afin d'assurer durablement la viabilité économique du modèle agricole français, qui repose avant tout sur la qualité des produits.
La compensation des handicaps naturels occupera en 2004 une place de premier rang dans la politique menée par le Gouvernement en faveur des territoires ruraux les plus fragiles. Si la responsabilité première de l'aménagement du territoire ne lui incombe pas, le ministère de l'agriculture dispose néanmoins d'outils spécifiques profitant essentiellement aux régions les moins favorisées.
Les crédits alloués à l'amélioration du cadre de vie et à l'aménagement de l'espace rural, qui représentaient 224,8 millions d'euros en 2003, augmenteront de 10,5 % pour atteindre 248,4 millions d'euros en 2004. Cet important signal politique adressé au monde rural passe bien sûr, en premier lieu, par une hausse des crédits d'interventions spéciales dans les zones agricoles défavorisées - les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) -, qui passeront de 204 millions d'euros en 2003 à 230 millions d'euros en 2004, soit une hausse de 12,7 %. Cette hausse permettra de revaloriser de 5 % le montant des primes correspondant aux 25 premiers hectares de l'exploitant et d'envisager une meilleure prise en compte de la pluriactivité des agriculteurs. En outre, ces aides nationales sont complétées par des crédits communautaires attribués à la France au titre du FEOGA-Garantie, qui ont représenté 231 millions d'euros en 2003.
Il convient de rappeler que le montant des ICHN versées par l'Etat est fonction de la surface fourragère de l'exploitant de zone défavorisée qui respecte les bonnes pratiques agricoles habituelles (221 euros par hectare en zone de haute montagne, 136 euros par hectare en zone de montagne, 89 euros par hectare en zone de piémont et 49 euros par hectare en zone défavorisée simple). Le nombre de bénéficiaires des ICHN, qui était de 112 000 en 2003, devrait poursuivre sa légère diminution du fait du déclin démographique des agriculteurs français.
Par ailleurs, le montant des interventions en faveur de l'élevage et de l'utilisation du cheval s'accroîtra légèrement, atteignant 4,3 millions d'euros en 2004, contre 4,26 millions d'euros en 2003.
L'effort pour encourager l'agriculture extensive, permettant à la fois d'assurer une bonne occupation du territoire et de mieux respecter l'environnement, s'inscrit dans une démarche similaire en faveur du monde rural. Ainsi, l'Etat apportera en 2004 un soutien de 165 millions d'euros à la prime au maintien des troupeaux de vaches allaitantes (contre 178 millions d'euros en 2003), cofinancée par l'Union européenne. Cette aide permet de compenser les baisses de prix décidées dans le cadre de la politique agricole commune, tout en favorisant l'élevage extensif dans des régions défavorisées, notamment en zones montagneuses.
Surtout, le budget des aides accordées aux agriculteurs au titre des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et des contrats d'agriculture durable (CAD) passe de 200 millions d'euros en 2003 à 254,7 millions d'euros en 2004. Cette hausse spectaculaire de 27,4 %, se double d'aménagements normatifs facilitant le recours aux mesures agri-environnementales (MAE), dont le budget sera stable à 133 millions d'euros (voir II A 1).
Par ailleurs, le montant de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE), qui va succéder cet automne à la prime au maintien des systèmes d'élevage extensifs (PMSEE), dite « prime à l'herbe », sera accru de 70 % en 2004. Atteignant environ 228 millions d'euros (contre 134 millions d'euros en 2003), il dépassera nettement son niveau de 2002 (164 millions d'euros). La France a en effet obtenu, grâce à certains aménagements techniques portant sur les conditions d'attribution (engagement à la parcelle, obligation d'un suivi à la parcelle, définition plus précise des conditions d'entretien par un arrêté préfectoral spécifique), la relance de ce dispositif critiqué par la Commission européenne. Cette prime à l'élevage extensif, cofinancée par l'Union européenne au titre du développement rural, a bénéficié en 2001 à 74 000 éleveurs, qui devront à l'avenir opter non seulement pour un élevage extensif mais aussi pour un entretien des prairies favorable à l'environnement.
La réduction de 30,3 % des crédits consacrés à la sécurité et à la qualité sanitaire de l'alimentation, qui n'atteindront plus en 2004 que 470,6 millions d'euros, constitue l'une des baisses de crédits les plus spectaculaires du budget de l'agriculture pour 2004. Par ailleurs, le nombre d'emplois affectés à la surveillance de la santé animale et de la qualité des aliments passera de 4 330 à 4 280.
Cette réduction ne signifie évidemment pas un relâchement de la vigilance du ministère chargé de l'agriculture en matière sanitaire. Elle s'explique avant tout par le changement de périmètre dû à l'instauration d'une taxe sur l'équarrissage (voir I A 4). A périmètre constant, le total des sommes consacrées à la sécurité et à la qualité sanitaire de l'alimentation ainsi qu'à l'équarrissage et à l'élimination des déchets animaux n'enregistre qu'une réduction de 3 %, passant de 665,2 millions d'euros en 2003 à 645,2 millions d'euros en 2004.
La baisse précitée semble d'autant plus minime si l'on tient compte de la résorption progressive de l'épizootie de fièvre aphteuse et de la crise d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), maladie dite de la « vache folle ». Alors que cette crise avait fait chuter fortement la consommation de viande bovine et conduit à l'abattage de nombreux troupeaux en 2001, la filière bovine semble aujourd'hui se relever. Ainsi, au cours du premier semestre 2003, les exportations de viande bovine ont dépassé de 35 % celles de 2002, tout en demeurant inférieures de 15 % à celles de 2000 avant la crise. Par ailleurs, le prix moyen du b_uf enregistre fin août 2003 une hausse de 3,3 % par rapport à l'année précédente. En 2004, dans l'Union européenne, la production de b_uf pourrait même être inférieure à la consommation.
S'agissant des mesures sanitaires décidées pour faire face à la crise de l'ESB, votre rapporteur constate un retour progressif à une situation plus ordinaire. Ainsi, la suspension de l'utilisation des farines d'origine animale dans l'alimentation destinée au bétail, décidée le 14 novembre 2000, avait été suivie de l'instauration par l'Etat d'un dispositif d'aides financières dégressives aux équarisseurs pour la production et l'incinération de farines. Or, l'aide à la production et à l'incinération des farines animales cessera à la fin de l'année 2003, grâce au développement de la valorisation des sous-produits. De même, la mise en stockage public de ces farines sera supprimée le 31 décembre 2003 grâce à la mise en place par les cimentiers français d'une capacité d'incinération de 450 000 tonnes par an.
L'arrêt de ces efforts publics, devenus inutiles, permet bien entendu de réaliser de substantielles économies sur le budget de l'Etat, qui consacrera en 2004 82 millions d'euros au service public de l'équarrissage et à l'élimination des déchets et coproduits animaux non recyclables. Ajoutée aux 176 millions d'euros issus de la taxe d'équarrissage, cette somme porte à 258 millions d'euros les dépenses publiques d'équarrissage et d'élimination des déchets animaux en 2004, contre 280 millions d'euros en 2003, soit une diminution de 7,9 % à périmètre constant.
D'autres économies seront réalisées grâce à une réduction des dépenses d'indemnisation des éleveurs dont le troupeau est abattu. Cette diminution ne proviendra pas d'une moindre indemnisation pour chaque animal abattu mais d'une baisse du nombre d'animaux abattus. Ainsi, conformément au droit communautaire, la mesure d'abattage total des cheptels dans lequel un cas a été détecté a été modifiée au mois de novembre 2002, seuls les animaux appartenant à la cohorte de l'animal malade (c'est-à-dire nés un an avant ou un an après lui) étant désormais abattus. Les éleveurs concernés par cette mesure sont désormais indemnisés sur la base de la valeur de remplacement des animaux éliminés.
Alors que l'Etat avait supporté en 2002 des coûts de 122,5 millions d'euros (dont 65 millions d'euros au titre des seules mesures d'éradication et 57,5 millions d'euros au titre de la surveillance), l'arrêt de l'abattage total des troupeaux permettra d'abaisser ces dépenses à 90 millions d'euros en 2003 et 2004. L'Etat consacrera au total en 2004 162 millions d'euros au dépistage, au contrôle, à la lutte contre les épizooties, à l'indemnisation des éleveurs et aux actions de maîtrise phytosanitaire. Sur le terrain, les cas d'ESB restent fortement concentrés dans le Grand Ouest, (voir la carte ci-après).
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES CAS FRANÇAIS D'ESB EN 2003
Source : Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales
Les actions de surveillance financées par le ministère de l'agriculture reposent notamment sur l'identification des cheptels : la base nationale d'identification des bovins sera pleinement opérationnelle à la fin 2003, et sera ensuite étendue aux cheptels porcin et ovin.
Preuve supplémentaire du maintien de la vigilance sanitaire de l'Etat, le Gouvernement a mis en place en 2002 des mesures de lutte contre la tremblante, maladie qui touche les petits ruminants et pourrait éventuellement avoir des liens avec l'ESB. Ainsi, le coût des mesures de lutte contre la tremblante s'est élevé à environ 12 millions d'euros en 2002. Là encore, les économies proviendront uniquement, en 2003 et 2004, de l'amélioration de la situation sanitaire, puisque, à surveillance constante, seuls 53 troupeaux se sont avérés atteints par la tremblante à la date du 5 août 2003, contre 152 en 2002.
Le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales consacrera 342,9 millions d'euros à la gestion durable de la forêt en 2004, contre 396,1 millions d'euros en 2003. Cette baisse de 13,4 % des crédits s'explique essentiellement par la résorption progressive de la crise ouverte par les intempéries dramatiques de l'hiver 1999-2000. L'enveloppe budgétaire n'en demeure pas moins supérieure aux sommes accordées, après régulation budgétaire, au titre de l'année 2003, et assure la continuité des engagements de l'Etat.
Il convient de rappeler que la politique forestière se caractérise par une triple ambition : garantir durablement une gestion multifonctionnelle de la forêt, renforcer la compétitivité de la production forestière et satisfaire une demande sociale croissante.
Pour ce faire, le fonctionnement et la mise en _uvre des missions de l'Office national des forêts (ONF), établissement public industriel et commercial qui dispose de 12 634 agents, seront assurés conformément au contrat d'objectifs signé le 22 octobre 2001. Certes, les crédits d'intervention du fonds forestier national et de l'ONF passeront de 221,9 millions d'euros en 2003 à 196,4 millions d'euros en 2004, ce qui représente une baisse de 8,9 %. Toutefois, une dotation supplémentaire exceptionnelle de 25 millions d'euros en faveur de l'ONF permettra encore à l'Etat de compenser les pertes causées par la baisse des produits de vente de bois des forêts domaniales, intervenue suite aux tempêtes de décembre 1999.
Les crédits de fonctionnement accordés au titre des travaux d'entretien forestier passeront de 25,3 millions d'euros en 2003 à 22,8 millions d'euros en 2004. Par ailleurs, la création de 30 emplois supplémentaires en faveur des Centres régionaux de la propriété forestière (CRPF) permettra d'assurer une gestion durable des forêts privées, conformément aux engagements internationaux de la France.
S'agissant des crédits d'intervention, votre rapporteur observe que les dépenses en matière de défense des forêts contre les incendies seront consolidées, ce qui est d'autant plus nécessaire que les incendies estivaux, d'une ampleur inégalée depuis plusieurs décennies, ont endommagé ce patrimoine naturel. Ainsi, 55 000 hectares ont brûlé dans le sud de la France, contre 20 000 en moyenne les années passées. Il convient de rappeler que si la France avait déjà connu dans le passé des températures estivales anormalement élevées, comme en 1948 et en 1998, ou une sécheresse marquée comme en 1947 et en 1976, la conjonction des deux facteurs, inédite, a conduit nombre d'arbres à une détresse écologique sans précédent (le stress hydrique les empêchant d'effectuer leur photosynthèse, c'est-à-dire de consommer l'énergie solaire par évaporation).
Le même effort sera effectué en faveur de la restauration des terrains de montagne, qui vise à protéger les sols montagnards contre l'érosion et à réguler le régime des eaux torrentielles. Enfin, les dépenses liées aux prêts bonifiés à la forêt passeront de 28 millions d'euros à 8,3 millions d'euros du fait de l'arrivée à échéance des prêts accordés en 2000 pour faciliter le nettoyage des parcelles touchées par les tempêtes de 1999.
S'agissant des dépenses en capital, les crédits du conservatoire de la forêt méditerranéenne reculent de 11 millions d'euros en 2003 à 9,5 millions d'euros en 2004, ce que regrette votre rapporteur compte tenu de l'importance des incendies estivaux, en particulier dans le département du Var et en Corse. Il convient en revanche de saluer, dans un contexte budgétaire très difficile, la quasi-stabilité des crédits de paiement du fonds forestier national et autres opérations forestières, qui passeront de 97,5 millions d'euros en 2003 à 95,8 millions d'euros en 2004. En outre, les autorisations de programme en faveur des actions de recherche et de développement dans la filière bois seront maintenues à hauteur de 2,5 millions d'euros.
Surtout, le budget destiné à la forêt inclura encore les crédits nécessaires à la reconstitution de la forêt dans le cadre du plan décennal financé par l'Union européenne et des avenants « tempête » aux contrats de plan Etat-régions 2000-2006. Ainsi, l'addition des crédits d'investissement accordés par l'Etat et de leur contrepartie communautaire permettra de respecter le montant moyen annuel du plan décennal, fixé à 91,5 millions d'euros. Cette action reste prioritaire, car l'actualité récente des incendies estivaux ne doit pas faire oublier les dégâts durables causés par les tempêtes en décembre 1999, ces dommages étant estimés à l'équivalent de trois récoltes annuelles complètes.
Le budget de l'agriculture connaît d'importants changements de périmètre dans le projet de loi de finances pour 2004, rendant délicates les comparaisons entre l'enveloppe des crédits directement rattachés au ministère en 2003 et celle de 2004. En effet, deux dépenses importantes dépendant directement du budget de l'agriculture en 2003 sortiront de ce périmètre en 2004, en raison d'un nouveau mode de financement.
En premier lieu, le service public de l'équarrissage, qui assure la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux, des saisies d'abattoir et des matériels à risque, sera désormais financé par le biais d'une taxe spécifique, affectée au Centre national pour l'adaptation des structures des exploitations agricoles (CNASEA), à hauteur de 176 millions d'euros. Ce montant de recettes semble raisonnable, puisque les dépenses du service public de l'équarrissage ont été comprises entre 117,4 et 229,7 millions d'euros au cours des quatre dernières années. L'assiette de la nouvelle taxe reposera sur le tonnage des carcasses produit par les abattoirs et sur les quantités de déchets effectivement éliminées. Les sommes prélevées du fait de la nouvelle taxe seront bien inférieures à celles perçues au titre de la taxe sur les achats de viande, qui a rapporté 526,5 millions d'euros en 2002. Cette dernière sera abandonnée en raison d'un recours introduit auprès de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) par les entreprises assujetties.
Le nouveau financement permettra en outre à la France de répondre aux demandes formulées par la Commission européenne, qui souhaite que les aides nationales au ramassage et à l'élimination des déchets animaux soient plafonnées et financées selon le principe pollueur-payeur. C'est pourquoi les sommes correspondantes seront directement collectées auprès des abattoirs et ne figurent plus dans le budget du ministère chargé de l'agriculture en 2004.
Ce changement ne remet pas en cause l'existence, en matière d'équarrissage, de la redevance sanitaire pour le contrôle de certaines substances et de leurs résidus, instituée par la loi de finance rectificative pour 1998, ce prélèvement ayant rapporté 6,1 millions d'euros en 2002.
En second lieu, la dotation spécifique de 25,7 millions d'euros en faveur de l'Agence pour le développement agricole et rural (ADAR), qui permettait en 2003 d'assurer la transition entre cette nouvelle agence et l'organisme précédent (Association nationale pour le développement agricole, ANDA), a été supprimée. En effet, l'ADAR, en tant qu'établissement public bénéficiant d'une autonomie de fonctionnement, n'a pas vocation à être financée par le budget du ministère chargé de l'agriculture. La poursuite de ses activités sera durablement garantie par le versement du produit d'une taxe qui lui sera spécialement affectée.
La récente diminution du chiffre d'affaires des exploitants conduit néanmoins à s'interroger sur le maintien du niveau de recettes de la taxe affectée à l'ADAR. Votre rapporteur souhaite par ailleurs que l'orientation des actions qui seront menées par l'ADAR soit précisée.
D'une manière plus générale, votre rapporteur constate que ces changements de périmètre ne sont pas sans incidence pour les agriculteurs, auxquels de nouveaux efforts financiers seront demandés du fait de ces taxes. Toutefois, les exigences communautaires et la nécessaire autonomie de l'ADAR rendaient certainement inévitable l'institution de tels prélèvements.
Le budget du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, avec 4,98 milliards d'euros pour 2004, ne représente qu'une partie modeste de l'effort public destiné à promouvoir les activités agricoles, qui devrait dépasser l'an prochain 32 milliards d'euros. Ce vaste ensemble, sur lequel les décisions du ministère ont une influence, comprend également les dépenses sociales et fiscales en faveur des agriculteurs, auxquelles il faut ajouter les contributions des collectivités locales et surtout les importants versements européens accordés à la France au titre de la politique agricole commune (PAC).
Le budget communautaire assure à lui seul le tiers des concours publics à l'agriculture en France. Les dépenses de l'Union européenne au titre de la politique agricole commune (PAC) représenteront en 2004 près de 45 milliards d'euros, dont 10,2 milliards d'euros reviendront à la France en 2004 sous forme d'aides directes au titre du « premier pilier » (aides en faveur de l'élevage et des grandes cultures) et, en cofinancement avec l'Etat, au titre du « second pilier » (aides au développement rural).
En 2002, les versements communautaires accordés en France au titre du premier pilier se sont élevés à 8,9 milliards d'euros et ont financé des mesures de régulation des marchés et de soutien aux productions, pilotées par les organisations communes de marché (OCM). Les aides du premier pilier sont entièrement financées par l'Union européenne, à l'exception de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes qui fait aussi l'objet d'un financement national (voir I A 3 c).
Les aides perçues au titre du second pilier, beaucoup plus modestes mais en croissance du fait de l'évolution de la PAC (voir III A), représentaient 1,1 milliard d'euros en 2002 dans le budget communautaire, auxquels il faut ajouter la part nationale de financement de ces aides. Ces soutiens sont essentiellement constitués d'aides à l'installation, à la modernisation, à la compensation de handicaps naturels ou encore de mesures agri-environnementales.
Une bonne mobilisation des crédits nationaux consacrés aux aides encourageant les bonnes pratiques agricoles a permis à la France d'éviter en 2002 et en 2003 toute pénalité pour non-consommation des crédits communautaires (en 2001, la non-consommation de 289 millions d'euros avait entraîné la perte de 21 millions d'euros de crédits du second pilier). Cette exigence, qui permet de maximiser les soutiens financiers accordés aux agriculteurs, demeure pour 2004 et explique en partie l'orientation générale du budget national de l'agriculture, favorable au développement durable.
Les dépenses du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), dont le ministère chargé de l'agriculture est responsable, atteindront 15 milliards d'euros en 2004, contre 15,92 milliards d'euros en 2003, ce qui représente une baisse de 6,1 % des crédits.
Ce régime bénéficie à 2,3 millions d'assurés, alors que le nombre de cotisants actifs est inférieur à 550 000, du fait d'une démographie déclinante, ce qui explique que les prestations vieillesse reçoivent plus de 50 % des ressources du BAPSA. Le budget social agricole représente ainsi presque la moitié des dépenses publiques en faveur de l'agriculture, soit trois fois le budget du ministère lui-même.
Alors que le BAPSA est financièrement renfloué et qu'un régime complémentaire obligatoire a été mis en place après le mois de juin 2002, deux réformes devraient être effectuées au cours de l'année 2004 : d'une part la mensualisation des retraites, qui améliorera la vie quotidienne des bénéficiaires du régime, d'autre part la substitution d'un établissement public au BAPSA, conformément aux exigences de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) n° 2001-692 du 1er août 2001.
Les dépenses fiscales représenteront en 2004 plus de 2 milliards d'euros, les plus importantes d'entre elles portant sur des réductions de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP). La part du produit de cette taxe pesant sur l'activité agricole sera en effet amoindrie au moyen d'un taux réduit pour le fuel domestique utilisé comme carburant diesel, d'une exonération de TIPP pour les bateaux de pêche, ou encore d'une exonération plafonnée de TIPP pour les biocarburants.
La participation des collectivités territoriales au soutien des activités agricoles, inférieure à 900 millions d'euros, représente 3 % environ des concours publics au secteur. Cette contribution est appelée à croître du fait de l'accentuation annoncée de la décentralisation, les régions et les départements étant amenés à prendre de nouvelles responsabilités, dans de nombreux domaines où leur bonne connaissance du terrain peut permettre une meilleure allocation des ressources.
Les aides des conseils généraux et régionaux à l'agriculture ont représenté 867 millions d'euros en 2000, répartis de la manière suivante :
- 430 millions d'euros pour le remembrement, c'est-à-dire la réunification des parcelles agricoles, ainsi que pour les aménagements hydrauliques et l'enseignement agricole.
- 437 millions d'euros pour les soutiens supplémentaires soumis à la réglementation relative aux aides à l'agriculture et aux entreprises.
Les régions financent la majeure partie de ces aides, auxquelles elles concourent à hauteur de 516 millions d'euros. Les soutiens à la formation professionnelle, à l'apprentissage et à l'enseignement technique, qui correspondent à leurs compétences légales, représentent leur premier poste de dépense (274 millions d'euros), devant les soutiens à l'installation, à la modernisation et aux aménagements hydrauliques (242 millions d'euros).
Le financement provenant des départements, plus limité, représente 351 millions d'euros, dont 156 millions d'euros pour les opérations foncières, les aménagements hydrauliques et les laboratoires vétérinaires (compétences légales des départements), 56 millions d'euros pour l'installation et la modernisation de l'appareil de production, ainsi que 35 millions d'euros pour le financement d'associations et de syndicats ruraux.
II.- DES PRATIQUES AGRICOLES EN MUTATION
Les contrats territoriaux d'exploitation (CTE), créés par la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole, consistaient à décliner au niveau national la politique communautaire de développement rural en réunissant sur un unique document un certain nombre d'engagements pris par l'exploitant et leur contrepartie étatique. Il s'agissait d'aider les exploitations à développer un projet global prenant en compte l'objectif de production mais aussi l'ensemble des externalités de cette activité économique, en terme d'emploi, d'environnement et d'occupation de l'espace. En vertu du décret n° 99-874 du 13 octobre 1999, chaque CTE devait comporter deux volets distincts, le premier consacré à l'économie et à l'emploi, le second aux engagements pris par l'exploitant pour « l'aménagement (et) le développement de l'espace rural et de l'environnement, en vue notamment de lutter contre l'érosion, de préserver la qualité des sols, les eaux, la nature et les paysages ». A l'aide de contrats types arrêtés par le préfet de département, les agriculteurs devaient mettre au point leurs contrats prévoyant des actions, dont les objectifs et moyens étaient précisés dans un cahier des charges.
Si la démarche contractuelle des CTE semblait pertinente, un certain nombre de dysfonctionnements et un coût devenu exorbitant ont toutefois conduit à leur suspension le 6 août 2002. Après un démarrage difficile dû à la complexité des procédures, à la multiplicité des conditions d'éligibilité et à la réticence de certains exploitants, les CTE se sont multipliés (14 535 en 2001, 25 060 en 2002), tandis que l'aide moyenne par contrat atteignait 44 000 euros, soit le double des prévisions.
En outre, la faiblesse de l'encadrement budgétaire a conduit à l'apparition de fortes disparités territoriales, le coût moyen d'un CTE variant du simple au double selon les départements, comme l'a mis en évidence le rapport demandé par le ministère en charge de l'agriculture au Comité permanent de coordination des inspections (COPERCI) et publié le 5 juillet (voir carte ci-après).
Coût par CTE (en euros)
53 800 à 88 500
46 00 à 53 800
43 900 à 46 900
35 300 à 43 900
0 à 35 300
L'efficacité des CTE reste difficile à évaluer en raison de la diversité des engagements pris par les exploitants, mais il semble que ceux-ci y ont surtout vu un moyen de moderniser leur appareil productif, les autres préoccupations, écologiques notamment, passant parfois au second plan - l'audit effectué par le COPERCI a souligné leur « manque d'efficacité en matière d'environnement ».
Le décret n° 2003-675 du 22 juillet 2003 relatif aux contrats d'agriculture durable (CAD) et modifiant le code rural a pris acte de ces difficultés en remplaçant les CTE par un nouveau dispositif. Les CAD se caractérisent par des procédures allégées et des modalités de déclaration simplifiées, tandis que le préfet de département est chargé de l'instruction des dossiers comme du contrôle des engagements, pris pour une durée de 5 ans. En outre, l'encadrement budgétaire des contrats est assuré, une moyenne départementale de 27 000 euros par contrat devant désormais être respectée. Au sein de ces enveloppes, une réserve définie au niveau régional devra être consacrée aux mesures de conversion à l'agriculture biologique. Surtout, les CAD sont recentrés sur la « contribution de l'activité de l'exploitation à la préservation des ressources naturelles », l'inclusion d'un volet économique devenant facultative.
Le volet écologique a été considérablement simplifié, grâce à la définition de territoires connaissant les mêmes problèmes environnementaux et à une limitation des engagements pouvant être pris par l'agriculteur : nul ne peut sélectionner plus de deux enjeux environnementaux dans chaque territoire, ni prévoir plus de trois actions prioritaires par enjeu. Par ailleurs, en vertu de l'article R. 341-14 du code rural, tous les exploitants sont désormais tenus de respecter les bonnes pratiques générales reconnues par la profession, indépendamment des engagements agri-environnementaux choisis.
La nouvelle réglementation assure en principe la crédibilité de ce dispositif, dont la bonne application sera vérifiée par les services déconcentrés. Ces derniers sont chargés d'effectuer des contrôles sur pièce et sur place, pouvant conduire à une suspension des versements, voire une résiliation du contrat. Les CAD ne seront pas pour autant un carcan pour les exploitants : ceux-ci pourront prendre des engagements agri-environnementaux sans souscrire un CAD, et ceux qui bénéficient déjà de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE, ex-« prime à l'herbe », voir I A 3 c) pourront, sous certaines conditions, cumuler cette aide et celles accordées dans le cadre du CAD.
Votre rapporteur tient à rappeler le grand intérêt des opérations locales agri-environnementales (OLAE), qui n'étaient pas toujours suffisamment encouragées dans l'ancien dispositif, puisque la rémunération était réduite de 20 % en l'absence de CTE. Or, il ne faut donc pas exclure de la dynamique les agriculteurs de plus de 55 ans ou ne disposant pas d'un projet de développement global pour leur exploitation.
Cette démarche souple sera poursuivie, comme l'atteste le décret n° 2003-774 du 20 août 2003 relatif aux engagements agri-environnementaux. Ce texte précise en effet que ceux-ci, pris auprès du préfet pour une durée minimale de cinq ans, « peuvent porter sur une partie seulement de l'exploitation », l'exploitant devant toutefois « respecter les bonnes pratiques agricoles habituelles définies dans le cadre du plan de développement rural national sur la totalité de son exploitation ». Ce texte est complété par un arrêté du même jour fixant, indépendamment du nombre d'actions, les montants annuels maximums des aides versées à l'hectare : 600 euros pour les cultures annuelles, 900 euros pour les cultures pérennes spécialisées, et 450 euros pour les autres utilisations des terres.
Votre rapporteur se félicite que ces importantes modifications réglementaires s'accompagnent d'une évolution favorable des crédits nationaux accordés au titre des CTE et CAD dans le projet de loi de finances pour 2004, ceux-ci devant atteindre 254,7 millions d'euros, ce qui représente une hausse de 27,4 % par rapport à l'année précédente. De leur côté, les mesures agri-environnementales resteront soutenues en 2004 à hauteur de 133 millions d'euros, comme en 2003.
Grâce au cofinancement par le budget communautaire (du « deuxième pilier ») dans le cadre du plan de développement rural national (PDRN), les CTE et les CAD recevront un total d'environ 450 millions d'euros en 2004.
Le premier programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA 1), dont le lancement remonte à 1993, visait à offrir aux agriculteurs un soutien technique et financier pour les aider à respecter les prescriptions imposées par la « directive nitrates » de 1991 en matière de gestion des effluents d'élevages (directive n° 91/676/CEE du 12 décembre 1991 sur la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir des sources agricoles). Le PMPOA 1, qui a bénéficié à 36 000 exploitations, s'est d'abord concentré sur les plus grosses d'entre elles et leur a permis de réaliser des investissements substantiels (bâtiments et cuves notamment). L'Etat y a consacré 250 millions d'euros, soit un sixième du coût total, les autres financeurs étant les collectivités locales (un sixième), les agences de l'eau (un tiers) et les agriculteurs eux-mêmes (un tiers). A elle seule, l'agence de l'eau Loire-Bretagne a couvert environ 60 % des contrats conclus sur le territoire national dans son ensemble, et plus de 75 % des contrats conclus dans les zones vulnérables (voir tableau ci-dessous).
CONTRATS CONCLUS DANS LE CADRE DU PREMIER PMPOA
FRANCE ENTIERE |
ZONES VULNERABLES | |||
Agences de l'eau |
Nombre de contrats |
Effluents d'élevage (en tonnes d'azote) |
Nombre de contrats |
Effluents d'élevage (en tonnes d'azote) |
Adour-Garonne |
2 343 |
23 000 |
579 |
6 000 |
Artois-Picardie |
1 441 |
15 000 |
120 |
1 000 |
Loire-Bretagne |
21 035 |
229 000 |
15 934 |
177 000 |
Rhin-Meuse |
2 598 |
28 000 |
1 097 |
11 000 |
Seine-Normandie |
5 237 |
58 000 |
2 606 |
29 000 |
Rhône-Mediterranée-Corse |
3 046 |
28 000 |
544 |
6 000 |
TOTAL |
35 700 |
381 000 |
20 880 |
230 000 |
Source : BIMA hors série n° 13, janvier 2003, p.19
Les résultats du PMPOA 1, bien qu'insuffisants, ne sont pas négligeables. Ainsi, dans le bilan d'azote agricole de la France, la croissance des engrais organiques s'est poursuivie jusqu'au début des années 1990, avant de se stabiliser depuis 1993 (1,28 million de tonnes d'azote en 1993, contre 1,25 million en 1997). Par ailleurs, ce programme a permis de maîtriser environ 60 % des effluents d'élevage lors du stockage. Néanmoins, la Cour des comptes comme l'Inspection des finances ont reproché au PMPOA 1 son coût élevé (double du coût prévu), un ciblage imparfait (seules les plus grandes exploitations étaient concernées), et une affectation des crédits discutable (soutien aux investissements de compétitivité économique plus qu'à une gestion écologique de la fertilisation).
Ces imperfections ont conduit à la fin de l'année 2000 à la suspension de ce programme, auquel a succédé deux ans plus tard un nouveau PMPOA baptisé « programme de maîtrise des pollutions liées aux effluents d'élevage », dont le financement est réparti à l'identique. La Commission européenne, avant de valider ce nouveau programme, a exigé que les financements publics soient concentrés à 80 % au moins dans les zones vulnérables, qu'ils s'adressent à l'ensemble des élevages indépendamment de leur taille, à charge pour eux de se déclarer avant la fin de l'année 2001, et que l'ensemble soit achevé le 31 décembre 2006. Le ministère de l'environnement a, pour sa part, demandé un renforcement du volet agronomique (gestion des effluents d'élevage) et un traitement global des problèmes de chaque bassin versant.
Le maintien global du niveau des subventions s'est accompagné de la révision de certains plafonds, et le coût total prévisible du PMPOA 2 avoisinera 1,3 milliard d'euros d'ici son achèvement en 2006. Comme le demandaient les organisations agricoles, les élevages placés en dehors des zones vulnérables seront éligibles à ces aides s'ils sont soumis au régime d'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), dans la limite des moyens des agences de l'eau concernées. Votre rapporteur estime souhaitable de poursuivre cet élargissement en étendant le bénéfice de telles aides aux exploitations soumises au régime de la simple déclaration, car les élevages modestes ne disposent que de faibles moyens pour améliorer leurs pratiques.
Près de 105 000 élevages ont fait l'objet d'une déclaration d'intention d'engagement avant le 31 décembre 2002 et pourront de ce fait bénéficier du programme au titre de la période 2003-2006. Ce dernier ne démarre que lentement, puisque seuls 1 000 engagements comptables avaient été pris au 1er septembre 2003. Il est prévu de traiter environ 2 500 dossiers en 2004 et d'accroître la consommation des crédits, ce que votre rapporteur juge indispensable. En effet, une sous-consommation importante des crédits de paiement (qui s'élevaient à 31 millions d'euros en 2003) réduit l'intérêt de la hausse massive des autorisations de programme, dont le montant doublera en 2004 après avoir cru de 14,4 % en 2003, pour atteindre finalement 68,5 millions d'euros.
Par ailleurs, le Gouvernement devrait aménager le financement du PMPOA de façon à ce que les écarts de richesse entre agences de l'eau ne conduisent pas, comme c'est actuellement le cas, à faire varier l'importance des soutiens accordés du simple au quadruple selon les régions. Il conviendra également de veiller, par une surveillance adaptée, au respect de prescriptions adressées aux éleveurs, en particulier dans les zones en excédent structurel (ZES) ; dans cette perspective, il serait souhaitable de préconiser des mesures aisément contrôlables (couverture hivernale des sols, retournement des prairies ou présence de bandes enherbées aux abords de cours d'eau par exemple).
Au-delà de ces aspects institutionnels, les pratiques agricoles évoluent par elles-mêmes dans le sens d'une meilleure prise en compte des équilibres écologiques, comme en témoignent le développement de l'agriculture biologique et l'émergence d'une « agriculture raisonnée ».
Rappelons que l'agriculture biologique, mode de production essentiellement mis au point en Europe du Nord, consiste à éviter le recours aux facteurs de production d'origine extérieur (nourriture ou médicaments achetés par l'exploitant à un fournisseur, par exemple) et à préférer les méthodes naturelles et mécaniques à l'emploi de produits chimiques de synthèse. Sa contribution à la préservation de l'environnement est globalement positive, puisqu'elle tend à accroître la diversité biologique sur les exploitations et à maintenir la fertilité des sols à long terme.
L'agriculture biologique dispose d'ores et déjà d'un label connu du grand public (le label « AB ») et connaît une réelle expansion, qui peut ponctuellement engendrer une situation d'excédent comme cela a pu être observé dans la filière laitière. La demande de produits issus de l'agriculture biologique dépasse généralement l'offre, en particulier dans le domaine des matières premières destinées à l'alimentation animale. Cet écart engendre un fort besoin d'importation en provenance d'Amérique du Nord, d'Europe orientale, d'Allemagne et d'Italie.
Certes, en consacrant seulement 1,4 % de sa surface agricole utile (S.A.U.) à l'agriculture biologique en 2001, la France n'occupe que le 25ème rang mondial pour l'importance relative de cette forme d'agriculture. Toutefois, la croissance de ce secteur ne s'est pas interrompue depuis trois ans. Entre 2000 et 2002, le nombre d'exploitations ayant recours à ce mode de production est passé de 8 985 à 11 177, et la surface concernée de 361 040 hectares à 509 000 hectares, ce qui traduit un réel engouement des professionnels. Les productions connaissant la plus forte progression en agriculture biologique sont les oléoprotéagineux (41 % d'augmentation entre 2000 et 2001), la vigne (29 %) et les pâturages et fourrages (28 %).
Le montant des aides consacrées par l'Etat aux mesures de conversion à l'agriculture biologique, dans le cadre des CTE, a également connu une forte augmentation, passant de 23,8 millions d'euros en 2000 à 73,7 millions d'euros en 2002, ce qui traduit une mobilisation de la puissance publique en faveur de cette forme de production écologique.
Toutefois, l'agriculture biologique souffre en France d'une recherche insuffisante, d'un partenariat défavorable avec la grande distribution et d'une réglementation trop lourde, qui offre aux autres pays européens des avantages comparatifs. Il convient de rappeler que cette réglementation va bien au-delà des exigences du règlement CE 2092/91, qui laisse à chaque Etat la responsabilité de la mettre en _uvre.
Le système mis en place en France repose sur un contrôle de premier niveau confié à des organismes certificateurs indépendants, accrédités par le Comité français d'accréditation (COFRAC) selon la norme NF EN 45011, puis agréés par les ministères chargés de l'agriculture et de la consommation, après avis de la commission nationale des labels et de la certification des produits agricoles (CNLC). Ces organismes, eux-mêmes soumis à un contrôle dit de deuxième niveau, sont aujourd'hui au nombre de six et vérifient la bonne application du règlement communautaire précité et des textes nationaux. Ils réalisent des audits annuels de contrôle et d'analyse du travail des différents opérateurs, sanctionnent les éventuelles erreurs ou fraudes par des amendes, un déclassement des produits ou l'exclusion de l'opérateur fautif, et peuvent imposer des mesures de correction.
Conscients de la complexité de ces procédures et de l'avantage comparatif accordé aux produits biologique des autres pays, les services de la direction générale de l'alimentation mènent depuis deux ans une action de clarification et d'harmonisation des méthodes de travail des organismes certificateurs, afin de soulager les producteurs et d'éviter tout arbitraire. Cet effort a conduit à la publication du décret n° 2001-514 du 13 juin 2001 augmentant les sanctions et contrôlant plus étroitement les organismes certificateurs, à l'animation d'un groupe de travail visant à harmoniser les processus de contrôle, à des négociations permanentes avec les professionnels pour définir un plan de contrôle global, et à une meilleure formation des personnels des organismes certificateurs.
Sur le plan communautaire, la France a obtenu l'adoption du règlement n° 1788-2001 du 7 septembre 2001 relatif au certificat de contrôle pour les importations, tandis que la Commission européenne a mis au point des formulaires harmonisant les conditions de délivrance des autorisations de commercialisation des produits biologiques importés. Par ailleurs, la Commission européenne gère depuis mai 2003 une banque de données qui centralise toutes les autorisations d'importation et permet des contrôles croisés en temps réel. Enfin, suite aux demandes répétées de la France, la Commission européenne a engagé un travail d'harmonisation communautaire des plans de contrôle et des documents en agriculture biologique.
Tout en appelant le Gouvernement à poursuivre ses efforts pour remédier aux difficultés spécifiques de cette filière prometteuse, votre rapporteur tient à souligner les limites propres à l'agriculture biologique.
En premier lieu, les produits issus de l'agriculture biologique restent dans tous les cas plus onéreux que les produits de l'agriculture traditionnelle, leur prix de vente reflétant l'absence de gains de productivité obtenus par des procédés industriels. Or, contrairement à un discours fréquent, le comportement des consommateurs reste largement déterminé par le prix de vente des produits, ce qui limite la marge de progression commerciale de produits vendus parfois deux fois plus cher que ceux de l'agriculture classique.
En second lieu, il convient de souligner la fragilité potentielle de la filière biologique en cas de crise sanitaire majeure, du fait de la rigidité des règles prohibant l'emploi d'outils de régulation chimiques, pharmaceutiques en particulier. Dans un tel scénario, la rigueur du label de l'agriculture biologique, qui est aujourd'hui un argument promotionnel, pourrait se retourner contre les professionnels en les privant des remèdes nécessaires et en entamant la confiance des consommateurs.
L'« agriculture raisonnée » constitue une autre forme innovante d'agriculture, intégrant pleinement les enjeux environnementaux sans pour autant faire abstraction de la dimension économique de la production. Bien qu'elle soit toujours en phase de lancement et n'ait pas encore pu apparaître aux yeux du grand public comme une réalité, l'agriculture raisonnée offre d'intéressantes perspectives de développement.
Officiellement reconnue par le décret n° 2002-631 du 25 avril 2002, l'agriculture raisonnée est une démarche qui vise à faire évoluer la gestion globale des exploitations en renforçant les impacts positifs des pratiques agricoles sur l'environnement et en réduisant leurs effets négatifs, sans jamais remettre en cause la rentabilité des exploitations concernées. Dans cette perspective, il est proposé à chaque agriculteur d'adhérer, sur une base volontaire, à une démarche de qualification, portant sur l'ensemble des conditions de production. La qualification est attribuée pour 5 ans, sur décision d'un organisme certificateur, après un audit sur place de l'exploitation, destiné à vérifier le respect des exigences contenues dans le référentiel de l'agriculture raisonnée. Ces organismes certificateurs sont agréés par les pouvoirs publics et accrédités selon la norme NF EN 45011, qui leur impose de présenter toutes les garanties nécessaires en termes de compétence, d'indépendance et d'impartialité. Ils peuvent en outre faire appel à des structures-relais pour réaliser des audits des exploitations et suivre leur qualification.
Le référentiel de l'agriculture raisonnée comprend un volet national, qui a fait l'objet d'un arrêté du 30 avril 2002 fixant la liste des exigences que les exploitations doivent respecter en matière d'environnement, de santé, de sécurité et de bien-être animal, pour être qualifiées. Ce volet national doit être complété par un volet territorial, qui sera applicable à partir de juillet 2004 et comprendra des exigences locales proposées par les commissions régionales et validées par la Commission nationale de l'agriculture raisonnée et de la qualification des exploitations (CNAR).
Les bonnes pratiques codifiées au niveau national concernent par exemple la traçabilité des produits, l'information de l'exploitant, l'adaptation des techniques de fertilisation, la gestion de l'eau ou encore les risques d'érosion. Les exigences du référentiel national imposent, notamment en matière de traçabilité, à l'agriculteur d'enregistrer systématiquement les opérations qu'il a effectuées et les produits qu'il a utilisés pour les besoins des cultures et des animaux, et de conserver ces enregistrements pendant cinq ans. S'agissant de la fertilisation et des produits phytosanitaires, l'agriculteur doit stocker de façon appropriée les produits pour éviter les pollutions accidentelles, n'apporter aux plantes que les doses nécessaires à leurs besoins, aux dates adaptées et après avoir minutieusement observé l'état sanitaire des cultures, puis trier et éliminer les déchets en participant aux collectes spécifiques. Des pratiques culturales adaptées à la préservation des sols contre les risques de pollution et d'érosion, une participation aux actions de gestion collective de la ressource en eau et une bonne intégration paysagère des nouveaux bâtiments sont aussi attendues de l'exploitant. Enfin, sur le plan de la sécurité sanitaire, l'agriculteur doit veiller à l'hygiène des installations, à la régularité des contrôles vétérinaires, ou encore à l'identification des animaux et à la qualité de l'alimentation.
Les éleveurs pourront être formés aux bonnes techniques d'épandage des effluents et aidés à s'équiper de fosses couvertes pour stocker ceux-ci, invités à implanter des bandes enherbées sur la partie aval des parcelles et le long des cours d'eau pour limiter les ruissellements. Ils pourront encore être instruits sur l'utilisation de kits de diagnostic et aidés à s'équiper de pulvérisateurs munis de buses anti-dérive et régulièrement contrôlés.
Il a été affirmé à votre rapporteur qu'un décret compléterait prochainement le dispositif en précisant les conditions d'utilisation de la mention « agriculture raisonnée » lors de la commercialisation des produits issus des exploitations ayant obtenu la qualification correspondante. Votre rapporteur se réjouit de cette perspective, qui devrait permettre aux agriculteurs impliqués dans cette démarche exigeante d'espérer un avantage concurrentiel à la vente, compte tenu de la sensibilité des consommateurs en matière sanitaire et environnementale.
L'agrément des premiers organismes certificateurs n'ayant pas encore été obtenu, aucune exploitation n'a à ce jour reçu la qualification « agriculture raisonnée ». Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les premières qualifications devraient toutefois intervenir avant la fin de l'année 2003 et se multiplier au cours de l'année 2004. La diffusion de ce dispositif sur le terrain est d'autant plus nécessaire qu'un objectif de 30 % d'exploitations qualifiées d'ici fin 2008 a été fixé dans le cadre de la stratégie nationale du développement durable.
En conséquence, votre rapporteur estime indispensable que l'agriculture raisonnée bénéficie au cours des prochaines années d'un soutien public important, qui passe par des encouragements financiers et une assistance technique soutenue des chambres d'agriculture. Il conviendrait en outre, pour assurer la crédibilité de la démarche, de ne pas diluer le contenu des exigences spécifiques de l'agriculture raisonnée dans la réglementation existante et de contrôler régulièrement les exploitations qualifiées. Par ailleurs, il est probable que la mise en place d'une chaîne de distribution spécifique et d'un véritable label permettrait de tirer pleinement profit de cette initiative.
L'année 2003 a été marquée par d'importants aléas climatiques, qu'il s'agisse du gel ou au contraire de la canicule estivale, cette dernière ayant aggravé une sécheresse déjà importante et favorisé les incendies de forêt. Ces phénomènes naturels ont incontestablement perturbé les activités agricoles, nuisant à la qualité des récoltes et rendant plus difficile l'alimentation du bétail. S'il est impossible d'empêcher la survenance de telles catastrophes, il reste essentiel d'en limiter l'impact négatif sur la production agricole. Aussi l'Etat a-t-il pris les mesures nécessaires pour accompagner le mouvement naturel de solidarité nationale en faveur des agriculteurs sinistrés.
Le projet de loi de finances pour 2004 prend en compte, pour la prochaine campagne, les conséquences prévisibles des récents événements climatiques. Toutefois, l'essentiel des mesures d'aide d'urgence annoncées par le Gouvernement figureront dans le projet de loi de finances rectificative pour 2003.
Ainsi, au cours du mois de septembre 2003, la trésorerie des agriculteurs a été soutenue à hauteur de 660 millions d'euros, grâce à une anticipation du versement des aides communautaires perçues au titre des soutiens à l'élevage et des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). Cet effort doit être complété au mois d'octobre 2003 par le paiement de 200 000 dossiers d'aides surfaces pour environ 1,4 milliard d'euros, et permettra au total le versement anticipé de plus de 2 milliards d'euros aux agriculteurs.
Par ailleurs, le coût des prêts consentis aux agriculteurs victimes de la sécheresse est abaissé. Le taux des prêts calamité pour pertes agricoles (dont la durée ne peut dépasser quatre années) ou pour perte de fonds (dont la durée doit être inférieure à sept ans) est ainsi réduit de 2,5 % à 1,5 % pour les jeunes agriculteurs et les récents investisseurs titulaires d'un plan d'amélioration matérielle. Ces deux catégories de professionnels bénéficieront de la même réduction de taux pour les prêts de consolidation accordés aux agriculteurs et seront dispensées des intérêts dus pendant la durée du différé (différé qui s'élève à un an maximum, la durée du prêt ne pouvant dépasser 5 ans).
Parallèlement à cet effort au niveau national, le Gouvernement a obtenu de la Commission européenne la possibilité de récolter les jachères ainsi que le versement anticipé, dans les 53 départements les plus touchés par la sécheresse, de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA) et de la prime à la brebis et à la chèvre (PBC), ce qui bénéficie respectivement à 12 082 et 34 137 éleveurs. Il convient d'observer que ces avances s'ajoutent aux acomptes versés précocement au titre des indemnités compensatoires de handicap naturel (ICHN), aides dont la répartition géographique profite en règle générale aux exploitations les plus fragiles.
L'ensemble de ces mesures traduit une forte mobilisation de l'Etat, dans un cadre budgétaire pourtant contraint, pour aider les agriculteurs à surmonter les difficultés d'origine météorologique.
La Commission nationale des calamités agricoles a estimé que 49 départements particulièrement affectés par la sécheresse devaient percevoir les compensations financières du régime des calamités agricoles pour les dommages causés aux productions fourragères et aux grandes cultures. Cette reconnaissance officielle permettra aux agriculteurs concernés de bénéficier d'indemnisations individuelles. Le nombre de dossiers déposés auprès des directions départementales de l'agriculture et de la forêt pourrait s'élever à environ 70 000 et donner lieu au versement de plus de 350 millions d'euros.
Toutefois, le fonctionnement de ce fonds ne donne pas pleine satisfaction aux agriculteurs, en raison de son financement inégal et de sa lenteur encore excessive.
Votre rapporteur tient ainsi à rappeler, hors versement exceptionnel de subventions de l'Etat (versement qui devrait atteindre cette année 180 millions d'euros au cours du second semestre 2003), la part croissante des contributions additionnelles des exploitants dans le financement du fonds national de garantie des calamités agricoles. Alors que ces cotisations ne représentaient que 60 millions d'euros environ il y a 20 ans, elles atteignent 85 millions d'euros en 2003. D'une manière générale, elles n'ont cessé de s'accroître depuis quarante ans, comme le montre le graphique suivant :
ÉVOLUTION DES DEUX SOURCES DE FINANCEMENT DU FNGCA)
Source : Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales
Par ailleurs, votre rapporteur regrette la longueur excessive des délais de versement des indemnisations : le délai réel entre l'arrêté de reconnaissance de l'état de calamité agricole et l'arrêté d'indemnisation est en moyenne de 262 jours depuis vingt ans, contre trois mois pour les assurances. Il est donc heureux que le délai compris entre la date d'examen des dossiers par la Commission nationale des calamités agricoles et la mise à disposition des fonds dans les départements sinistrés soit désormais ramené à 30 jours, grâce aux enseignements tirés du traitement des tempêtes de décembre 1999 et à la récente mobilisation du Gouvernement.
La sécheresse sans précédent observée cet été a réduit à néant la production de foin de nombreuses prairies, obligeant les éleveurs à consommer leurs stocks d'aliments hivernaux. La profession agricole, forte d'une longue tradition d'entraide, a très rapidement réagi à cette situation en organisant sur le plan matériel l'élan naturel de solidarité entre les exploitants. Ainsi, les agriculteurs des régions relativement épargnées par la sécheresse (essentiellement ceux du nord de la France) ont renoncé à broyer tout ou partie de leur paille, habituellement utilisée comme engrais organique, pour la presser et la mettre à disposition des exploitations des régions sinistrées. Ils ont donc entrepris, avec le soutien logistique des organisations professionnelles, de collecter la paille et le fourrage nécessaires pour approvisionner les éleveurs en manquant (concentrés notamment dans le Massif central). Par ailleurs, votre rapporteur observe que le Gouvernement a également obtenu de la Commission européenne l'autorisation de récolter les jachères.
Dans le cadre de cette action, de nombreux volontaires ont pris la tête de longs convois permettant de ravitailler les élevages qui, sans cette aide, auraient été frappés par des mesures d'abattage massives du bétail et à une vente forcée de ce dernier. Plus de 35 000 tonnes de fourrage ont déjà été transportées et, au total, environ 200 000 tonnes de paille devront être acheminées vers les exploitations demandeuses. Jamais dans l'histoire agricole française de telles quantités de paille n'avaient été transportées sur des distances aussi importantes.
Malgré d'indéniables problèmes logistiques, il est évident que le coût d'une telle opération, tant en terme de carburant que d'énergie humaine, est beaucoup plus faible que le préjudice qui résulterait de la vente forcée du cheptel dans les exploitations. Votre rapporteur salue donc ce mouvement spontané des agriculteurs et se félicite de la décision du Gouvernement d'accompagner cette démarche généreuse par le versement d'une aide au transport de fourrage à hauteur de 50 millions d'euros. Le soutien de l'armée, les aménagements réglementaires en faveur des transports privés (autorisations de transport pour les chauffeurs préretraités et en fin de semaine) et la mise à disposition de trains par la SNCF aideront également les agriculteurs à relever ce défi inédit.
III.- L'IMPACT DES NÉGOCIATIONS INTERNATIONALES SUR L'AVENIR DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE
Il est indéniable que l'importance des soutiens communautaires accordés aux agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) et la libéralisation croissante des échanges internationaux ne permettent plus réellement de limiter l'analyse des politiques agricoles à leur seule dimension nationale. L'année 2003 a en outre été marquée par une importante actualité internationale pour l'agriculture - depuis la réforme de la PAC décidée le 26 juin jusqu'au report des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancún le 14 septembre -, justifiant aux yeux de votre rapporteur des développements spécifiques, sortant du cadre budgétaire français.
L'accord politique adopté le 26 juin 2003 au Luxembourg par le Conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne au terme d'une longue négociation constitue à l'évidence une réforme de grande ampleur de la PAC, allant bien au-delà de la « révision à mi-parcours » initialement prévue.
Il convient en effet de rappeler que la PAC, ayant fait l'objet d'un accord politique important en 1999 à l'initiative de la France et de l'Allemagne, ne devait plus connaître en principe de bouleversement important jusqu'en 2013. Il avait ainsi été décidé que l'arrivée de 10 nouveaux Etats-membres dans l'Union européenne ne remettrait pas en cause la stabilité du budget de la PAC pour les 15 Etats membres actuels jusqu'à cette date. La réforme adoptée cette année préserve finalement cet équilibre, favorable à la France dans la mesure où celle-ci bénéficie de la plus grande part des financements communautaires accordés au titre de la PAC.
Le projet de réforme présenté par Franz Fischler en juillet 2002 prévoyait de « découpler » - c'est-à-dire de déconnecter - totalement le niveau des aides versées à chaque agriculteur au titre du « premier pilier » de la PAC (aides directement agricoles) de celui de la production. Dans cette hypothèse, le niveau des aides aurait uniquement été fixé en fonction d'un historique des aides perçues par l'exploitation et de la superficie des terres cultivées. Les organisations agricoles ont à juste titre souligné le risque qu'un tel système ne favorise la spéculation foncière et ne perpétue des injustices en figeant les situations. La France s'est donc vivement opposée à ce projet et a obtenu qu'il soit largement amendé.
Ainsi, la France sera autorisée à ne procéder qu'à un découplage partiel. Ce dernier atteindrait 75 % dans le secteur des céréales mais seulement 60 % pour la prime à l'abattage des bovins et 50 % pour la prime ovine, la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA) restant quant à elle entièrement couplée à la production. Par ailleurs, le prix d'intervention sur les céréales sera maintenu, tandis que le prix du lait baissera de 15 % en trois ans, les quotas laitiers étant prorogés jusqu'en 2014 (avec une augmentation de ceux-ci de 0,5 % par an). S'agissant du beurre, une baisse supplémentaire du prix de 10 % sera compensée pour le producteur à hauteur de 82 %, parallèlement à une forte augmentation du stock de beurre à l'intervention, qui sera porté à 50 000 tonnes alors que la Commission européenne souhaitait s'en tenir à 20 000 tonnes. Enfin, l'organisation commune de marché (OCM) des fruits et légumes sera améliorée.
En revanche, la démarche visant à développer l'éco-conditionnalité des aides, qui figurait dans la réforme initiale, demeure : l'agriculteur ne pourra prétendre à ces aides que s'il respecte un certain nombre d'exigences environnementales prédéfinies. Cette modification peut générer des contraintes importantes pour les petits agriculteurs, qui n'ont pas toujours les moyens d'acquérir les équipements nécessaires. Elle présente néanmoins l'avantage de rendre plus défendables les aides de la « boîte bleue » (aides à la maîtrise de la production, les aides de la « boîte verte » en étant entièrement séparée et attribuées au titre du seul développement rural), dans la perspective des négociations commerciales internationales où la PAC fait l'objet de vives critiques (voir infra).
Le Gouvernement a par ailleurs obtenu avec l'accord du 26 juin 2003 un certain nombre d'assouplissements qui lui permettront d'adapter la réforme aux besoins des agriculteurs. Ainsi, la France, attachée à la démarche de régulation des marchés, pourra créer un fonds de gestion des crises, en particulier pour les filières porcine et avicole. Il s'agit là d'une avancée essentielle dans la mesure où ces deux filières ne sont pas couvertes par des OCM et restent à ce jour soumises à des crises cycliques dues à de fortes variations de prix. Par ailleurs, un dispositif national d'aide aux jeunes agriculteurs pourra être institué, ce qui est indispensable pour préserver l'avenir de l'agriculture française. La France pourra également mettre en place un plan de dix ans pour aider les exploitations à s'adapter aux normes en matière d'environnement, de bien-être animal et de sécurité sanitaire et alimentaire.
Ces aménagements ne doivent pas être considérés comme un début de renationalisation de la PAC, mais uniquement comme des facteurs de souplesse qui ne remettent pas en cause le cadre budgétaire général de la PAC, par lequel l'ensemble des Etats membres est solidaire.
Enfin, la date d'application de l'accord pourra intervenir entre 2005 et 2007, ce qui laisse au Gouvernement le temps nécessaire pour mettre en place les aménagements et les soutiens appropriés, en concertation avec les organisations professionnelles, avant l'entrée en vigueur de la réforme.
Votre rapporteur tient à saluer l'efficacité de l'action entreprise au niveau européen par le ministre en charge de l'agriculture, qui a réussi à négocier au mieux une réforme de la PAC qui préserve les intérêts de la France et l'avenir des exploitants dans un contexte pourtant difficile. Il lui reviendra de mettre en place des procédures allégées pour apaiser l'inquiétude de certains professionnels, qui redoutent désormais la complexité d'un découplage partiel des aides.
Surtout, il est désormais indispensable de proposer, au niveau national, un accompagnement juridique et financier permettant aux agriculteurs de faire face au surcoût engendré par les nouvelles exigences communautaires en matière d'environnement, de sécurité sanitaire et alimentaire et de bien-être animal. La représentation nationale devra veiller à faire évoluer la législation pour répondre pleinement à cette aspiration légitime.
Le règlement (CE) 1257/99 du 17 mai 1999 regroupe désormais l'ensemble des règles relatives aux aides de développement rural, qui relevaient auparavant de neuf règlements différents. Dans le même temps, l'ensemble des financements correspondants ont été réunis en un unique instrument : le fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section garantie.
Cet effort de clarification a permis à la France d'élaborer plus aisément son plan de développement rural national (PDRN), principale déclinaison du règlement de développement rural, qui fédère 17 mesures et concerne une vingtaine de dispositifs de soutien aux agriculteurs. Le PDRN, qui permettra de mobiliser jusqu'en 2006 environ 85 % de l'enveloppe du FEOGA-garantie (soit 5 milliards d'euros), a été validé par la Commission européenne le 17 décembre 2001. Il programme des aides dont le montant total s'élève à 12 milliards d'euros de 2000 à 2006 si l'on tient compte de son co-financement par l'Etat et les collectivités territoriales.
Les aides prévues par le PDRN concernent notamment les investissements dans les exploitations agricoles, l'installation des jeunes agriculteurs, la formation et la préretraite des agriculteurs, les zones défavorisées et l'agri-environnement, la transformation et la commercialisation des produits agricoles, la sylviculture ou encore l'adaptation et le développement des zones rurales. Les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), avec un montant de 400 à 450 millions d'euros par an, représentent à elles seules entre 25 et 30 % du total de ces dépenses.
La modulation obligatoire des aides directes, décidée au Conseil des ministres de Luxembourg le 26 juin 2003 dans le cadre de la réforme de la PAC, renforcera à partir de 2005 le financement du second pilier de la PAC aux dépens du premier. Cette modulation consistera à prélever aux agriculteurs 3 % du montant des aides qui leur sont versées, après application d'une franchise de 5 000 euros, ce taux passant à 4 % en 2006 puis 5 % en 2007. La nouvelle ressource ainsi dégagée devrait s'élever à 150 millions d'euros en 2006 et sera entièrement affectée au financement des aides au développement rural.
Certaines de celles-ci connaissent d'ores et déjà une évolution très favorable, en particulier pour les professionnels débutant leur activité. Ainsi, le plafond d'aide à l'installation est porté de 25 000 à 30 000 euros pour les nouveaux exploitants qui choisiront de bénéficier d'un appui technique lors des trois premières années d'installation. Les jeunes agriculteurs bénéficieront également d'une majoration des taux plafonds d'aide à l'investissement, ceux-ci passant de 5 à 10 % du capital investi.
Votre rapporteur se réjouit de cette montée en puissance des aides communautaires au développement rural, dont le développement est nécessaire pour dynamiser les campagnes françaises et accompagner l'évolution de la profession agricole vers des modes de production privilégiant la qualité et le cadre de vie. La France devra évidemment veiller à la stabilité durable du budget global accordé à ses agriculteurs au titre de la PAC (10,2 milliards d'euros en 2004, voir I B 1). Cette stabilité est en principe garantie jusqu'en 2013 du fait de l'accord conclu le 26 juin au Luxembourg mais pourrait être mise à mal par l'élargissement de l'Union européenne à des pays dont l'agriculture est moins performante.
Comme d'autres activités économiques, l'agriculture doit faire face à une mondialisation qui tend à placer chaque producteur en situation de concurrence au niveau mondial et remet en cause les politiques de stabilisation et de protection des marchés. Pour éviter que cette évolution ne conduise à une concurrence anarchique, des accords commerciaux doivent être conclus, en recherchant l'implication du plus grand nombre de pays possible. Cette démarche régulatrice a été consacrée par la création, en 1995, de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui offre un cadre unique à toutes les négociations commerciales - cette création résulte de l'accord de Marrakech qui avait conclu, le 15 avril 1994, le « cycle de l'Uruguay » consacré à l'Accord général sur le tarif douanier et le commerce (GATT).
Le cycle de négociations ouvert le 14 novembre 2001 à Doha devait être conclu avant le 1er janvier 2005 mais n'a désormais que peu de chances d'aboutir, en raison de l'échec de la conférence ministérielle qui s'est tenue à Cancun du 10 au 14 septembre 2003.
Le volet agricole de ce « cycle de Doha » a fait l'objet en mars 2003 d'un accord relatif aux « modalités » de négociation et objectifs communs aux partenaires, accord qui avait déjà été difficile à obtenir en raison d'une forte tension. Cette dernière, qui est la cause de l'échec du sommet de Cancún, provient d'un double affrontement entre les pays développés et les pays en voie de développement (« Groupe des 21 » conduit par le Brésil), qui leur reprochent, avec l'appui d'analyses du FMI et de l'OCDE, de pratiquer du fait de leurs subventions une sorte de dumping (vente en dessous du coût de production pour conquérir des marchés) empêchant leur développement et leur autosuffisance alimentaire.
Cette analyse les amène à défendre une organisation plus libérale des marchés agricoles, alors même que les pays les moins avancés (PMA) ne sont pas en mesure de rivaliser avec la compétitivité naturelle de pays émergents tels que l'Argentine ou l'Afrique du Sud. L'alliance nouée entre ces deux groupes de pays pour critiquer les effets pervers de la PAC est d'autant plus surprenante que l'Union européenne accorde un accès préférentiel à son marché aux produits en provenance de nombreux PMA, du fait des accords conclus à Lomé en 1975. En outre, l'Union européenne est incontestablement le premier importateur mondial de produits agricoles provenant des pays en voie de développement.
Par ailleurs, si les Etats-Unis et l'Union européenne n'ont guère eu l'occasion de s'affronter lors du sommet de Cancùn, leurs intérêts restent largement divergents. Ainsi, les Etats-Unis ont doublé, depuis le Farm Act de 1996, leurs dépenses publiques de soutien à l'agriculture. En revanche, entre 1992 et 2001, l'Union européenne a réalisé de gros efforts, puisque les subventions à l'exportation sont passées de 25 % à 5,2 % de la valeur des exportations agricoles. Au cours des cinq dernières années, la dépense publique par agriculteur s'est stabilisée à 5 000 dollars dans l'Union européenne, alors qu'elle a bondi de 2 500 à 15 000 dollars aux Etats-Unis.
La position des Etats-Unis est d'autant plus ambiguë que leurs soutiens internes se cessent de s'accroître. Ainsi, les paiements directs de l'administration américaine aux agriculteurs atteindraient 21,4 milliards de dollars en 2003, en hausse de 80 % par rapport à 2002. A titre d'exemple, les prêts de commercialisation (« marketing loans »), qui sont des subventions à l'exportation déguisées accordées aux agriculteurs américains, ont atteint en 2001 un record de 8,2 milliards de dollars. Il convient de rappeler qu'à ces aides directes s'ajoutent près de 100 milliards de dollars d'aides indirectes, versées au titre de l'agriculture, de l'alimentation, de l'environnement et du développement rural. Par ailleurs, les Etats-Unis pratiquent une aide alimentaire variable aux pays en développement (1,4 milliard de dollars en 2002), qui a l'apparence de la générosité mais permet en réalité d'écouler la surproduction américaine et de conquérir des parts de marché.
Fondamentalement, les négociations agricoles du cycle de Doha étaient donc engagées dans un contexte dégradé, les Etats-Unis n'ayant pas véritablement intérêt à accepter une concurrence plus encadrée compte tenu de l'importance croissante de leurs soutiens internes.
De son côté, l'Union européenne a cherché à limiter l'ampleur des critiques adressées à la PAC en la réformant à nouveau (voir III A) et en proposant d'importantes concessions à ses partenaires. Ainsi, les ministres des affaires étrangères de l'Union européenne avaient arrêté le 27 janvier 2003 à Bruxelles la position que la Commission européenne défendrait à l'OMC, consistant à réduire sur 6 ans :
- 36 % de la protection aux frontières (droits de douane) ;
- 45 % des dépenses pour les subventions à l'exportation ;
- 55 % des aides versées pour le soutien des marchés qui génèrent des distorsions des échanges.
Le projet de déclaration soumis à l'ensemble des délégations lors du sommet de Cancun allait bien au-delà de ces propositions et exigeait de l'Union européenne de nouveaux sacrifices agricoles (« élimination programmée à une date à déterminer » des subventions à l'exportation, réexamen des critères permettant de classer une aide dans la « boîte verte » - aides qui créent peu de distorsions et sont donc moins étroitement encadrées -, forte réduction des aides de la « boîte bleue » - aides à la maîtrise de la production). Ces sacrifices agricoles n'étaient pas compensés par des avantages dans d'autres secteurs, tels que les marchés publics ou les droits de douane industriels.
Il était également défavorable aux pays les moins avancés (PMA), qui n'étaient pas différenciés des autres pays en voie de développement (PVD), dont certains grands exportateurs comme le Brésil. La faiblesse du projet de déclaration sur le coton, produit essentiel pour plusieurs PMA d'Afrique qui souffrent d'une concurrence déloyale des Etats-Unis, a grandement contribué au blocage des négociations : les PMA concernés ont vécu comme une provocation la recommandation de « diversifier leurs économies dans lesquelles le coton représente la majeure partie du PIB ».
Non seulement les efforts de l'Union européenne en matière agricole n'ont pas été correctement pris en compte lors des négociations à l'OMC, mais en outre l'échec de celles-ci fait planer des menaces importantes sur le modèle agricole européen.
On pourrait certes se réjouir de l'échec d'une négociation où la Commission européenne pouvait être tentée d'utiliser le secteur agricole comme monnaie d'échange pour obtenir des concessions sur d'autres secteurs. Toutefois, votre rapporteur estime qu'en matière agricole, cet échec profite avant tout aux Etats-Unis, qui n'ont pas opté pour une stratégie « vertueuse » comme celle de l'Union européenne. Cette dernière a cherché à réduire les distorsions commerciales que la PAC occasionnait au niveau mondial, en espérant rompre ainsi son isolement dans les négociations et, une fois de nouvelles règles établies, pouvoir mettre en défaut les Etats-Unis. L'absence d'accord à Cancún permet au contraire aux Etats-Unis de réduire la contrainte que les règles définies à l'OMC pourraient faire peser sur la politique agricole américaine et de négocier avec certains pays, notamment d'Amérique latine, des accords bilatéraux qui renforcent leur position.
La réorientation de la PAC décidée récemment confirme la priorité donnée par l'Union européenne à des préoccupations qui ne sont pas strictement marchandes : les agriculteurs seront d'autant plus aidés qu'ils respecteront l'environnement, veilleront au bien-être de leurs animaux, s'assureront du respect de nombreuses précautions sanitaires ou accepteront de nouvelles exigences sociales. Ces normes pouvaient trouver un prolongement à l'OMC et constituaient un argument opposable aux tenants d'une libéralisation plus complète des productions agricoles. Dès lors que des contraintes supplémentaires ne sont pas imposées à ses partenaires commerciaux, l'Union européenne connaîtra une majoration de ses coûts de production agricole, qui risque de réduire sa compétitivité mondiale.
En France comme dans les autres Etats membres de l'UE, des compensations financières sont indispensables pour maintenir l'activité agricole dans les zones rurales fragiles et assurer la compétitivité internationale des produits agricoles. En effet, si les surcoûts ne sont pas compensés par une hausse des aides, de nombreux agriculteurs risquent d'être conduits à la faillite. A l'inverse, si les surcoûts sont compensés par la puissance publique, l'Union européenne redevient une cible potentielle à l'OMC, face à des pays émergents (Brésil, Argentine ou Afrique du Sud par exemple) qui sont structurellement compétitifs, sans avoir recours à d'importants soutiens internes. Le risque de condamnation future de la France par l'organe de règlement des différends de l'OMC semble toutefois plus limité tant que de nouvelles règles commerciales ne sont pas établies.
Par ailleurs, l'échec des négociations agricoles risquant de placer l'agriculture européenne dans une position défavorable du fait d'une concurrence internationale non régulée, votre rapporteur estime que les Etats membres de l'Union européenne doivent développer leurs avantages comparatifs sur un autre terrain, en accompagnant les efforts qualitatifs de leurs agriculteurs et en faisant reconnaître la spécificité de leurs productions.
D'un point de vue commercial, l'Union européenne a toujours intérêt à conclure des accords avec ses principaux partenaires commerciaux, pour valoriser les efforts qu'elle s'est imposé dans une logique qui n'était pas purement marchande. Si elle ne peut l'effectuer dans le cadre de l'OMC, elle conserve évidemment la possibilité de négocier des accords multilatéraux dans d'autres enceintes, ainsi que des accords bilatéraux. Dans cette perspective, elle devrait chercher à conclure des alliances commerciales avec des ensembles régionaux, sur le modèle des accords de Lomé conclus en 1975 avec les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.
D'un point de vue économique, l'Union européenne ne possède pas d'avantage structurel suffisant pour l'emporter au niveau mondial si la concurrence est pure et parfaite (par exemple, le coût de la main-d'_uvre y est beaucoup plus élevé que dans les PVD). Elle n'a aucun intérêt à ce que sa compétitivité soit uniquement appréciée sous l'angle du prix, celui-ci lui étant en général défavorable. Elle doit donc s'orienter, autant que possible, vers des productions très spécifiques et identifiables, car d'autres productions ne peuvent s'y substituer (la concurrence dite « imparfaite », du fait de l'absence d'homogénéité des produits). L'Union européenne peut s'appuyer sur une longue histoire de culture des terroirs, sur la qualité reconnue de productions traditionnelles qui doivent être signalées comme telles au consommateur par le biais de labels - « Label rouge » et appellations d'origine contrôlée (AOC) en France, « appellations d'origine protégée » au niveau communautaire. Sur ce terrain, l'agriculture des concurrents de l'Union européenne, et notamment des pays émergents, ne peut l'emporter en raison de son caractère jeune et « industriel », malgré la qualité de certaines productions.
Enfin, l'Union européenne devrait chercher à conforter le développement des soutiens internes dits de la « boîte verte », attribués en raison de considérations environnementales, sanitaires, sociales ou de bien-être animal. Ce faisant, elle limiterait en effet les risques de condamnation par l'organe de règlement des différends de l'OMC en cas de litige - de telles aides sont jugées moins distordantes pour le commerce international - tout en préservant l'équilibre financier des exploitations.
Cette évolution a effectivement été retenue dans la dernière réforme de la PAC et devrait s'accompagner d'un accroissement des aides accordées aux agriculteurs au titre du développement rural (le « deuxième pilier » de la PAC, le premier étant constitué des aides véritablement agricoles), cofinancées par le budget communautaire et celui des Etats membres.
La France s'est résolument engagée sur cette voie, puisque le ministre de l'agriculture a mis en place récemment des contrats d'agriculture durable (CAD) (voir II A 1) et a présenté le 3 septembre dernier en Conseil des ministres un projet de loi visant à favoriser le développement des territoires ruraux. Ce texte comprend de nombreuses mesures destinées à dynamiser l'activité économique et sociale dans les campagnes françaises et devra naturellement être enrichi dans ses aspects spécifiquement agricoles à l'occasion de son examen par la représentation nationale.
En conséquence, votre rapporteur estime qu'il convient d'accompagner, dans un contexte international plus incertain, l'évolution qualitative de l'agriculture européenne, la Commission européenne ayant pour sa part le devoir de faire valoir auprès de ses partenaires commerciaux les efforts réalisés dans le cadre de la réforme de la PAC. Au niveau national, de telles contraintes externes doivent naturellement conduire la représentation nationale à appuyer, en complément des soutiens communautaires, toutes les mesures permettant de faciliter l'adaptation des exploitations agricoles aux nouvelles exigences de la société et aux nouveaux défis de la concurrence internationale.
·
· ·
La préservation globale des crédits du ministère et les nombreux efforts réalisés, dans un cadre budgétaire contraint et un contexte international difficile, en faveur du renouveau de l'agriculture française et du monde rural, conduisent votre rapporteur à émettre un avis favorable à l'adoption du budget de l'agriculture pour 2004.
Lors de sa réunion du 16 octobre 2003, la commission a entendu M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, sur les crédits de son département pour 2004.
Après avoir remercié le ministre de sa présence, le Président Patrick Ollier a salué le respect, dans un contexte budgétaire difficile, des engagements pris devant la Commission s'agissant des aides à l'installation des jeunes agriculteurs et de la revalorisation des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). Il a souligné l'attachement des commissaires à ces soutiens, compte tenu de leurs racines agricoles et dans la perspective de la prochaine discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.
Il a par ailleurs félicité le ministre pour son implication continue au mois d'août dans la gestion de la crise provoquée par la sécheresse. Il a jugé infondées les critiques de la presse sur cette question, compte tenu de l'importance des aides mises en place, en liaison avec la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et le ministère de la défense, pour faciliter le transport de fourrage.
Il a enfin estimé nécessaire d'analyser les conséquences agricoles de l'échec, le 14 septembre dernier, des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancún.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a remercié la Commission de l'accueillir pour évoquer le budget de son ministère pour 2004, ainsi que l'ensemble des sujets liés à l'actualité agricole, au premier rang desquels la crise provoquée par la sécheresse et la suite de l'échec des négociations de l'OMC à Cancùn.
Il a d'abord souhaité effectuer une présentation globale des crédits consacrés à l'agriculture. Il a ainsi indiqué que, s'agissant du niveau européen, la France était structurellement le premier contributeur de la politique agricole commune (PAC), à hauteur de 14,2 milliards d'euros, les sommes qui lui sont reversées par l'Union européenne s'élevant à 11,8 milliards d'euros. Il a par ailleurs rappelé que l'Union européenne consacrait près de la moitié de son budget aux dépenses agricoles, mais que celles-ci ne représentaient qu'entre 1 et 2 % de l'ensemble des dépenses budgétaires consolidées effectuées au sein de l'Union européenne.
Il a précisé que la somme de tous les crédits engagés en France en faveur de l'agriculture s'élevait plus de 30 milliards d'euros, dont 10 millions d'euros provenant de l'Union européenne, 15 milliards d'euros du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), 5 milliards d'euros du budget du ministère lui-même, 600 millions d'euros des budgets d'autres ministères et 900 millions d'euros des collectivités locales. Il a souligné qu'en conséquence, en excluant les dépenses de protection sociale, le budget du ministère chargé de l'agriculture ne représentait que le tiers environ des crédits publics accordés à l'agriculture, ces derniers s'élevant à 15 milliards d'euros, dont 11,7 milliards d'euros réellement versés aux exploitations agricoles. Il a enfin remarqué que le budget domestique consacré à l'agriculture ne dépassait guère 20 % de l'ensemble des dépenses publiques en faveur de l'agriculture, en incluant les prestations sociales agricoles à ce total.
S'agissant de la répartition des crédits du ministère, il a indiqué que 8,2 % de ce budget était consacré au fonctionnement du ministère, à la rémunération et à la retraite de ses fonctionnaires, 12,3 % à la recherche et à l'enseignement agricole, dépenses de personnel incluses, et 79 % aux diverses interventions et aides publiques à l'agriculture. Il a reconnu que le budget prévu pour 2004 n'atteignait plus que 4,97 milliards d'euros contre 5,18 milliards d'euros en 2003, mais a jugé plus honnête, si des comparaisons devaient être établies, de raisonner à périmètre constant, ce qui conduit à mettre en évidence la stabilité des dépenses en faveur de l'agriculture. Il a ainsi souligné que le service public de l'équarrissage, qui avait reçu en 2003 un budget de 198 millions d'euros, ne figurait plus en 2004 dans le périmètre budgétaire du ministère, ses ressources provenant dorénavant d'une taxe spécifique, dont le produit prévisible de 176 millions d'euros serait affecté au Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA). De même, il a indiqué que le développement agricole, qui avait reçu en 2003 un budget de 27,5 millions d'euros au sein du ministère, était financé, à compter de 2004, par une taxe fiscale dont le produit devait être affecté à la nouvelle Agence pour le développement agricole et rural (ADAR). Il a donc estimé que le budget de l'agriculture était globalement reconduit en 2004 et que l'annonce par une dépêche de l'Agence France Presse d'une diminution de 4 % de ce budget ne reposait pas sur des comparaisons rigoureuses, le budget du ministère incluant en 2003 les crédits du développement agricole et du service public de l'équarrissage, ce qui n'est pas le cas en 2004.
Il a par ailleurs estimé que le budget de l'agriculture serait maîtrisé grâce à plusieurs sources d'économies.
Il a d'abord évoqué la réduction des dépenses engagées au titre de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (PMTVA), qui passent de 178 à 165 millions d'euros. Il a précisé que cette économie ne provenait pas d'une réduction du barème des aides mais uniquement du constat d'une diminution du nombre de demandes de primes.
Il a ensuite considéré que la baisse de moitié des crédits de paiement du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE) s'expliquait uniquement par le rattachement de ce compte d'affectation spécial au budget du ministère à compter de 2004, les importants reports constatés les années précédentes devant à présent être consommés pour assurer la stabilité des crédits en termes de gestion.
Il a également expliqué que la réduction du montant inscrit pour les prêts bonifiés à la forêt provenait de la prise en compte de l'arrivée à échéance des prêts accordés en 2000 pour faciliter le nettoyage des parcelles touchées par les tempêtes de décembre 1999.
Il a enfin précisé que la baisse des crédits prévus pour le fonds d'allègement des charges financières (FAC) s'opérait à législation constante et résultait de l'application de normes européennes. Il a rappelé que le budget pour 2004 avait été élaboré avant que tous les effets de la sécheresse ne soient connus et a annoncé que le FAC pourrait être abondé dans la loi de finances rectificative pour 2003.
Puis, il a indiqué que 65 mesures de simplification des procédures administratives avaient déjà été mises en _uvre depuis le début de l'année 2003.
Il a précisé que des économies avaient également été réalisées s'agissant du fonctionnement du ministère et des établissements publics, grâce à une optimisation des moyens alloués aux services. Il a ainsi rappelé qu'au niveau de l'administration centrale du ministère, la création de la direction générale de la forêt et des affaires rurales (DGFAR) avait permis de fusionner deux directions et qu'au niveau déconcentré, les directions régionales de l'agriculture et de la forêt (DRAF) étaient en cours de regroupement avec les directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) situées dans le chef-lieu de la région. Il a également souligné la maîtrise des dépenses de personnel du ministère, 323 des 767 emplois libérés par les départs à la retraite n'étant pas remplacés. Il a enfin annoncé la transmission depuis quelques jours du rapport demandé au ministère par le président de l'Assemblée nationale concernant la réforme des offices agricoles, qui vise, là encore, à adapter les moyens engagés aux besoins constatés.
Il a ensuite procédé à une présentation sectorielle du budget du ministère de l'agriculture pour 2004.
Il a indiqué que le premier grand objectif guidant l'action des services était le développement d'une agriculture écologiquement responsable et économiquement forte. Il a remarqué que la très forte revalorisation de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE) décidée dans le précédent budget serait complétée en 2004 par de nouvelles actions, notamment par le versement en une seule fois de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), qui représente 7 millions d'euros, ou encore par le maintien des crédits du fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA) à hauteur de 10 millions d'euros.
Il a également souligné la nouvelle revalorisation de 5 % du montant des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), cette hausse constituant la première étape d'une augmentation quinquennale de la fraction de ces primes correspondant aux 25 premiers hectares des exploitations concernées. Il a ajouté que les services de remplacement, permettant aux agriculteurs en difficulté de mener une vie presque normale, étaient financés, de même que les contrats d'agriculture durable (CAD), dont l'enveloppe budgétaire - confondue avec celle des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) - croît de 54 millions d'euros, c'est-à-dire de 27 %. Il a enfin précisé que l'augmentation de la dotation des mesures agri-environnementales est pérennisée du fait d'une stabilisation à 133 millions d'euros de l'enveloppe qui les concerne.
Abordant le second axe de la politique menée par le ministère en charge de l'agriculture, qui concerne la sécurité sanitaire et la qualité des aliments, il a rappelé l'augmentation de 15 % des crédits destinés au financement du programme d'analyse et de contrôle renforcé des produits phytosanitaires, indiquant que cet effort permettrait de prendre en charge les traitements de la sharka, de la chrysomèle du maïs ainsi que des viroses des cultures maraîchères. Il a précisé que la subvention du ministère à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) était accrue de 2,5 % en 2004.
Puis, il est revenu sur la réforme complexe du financement du service public de l'équarrissage, qui résulte de l'application de la réglementation communautaire. Il a ainsi indiqué que ces dernières imposaient une limitation des aides nationales au ramassage et à l'abattage des animaux, ainsi que le respect du principe pollueur-payeur, le ministère souhaitant pour sa part conserver un système de mutualisation des coûts. Il a rappelé que cette situation avait conduit le Gouvernement à créer une taxe, dont le produit prévisible de 176 millions d'euros serait affecté au financement du CNASEA, une telle taxe garantissant l'égalité entre producteurs et la sécurité du dispositif d'équarrissage. Il a ajouté qu'en contrepartie de la création de cette taxe, la taxe sur les achats de viande, dont le produit s'était élevé à environ 550 millions d'euros en 2002 et n'était pas été entièrement consacré au service public de l'équarrissage, était supprimée en 2004.
Il a ensuite indiqué que le troisième axe de la politique financée sur les crédits du ministère concernait la gestion durable du monde rural et de la forêt.
S'agissant de l'organisation de la filière bois, il a annoncé l'affectation de crédits supplémentaires en 2004, permettant de créer une première tranche de 30 emplois supplémentaires dans les centres régionaux de propriété forestière, 100 emplois au total devant être créés sur une période de trois ans. Il a également rappelé qu'un plan d'encouragement à la filière cheval avait été annoncé à la fin du mois de juillet dernier par le Gouvernement, comprenant des mesures fiscales inscrites en première partie de loi de finances, ainsi que des engagements budgétaires du ministère chargé de l'agriculture, conformément au contrat d'objectif conclu entre l'Etat et les haras nationaux.
Il a ensuite évoqué les crédits relatifs à la recherche et à l'enseignement agricole. Il a indiqué que l'enseignement agricole public serait soutenu de façon prioritaire, grâce au maintien des crédits consacrés aux dépenses pédagogiques des établissements publics et à la mise en place de crédits supplémentaires permettant de remplacer les surveillants d'externats et les maîtres d'internats, ainsi que de substituer aux emplois-jeunes des assistants d'éducation dans les mêmes proportions qu'au sein du ministère chargé de l'éducation nationale. S'agissant de l'enseignement supérieur, les crédits seront consolidés de façon à poursuivre la politique de contractualisation et à favoriser l'adaptation au modèle européen de formation, reposant sur une progression licence-mastère-doctorat. Il a ajouté que le budget réservé aux bourses, dans l'enseignement public comme privé, était augmenté de 2,3 %, de façon à assurer dans ce domaine une parité avec l'enseignement général et à accompagner un plus grand nombre de familles. S'agissant de l'enseignement agricole privé, le Gouvernement appliquera la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, dite « loi Rocard », et a aujourd'hui surmonté, grâce à un accord transactionnel, les difficultés posées par le recours introduit devant le Conseil d'Etat par l'enseignement privé. Il a enfin rappelé que le secteur de la recherche et de la formation avait été retenu par le ministère en charge de l'agriculture pour expérimenter la mise en place de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), avant que l'application de cette dernière ne soit généralisée, ce qui conduisait à une fongibilité des crédits destinée à accroître la responsabilité de gestion des établissements publics et à limiter ainsi une centralisation et une bureaucratie excessives.
S'agissant enfin de la protection sociale agricole, qui représente un important budget de 15 milliards d'euros, il a indiqué qu'un régime de retraites complémentaires obligatoires avait été mis en place depuis le 1er avril 2003 et que le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) bénéficiait désormais d'un renflouement budgétaire. Il a ajouté que la mensualisation des retraites, attendue depuis longtemps, serait effective dès le 1er janvier 2004, tandis que la réforme du BAPSA serait poursuivie, aboutissant à le transformer au 1er janvier 2004 en établissement public, du fait de la LOLF, alors qu'il s'agissait d'un budget annexe depuis le début des années 1960. Il a précisé que cette action avait fait l'objet d'un important travail de concertation avec la mutualité sociale agricole et les organisations professionnelles. Il a également annoncé que le nouvel établissement public porterait l'emprunt requis pour la mensualisation des retraites, et deviendrait dès le 1er janvier 2005 le « réceptacle » de la protection sociale agricole, sans que le caractère mutualiste ou le système électoral propres au BAPSA soient remis en cause par ce changement juridique.
M. Antoine Herth, rapporteur pour avis des crédits de l'agriculture, a rappelé que l'examen du budget de l'agriculture pour 2004 intervenait au terme d'une campagne agricole particulièrement mouvementée, qu'il s'agisse des phénomènes climatiques exceptionnels, de la réforme de la politique agricole commune (PAC), ou encore de l'ajournement des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancún.
Tout en constatant que l'agriculture ne représente plus que 2 % du produit intérieur brut (PIB) et n'occupe plus que 4 % de la population active, il a estimé que ce secteur d'activité avait été au c_ur de l'actualité et avait démontré son importance à l'occasion des incendies estivaux ayant ravagé les forêts et les friches.
Il a jugé que le budget présenté, à hauteur de 5 milliards d'euros pour l'Etat, montrait que le Gouvernement avait choisi de reconduire l'effort budgétaire en faveur de l'agriculture, tout en exigeant une optimisation des crédits ainsi qu'une modernisation des services. Il a rappelé que l'effort de l'Etat représentait, en excluant le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), environ un tiers des concours publics à l'agriculture, les contributions de l'Union européenne et des collectivités territoriales représentant respectivement 10 milliards d'euros et 900 millions d'euros.
Il a souhaité que la cohérence et la répartition des ressources soit contrôlées de façon permanente, ajoutant que cette démarche faisait l'objet de négociations régulières à Bruxelles, était confirmée au niveau national par la mise en _uvre progressive de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, et serait bientôt renforcée au niveau local grâce au projet de loi relatif à la décentralisation.
Il a estimé que cet impératif de cohérence expliquait les modifications de périmètre dont le budget de l'agriculture faisait l'objet. Il a ainsi évoqué la suppression, du fait d'exigences communautaires, de la taxe sur les achats de viande, remplacée par une taxe affectée au service public de l'équarrissage, la non-reconduction de la subvention exceptionnelle précédemment accordée à l'Agence pour le développement agricole et rural (ADAR), qui sera désormais alimentée par une taxe spécifique, ainsi que la budgétisation du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE).
Il a remarqué que le budget de l'agriculture pour 2004 masquait, derrière une apparente stabilité, un réel effort destiné à améliorer la productivité de la dépense publique. Il a ainsi précisé que les dépenses étaient ajustées aux besoins prévisibles, tandis qu'était réaffirmée l'importance des actions en faveur de la sécurité sanitaire des produits ou de la gestion durable des forêts. Il s'est également félicité des efforts de modernisation des services du ministère qui étaient entrepris, comme en attestent la fusion de deux directions, la maîtrise des effectifs ou la réduction des emplois précaires.
Il a approuvé l'octroi de moyens supplémentaires pour la formation agricole, jugeant qu'il s'agissait là d'un pari sur l'avenir. Il a par ailleurs jugé légitime de maîtriser le budget de la recherche en concentrant les efforts sur les sujets stratégiques et en veillant à développer les synergies avec l'enseignement agricole ainsi qu'avec d'autres ministères.
Il a salué l'augmentation de près de 10 % des crédits consacrés à l'installation des jeunes agriculteurs, ainsi que la hausse de 12,7 % des crédits alloués aux indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). Il a également précisé que les pratiques agricoles durables seraient fortement soutenues, grâce à un accroissement de 70 % du montant de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE) et à une hausse de 27,4 % des sommes consacrées aux politiques contractuelles. Il a estimé que cette dernière dotation faciliterait le respect des engagements pris s'agissant des contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et de la mise en place des contrats d'agriculture durable (CAD). Il a jugé que de tels efforts permettraient aux pouvoirs publics d'accompagner la transformation progressive des pratiques, l'éco-conditionnalité devenant un critère d'accès aux aides publiques mais aussi, probablement, d'accès au marché.
Il a indiqué que, parallèlement à la mise en place progressive des actions volontaires menées dans le cadre de l'« agriculture raisonnée », les professionnels s'interrogeaient sur les contours du nouveau programme de mise aux normes des bâtiments d'élevage. Il a ajouté que l'inventaire des besoins mettait en évidence l'insuffisance des capacités d'autofinancement des agriculteurs et en a conclu qu'il serait préférable de reconsidérer ce programme pour pouvoir respecter le calendrier communautaire, qui prévoit son achèvement dans un délai très court.
Par ailleurs, il a constaté que le projet de loi de finances pour 2004 annonçait la création de 15 emplois à l'ADAR mais ne précisait pas les critères d'attribution des crédits collectés par le biais de la taxe qui lui serait affectée, cette incertitude nourrissant l'inquiétude des instituts techniques.
Il a enfin observé que les crédits affectés au fonds d'allègement des charges financières (FAC) et aux agriculteurs en difficulté étaient plutôt en réduction dans le projet de loi de finances pour 2004, apparemment établi pour un contexte ordinaire. Il a souhaité savoir s'il était pertinent d'en déduire que les sommes nécessaires pour faire face à la crise de l'été figureraient dans le projet de loi de finances rectificatives pour 2003.
En conclusion, il a estimé que le budget devrait être adopté en raison de sa double ambition, contribuant à la fois à la maîtrise des dépenses publiques et au redéploiement des efforts de l'Etat sur ses missions régaliennes. Il a considéré que cette démarche permettrait également en 2004 de promouvoir un aménagement équilibré du territoire, de garantir une production de qualité et de former une nouvelle génération d'agriculteurs.
M. Michel Raison, s'exprimant au nom du groupe UMP, a rappelé la nécessité d'apprécier les budgets en fonction de leurs qualités intrinsèques et non de leur seule masse, une telle démarche répondant à une exigence d'honnêteté intellectuelle. Il a par ailleurs souligné l'importance de replacer le budget du ministère de l'agriculture dans le contexte plus large de l'ensemble des interventions effectuées dans le domaine agricole, ce qui suppose de prendre en compte non seulement les apports complémentaires de l'Union européenne, des collectivités locales et du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), mais aussi l'impact du fonctionnement des mécanismes de marché.
Il a félicité le ministre pour la poursuite de l'effort d'économie déjà engagé en 2002, en s'interrogeant néanmoins sur le fait que le nombre des agents du ministère était passé de 28 000 au début des années soixante-dix à 37 000 aujourd'hui, alors que la population agricole n'avait cessé de diminuer depuis lors. Il a approuvé la mise en place du versement en une seule fois de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), le maintien du fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture (FICIA), le relèvement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) au profit des exploitants installés dans les zones désavantagées, le supplément de crédits de 54 millions d'euros dégagé en faveur des CTE et des contrats d'agriculture durable (CAD), le maintien à haut niveau de la prime herbagère agri-environnementale (PHAE), favorable aux régions où la terre est difficile à labourer, ainsi que la poursuite du soutien aux structures en charge de la surveillance sanitaire. Il a noté que la mensualisation du versement des retraites aux agriculteurs correspondait à la réalisation d'une promesse.
Il a souhaité savoir dans quelle mesure il serait possible, tout en respectant l'obligation d'une concertation avec la Commission européenne, de déconcentrer la mise en _uvre du PMPOA pour en améliorer l'efficacité. Il s'est ensuite inquiété du risque que la taxe d'abattage remplaçant la taxe sur les achats de viande ne soit répercutée par les abattoirs vers l'amont des filières, au détriment des éleveurs, pénalisant en particulier la filière porcine. Il a enfin regretté le montant globalement trop réduit des crédits dégagés en direction des agriculteurs en difficulté.
Il a enfin souligné la pertinence de l'approche des dossiers par le ministre, ainsi que son attitude d'ouverture et de respect vis-à-vis de la population des agriculteurs, qui constitue déjà pour eux une forme de soutien, face aux difficultés qu'ils ont à affronter.
Mme Marilyse Lebranchu, s'exprimant au nom du groupe socialiste, a d'abord souligné la faible lisibilité des dispositions budgétaires relatives à l'agriculture, une certaine imprécision entourant par exemple le devenir des crédits de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). Elle a souhaité obtenir des précisions concernant la répartition des 323 emplois supprimés du fait du non-remplacement de certains départs en retraite, indiquant sa crainte que des missions essentielles, comme celles relatives aux contrôles, ne s'en trouvent pénalisées. Elle a constaté que les crédits affectés à la gestion des crises, au travers du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), semblaient peu élevés compte tenu des besoins créés par la sécheresse de l'été. Elle a donc souhaité qu'un effort budgétaire particulier soit effectué pour abonder ce fonds, malgré la règle constitutive imposant une contribution à parts égales des professionnels concernés et de l'Etat, pour éviter les opérations de déstockage, qui viendraient peser sur les cours, et créer ainsi une nouvelle situation de crise. Elle a observé que le relèvement du montant des ICHN les laissait néanmoins à un niveau très inférieur à celui attendu par les agriculteurs.
Elle a par ailleurs réclamé la mise en place d'un instrument de suivi prévisionnel de la mise en _uvre des contrats d'agriculture durable (CAD). Elle a enfin regretté que l'évolution de statut du BAPSA lui permette d'échapper au contrôle du Parlement, ainsi que l'absence de mise en place du dispositif de transfert de la retraite au profit du conjoint survivant. Elle a ajouté que les progrès effectués en matière de soutien à l'installation des jeunes ne permettaient absolument pas d'atteindre les objectifs fixés en 1994, que le soutien accordé aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) traduisait une préférence discutable pour une extension des exploitations plutôt que pour une augmentation de leur nombre, et que les offices agricoles disposaient de crédits insuffisants pour encourager comme il le faudrait le développement de productions à plus forte valeur ajoutée.
Félicitant le ministre pour sa présence sur le terrain pendant la canicule, M. François Sauvadet, s'exprimant au nom du groupe UDF, a néanmoins estimé que les problèmes agricoles liés à la sécheresse étaient encore importants, et interrogé le ministre sur les mesures qui pouvaient être prises, conjointement avec le ministre chargé des transports, afin d'améliorer l'acheminement par la SNCF du fourrage disponible dans le nord de la France.
Il a également demandé si les conséquences très importantes de la canicule sur les forêts avaient fait l'objet d'une évaluation par les services du ministre, compte tenu des enjeux économiques liés à leur exploitation dans les territoires ruraux.
Notant que ce projet de budget succédait à la révision de la PAC, il a désiré savoir si cette réforme avait conduit à une amélioration des marges de man_uvre financières à l'échelon national, notamment dans la perspective du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Il s'est en outre interrogé sur les mesures prises pour améliorer la consommation des crédits communautaires, soulignant que l'objectif principal était une consommation efficace des crédits.
Rappelant que les CTE étaient dans une phase de mise en _uvre, il s'est en outre interrogé sur l'importance de leur financement dans le projet de loi de finances pour 2004 et sur les objectifs retenus dans la perspective des CAD.
Il s'est en outre félicité de la fongibilité et de l'augmentation du montant des crédits destinés à la formation professionnelle et à l'apprentissage, mais a souhaité savoir si ces crédits permettraient de couvrir les besoins de financement des établissements d'enseignement tant publics que privés.
Il s'est en outre interrogé sur les conséquences financières pour les éleveurs des nouvelles mesures prises dans le domaine de l'équarrissage.
Il s'est ensuite alarmé de la baisse des crédits destinés aux offices et à la promotion des produits agricoles français à l'étranger, notamment ceux de la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA), estimant que ce recul risquait de porter atteinte à la reconnaissance de la qualité des produits des petits exploitants français à l'étranger, au moment précis où la France doit engager une réflexion sur sa politique de promotion agricole.
Il a par ailleurs exprimé les mêmes inquiétudes que Mme Marylise Lebranchu au sujet de la transformation du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) en établissement public, estimant que cette transformation risquait de réduire le contrôle du Parlement sur son financement. Il a en outre souligné le paradoxe selon lequel le produit de la taxe sur le tabac permettait à la fois d'assurer un financement pérenne et d'accroître la lutte contre le tabagisme, une baisse de la consommation risquant d'amoindrir les recettes.
S'exprimant au nom du groupe des Député-e-s communistes et républicains, M. André Chassaigne a qualifié de surréaliste le projet de budget en raison du contexte dans lequel il s'insérait.
Rappelant qu'il avait envoyé au ministre des questions écrites au sujet de la canicule, il a estimé que la gestion de cette crise majeure devait être examinée avec la plus grande circonspection. Il a par ailleurs souhaité connaître les mesures prises pour faire face aux conséquences de la sécheresse au cours des prochains mois, notamment s'agissant des difficultés d'acheminement du fourrage par voie ferroviaire. Il a en outre déploré que les prix agricoles n'aient pas été plafonnés pendant cette crise, ouvrant ainsi la voie à une spéculation très préjudiciable aux petits exploitants.
Abordant des problèmes plus structurels, il a demandé si le projet de loi de finances pour 2004 avait pris en compte les conséquences du désengagement européen en matière d'agriculture, sanctionné par l'accord de Luxembourg réformant la PAC, et avait augmenté en conséquence les crédits destinés à ce secteur au niveau national. Il s'est en outre demandé si l'échec des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) au sommet de Cancún ne rendait pas nécessaire une révision de l'accord de Luxembourg, faute de quoi les agriculteurs subiraient à la fois les mesures prises au niveau communautaire et celles résultant des négociations commerciales internationales.
S'agissant des mesures budgétaires du projet de loi de finances pour 2004, il s'est interrogé sur l'opportunité de réduire les crédits destinés aux offices, dont les missions consistent à anticiper les crises et, le cas échéant, à en réparer les conséquences dans le domaine agricole. Il a en outre souligné l'hostilité des principaux syndicats agricoles à la baisse des crédits consacrés aux CTE, aucun crédit n'ayant par ailleurs été prévu au profit des CAD. Il a ensuite déploré la réduction des crédits destinés à la promotion des produits agricoles français, alors que le marché mondial est désormais entièrement libéralisé.
Il s'est en outre alarmé de l'évolution des crédits destinés à la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA), dont l'installation est désormais effectuée dans la moitié des cas sans cette dotation mais avec l'aide plus limitée des collectivités locales. Il a donc souhaité une réforme des critères d'éligibilité à cette aide.
M. André Chassaigne s'est ensuite inquiété de la réduction probable du contrôle parlementaire sur les comptes du BAPSA, du fait de la transformation de ce budget annexe en établissement public. Il a en outre déploré que la modification de ses ressources ait essentiellement pénalisé les petits agriculteurs, dont les cotisations d'asurrance vieillesse ont parfois augmenté de près de 50 %. Il a enfin estimé nécessaire une réforme des retraites agricoles, le dispositif de surcompensation conduisant à ne pas prendre en compte, pour le calcul des droits à la retraite, les années travaillées avant l'installation de l'agriculteur.
En réponse aux premiers intervenants, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a apporté les précisions suivantes :
- la réforme du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) met en place, en raison des exigences de la Commission européenne, un dispositif excessivement complexe aboutissant parfois à des règles contradictoires, en particulier dans les zones vulnérables. Un effort de simplification est donc conduit en concertation avec Mme Roselyne Bachelot, ministre de l'écologie et du développement durable. Le fait que la réglementation communautaire impose que 80 % des crédits affectés à ce programme soient alloués aux actions conduites dans les zones vulnérables pose, en outre, un problème particulier, car il a pour effet d'entraver la conduite d'actions hors de ces zones bien que des financements soient disponibles. Un assouplissement de cette règle est donc nécessaire. D'une manière générale, la réglementation tendant à la maîtrise des pollutions d'origine agricole se révèle difficile à gérer et constitue le premier sujet de préoccupation des exploitants sur le terrain, notamment dans les filières avicole, bovine et laitière. La mobilisation du Gouvernement est donc totale pour l'améliorer ;
- sur le plan budgétaire, la modification des règles d'utilisation du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE), dont les moyens seront, à compter de 2004, consacrés exclusivement à la politique de l'eau, rend nécessaire l'augmentation des crédits du ministère de l'agriculture destinés à la maîtrise des pollutions d'origine agricole. Le projet de loi de finances pour 2004 prévoit donc d'allouer 68 millions d'euros d'autorisations de programme à l'article budgétaire correspondant (l'article 30 du chapitre 61-40) qui était doté de 34 millions d'euros en 2003. Cet article budgétaire finance également des subventions spécifiques aux zones de montagne pour compenser les surcoûts de construction des bâtiments d'élevage. La ventilation des crédits de cet article entre les deux types d'actions qu'il finance sera déterminée en concertation avec les organisations professionnelles agricoles dans les prochaines semaines ;
- l'Agence de développement agricole et rural (ADAR), établissement public qui succède à l'Agence nationale pour le développement agricole (ANDA), sera mise en place dès le début du mois de novembre. Le produit de la taxe unique sur le chiffre d'affaires des agriculteurs qui lui sera affecté devrait être supérieur d'environ 10 millions d'euros aux prévisions et permettra donc un financement conforme à ce qui a été envisagé avec les professionnels. Les craintes portant sur l'action territoriale de cette agence, c'est-à-dire sur les subventions aux chambres d'agriculture, ne sont pas justifiées car les subventions correspondantes seront, globalement, conformes à ce qui était prévu. Les agriculteurs et les représentants des filières seront majoritaires au conseil d'administration de l'ADAR et il est souhaitable - et probable - que chaque filière, et notamment la filière viticole, qui est celle pour laquelle les interrogations sont les plus fortes, bénéficie d'un « droit de retour » légitime. La continuité du financement des instituts techniques, auparavant effectué par l'ANDA, sera assurée. En la matière, il conviendra de passer d'une logique d'abonnement à une logique d'appel à projets, ce à quoi les instituts techniques sont prêts. Enfin, la spécificité de l'action en faveur de la filière viticole, qui a été soulignée à juste titre, conduira à mettre en place des mécanismes adaptés ;
- la sécheresse qui a frappé l'agriculture française est apparue fin juin, s'est confirmée en juillet puis s'est aggravée en août. Le Gouvernement s'est efforcé d'être aussi réactif que possible, même si un problème conjoncturel, le transport des fourrages, a créé une grande émotion. L'exaspération des agriculteurs qui n'ont pas constaté l'enlèvement de la paille et du foin disponibles, ou de ceux qui n'ont pas reçu les fourrages attendus, est compréhensible. Il convient pourtant de constater qu'il était impossible de transporter en un mois tout le fourrage nécessaire pour faire face à une sécheresse centennale, malgré les efforts importants accomplis tant par la SNCF que par l'armée et les transporteurs privés. Sur le plan financier, la volonté du Gouvernement de faire jouer la solidarité nationale a été annoncée dès le début du mois de juillet, aucun chiffre n'étant alors donné car il était trop tôt pour le faire. Les professionnels s'en étant émus, une enveloppe financière de 37 millions d'euros et une aide au transport du fourrage avoisinant 45 euros par tonne ont été annoncées à leur demande. Ce dernier montant a été donné, peut-être maladroitement, comme ordre de grandeur de l'aide au transport, mais la situation est évidemment très différente selon les départements en fonction, d'une part, du coût de transport des fourrages - qui dépend de la distance - et, d'autre part, du montant des aides décidées, le cas échéant, par les conseils généraux et régionaux. L'équité ne suppose donc pas, en l'espèce, un traitement identique dans tous les départements. La première distribution d'aides a d'ailleurs conduit trois départements qui en ont bénéficié à restituer à l'Etat des moyens inutilisés, démarche qui est exemplaire. Les phénomènes de spéculation ne doivent pas être exagérés d'autant que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) s'est fortement mobilisée pour éviter tout dérapage ;
- s'agissant du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), certaines productions spécifiques, comme les volailles, n'y sont pas éligibles. Le ministère a néanmoins voulu que ces productions puissent être dédommagées des effets de la canicule grâce à un dispositif « cousu-main » et, à cet effet, il a été fait appel au fonds d'allègement des charges (FAC) et au fonds destiné aux agriculteurs en difficulté, dit « Agridif ». Ainsi, un système d'aides d'un montant de 500 millions d'euros a pu être mis en place et une bonne part de cette somme a déjà été versée aux agriculteurs concernés. On doit néanmoins souligner la nécessité, en loi de finances rectificative, d'abonder les crédits du FNGCA, le budget du ministère chargé de l'agriculture ne pouvant à lui seul supporter la charge due à une sécheresse centennale. On doit noter, sans esprit de polémique, que le FNGCA a manqué de crédits ces derniers temps : sous le précédent Gouvernement, il avait été insuffisamment doté et le présent Gouvernement a décidé, en 2003, de le ponctionner en faveur du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA). Une telle situation n'est pas choquante, dès lors que la solidarité nationale intervient lorsque des difficultés, telle la sécheresse, surviennent ;
- les crédits consacrés aux fonds FAC et Agridif ont été revus à la baisse dans le projet de budget pour 2004, en application d'une récente directive européenne qui restreint le champ d'intervention de ces fonds. Toutefois, cette diminution des crédits a été décidée à une époque où les conséquences de la sécheresse n'avaient pas été pleinement mesurées. Ces fonds seront donc eux aussi abondés en loi de finances rectificative pour 2003 ;
- la question de l'équarrissage est un sujet complexe et sensible. On doit tout d'abord rendre hommage à l'action du précédent Gouvernement, qui a eu à faire face à une situation très difficile du fait de la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). Un dispositif d'urgence était indispensable et il a été effectivement mis en place. La situation actuelle est différente : la France doit se conformer aux règles communautaires relatives à la prise en charge du service public de l'équarrissage. Le système actuel repose sur une taxe parafiscale sur les achats des viandes, dont le produit, d'un montant de 550 millions d'euros, n'est affecté que pour un tiers à l'équarrissage, les deux tiers restants étant affectés au budget général et donc en quelque sorte détournés de leur objet initial. Cette taxe sera supprimée en 2004 et remplacée par une nouvelle taxe d'équarrissage, dont le produit attendu s'élève à 176 millions d'euros. Cette nouvelle taxe sera perçue au niveau des abattoirs, qui bénéficieront par ailleurs d'un plan d'accompagnement. Il sera néanmoins nécessaire d'étudier de manière distincte le secteur porcin, en concertation avec les professionnels de la filière. Certes, le nouveau dispositif suscite des interrogations, voire des oppositions ; il était néanmoins indispensable ;
- s'agissant des moyens en personnel du ministère chargé de l'agriculture, 767 départs en retraite sont prévus en 2004 et donneront lieu à la suppression de 323 emplois, soit un taux de non-remplacement de 42,11 %. Ces suppressions sont réparties comme suit : en administration centrale, 23 emplois seront supprimés pour 39 départs à la retraite prévus, soit un taux de non-remplacement de 59 % ; dans les directions régionales et départementales de l'agriculture et de la forêt, 219 départs à la retraite sont prévus et 111 emplois sont supprimés, soit un taux de non-remplacement de 50,68 % ; dans les directions départementales des services vétérinaires, 105 départs à la retraite sont prévus et 50 emplois sont supprimés, soit un taux de non-remplacement de 47,62 %. Pour l'ensemble des services déconcentrés, le taux de non-remplacement se situe donc à 49,69 %. S'agissant de l'enseignement technique, 350 départs à la retraite sont prévus et 125 emplois sont supprimés (taux de 35,71 %) ; pour l'enseignement supérieur, 51 départs sont prévus et 14 emplois sont supprimés (taux de 27,45 %), enfin dans la recherche 3 départs sont prévus et aucun emploi n'est supprimé. Au total, le taux de non-remplacement dans l'enseignement , inférieur à celui des services administratifs, s'élève à 34,4 % et un effort a été consenti pour faire porter les suppressions davantage sur l'administration centrale que sur les services déconcentrés ;
- le dispositif CTE a été suspendu en 2003, non parce que le Gouvernement était opposé à sa philosophie contractuelle, qui était pertinente, mais parce qu'il n'était pas maîtrisé budgétairement. En effet, lors de la mise en place des tout premiers CTE, le coût du dispositif était estimé à 22 000 euros par exploitant. En 2003, il s'élevait en réalité à 44 000 euros par exploitant, soit le double. A raison de 500 000 exploitants, le coût des CTE se serait donc élevé à 20 milliards d'euros sur cinq ans, alors que le budget du ministère chargé de l'agriculture s'élève à 5 milliards d'euros. Il était donc impossible de poursuivre dans la même voie. En outre, on a constaté, lors des derniers mois d'existence des CTE, un véritable engorgement dans le traitement des dossiers, ces contrats étant finalement perçus comme une aubaine en raison du non-plafonnement du dispositif. Le CAD sera quant à lui plafonné à 27 000 euros, un sous-plafond d'un montant de 15 000 euros étant prévu pour les investissements ; le dispositif a été élaboré dans un souci de déconcentration permettant de l'adapter aux situations départementales. L'objectif initial consistait à lancer les premiers CAD en 2003. Cela n'a pas été possible, car leur mise en _uvre supposait préalablement de déclasser du domaine législatif les dispositions relatives aux CTE, qui sont en réalité du domaine réglementaire. Cette longue procédure, ainsi que les négociations avec la Commission européenne, expliquent le retard pris dans le lancement des CAD. Aujourd'hui, la circulaire relative aux CAD a enfin été publiée et le dispositif est applicable.
Il convient de souligner que le ministère ne s'est pas fixé d'objectif en termes de nombre de CAD souscrits. En effet, il n'y a pas de « droit au CAD » et il faut éviter de retomber dans le travers des CTE, qui étaient initialement une mesure agri-environnementale puis ont évolué pour devenir une sorte d'aide au revenu des agriculteurs, voire un « RMA » (« revenu minimum agricole »). Le CAD n'a pas vocation à devenir un substitut au revenu : il s'agit d'une mesure agri-environnementale, assortie d'un cahier des charges précis.
Les moyens affectés aux CTE en 2001 ont été de 61 millions d'euros en loi de finances initiale (LFI), auxquels s'ajoutaient 88 millions d'euros de reports disponibles pour des paiements de l'ordre de 80 millions d'euros. En 2002, la LFI les a dotés de 76 millions d'euros, les reports ont été de 106 millions d'euros ; le collectif a permis d'ajouter 119 millions d'euros, pour 203 millions d'euros de paiements. En 2003, la LFI y a consacré 200 millions d'euros, les reports ont été de 100 millions et les paiements seront donc de 300 millions d'euros. Les crédits disponibles pour les paiements sont donc passés, en deux ans, de 80 à 300 millions d'euros.
Pour 2004, la loi de finances prévoit, sans reports, une dotation de 254,7 millions d'euros, en baisse certes, mais l'ensemble des CTE et CAD seront honorés, une grande partie des investissements réalisés dans le cadre des CTE ayant déjà été financée et donc payée. Plusieurs milliers de CAD seront d'ailleurs signés d'ici la fin de l'année, puis en 2004 ;
- s'agissant du BAPSA, la nouvelle procédure est le résultat de l'application de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Il convient de se souvenir que cette loi a été adoptée à l'unanimité, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée. Il conviendrait de trouver une solution, avec les présidents des deux assemblées, pour que la question, importante, de la protection sociale agricole soit malgré tout débattue au Parlement ;
- les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ne sont remises en cause ni dans leurs structures, ni dans leur philosophie. Effectivement, dans le cadre de la préparation du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, la fédération nationale des SAFER a proposé un élargissement de leurs missions à l'aménagement foncier, proposition qui n'a pas été retenue. Plus largement pourtant, dans le cadre de la préparation de la future loi de modernisation agricole prévue en 2004, une vraie question de fond devra être abordée, celle de l'adaptation des structures agricoles, compte tenu de la réforme de la PAC, mais également de l'évolution de la société et du cadre de vie. Il convient d'analyser les causes de la diminution des installations, qui sont au nombre de trois : en premier lieu, l'absence de perspectives économiques stables pour l'agriculture, même si le maintien du budget communautaire pour les 10 prochaines années et des quotas laitiers jusqu'en 2013 devrait améliorer les choses ; ensuite, les blocages techniques importants à l'installation, qui sont en cours de résolution s'agissant de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs (DJA) ; enfin, la faible attractivité du monde agricole, notamment de l'élevage, au regard des nouveaux modes de vie, même si l'augmentation des crédits pour services de remplacement est un élément favorable. Il s'agit là d'un véritable sujet de société ;
- on n'a effectivement pas encore mesuré toutes les conséquences de la sécheresse et des incendies estivaux sur la forêt française. Lorsque cette évaluation sera finalisée, des mesures d'urgence seront financées en loi de finances rectificative ;
- s'agissant des marges de man_uvre pour la mise en _uvre de la PAC, plusieurs questions se posent : celle du calendrier en premier lieu, l'application devant être effective au plus tard en 2007, et la position des syndicats agricoles connue avant toute prise de décision ; la question ensuite des formules de découplage possibles, la décision devant être prise avant la fin de l'année. La position du monde agricole est, là encore, attendue mais un découplage horizontal pour la filière végétale, et vertical pour la filière animale, pourrait être intéressant ;
- la hausse des crédits « deuxième pilier » de la PAC devrait être utilisée pour renforcer les mesures agri-environnementales, pour développer des fonds de gestion de crise, notamment pour le porc et la volaille, filières qui ne disposent pas d'organisations communes de marché (OCM), et pour améliorer le financement des mises aux normes en matière environnementale ou de bien-être animal ;
- la promotion de la production agro-alimentaire française est importante. Le ministère de l'agriculture, en lien avec celui du commerce extérieur, tient à définir une vraie stratégie en ce domaine. Le rôle de la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA) et celui de l'association Ubifrance doivent être mieux articulés ;
- la fongibilité ne signifie pas un regroupement de tous les crédits mais seulement que les chefs d'établissements disposeront de davantage de moyens pour gérer librement leur budget ;
- la question des offices a fait l'objet d'un amendement en loi de finances initiale pour 2003. Le ministère a demandé deux rapports à des missions d'inspection : le premier sur les marges existant en matière de promotion et de soutien, les règles européennes de marché obligeant à un recalage ; le second sur une meilleure organisation de ces offices au moindre coût.
Ces rapports ont été rendus, transmis au Président de l'Assemblée nationale et devraient être distribués à l'ensemble des parlementaires afin qu'un débat éclairé s'engage entre le Gouvernement, le Parlement, les offices et les professionnels ;
- on ne doit pas remettre en cause l'accord conclu en juin dernier au Luxembourg pour réformer la PAC du seul fait de l'échec du sommet de l'OMC à Cancún, d'autant plus que les débats de fond sur l'agriculture n'ont jamais vraiment eu lieu. L'Union européenne a abouti à un texte consensuel qu'il convient de préserver, car elle était ainsi psychologiquement en position de force pour les négociations commerciales internationales.
Plusieurs orateurs ont alors interrogé le ministre.
M. François Brottes, après avoir manifesté son soutien aux mesures décidées lors du Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) de décembre 2002, a rappelé que les incendies de forêt de cet été avaient touché 52 000 hectares, soit 2,5 fois plus que les autres années, les dégâts affectant essentiellement les forêts privées. Il a donc demandé au ministre pourquoi aucune disposition spécifique n'avait été prévue pour réparer les dommages causés par les incendies et s'est inquiété que les dotations budgétaires pour les massifs forestiers fassent au contraire l'objet de restrictions sans précédent telles que la baisse des emplois dans les forêts publiques, alors que seuls 30 des 100 emplois annoncés ont été créés pour les forêts privées, ou encore la baisse des crédits du Conservatoire national de la forêt méditerranéenne. Il a également souligné que la baisse de 20 millions d'euros des crédits versés à l'Office national des forêts (ONF) au titre du versement compensatoire aux communes forestières constituait une rupture des engagements de l'Etat envers les élus locaux.
M. Jacques Le Guen s'est interrogé sur les modifications intervenues en 2003 s'agissant du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE), celles-ci ayant conduit à une baisse des crédits versés aux collectivités locales, et a souhaité savoir si les conventions antérieures pourraient être respectées.
Il a par ailleurs noté que l'accord conclu en juin 2003 à Luxembourg avait été suivi de l'adoption d'un compromis avec l'Allemagne, prévoyant une reconversion de certaines zones céréalières dans la production de fruits et légumes. Il a donc souhaité savoir comment ce compromis pourrait être respecté sans remettre en cause certains principes de la réforme de la PAC.
Il a ensuite évoqué l'enseignement agricole et a regretté la modestie des crédits prévus pour la formation en alternance dans les zones rurales.
Il a enfin remercié le ministre pour son implication dans le dossier de l'échalote.
M. Pierre Micaux a suggéré que les dispositions de l'article 21 du chapitre 61-40 du projet de loi de finances pour 2004 soient reconsidérées dans la future loi de décentralisation afin de tenir compte de la distinction établie depuis un an entre les crédits du FNDAE et ceux du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA). Il a indiqué que, comme d'autres élus, il s'inquiétait de la modicité des crédits affectés à l'économie forestière et a souhaité obtenir des précisions sur le versement compensatoire à l'ONF. Il a par ailleurs rappelé son attachement à la mise en _uvre du plan d'épargne forestière.
Il a enfin signalé l'inquiétude grandissante des vignerons de Champagne au sujet de la baisse des crédits de l'Institut national des appellations d'origine (INAO).
M. Jean-Pierre Grand s'est interrogé sur la reconduction du dispositif établi en faveur de 5 000 hectares de vignobles dans le département de l'Hérault.
M. Alain Gouriou s'est inquiété d'une éventuelle remise en cause, après l'échec du sommet de Cancún, du principe annoncé en juillet 2002 par le ministre, selon lequel la production de fruits et légumes sur les zones soumises au découplage des aides ne souffrirait pas d'une concurrence accrue. Il s'est ainsi élevé contre la dérogation accordée aux céréaliers, leur permettant de percevoir leurs anciennes primes tout en convertissant leurs terres à la production de fruits et légumes, soulignant les risques de distorsion de concurrence qui en résulteraient. Rappelant l'importance des enjeux financiers en cause, qui atteignent 320 euros par hectare, soit à peu près un milliard d'euros de fonds communautaires, il a souhaité une évolution de ce projet.
M. Serge Poignant a tout d'abord indiqué que les commissions de l'agriculture des parlements nationaux de l'Union européenne, rencontrées à Rome les 2 et 3 octobre derniers, c'est-à-dire après l'échec des négociations de Cancún, partageaient pleinement la position du Gouvernement français en faveur d'une agriculture axée prioritairement sur une production de qualité, la défense des terroirs et l'aménagement du territoire.
Concernant l'INAO, il a appelé à débloquer au plus vite les crédits gelés en 2003, qui s'élèvent à 500 000 euros.
S'agissant de la nouvelle taxe d'équarrissage, il a suggéré que des dispositions spécifiques soient prises pour éviter de pénaliser les éleveurs de porcs.
Il a enfin souhaité savoir si des CAD pouvaient être signés avant la fin de l'année 2003, ce qui supposerait la publication très rapide d'arrêtés et de circulaires, et s'ils pourraient être conclus en dehors des zones couvertes par le programme « Natura 2000 ».
M. Philippe Martin (Marne) a souhaité obtenir des précisions sur le financement par une taxe de l'Agence pour le développement agricole et rural (ADAR), qui succède à l'Association nationale pour le développement agricole (ANDA), et s'est interrogé sur la part qui reviendrait dans ce cadre à l'Institut technique du vin (ITV).
Abordant le problème de la situation de l'INAO, il a déploré que les dotations de l'Etat soient aujourd'hui réduites alors même que les missions de cet organisme ont été accrues. Il s'est aussi inquiété de l'augmentation des importations d'acide tartrique de synthèse en provenance de Chine, l'innocuité de ce produit n'ayant pas été prouvée.
En réponse aux intervenants, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a apporté les précisions suivantes :
- les crédits en faveur de la forêt inscrits dans le projet de loi de finances pour 2003 ne prennent pas en compte les dommages créés par la sécheresse et les incendies estivaux, les crédits nécessaires pouvant être réajustés en cours d'année. Le Conservatoire national de la forêt méditerranéenne est loin d'être sacrifié même si ses crédits baissent légèrement, passant de 9,8 à 9,5 millions d'euros. Par ailleurs les efforts de reconstitution des forêts ravagées par les tempêtes de décembre 1999 seront poursuivis, tandis que la réforme de l'ONF sera menée à son terme conformément au contrat signé avec l'Etat, valable jusqu'en 2006.
- s'agissant du FNDAE, dont les ressources destinées au PMPOA ont été supprimées l'an dernier à la suite d'un amendement parlementaire, il convient d'observer qu'il a accumulé un très important retard dans la consommation de ses crédits. Ainsi, au 31 décembre 2002, le montant des autorisations de programme non affectées atteignait 1,15 million d'euros dans le département de l'Aube, et 305 000 euros dans celui du Finistère. Cette situation témoigne d'une lourdeur globale des procédures de gestion, même si des différences peuvent exister à ce niveau d'un département à l'autre. En tout état de cause, la politique d'intervention en faveur de la protection des ressources en eau fera prochainement l'objet d'un projet de loi, qui sera présenté par le ministère chargé de l'écologie. Pour ce qui concerne le ministère de l'agriculture, la capacité d'intervention dans le domaine de l'assainissement se limite aux crédits récupérés sur ceux du FNDAE et dorénavant mobilisés de façon indépendante dans le cadre du PMPOA ;
- en ce qui concerne le découplage des aides aux cultivateurs de légumes, il convient de rappeler qu'aux termes de l'accord de Bruxelles, qui avait ouvert aux Etats la possibilité d'accorder ces aides, deux règles avaient été fixées en même temps pour faire barrage aux risques de pratiques anti-concurrentielles : d'une part, il était interdit de cultiver les légumes sur des surfaces antérieurement affectées à d'autres productions agricoles ; d'autre part, le dispositif des aides devait faire l'objet d'un réexamen annuel pour repérer d'éventuelles distorsions de concurrence. La refonte des aides intervenue en Allemagne, selon une logique non plus sectorielle mais territoriale, s'est traduite par une baisse moyenne des aides, de plus petits montants étant accordés à un nombre plus élevé de producteurs. Les cultivateurs de légumes ont globalement été bénéficiaires de cette réforme. Toutefois, la réforme de la PAC décidée au Luxembourg a conduit à geler les quantités produites à leur niveau actuel. Dans ces conditions, la modification du dispositif des aides en Allemagne ne peut conduire à aucune hausse de production, puisque les surfaces cultivées ne peuvent toujours pas s'étendre par reconversion des exploitations. Dans tous les cas de figure, la France conserve le droit d'enjoindre à la Commission européenne de prendre des mesures de sauvegarde si elle constate qu'une mauvaise mise en _uvre de la réforme de la PAC conduit à des distorsions de concurrences ;
- les difficultés budgétaires de l'INAO sont le résultat de vingt années de gestion trop laxiste, ayant eu pour résultat un gonflement exagéré des dépenses de fonctionnement par rapport aux crédits d'intervention. Cette dérive a été masquée pendant plusieurs années, tant que le budget de l'Etat pouvait augmenter ses dotations grâce au gonflement des recettes résultant mécaniquement de la croissance. L'Etat doit désormais faire face à un déficit de 360 milliards d'euros, et à un service de la dette qui est devenu sa première dépense, ce qui lui interdit de continuer à accorder des subventions sans exiger une rigueur accrue. La cohérence politique impose en effet que les attentes exprimées par les Français conduisent les services financés par leurs impôts à tenter de maîtriser leurs dépenses. S'agissant de l'INAO, une solution va être recherchée à court terme en utilisant les ressources que peut procurer le dégel de certains crédits, mais un assainissement des conditions de gestion de cet établissement est indispensable.
- la mesure de reconversion qualitative différée, dont l'acceptation par la Commission européenne avait été difficile, a heureusement reçu un bon accueil. Il est néanmoins nécessaire de continuer à évaluer son efficacité en concertation avec les professionnels ;
- s'agissant du service public de l'équarrissage, il convient effectivement de prendre en compte la filière porcine ;
- les CAD ne concernent pas spécifiquement le réseau Natura 2000, même si les deux dispositifs se chevauchent ponctuellement ;
- s'agissant de l'ITV, un retour à la filière viticole doit être encouragé ; par ailleurs les agriculteurs sont majoritaires au conseil d'administration de l'ADAR, et la filière viticole sera désormais représentée dans ce cadre ;
- s'agissant de l'utilisation de l'acide tartrique dans les pratiques _nologiques, ce dossier est suivi de près sans permettre à ce stade de prendre une décision ;
·
· ·
La Commission a ensuite examiné les crédits de l'agriculture pour 2004.
Conformément aux conclusions de M. Antoine Herth, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'agriculture et de la pêche : agriculture pour 2004.
_________________
N° 1112 - 02 - Avis de M. Antoine Herth sur le projet de loi de finances pour 2004 - Agriculture
- Cliquer ici pour retourner au sommaire général
- Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires