N° 1113

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2003

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2004 (n° 1093),

TOME III

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COOPÉRATION ET DÉVELOPPEMENT

PAR M. JACQUES GODFRAIN,

Député

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SOMMAIRE

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INTRODUCTION 5

I - MAINTENIR LES MOYENS DE LA COOPÉRATION ET DE
     L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT (APD)
7

II - DÉVELOPPER DES ACTIONS DE COOPÉRATION DANS
      DES DOMAINES CIBLÉS
19

CONCLUSION 36

AUDITION DES MINISTRES 39

EXAMEN EN COMMISSION 49

LISTE DES PERSONNALITÉS ENTENDUES 51

ANNEXE 1 542

ANNEXE 2 597

ANNEXE 3 59

ANNEXE 4 60

ANNEXE 5 63

Mesdames, Messieurs,

L'échec à Cancun du Sommet de l'OMC a mis plus que jamais en relief l'urgence d'une politique d'aide extérieure à l'égard des pays du Sud. Les égoïsmes et les égocentrismes ne constituent pas une politique face à la mondialisation. La moindre réforme en France ou dans l'Union européenne a des répercussions et se trouve analysée dans le village le plus reculé, voire la forêt ou le désert ; de même, ce qu'il advient dans certaines de ces zones a un impact en France.

Nul citoyen ne peut se désintéresser du Sud et notamment de l'Afrique. La situation mondiale a changé la donne et les crises récentes ont rappelé à toutes les puissances que les voix des pays du Sud comptaient sur la scène internationale et que les échanges politiques économiques et culturels avec ces pays étaient essentiels pour le Nord comme pour le Sud.

Depuis l'élection du Président Jacques Chirac en 2002 et d'une majorité parlementaire qui soutient son action, la France a renforcé ses liens avec les pays du Sud. Le Président de la République a rappelé à chaque occasion et dans différentes enceintes l'importance que la France y attache. Il s'est engagé à augmenter l'aide publique au développement. Il a apporté un soutien sans faille au Nouveau Partenariat pour l'Afrique et le développement (NEPAD). Lors du sommet du G8 à Evian, la France a joué un rôle moteur que les pays du Sud ont salué.

Aussi votre Rapporteur souhaite-t-il que l'aide publique au développement, la coopération multilatérale, mais surtout bilatérale soient les éléments essentiels de l'action extérieure de la France qui doit également s'efforcer de faire partager cette vision à ses partenaires européens.

Pour l'exercice 2004, les lignes budgétaires consacrées à cette action semblent prometteuses si aucun gel budgétaire n'intervient. En effet, dans un contexte de forte rigueur budgétaire, le budget du ministère des Affaires étrangères augmente de 2,61% et l'aide publique au développement (APD), qui mobilise 46% du budget, y est considérée comme une priorité. C'est en effet l'augmentation de l'APD qui explique cette hausse globale : hors crédits dédiés à l'APD, le budget est présenté, en baisse de 1,26%.

Parmi les membres du G8, la France demeurera donc le premier contributeur d'aide publique au développement. Ainsi, malgré les critiques acerbes de la Commission européenne sur son déficit budgétaire, la France s'efforce de respecter son engagement d'atteindre un niveau d'APD de 0,7% du PIB dans les années à venir, comme le Président de la République en a pris l'engagement.

I - MAINTENIR LES MOYENS DE LA COOPÉRATION ET
DE L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT (APD)

L'action extérieure de la France au cours de l'année écoulée a suscité une attente considérable auprès de ses partenaires du Sud et notamment dans tous les pays de la zone de solidarité prioritaire (ZSP). Certes, il apparaît que pour l'exercice 2004 le montant de l'APD sera accru, toutefois sera-ce suffisant pour pallier les effets pernicieux du gel des crédits en 2003 ?

A - Des moyens stables pour l'exercice 2004

1) Un volume de l'APD en légère hausse en 2004

De 1994 à 2000, l'évolution de l'APD française a été caractérisée par une baisse tendancielle qui n'a pas été propre à la France mais a affecté l'ensemble de l'APD fournie au niveau mondial. L'année 2001 a marqué une inflexion : le taux d'effort mesuré par le ratio de l'APD rapporté au PNB s'est stabilisé à 0,32% alors qu'il connaissait une baisse régulière depuis 1994. En 2002, sous l'impulsion du Président de la République, la France a accentué le redressement de son effort d'aide publique au développement : le ratio de l'APD rapporté au PNB s'élève à 0,36% en 2002. Cette progression se poursuit en 2003 et le ratio APD/PNB devrait atteindre 0,39% selon les estimations de la direction du Trésor. Cette augmentation est conforme à la volonté du Président de la République d'augmenter de 50% en cinq ans l'APD de la France. Ces chiffres continuent de placer la France au premier rang des pays du G7 dont le taux d'effort moyen est de 0,19% en 2002.

D'après les calculs de la direction du Trésor, le redressement de l'effort d'APD en 2003 se confirmerait mais il est lié à la forte progression des allègements de dette en 2003. En outre, l'impact du gel des crédits sur le volume de l'APD n'est toutefois pas encore clairement connu et pourrait être préoccupant.

Pour 2004, il est prévu que le volume d'APD atteigne 0,43% du PIB. Toutefois, le volume de l'aide gérée par le ministère de l'Economie et des Finances s'accroît, même si désormais les contributions au Fonds européen de développement (FED) sont gérées par le ministère des Affaires étrangères. Cela ne serait pas sans conséquences si un gel des crédits intervenait, le calcul du montant de la contribution de la France au FED ne relevant pas des compétences de ce ministère. On pourrait alors craindre que pour éviter d'être débiteur du FED l'on utilise d'autres lignes budgétaires comme variable d'ajustement.

La coopération internationale

Aide publique au développement (APD)

versements nets en millions €

2001

2002

20031

20041

 

Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (charges communes + AFD2)

2 089.45

2 498.40

3 106.48

3 388.28

 

* Aide multilatérale

1 669.05

1 235.52

1 262.61

1 236.16

 

* Prêts du Trésor et dons du Trésor

-183.16

-156.50

-87.86

-186.50

 

* Annulations et consolidations de dettes

470.37

1 137.47

1 902.85

2 056.20

 

* Garanties et devises (zone franc)

85.74

63.03

     

* Dons projet et dons à l'ajustement structurel

 

50.00

50.00

150.00

 

* Prêts AFD

47.45

168.88

28.88

132.42

 

Ministère des affaires étrangères

1 107.04

1 703.02

1 607.10

1 670.69

 

* Coopération technique

570.90

577.01

584.63

562.18

 

* Fonds de Solidarité Prioritaire

129.28

109.30

120.00

140.00

 

* Concours budgétaires

17.04

23.41

20.00

15.00

 

* Dons projet et dons à l'ajustement structurel

168.72

166.80

173.30

178.00

 

* Transport d'aide alimentaire

19.10

17.84

17.39

18.13

 

* Autres dons

72.41

47.33

44.43

40.07

 

* Aide d'urgence

9.54

11.37

21.59

16.76

 

* Aide multilatérale (Nations Unies et FED depuis 2002)

120.04

749.96

625.76

700.55

 
 

Autres ministères

1102.74

1226.15

1333.31

1416.51

* Recherche

350.49

352.65

356.53

360.45

* Ecolage

451.19

547.36

638.86

648.45

* Aide alimentaire

38.85

16.96

16.53

17.23

* Divers

262.21

309.18

321.40

390.39

TOM

188.77

187.69

185.05

187.83

Coûts administratifs

199.63

206.09

212.27

218.64

APD totale

4 687.62

5 821.35

6 494.22

6 881.96

RNB en Mds EUR

1486.718

1527.333

1565.078

1619.283

Effort de l'aide en % du PIB

0.32%

0.38%

0.41%

0.43%

1 Prévisions en association avec le PLF 2004

2 Agence Française de Développement

L'APD française est accordée à plus de 64 pays, comme le montre le tableau figurant en annexe 1. Certes, il est nécessaire d'être présent sur tous les continents et dans de nombreux pays ; pourtant, il convient de rappeler que la France a créé en 1998 la zone de solidarité prioritaire (ZSP) définie par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) en fonction de la situation économique et financière des pays et de l'impact politique de l'aide bilatérale française. La ZSP dont le périmètre n'a pas été modifié depuis la réunion du CICID du 11 décembre 2002 comporte déjà 54 pays et s'établit comme suit :

On peut s'interroger sur la dimension de la ZSP et le volume d'APD hors ZSP. N'y a-t-il pas là un risque d'éparpillement de l'aide bilatérale, de saupoudrage inefficace en termes de visibilité de l'action extérieure ? Pourquoi ne pas concentrer l'effort de la France à certains pays, notamment les pays pauvres les plus endettés (PPTE) ? On pèserait alors au niveau bilatéral et multilatéral par le volume d'aide engagé.

2) Les crédits et le fonctionnement de la DGCID

a) Les moyens de la DGCID

Dans un contexte de stabilisation des dépenses de l'Etat, les crédits gérés par la DGCID passeront de 2 031,5 M€ en 2003 à 2 157,4 M€ en 2004, soit une augmentation de 6,2% (3 ,7% hors FED).

On note une augmentation sensible de la part de l'aide publique au développement sur les titres IV et VI. Le chapitre 41-43 : « concours financiers » connaît une augmentation de 28% grâce à une mesure nouvelle de + 35,5 M€ dont + 5 M€ pour les aides budgétaires et de 30,5 M€ pour faire face aux besoins en matière de dons en faveur de l'ajustement structurel. Pour faciliter la gestion de ce chapitre on a proposé dans la nomenclature budgétaire 2004 un regroupement des articles 20, 30 et 40 en un article 50 de prévision unique : « Concours financiers en faveur de l'ajustement structurel et contrats de désendettement-développement ».

Au chapitre 42-15 (article 70) « Fonds de coopération économique, social et culturel pour le Pacifique Sud » une mesure nouvelle et un transfert permettent le doublement de cette enveloppe (soit + 1,65 M€). Les crédits de paiement du chapitre 68-02 : « participation de la France au Fonds européen de développement » augmentent de 69 M€ par rapport à la dotation 2003 (soit + 13,9%). Les crédits de paiement du chapitre 68-91 « Fonds de solidarité prioritaire », connaissent un accroissement global de 28 M€ (soit + 25%). Un article 30 nouveau y est créé pour l'aide aux pays sortant de conflits, conformément à la résolution du CICID du 11 décembre 2002. Les crédits de paiement du chapitre 68-93 « Dons mis en _uvre par l'agence française de développement » augmentent de 21 M€ (soit + 15%).

b) Le fonctionnement de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID)

La réforme institutionnelle étant achevée et l'organigramme stabilisé, la DGCID a pu se consacrer à l'animation de la politique de coopération et d'aide au développement en s'attachant à moderniser aussi les instruments, les méthodes et les procédures.

Parmi les chantiers récents menés, quatorze Documents stratégiques-pays (DSP) ont été réalisés et une nouvelle génération est en cours d'élaboration. Une réflexion a été lancée sur les grandes thématiques transversales de la coopération. Un programme d'études prospectives est réalisé chaque année.

L'évaluation tend à devenir une étape normale du cycle des actions de coopération, notamment pour celles que finance le Fonds de solidarité prioritaire (FSP). Un programme d'évaluations rétrospectives de grande ampleur est réalisé chaque année. La modernisation de l'assistance technique a été très largement engagée avec l'harmonisation du régime juridique et statutaire des assistants en janvier 2002, l'élargissement de leur zone d'intervention, la création d'une « ligne souple » destinée à financer des missions de courte et moyenne durée et la création du Groupement d'intérêt public (GIP) « France coopération internationale » destiné à mobiliser des experts sur des missions de coopération internationale.

Les contrats de désendettement et de développement (C2D) qui constituent l'instrument bilatéral français d'annulation de la dette, ont été mis en place. Des documents sur les nouveaux enjeux de la coopération, ses réalisations et les grands objectifs de la réforme ont été publiés. Des rencontres de la coopération multilatérale ont été organisées en 2001, 2002 et 2003 ; des réseaux Internet et Intranet ont été développés en collaboration étroite avec la Direction de la Communication et de l'Information. La DGCID a commencé à se préparer à la mise en _uvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

3) Des contributions volontaires aux grandes agences internationales à accroître

Au cours de l'exercice 2003, le chapitre 42-32 article 10 (contributions volontaires aux organisations du système des Nations unies) dont la dotation initiale s'élevait à 48,86 M€, a dû faire face à des dépenses supplémentaires non prévues à hauteur de 3 M€ mais a été complété par des contributions versées à partir du chapitre 42-37 article 51 (Fonds d'urgence humanitaire), à hauteur de 6,35 M€, et du chapitre 42-37 article 52 (opérations exceptionnelles - aides aux sorties de crise) à hauteur de 1,8 M€. Si l'on fait abstraction de la dépense exceptionnelle de 2,1 M€ pour l'Unesco, les contributions volontaires se sont élevées à 55 M€.

La France ne figure dans aucune des principales institutions du système des Nations unies parmi les dix principaux contributeurs en raison de la faiblesse de ses contributions volontaires. En 2004, les crédits affectés aux organisations du système des Nations unies seront, au mieux, reconduits à l'identique, ce qui est regrettable. La France est passée du 12ème au 13ème rang pour les contributions volontaires en 2002 et du 4ème au 5ème rang pour les contributions obligatoires en 2004.

D'un niveau assez faible, les contributions volontaires, bien que s'ajoutant à des versements obligatoires, n'assurent pas globalement à la France, un niveau suffisant de crédibilité au sein des organisations elles-mêmes, ou globalement au sein du système des Nations unies pour engager des réformes du système qui toutes ont un coût en termes financiers et humains.

Au sein de l'aide multilatérale, qui représente à peine 10% depuis quelques années, l'arbitrage s'est fait en faveur de l'aide européenne et de l'aide transitant par les institutions financières au détriment du système des Nations unies. Cela conduit à une perte d'influence de la France dans les organisations du système des Nations unies et du Ministère des Affaires étrangères dans la gestion interministérielle de l'aide.

Votre Rapporteur souhaite donc que des choix clairs soient opérés. En effet, en période de restrictions budgétaires, la politique qui consiste à reconduire toutes les contributions volontaires sans modifier leur répartition se révèle contreproductive. Mieux vaudrait en effet en privilégier certaines, comme le PNUD, la FAO, le HCR, le PAM, ONUSIDA, dans lesquelles la France doit jouer un rôle important, disposant d'une expertise qui lui permet d'orienter les décisions. Or, le système actuel ne le permet pas. Il est extrêmement regrettable que les contributions volontaires soient ainsi figées sans réflexion stratégique sur la manière de conférer une visibilité et une efficacité à l'action de la France au sein du système des Nations unies.

B - Eviter le gel des crédits en 2004

1) Les conséquences du gel des crédits sur l'exercice 2003

Le gel des crédits sur les exercices 2002 et 2003 a gêné les actions de coopération extérieure de l'Etat et particulièrement celles engagées au titre de l'APD bilatérale, la seule directement perçue comme venant de la France par les Etats et les populations concernées.

Ainsi la régulation budgétaire s'est traduite sur les crédits de la DGCID par une annulation de 15,59 M€, une mise en réserve dite d'innovation de 8,71 M€, un gel de précaution, correspondant aux crédits d'APD, de 91,59 M€ en crédits de paiement (CP), et de 38,38 M€ en autorisation de programme (AP) sur le FSP et les dons-projets AFD. Le caractère cumulatif des baisses successives des crédits de paiement du FSP conjugué au gel des crédits décidé en février 2003 a mis le FSP en cessation de paiement ce qui n'est pas acceptable.

a) Des actions différées

Le gel des crédits a obligé la DGCID à revoir l'ensemble de la programmation de l'administration centrale et des postes. Elle a ainsi dû procéder à un abattement de 18 % sur ses crédits programmés. Cette réduction s'applique aux stages de courte durée, subventions et commandes aux opérateurs et autres organismes, subventions aux établissements à autonomie financière, invitations, crédits délégués et déconcentrés.

Le gel des crédits de report 2002, confirmé en avril 2003, et effectué sans aucun avertissement préalable, a accru la charge de plus de 24 M€. Il a obligé la DGCID à rechercher des économies. Ainsi une économie d'un million devrait être effectuée sur les bourses de longue durée. Surtout, 16,7 M€ devraient être économisées sur l'assistance technique. Certes, cette économie est obtenue sans rupture de contrats, car le ministère n'a pas pourvu, à la rentrée de septembre 2003, quelque 407 postes dont la création venait d'être décidée ou qui étaient l'objet d'un renouvellement. Les experts dont l'affectation a ainsi été suspendue pourraient dans leur grande majorité, être affectés en janvier 2004 si aucune mesure de gel n'était prise, ce qui est loin d'être certain. La baisse de l'assistance technique est réellement préoccupante comme le montre le tableau figurant en annexe 2. Cette baisse touche précisément les secteurs où la compétence française est internationalement reconnue : santé, agriculture, enseignement, appui institutionnel.

Ces mesures contraignantes ont paralysé la réalisation de projets de coopération pourtant engagés, mettant les postes dans des situations délicates vis-à-vis de leurs partenaires.

b) Des organisations de solidarité internationale (OSI) limitées dans leurs actions

Le programme d'appui au volontariat associatif résultant du décret du 30 janvier 1995 relatif aux volontaires et aux associations de volontariat pour la solidarité internationale permet d'aider les associations pour la couverture sociale, la formation, la gestion et la réinsertion des volontaires. L'aide ainsi fournie représente environ 55 % du coût du volontaire. Ce dispositif, géré par le FONJEP (Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire), concernait 24 associations agrées en 2000.

Or, pour l'exercice 2003, on constate une baisse des crédits consacrés au volontariat associatif due à la régulation budgétaire. Amputées de 10 % de leurs crédits dès le mois de février, ces associations ont subi le gel des crédits de report au mois de mai. La commande 2003 au FONJEP a été diminuée de 5,7 % en cours d'exercice pour faire face à cette situation.

Ainsi l'Association Française des Volontaires du Progrès s'est-elle vu imposer une baisse de 10 % de la subvention annuelle. De même l'appui au Comité de Liaison des ONG de volontariat (CLONG) a subi un abattement de 10 % afin de participer à l'effort d'économie. Toutefois les axes des cofinancements en faveur des OSI devraient être maintenus en 2004.

Bien que l'action des OSI soit aussi financée sur le FSP, la loi de finances 2004 ne confèrera aucune marge de man_uvre pour accroître le soutien à de nouveaux programmes, ni pour augmenter les moyens accordés aux actions de renforcement des collectifs représentatifs de la société civile française et des pays du sud.

Pourtant, la présence sur le terrain de ces organisations s'est intensifiée, notamment dans des pays qui ne faisaient pas partie de leur champ d'intervention historique. Plusieurs dizaines de nouveaux projets de lutte contre la pauvreté en Amérique Latine, au Moyen-Orient, en Asie et en Europe Centrale et Orientale n'ont pas trouvé de possibilité de cofinancement malgré la qualité incontestable de beaucoup d'entre eux.

La dimension des projets augmente du fait de la concertation des pouvoirs publics et des OSI et de l'expérience acquise. Les demandes de collaboration entre des partenaires du Sud et des associations françaises se multiplient. Les organisations non gouvernementales (ONG) françaises ont un rôle essentiel à jouer dans le renforcement des sociétés civiles du Sud et de l'Est très sollicitées aujourd'hui dans la définition et la mise en _uvre de programmes de lutte contre la pauvreté. Ce renforcement passe par des actions d'appui institutionnel à diverses organisations des sociétés civiles des pays concernés. Cet engagement des ONG françaises mériterait encore d'être renforcé et structuré pour contrebalancer l'influence des ONG anglo-saxonnes dans ces instances.

2) Une concertation entre le ministère des Finances et le ministère des Affaires étrangères à améliorer

Comme le montre le tableau ci-après, la chronologie de la gestion des crédits pour l'exercice 2003 fait apparaître un manque de concertation interministérielle préalable au gel des crédits comme si les articles 37-90, 37-95 du Titre III, 42-14, 42-15, 42-32, 42-37 du titre IV, 57-10 du titre V (voir tableau ci-dessous) étaient considérés dès l'annonce du gel le 3 février 2003 comme des variables d'ajustement.

Services

Chapitres

AP annulées

CP annulés

Titre III

Moyens généraux des services

Etablissements culturels, de

coopération et de recherche à l'étranger

Titre IV

Subventions aux opérateurs de l'action audiovisuelle

Coopération internationale et développement

Participation de la France à des dépenses internationales (contributions volontaires)

Autres interventions de politique internationale

Titre V

Equipements administratifs et divers

Totaux pour les affaires étrangères

37-90

37-95

42-14

42-15

42-32

42-37

57-10

`'

`'

`'

`'

`'

`'

5 290 000

5 290 000

5 430 000

2 670 000

1 690 000

11 270 000

5 000 000

630 000

31 390 000

En outre, le ministère des Affaires étrangères a dû faire face à un gel des crédits de reports le 15 avril 2003 sans avertissement préalable pour un montant de 133,84 M€, ce qui a désorganisé les postes et les projets de coopération. Quelques mesures de dégel partiel sont heureusement intervenues en mai, juillet et octobre 2003.

Si le gel des crédits est une pratique habituelle, il convient d'éviter que ne soient brutalement retardés, voire annulés, des projets de coopération bilatérale que la France s'est engagée à réaliser, soit en partenariat avec des organisations internationales, soit directement avec les responsables des pays concernés. Il y va de sa crédibilité et de la visibilité à l'étranger de son action extérieure, notamment en Afrique.

Pour 2004, il est hautement souhaitable d'éviter la brutalité de ces pratiques et surtout de maintenir à son niveau prévu l'APD bilatérale, faute de quoi la plus grande partie de l'aide publique française au développement transiterait par le Fonds européen de développement (FED) sans visibilité spécifique sur le terrain ni possibilité d'influer sur les décisions, alors que le besoin de France est exprimé dans toute l'Afrique et au-delà.

3) Un pourcentage important d'APD transitant par le Fonds européen de développement (FED)

Aide publique au développement de la France

Ventilation par instruments

Le tableau ci-dessus suggère que, si le volume de l'aide bilatérale française augmente en 2004 (6882 M€), la part des allègements de dettes (2056 M€) et de l'aide européenne (1365 M€) réduit en grande partie l'aide bilatérale réellement utilisée sur le terrain, ce dont les acteurs sur place se plaignent, notamment en Afrique.

C - Des réformes opportunes envisagées

Lors de la conférence des ambassadeurs d'août 2002, le Ministre des Affaires étrangères a ouvert le chantier de la modernisation de l'action extérieure de l'Etat avec pour objectif premier l'adaptation du ministère aux changements.

La conduite de ce chantier a été confiée à un Comité de pilotage des réformes mis en place à l'automne 2002 et placée sous la présidence de M. Hubert Colin de Verdière, secrétaire général du ministère. Ce Comité a élaboré deux documents : un livre blanc de présentation de ses travaux et une proposition de plan d'action stratégique comprenant 107 propositions. Ces documents, diffusés au sein du ministère lors de la Conférence des ambassadeurs fin août, ont été soumis par le Comité à l'appréciation du Ministre. Au préalable, le Ministre a demandé aux chefs de poste et aux directeurs de l'administration centrale de conduire des discussions avec l'ensemble de leurs collaborateurs sur ces propositions. En parallèle, les échanges entre l'administration et les organisations syndicales et professionnelles, suite aux réunions le 26 août 2003 des deux Comités techniques paritaires ministériels présidées par le Ministre, se poursuivent.

Lors de leur audition le 25 septembre 2003 par votre Rapporteur, M. Hubert Colin de Verdière, secrétaire général du Ministère des Affaires étrangères et M. Claude Blanchemaison, directeur général de la DGCID, ont évoqué les réformes en cours d'élaboration et les travaux du Comité de pilotage de la réforme qui a fait 107 propositions pour élaborer un plan stratégique affaires étrangères 2007 fondé sur trois axes de réforme : l'amélioration de la coordination, la responsabilisation des agents et l'accentuation du caractère opérationnel des actions.

1) Faire du ministère des Affaires étrangères le pivot de l'action extérieure de l'Etat

Le Comité de pilotage a suggéré des programmes d'action interministériels pour favoriser le travail conjoint du Quai d'Orsay et des autres ministères engagés à l'étranger, l'idée étant de mettre le ministère des Affaires étrangères au c_ur de l'action extérieure de l'Etat, ce qui aurait des répercussions importantes sur le mode de gestion de l'APD et de la coopération. L'ambassadeur serait alors le représentant de tous les ministères, le chef d'une équipe pluridisciplinaire, ce qui permettrait de mieux identifier l'action extérieure de l'Etat. Un conseil d'orientation stratégique serait institué, chargé de réfléchir aux principaux axes de l'action extérieure.

2) Redéployer les moyens et les personnels

La nécessité d'améliorer la coordination entre les services s'étant imposée, on évoque la création d'une direction collégiale composée du secrétaire général et de trois ou quatre secrétaires généraux adjoints qui serait chargée d'assurer le fonctionnement du ministère des Affaires étrangères exerçant une responsabilité sur des programmes identifiés au sein du budget en application de la loi organique sur les lois de finances (LOLF). Elle serait également chargée d'exercer des arbitrages internes.

Plusieurs fonctions pourraient être ainsi mieux coordonnées : fonction européenne, fonction économique, fonction stratégique ; l'animation et le suivi du réseau des postes seraient confiés aux directions géographiques. C'est aux directions géographiques que seraient adressées les propositions des postes pour les crédits d'intervention et les moyens de fonctionnement, ce qui implique que l'ambassadeur devienne l'animateur, le stratège et le coordonnateur dans son pays de l'action de la France. Un système d'information et de communication plus performant, des méthodes de travail plus adaptées et une meilleure gestion des personnels du ministère seraient le corollaire de cette réforme.

Il n'est pas question de réformer la DGCID mais de mieux organiser ses relations avec les autres directions et notamment les directions politiques. La DGCID aura pour tâche de restructurer le réseau des centres culturels et de mieux le coordonner avec celui des alliances françaises pour supprimer les doublons. De même, il lui faudra s'adapter à la gestion de contrats d'objectifs, ce qui pose le problème de la co-tutelle des ministères des affaires étrangères et de l'économie et des finances sur l'Agence française de développement (AFD), que votre Rapporteur a déjà regretté car elle génère des difficultés d'exécution des programmes sur place. De même sera-t-il nécessaire, en application de la LOLF, d'étendre les programmes et missions gérés par le Quai d'Orsay à l'ensemble de la coopération bilatérale

3) Evaluer l'impact de la coopération

Le Comité de pilotage suggère d'instaurer une action par objectif avec un contrôle de gestion et l'évaluation des résultats. Cela implique que les chefs de postes diplomatiques et consulaires, comme les directeurs de l'administration centrale, rendent compte de la gestion politique et administrative dont ils seront responsables, car la LOLF prévoit une évaluation annuelle des programmes et des actions budgétaires et l'établissement d'un compte rendu annuel.

Il est certain que la LOLF sera un puissant levier de changement des habitudes de la gestion publique et votre Rapporteur s'interroge sur la manière dont l'aide publique au développement et la coopération seront traduites en termes de programmes et de missions, car il faudra passer de l'actuelle gestion de moyens à une gestion par objectif.

II - DÉVELOPPER DES ACTIONS DE COOPÉRATION
DANS DES DOMAINES CIBLÉS

La coopération bilatérale gagnerait en efficacité, en visibilité et en influence à consacrer une part plus importante de l'APD aux actions et domaines dans lesquels l'expertise française est unanimement reconnue. Il en va d'ailleurs de même, cela a été souligné, des contributions volontaires aux organisations internationales. Il est vain de se livrer à un saupoudrage n'apportant de clarté ni dans les choix ni dans l'action.

Votre Rapporteur souhaite que soient considérés comme prioritaires la lutte contre les pandémies, le développement de partenariats renforçant l'appui institutionnel aux Etats, les aides d'urgence et les programmes d'aide alimentaire.

A - Accroître le rôle de la France dans la lutte contre les pandémies

1) Les actions entreprises

La lutte contre les pandémies, notamment le Sida, est vitale pour l'Afrique. En effet, la population totale de l'Afrique sub-saharienne était estimée, en 1999, à 591 millions d'habitants, contre 302 millions en 1975. Le taux moyen annuel d'accroissement de 1975 à 1999 s'établissait à 2,8%. A l'horizon 2015, la population, en tenant compte de la pandémie de Sida, s'élèvera alors à 866 millions, le taux annuel moyen d'accroissement passant à 2,4% entre 2000 et 2015. Ces chiffres globaux recouvrent, en fait, des situations très différentes.

En Afrique australe, où les pays présentent des taux de prévalence du virus dans la population adulte supérieurs à 20%, le taux d'accroissement annuel de la population sera dramatiquement réduit (0,3% en Afrique du Sud, 0,4% au Lesotho, 1,7% au Mozambique). La diminution de l'espérance de vie dans ces pays est d'ores et déjà observée depuis 1975 (moins 6 ans en Zambie, moins 3 ans en Afrique du Sud) et s'aggravera encore dans les prochaines années, pouvant aller jusqu'à 20 ans dans les pays les plus touchés. Dans ces pays, le nombre d'enfants dont un ou deux parents est décédé du fait du Sida représentera jusqu'à 15% des enfants en 2015.

La situation dans les pays de l'Afrique de l'Est et Centrale est moins dramatique aujourd'hui (taux de prévalence autour de 10% chez les adultes : 7,2% au Congo, 11,8% au Cameroun, 12,9% en République centrafricaine), mais pourrait rejoindre rapidement celle de l'Afrique australe en l'absence de programmes massifs de prévention et de soins.

En Afrique de l'Ouest, la pandémie atteint des taux très inquiétants en Côte d'Ivoire (9%) au Burkina Faso (6,3%) et au Nigeria (5,3%), mais reste limitée, comparativement, dans les pays du Sahel (taux inférieurs à 2% au Mali, Niger, Sénégal).

a) Les moyens mis en _uvre

On se reportera au tableau figurant en annexe 3.

- Au titre de l'aide bilatérale accordée aux pays de la ZSP, ce sont plus de 15 M€ qui sont affectés annuellement par le ministère des affaires étrangères via la DGCID à des projets de lutte contre le Sida, animés par une centaine d'assistants techniques et/ou par des organisations non gouvernementales dans 20 pays et une région (Caraïbes). Ces projets s'inscrivent dans les cinq priorités stratégiques définies par le ministère des Affaires Etrangères : approche globale de la prise en charge (médicale et extramédicale), vision régionale, implication des partenaires non gouvernementaux et des personnes atteintes, stabilisation et pérennisation des acquis en soutenant le renforcement des systèmes nationaux de santé, et développement de la recherche appliquée.

Ainsi, l'Agence nationale de recherche sur le Sida (ANRS) a consacré, en 2002, 8 M€ soit 20% de son budget à la recherche consacrée aux problématiques spécifiques du Sida dans les pays en développement.

La France est également l'initiatrice du projet ESTHER (Ensemble pour une Solidarité thérapeutique hospitalière en réseau) pour la prise en charge des personnes infectées par le virus du Sida. Des partenariats directs entre hôpitaux du Nord et du Sud sont en cours de constitution et devront faciliter l'extension du nombre de sites aptes à prescrire puis à contrôler les traitements antirétroviraux, donc l'accroissement du nombre de personnes recevant des traitements efficaces. Des programmes ont été lancés dans 9 pays en 2002 et 2003 et concernent plus de 40 établissements de santé en Afrique de l'Ouest et du Centre et en Asie du Sud-Est (9 M€ en 2002, financés par le budget du Ministère de la santé).

- Au plan multilatéral, la France appuie l'ONUSIDA (1,25 M€ en 2003). Dans le cadre de l'initiative de réduction de la dette des pays pauvres très endettés (PPTE), la France soutient l'élaboration par les pays concernés de contrats de développement et de désendettement (C2D). Dans ces contrats, 10% des sommes qui auraient dû être affectées au remboursement de la dette bilatérale seront affectés à des projets de lutte contre le Sida, soit 1 milliard d'euros dans les 15 ans à venir. Les contrats déjà signés en Ouganda et au Mozambique ont ainsi réservé une part importante de leurs montants à des actions de lutte contre le Sida (3M€ en 2002).

La France contribue à la lutte contre la pandémie à travers l'Union européenne (341 M€ sur 4 ans pour la lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme) la contribution française s'inscrit dans sa contribution générale au budget de la Commission.

En outre la France et le Royaume-Uni ont réussi à obtenir que la contribution globale de l'Union Européenne soit portée à 1 milliard de dollars par an (le montant des promesses européennes au 23 juillet 2003 s'élève à 465 M€ pour 2003 et 405 M€ pour 2004 à travers le Fonds mondial.

La France a d'ores et déjà contribué à hauteur de 50 M€ par an en 2002 et 2003 à titre bilatéral à ce Fonds mondial. (70% des dépenses du Fonds sont consacrés à la lutte contre le Sida).

En juin 2003, lors du sommet d'Evian le Président de la République a annoncé le triplement de la contribution française au Fonds mondial (soit 150 M€ par an de 2004 à 2006). La France devient ainsi le deuxième contributeur annuel à ce Fonds, après les Etats-Unis.

La France a proposé puis accueilli à Paris en juillet 2003, avec le soutien des autres membres du G8, une Conférence de soutien au Fonds mondial. En clôture de cette conférence le Président de la République et le président de la Commission européenne ont renouvelé leur engagement à soutenir la lutte contre le Sida dans les pays en développement, et à renforcer les moyens mis à la disposition du Fonds mondial avec l'objectif de parvenir à 3 milliards de dollars de recettes annuelles (1 milliard des Etats-Unis, 1 milliard de l'Union européenne et 1 milliard d'autres sources publiques et privées).

La France mène une action contre les autres endémies, et au-delà de la part de sa contribution annuelle au Fonds mondial utilisée pour la lutte contre la tuberculose (14%, doit 6 M€) et au paludisme (16%, doit 8 M€), la France intervient soit dans le cadre de projets de coopération bilatérale en santé (trypanosomiase en République démocratique du Congo, paludisme au Surinam...) soit à travers des organisations internationales sur des objectifs spécifiques : convention avec l'OMS pour soutenir l'initiative « faire reculer le paludisme (1,5 M€ sur 3 ans) et pour la lutte contre la trypanosomiase (1,5 M€ sur 3 ans), programme de lutte contre l'onchocercose et les maladies cécitantes avec la Banque mondiale (3,5M€ sur 3 ans), convention avec l'Union internationale contre la tuberculose et les maladies respiratoires (projet de 2,4 M€ sur 3 ans).

b) Les actions entreprises

Au-delà de la poursuite de ses actions de prévention et de sécurisation de la transfusion sanguine, la France a tout d'abord soutenu la création de centres de dépistage puis de prise en charge clinique et biologique des infections opportunistes du Sida dans le cadre des projets financés par le FSP : hôpitaux de jour à Yaoundé et à Maputo, renforcement des capacités de diagnostic biologique des hôpitaux à Bangui et à Ouagadougou et soutien aux structures associatives de prise en charge à Bamako).

A partir de 1997, et suite à la généralisation dans les pays développés de l'accès aux thérapies antirétrovirales, la France a très activement milité au sein des instances internationales afin de faire reconnaître par tous l'exigence de faire accéder les patients des pays en développement à ces nouveaux traitements. Les premiers projets financés par le Fonds mondial comportent ainsi dans 70% des cas des composantes d'accès au traitement qui permettront à 500 000 nouvelles personnes de bénéficier de ces thérapies d'ici 5 ans dans les pays en développement.

Actuellement, l'accès au traitement est ainsi reconnu par l'ensemble des acteurs internationaux comme une composante essentielle des programmes de lutte contre la pandémie, tant pour ses effets de réduction des souffrances et des morts liées à la maladie que pour son rôle incitatif vis à vis du dépistage. En juin 2002, l'Organisation mondiale de la santé a donné comme objectif la mise au traitement de 3 millions de personnes avant la fin de 2005.

Pour louables qu'elles soient, ces initiatives françaises manquent souvent de coordination. D'après le Professeur Marc Gentilini, Président de la Croix Rouge française, auditionné par votre Rapporteur le 24 septembre 2003, il est urgent de mener une réflexion sur la cohérence des actions menées.

2) Mieux coordonner la coopération en matière de santé

Le Professeur Marc Gentilini s'est déclaré amer et déçu du manque de cohérence et de réflexion sur la coopération sanitaire alors que le savoir-faire médical français est reconnu partout. Il a dénoncé la dispersion des moyens gérés par plusieurs ministères (Affaires étrangères, Santé, Economie et Finances, etc.). Selon lui, malgré le capital humain et technique dont dispose la France, on ne réfléchit pas assez à la manière d'utiliser au mieux toutes les ressources dont on dispose. La multiplicité des intervenants tant au sein de l'administration française qu'au sein de l'Union européenne complique singulièrement les actions de coopération et obèrent leur efficacité et leur visibilité.

Selon les responsables de la Croix rouge française, il convient non seulement de rendre les traitements contre le Sida accessibles en Afrique, mais surtout de mettre en place les structures appropriées pour assurer le suivi du traitement dans de bonnes conditions ce qui n'est pas toujours le cas. Selon eux, l'intervention française n'est pas mauvaise, mais elle est simplement disparate, désordonnée et aboutit à des incohérences.

Doté de moyens non négligeables (près de 10 M€), le dispositif ESTHER, censé procurer des moyens nouveaux aux plans nationaux de lutte contre le Sida et aux hôpitaux africains, a du mal à trouver son positionnement. Son rattachement au ministère de la Santé et une intégration à la délégation aux Affaires européennes et Internationales (DAEI), une dépendance absolue au ministère des Finances et à la direction du Trésor, posent problème. Ce dispositif devrait dépendre du ministère des Affaires étrangères ; on disposerait ainsi une vision d'ensemble des initiatives et moyens de la coopération bilatérale française en matière de santé qui suscite un intérêt fort dans le monde.

L'ampleur et la diversité des engagements français en matière de lutte contre le Sida a conduit en mars 2003 le Gouvernement à proposer un cadre de concertation et d'échange pour l'ensemble des acteurs publics et privés intervenant dans les pays en développement.Une plate-forme sur la lutte contre le Sida dans les pays en développement a été lancée, rassemblant lors de sa première réunion plus de 40 participants représentant les ministères, les entreprises privées, les instituts de recherche, la société civile à travers plusieurs réseaux associatifs, diverses fondations, des autorités rurales et scientifiques, ainsi que des organisations internationales impliquées dans le combat contre la maladie. Elle était co-présidée par la directrice du développement et de la coopération technique au ministère des Affaires étrangères et par le Président de l'Institut de recherche pour le développement (IRD).

Cette plate-forme se réunira quatre fois par an. Dans chaque réunion, un ou plusieurs membres présenteront leurs actions et un thème particulier sera traité tel la recherche internationale sur le Sida, l'accès aux médicaments pour les malades des pays les plus pauvres, le Fonds mondial pour lutter contre le Sida, la tuberculose et le paludisme. Cette initiative facilitera une plus grande synergie entre les différents acteurs, dans le respect des différences et des contraintes de chacun.

B - Favoriser les aides d'urgence et les programmes d'aide alimentaire

1) L'efficacité de l'aide humanitaire d'urgence

a) L'importance de l'action humanitaire

L'action humanitaire d'Etat est une composante importante de la politique étrangère de la France. En tant que pays membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, la France détient des responsabilités internationales majeures. Elle participe activement aux réponses qui sont apportées aux grandes crises humanitaires, issues notamment de conflits armés ou liées à des catastrophes naturelles. Cette action s'exerce à titre bilatéral, avec pour exemple récent d'action, l'assistance humanitaire d'urgence engagée en 2002 pour les populations vulnérables de Madagascar et de Palestine, en 2003 l'aide en faveur des populations victimes des combats en Irak et du tremblement de terre en Algérie.

La France participe également aux programmes multilatéraux développés au sein de l'Union Européenne et contribue à l'action de l'Office Humanitaire de la Communauté Européenne (ECHO) et à celle des agences d'aide humanitaire au sein du système des Nations Unies (HCR, UNICEF, PAM) par le biais de ses contributions obligatoires et volontaires. La France joue, enfin, un rôle important auprès du CICR, dont elle est devenue en 2002 l'un des principaux contributeurs.

L'action humanitaire d'Etat mise en _uvre ces trois dernières années témoigne de l'importance croissante prise par ce secteur dans la conduite de l'action extérieure de la France. Ainsi l'action menée en Algérie lors du tremblement de terre a eu un impact direct sur les relations des populations victimes avec la France. Elle a contribué à resserrer les liens entre les deux peuples. L'action humanitaire ne doit pas être perçue comme une suite de mesures conjoncturelles et réactives, imposées par des situations médiatisées ; c'est une véritable politique basée sur une affirmation claire des responsabilités et du rôle de la France et de l'Europe dans un monde où interdépendances et solidarités internationales ne peuvent être dissociées.

b) Les moyens de l'aide d'urgence humanitaire

Les moyens financiers destinés à l'aide d'urgence humanitaire sont prélevés sur la ligne budgétaire du Fonds d'urgence humanitaire (FUH), créé en 1989. Le Fonds d'urgence humanitaire dispose, depuis l'année 2000, de dotations relativement stables malgré les gels budgétaires : en 2000, 9,62 M€, en 2001, 9,26 M€ (dotation initiale) et une dotation supplémentaire de 1,524 millions d'euros exclusivement affectés à la crise afghane, en 2002, 9,26 M€, en 2003, 9,25 M€ (dotation initiale) et une dotation supplémentaire de 10 M€ exclusivement affectés à la crise irakienne. Les crédits devraient être reconduits en 2004.

Le FUH finance les opérations d'aide directe, menées par l'intermédiaire des postes diplomatiques et consulaires. Il délègue les crédits correspondant aux besoins exprimés permettant aux postes de répondre rapidement à des urgences ponctuelles. La fourchette des cofinancements se situe entre 16 000 € et 1M€. Le Fonds opère des versements exceptionnels à des organisations internationales pour soutenir un programme d'aide d'urgence.

L'action humanitaire d'urgence est l'un des domaines où la compétence française est unanimement reconnue. Il conviendrait de renforcer les moyens de ce Fonds.

2) Des actions à mener en liaison avec la FAO

a) Les moyens accordés pour l'aide alimentaire

L'aide alimentaire programmée française est fournie aux Etats récipiendaires à travers deux circuits distincts d'un point de vue budgétaire. La France contribue, par ses engagements communautaires, au financement d'environ 17,5% de l'aide alimentaire distribuée actuellement par l'Union européenne, soit 73,8 M€ sur un montant total de 422 M€. Conformément à la convention internationale relative à l'aide alimentaire (convention de Londres), ratifiée par la France le 30 juin 1999 et prorogée pour deux ans en juin 2002, l'engagement annuel de la France est fixé à 200.000 Tonnes équivalent céréales (TEC), sur un total d'environ cinq millions de TEC.

Parmi les contributeurs du Programme alimentaire mondial, la France figure au dixième rang en 2001 (35.882.000 dollars) et au seizième rang en 2002 (14.089.000 dollars), car la France a privilégié des actions bilatérales en faveur de l'Afghanistan au cours de l'année 2002 ce qui, à budget constant, n'a pas permis de maintenir le niveau de contributions multilatérales.

L'engagement français d'aide alimentaire programmée peut sembler modeste, à titre de comparaison le volume d'aide alimentaire des Etats-Unis est de plus de 2,5 millions de TEC par an. Toutefois, les efforts déployés pour une meilleure valorisation de l'aide française à travers la constitution de fonds de contrepartie alimentés par les achats sur les marchés locaux, a permis de faire de cet instrument un outil efficace d'aide au développement. Pour éviter les crises alimentaires, mieux vaut acheter des denrées sur place et ainsi promouvoir l'agriculture locale que recourir à des dons. Ainsi l'aide alimentaire programmée participe non seulement au renforcement de l'aide française pour hâter les sorties de crise mais s'intègre aussi dans un processus plus global de développement d'une sécurité alimentaire durable.

L'aide alimentaire programmée permet à la France d'être présente face aux besoins alimentaires conjoncturels dans le monde, ainsi que dans l'appui à des pays structurellement déficitaires, dans une logique de prévention des crises sur le long terme.

La gestion de l'aide alimentaire programmée relève de la responsabilité du Comité interministériel de l'aide alimentaire (CIAA) dont la présidence est assurée par le ministère des Finances. Participent avec voix délibérative à ce Comité, des représentants du ministère des Affaires étrangères, du ministère de l'agriculture. Des représentants d'autres ministères (transport par exemple) et des offices professionnels participent également à ces comités avec voix consultative.

b) La nécessité d'instaurer une meilleure coordination

La gestion des crédits de l'aide alimentaire s'effectue sur deux chapitres budgétaires distincts : ministère des Affaires étrangères pour le transport (chapitre 42-26 article 10) et ministère de l'Agriculture pour les produits (chapitre 44-23 article 10). Malgré des efforts importants de coordination pour harmoniser les procédures de gestion de ces deux chapitres, la gestion séparée des deux lignes budgétaires a conduit à des lenteurs importantes.

Le ministère de l'Agriculture s'est trouvé parfois doté très largement pour acheter les produits tandis que le budget du ministère des Affaires étrangères ne pouvait faire face aux coûts de transport en raison de leur augmentation. Ce circuit assez long et compliqué est tributaire de deux services financiers au lieu d'un. Le regroupement des lignes budgétaires auprès du ministère en charge de la coopération internationale permettrait une simplification des procédures, apporterait une plus grande souplesse de fonctionnement tout en réduisant considérablement les délais administratifs de mobilisation de l'aide programmée. Il permettrait également d'inscrire sans équivoque les interventions de la France en matière d'aide alimentaire dans une logique de coopération internationale et de développement dans les pays partenaires.

Il a d'ailleurs été souhaité par M. Henri Carsalade, sous-Directeur général du département de la coopération technique de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) entendu par votre Rapporteur le 13 octobre 2003. Celui-ci a insisté sur la baisse de l'APD pour l'agriculture, comme le montrent les tableaux figurant en annexe 4. Selon lui, l'agriculture et le développement rural ne sont plus des priorités. De ce fait, la sécurité alimentaire mondiale est loin d'être assurée. La priorité accordée au secteur rural est battue en brèche, en raison de la complexité institutionnelle, sociale et environnementale des questions de développement rural et parce que les pays en développement ont privilégié d'autres priorités sous la pression des institutions financières internationales qui considèrent que les projets de développement rural sont plus risqués et moins rentables.

Cependant, votre Rapporteur estime, comme M. Henri Carsalade, que l'agriculture et le développement rural ont un rôle fondamental dans l'économie et la sécurité alimentaire des pays en développement, car ils réduisent la pauvreté, les inégalités et l'instabilité et protègent les ressources naturelles et les héritages culturels.

Par ailleurs, M. Henri Carsalade s'est étonné de l'absence de synergies entre les différents organismes chargés de la recherche en matière agricole, tels l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), l'Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération (ORSTOM), les universités et les acteurs de la coopération.

L'éparpillement des structures, l'absence de concertation entre elles, nuisent à l'action de terrain, d'autant qu'il convient d'améliorer la productivité et la qualité de production du Sud pour obtenir l'autosuffisance alimentaire. M. Henri Carsalade a estimé que le recours au libéralisme ne résoudrait pas le problème agricole des pays en développement. Il a critiqué la politique agricole commune mal perçue par les pays du Sud, elle obère selon lui l'influence de la France dans un domaine de coopération dans lequel ses compétences sont reconnues. Il a insisté sur le rôle de la FAO dans la lutte pour l'autosuffisance alimentaire et les négociations nord-sud sur l'agriculture après l'échec du Sommet de Cancun.

Consciente de la nécessité d'agir sur le plan de la sécurité alimentaire, la France a renforcé son action contre la famine dans le cadre de la fondation FARM (Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde) comme l'a annoncé le Président de la République au congrès des jeunes agriculteurs, ce dont votre Rapporteur se félicite.

C - Développer les partenariats

1) Un soutien sans faille de la France au Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD)

a) Les initiatives prises dans le cadre général du NEPAD

Adopté à Abuja en octobre 2001, le NEPAD résulte de la fusion du « programme pour le millénaire » conçu par l'Afrique du Sud, rejointe par le Nigeria et l'Algérie, et du plan Oméga proposé par le Sénégal. Cette initiative africaine part d'un constat lucide : il est indispensable que l'Afrique pilote son développement, avec l'aide d'un partenariat solide avec les pays industrialisés.

Programme ambitieux, le NEPAD se décline en deux volets, politique et économique. Le volet politique se base sur les décisions des derniers sommets de l'OUA et insiste sur le rôle fondamental de la bonne gouvernance avec élaboration du mécanisme de revue par les pairs qui constitue l'une des innovations les plus prometteuses.

Le volet économique du NEPAD que constitue le c_ur du document approuvé par les Africains repose sur une vision à long terme du développement du continent. L'objectif du NEPAD est d'obtenir des financements à long terme afin de résorber les écarts qui séparent l'Afrique du monde développé dans sept secteurs prioritaires que sont les infrastructures, le développement des ressources humaines, de l'éducation et de la formation, la santé, les technologies de l'information et de la communication, l'agriculture, l'énergie, la diversification de la production et l'accès des exportations africaines aux marchés des pays développés. La culture et l'environnement font également l'objet d'initiatives spécifiques. Cependant, le financement du NEPAD bute sur une contrainte forte, le faible niveau d'épargne et d'investissement en Afrique.

Le NEPAD lance un appel en faveur de l'instauration de nouvelles relations avec les pays industrialisés et les organisations multilatérales et en faveur de l'appropriation des stratégies de développement par les Africains. Il interpelle les bailleurs de fonds sur les réformes qu'ils doivent eux-mêmes entreprendre pour atteindre une meilleure efficacité de l'aide. En réponse, le G8 a adopté à Kananaskis, en juin 2002, un plan d'action pour l'Afrique, qui reprend dans ses grandes lignes le programme du NEPAD mais laisse leur souveraineté aux pays donateurs dans la gestion de leur aide bilatérale.

Lors de la réunion du G8 à Evian, les mesures de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme dans le cadre du NEPAD ont été approuvées. Le G8 s'est engagé à fournir 521 millions de dollars supplémentaires pour éradique la polio d'ici 2005. La France et les Etats-Unis ont lancé une initiative de lutte contre la famine, qui a débouché à Evian sur un plan d'action innovant dans lequel le G8 s'engage à améliorer l'efficacité de ses modalités d'intervention et à renforcer les capacités africaines d'évaluation, d'alerte et de prévention des famines. Il encourage les institutions internationales à accroître leur assistance en vue de promouvoir l'irrigation.

En prenant la présidence du G8 en 2003, la France a fait de l'Afrique et du NEPAD une priorité. Les avancées obtenues à Evian lors de la réunion du G8 en juin 2003, en constituent la démonstration. Le plan d'action pour le développement des capacités africaines de maintien de la paix a été agréé, notamment grâce aux efforts conjugués de l'Allemagne et de la France. Celle-ci n'a pas ménagé son soutien aux efforts des organisations régionales africaines qui cherchent à réduire le nombre d'armes légères en circulation, et elle aide l'Afrique à se débarrasser du fléau des mines antipersonnel.

Les pays du G8 se sont engagés à poursuivre leurs efforts en vue de consolider les institutions démocratiques africaines (parlements, système judiciaires en particulier). Du côté africain, lors du sixième sommet des chefs d'Etat des pays membres du comité de mise en _uvre du NEPAD (Abuja 9 mars 2003) douze pays africains (quinze désormais depuis le sommet d'Abuja du 28 mai 2003) ont signé un engagement à cet égard.

b) Les initiatives liées à l'existence du NEPAD

La France et le Royaume-Uni ont adopté au sommet de Johannesburg une initiative visant à relancer l'investissement privé au service du développement durable. La France s'est engagée à apporter 100 M€ sur trois ans afin de permettre d'attirer 1 milliard d'investissement privé. Cette initiative progresse au plan européen avec la proposition britannique d'une nouvelle « facilité financière internationale » pour accélérer les déboursements au profit des pays en développement afin d'atteindre les objectifs du millénaire.

La France co-préside en 2003, avec les Pays-Bas l'initiative internationale « Education pour tous - procédure accélérée » qui, utilisant le système d'enseignement à distance, vise à aider, de façon coordonnée, les pays les plus pauvres à atteindre l'objectif d'une scolarisation primaire universelle d'ici 2015. 10 pays, dont 6 africains, ont déjà été déclarés éligibles à l'initiative. La France a pris un engagement triennal de 65 M€ pour ces pays africains, ce qui fait d'elle le premier donateur en Afrique dans ce domaine.

Au plan bilatéral, la France est allée au-delà des annulations de dette prévues dans ce cadre : elle a annulé la totalité de ses créances d'aide publique au développement (soit 4 milliards d'euros), la plupart des pays bénéficiaires de ses annulations étant des pays pauvres très endettés (PPTE). Au plan multilatéral, elle a obtenu à Evian que des allègements de dette complémentaires soient proposés d'une part aux pays bénéficiaires de l'initiative PPTE et néanmoins pénalisés par une évolution défavorable de leurs recettes d'exportations et d'autre part que les pays à revenu intermédiaire, non éligibles à l'initiative PPTE, et néanmoins pauvres et lourdement endettés, soient mieux traités.

2) Renforcer les capacités institutionnelles des Etats

a) Importance de la coopération militaire et de police

Le nombre de coopérants militaires français a diminué par rapport à 2002. Cette diminution est liée aux crises ivoiriennes et centrafricaines qui ont entraîné une adaptation du format des missions de coopération militaire dans ces pays. La répartition par pays des effectifs de coopérants en poste figure en annexe 4.

Les Chefs d'Etats africains ont, à maintes reprises, exprimé leur volonté de se doter de capacités renforcées de prévention des conflits, sous l'égide des Nations unies, de l'OUA et dans un cadre sous-régional. Les organisations régionales africaines tentent de trouver des solutions de maintien de la paix en Afrique. Certaines ont déjà été mises en _uvre, d'autres sont encore au stade des études.

Depuis 1997, l'action que la France mène pour favoriser la mise en _uvre de solutions régionales de maintien de la paix en Afrique repose sur le programme RECAMP (renforcement des capacités africaines de maintien de la paix) qui comporte sur trois piliers : la formation, l'entraînement, l'équipement.

Ce programme a permis de mener trois cycles complets qui se sont concrétisés par les exercices de synthèse de 1998, de 2000 et de février 2002. Ce concept français reste un concept opérationnel, placé sous le contrôle politique du ministère des Affaires étrangères, exercé par un ambassadeur, mais mis en _uvre de manière pratique par les Armées. Dans un souci de cohérence de l'action de la France, la coopération militaire intervient en totale coordination avec l'action menée par le ministère de la Défense pour concourir à la formation des cadres africains en matière de maintien de la paix.

Véritable succès politique, ce programme dispose désormais d'une grande notoriété en particulier en Afrique en raison de son caractère non-exclusif. De nombreux partenaires occidentaux ou asiatiques, ainsi que l'ONU, le soutiennent. Le Conseil de défense du 5 mai 2003 a permis de réactualiser les précédentes orientations données à la coopération militaire à l'occasion du Conseil de défense du 3 mars 1998, élargissement du concept de coopération militaire et de défense, mise en _uvre de priorités géographiques, réaménagement des modes d'action, notamment en Afrique, redéploiement de moyens financiers à réaliser sur trois ans à partir des ressources transférables d'Afrique subsaharienne.

En revanche, il ne semble pas qu'un audit centré sur l'efficacité de l'offre de stages de formation dans les écoles militaires françaises ait été conduit de manière exhaustive au cours des dix dernières années. Pays par pays, des bilans réguliers sont faits par le chef de la mission militaire de coopération et de défense (MCMD) ou par l'attaché de défense résident ou non résident. Ces bilans réguliers abordent généralement les stages qui sont l'un de nos principaux modes d'action en terme de coopération militaire.

En Afrique, la coopération militaire est étudiée au même titre que les autres formes de coopération lors des audits engagés par la DGCID. Les deux derniers audits réalisés ont concerné la coopération militaire et de sécurité intérieure avec le Niger en 2002 et le Tchad en 2003. Dans les deux cas, les modes d'action de coopération ont été estimés plutôt efficaces et adaptés aux besoins des pays concernés.

La coopération militaire et de défense fait progresser l'Etat de droit par des conseils aux hautes autorités civiles et militaires, audits, programmes de gestion des ressources humaines, soutien institutionnel, sécurité intérieure, restructuration des forces armées, etc.

Les postes reçoivent des instructions de plus en plus précises pour conditionner les efforts en matière de coopération militaire, à la mise en _uvre de mesures effectives visant à lutter contre les carences constatées dans ce domaine.

b) Un exemple de soutien aux capacités institutionnels de l'Etat, le rôle de l'Organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA)

La France soutient l'OHADA depuis l'origine. Elle a pris en charge l'ensemble des travaux préparatoires effectués dès 1991 pour aboutir à la signature du traité le 17 octobre 1993 à Port-Louis, traité aujourd'hui ratifié par les 15 pays de la zone Franc et la Guinée Conakry. Elle a également financé tout le processus d'élaboration des sept premiers Actes uniformes adoptés par le Conseil des ministres de l'OHADA de 1997 à 2000, touchant pratiquement tous les domaines du droit commercial. Un huitième Acte uniforme vient d'être approuvé par le Conseil des ministres réuni à Yaoundé au mois de mars 2003, il concerne le droit des transports de marchandises par route. Les deux derniers Actes uniformes prévus par le Traité sont en cours de préparation. Les avant-projets seront présentés aux experts des Etats-parties avant la fin de cette année. Le premier relatif au droit de la vente aux consommateurs est financé par le Canada, le second qui concerne le droit du travail, par la France.

L'édition et la diffusion d'un premier « code OHADA » rassemblant les textes du traité de l'OHADA et des premiers actes uniformes a été prise en charge par la France en 1999. Dans les mêmes conditions, la mise à jour de ce code a été effectuée en 2002. Les institutions de l'OHADA sont maintenant toutes en place.

Outre les formations à l'Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature (ERSUMA), plusieurs séminaires de sensibilisation ont été organisés par les Etats-membres à l'intention des acteurs judiciaires et économiques avec l'appui de la France. Par ailleurs, dans le cadre de ses projets bilatéraux d'aide aux systèmes judiciaires africains, celle-ci finance des programmes de formation continue au droit OHADA.

Le travail accompli depuis la mise en place de nouvelles institutions est capital pour la sécurité des affaires, le développement des échanges commerciaux et l'encouragement des investissements. L'OHADA dispose d'un corpus juridique déjà significatif que devrait venir consolider la jurisprudence naissante de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA).

Une étude prospective sur l'avenir de l'OHADA, réalisée à la fin de l'année 2002 préconise de soutenir particulièrement les Etats-membres pour les aider à appliquer ce nouveau droit.

c) L'aide aux processus électoraux

La France estime à juste titre que l'organisation des élections constitue un acte de souveraineté de tout Etat démocratique, auquel il revient d'en prévoir le financement. Le recours à des ressources extérieures pour assurer ce financement, même partiel ne saurait, par conséquent, être considéré comme une solution normale mais doit, au contraire, rester exceptionnel. Aussi convient-il de privilégier le cadre multilatéral d'intervention.

La France appuie les processus électoraux qui doivent être subordonnés au respect, par les autorités de l'Etat bénéficiaire, des conditions nécessaires pour garantir la transparence et l'équité du scrutin. Ils sont déterminés en concertation avec les autres bailleurs, notamment avec l'Union européenne et cette aide peut porter sur l'organisation d'un référendum, d'élections présidentielles ou législatives et, depuis 1996, sur les élections locales (régionales ou municipales).

Trois facteurs sont pris en compte pour la détermination du montant de l'aide : la part prise par la communauté internationale au financement des élections, la situation sociale et financière du pays concerné, le caractère novateur du processus électoral.

Le montant de la contribution française est versé sur un fonds fiduciaire d'une organisation multilatérale (le plus souvent le PNUD ou l'Union européenne). Les processus électoraux transparents constituent le fondement de l'Etat de droit ; ils doivent cependant être accompagnés d'actions de formation renforçant la capacité juridique des Etats.

3) Privilégier le co-développement

a) Le co-développement et la nouvelle approche du rôle des migrants

Le Gouvernement a décidé de donner une nouvelle impulsion à sa politique de co-développement. En effet, tant que la réduction de l'écart économique entre le Nord et le Sud ne se produira pas la lutte contre l'immigration clandestine sera battue en brèche. Le co-développement propose un regard nouveau sur les migrants. Il valorise leur rôle dans le développement de leur pays d'origine et tend à fluidifier les mouvements migratoires dans un cadre légal et concerté supposant la participation active des Etats concernés.

Il poursuit trois objectifs principaux : négocier avec le pays d'origine une politique de régulation des mouvements migratoires et de prévention des flux illégaux, favoriser la mobilisation et les initiatives des migrants pour le développement de leur pays et région d'origine, organiser la mobilité temporaire de ces personnes dans le but de se former sous la responsabilité conjointe de la France et du pays d'origine.

M. Christian Connan a été nommé ambassadeur délégué au co-développement ; sa tâche sera de mieux intégrer le co-développement à la politique de coopération. Dans un premier temps quatre pays : le Maroc, le Mali, le Sénégal et les Comores, sont concernés par cette démarche.

Le co-développement, tout en étant un moyen de maîtriser les flux migratoires est aussi un outil de développement social fort utile à l'intégration, dans les cités, des migrants de la deuxième génération et aux échanges entre la France et ses partenaires du Sud. Il pourrait être un facteur de développement d'un pays qui intègre de façon organisée et légale les contributions de toute nature des migrants qui en sont originaires. Parallèlement, il serait une des modalités de gestion des flux migratoires par l'organisation d'un partenariat bilatéral, portant sur des projets et programmes de développement impliquant les migrants comme les populations originaires des zones traditionnelles d'immigration.

Le co-développement a le mérite de faire du migrant un opérateur potentiel du développement. Il institutionnalise et renforce les solidarités fortes entre les migrants et leur pays d'origine. Par des aides spécifiques, il valorise la compétence des migrants (stages de formation pour les animateurs d'associations de migrants, bourses de co-développement, missions d'appui de migrants qualifiés axées sur des échanges professionnels avec leur pays d'origine). Des systèmes d'aide à la création d'activité économique par des migrants dans leur pays d'origine ont été mis en place et votre Rapporteur a pu en constater l'efficacité en Afrique.

On s'efforce ainsi de favoriser les projets réalisés par des migrants de retour en France, de mettre à contribution les compétences de migrants installés en France pour répondre à certains besoins du secteur privé, de l'administration et de l'enseignement. Cet apport de compétence et d'expertise ne passe pas nécessairement par le retour au pays ; il peut se réaliser, par exemple, par des missions de courte durée ne remettant pas en cause l'intégration en France lorsqu'elle est souhaitée.

Le co-développement favorise les échanges d'expérience entre le Nord et le Sud.

b) Favoriser les liens des migrants avec leur pays d'origine par la création d'un livret d'épargne-développement

La nouvelle ambition qu'entend donner le Gouvernement à sa politique de co-développement s'exprime dans deux programmes nouveaux, qui bénéficieront de financements du FSP, en liaison avec l'AFD. Le premier s'appuie sur la mobilisation des élites des communautés étrangères en faveur du développement de leur pays d'origine, car elles rassemblent en France plusieurs milliers de migrants formés dans les universités et les grandes écoles françaises ; il s'agit de les mobiliser, en particulier à travers le monde associatif, vers des actions de développement de leur pays d'origine.

Le deuxième vise à canaliser l'épargne des migrants vers l'investissement, car les fonds envoyés par eux dans leur pays représentent des sommes considérables. En liaison avec les banques, des circuits financiers fiables et des incitations seront mises en place pour aider les migrants à réaliser des investissements dans leur pays d'origine. Ces mécanismes et ces nouveaux produits financiers devrait être élaborés par les réseaux bancaires en partenariat avec les structures de coopération, afin d'être disponibles courant 2004.

En effet, les micro-projets nécessitent peu de moyens financiers mais leur réalisation est fondamentale pour permettre aux populations de sortir du sous-développement et freiner l'immigration.

Comme votre Rapporteur en faisait le constat il y a déjà un an, pour encourager le retour des migrants, il ne suffit pas de mettre en place, comme cela se fait, un système d'aide à la création d'entreprise voire de mettre en _uvre des systèmes de prime au retour. On ne peut non plus se contenter de traiter les flux migratoires en terme de contrôles policiers qui ne se révèlent pas toujours efficaces et sont très mal perçus par les populations des pays d'émigration.

Le système bancaire étant peu développé, voire inexistant ou peu fiable dans la plupart des pays d'Afrique et notamment dans les régions reculées, l'argent arrive mal ; les détournements de fonds ne sont pas rares. Les délais de paiement une fois l'envoi effectué sont longs faute d'un système bancaire efficace. Aussi votre Rapporteur avait-il préconisé la création d'un livret d'épargne développement permettant au migrant d'envoyer de façon sécurisée une part de ses revenus aux siens et de conserver l'autre sur un compte rémunéré pour pouvoir créer dans sa région d'origine une entreprise commerciale ou une unité de production. On pourrait aussi offrir au migrant des occasions de placements sécurisés et rémunérés dans le capital de petites unités de production dans sa région d'origine.

M. Pierre-André Wiltzer, Ministre délégué à la coopération et à la francophonie a témoigné de son intérêt pour ce dispositif. Un groupe de travail a été constitué avec la participation de l'ambassadeur délégué au co-développement au quai d'Orsay et ce groupe doit prendre en compte les efforts déployés par un certain nombre d'établissements financiers dans la mise en place de produits adaptés. L'AFD se montre très intéressée également.Votre Rapporteur espère que les conclusions du groupe de travail seront être rendues d'ici la fin de l'année car ce projet suscite des espoirs et confère un contenu économique précis au co-développement. Le livret d'épargne-développement s'inscrit donc dans la nouvelle stratégie de mise en _uvre du co-développement.

CONCLUSION

Votre Rapporteur ne peut que saluer les efforts du Gouvernement pour accroître la part de l'aide publique au développement dans le budget 2004. Ils répondent au vif intérêt que portent les populations des pays en développement et leurs gouvernements à la politique française de coopération. L'accueil très chaleureux reçu par le Président de la République lors de son récent voyage au Niger et au Mali en témoigne largement.

La France suscite ainsi des attentes qui ne doivent en rien être déçues. Il n'est pas concevable que cette année de nouveaux gels budgétaires viennent paralyser les actions de coopération bilatérale et que la baisse inquiétante de l'assistance technique vienne briser l'impulsion donnée par le Président de la République et contredire la parole de la France.

Il ne s'agit pas de mener une politique d'assistance mais d'instaurer un partenariat avec les pays en développement en mettant en place de nouvelles pratiques comme le co-développement, qui valorise en France et dans leur pays d'origine le rôle des migrants.

Utiliser au mieux les crédits et les compétences de la France est plus que jamais une nécessité. On se doit d'agir dans les domaines où les compétences françaises sont internationalement reconnues et de simplifier les procédures et les structures d'intervention en matière de coopération extérieure. Il n'est pas acceptable que des concurrences inutiles entre ministères, voire des doublons, obèrent l'efficacité de la coopération bilatérale.

Pour être visible, utile et efficace, aussi bien vis-à-vis de l'Union européenne que de ses partenaires du Sud, il est plus que jamais nécessaire que l'aide extérieure de la France soit gérée dans sa quasi-totalité par un seul ministère, celui des Affaires étrangères.

Votre Rapporteur tient à faire observer que le seul effort de remise de la dette des pays les plus pauvres consenti par la France s'intègre au pourcentage du déficit budgétaire de 3,6% du PIB prévu pour l'exercice 2004. En atteignant près de 2 milliards d'euros, dont près d'1,5 milliard pour les seules remises de dettes aux pays les plus pauvres très endettés, ces aides représentent près du quart des 9 milliards d'euros de l'excès de déficit (0,6 % du PIB) que la Commission européenne reproche à la France. La France sera-t-elle pénalisée parce qu'elle souhaite accroître son aide aux pays pauvres très endettés conformément aux engagements de l'ensemble des pays développés et de la communauté internationale.

AUDITION DES MINISTRES

Audition de M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères
et de M. Pierre-André Wiltzer, Ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, devant la Commission des Affaires étrangères,

le mardi 28 octobre 2003

M. Dominique de Villepin, Ministre des Affaires étrangères, a insisté sur la cohérence du budget face à la nécessité de réduire la dépense publique, de réformer l'Etat, de moderniser le ministère et de respecter les grands objectifs du Président de la République et du Gouvernement.

Il a d'abord souligné la contribution de ce budget à l'effort de réduction de la dépense publique en rappelant que l'année 2003 s'était traduite par une régulation budgétaire sans précédent, amputant le budget de 247 millions d'euros, soit près de 15 % des crédits hors rémunérations et engagements internationaux. L'exécution du budget 2003 fut donc très difficile, remettant en cause la programmation budgétaire, en matière de coopération internationale et d'aide publique au développement (APD).

Le projet de budget pour 2004 s'élève à 4,2 milliards d'euros, ce qui représente une progression de 2,6 % par rapport à 2003 mais, si l'on exclut les crédits consacrés à l'aide publique au développement (APD), ce budget est en baisse de 1,6 %. Le Ministre des Affaires étrangères a détaillé les mesures sur lesquelles porterait cette baisse : suppression de 116 emplois en 2004, économie de 20 millions d'euros sur les indemnités de résidence, réduction de 2% des frais de fonctionnement de l'administration centrale et du réseau à l'étranger par rapport à 2003, diminution des crédits immobiliers de 10,3 % en crédits de paiement et de 23,5 % en autorisations de programmes ce qui conduira à réexaminer le financement des campus diplomatiques de Pékin et de Tokyo et le déménagement des archives du ministère des Affaires étrangères à La Courneuve.

En revanche, il a fait valoir que certaines dotations, même si elles demeurent insuffisantes, avaient été reconduites : les contributions volontaires aux organismes internationaux, les subventions aux opérateurs de l'audiovisuel, la coopération militaire et de défense, les dépenses diverses au titre de l'aide alimentaire et l'enseignement français à l'étranger.

M. Dominique de Villepin a ensuite détaillé les innovations préfigurant la réforme de l'action extérieure de l'Etat, en cohérence avec le projet de plan d'action stratégique, « Affaires étrangères 2007 », en cours de validation. Ce plan propose de changer les mentalités plus que les structures en affirmant le rôle interministériel du Quai d'Orsay, en renforçant sa capacité stratégique, en consolidant le budget de l'action extérieure de l'Etat, et en instaurant dans le cadre de la loi organique sur la loi de finances (LOLF) une mission interministérielle « action extérieure de l'Etat » qui pourra être complétée d'un ou de plusieurs programmes coordonnés de politique interministérielle.

La création d'un Conseil d'orientation stratégique, ouvert aux autres ministères et à la société civile, voire à des personnalités étrangères, la mise en place d'une direction collégiale, composée du Secrétaire général et de trois ou quatre secrétaires généraux adjoints veillant à la coordination des programmes identifiés en application de la LOLF font également partie des propositions avancées dans ce plan.

De même, la cohérence interministérielle devra se traduire par la rédaction d'un « plan d'action de l'ambassade » associant tous les services de l'Etat présents dans le pays ; l'animation du réseau des postes diplomatiques sera confiée aux directions géographiques.

Le Ministre des Affaires étrangères a souhaité que le ministère soit plus opérationnel en adoptant des méthodes de travail plus souples et un système de déconcentration maximale des crédits, en se concentrant sur les tâches qui relèvent directement de l'Etat, en insufflant la culture de l'évaluation, en rendant les nominations plus transparentes à tous les niveaux, grâce à la création d'un comité diplomatique et consulaire, et en développant la formation, une priorité pour le ministère dans le cadre d'une charte de la formation.

De plus, il a annoncé le réaménagement des réseaux diplomatiques, consulaire et culturel d'ici 2007, pour dégager les marges de financement de la réforme, en jouant sur toutes les variables (polyvalence des sites et des hommes, transfert d'attributions à des postes voisins mieux dotés, coopération renforcée avec nos partenaires de l'Union européenne, l'Allemagne et le Royaume-Uni en particulier, etc.). Selon le Ministre des Affaires étrangères, il faudra également procéder à une analyse coût-efficacité de la présence française en terme d'immobilier ou de personnel.

En outre le plan d'action propose d'accentuer la modernisation de la gestion en la dynamisant par la déconcentration et la globalisation des moyens de fonctionnement, le regroupement des fonctions de soutien en services administratifs et financiers uniques, l'instauration de « budgets-pays » et de conférences d'orientation budgétaire, la création d'une direction du contrôle de gestion composée de professionnels issus du secteur privé.

Le Ministre des Affaires étrangères a évoqué un mécanisme d'intéressement à la productivité avec une restitution partielle des gains obtenus dans le traitement des dossiers consulaires. L'économie de 20 millions d'euros effectuée sur les indemnités de résidence sera en partie redéployée pour permettre la revalorisation des rémunérations des recrutés locaux (4,2 millions d'euros) et l'abondement des primes de l'administration centrale (3,8 millions d'euros), une expérimentation de la LOLF dès 2004 dans cinq pays (Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Italie et Chine) sera mise en place. Cette procédure de « budget-pays LOLF » permettra aux ambassadeurs concernés d'appliquer la fongibilité des crédits du titre III.

M. Dominique de Villepin a jugé le budget 2004 conforme aux priorités du Président de la République et du Gouvernement en insistant sur le respect de l'objectif de progression de l'APD, qui atteindra 0,43 % du PIB pour un objectif de 0,5 % du PIB en 2007.

Avec 141 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2003, soit une hausse de près de 10 %, l'APD est la première priorité du ministère. Cette progression concerne pour près de 14 % le Fonds européen de développement (FED), pour près de 25% les crédits de paiement du Fonds de solidarité prioritaires (FSP), pour 15,3 % ceux de l'Agence française de développement et pour 29 % le concours financier comprenant les contrats dits de désendettement développement.

La baisse des autorisations de programmes (AP) pour le FSP permettra de réduire le décalage chronique sur ces chapitres entre les autorisations de programme et les crédits de paiement. Le Ministre des Affaires étrangères a estimé que ce budget reflétait le rôle privilégié de la francophonie dans le rayonnement culturel et intellectuel de la France car les crédits alloués au Fonds multilatéral unique augmentent de 10 millions d'euros.

De même, la qualité des services rendus aux Français est également prise en compte car les moyens consacrés au Français de l'étranger seront renforcés, en particulier en faveur de la sécurité et de la solidarité à l'égard des plus démunis. Les crédits liés à la sécurité sur les chapitres de fonctionnement sont maintenus et ceux consacrés aux actions de prévention au service des communautés françaises augmentent de 36 %, par redéploiement. Au sein du budget de l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger, qui poursuit sa modernisation et adapte la carte de ses implantations, la dotation destinée aux bourses pour les enfants français devrait à nouveau progresser.

Enfin, dans le cadre de la réforme du droit d'asile, les crédits destinés à l'OFPRA et à la Commission de recours des réfugiés augmentent de presque 10 millions d'euros, soit une croissance de 34,4 % par rapport à la LFI pour 2003. Cela permettra de pérenniser les renforts mis à la disposition de ces deux organismes par la loi de finances rectificative de la fin 2002 et de créer 100 nouveaux emplois.

M. Pierre-André Wiltzer, Ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, a déclaré que le projet de budget pour 2004 s'inscrivait dans la perspective de l'objectif fixé par le chef de l'Etat d'une aide publique au développement (APD) représentant 0,50 % de notre PIB en 2007. Le montant de cette dernière est passé de 0,32 % en 2001 à 0,41 % cette année et devrait atteindre 0,43 % l'an prochain. La part de notre aide bilatérale poursuit sa progression en 2004 puisque de 62 % du total de l'aide en 2001, elle en représentera 72 % en 2004, malgré l'augmentation de notre contribution au Fonds européen de développement (FED). Au-delà du soutien apporté à l'Afrique dans les enceintes multilatérales, notre aide bilatérale lui a été destinée à hauteur de 72 % l'an dernier et cette proportion devrait augmenter au cours des prochains exercices. Une part importante de l'APD va aux opérations d'allégement de la dette : 2 milliards d'euros y seront consacrés en 2004 contre seulement 470 millions d'euros en 2001. Notre aide est aussi prioritairement utilisée dans le cadre de l'initiative pour les pays pauvres très endettés et les contrats de désendettement développement qui permettent de conjuguer un effort exceptionnel des créanciers avec la mise en _uvre par les pays bénéficiaires d'une stratégie de lutte contre la pauvreté.

Les crédits de coopération du ministère des Affaires étrangères progressent de 141 millions d'euros en 2004, ce qui traduit une priorité politique claire. Il est vrai que l'exercice 2003 a été marqué par des régulations qui ont entraîné un report de charges d'environ 90 millions d'euros. Notre contribution au FED augmente de près de 14 %, les crédits de paiement alloués à l'Agence française de développement progressent de plus de 15 %, ceux du Fonds de solidarité prioritaire (FSP) de 25 % et les concours financiers de 29 %. Des opérations de développement plus immédiates et plus visibles que les annulations de dettes pourront ainsi être menées par notre pays. Enfin, les autorisations de programmes du titre VI ont diminué de 10 % dans un souci de clarté budgétaire dû au décalage croissant avec les crédits de paiement alloués chaque année.

Les régulations budgétaires ont par ailleurs entravé la mise en _uvre du plan de relance de la Francophonie annoncé par le Président de la République lors du Sommet de Beyrouth. La situation pour 2004 devrait être meilleure en raison de l'allocation de crédits du titre IV et du Fonds multilatéral unique à hauteur de 20 millions d'euros. L'importance qu'attache notre pays à son rayonnement culturel est ainsi clairement exprimée.

Avant de répondre aux questions relatives à ce projet de budget 2004, le Ministre des Affaires étrangères, à la demande du Président Edouard Balladur, a donné à la Commission les précisions suivantes sur la Conférence des donateurs pour l'Irak qui s'est tenue à Madrid. Le montant total des promesses pour la période 2004 - 2007 s'élève à 33 milliards de dollars dont 20 milliards proviennent des Etats Unis. La communauté internationale contribuera pour environ 13 milliards de dollars, dont les deux tiers seront constitués par des prêts et un tiers par des dons. La Banque mondiale sur ce dernier total apportera un montant de 3 à 5 milliards de prêts et le FMI 2,5 à 4 milliards en prêts également. Nous sommes donc encore loin des 56 milliards de dollars nécessaires à la reconstruction du pays, selon la Banque mondiale. Néanmoins le montant est significatif en comparaison d'autres conférences de donateurs, et il devrait saturer la capacité d'absorption de ces sommes par l'Irak pour 2004.

La plupart des délégations ont exprimé des inquiétudes quant à la sécurité de l'Irak et insisté sur la nécessité politique de donner plus de pouvoir et de responsabilités aux Irakiens, ainsi que sur la sécurité juridique et technique indispensable pour pouvoir mettre en _uvre les prêts qui ont été annoncés. Les donateurs ont souhaité la transparence et la coordination de la gestion de l'aide. Face à ces interrogations, Washington comme les Irakiens ont encore peu de réponses.

La France a appuyé l'effort fait par l'Union européenne (200 millions d'euros), elle a rappelé les aides déjà engagées en faveur de l'Irak et annoncé qu'elle était disposée à étudier, dans le cadre du Club de Paris, un traitement de la dette de l'Irak plus adapté à sa capacité actuelle de remboursement.

Répondant au Président Edouard Balladur sur l'apport des autres pays européens, le Ministre des Affaires étrangères a indiqué que l'Espagne et la Grande-Bretagne avaient, au sein de l'Union européenne, apporté les contributions les plus importantes. Le Japon est le deuxième contributeur après les Etats-Unis, avec l'annonce d'une aide de 5 milliards de dollars, dont 3,5 de prêts. La France ne s'est pas engagée pour le moment à réduire la dette de l'Irak, mais a seulement proposé d'examiner cette question dans le cadre des procédures habituelles au sein du Club de Paris.

Après avoir déclaré soutenir l'action du Gouvernement sur la scène internationale visant à défendre les conceptions françaises, M. Jacques Myard s'est dit préoccupé par les annonces de suppressions d'emplois contenues dans le projet de budget du ministère des Affaires étrangères pour 2004. Depuis dix ans, la perte d'emplois a atteint 10 %, ce qui est disproportionné par rapport à ce que doit être l'action de la France dans le monde. Pour cette raison, il a indiqué son intention de déposer des amendements visant à annuler ces suppressions d'emplois.

M. François Rochebloine a tout d'abord demandé à quelle date devait être prise la décision définitive de transférer l'Institut de France de Tel-Aviv dans de nouveaux locaux. Puis il a demandé des précisions quant aux difficultés que paraissent rencontrer actuellement les étudiants étrangers pour obtenir des visas. S'agissant de la proposition de M. Bernard Brochand de créer une chaîne généraliste francophone regroupant les missions de RFO et TV5, il a souhaité connaître le sentiment du Ministre des Affaires étrangères en la matière. Enfin, il a posé la question de la réalisation de la Maison de la Francophonie.

M. Guy Lengagne a estimé que les étudiants étrangers n'étaient pas suffisamment incités à venir en France. Par exemple, sur 25 étudiants turcs qui se rendent en Europe pour étudier, un seul vient en France. Selon lui, l'attribution de bourses aux étudiants étrangers souffre sans doute d'un manque de moyens financiers, mais le problème est également lié à la question de l'attribution des visas. Par ailleurs, il s'est intéressé à la part des autres partenaires dans le financement de l'Institut du monde arabe.

M. Jacques Godfrain a demandé si l'inventaire des projets lancés et risquant de ne pas aboutir du fait des gels de crédits avait été fait. Puis il a souhaité savoir si le ministère des Affaires étrangères envisageait de soutenir la réalisation d'un plan développement.

M. Dominique de Villepin a répondu aux intervenants.

Concernant la politique des emplois, il a admis que la baisse constatée depuis dix ans était importante (9,5 %). L'effort fourni en 2004 relève de la contribution du ministère de Affaires étrangères à l'effort global revendiqué par le Gouvernement, visant à ne remplacer que la moitié des fonctionnaires partant à la retraite. Grâce à une gestion adéquate, notamment en réduisant le taux de vacances de postes, ces réductions n'ont pas pénalisé le fonctionnement du ministère. Mais il est certain qu'il ne sera plus possible de continuer dans cette voie. A l'avenir, les futures rationalisations devront concerner l'ensemble des réseaux de l'Etat à l'étranger : il faudra pouvoir apprécier dans chaque pays le nombre d'agents nécessaires par ministère selon une vision d'ensemble de l'action extérieure de l'Etat. La mise en place d'une polyvalence des agents est nécessaire afin de mettre fin aux cloisonnements entre ministères possédant un réseau à l'étranger. De plus, afin de prendre en compte les évolutions du monde, par exemple celles liés à l'élargissement de l'Europe, la présence française à l'étranger doit pouvoir s'adapter.

L'Institut français de Tel-Aviv est un projet résultant d'une décision conjointe franco-israélienne prise à la suite des conclusions rendues par un groupe de travail de haut niveau. Cette décision étant définitive, elle sera mise en _uvre dans un délai maximum de trois ans. Les études sont en cours ; le coût devrait être de 5 millions d'euros.

Le nombre des étudiants étrangers en France ne dépend pas seulement du niveau des bourses, mais aussi de l'attractivité de notre système d'enseignement supérieur par rapport à celui de pays comme les Etats-Unis ou le Canada. En dépit du faible coût des études, le système français attire moins que le système américain où existent de grandes facilités de financement des études universitaire proposées par les banques. Il faut donc réfléchir pour améliorer l'attractivité de notre système dans un cadre européen qui doit être mieux coordonné et prendre en compte la question délicate de la mise en place de filières anglophones. Quant à notre politique de visas étudiants, elle s'est délibérément orientée vers une augmentation importante du nombre de visas délivrés.

En ce qui concerne l'Institut du monde arabe, il est vrai que certains Etats sont en retard dans le versement de leurs cotisations ; leur attention a été attirée sur ce problème, et les arriérés ont été versés sur un fonds de réserve dont le produit des placements financiers compensera les aléas des versements de cotisations.

Au sujet de la politique télévisuelle, il faut rappeler que TV5 est une chaîne francophone multilatérale et que toute modification la concernant doit tenir compte de nos partenaires et de nos obligations vis-à-vis de cette chaîne.

M. Pierre-André Wiltzer, Ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, a répondu qu'en trois ans le nombre d'étudiants étrangers accueillis dans notre pays avait augmenté de 48 %, renouant ainsi avec l'effectif le plus élevé jamais atteint. Si notre pays, avec plus de 221 000 étudiants, se place derrière le Royaume-Uni qui accueille plus de 242 000 étudiants, il se place nettement devant l'Allemagne avec environ 187 000 étudiants. Le nombre de bourses accordées est de 23 438, dont plus de la moitié au profit d'étudiants africains.

La création d'une Maison de la francophonie regroupant l'ensemble des opérateurs sur un même site est une initiative du Président de la République, rendue publique lors du Sommet de Beyrouth. Une mission a été confiée à un membre de la Cour des Comptes pour la mise en _uvre de ce projet qui doit être réalisé en 2006. Les conclusions de cette mission ont retenu cinq localisations à Paris intra-muros qui viennent d'être soumises aux instances de la Francophonie.

Le gel des crédits a entraîné le report de plusieurs opérations de coopération sur le prochain exercice. Le renforcement des crédits de paiement au titre du FSP et de l'AFD devrait permettre de réaliser ces projets l'an prochain. Enfin, le projet de plan épargne investissement au profit des ressortissants des pays africains est actuellement à l'étude à l'AFD et dans plusieurs réseaux bancaires. Le Mali et le Maroc font partie des pays partenaires privilégiés pour la mise en _uvre de ce programme, qui devrait rapidement déboucher sur la définition de nouveaux produits financiers facilitant l'investissement.

Observant une nouvelle répartition des crédits inscrits au titre IV chapitre 42-31, relatifs à notre contribution aux opérations de maintien de la paix (OMP), M. Gilbert Gantier en a demandé la justification. Sur la réforme de l'ONU, il a souhaité connaître l'état d'avancement des travaux.

M. Richard Cazenave a questionné le Ministre des Affaires étrangères sur la part des programmes de 2003 qui seront imputés sur 2004, ainsi que sur les crédits disponibles pour de nouvelles actions. Par ailleurs, il s'est inquiété de savoir si des enseignements avaient été tirés de 2003 permettant d'élaborer une stratégie de réplique à la régulation budgétaire afin de n'engager qu'à coup sûr certains programmes. Enfin, le calendrier de la LOLF se rapprochant, il a interrogé le Ministre des Affaires étrangères sur les résultats de la réflexion portant sur l'organisation des programmes dans le cadre d'une action interministérielle de l'Etat, espérant que les rapporteurs budgétaires puissent être associés à ces travaux.

M. Jean-Paul Bacquet a souhaité connaître exactement l'évolution sur les vingt ou trente dernières années du nombre d'étudiants africains venant en France, ayant l'impression que ceux-ci étaient beaucoup plus nombreux par le passé.

Soulignant l'importance des efforts de rationalisation budgétaire engagés, M. Loïc Bouvard a demandé comment le ministère des Affaires étrangères comptait agir. Un appel à des cabinets spécialisés en organisation est-il envisagé ? Si oui, quels sont ces cabinets et dispose-t-on d'un budget pour cela ?

M. Dominique de Villepin a répondu que la diminution de crédits observée en matière d'OMP était liée au taux de change, c'est-à-dire à l'effet dollar/euro. La contribution est en fait la même en euros constants.

La réforme des Nations unies est un grand projet évoqué depuis de nombreuses années. M. Kofi Annan l'a mise à l'ordre du jour de la nouvelle session : elle a un caractère ambitieux, puisque qu'elle devrait notamment modifier la représentativité des groupes régionaux au sein du Conseil de sécurité. Plusieurs pays sont candidats au Conseil de sécurité, et chacune de ces candidatures suscite des contre-candidatures. Aussi, le travail d'un Comité des Sages sera-t-il nécessaire pour y voir plus clair. S'ajoute à cela le projet de réforme du Conseil économique et social, pour le transformer en un Conseil de sécurité économique et sociale susceptible de faire des propositions et d'apporter des rationalisations de l'action des Nations unies dans ce domaine. Pourraient aussi être évoquées certaines idées proposées par notre pays, telles que la création d'un corps d'inspection dans le domaine de la non-prolifération ou d'un corps d'inspection dans le domaine des droits de l'Homme. Ces derniers permettraient de disposer de plus d'information pour mieux ajuster la politique de l'organisation internationale et de l'appuyer par des inspections plus intrusives.

Ces projets constituent un grand chantier, et la France est à l'origine du plus grand nombre de propositions pour ces réformes, en concertation étroite avec nos partenaires européens, notamment les Britanniques très soucieux aussi d'avancer dans ce domaine. Le Secrétaire général des Nations unies présentera, le moment venu, ses conclusions et propositions et il faut espérer que celles-ci feront l'objet de toute l'attention nécessaire, eu égard aux menaces qui pèsent sur le monde et exigent l'efficacité de l'organisation.

En ce qui concerne la régulation budgétaire, le report de charges pour 2004 devrait être de l'ordre de 90 millions d'euros dont 20 pour le FSP ; c'est pourquoi il a été demandé que soient dégelés en priorité les crédits de l'aide publique au développement. Le budget pour 2004 prévoit des hausses substantielles pour cette APD (FSP, AFD, aide budgétaire, FED) pour un total de plus de 150 millions d'euros. La programmation pour 2004 a été conçue en intégrant une diminution a priori des enveloppes de chaque pays, ce qui permettra d'adapter nos projets aux disponibilités finales en crédits.

A ce stade, le Ministre des Affaires étrangères a indiqué qu'il proposait pour la LOLF la construction suivante en trois programmes dotés chacun de 1,3 milliard d'euros.

Le premier programme serait intitulé « rayonnement et influence de la France » ; il comporterait les crédits de l'action diplomatique de la France, des directions géographiques, des contributions aux organisations internationales, l'action humanitaire et de maintien de la paix, la coopération en matière de défense.

Le deuxième programme serait celui de la coopération et de l'action culturelle qui regrouperait une grande partie des crédits de la DGCID. Une logique plus thématique « aide au développement » aurait été possible, regroupant les seuls crédits de l'aide au développement, mais cela supposerait en parallèle la création de la mission « action extérieure de l'Etat ». Le Ministre a dit souhaiter la création de cette mission, la jugeant incontournable, mais a souligné qu'il s'agissait d'un choix politique lourd de conséquences pour l'ensemble des autres administrations.

Le troisième programme intitulé « réseaux et services publics à l'étranger » regroupe essentiellement les crédits de la direction des Français à l'étranger, de la direction générale de l'administration, du Cabinet, du Secrétariat général et dans un premier temps des réseaux à l'étranger.

M. Pierre-André Wiltzer a ajouté que son premier objectif était de revenir sur la forte décroissance des années précédentes : la France doit faire face à une très forte demande d'accueil d'étudiants étrangers, en particulier de l'Afrique du Nord (qui constitue la moitié de l'effectif des étudiants africains en France). Pour ces étudiants, beaucoup plus répartis qu'avant sur tout le territoire, la France reste une destination privilégiée. Une question mériterait un débat en profondeur : faut-il continuer à proposer toujours davantage de places pour former les élites de ces pays, sachant qu'une grande partie de ces étudiants ne retourne pas dans son pays, ou bien faut- il compléter notre action par la mise en place de pôles de formation de haut niveau pour faire face à ces besoins ? Cette solution éviterait l'aspiration des étudiants formés vers l'Europe au détriment du pays d'origine.

M. Dominique de Villepin a ajouté que le ministère n'avait pas fait appel à des consultants privés pour la réforme ; un comité de pilotage a été mis en place, réunissant des personnes venant pour certaines de l'entreprise. Un contrôleur de gestion issu du privé a été sélectionné et nommé au sein du ministère, une consultation des postes et des agents du réseau a eu lieu. Un plan d'action stratégique, étalé sur quatre ans, va être définitivement adopté dans les prochains jours.

Le Président Edouard Balladur a rappelé qu'il y a une dizaine d'années, alors qu'il était Premier Ministre, la question du coût de l'installation des archives du ministère des Affaires étrangères à La Courneuve était déjà une préoccupation. Il s'est étonné que depuis dix ans rien ne se soit passé et a demandé si des crédits étaient disponibles pour cette action, qui, semble-t-il, doit prendre la forme d'une construction nouvelle.

Le Ministre des Affaires étrangères a répondu qu'en effet rien n'avait eu lieu car le choix du lieu avait fait l'objet de nombreuses discussions interministérielles depuis dix ans ; en outre, le ministère n'avait pas eu les moyens financiers permettant de réaliser ce projet et a espéré que ces moyens seraient à présent disponibles. Le problème est le même pour différents projets d'ambassades toujours dans les tiroirs (Tokyo ou Pékin par exemple), programmes qui ont fait les frais du manque de crédits de paiement disponibles ces dernières années.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mardi 4 novembre 2004, la Commission a examiné pour avis les crédits de la Coopération pour 2004.

M. Jacques Godfrain, Rapporteur pour avis, a d'abord rappelé le contexte international qui a fait apparaître les problèmes des pays du Sud. L'échec à Cancun du Sommet de l'OMC a mis plus que jamais en relief l'urgence d'une politique d'aide extérieure à l'égard des pays du Sud. Il a souhaité que l'aide publique au développement, la coopération multilatérale, mais surtout bilatérale soient les éléments essentiels de la politique extérieure de la France qui doit également s'efforcer de faire partager cette vision à ses partenaires européens.

Abordant la question de l'aide publique au développement, il a fait observer que pour l'exercice 2004, le volume d'APD devrait atteindre 0,43% du PIB. Au chapitre 68-91 « Fonds de solidarité prioritaire », les crédits de paiement connaissent un accroissement global de 28 M€ (soit + 25%). Un article 30 nouveau y est créé pour l'aide aux pays sortant de conflits.

S'agissant du fonctionnement de la Direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID), il a indiqué que la réforme institutionnelle étant achevée et l'organigramme stabilisé, la DGCID s'est consacrée à l'animation de la politique de coopération et d'aide au développement en s'attachant à moderniser aussi les instruments, les méthodes et les procédures.

Concernant les contributions volontaires de la France aux grandes agences internationales, il a regretté que notre pays ne figure dans aucune des principales institutions du système des Nations unies parmi les dix principaux contributeurs en raison de la faiblesse de ses contributions volontaires. En 2004, les crédits affectés aux organisations du système des Nations unies seront, au mieux, reconduits à l'identique. Au sein de l'aide multilatérale, qui représente à peine 10% depuis quelques années, l'arbitrage s'est fait en faveur de l'aide européenne conduisant à une perte d'influence de la France dans les organisations du système des Nations unies, et du ministère des Affaires étrangères dans la gestion interministérielle de l'aide. Il a demandé que des choix clairs soient opérés, car la politique qui consiste à reconduire toutes les contributions volontaires sans modifier leur répartition se révèle contreproductive. Mieux vaudrait privilégier certaines organisations dans lesquelles la France doit jouer un rôle important, disposant d'une expertise qui lui permet d'orienter les décisions.

M. Jacques Godfrain a souligné combien le gel des crédits sur les exercices 2002 et 2003 a gêné les actions de coopération extérieure de l'Etat et particulièrement celles engagées au titre de l'APD bilatérale, la seule qui soit directement perçue par les Etats et les populations concernées comme venant de la France. Le gel des crédits a obligé la DGCID à procéder à un abattement de 18 % sur ses crédits programmés et à revoir l'ensemble de sa programmation. Il a également souligné, pour l'exercice 2003, une baisse des crédits consacrés au volontariat associatif due à la régulation budgétaire. Amputées de 10 % de leurs crédits dès le mois de février, les associations ont subi le gel des crédits de report au mois de mai.

Pour 2004, il a recommandé d'éviter la brutalité de ces pratiques et surtout de maintenir l'APD bilatérale à son niveau initialement prévu dans le budget pour 2004, faute de quoi la plus grande partie de l'aide publique française au développement transiterait par le Fonds européen de développement (FED) sans visibilité spécifique sur le terrain ni possibilité d'influer sur les décisions, alors que le besoin de France est exprimé dans toute l'Afrique et au-delà.

Par ailleurs, il s'est félicité de l'action réformatrice menée par le Ministre des Affaires étrangères, qui a ouvert le chantier de la modernisation de l'action extérieure de l'Etat avec pour objectif premier l'adaptation du ministère aux changements. Ainsi, la DGCID pourra mieux organiser ses relations avec les autres directions et notamment les directions politiques. Elle aura pour tâche de restructurer le réseau des centres culturels et de mieux le coordonner avec celui des alliances françaises pour supprimer les doublons. De même, il lui faudra s'adapter à la gestion de contrats d'objectifs, ce qui pose le problème de la co-tutelle des ministères des affaires étrangères et de l'économie et des finances sur l'Agence française de développement (AFD), qui génère des difficultés d'exécution des programmes sur place.

Le Rapporteur a proposé que soient développées des actions de coopération dans des domaines ciblés dans lesquels l'expertise française est unanimement reconnue : coopération en matière de santé, d'aide humanitaire d'urgence, d'aide alimentaire, appui au développement institutionnel.

Il a présenté les moyens mis en _uvre au niveau bilatéral en 2002 par la France dans la lutte contre le Sida : 15 M€ via la DGCID, 8 M€ via l'Agence nationale de recherche sur le Sida et 9 M€ via le projet Ensemble pour une Solidarité thérapeutique hospitalière en réseau (ESTHER) et a rappelé les engagements pris par la France au plan multilatéral pour lutter contre cette pandémie, en soulignant l'ampleur et la diversité des engagements français en matière de lutte contre le Sida.

Constatant que l'action humanitaire d'Etat est une composante importante de la politique étrangère de la France, il a insisté sur le fait que c'est l'un des domaines où la compétence française est unanimement reconnue et qu'il conviendrait de renforcer les moyens de cette action.

En ce qui concerne l'aide alimentaire, il a observé qu'elle permettait à la France d'être présente face aux besoins conjoncturels et structurels dans une logique de prévention des crises sur le long terme. Il s'est étonné de l'absence de synergies dans les actions de coopération entre les différents organismes chargés de la recherche en matière agricole. L'éparpillement des structures, l'absence de concertation entre elles, nuisent à l'action de terrain, d'autant qu'il convient d'améliorer la productivité et la qualité de production du Sud pour obtenir l'autosuffisance alimentaire.

Evoquant l'appui aux institutions africaines, il a jugé que le NEPAD était une priorité, les avancées obtenues à Evian lors de la réunion du G8 en juin 2003 en constituant la démonstration. Il a insisté sur le rôle positif de l'Organisation pour l'harmonisation du droit des Affaires en Afrique (OHADA), que la France soutient depuis l'origine.

Abordant les nouvelles formes de coopération, le Rapporteur a jugé utile de privilégier le co-développement, qui a le mérite de faire du migrant un opérateur potentiel du développement. Par des aides spécifiques, ce processus valorise la compétence des migrants. Des systèmes d'aide à la création d'activités économiques par des migrants dans leur pays d'origine ont été mis en place et sont efficaces. Dans ce cadre, il a proposé à nouveau la création d'un livret d'Epargne développement permettant aux migrants d'utiliser leur épargne à des projets de développement tout en sécurisant les transferts de fonds dans leur pays d'origine.

En conclusion, M. Jacques Godfrain a tenu à faire observer que l'effort de remise de la dette des pays les plus pauvres consenti par la France atteignait près de 2 milliards d'euros, dont près d'1,5 milliard pour les seules remises de dettes aux pays les plus pauvres très endettés. Il a fait remarquer que ces aides représentent près du quart des 9 milliards d'euros de déficit excessif (0,6 % du PIB) que la Commission européenne reproche à la France. Il s'est demandé si on pénaliserait la France parce qu'elle accroît son aide aux pays pauvres très endettés conformément aux engagements de l'ensemble des pays développés et de la communauté internationale et de la Commission européenne elle-même.

M. Serge Janquin a donné acte à MM. Richard Cazenave et Jacques Godfrain de leur franchise dans la présentation de leur avis budgétaire respectif, eu égard aux gels, régulations et autres annulations de crédits qui, en 2003, ont altéré l'exécution de la loi de finances telle qu'elle avait été votée, tout en faisant observer que l'utilisation de la régulation touchait à la sincérité d'un projet de budget.

Il a souhaité connaître le montant précis du crédit inscrit au Projet de loi de Finances initial pour 2004 pour le Fonds mondial de lutte contre le Sida.

M. Jacques Godfrain a remercié M. Serge Janquin pour sa question en prônant un engagement fort contre tout gel budgétaire touchant l'APD. Il a précisé que l'aide française en matière de lutte contre le Sida passait par des canaux bilatéraux et multilatéraux. S'agissant de la contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le Sida, la tuberculose et le paludisme, celle-ci s'élevait à 50 M€ en 2002 dont 70% consacrés au Sida, soit 35 M€. Il a rappelé qu'en juin 2003, le Président de la République avait annoncé le triplement de la contribution française à ce Fonds.

Suivant l'avis du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Coopération pour 2004.

LISTE DES PERSONNALITÉS ENTENDUES

- M. Marc Gentilini, Président de la Croix-Rouge française, le 25 septembre 2003 ;

- M. Hubert Colin de Verdière, Secrétaire général du Quai d'Orsay, et M. Claude Blanchemaison, Directeur de la DGCID, le 25 septembre 2003

- M. Henri Carsalade, sous-Directeur général du département de la coopération technique de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le 13 octobre 2003 ;

ANNEXES

 

N° 1113 tome III : Avis sur le projet de loi de finances pour 2004 de M. Jacques Godfrain - Coopération et développement


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