Document mis en distribution le 2 novembre 2004 N° 1863 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004 RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800), PAR M. GILLES CARREZ, Rapporteur Général, Député. -- ANNEXE N° 5 FORMATION PROFESSIONNELLE Rapporteur spécial : M. JEAN-Michel FOURGOUS Député ____ I.- UN ENJEU STRATÉGIQUE CONFRONTÉ À DE MULTIPLES DÉFIS 8 A.- UN ENJEU STRATÉGIQUE 8 B.- DE MULTIPLES DÉFIS 9 II - UN BUDGET DE CONTINUITE POUR 2005 17 A.- UN BUDGET QUI S'INSCRIT DANS LE DROIT FIL DE LA POLITIQUE ENGAGEE DEPUIS 2002 17 1.- La validation des acquis de l'expérience 17 2.- Une implication plus forte des régions 18 3.- Le développement du système de formation professionnelle continue des salariés 18 4.- L'encouragement de l'apprentissage 20 B.- UN BUDGET AXE SUR LA POURSUITE DE LA DECENTRALISATION, LES FORMATIONS EN ALTERNANCE ET L'INSERTION DES PUBLICS EN DIFFICULTE 21 1.- Une diminution globale des crédits compensée par plusieurs mesures connexes 21 2.- La poursuite de la décentralisation 24 3.- Le développement de l'apprentissage 25 4.- L'encouragement des autres formations par alternance 28 5.- L'accompagnement des jeunes sans qualification 28 6.- L'aide aux publics les plus en difficulté 29 C.- LES AUTRES MESURES BUDGÉTAIRES 31 1.- La validation des acquis de l'expérience 31 2.- La formation professionnelle des adultes 31 3.- Les formations en faveur des chômeurs de longue durée 31 4.- Les dépenses en capital 31 5.- Les expérimentations 32 III.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES LAISSE ENTREVOIR DE MULTIPLES VOIES DE PROGRÈS, MOYENNANT CERTAINES AMÉLIORATIONS. 33 A.- UNE APPROCHE PLUS STRATÉGIQUE 33 B.- UN PROGRAMME QUI DOIT ENCORE GAGNER EN CLARTÉ 35 C.- DES INDICATEURS DE PERFORMANCE QUI DEVRAIENT ÊTRE PRÉCISÉS, ÉVALUÉS ET AJUSTÉS 36 EXAMEN EN COMMISSION 39 Article 75 : révision du dispositif des exonérations de cotisations sociales patronales au titre des salaires versés aux apprentis 41 ANNEXES 47 - Annexe 1 : présentation des crédits de la formation professionnelle selon la nouvelle nomenclature budgétaire 49 - Annexe 2 : liste des objectifs et indicateurs du programme 3 (accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques) 57 L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre. A cette date, environ 70 % des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial, contre 77 % l'année dernière au même moment. Ce taux est insuffisant. D'autant que votre Rapporteur spécial avait, cette année, expressément demandé les réponses pour le 17 septembre. Or, le 30 septembre, seulement 46 % de celles-ci avaient été transmises.
Doté de 4.849,9 millions d'euros pour 2005, le projet de budget relatif à la formation professionnelle représente 1,7 % du budget de l'État. Alors que celui-ci progresse de 1,8 %, il diminue de 3 % par rapport à 2004 ; cette baisse doit toutefois être relativisée compte tenu de plusieurs changements de périmètre. Au croisement de multiples réformes (la formation professionnelle elle-même, mais aussi la décentralisation ou le plan de cohésion sociale), la formation professionnelle constitue aujourd'hui un enjeu stratégique confronté à de multiples défis. En effet, l'insertion dans la vie active et la capacité des salariés à s'adapter aux mutations socio-économiques sont une des clés de l'exception française en matière de chômage. Le passage entre sortie du système éducatif et entrée dans une vie professionnelle stable reste des plus problématiques, le marché du travail payant le tribut d'un manque d'adaptation de l'offre de formation initiale et d'une inégalité d'accès aux dispositifs de formation, ce par méconnaissance de la réalité du monde de l'entreprise. Le projet de budget, qui s'inscrit dans la continuité de la politique de relance de la formation engagée depuis 2002, tend à y répondre. Par une nécessaire réforme du système d'orientation, un développement de l'apprentissage en entreprise puis une généralisation du droit à la formation permanente et individuelle du salarié, le concept de formation tout au long de la vie prend alors tout son sens. Source de responsabilité et de promotion sociale, la formation professionnelle devient ainsi un élément essentiel de la compétitivité de nos salariés et de la capacité de nos entreprises à conserver et conquérir de nouveaux marchés. L'occasion est à présent offerte à l'État de prendre sa part de ces mutations. Au regard des insuffisances structurelles persistantes du système de formation professionnelle dans notre pays, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances offre une double opportunité, qu'il convient pleinement d'exploiter : clarifier la présentation des crédits et, surtout, rationaliser leur emploi, en se dotant d'objectifs et d'indicateurs de performance rigoureux. I.- UN ENJEU STRATÉGIQUE CONFRONTÉ À DE MULTIPLES DÉFIS La formation professionnelle constitue un triple enjeu stratégique pour l'avenir de notre pays. Économique d'abord. Rappelons que la dépense de la Nation en faveur de la formation professionnelle et de l'apprentissage s'élève à environ 21,8 milliards d'euros (1), soit 1,43 % du PIB. Elle mobilise à ce titre une multiplicité d'acteurs : l'État (20,3 % de la dépense), les régions (9,6 %), l'UNEDIC (4,8 %), diverses autres administrations publiques (3,1 %) ou collectivités territoriales (0,1 %), les ménages (2,9 %), et surtout les entreprises (44,2 %). On estime que le chiffre d'affaires des organismes exerçant une activité marchande principale ou secondaire de formation continue représente au moins 7,8 milliards d'euros (0,5 % du PIB), dont les trois quarts sont réalisés par le secteur privé. Les organismes exerçant la formation continue à titre principal emploieraient environ 120.000 personnes. Quant aux animateurs de formation continue, ils représenteraient au moins 135.000 personnes(2). Mais au-delà de l'importance économique du secteur, la formation professionnelle constitue surtout un enjeu stratégique évident dans la mesure où elle détermine le niveau de qualification des salariés. Or, comme l'ont montré de nombreuses études, notamment celles de l'OCDE, le niveau de qualification conditionne pour une large part celui du développement. En outre, la capacité d'un pays à former ses salariés dans des secteurs à forte valeur ajoutée, où il peut faire valoir un avantage comparatif par rapport à ses partenaires, influe directement sur le rythme de ce développement et, par conséquent, celui de la croissance, du pouvoir d'achat et des créations d'emplois. L'enjeu est aussi évidemment social. Car une formation adaptée, outre le fait qu'elle offre à chacun l'opportunité de trouver un emploi - et limite, ce faisant, les phénomènes d'exclusion, avec tous les effets négatifs en chaîne qu'ils entraînent -, lui permet aussi d'exercer l'activité qu'il désire. De plus, la formation professionnelle est un moyen de promotion sociale. Le premier capital de tout individu est en effet sa compétence. Dans une société qui évolue sans cesse, où des métiers disparaissent, de nouveaux besoins naissent, l'important n'est pas tant de conserver coûte que coûte son emploi mais bien d'être en capacité d'en trouver un autre rapidement. La politique de l'État en matière de formation doit donc poursuivre cet objectif en donnant à chacun la possibilité d'adapter ses compétences et de progresser. C'est enfin une façon d'élever l'homme, par l'intelligence et la culture ; de ce fait, elle participe à une forme d'humanisme. Dans une société marquée par de multiples formes d'exclusion, de violence, d'intolérance, comment le négliger ? Enfin, l'enjeu est politique. Sur le plan international, l'expansion économique que conditionne le niveau de qualification, est un facteur clé de la puissance politique et de l'influence géographique. Le Conseil européen des chefs d'État réunis à Lisbonne en mars 2000 en a pleinement pris la mesure en fixant à l'Union européenne comme nouvel objectif stratégique pour la décennie de « devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ». Sur le plan interne, le Gouvernement qui parviendra, par une politique dynamique de croissance et de création d'emplois, à vaincre le chômage, s'assurera une confiance durable. Or, il suffit de voir la forte inadéquation qui existe dans notre pays entre l'offre et la demande d'emplois, par déficit de personnel qualifié - que ce soit dans l'artisanat, l'industrie ou le secteur tertiaire - pour se convaincre de l'utilité première d'un système de formation professionnelle adapté. La France dispose de plusieurs atouts en la matière : un niveau de formation initiale globalement élevé, de nombreux organismes, contrats ou dispositifs de formation, et une aide financière substantielle des pouvoirs publics, notamment. Mais notre système de formation professionnelle comporte aussi de multiples faiblesses, qui sont autant de défis à relever. Déjà évoquées dans plusieurs rapports administratifs ou parlementaires, elles tiennent à plusieurs facteurs. En termes quantitatifs, on note un retard de la France par rapport à plusieurs pays développés. Ainsi, alors que 30 % environ de la population âgée de 25 à 64 ans bénéficie, au moins une fois par an, d'une formation continue dans notre pays, cette proportion dépasserait 40 % en Allemagne, au Royaume-Uni, aux États-unis et dans les pays d'Europe du Nord. Ce retard est d'autant plus préjudiciable que le niveau de formation par groupe d'âge y est inférieur. La part des 25-34 ans ayant atteint au moins une formation de deuxième cycle du secondaire s'élève à 78 %, contre 88 % aux États-unis, 86 % au Danemark et 85 % en Allemagne (le Royaume-Uni étant derrière avec 68 %) (3). Pour les 35-44 ans, elle atteint 67 %, à peu près au même niveau que le Royaume-Uni (65 %), mais loin derrière les États-Unis (89 %), l'Allemagne (86 %) et le Danemark (80 %). Si l'on considère les 55-64 ans, l'écart est encore plus marqué : 46 % seulement, contre 83 % aux États-Unis, 76 % en Allemagne, 72 % au Danemark et 55 % au Royaume-Uni. Cette faiblesse s'explique notamment par la diminution constante de la richesse nationale consacrée à la formation et à l'apprentissage depuis 1993. La part de la dépense globale qui lui est dévolue est passée de 1,9 % du PIB en 1993 à 1,75 % en 1996, 1,5 % en 2000, et 1,43 % en 2002. DÉPENSE GLOBALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE Source : DARES, données provisoires. Le système de formation professionnelle est marqué par de fortes inégalités selon l'âge et le statut. Le taux d'accès selon l'âge varie de 14 % pour les 60-65 ans à 36 % pour les 25-29 ans et 30-34 ans. Si les jeunes ont besoin d'être formés pour mieux s'insérer dans la vie professionnelle, les travailleurs les plus âgés ont, aussi, un même besoin pour s'adapter aux mutations économiques et technologiques. De ce point de vue, un taux d'accès à la formation continue de 20 % pour les 55-59 ans et 27 % pour les 50-54 ans paraît notoirement insuffisant.
À ces inégalités selon l'âge s'ajoute, de façon encore plus marquée, des inégalités selon la catégorie socio-professionnelle. Alors que le taux d'accès est de de 54 % en moyenne pour les cadres, il est de seulement 20 % pour les ouvriers et 29 % pour les employés. On relève également d'importantes inégalités selon le secteur ou la taille de l'entreprise. La répartition des dépenses de l'État par public bénéficiaire fait apparaître une part prépondérante du secteur public (42,6 %) par rapport au secteur privé (57,4 %), en proportion des effectifs respectifs de ces secteurs (le secteur public représentant environ 20 % des actifs).
Si cet écart peut s'expliquer par le rôle de l'État employeur vis-à-vis de ses salariés, on peut aussi penser que celui-ci a un devoir tout aussi important vis-à-vis des salariés du secteur productif ou exposés au chômage. Mais c'est selon la taille des entreprises que les inégalités sont les plus prononcées. On estime que le taux de formation est quatre fois plus élevé dans les grandes entreprises que dans les petites. Les contraintes de production d'une petite entité et la complexité d'accès à l'offre de formation l'expliquent pour une large part. On constate aussi des problèmes d'inadaptation de l'offre de formation. Elle paraît parfois soit trop éloignée des exigences professionnelles des bénéficiaires, soit trop théorique. Son inadéquation avec les perspectives d'emploi est ainsi à l'origine de centaines de milliers d'offres non pourvues chaque année. L'intelligence requise par le marché, ce n'est pas la capacité d'abstraction et de synthèse, mais bien la capacité à trouver une solution à un problème. Seule l'entreprise apporte cette perception de la réalité. Or, l'entreprise demeure ignorée, voire méprisée, dans les programmes scolaires. La voie professionnelle en prise avec la réalité des métiers, qui devrait être celle de l'excellence, est au contraire stigmatisée et assimilée à l'échec. Cela contribue à en détourner les meilleurs éléments et explique certainement que près de 70% des jeunes Français rêvent aujourd'hui de rejoindre la fonction publique. La gestion des dépenses de l'État consacrées à la formation professionnelle est d'une efficacité limitée. La part des dépenses publiques (représentées majoritairement par des dépenses de l'État) se situe, avec 0,38 % du PIB, à un niveau relativement élevé par rapport aux principaux autres pays développés. Ce taux atteint en effet 0,34 % en Allemagne, 0,16 % au Canada, 0,12 % au Royaume-Uni et 0,03 % aux États-Unis. Il est cependant plus élevé au Danemark (0,86 %), en Italie (0,7 %) et aux Pays-Bas (0,65 %).
Si l'on compare cet effort avec le taux de chômage (de l'ordre de 10 %), son rendement est relativement faible, dans la mesure où tous ces pays enregistrent un taux de chômage plus bas, voire nettement inférieur (6 % aux États-Unis, 5 % au Royaume-Uni, et 7 % en moyenne dans les pays de l'OCDE). Certes, le taux de chômage dépend d'autres facteurs que le niveau de formation professionnelle. Mais la conjonction de ces deux faits est marquante, surtout au regard des critiques émises sur la gestion des dépenses de formation professionnelle de l'État : complexité de l'offre, opacité de la gestion, multiplication des dispositifs, changements fréquents de la réglementation, mise en concurrence insuffisante des opérateurs, éparpillement des crédits, qualité variable des prestations... Ainsi - exemple parmi d'autres d'une gestion aléatoire - votre Rapporteur spécial a souhaité connaître la liste des 100 principaux organismes publics et parapublics financés par le budget de la formation professionnelle. Voici la réponse qui lui fut apportée : « Le ministère de l'Emploi, du travail et de la cohésion sociale ne dispose pas de liste centralisée des organismes publics et parapublics qui sont financés par le budget de la formation professionnelle compte tenu de la multiplicité des financeurs ». Il est des silences éloquents. Quant à la question de savoir quelle est leur efficience ou rentabilité relative, est-il utile de préciser qu'elle n'a donné lieu à aucune réponse ? À cette opacité de la gestion, s'ajoute celle des documents budgétaires. Veut-on connaître le montant des crédits consacrés par l'État à la formation professionnelle ? Celui-ci fournit pas moins de trois chiffres différents. Si l'on s'en tient à l'annexe bleue du projet de loi de finances, l'agrégat 2 relatif à la « participation de l'État à la formation professionnelle » affiche 3.880,7 millions d'euros pour 2004 et 3.752,6 millions pour 2005. Mais si l'on se réfère au « jaune » (4), ce montant s'élève à 5.002,9 millions d'euros en 2004 et 4.849,9 millions en 2005. Pas moins de 1.122 millions de différence pour 2004 et 1.097 millions pour 2005 ! Quant à la réponse au questionnaire adressé par votre Rapporteur spécial, elle annonce un troisième type de chiffres : 4.995,5 millions pour 2004 et 4.841,3 millions pour 2005 ! Veut-on connaître les principales masses de dépenses ? Il convient de ne surtout pas se fier à l'agrégat « Participation de l'État à la formation professionnelle » dont c'est pourtant l'objet : la dépense principale, constituée par la subvention de l'AFPA (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) et qui représente quelque 750 millions d'euros n'y figure pas ! (5) Veut-on avoir une idée précise du contenu des dépenses et de leur utilisation ? Le nombre d'organismes et de dispositifs de formation est tel que, combiné à l'empilement des réglementations successives et aux multiples changements de nomenclature et de périmètre budgétaires, cet exercice ne peut être aujourd'hui réservé qu'à quelques experts. Sont-ce là les conditions d'un bon contrôle démocratique de la dépense publique par le peuple et ses représentants ? Offrent-elles une base satisfaisante au débat parlementaire, pour lui permettre d'améliorer l'emploi des fonds publics ? II - UN BUDGET DE CONTINUITE POUR 2005 A.- UN BUDGET QUI S'INSCRIT DANS LE DROIT FIL DE LA POLITIQUE ENGAGEE DEPUIS 2002 La politique de formation professionnelle conduite depuis 2002 recouvre quatre orientations principales : la validation des acquis de l'expérience, le développement du système de formation continue des salariés, une implication plus forte des régions et l'encouragement de l'apprentissage. 1.- La validation des acquis de l'expérience Un droit individuel à la validation des acquis de l'expérience a été créé par la loi n° 2002 - 73 du 17 janvier 2002. Ce droit consiste à favoriser l'accès des actifs aux différentes certifications existantes en vue d'alléger les parcours de formation, de rendre « lisible » et « transférable » l'expérience acquise, et d'encourager la promotion sociale et professionnelle. Désormais, toute personne engagée dans la vie active est en droit de faire valider les acquis de son expérience pour obtenir un diplôme, un titre de nature professionnelle ou un certificat de qualification de branche, enregistrés dans un répertoire national des certifications professionnelles. Peut être pris en compte pour la validation l'ensemble des compétences professionnelles acquises dans l'exercice d'une activité salariée, non salariée ou bénévole en rapport avec le diplôme ou le titre recherché. La durée minimale d'activité requise à cet effet est de trois ans. À cette fin, un répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) a été instauré par un décret du 26 avril 2002. Ce répertoire est élaboré par la commission nationale de la certification professionnelle (CNCP), composée de représentants de seize ministères, ainsi que des organisations patronales et syndicales, des régions et des chambres consulaires. A terme, un fichier complet des certifications par secteur professionnel sera accessible au grand public. Ce fichier sera triplement utile : pour les salariés, en vue de trouver l'emploi qui leur correspond ; pour les entreprises, afin de satisfaire leurs besoins ; et pour les services de placement, dont le travail sera ainsi facilité. La généralisation et la réussite de la validation des acquis de l'expérience suppose l'implication de l'ensemble des acteurs régionaux et locaux. Aussi, le ministère du travail organise-t-il, avec les conseils régionaux, le maillage territorial d'information sur la validation, composé d'une tête de réseau régional - appelée cellule régionale inter-services - et de points de relais-conseil. À la fin de 2003, près de 400 points de relais étaient opérationnels dans 22 régions. 2.- Une implication plus forte des régions Trois lois ont successivement renforcé les compétences régionales en matière de formation professionnelle depuis deux ans : - la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 relative à la modernisation sociale, qui a permis la création de nouveaux comités de coordination régionaux de l'emploi et de la formation professionnelle (CCREFP). Coprésidés par le préfet de région et le président du conseil régional, ces comités tendent à coordonner les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle menées par l'État, le conseil régional et les partenaires sociaux ; - la loi n° 2002-76 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, qui renforce cette coordination régionale, en instaurant un plan régional de développement de la formation professionnelle des jeunes et des adultes, élaboré par le conseil régional en concertation avec l'État et les organisations syndicales. Ce plan donne lieu à la définition d'un schéma régional des formations de l'Association nationale de formation professionnelle des adultes (AFPA) ; - la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui étend à l'ensemble des publics la responsabilité des conseils régionaux en matière de formation professionnelle. Elle se traduit notamment par le transfert aux régions des crédits consacrés par l'État aux stages de l'AFPA (comprenant les crédits de fonctionnement des stages et de rémunération des stagiaires). Ce transfert se fera, région par région, dans le cadre de conventions tripartites entre l'État, les régions et l'AFPA, qui devront être signées entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2008 au plus tard. S'agissant de l'apprentissage, les régions disposeront d'une plus grande marge d'action pour fixer le régime de l'indemnité compensatrice forfaitaire aux employeurs d'apprentis, en respectant toutefois un montant minimum. 3.- Le développement du système de formation professionnelle continue des salariés Cette réforme a été mise en œuvre par la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, qui traduit l'accord national interprofessionnel relatif à l'accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle, signé le 20 septembre 2003 par l'ensemble des organisations patronales (MEDEF, CGPME, UPA) et syndicales (CGT, CFDT, CGT-FO, CFTC, CFE-CGC) représentatives au niveau national. Cette loi tend à remédier aux insuffisances et aux dysfonctionnements du système de formation professionnelle continue des salariés, découlant de l'accord national interprofessionnel du 9 juillet 1970 et de la loi du 16 juillet 1971 : en particulier, l'inégalité d'accès à la formation, la part prépondérante des actions courtes d'adaptation à l'emploi et le manque de lisibilité des responsabilités et des dispositifs. Outre le plan de formation de l'entreprise et les congés individuels de formation, les salariés peuvent désormais avoir recours à deux dispositifs : - un droit individuel à la formation de 20 heures par an, cumulables sur six ans. Ce droit nouveau est mis en œuvre à l'initiative du salarié, avec l'accord de l'employeur sur le choix de la formation. La formation se déroule en principe en dehors du temps de travail, sauf si un accord de branche en décide autrement. Dans le premier cas, elle donne lieu au versement par l'employeur, en plus des frais de formation, d'une allocation égale à 50 % du salaire. Les droits obtenus par le salarié restent acquis en cas de licenciement. Ce droit est en outre partiellement transférable d'une entreprise à une autre ; - une période de professionnalisation, afin de permettre aux salariés d'acquérir une qualification ou de participer à une action de professionnalisation au travers d'une formation en alternance. Mise en œuvre soit à l'initiative de l'employé, soit à celle de l'employeur, elle bénéficie à certaines catégories de salariés, en particulier ceux dont la qualification est inadaptée à l'évolution des technologies et ceux qui sont en deuxième partie de carrière. En outre, la loi a simplifié et élargi le régime de la formation en alternance en fusionnant les différents contrats de formation existants (contrats d'orientation, d'adaptation et de qualification), au profit d'un dispositif unique : le contrat de professionnalisation. Ouvert aux jeunes cherchant à s'insérer dans la vie active et aux adultes demandeurs d'emploi, il est composé d'un contrat de travail d'une durée de six à douze mois minimum pour un emploi en relation avec la qualification recherchée et d'une formation d'une durée de 15 % au minimum de celle du contrat, avec un plancher de 150 heures. Ces seuils peuvent être relevés dans le cadre d'un accord de branche pour certaines formations ou certains types de publics. Parallèlement, la contribution légale des entreprises au financement de la formation professionnelle a été accrue : celle des entreprises de 10 salariés et plus est passée, dès 2004, de 1,5 à 1,6 % du montant des rémunérations brutes versées au cours de l'année ; celle des entreprises de moins de 10 salariés est portée de 0,25 à 0,40 % au 1er janvier 2004, puis à 0,55 % au 1er janvier 2005. Il revient aux branches professionnelles de définir notamment les priorités du droit individuel à la formation et les objectifs de professionnalisation des actions proposées aux salariés. À cette fin, elles peuvent bénéficier d'une fongibilité renforcée des fonds mutualisés et s'appuyer sur les données de l'observatoire des métiers et des qualifications qu'elles doivent mettre en place. Dans le cadre de l'entreprise, les différentes catégories d'actions du plan de formation sont définies en tenant compte de l'avis du comité d'entreprise. La mise en œuvre de la loi a donné lieu à deux efforts financiers complémentaires de l'État : l'exonération des cotisations sociales patronales pour les contrats de professionnalisation en faveur des jeunes et des demandeurs d'emploi de plus de 45 ans, le non assujettissement de l'allocation de formation, ainsi que des aides forfaitaires versées aux entreprises de moins de 50 salariés pour compenser le salaire accordé aux salariés recrutés pour remplacer ceux partis en formation. Enfin, a été créé un conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, remplaçant le conseil national de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l'emploi et le comité de coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue. Il est chargé de favoriser, au niveau national, la concertation entre les acteurs des politiques de formation professionnelle et le suivi de la mise en œuvre de celles-ci. 4.- L'encouragement de l'apprentissage Deux dispositifs ont été élaborés depuis 2002 pour favoriser l'apprentissage. En premier lieu, la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 a réformé le financement de l'apprentissage. Elle a décidé le transfert aux régions des indemnités versées aux employeurs pour l'embauche et la formation d'apprentis (indemnités compensatrices forfaitaires), dont la mise en œuvre est étalée entre 2003 et 2006. Elle simplifie par ailleurs le mécanisme de collecte (qui se traduit par une réduction significative du nombre d'organismes de collecte), un accroissement de la transparence et une meilleure allocation des ressources dédiées à l'apprentissage. Le deuxième dispositif est constitué par le plan de cohésion sociale, élaboré depuis le printemps dernier, devant donner lieu au projet de loi de programmation sur la cohésion sociale, qui devrait être débattu cet automne au Parlement. Ce plan comporte notamment deux programmes, consacrés à la formation des jeunes. En premier lieu, le programme 3 réformant l'apprentissage, à la suite, notamment, des conclusions du livre blanc du secrétariat d'État aux PME. Il est prévu que l'État devrait conduire, avec les organismes consulaires, les partenaires sociaux et les régions, plusieurs actions pour augmenter de 40 % le nombre d'apprentis d'ici 2009. Plusieurs dispositions législatives seront proposées pour rendre l'apprentissage plus attractif : des aides pour le logement et la mobilité, une carte nationale d'apprenti et un nouveau crédit d'impôt (6) pour les entreprises embauchant des apprentis. Parallèlement, l'augmentation de la rémunération des apprentis devrait faire l'objet de négociations avec les partenaires sociaux. Par ailleurs, plusieurs dispositions tendent à améliorer l'efficacité et la transparence du financement de l'apprentissage. Quant au programme 4 du plan de cohésion sociale, il prévoit la création d'une nouvelle voie de recrutement d'emplois publics, fondée sur le principe d'une formation alternée dans le service public. Intitulée PACTE (parcours d'accès à la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État), elle bénéficiera notamment aux jeunes issus des quartiers sensibles. La rémunération devrait être calculée selon le même mécanisme que le contrat de professionnalisation et des exonérations de cotisations devraient inciter les collectivités locales et les hôpitaux à recourir à cette nouvelle forme de recrutement. Les dispositions législatives concernant le PACTE devraient être intégrées dans le projet de réforme de la fonction publique. B.- UN BUDGET AXE SUR LA POURSUITE DE LA DECENTRALISATION, LES FORMATIONS EN ALTERNANCE ET L'INSERTION DES PUBLICS EN DIFFICULTE 1.- Une diminution globale des crédits compensée par plusieurs mesures connexes Si l'on considère l'annexe jaune au projet de loi de finances, qui englobe plus largement les crédits de formation professionnelle (par rapport, notamment, à l'annexe bleue), ceux-ci s'élèveraient à 4.849,9 millions d'euros en 2005, contre 5.002,9 millions d'euros en 2004, soit une diminution de 153 millions d'euros (- 3 %). Ils représentent 2 % de l'ensemble des budgets civils de l'État et 1,7 % du budget général.
Toutefois, cette baisse est liée à plusieurs modifications de périmètre : - le transfert des crédits de la politique contractuelle (chapitre 43-70, article 51) vers l'agrégat « promotion de l'emploi et adaptation économique » (chapitre 44-79, article 21) pour un montant de 39,6 millions d'euros ; - le transfert des crédits relatifs aux organisations syndicales (chapitre 44-70, article 55) vers l'agrégat « gestion de la politique de l'emploi » (chapitre 44-73 « relations de travail et amélioration des conditions de travail »), pour un montant de 12,2 millions d'euros ; - le transfert d'environ 180 millions d'euros de la dotation de décentralisation relative à l'apprentissage (articles 10 et 20 du chapitre 43-06) en une nouvelle ressource propre des régions : la contribution au développement de l'apprentissage, dont le taux est fixé à 0,06 % de la masse salariale et qui devrait procurer 197,9 millions d'euros. À périmètre constant, le budget total de la formation professionnelle s'élève donc à 5.100 millions d'euros (4.849 M€ + 39,6 M€ + 12,6 M€ + 197,9 M€) contre 5.003 millions d'euros en 2004. Il traduit une augmentation de 97 millions d'euros, soit 1,9 %. Enfin, il convient de tenir compte des mesures prévues dans le cadre du plan de cohésion sociale (enveloppe unique régionale, contrats d'avenir...) comportant une part de formation, cette part n'étant pas, selon les informations communiquées, toujours identifiée en tant que telle dans le budget. 2.- La poursuite de la décentralisation La poursuite de la décentralisation des compétences et du financement de la formation professionnelle se traduit dans le budget pour 2005 par deux mesures principales : - la création d'une nouvelle ressource propre des régions, constituée par la contribution au développement de l'apprentissage précitée. Taxe additionnelle à la taxe d'apprentissage, elle repose sur un transfert de crédits vers les régions qui devrait se poursuivre pendant une durée de trois ans. Le taux de 0,06 % serait porté à 0,12 % sur les rémunérations de 2005 et à 0,18 % sur celles de 2006. À cet égard, votre Rapporteur spécial estime qu'il serait souhaitable de procéder à une évaluation préalable du nouveau dispositif au taux de 0,06 % avant d'envisager une nouvelle augmentation. Il convient en effet de sortir d'une logique d'accroissement automatique des prélèvements pesant sur les entreprises, mais aussi d'adopter une démarche fondée sur l'évaluation et la performance ; ce, conformément à l'esprit de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances ; - l'accroissement de la dotation de décentralisation inscrite au chapitre 43-06, qui passe de 1.862,4 millions d'euros en 2004 à 2.052,5 millions d'euros en 2005, soit une progression de 190 millions d'euros. Cette hausse s'explique notamment par le transfert aux régions, par le biais de la dotation de décentralisation, du financement des primes de contrats d'apprentissage. 3.- Le développement de l'apprentissage La réforme de l'apprentissage, qui figure au cœur du plan de cohésion sociale du Gouvernement, constitue l'action la plus marquante, dans le budget pour 2005, en matière de formation professionnelle. Cette réforme tend à faire passer de 350.000 à 500.000 le nombre d'apprentis par an en cinq ans. Elle repose sur trois séries de mesures : rendre l'apprentissage plus attractif pour les jeunes, le rendre plus intéressant pour les employeurs et mobiliser des ressources supplémentaires au profit du système de formation. Il convient de rappeler que l'apprentissage est financé par trois acteurs principaux : les entreprises, qui paient la taxe d'apprentissage (représentant en général 0,5 % de la masse salariale) ; les régions, compétentes pour la construction et le financement des centres de formation d'apprentis (CFA) et pour octroyer une prime incitative aux employeurs ; enfin, l'État, qui compense les dépenses des régions par le biais de la dotation générale de décentralisation et qui finance les exonérations de charges sociales dont bénéficient entreprises et apprentis. Or, la réforme tend à accroître les moyens dont dispose chacun de ces acteurs.
Cette augmentation repose sur trois mesures principales : - pour les régions, la création de la contribution au développement de l'apprentissage (197 millions d'euros) ; - pour les entreprises, la création d'un crédit d'impôt de 1.600 euros par apprenti présent au moins six mois pendant l'année précédente (472 millions d'euros) ; - pour l'État, la suppression de diverses exonérations jugées « injustifiées » de taxe d'apprentissage, permettant une économie évaluée à 123 millions d'euros. Il s'agit de dépenses non directement liées à l'apprentissage acquittées par les entreprises. Dans l'ensemble, ces trois mesures permettront, selon le Gouvernement, de mobiliser environ 600 millions d'euros de crédits supplémentaires au profit de l'apprentissage. Si les entreprises seront tenues de payer 197 millions d'euros supplémentaires au titre de la contribution au développement de l'apprentissage et 123 millions d'euros au titre de la suppression des exonérations précitées, elles recevront la dotation de 472 millions d'euros correspondant au crédit d'impôt, soit, en principe, un gain net pour elles de 152 millions d'euros. Cependant, si l'on tient compte de la suppression des exonérations de cotisations sociales patronales pour les apprentis ayant obtenu leur diplôme (7), ce gain n'est plus que de 120 millions d'euros. Cependant, cet apport net reste à vérifier dans les faits. Par ailleurs, il ne se répartira pas de la même manière entre les entreprises : celles qui embauchent des apprentis pourront être gagnantes, tandis que celles qui ne le font pas, ou ne peuvent pas le faire, verront leurs prélèvements augmenter. Cette mesure, qui peut s'expliquer par la priorité politique du Gouvernement de favoriser l'apprentissage, devra donc être soigneusement évaluée l'année prochaine, voire éventuellement corrigée, afin de s'assurer qu'elle n'engendre pas d'effets pervers. S'il est souhaitable d'encourager l'apprentissage, à la fois au regard du retard de notre pays dans ce domaine et de ses besoins en personnels qualifiés, il convient plus largement de s'interroger sur le bien-fondé de notre système de redistribution qui, avec 43,6 % de prélèvements obligatoires par rapport au PIB - taux déjà le plus élevé des grands pays industrialisés - et un niveau de chômage structurellement fort, semble avoir montré ses limites. Quant aux ressources supplémentaires procurées par la suppression des exonérations de taxe d'apprentissage, elles seront affectées à un fonds de modernisation et de développement de l'apprentissage, qui se substituera à l'actuel fonds de péréquation de la taxe d'apprentissage (FNPTA). Les ressources de ce nouveau fonds seront ainsi constituées, outre des recettes liées à cette suppression (123 millions d'euros), des ressources actuelles du FNPTA (150 millions d'euros). Pour permettre le transfert des recettes engendrées par la suppression des exonérations, une fraction de la taxe, fixée par voie réglementaire, alimentera ce fonds. À cela s'ajouteront les recettes correspondant aux sommes aujourd'hui perçues à titre résiduel par le Trésor public (28 millions d'euros). Ce fonds comportera deux sections : la première conservera la vocation de l'actuel fonds de péréquation et sera dotée d'un même montant (le mécanisme de répartition entre régions devant être modifié afin de mieux tenir compte des efforts des régions en faveur de l'apprentissage) ; la seconde sera destinée, par l'intermédiaire des fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle, au financement d'actions mises en œuvre dans le cadre de contrats d'objectifs et de moyens. Ces contrats porteront principalement sur l'adaptation de l'offre de formation, l'amélioration de la qualité des formations dispensées, l'amélioration des conditions de vie des apprentis, le développement de l'initiative et de l'expérimentation, ainsi que le déroulement de séquences d'apprentissage dans des États membres de l'Union européenne. Il y a lieu de regretter l'extrême complexité de ce nouveau dispositif, qui s'apparente à une véritable « usine à gaz ». En outre, la suppression des exonérations de cotisations sociales patronales au titre des salaires versés aux apprentis qui ont obtenu leur diplôme ou leur titre dans le cadre de leur contrat d'apprentissage - prévu à l'article 75 du projet de loi de finances (8)- est discutable. D'abord, elle accroît les prélèvements sur les entreprises : le gain pour l'État de cette mesure est estimé à 32,6 millions d'euros. Présentée comme une compensation, pour l'État, du crédit d'impôt pour apprenti accordé aux entreprises, elle s'apparente à une nouvelle mesure de redistribution, avec tous les risques d'effets pervers que cela comporte. Troisièmement, elle suppose une contrainte et un coût administratifs supplémentaires : pour l'entreprise, qui devrait informer l'URSSAF de la date d'obtention du diplôme par le jeune ; pour l'administration, qui devrait gérer ces informations et procéder à des contrôles. De plus, elle introduit une incertitude de gestion pour l'employeur, qui ne saura pas, lors de l'embauche, si et quand il perdra son exonération. Enfin, elle constitue une « prime négative » à l'encontre des maîtres d'apprentissage efficaces, capables de conduire rapidement leurs apprentis au succès. Pour toutes ces raisons, votre Rapporteur spécial vous proposera de supprimer par voie d'amendement cette disposition. Parallèlement à l'encouragement de l'apprentissage dans le secteur privé, 10 millions d'euros sont budgétés au titre des compensations d'exonérations de charges sociales pour favoriser l'apprentissage dans la fonction publique dans le cadre du PACTE (parcours d'accès à la fonction publique) évoqué plus haut. Ce dispositif est discutable à deux égards. D'une part, parce qu'il s'agit d'une autre action de redistribution, supposant, de ce fait, un prélèvement supplémentaire, ce au détriment de l'emploi des jeunes dans l'entreprise. D'autre part, car il se présente comme une mesure de discrimination positive (en faveur notamment des jeunes issus des quartiers sensibles) et qu'il implique donc, par nature, une discrimination. Enfin, s'il faut saluer le développement de l'apprentissage, il convient cependant de se pencher sur les freins à sa concrétisation. Cet objectif ne pourra être atteint sans l'implication de l'Éducation Nationale, qui devra pour cela accepter d'orienter une partie de ses effectifs vers l'enseignement professionnel et donc, réformer profondément ses références en termes d'orientation. Notre système est encore trop marqué par une culture de défiance vis-à-vis de l'entreprise et il existe en France un décalage culturel trop important entre les enseignants et le monde économique. La question d'un personnel d'orientation, qui ne connaît pas les métiers et est le plus souvent trop déconnecté des réalités de l'entreprise, se pose avec pertinence. La France compte deux fois plus de jeunes au chômage que certains de ses voisins : plus qu'ailleurs l'Éducation Nationale doit donc compenser cet échec. Or, la voie professionnelle est le plus souvent dévalorisée, quand l'entreprise est diabolisée ou tout simplement ignorée. Il est donc temps de sortir de ces schémas archaïques. 4.- L'encouragement des autres formations par alternance Cette orientation, également prévue dans le plan de cohésion sociale, se traduit principalement par la promotion du contrat de professionnalisation. Créé par la loi du 4 mai 2004, le contrat de professionnalisation est exonéré de charges sociales pour les jeunes de moins de 25 ans et les demandeurs d'emploi de plus de 45 ans. L'État prend en charge la compensation de cette exonération. Ce contrat repose sur deux leviers principaux : la simplification des formations par alternance (par la substitution de ce contrat aux autres contrats existants) ; l'accroissement du financement accordé à la formation professionnelle dans le cadre de la loi du 4 mai 2004 (passage de 1,5 % à 1,6 % de la masse salariale de la contribution des entreprises de dix salariés et plus, et de 0,25 % à 0,40 % au 1er janvier 2004, puis à 0,5 % dès le 1er janvier 2005 pour les entreprises de moins de dix salariés). Le nombre d'entrées prévues dans ces dispositifs en 2005 s'élève à 180.000, dont 160.000 pour les jeunes, contre 138.000 (dont 125.000 pour les jeunes) en 2004. Les crédits inscrits au projet de loi de finances passent en conséquence de 386 à 472 millions d'euros, soit une hausse de 86 millions d'euros. 5.- L'accompagnement des jeunes sans qualification Figurant aussi dans le plan de cohésion sociale, cette action prévoit l'accompagnement, dans les cinq ans à venir, de 800.000 jeunes sortis du système scolaire sans qualification vers l'emploi durable. Tous les outils existants devraient être mobilisés à cet effet : apprentissage dans les entreprises et la fonction publique, contrats de professionnalisation, contrats jeunes en entreprise, accès direct à des emplois marchands, formation professionnelle. Le plan met également en place un « véritable parcours vers l'emploi durable », assorti d'un accompagnement personnalisé. À cet effet, le projet de loi de finances prévoit quatre mesures principales : - la création d'un fonds d'insertion professionnelle des jeunes, doté de 75 millions d'euros, permettant de financer les actions nécessaires (formations ou stages) pour les jeunes les plus en difficulté. Il sera mobilisé par les missions locales et les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) ; - des crédits supplémentaires, d'un montant de 66 millions d'euros, pour les PAIO, en vue de recruter des « référents » et des coordonnateurs, permettant de favoriser notamment un accompagnement personnalisé ; - une nouvelle dotation de 52 millions d'euros pour le financement de bourses intermédiaires, qui permettront aux jeunes de ne pas subir de pertes complètes de revenus entre deux périodes de travail tant qu'un accès à l'emploi pérenne n'est pas acquis ; - une mesure nouvelle de 32 millions d'euros, tendant à financer des « plate-formes de vocation », créées au sein de l'ANPE, destinées à orienter les jeunes vers les métiers où existe un réel potentiel de recrutement. Il est également prévu une réforme du contrat jeune en entreprise (qui bénéficie d'une prime permettant d'abaisser le coût du travail pour les jeunes sans qualification âgés de 18 à 22 ans) : désormais, cette prime sera modulable en fonction, notamment, de la situation du jeune. Les crédits relatifs à ce contrat devraient passer de 416 à 429 millions d'euros. Parallèlement, les crédits consacrés aux emplois jeunes continueront de décroître (996 millions d'euros en 2005 contre 1.590 en 2004), le remplacement des jeunes quittant leur poste d'emploi jeune avant le terme de la convention étant mis en extinction, de même que le dispositif CIVIS emplois d'utilité sociale, en raison du peu de succès rencontré. 6.- L'aide aux publics les plus en difficulté Cette orientation se traduit principalement par les mesures suivantes : - la dotation consacrée aux ateliers pédagogiques personnalisés est portée à 19,8 millions d'euros, soit une augmentation de 26,5 % par rapport à 2004. Mis en place à partir de 1983 en région Rhône-Alpes, ces ateliers constituent un réseau de 469 sites répartis sur tout le territoire, 260 antennes en milieu rural et 30 en milieu carcéral. Ils tendent à satisfaire les besoins individuels relatifs aux savoirs fondamentaux de toute personne sortie du système scolaire et rencontrant des difficultés à accéder à l'offre de formation traditionnelle. Le dispositif est encadré par un cahier des charges national qui s'impose à tous les organismes, sous le contrôle des directeurs régionaux du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle dans le cadre d'un conventionnement ; - les crédits relatifs aux actions ciblées en faveur des personnes illettrées augmentent également de 7,8 %, passant de 16,8 à 18,1 millions d'euros. Ces crédits tendent à mettre en œuvre le programme « Insertion, réinsertion, lutte contre l'illettrisme », institué en 1997 pour financer des actions de formation au profit des détenus et des personnes illétrées. S'agissant des détenus, il permet à ceux ne disposent pas de qualification d'entreprendre un parcours de formation permettant de l'acquérir, à ceux qui ont déjà un premier niveau de qualification de poursuivre leur formation, et à ceux qui sont en fin de peine de préparer leur sortie de prison par l'élaboration d'un projet d'insertion sociale et professionnelle. Concernant plus généralement les personnes illettrées, le programme promeut des actions revêtant des formes pédagogiques diverses adaptées à la personne. Celles-ci recouvrent notamment des mises en situation interactives en vue de favoriser l'apprentissage des savoirs fondamentaux. Ces formations donnent lieu, selon les cas, à des attestations de compétences, à des certifications ou à des unités capitalisables pour l'obtention de titres ou de diplômes. C.- LES AUTRES MESURES BUDGÉTAIRES 1.- La validation des acquis de l'expérience Créée par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 précitée, la validation des acquis de l'expérience continue d'être poursuivie. Elle bénéficie pour 2005 d'une augmentation de 1,9 million d'euros, ses crédits passant de 22,2 à 24,1 millions d'euros. 2.- La formation professionnelle des adultes La formation professionnelle des adultes est essentiellement assurée par l'Association nationale de formation professionnelle des adultes (AFPA). Ses crédits au titre du budget de l'État, d'un montant total de 750,8 millions d'euros, baissent légèrement de 1,9 % par rapport à 2004, en raison essentiellement de la diminution de la subvention d'investissement. Quant à ceux relatifs aux rémunérations des actions de formation des stagiaires de l'AFPA, ils passent à 143 millions d'euros, soit une augmentation de 3 millions d'euros par rapport à 2004. L'AFPA, qui a fait l'objet de maintes critiques par le passé, vient d'engager un processus de rationalisation de sa gestion, tendant à mieux optimiser l'emploi de ses crédits. Il conviendra, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, d'en apprécier les premiers effets. 3.- Les formations en faveur des chômeurs de longue durée Les crédits relatifs à ces formations, inscrits aux chapitres 43-71 et 43-70 (SIFE et SAE (9)) diminuent de 74,3 millions d'euros. Cette mesure est compensée par la forte progression des crédits du chapitre 44-70, relatif au dispositif d'insertion des publics en difficulté, qui passent de 2.895 à 3.002 millions d'euros. Cette progression devrait se traduire, selon les informations communiquées, par la création d'une « enveloppe unique régionale » dans le cadre du plan de cohésion sociale, qui devrait permettre une simplification des dispositifs existants et un assouplissement de leur gestion. Les dotations en capital baissent de 72,6 à 46,9 millions d'euros en 2005. Cette diminution, d'un montant de 25,7 millions d'euros, s'explique par un montant correspondant de reports de crédits de paiement d'une année sur l'autre. La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances a donné lieu à une expérimentation dans deux régions : la Champagne-Ardenne et la Franche-Comté. Cette expérimentation concerne le regroupement des crédits relatifs au programme 3 de la mission travail (« Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques ») (10). Elle fait l'objet d'une dotation nouvelle de 3,8 millions d'euros, comportant 2 millions pour le soutien à la professionnalisation des actifs et 1,8 millions pour l'amélioration de leur qualification et le développement de la validation des acquis de l'expérience. III.- LA MISE EN œUVRE DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES LAISSE ENTREVOIR DE MULTIPLES VOIES DE PROGRÈS, MOYENNANT CERTAINES AMÉLIORATIONS. A.- UNE APPROCHE PLUS STRATÉGIQUE La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances devrait permettre de substituer à une approche comptable par nature de dépense - dont on a vu combien elle pouvait être confuse s'agissant de la formation professionnelle - une approche cohérente, déclinée en missions, programmes et actions, correspondant aux grandes politiques publiques. Cette approche stratégique devrait, en principe, être renforcée par deux facteurs : les politiques ont vocation à s'inscrire dans une perspective pluriannuelle et la qualité des programmes est vérifiée par un comité interministériel d'audit des programmes. Par ailleurs, la désignation d'un responsable pour chaque programme devrait favoriser la cohérence de la mise en œuvre de celui-ci. La politique de formation professionnelle devrait s'inscrire dans le cadre de la mission travail, elle-même composée de 5 programmes. Elle correspond au programme 3 : accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques.
Ce programme est subdivisé en 3 actions : le soutien à la professionnalisation des actifs ; l'amélioration de la qualification des actifs et le développement de la validation des acquis de l'expérience ; l'anticipation et l'accompagnement des mutations économiques. Dans cette nouvelle présentation, les crédits pour 2005 se répartissent de la manière suivante :
On note que le total des crédits est inférieur de 12,2 millions à celui figurant dans le « jaune ». Cet écart tiendrait, selon les informations recueillies, à la traduction de ces crédits dans la nouvelle nomenclature en pourcentages arrondis. Sans véritable portée cette année pour la présentation « à blanc », cette erreur devra absolument être évitée l'an prochain. Par ailleurs, la répartition des crédits fait apparaître que, sur environ 4.800 millions d'euros, plus de la moitié sont consacrés au soutien à la professionnalisation des actifs, près de 36 % à l'amélioration de leur qualification et environ 13 % à l'anticipation et à l'accompagnement des mutations économiques proprement dites. B.- UN PROGRAMME QUI DOIT ENCORE GAGNER EN CLARTÉ Le programme 3 poursuit plusieurs objets. Il tend à anticiper et à accompagner les mutations économiques, sociales et démographiques, « afin de garantir le maintien de la cohésion sociale sur l'ensemble du territoire dans le cadre d'une économie de plus en plus fondée sur l'innovation et les compétences ». Il vise à développer les compétences et l'accès à une qualification reconnue, acquise notamment à la suite d'une formation ou de la validation des acquis de l'expérience, afin de faciliter l'accès, le maintien ou le retour à un emploi durable, dans un marché du travail en évolution rapide. À cet égard, la création des maisons de l'emploi « ouvre des perspectives nouvelles » pour mettre en œuvre, de façon concertée, au niveau des bassins d'emplois, « l'ensemble des démarches d'anticipation et d'accompagnement des mutations ». Le programme permet également « d'appuyer le développement de la gestion des compétences et des âges dans les entreprises et les branches » et de favoriser les initiatives structurées des partenaires sociaux en la matière. Enfin, il tend, à l'occasion de restructurations, à favoriser le reclassement et la reconversion des salariés licenciés en mobilisant le service public de l'emploi et en coordonnant l'ensemble des acteurs locaux concernés. La présentation de ce programme paraît, sur certains points, discutable. D'abord, son intitulé ne reflète pas bien son contenu. En effet, l'accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques ne fait pas suffisamment apparaître qu'il regroupe l'ensemble des actions et des crédits relatifs à la formation professionnelle. D'autre part, et corollairement, il rend surtout compte de sa troisième action (anticipation et accompagnement des mutations économiques), créant ainsi une forme de redondance. Cela est d'autant moins justifié que cette action ne mobilise que 13 % des crédits. Il en est de même s'agissant de la définition des actions. La différenciation entre l'action 1 (soutien à la professionnalisation des actifs) et l'action 2 (amélioration de la qualification des actifs) n'apparaît pas assez clairement. D'ailleurs, la deuxième sous-action (soutien à la professionnalisation des personnes sans emploi) de l'action 1 et la première sous-action (qualification des demandeurs d'emploi) de l'action 2 concernent l'une et l'autre la formation des demandeurs d'emploi (cf. annexe 1). En outre, si l'action 3 touche principalement à l'accompagnement des restructurations, à l'exclusion de mesures de formation, il comporte également des « dépenses de fonctionnement des actions de formation ». Ainsi, non seulement l'intitulé du programme 3 n'indique pas que l'essentiel de ses crédits concerne la formation professionnelle, mais encore ceux-ci ne semblent pas être clairement délimités entre les actions. Il sera en conséquence difficile d'identifier clairement les crédits dévolus à la formation, de même que le nombre d'emplois qui lui sont consacrés. Il sera a fortiori malaisé de connaître la répartition de ceux-ci selon leur statut et leur catégorie. D'ailleurs, les informations communiquées en la matière ne portent que sur les programmes 4 et 5 de la mission travail. Dans ces conditions, il serait souhaitable d'améliorer la présentation et la cohérence du programme 3. Celui-ci devrait plutôt s'intituler « Formation professionnelle », voire « Formation professionnelle et accompagnement économique », si l'accompagnement des restructurations devait continuer de figurer dans ce programme. On pourrait en effet envisager d'extraire de ce programme les crédits relatifs à l'accompagnement des restructurations qui ne concernent pas la formation professionnelle et les intégrer à un autre programme. Cela donnerait plus d'homogénéité au programme, qui serait ainsi entièrement consacré à la formation professionnelle. Quant aux actions, elles pourraient être redéfinies en fonction des principales catégories de formation : les formations en alternance, la formation continue (y compris la reconnaissance des qualifications et la validation des acquis de l'expérience), et la formation de publics spécifiques (chômeurs, illettrés, jeunes en difficulté, salariés âgés, etc.) - cette dernière action pouvant elle-même être décomposée en deux : l'une consacrée à la formation des chômeurs, l'autre aux autres publics spécifiques. Plus claire, plus logique, cette nouvelle présentation permettrait en outre de mieux identifier le nombre d'emplois consacrés à la formation professionnelle, qui correspondrait ainsi à celui du programme 3 dans son ensemble. Le besoin de clarté est d'autant plus nécessaire que les pouvoirs du Parlement demeureront limités dans le vote du budget par plusieurs facteurs : l'interdiction de créer de nouvelles missions ou d'opérer des transferts de crédits entre missions, en application de l'article 40 de la Constitution ; l'impossibilité probable de modifier par voie d'amendement l'intitulé ou le contenu des actions, ou de modifier la répartition des crédits entre celles-ci ; le caractère indicatif des enveloppes des actions (les administrations pouvant modifier leur montant dans le cadre du plafond global de dépenses autorisées pour chaque programme, sous réserve du plafonnement des crédits de personnel) ; enfin, la probable impossibilité de modifier par voie d'amendement les objectifs sous-tendant les programmes et les indicateurs de résultat qui leurs sont associés. Mais il convient de rappeler que le transfert de crédits d'un programme à un autre, au sein de la même mission, sera désormais possible par amendement parlementaire, ce qui permettra, si besoin est, de clarifier le périmètre et donc les objectifs et, par là, les indicateurs. C.- DES INDICATEURS DE PERFORMANCE QUI DEVRAIENT ÊTRE PRÉCISÉS, ÉVALUÉS ET AJUSTÉS Au-delà d'une présentation plus rationnelle du budget et d'un meilleur contrôle de l'emploi des fonds publics par le Parlement, l'efficacité de l'action publique dépend largement de la capacité de l'État à se doter, pour chacune de ses politiques, d'objectifs clairs et cohérents et d'indicateurs de performance adaptés pour mesurer sont aptitude à les atteindre. Les projets annuels de performances (PAP) et les rapports annuels de performances (RAP) auront précisément pour objet, pour les premiers, de présenter les objectifs stratégiques et indicateurs de performance de chaque politique publique et, pour les seconds, d'évaluer les résultats des politiques menées au regard de ces indicateurs. Trois types d'objectifs seront poursuivis : - des objectifs d'efficacité socio-économiques, tendant à répondre aux attentes des citoyens (amélioration de l'environnement économique, social, culturel,...) ; - des objectifs de qualité de service, visant à améliorer le service rendu aux usagers des services publics, que ces usagers soient externes ou internes à l'administration ; - des objectifs d'efficience de la gestion, tendant, pour les contribuables, à améliorer le rendement des fonds publics, soit en accroissant, pour un même niveau de ressources, les « produits » des activités publiques, soit, pour un même niveau d'activité, à recourir à moins de moyens. L'avant-projet annuel de performances relatif à la mission travail, annexé au projet de loi de finances pour 2005 - qui préfigure le futur PAP - confère au programme 3 tel qu'actuellement défini dix objectifs et une quarantaine d'indicateurs, eux-mêmes déclinés parfois en sous-indicateurs (cf. annexe 2). Un objectif, consacré à faciliter l'accès des actifs à la formation professionnelle continue, est commun à l'ensemble des actions du programme. Les autres se répartissent entre les trois actions (trois pour la première, quatre pour la seconde, et deux pour la troisième). La définition de ces objectifs et de ces indicateurs constitue un progrès notable à la fois pour clarifier les priorités de l'action publique et pour mieux mesurer son efficacité et son efficience. Cela étant, certains objectifs pourraient être mieux précisés. Ainsi, l'intitulé de l'objectif 3 (favoriser le retour dans un emploi qualifié pour les demandeurs d'emploi) est-il proche de celui de l'objectif 5 (accroître le taux de retour à l'emploi des stagiaires ayant suivi une formation qualifiante). De même, pourrait-on préciser certains indicateurs. Il en est ainsi du troisième indicateur de l'objectif 9, mesurant l'augmentation de la part des salariés expérimentés dans les dispositifs de politique contractuelle. Que faut-il entendre, en effet, exactement par « salarié expérimenté » ? Il convient enfin de mettre en garde contre un nombre trop important d'indicateurs et une bureaucratisation excessive du dispositif d'évaluation. Votre Rapporteur spécial estime qu'il faudrait, outre clarifier l'intitulé et le contenu du programme 3, prévoir des indicateurs plus qualitatifs, notamment sur le niveau de satisfaction des entreprises et des salariés à l'égard des formations offertes, en particulier de leur adaptation aux besoins du marché du travail et de leur efficacité pour permettre l'insertion, le maintien ou le retour dans l'emploi. L'efficacité et l'efficience de notre système de formation professionnelle n'ayant de sens - comme le niveau de compétitivité de notre économie - que par rapport à nos principaux partenaires économiques, il est essentiel que ces indicateurs fassent état de comparaisons internationales précises. À cet égard, il convient de tenir compte des critères de mesure, de classement et d'évaluation établis par les grandes organisations européennes et internationales. En outre, il n'est pas satisfaisant de se fonder sur des évaluations totalement ou quasi exclusivement élaborées par les services publics, a fortiori ceux qui contribuent à l'organisation et au fonctionnement de la formation professionnelle. Une évaluation juste et objective implique une totale indépendance. Aussi ne peut-on qu'encourager, au-delà des enquêtes que peut conduire la Cour des comptes, le développement d'évaluations par des cabinets d'audit privés. Enfin, la politique de formation professionnelle étant intimement liée à la politique économique et sociale générale, il est nécessaire de mieux identifier les secteurs d'avenir, à haute valeur ajoutée, dans lesquels il est souhaitable d'inciter notre économie à se spécialiser. Ce peut être le cas notamment de l'aéronautique, des transports, de l'agro-alimentaire, de la médecine, du nucléaire, du bâtiment et du tourisme. En effet, l'efficacité sur le moyen et long terme de la politique de formation professionnelle dépend de l'orientation stratégique des salariés vers les secteurs les plus créateurs d'emplois et de richesse. EXAMEN EN COMMISSION La Commission a examiné au cours de sa réunion du 28 octobre 2004 les crédits de la formation professionnelle, ainsi que l'article 75, rattaché. Après l'exposé de votre Rapporteur spécial, M. Jean-Pierre Gorges a souligné que l'objectif essentiel de la formation professionnelle est la diminution du chômage : y a-t-il des objectifs précis fixés en la matière ? Les employeurs se plaignent de ne pas disposer de salariés formés dans certains secteurs. Votre Rapporteur spécial a remarqué qu'on touchait là au cœur de la problématique. On entretient des dispositifs d'une complexité extrême, toujours justifiés par des objectifs sociaux. Ces « tuyauteries » ne sont pas efficaces et on emploie des moyens démesurés pour des dépenses d'aide aux demandeurs d'emploi qui relèvent de l' « assistanat » au lieu de les employer à des dépenses « actives ». Il y a tout de même dans ce budget des mesures volontaristes ; cependant, il faudrait adopter une meilleure répartition entre dépenses passives et actives. Si l'on groupait tous les moyens de la politique de l'emploi en une seule masse et si on les employait à des dépenses actives, la France aurait un taux de chômage comparable à celui des Etats-Unis. Le problème du chômage n'est pas seulement culturel : il vient surtout du fait que l'on dépense trop dans tous ces dispositifs sociaux. Le choc culturel qui sépare l'école de l'entreprise est révélateur de ce malaise français. La politique de l'emploi et de la formation professionnelle doit être davantage axée sur les aspects économiques et moins sur les aspects sociaux. Cela devrait permettre à la France de retrouver le taux d'activité économique qui devrait être le sien. M. Pierre Méhaignerie, Président, a demandé au Rapporteur spécial s'il suggérait des thèmes d'enquêtes de la Cour des comptes ou des sujets de mission d'évaluation et de contrôle. Votre Rapporteur spécial s'est étonné qu'ayant souhaité connaître la liste des principaux organismes publics et parapublics financés par le budget de la formation professionnelle, le ministère lui ait répondu qu'il ne disposait pas de liste centralisée de ces organismes, compte tenu de la multiplicité des financeurs. Voilà un sujet sur lequel la Cour des comptes pourrait utilement se pencher. M. Pierre Méhaignerie, Président, a souligné que ce problème n'est pas spécifique à la formation professionnelle, mais concerne l'ensemble des établissements publics et parapublics. M. Hervé Novelli a rappelé, qu'en 1993, a été créée une commission d'enquête sur la formation professionnelle, dont M. Claude Goasguen était le Rapporteur. Rien n'a été entrepris pour tenir compte des critiques qui avaient alors été émises sur le système, car le financement de la formation professionnelle constitue une réelle manne pour les syndicats. Il existe en fait une sorte de conspiration entre les partenaires sociaux, fondée sur la loi du silence, pour ne rien changer au système. La Commission a adopté, sur la proposition de votre Rapporteur spécial, les crédits de la formation professionnelle. Révision du dispositif des exonérations de cotisations sociales patronales au titre des salaires versés aux apprentis Texte du projet de loi : I. Le premier alinéa de l'article L. 118-6 du code du travail est complété par les dispositions suivantes : « L'État prend en charge les cotisations sociales patronales jusqu'à la date de l'obtention du diplôme ou du titre de l'enseignement technologique préparé. ». II. L'article 18 de la loi n° 87-572 du 23 juillet 1987 modifiant le titre Ier du code du travail et relative à l'apprentissage est complété par un alinéa ainsi rédigé : « L'État prend en charge les cotisations sociales patronales jusqu'à la date de l'obtention du diplôme ou du titre de l'enseignement technologique préparé. ». III. Le paragraphe VI de l'article 20 de la loi n° 92-675 du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé : « L'État prend en charge les cotisations sociales patronales jusqu'à la date de l'obtention du diplôme ou du titre de l'enseignement technologique préparé. ». Exposé des motifs du projet de loi : L'État prend en charge, partiellement ou totalement, les cotisations sociales, salariales et patronales d'origine légale et conventionnelle, au titre des salaires versés aux apprentis. Les dispositifs d'exonérations de charges sociales patronales, différents selon la taille et l'activité des entreprises, sont régis par trois textes législatifs : - le premier alinéa de l'article L. 118-6 du code du travail : il prévoit une exonération totale de charges sociales pour les employeurs du secteur privé, inscrits au répertoire des métiers (ou au registre des entreprises en Alsace et en Moselle) ou occupant moins de onze salariés (le seuil de « moins de onze salariés », remplaçant celui de « dix salariés au plus », résulte de l'ordonnance de simplification du droit adoptée le 23 juin 2004) ; - l'article 18 de la loi n° 87-572 du 23 juillet 1987 modifiant le titre Ier du code du travail et relative à l'apprentissage : il prévoit une exonération partielle de cotisations patronales dont bénéficient les employeurs du secteur privé non mentionnés au premier alinéa de l'article L. 118-6 du code du travail. - le VI de l'article 20 de la loi n° 92-675 du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail : il prévoit une exonération partielle de cotisations patronales dont bénéficient les employeurs d'apprentis du secteur public non industriel et commercial. L'État prend en charge ces cotisations sociales jusqu'à l'échéance du contrat d'apprentissage. Or, la prise en charge par l'État des cotisations patronales ne se justifie plus dès lors que le jeune a obtenu le diplôme ou le titre préparé, objet du contrat d'apprentissage. La modification des trois textes législatifs précités, proposée par cet article, a pour objet de mettre fin aux exonérations des cotisations patronales à la date à laquelle l'apprenti a obtenu le diplôme ou le titre préparé dans le cadre du contrat d'apprentissage. En revanche, cette mesure ne comporte aucune incidence sur la rémunération de l'apprenti. Observations et décision de la Commission : Cet article tend à modifier les trois textes législatifs précités (1er alinéa de l'article L.118-6 du code du travail, article 18 de la loi n° 87-572 du 23 juillet 1987 et paragraphe VI de l'article 20 de la loi n° 92-675 du 17 juillet 1992), afin de supprimer l'exonération des cotisations patronales dont bénéficient les employeurs d'apprentis à partir de la date à laquelle ceux-ci ont obtenu leur diplôme. Ces textes couvrent les trois cas de figure possibles : l'exonération totale de charges sociales pour les employeurs du secteur privé inscrits au répertoire des métiers (ou au registre des entreprises d'Alsace et de Moselle) employant moins de 11 salariés ; l'exonération partielle de cotisations patronales pour les autres employeurs du secteur privé ; l'exonération partielle de cotisations patronales pour les employeurs du secteur public non industriel et commercial. Plusieurs raisons motivent, selon le Gouvernement, cette suppression d'exonération : - l'exonération ne se justifierait plus « dès lors que le jeune a obtenu le diplôme ou le titre préparé, objet du contrat d'apprentissage ». Autrement dit, pour le Gouvernement, l'incitation de l'État par le biais de l'exonération de cotisations patronales doit se limiter à l'apprentissage au sens strict, soit la période comprise entre la signature du contrat d'apprentissage et la date d'obtention du diplôme ; - cette disposition, qui tend à réaliser une économie budgétaire estimée à 32,6 millions d'euros selon l'étude d'impact, ne remet pas en cause le dispositif général d'exonération de charges sociales en faveur de l'apprentissage, ni l'assiette forfaitaire servant de base au calcul des cotisations de sécurité sociale. Elle ne devrait donc pas, selon l'étude d'impact, avoir d'effet sur l'attractivité des contrats d'apprentissage, « compte tenu du maintien d'un dispositif d'exonération de charges sociales qui reste particulièrement avantageux pour les entreprises ». L'étude d'impact rappelle à cet égard que, durant la période s'écoulant entre l'obtention du diplôme et la fin du contrat d'apprentissage, l'employeur verse au jeune un salaire, calculé en pourcentage du SMIC, alors que ce dernier travaille à temps complet dans l'entreprise ; - elle n'a, en outre, aucun effet négatif sur le salaire de l'apprenti, qui bénéficiera toujours de l'exonération totale des cotisations sociales, légales et conventionnelles, jusqu'à l'échéance du contrat d'apprentissage, quelle que soit la date d'obtention du diplôme ; - l'augmentation du coût salarial pour l'entreprise est limitée, dans la mesure où la période s'écoulant entre l'obtention du diplôme et la fin du contrat est en moyenne de deux mois sur une durée du contrat d'apprentissage de deux ans. En effet, la plupart des contrats commencent, selon les informations communiquées par le Gouvernement, en septembre ou octobre de l'année N - au moment où débutent les enseignements des centres de formation d'apprentis - et s'achèvent en août de l'année N+2, soit en général deux mois après l'obtention du diplôme (acquise ordinairement en juin de l'année N+2). L'augmentation du coût salarial devrait être, pour les employeurs du secteur privé employant 11 salariés et plus et ceux du secteur public, d'environ 20 % durant la période concernée par la suppression des exonérations. Pour les employeurs du secteur privé de moins de 11 salariés, cette augmentation devrait être plus importante (30 %), dans la mesure où ces employeurs bénéficient d'une exonération totale de cotisations sociales ; - cette augmentation est, en tout état de cause, largement compensée budgétairement pour les entreprises par la création du crédit d'impôt de 1.600 euros par apprenti (présent au moins 6 mois pendant l'année précédente), ce qui représente une dotation nouvelle de l'État estimée à 472 millions d'euros ; - les employeurs pourront réduire ou supprimer ce coût supplémentaire, soit en diminuant la durée des contrats d'apprentissage proposés, soit en faisant coïncider la fin du contrat avec la date présumée d'obtention du diplôme. Si cette mesure repose sur une intention louable - faire une économie budgétaire et, dans le cadre plus large du programme en faveur de l'apprentissage, mieux recentrer les crédits vers l'aide à l'apprentissage au sens strict -, elle présente, selon votre Rapporteur spécial, en pratique plus d'inconvénients que d'avantages. Elle comporte en effet cinq principaux inconvénients : - elle accroît les prélèvements sur les entreprises. Si l'on doit, en effet, prendre en compte la nouvelle dotation de l'État correspondant à la création du crédit d'impôt de 1.600 euros par apprenti (472 millions d'euros), il convient aussi de déduire les deux autres prélèvements prévus sur les entreprises : la création de la contribution au développement de l'apprentissage, pour 197 millions d'euros (article 20 du projet de loi de finances) et la suppression des exonérations jugées « injustifiées » de taxe d'apprentissage, pour 123 millions d'euros. Au total, le gain net pour les entreprises serait seulement de 120 millions d'euros. Or, ce gain, qui reste à vérifier dans les faits, ne se répartira pas de la même manière entre les entreprises : celles qui embauchent des apprentis pourront être gagnantes, tandis que celles qui ne le font pas, ou ne peuvent pas le faire, verront leurs prélèvements augmenter ; - présentée comme une compensation pour l'État du crédit d'impôt pour apprenti accordé aux entreprises, elle s'apparente à une mesure de redistribution, avec tous les risques d'effets pervers que cela comporte ; - elle implique en outre une contrainte et un coût administratif supplémentaires : pour l'entreprise, qui devrait informer l'URSSAF de la date d'obtention du diplôme par le jeune ; pour l'administration, qui devrait gérer ces informations et procéder à des contrôles ; - elle introduit une incertitude de gestion pour l'employeur, qui ne saura, lors de l'embauche, si et quand il perdra son exonération ; - elle constitue enfin une « prime négative » à l'encontre des maîtres d'apprentissage efficaces, capables de conduire rapidement leurs apprentis au succès. * * * La Commission a examiné un amendement présenté par votre Rapporteur spécial tendant à supprimer cet article. Cette suppression est justifiée par plusieurs motifs : l'article conduit à accroître les prélèvements sur les entreprises de 32,6 millions d'euros ; il s'apparente à une mesure de redistribution, avec tous les risques d'effets pervers que cela comporte ; il implique une contrainte et un coût administratifs supplémentaires ; il introduit une incertitude de gestion pour l'employeur et constitue une « prime négative » à l'encontre des maîtres d'apprentissage efficaces, capables de conduire rapidement leurs apprentis au succès. Cette exonération doit, logiquement, durer jusqu'à la fin du contrat d'apprentissage. En effet, si le contrat se termine, par exemple, trois mois après le diplôme, l'employeur perd, dans l'intervalle, le bénéfice de l'exonération. Le maintien de l'exonération pendant la durée totale du contrat serait plus cohérent et de nature à favoriser une relation de confiance entre l'État et l'entreprise. Le Président Pierre Méhaignerie a demandé si, après le diplôme, le salarié conservait le statut d'apprenti. Votre Rapporteur spécial a indiqué qu'il continuait à être régi par le contrat d'apprentissage jusqu'à son terme, le contrat étant, de toute façon, à durée déterminée. M. Jean-Pierre Gorges a fait remarquer qu'un hiatus entre la durée du contrat d'apprentissage et la période d'exonération ne devrait, en principe, pas exister. M. Hervé Novelli a souligné qu'il faudrait mettre une limite de durée à l'exonération, sous peine de donner cours à des abus. Le Président Pierre Méhaignerie a relevé que l'article 75 porte sur un montant de 32,6 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable. En ce qui concerne la durée d'exonération, votre Rapporteur spécial, a rappelé que, de toute façon, le contrat d'apprentissage est normalement limité à deux ans. Il s'agit de maintenir la prise en compte de situations intermédiaires. Mais la suppression de l'exonération génèrerait une réelle gêne pour les entreprises. La Commission a ensuite adopté cet amendement. En conséquence, l'article 75 a été supprimé. Annexe 1 Présentation des crédits de la formation professionnelle
Liste des objectifs et indicateurs du programme 3 (accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques)
_____________________ N° 1863 - 5 : Rapport sur le projet de loi de finances pour 2005 : emploi, travail et cohésion sociales : formation professionnelle (Jean-Michel Fourgous) 1 () Données 2002 (dernières données disponibles). 2 () Idem. 3 () Données OCDE, année 2001 (dernières données disponibles). 4 () Annexe jaune au projet de loi de finances pour 2005. 5 () Cette subvention est inscrite à l'agrégat 1 (« Gestion de la politique de l'emploi »), chapitres 43-71 et 66-71. 6 () Voir plus loin. 7 () Voir plus loin. 8 () Article rattaché au budget de la formation professionnelle. Voir plus loin observations et décision de la Commission (annexe 1). 9 () Stages d'insertion et de formation à l'emploi et stages d'accès à l'emploi. 10 () Voir III. ci-après. - Cliquer ici pour retourner au sommaire général - Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires © Assemblée nationale |