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le 17 novembre 2004

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N° 1863

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2004.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2005 (n° 1800),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

--

ANNEXE N° 12


CHARGES COMMUNES

Rapporteur spécial : M. Daniel GARRIGUE

Député

____

SOMMAIRE

-

Pages

INTRODUCTION 7

LE BUDGET DES CHARGES COMMUNES : L'ÉCLATEMENT ANNONCÉ D'UN SUPPORT COMPOSITE 7

A.- LA PLUS IMPORTANTE MASSE DU BUDGET GÉNÉRAL 7

B.- DES CRÉDITS DISPARATES, QUI SERONT RÉPARTIS ENTRE DE NOMBREUSES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL EN 2006 9

I.- LA CONSÉCRATION DU PROGRAMME « CHARGE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT » 11

II.- LES GRANDS BLOCS DE CRÉDITS DANS LE PROJET DE BUDGET 2005 DES CHARGES COMMUNES 13

A.- UNE CROISSANCE PLUS VIVE POUR LA CHARGE DE LA DETTE 13

B.- UNE PROGRESSION MODÉRÉE DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS, APRÈS UN FORT RALENTISSEMENT EN 2004 15

C.- LES DÉPENSES DE PERSONNEL : STABILITÉ DU POINT D'INDICE ET POURSUITE DE L'ALOURDISSEMENT TENDANCIEL DES PENSIONS 17

III.- LES AUTRES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS 18

A.- DEUX RECTIFICATIONS MINEURES DE PÉRIMÈTRE 18

B.- L'ÉVOLUTION DES AUTRES CRÉDITS 18

CHAPITRE PREMIER : REDRESSER LES FINANCES PUBLIQUES ET MAÎTRISER LA CHARGE DE LA DETTE : UN EFFORT INDISPENSABLE POUR REDONNER DES MARGES DE MANœUVRE À LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE 21

I.- LA CONSÉCRATION DU PROGRAMME RELATIF À LA GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE 23

A.- DU « PRÉ-PROGRAMME » AU PROGRAMME 23

1.- Une filiation inévitable 23

2.- L'Agence France Trésor, gestionnaire de la dette négociable et de la trésorerie 24

B.- UN PROGRAMME PLACÉ À L'INTERFACE ENTRE LE BUDGET GÉNÉRAL ET LE FUTUR COMPTE DE GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT 26

1.- Le compte de gestion de la dette et de la trésorerie 26

2.- L'articulation entre le programme et le compte de commerce 27

C.- LE REMODELAGE ET L'ENRICHISSEMENT DES OBJECTIFS 28

1.- L'endettement de l'État : une donnée qui s'impose au gestionnaire de la dette 28

2.- Les objectifs et indicateurs assignés à la gestion de la dette 34

3.- Les objectifs et les indicateurs assignés à la gestion de la trésorerie 42

4.- La maîtrise des risques : un objectif transverse 47

5.- Une innovation : l'objectif fixé à la gestion de la dette non négociable 51

II.- DES INSTRUMENTS DE GESTION ÉPROUVÉS 52

A.- LA POLITIQUE D'ÉMISSION S'EFFORCE DE RÉPONDRE AUX ATTENTES DU MARCHÉ 52

1.- La diversité maîtrisée des emprunts de l'État 52

2.- Une procédure d'émission transparente 55

B.- L'INSTRUMENT PRINCIPAL DU FINANCEMENT : LE PROGRAMME D'EMPRUNT 58

1.- Le financement définitif de l'État en 2003 59

2.- Les prévisions de financement de l'État en 2004 62

3.- Le programme de financement de l'État en 2005 63

C.- UNE « GESTION ACTIVE » QUI POURRAIT ENCORE DEVOIR SE PASSER DU PROGRAMME DE SWAPS DE TAUX D'INTÉRÊT 64

1.- Un instrument classique : les interventions directes sur le stock de dette 64

2.- Le programme de swaps pourra-t-il être repris en 2005 ? 68

D.- LES INSTRUMENTS DE GESTION DE LA TRÉSORERIE 70

1.- Les opérations de pension de titres conduites par l'AFT 70

2.- L'essor des opérations interbancaires ou avec d'autres États membres de la zone euro 73

3.- La nécessité de surveiller le bon fonctionnement du marché 74

III.- LE RETOUR DE LA CHARGE DE LA DETTE SUR UN SENTIER DE CROISSANCE PLUS SOUTENU 75

A.- DES HYPOTHÈSES DE TAUX D'INTÉRÊT QUI REFLÈTENT LE « POINT BAS » ATTEINT EN 2004 75

1.- Les hypothèses de taux associées au projet de loi de finances pour 2005 75

2.- Les perspectives d'évolution des taux d'intérêt 76

B.- LA CHARGE DE LA DETTE PROGRESSERAIT DE 3,1% PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2004 80

1.- Le service de la dette négociable 80

2.- Le service de la dette non négociable 82

3.- Une augmentation sensible des recettes d'ordre 85

C.- L'EFFET « BOULE DE NEIGE » SERAIT MOINS VIRULENT EN 2005 87

CHAPITRE II : LES CHARGES BUDGÉTAIRES COMMUNES 91

I.- LES CRÉDITS DES POUVOIRS PUBLICS 91

II.- LES DÉPENSES RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE : RÉMUNÉRATIONS, PENSIONS, CHARGES SOCIALES 94

A.- L'ABSENCE DE PROVISION POUR LES MESURES GÉNÉRALES AFFÉRENTES AUX RÉMUNÉRATIONS 94

B.- LES CRÉDITS POUR CHARGES DE PENSION 95

1.- L'architecture des crédits de pensions : de l'ancien au nouveau modèle 95

2.- Le régime de retraite des fonctionnaires engagé dans la réforme 100

3.- L'évolution des crédits de pension 105

4.- Les charges liées aux mécanismes de compensation généralisée et spécifique entre régimes d'assurance vieillesse 106

5.- L'équilibre du régime des pensions civiles et militaires de l'État 109

6.- Le régime de pension des ouvriers des établissements industriels de l'État 111

C.- UNE FORTE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE PRESTATIONS SOCIALES 114

III.- LES DÉPENSES ET « QUASI DÉPENSES » DE FONCTIONNEMENT COURANT DES ADMINISTRATIONS 117

A.- UN RALENTISSEMENT DES DÉPENSES EN ATTÉNUATION DES RECETTES DE L'ÉTAT 117

1.- Les remboursements et dégrèvements de recettes d'État 117

2.- Les frais de poursuite et de contentieux, les décharges de responsabilité et remises de débets 121

B.- LES CRÉDITS GLOBAUX POUR « CHARGES COMMUNES » DE FONCTIONNEMENT 123

C.- L'APUREMENT DÉFINITIF DE LA DETTE DE L'ÉTAT AU TITRE DU PROGRAMME RIMBAUD 126

CHAPITRE III : LES DÉPENSES D'INTERVENTION DU TRÉSOR 129

I.- LES INTERVENTIONS À CARACTÈRE SOCIAL : UNE LÉGÈRE RÉDUCTION DES CRÉDITS EN 2005 129

A.- LES VERSEMENTS À DIVERS RÉGIMES OBLIGATOIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE 129

1.- La contribution de l'État au Fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines 129

2.- La participation de l'État au financement d'autres régimes spéciaux de sécurité sociale 133

B.- LES INTERVENTIONS À DESTINATION DES PARTICULIERS 135

1.- L'augmentation significative des besoins pour les actions conduites en faveur des rapatriés 135

2.- Les majorations légales de rentes viagères 137

II.- DES CRÉDITS D'INTERVENTION ÉCONOMIQUE ÉRODÉS PAR LA RÉFORME DE L'ÉPARGNE LOGEMENT 138

A.- L'ENCOURAGEMENT À LA CONSTRUCTION IMMOBILIÈRE 138

1.- La gestion des crédits en 2003 et 2004 et les demandes budgétaires pour 2005 138

2.- L'épargne-logement après la réforme de 2003 140

B.- LA STABILISATION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX GARANTIES 144

1.- Les garanties afférentes à l'exportation 144

2.- Les autres garanties 149

III.- LES RELATIONS FINANCIÈRES DU TRÉSOR AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 150

A.- LES DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX EN 2005 : UN FORT IMPACT DES AMÉNAGEMENTS LÉGISLATIFS 151

1.- Les dégrèvements de taxe professionnelle 152

2.- Les dégrèvements de taxe d'habitation 156

3.- Les dégrèvements de taxes foncières 158

B.- L'AIDE À LA RECONVERSION DE L'ÉCONOMIE POLYNÉSIENNE 159

CHAPITRE IV : LES COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR RATTACHÉS AU BUDGET DES CHARGES COMMUNES 163

A.- LE COMPTE N° 902-33 « FONDS DE PROVISIONNEMENT DES CHARGES DE RETRAITE » 163

B.- LE COMPTE N° 904-22 « GESTION ACTIVE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT » 164

EXAMEN EN COMMISSION 167

Article 73 177

OBSERVATION 192

EXAMEN EN COMMISSION 167

Article 73 : Mise en œuvre du droit au départ anticipé en retraite, pour les fonctionnaires ayant commencé à travailler très jeunes et ayant effectué une longue carrière 177

OBSERVATION 193

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe comme date butoir, pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires, au plus tard huit jours francs à compter du dépôt du projet de loi de finances. Cette date était donc le 9 octobre 2004.

A cette date, 31% des réponses étaient parvenues à votre Rapporteur spécial. La quasi totalité des autres réponses lui ont été transmises dans les jours suivants. Nonobstant ce délai, et comme les années précédentes, votre Rapporteur spécial a pu travailler dans des conditions tout à fait satisfaisantes.

LE BUDGET DES CHARGES COMMUNES :
L'ÉCLATEMENT ANNONCÉ D'UN SUPPORT COMPOSITE

A.- LA PLUS IMPORTANTE MASSE DU BUDGET GÉNÉRAL

· Depuis de nombreuses années, le budget des Charges communes constitue la section budgétaire la plus dotée. Il existe plusieurs mesures de son volume, qui répondent chacune à des logiques spécifiques.

La plus directe et la plus légitime se réfère à la somme des crédits demandés sur l'ensemble des chapitres qui y sont inscrits. Avec 126 milliards d'euros de crédits bruts (+ 4,9%) demandés pour 2005, le budget des Charges communes représente 35,1% des crédits bruts du budget général (359,3 milliards d'euros).

LA RÉPARTITION DES CRÉDITS BRUTS DU BUDGET GÉNÉRAL (civil et militaire)

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Source : PLF 2005

Les crédits bruts incluent les remboursements et dégrèvements, couvrant les dépenses dites « en atténuation de recettes », qui sont portés, au sein du budget général, par le seul budget des Charges communes. Les crédits nets de remboursements et dégrèvements, que l'on considère comme plus représentatifs des dépenses « réelles » de l'État, atteindraient 57,7 milliards d'euros (+ 3,2%), soit 19,8% des crédits nets du budget général en 2005. Cette masse est supérieure de 1,1 milliard d'euros à celle des crédits du budget de l'Enseignement scolaire, souvent présentée comme « le plus gros budget du Budget ».

CHARGES COMMUNES :
RÉPARTITION DES CRÉDITS BRUTS PAR TITRE ET PAR PARTIE

(en millions d'euros)

Part dans les crédits bruts 2005
(en %)

NATURE DE LA DÉPENSE

LFI 2004

PLF 2005

Écart

TITRE I - Dette publique et dépenses en atténuation de recettes

33,3

Partie 1 : Dette négociable à long, moyen ou court terme

40.510,1

41.921,4

+ 3,5%

0,3

Partie 2 : Dette non négociable, dette à vue

422,9

349,4

- 17,4%

0,1

Partie 3 : Charges diverses résultant de la gestion de la dette et frais de trésorerie

59,0

85,0

+ 44,1%

0,1

Partie 4 : Garanties

121,6

125,4

+ 3,1%

54,5

Partie 5 : Dépenses en atténuation de recettes

64.483,7

68.625,3

+ 6,4%

88,2

Total pour le titre I

105.597,3

111.106,5

+ 5,2%

TITRE II - Pouvoirs publics

0,7

Total pour le titre II

831,0

844,4

+ 1,6%

TITRE III - Moyens des services

0,0

Partie 1 : Personnel. Rémunérations d'activité

200,0

0,0

- 100,0%

5,5

Partie 2 : Personnel. Pensions et allocations

6.779,8

6.884,3

+ 1,5%

3,6

Partie 3 : Personnel en activité et en retraite. Charges sociales

4.009,4

4.496,0

+ 12,1%

0,2

Partie 7 : Dépenses diverses

115,3

262,1

+ 127,4%

9,2

Total pour le titre III

11.104,5

11.642,4

+ 4,8%

TITRE IV - Interventions publiques

n.s.

Partie 1 : Interventions politiques et administratives

0,0

suppr.

n.s.

1,0

Partie 4 : Action économique. Encouragements et interventions

1.367,1

1.264,4

- 7,5%

0,8

Partie 6 : Action sociale. Assistance et solidarité

1.023,7

982,9

- 4,0%

1,8

Total pour le titre IV

2.390,9

2.247,3

- 6,0%

99,9

Total pour les dépenses ordinaires

119.923,6

125.840,6

+ 4,9%

TITRE VI - Subventions d'investissement accordées par l'État

0,12

Partie 8 : Investissements hors de la métropole

151,0

151,0

+ 0,0%

0,12

Total pour le titre VI

151,0

151,0

+ 0,0%

0,12

Total pour les dépenses en capital

151,0

151,0

+ 0,0%

100,0

Total pour les Charges communes

120.074,6

125.991,6

+ 4,9%

Pour mémoire :

54,2

remboursements et dégrèvements

64.213,7

68.325,3

+ 6,4%

45,8

crédits nets de remboursements et dégrèvements

55.860,9

57.666,3

+ 3,2%

COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR RATTACHÉS AUX CHARGES COMMUNES

(en millions d'euros)

LFI
2004

PLF
2005

1. Compte d'affectation spéciale n° 902-33
« Fonds de provisionnement des charges de retraite »

Évaluations de recettes

0,0

0,0

Crédits

0,0

0,0

Charge nette

0,0

0,0

2. Compte de commerce n° 904-22
« Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'État »

Recettes

2.159,0

2.144,0

Dépenses

1.869,0

1.797,0

Charge nette

- 290,0

- 347,0

Autorisation de découvert

1.700,0

1.700,0

En exécution, les dépenses nettes du budget des Charges communes représentent près du tiers des dépenses nettes du budget général. En effet, les crédits pour charges de pension, répartis entre les différents fascicules budgétaires dans la loi de finances initiale, sont transférés en cours de gestion sur le budget des Charges communes, qui inclut les chapitres d'imputation de la dépense.

ÉVOLUTION DU BUDGET DES CHARGES COMMUNES
(charges nettes de remboursements et dégrèvements)

1999

2000

2001

2002

2003

LFI 2004

PLF 2005

I.- Budget des Charges communes (a) (en milliards d'euros)

1) Crédits initiaux

57,01

56,53

53,87

54,27

56,88

55,86

57,67

2) Crédits ouverts (b)

79,58

77,39

79,15

81,50

82,70

-

-

3) Dépense nette

78,69

77,65

79,08

81,40

81,82

-

-

II.- Part des Charges communes dans le budget général (en pourcentage)

1) Crédits initiaux

22,2%

22,0%

20,4%

20,2%

20,5%

19,5%

19,8%

2) Crédits ouverts (b)

29,0%

28,1%

28,0%

27,9%

28,5%

-

-

3) Dépense nette

29,9%

29,6%

29,4%

29,1%

29,1%

-

-

(a) Hors remboursements et dégrèvements d'impôts (chapitres 15-01 et 15-02) qui s'élèvent à 64,2 milliards d'euros dans la loi de finances initiale pour 2004 et atteindraient 68,3 milliards d'euros en 2005.

(b) Dont le transfert sur le budget des Charges communes, en cours de gestion, des crédits de pension inscrits en loi de finances initiale sur les différents budgets.

B.- DES CRÉDITS DISPARATES, QUI SERONT RÉPARTIS ENTRE DE NOMBREUSES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL EN 2006

· Le budget des Charges communes est un assemblage composite de crédits à la destination très diverse. Il a souvent servi d'« incubateur » pour des dispositifs nouveaux (par exemple, la ristourne dégressive sur les bas salaires instaurée en 1995) avant leur transfert vers leur ministère « logique » de rattachement. Depuis quelques années, cependant, de nombreux transferts de crédits vers ou en provenance d'autres ministères l'ont amené à refléter mieux qu'auparavant sa vocation première, la couverture des « charges communes » de l'État. Il s'agit essentiellement :

- des charges qui ne sauraient figurer dans aucun budget : les dépenses relatives à la dette publique, les remboursements et dégrèvements d'impôts, les dépenses en atténuation de recettes, les dépenses relatives au fonctionnement des pouvoirs publics, etc. font partie du domaine naturel des « charges communes » ;

- des charges qui possèdent un caractère interministériel : le budget des Charges communes porte par exemple des crédits globaux destinés à être répartis en cours d'exercice, notamment pour des dépenses accidentelles (secours aux victimes de calamités) ou éventuelles (abondement des chapitres du budget général dotés de crédits provisionnels), ainsi que, certaines années, une provision générale au titre de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

En revanche, restent inscrites sur le budget des Charges communes des dotations qui relèvent des compétences propres du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, comme, par exemple, les versements à certains régimes spéciaux de sécurité sociale, les aides à la pierre, diverses aides en faveur de rapatriés, certaines majorations de rentes ou la réparation de préjudices dans le domaine de la santé (SIDA, amiante, contentieux transfusionnel).

· La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) définit la façon dont devraient être inscrites au budget certaines dotations actuelles du budget des Charges communes :

- la charge de la dette sera rattachée à un compte spécial qui supportera les charges d'intérêt et les charges et produits liés à la gestion active de la dette, notamment les swaps de taux ;

- les garanties devront faire l'objet d'un programme spécifique, doté de crédits évaluatifs, de même que les remboursements et dégrèvements ;

- les dotations des pouvoirs publics constitueront les différents programmes d'une mission unique ;

- une mission spécifique rassemblera la dotation pour mesures générales en matière de rémunérations des agents de l'État (qui remplacera l'actuel chapitre 31-94) et la dotation pour dépenses accidentelles (actuel chapitre 37-95) ;

- le compte spécial relatif aux pensions de retraite et charges accessoires regroupera toutes les dépenses de pension.

Ces règles, fixées dans le texte même de la loi organique, ont orienté la construction par le Gouvernement du projet de maquette qui a été soumis pour discussion aux assemblées parlementaires. L'essentiel des crédits des Charges communes constituerait la matière de deux missions gérées par les services du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

- la mission « Engagements financiers de l'État » (46,4 milliards d'euros en 2005, selon le document de préfiguration du projet annuel de performance (1) transmis par le Gouvernement) regrouperait cinq programmes consacrés, respectivement, à la charge de la dette et de la trésorerie de l'État (42,4 milliards d'euros), aux appels en garantie (125,4 millions d'euros), à l'épargne-logement et divers dispositifs de financement du logement en voie d'extinction (1,3 milliard d'euros) et aux majorations de rentes (243 millions d'euros). L'apurement des cotisations dues par l'État à la Caisse nationale d'allocations familiales (2,4 milliards d'euros), inclus dans le document de préfiguration, devrait en fait disparaître d'ici à la présentation du budget 2006 ;

- la mission « Remboursements et dégrèvements » (68,3 milliards d'euros) serait organisée en deux programmes : remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (57,2 milliards d'euros) et remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (11,1 milliards d'euros). Cette mission - la plus importante, en masse, dans le budget général - pose problème au regard de l'objectif premier de la LOLF, qui consiste à organiser les crédits selon la finalité de la dépense. En effet, la mission regroupe les crédits concernés en fonction de la nature de la dépense alors qu'une structuration selon leur finalité (soutien aux entreprises, allégement à caractère social de la charge fiscale pesant sur les ménages, gestion technique de l'impôt, etc.) aurait conduit à les répartir entre différentes missions du budget général (comme Développement des entreprises ou Solidarité et intégration), dans des programmes spécifiques puisqu'il s'agit de crédits évaluatifs.

Les crédits des Charges communes relatifs aux pensions n'apparaîtront plus en tant que tels : les charges de pension seront imputées sur le compte d'affectation spéciale ad hoc, y compris les charges dues au titre des mécanismes de compensation généralisée et spécifique entre régimes spéciaux d'assurance vieillesse. Le compte spécial sera alimenté, en recettes, par des versements imputés sur des crédits inscrits sur les différents programmes comportant des dépenses de personnel, en fonction du taux de contribution employeur déterminé pour les personnels rémunérés par ces programmes. Les autres crédits seront répartis dans différentes missions (Régimes sociaux et de retraite, Gestion et contrôle des finances publiques, Développement et régulation économiques, Direction de l'action du Gouvernement, Action extérieure de l'État, Relations avec les collectivités territoriales, Outre-mer, Solidarité et intégration, Santé, Administration générale et territoriale de l'État).

I.- LA CONSÉCRATION DU PROGRAMME « CHARGE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT »

Depuis le projet de loi de finances pour 2002, le Gouvernement propose au Parlement d'examiner les crédits relatifs à la charge de la dette dans le cadre d'un « pré-programme », au sens de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

La quatrième version du pré-programme relatif à la gestion de la dette et de la trésorerie de l'État s'écarte, dans sa forme, des versions antérieures, sans cependant signifier un changement sur le fond.

La politique d'endettement de l'État s'appuie sur les principes généraux désormais classiques : simplicité de l'offre de titres, organisée autour des trois grandes catégories bien connues que sont les BTF, les BTAN et les OAT ; liquidité du marché, afin d'attirer les investisseurs et de leur donner la possibilité d'effectuer des arbitrages ; transparence, avec la mise en œuvre d'une procédure de vente des titres qui assure l'égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence.

Placé sous la responsabilité du directeur du Trésor, le programme a pour objet de « permettre à l'État d'honorer ses engagements financiers en toute circonstance », c'est-à-dire, en pratique, de faire en sorte que le compte de l'État à la Banque de France soit toujours créditeur. Il sera organisé en trois actions : Dette négociable ; Trésorerie de l'État ; Dette non négociable. L'Agence France Trésor sera pilote des deux premières actions, l'Agence comptable centrale du Trésor sera pilote de la troisième.

Les objectifs, désormais au nombre de huit, ont été répartis entre les trois actions susmentionnées :

_ Dette négociable : 1/ couvrir le programme d'émission en toute sécurité ; 2/ améliorer la pertinence des choix relatifs à la mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire ; 3/ réduire la durée de vie moyenne de la dette après swaps ;

_ Trésorerie de l'État : 1/ limiter le solde du compte de l'État à la Banque de France en fin de journée ; 2/ placer les excédents ponctuels de trésorerie au meilleur prix ; 3/ améliorer l'information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte de l'État ; 4/ obtenir un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la survenance d'incidents ;

_ Dette non négociable : gérer de manière satisfaisante l'extinction progressive de la dette financière non négociable.

Les indicateurs associés aux objectifs poursuivis se sont à nouveau enrichis et affinés par rapport à l'an passé. Deux indicateurs relatifs aux conditions de réalisation des adjudications, deux indicateurs relatifs à la pertinence des choix d'émission effectués par l'AFT, un indicateur relatif au taux d'annonce de leurs opérations par les correspondants du Trésor, un indicateur sur le taux de rejet des opérations de remboursement de la dette non négociable et un système hiérarchisé d'indicateurs et de sous-indicateurs relatifs à la maîtrise des risques ont ainsi été ajoutés aux indicateurs présentés dans le pré-programme du PLF 2004.

S'agissant des grandes options retenues par l'Agence France Trésor pour la gestion de la dette et de la trésorerie de l'État, il convient de rappeler brièvement les éléments suivants :

- l'AFT a engagé en 2003 des études exploratoires sur la possibilité d'émission de titres en devises, couvertes contre le risque de change, à la suite de l'autorisation de principe qui a été accordée dans la LFI 2003. Ces études concluent que de telles émissions n'apparaissent pas opportunes dans le contexte actuel ;

- un programme de swaps de taux d'intérêt a été engagé à la fin de l'année 2001 mais suspendu le 3 septembre 2002, à titre provisoire, en raison de conditions de marché jugées trop peu favorables. Il n'apparaît pas possible de le reprendre, pour l'heure, mais les contrats arrivant à échéance sont renouvelés ;

- la stratégie de financement proposée à l'examen du Parlement consiste à réduire à 5 ans et 6 mois à la fin de l'année 2005 (au lieu de 6 ans et 2 mois au 30 septembre 2004) la durée de vie moyenne de la dette négociable, afin de bénéficier de taux d'intérêt moins élevés. Ce résultat s'entend comme devant être atteint dans le cas de conditions de marché favorables permettant une reprise du programme de swaps.

II.- LES GRANDS BLOCS DE CRÉDITS DANS LE PROJET DE BUDGET 2005 DES CHARGES COMMUNES

Trois grands blocs structurent le budget des Charges communes, alors que l'ensemble des autres crédits ne représente que 3,1% de leur montant total :

- la charge de la dette : 33,6% du total ;

- les remboursements et dégrèvements : 54,2% du total ;

- les dépenses de personnel : 9% du total.

A.- UNE CROISSANCE PLUS VIVE POUR LA CHARGE DE LA DETTE

· La charge nette de la dette augmenterait de 1,2 milliard d'euros entre 2004 et 2005, soit + 3,1%, et s'établirait à 39,5 milliards d'euros. On prévoit donc une légère accélération par rapport à 2004, où le taux de progression ne devrait être que de + 2,6%. Depuis 2000, la charge nette progresse chaque année d'environ un milliard d'euros, à l'exception de 2003, où elle a reculé de 560 millions d'euros. La progression annuelle atteignait fréquemment 2 à 3 milliards d'euros avant 1997.

LES COMPOSANTES DE LA CHARGE DE LA DETTE

(en milliards d'euros)

2003

LFI 2004

PLF 2005

Dette négociable à moyen et long terme

35,17

36,06

37,50

Dette négociable à court terme

2,44

2,38

2,39

Dette non négociable

0,67

0,42

0,35

Charges diverses

0,07

0,06

0,09

A déduire :

- recettes diverses

0,78

0,33

0,48

- résultat des swaps

0,24

0,29

0,35

Total Charge nette de la dette

37,34

38,30

39,50

En effet, depuis plusieurs années, les charges d'intérêt ont enregistré les effets bénéfiques de la baisse du déficit et de la baisse des taux. Sur ce dernier point, le renouvellement progressif de la dette amène à remplacer des titres anciens, émis à taux élevés, par des titres nouveaux, émis à des taux plus faibles, qui génèrent donc de moindres charges d'intérêt. Cet « effet taux » dure tant que subsiste un décalage entre le taux moyen de la dette et le taux moyen du marché.

Lorsque l'effet taux s'affaiblit, la charge de la dette est gouvernée par l'« effet volume », reflet de l'accroissement de l'encours, qui découle principalement du déficit budgétaire. Un déficit de 45 milliards d'euros par an financé au taux moyen de 5% génère une charge d'intérêt supplémentaire de 2,25 milliard d'euros chaque année. Cette évaluation sommaire rappelle combien est nécessaire une réduction continue du déficit budgétaire, réduction qui reste l'unique moyen de maîtriser vraiment, sur le long terme, la charge de la dette.

· Le besoin de financement de l'État est constitué, à titre principal, du déficit budgétaire et du montant des amortissements de titres arrivés à échéance. En 2005, le déficit budgétaire s'établirait à 44,9 milliards d'euros et le montant des amortissements serait égal à 73,1milliards d'euros. Il apparaît que le besoin de financement de l'État devrait s'élever à 118 milliards d'euros.

MODALITÉS PRÉVISIONNELLES DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT EN 2005

graphique

Source : Agence France Trésor

Ce besoin serait couvert intégralement par des émissions de titres à long et moyen terme (OAT et BTAN). A la différence des années précédentes, les dépôts des correspondants ne connaîtraient pas de variation sensible. Les émissions nettes de BTF seraient également nulles, l'État ayant considérablement augmenté l'encours de ces produits à court terme en 2002 et 2003, en raison d'une exécution des lois de finances plus difficile que prévu. Le niveau des disponibilités du Trésor, porté sur son compte ouvert dans les livres de la Banque de France ou placé auprès des partenaires financiers habituels, resterait également inchangé.

B.- UNE PROGRESSION MODÉRÉE DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS, APRÈS UN FORT RALENTISSEMENT EN 2004

Les remboursements et dégrèvements étant à la fois des dépenses et des recettes, leur montant pour l'exercice en cours (2004) fait l'objet d'une révision dans le cadre du présent projet, comme pour toutes les recettes. L'évaluation révisée est une base plus pertinente que l'évaluation de la loi de finances initiale pour juger des prévisions présentées dans le projet de loi de finances pour 2005.

Les remboursements et dégrèvements atteindraient 66,6 milliards d'euros en 2004 (évaluation révisée) et 68,3 milliards d'euros en 2005, augmentant ainsi de 2,6% d'une année sur l'autre. Ceci traduit un rythme de progression somme toute modéré puisque l'évaluation révisée pour 2004 fait apparaître un fort ralentissement (+ 0,6%) par rapport aux dépenses constatées en 2003 (66,2 milliards d'euros).

ÉVOLUTION GÉNÉRALE DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS

(en milliards d'euros)

graphique

Années 1996 à 2003 : résultats d'exécution ; année 2004 : évaluation révisée

Source : lois de règlement et PLF

Les remboursements et dégrèvements représenteraient, en 2005, 20,1% des ressources fiscales brutes, après 20,3% en 2004. Il s'agit toujours d'un niveau très supérieur au niveau moyen observé depuis 1990.

· Les remboursements de TVA progressent de 3,4% par rapport à 2004. Ils atteindraient ainsi 36,7 milliards d'euros. Il est toujours aussi difficile d'évaluer correctement les remboursements de TVA à venir. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estime qu'« un lien a pu être établi entre l'évolution des remboursements de crédits de TVA et l'évolution des investissements et des exportations ». Sur cette base, le ministère indique que la progression moins forte des crédits demandés pour 2005 résulte de « la poursuite de la reprise de l'activité économique ».

· Les dégrèvements au titre des impôts locaux augmenteraient de 7,3% en 2005, après une diminution de 9,2% en 2004. Ils atteindraient 11,1 milliards d'euros.

Les dégrèvements de taxe professionnelle représentent environ 68% des dégrèvements d'impositions locales. Les réformes du dispositif de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, en 1995 et 1996, ont mis deux à trois ans avant de produire leur plein effet. Par ailleurs, la réforme de la taxe professionnelle par suppression progressive de la part « salaires » dans les bases d'imposition a stabilisé le coût du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. En 2005, les dépenses budgétaires progresseraient de 8,5%, de par :

- l'effet de l'évolution spontanée (154 millions d'euros) ;

- l'instauration, prévue par l'article 14 du présent projet, d'un crédit d'impôt de taxe professionnelle pour le maintien de l'activité dans les zones d'emploi en grande difficulté (330 millions d'euros) ;

- le renforcement, prévu par l'article 15 du présent projet, du dégrèvement de taxe professionnelle en faveur des entreprises disposant de véhicules routiers ou d'autocars (60 millions d'euros) ;

- l'effet supplémentaire en 2005 du dégrèvement de taxe professionnelle au titre des immobilisations nouvelles affectées à la recherche, prévu par l'article 82 de la loi de finances initiale pour 2003 (15 millions d'euros).

Les dépenses observées ou prévues de 2002 à 2005 suggèrent que les dégrèvements de taxe d'habitation (26% des dégrèvements d'impositions locales) s'installent sur un sentier de croissance régulier de 2,6% par an, malgré le dispositif de « gel » des taux instauré par la réforme de la taxe d'habitation de juillet 2000. Ces dégrèvements atteindraient 2,8 milliards d'euros en 2005.

· Les restitutions d'impôt sur les sociétés s'élèveraient à 7,7 milliards d'euros, en légère progression par rapport à 2004 (+ 0,7%).

Les restitutions d'excédents de versements évoluent, en général, à rebours de la situation économique, ce qui suggère que les entreprises ont du mal à anticiper correctement les répercussions de la conjoncture sur leur résultat imposable et à ajuster le niveau de leurs acomptes en conséquence. Sur la base des premiers recouvrements de 2004, les restitutions d'excédent de versement pourraient atteindre 7 milliards d'euros. Le produit brut de l'impôt est attendu en forte progression en 2005, ce qui amène à prévoir un montant de restitutions de 7,6 milliards d'euros environ. Les remboursements de crédits d'impôts ne font pas l'objet d'une prévision en loi de finances. Ils représentent, en moyenne, une dépense de 350 à 400 millions d'euros, qui provient pour partie du remboursement au terme du délai de 5 ans des créances nées du report en arrière des déficits et, pour une autre partie, des crédits à caractère incitatif (crédit d'impôt recherche, crédit d'impôt formation, etc.).

C.- LES DÉPENSES DE PERSONNEL : STABILITÉ DU POINT D'INDICE ET POURSUITE DE L'ALOURDISSEMENT TENDANCIEL DES PENSIONS

· Une dotation de 200 millions d'euros était inscrite sur le chapitre 31-94 « Mesures générales intéressant les agents du secteur public » dans la LFI 2004, afin de financer les mesures de revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenues en janvier 2004.

Aucune dotation de ce type n'est demandée dans le présent projet, ce qui signifie qu'aucune augmentation salariale n'est envisagée d'ici à la fin de 2004. De même, les crédits de rémunération inscrits sur les fascicules des différents ministères sont calés sur la valeur du point fonction publique au 1er janvier 2004 et la valeur moyenne du point en 2005 est identique à celle de 2004.

La stabilité du point de la fonction publique constitue un soutien indispensable à la politique de maîtrise de dépenses engagée avec détermination par le Gouvernement. Il faudra bien se poser un jour la question du maintien de cette stabilité dans la durée, car on ne peut laisser se creuser un écart trop important entre les rémunérations publiques et les rémunérations privées pour des qualifications équivalentes. A terme, la qualité du recrutement et la motivation des agents s'en ressentiraient, alors même que les besoins en recrutement vont croître avec le départ en retraite de générations nombreuses, dans les prochaines années.

· Les charges de pension (chapitre 32-97) passent de 6,76 milliards d'euros à 6,87 milliards d'euros (+1,5%). Cependant, les dotations inscrites en loi de finances initiale sur le chapitre 32-97 du budget des Charges communes ne sont pas représentatives des dépenses effectives de pension : le chapitre est abondé en gestion par le transfert des crédits inscrits sur de nombreuses sections ministérielles. La charge nette du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires pour le budget général peut être évaluée à 28,1 milliards d'euros en 2005, ce qui correspond à un taux de cotisation implicite de 60,2%.

Les crédits destinés à la compensation démographique des ressources et des charges des régimes de sécurité sociale diminuent de 240 millions d'euros et s'établissent à 2,1 milliards d'euros. La nouvelle diminution du taux de réalisation de la surcompensation (qui reviendrait de 24% à 21%) procurerait une économie de 45 millions d'euros. En revanche, la prise en charge par l'État de la dérive des charges de pensions des fonctionnaires de la Poste a été provisionnée pour 371 millions d'euros en 2005 au lieu de 221 millions d'euros en 2004.

· Les crédits pour cotisations et prestations sociales atteindraient 2.415 millions d'euros en 2005, en augmentation de 726,7 millions d'euros par rapport à 2004. La majeure partie (2.362 millions d'euros) correspond à l'apurement des cotisations familiales dues par l'État à la Caisse nationale des allocations familiales, qui enregistre par ailleurs les conséquences du transfert à la CNAF du service des prestations familiales : les crédits ont été majorés de 643,4 millions d'euros par transfert à partir des autres sections budgétaires.

III.- LES AUTRES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS

A.- DEUX RECTIFICATIONS MINEURES DE PÉRIMÈTRE

Comme indiqué ci-avant, les crédits du budget des Charges communes sont majorés de 643,4 millions d'euros en raison de la modification de la répartition des compétences entre l'État et la CNAF pour le versement des prestations familiales. Celles-ci devant désormais être versées par la CNAF, les crédits de toutes les sections budgétaires ont été minorés des montants correspondants et les crédits de l'apurement global, payé sur l'article 10 du chapitre 33-91 du budget des Charges communes ont été majorés à due concurrence. Compte tenu des effectifs portés par les sections budgétaires, les principaux transferts effectués à ce titre concernent l'Enseignement scolaire (314,8 millions d'euros), la Défense (209 millions d'euros), le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (71,8 millions d'euros), l'Intérieur (48,9 millions d'euros) et la Justice (31,5 millions d'euros).

Par ailleurs, les crédits destinés à la réparation des préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience humaine de transfusés et aux contentieux transfusionnels, jusqu'ici inscrits sur les articles 10 et 30 du chapitre 46-98 « Réparation de préjudices dans le domaine de la santé », sont transférés sur le budget de la Santé, de la famille, des personnes handicapées et de la cohésion sociale. Le transfert porte sur 12,2 millions d'euros.

B.- L'ÉVOLUTION DES AUTRES CRÉDITS

Les crédits pour charges de garantie (chapitre 14-01) progressent de 3,8 millions d'euros et atteignent 125,4 millions d'euros. Les procédures publiques gérées par la COFACE nécessitent 61 millions d'euros (comme en 2003 et en 2004), aucune dotation n'étant demandée pour l'assurance-crédit à l'exportation compte tenu de l'excédent attendu pour cette procédure.

Les crédits des pouvoirs publics (titre II) sont portés à 844,4 millions d'euros et augmentent ainsi de 1,6%. Après le doublement, en 2003, de la dotation demandée au profit de la Présidence de la République, qui marque l'arrivée à maturité du processus de clarification engagé depuis plusieurs années, l'essentiel de la progression des crédits demandés au titre des pouvoirs publics est imputable aux assemblées parlementaires.

Les crédits pour dépenses accidentelles (chapitre 37-95) sont majorés de 149 millions d'euros et atteignent 195 millions d'euros. On sait, cependant, que cette dotation est parfois mise à profit pour « gager », au cours de la discussion parlementaire, des majorations décidées par le Gouvernement sur d'autres chapitres budgétaires. Pour leur part, les crédits pour dépenses éventuelles (chapitre 37-94) sont stables à 45 millions d'euros.

Les crédits pour primes d'épargne-logement versées par l'État (chapitre 44-91, article 30) s'établissent à 1.250 millions d'euros, en diminution de 100 millions d'euros. Leur niveau s'ajuste, avec retard, sur l'évolution constatée des dépenses depuis 2001. La réforme des plans d'épargne logement, adoptée dans la loi de finances initiale pour 2003, devrait modifier sensiblement l'équilibre du produit et rend délicate, à court terme, toute anticipation du rythme de clôture des plans en cours, qui détermine la dépense budgétaire. L'effet de la récente baisse des taux réglementée est un autre facteur d'incertitude.

Les versements de l'État à divers régimes obligatoires de sécurité sociale (chapitre 46-90) occasionneraient, en 2005, une dépense de 693,2 millions d'euros au lieu de 755,2 millions d'euros en 2004. La subvention d'équilibre au régime des Mines est réduite de 72 millions d'euros, parallèlement à la réforme du régime minier qui voit, notamment, la suppression du transfert que le régime d'assurance vieillesse effectuait au profit du régime d'assurance maladie. La subvention au régime de la SEITA est accrue de 10 millions d'euros, notamment en raison de la diminution du taux de réalisation de la compensation spécifique entre régimes spéciaux d'assurance vieillesse.

CHAPITRE PREMIER :

REDRESSER LES FINANCES PUBLIQUES ET MAÎTRISER LA CHARGE
DE LA DETTE : UN EFFORT INDISPENSABLE POUR REDONNER DES MARGES DE MANœUVRE À LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

(en milliards d'euros)

LA DETTE DE L'ÉTAT EN 2005 : ENCOURS, CHARGE, GESTION

I.- HYPOTHÈSES RETENUES

- Déficit à financer (en exercice) : 44,9 (55,5 en LFI 2004)

- Amortissements de titres à moyen et long terme : 73,1 (66,5 en LFI 2004)

- Émissions à moyen et long terme : 118,0 (122,0 en LFI 2004)

- Émissions nettes à court terme (BTF) : 0,0 (0,0 en LFI 2004)

- Taux d'intérêt moyens : - court terme (BTF) en 2005 : 2,4% (LFI 2004 : 2,1%)

- moyen terme (BTAN) en 2004 : 2,9% (LFI 2004 : 3,3%)

- long terme (OAT) en 2004 : 4,0% (LFI 2004 : 4,0%)

II.- ÉVOLUTION ATTENDUE

- Encours nominal de dette constaté fin 2003  : 827,3 = 53,1% du PIB

dont dette négociable : 787,8 (95,2% du total)

- Projections : - 875 fin 2004 (53,8% du PIB)

920 fin 2005 (54,2% du PIB)

- Charge nette : - constatée en 2003 : 37,3 (solde primaire : - 19,4)

- prévue en 2004 : 38,3 (LFI) (solde primaire : - 10,7)

- prévue en 2005 : 39,5 (solde primaire : - 5,1)

(Après effet du programme de swaps : solde positif de 290 millions d'euros en 2004 et de 347 millions d'euros en 2005)

III.- PRINCIPAUX OBJECTIFS DE LA GESTION

· Limiter le montant du compte du Trésor à la Banque de France en fin de journée

· Placer les excédents ponctuels de trésorerie au meilleur prix

· Minimiser à moyen terme la charge de la dette, dans des conditions de sécurité absolues

CHARGE DE LA DETTE

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

LFI 2004

PLF 2005

1ère PARTIE - DETTE NÉGOCIABLE :

11-05 Emprunts d'État et OAT

27.445,80

28.614,74

29.114,71

30.132,16

30.796,1

32.057,6

11-06 Bons du Trésor à court et moyen terme

9.804,46

9.521,72

10.171,53

9.245,53

9.714,0

9.863,8

- art. 10 : BTF

1.882,17

2.135,46

2.541,61

2.438,94

2.379,0

2.391,8

- art. 20 : BTAN

7.922,28

7.386,26

7.629,93

6.806,59

7.335,0

7.472,0

- art. 30 : Autres bons négociables

-

-

-

-

-

-

Total Première partie

37.250,25

38.136,45

39.286,25

39.377,69

40.510,1

41.921,4

2ème PARTIE - DETTE NON NÉGOCIABLE, DETTE À VUE :

12-01 Intérêts des comptes de dépôt au Trésor

1.104,72

690,81

782,22

313,10

137,0

82,4

- art. 10 : comptes de dépôts

49,46

55,12

314,94

280,25

137,0

82,4

- art. 20 : rémunération des avoirs CCP

1.055,26

635,69

467,28

32,84

-

-

12-02 Bons du Trésor non négociables

86,61

103,72

284,25

88,03

55,0

35,0

12-03 Rémunération des dépôts de divers instituts
d'émission et banques centrales

229,97

319,62

285,94

263,81

229,0

230,0

12-05 Prise en charge par l'État de la dette de divers organismes (a)

11,34

4,85

4,44

2,17

1,9

2,0

Total Deuxième partie

1.432,65

1.119,00

1.356,85

667,10

422,9

349,4

3ème PARTIE - CHARGES DIVERSES RÉSULTANT DE LA GESTION DE LA DETTE ET FRAIS DE TRÉSORERIE :

13-01 Charges diverses résultant de la gestion de la dette

10,41

7,81

9,76

35,67

35,0

35,0

(dont charges FSR) (b)

(5,53)

(0,37)

(0,24)

-

-

-

13-03 Frais divers de trésorerie

34,34

48,25

38,20

38,68

24,0

50,0

Total Troisième partie

44,74

56,06

47,96

74,35

59,0

85,0

Charge brute de la dette

38.727,65

39.311,51

40.691,05

40.119,14

40.992,0

42.355,8

A déduire : Recettes d'ordre (hors FSC) (b)

3.038,88

2.635,38

2.635,97

2.543,35

2.404,0

2.508,0

(pour mémoire : recettes FSC) (b)

(25,72)

(12,14)

(1,32)

-

-

-

_ ligne 806 (c)

3.018,64

2.610,21

2.614,14

2.519,64

2.404,0

2.508,0

- recettes de coupon couru

2.449,93

2.110,97

2.052,48

1.767,04

2.074,0

2.033,0

- rémunération de la trésorerie Banque de France ; pensions de titres

533,48

455,86

525,22

738,58

315,0

460,0

- recettes FSR

12,33

8,06

6,67

-

-

-

- divers

22,90

35,32

29,77

13,91

15,0

15,0

_ intérêts des avances (FSR/CDP) (d)

20,24

25,17

21,83

-

-

-

Charge nette de la dette (hors FSC) (b)

35.688,76

36.676,13

38.055,08

37.575,79

38.588,0

39.847,8

A déduire : solde du compte n° 904-22

-

-

+ 155,37

+ 235,00

+ 290,0

+ 347,0

Charge nette après swaps

35.688,76

36.676,13

37.899,71

37.340,79

38.298,0

39.500,8

Écart sur l'année précédente

+ 980,80

+ 987,37

+ 1.223,58

- 558,92

+ 957,2

+ 1.202,8

Variation sur l'année précédente

+ 2,8%

+ 2,8%

+ 3,3%

- 1,5%

+ 2,6%

+ 3,1%

(a) Dont rémunération des créances de TVA.

(b) FSC : Fonds de stabilisation des changes ; FSR : Fonds de soutien des rentes.
Leur activité donne lieu à des ressources et des charges budgétaires, qui ne font pas l'objet de prévision en loi de finances.

(c) Ligne de recettes non fiscales retraçant les recettes en atténuation des charges de la dette et des frais de trésorerie.
Montant hors FSC (sous-ligne 806-72 jusqu'à 1996 ; ligne 817-02 à partir de 1997).

(d) Ligne 411-02 des recettes non fiscales à partir de 1997.

I.- LA CONSÉCRATION DU PROGRAMME RELATIF À LA GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE

A.- DU « PRÉ-PROGRAMME » AU PROGRAMME

1.- Une filiation inévitable

Depuis le projet de loi de finances pour 2002, le Gouvernement propose au Parlement d'examiner les crédits relatifs à la charge de la dette dans le cadre d'un « pré-programme », au sens de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Grâce au dialogue constructif qui s'est établi entre l'Agence France Trésor et les commissions des finances des deux assemblées, le « pré-programme » a atteint rapidement une grande qualité, au point qu'il était possible d'affirmer qu'il répondait très correctement aux exigences de la LOLF avant même que celle-ci ne trouve pleinement à s'appliquer.

Le projet de loi de finances pour 2005 donne l'occasion au Gouvernement de présenter les crédits du budget général « conformément aux principes retenus » par la LOLF, comme le prévoit l'article 66 de celle-ci. Le Gouvernement est allé plus loin et, dans la lignée des travaux conduits tout au long de l'année 2004 sur la construction de la « maquette budgétaire », il a voulu compléter l'information du Parlement en joignant au présent projet des fascicules préfigurant les « projets annuels de performance », qui remplaceront les classiques fascicules « bleus » à compter de l'an prochain.

Sans que cela constitue une grande surprise, les crédits budgétaires relatifs à la charge de la dette seront réunis au sein d'un programme « Charge de la dette et de la trésorerie de l'État » inclus dans la mission « Engagements financiers de l'État ». Trois ans après sa naissance, le « pré-programme » proposé en 2002 se trouve donc consacré sous forme de programme à part entière.

Placé sous la responsabilité du directeur du Trésor, le programme a pour objet de « permettre à l'État d'honorer ses engagements financiers en toute circonstance », c'est-à-dire, en pratique, de faire en sorte que le compte de l'État à la Banque de France soit toujours créditeur. Il sera organisé en trois actions : Dette négociable ; Trésorerie de l'État ; Dette non négociable. L'AFT pilotera les deux premières actions, l'Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) pilotera la troisième.

La définition des normes comptables de l'État devant conduire à quelques reclassements, certains postes de dépenses relevant jusqu'ici de la partie 12 « Dette non négociable » devraient être basculés vers l'action « Trésorerie de l'État ». En effet, ne devront plus être considérés comme dette financière que les passifs concourant directement à la couverture du besoin de financement. Les autres relèveront de la simple gestion de la trésorerie.

2.- L'Agence France Trésor, gestionnaire de la dette négociable et de la trésorerie

· L'Agence France Trésor a été mise en place par un arrêté du ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie du 8 février 2001. Il s'agit d'un service à compétence nationale, placé sous l'autorité du directeur du Trésor. Elle est dirigée par un directeur général. L'Agence France Trésor remplit des missions strictement définies, souvent en liaison étroite avec d'autres structures de la direction du Trésor ou du ministère de l'Économie, des finances et de l'industrie. Pour les mener à bien, l'Agence répartit sa tâche entre six cellules de travail :

la cellule « Trésorerie » a pour mission de faire en sorte que le compte de l'État à la Banque de France soit toujours créditeur, c'est-à-dire que l'État puisse honorer toutes ses dépenses et que les éventuels excédents de trésorerie soient placés de façon à fructifier. Elle établit les prévisions de trésorerie, assure les relations de travail avec la Banque de France, ainsi que les relations avec les ordonnateurs et les comptables de l'État. Elle définit les opérations de gestion de la trésorerie (emprunts et dépôts, prises et mises en pension de titres d'État) ;

la cellule « Recherche opérationnelle » définit la stratégie d'endettement de l'État, dans ses dimensions économique, budgétaire et comptable. A cette fin, elle réalise l'analyse théorique des opérations qu'envisage l'Agence et doit proposer les cadres de référence qui seront à l'origine des opérations et des limites que décidera le ministre. Elle modélise les propositions, en vérifie la pertinence, formule les conditions d'optimisation ;

la cellule « Dette » est chargée de la gestion opérationnelle de la dette de l'État : adjudications, rachats, conclusions de swaps de taux d'intérêt, opérations de gestion active de la dette. Elle doit également assurer les relations avec les spécialistes en valeurs du Trésor ;

la cellule « Contrôle des risques et opérations post-marché » définit et met en place le code et les procédures de contrôle. Elle gère les risques associés aux opérations financières. Le segment post-marché enregistre et suit jusqu'à leur dénouement les opérations de l'Agence, en vérifiant leurs caractéristiques avec les SVT. Il transmet l'ensemble de ces informations à l'Agence comptable centrale du Trésor (ACCT) qui effectue le règlement et la comptabilité des opérations ;

la cellule « Macroéconomie » offre à l'AFT une capacité propre d'analyse macroéconomique et financière : évaluation des implications sur les marchés de taux d'intérêt de la conjoncture économique et financière, des politiques monétaires et budgétaires, des débats relatifs aux politiques structurelles, en particulier en France et dans la zone euro. Elle étudie l'environnement économique mondial et européen où doit se déployer l'activité de l'Agence. Elle travaille aussi à expliquer aux investisseurs acteurs de marché, en France et à l'étranger, la façon dont l'Agence perçoit l'environnement économique, et la façon dont elle adapte son action à cet environnement.

la cellule « Information - Communication » est un instrument de veille concurrentielle, de collecte d'information économique et de diffusion d'information. Elle recense les éléments d'information de toute origine susceptibles d'intéresser l'Agence dans la conduite de ses missions. Elle gère les bases de données de l'Agence. Elle assure l'information des milieux financiers sur l'activité de l'Agence, notamment par l'intermédiaire de la presse.

Les effectifs de l'Agence France Trésor sont composés d'une majorité de fonctionnaires mais également de contractuels dans certains domaines précis, qu'ils travaillent à temps plein (contrôle des risques, information) ou qu'ils participent comme consultants à certaines missions (participation à l'élaboration du modèle macrofinancier).

L'Agence France Trésor est assistée dans la gestion de la dette de l'État par un « comité stratégique », qui aux côtés des spécialistes en valeurs du Trésor, la conseille sur les grands axes de la politique d'émission de l'État. Il est composé de personnalités venant d'horizons divers qui aident l'Agence à mettre en œuvre de façon concrète, en les approfondissant, les principes de gestion de la dette et ses procédures. Le rôle du comité stratégique est de donner sa lecture propre des principes qui gouvernent la politique d'émission de l'État et la gestion de sa trésorerie, ainsi que de se prononcer sur les pratiques en cours et les éventuelles évolutions à venir. Le comité s'est réuni les 24 juin et 11 décembre 2003, ainsi que le 27 mai 2004. Il a été l'occasion pour le directeur du Trésor, président de l'AFT, de résumer l'activité de celle-ci, de commenter l'environnement économique et financier, et d'exposer les travaux en cours.

L'AFT cherche à bénéficier de l'expérience de ses homologues, gestionnaires de trésorerie et de dette du monde entier. Des représentants de l'Agence participent aux réunions du groupe de travail sur la gestion de la dette de l'OCDE (qui regroupe 30 pays industrialisés), au Forum des émetteurs souverains (qui regroupe également les gestionnaires de dette des pays émergents) et au « groupe Brouhns », sous-groupe du Comité économique et financier de l'Union européenne qui réunit les 15 agences de la dette ou ministères des finances de l'Union. Des réunions techniques peuvent être organisées avec certains pays, notamment en matière de gestion de trésorerie et de systèmes informatiques.

L'AFT réalise également des opérations de promotion des valeurs du Trésor. Cette activité consiste autant à expliquer la perception de son environnement économique par l'État émetteur qu'à populariser les produits auprès des principales institutions financières du monde. Les opérations prennent trois formes : des voyages de présentation des produits ; des exposés au cours de manifestations rassemblant des acteurs du marché financier ; des campagnes publicitaires. Comme l'indique l'Agence dans son rapport annuel d'activité, « le bon renom de l'État émetteur est un élément important de l'accueil que reçoivent ses émissions [...]. Les sommes consacrées aux activités de promotion n'ont finalement d'autre but que d'abaisser leur coût ».

Enfin, l'Agence intervient comme conseil de diverses entités publiques pour les aider à améliorer la gestion de leur dette et de leur trésorerie. Par exemple, la fin de l'année 2002 a permis à l'AFT d'épauler l'ERAP dans la mise en place d'un programme d'émissions obligataires destinées à lui permettre de participer, pour le compte de l'État, à l'augmentation de capital de France Télécom. Ces émissions ont eu lieu au printemps 2003.

B.- UN PROGRAMME PLACÉ À L'INTERFACE ENTRE LE BUDGET GÉNÉRAL ET LE FUTUR COMPTE DE GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT

1.- Le compte de gestion de la dette et de la trésorerie

Afin de favoriser le développement des interventions de l'Agence France Trésor sur produits dérivés (en particulier les contrats d'échange de taux, ou swaps), la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000 a créé le compte de commerce n° 904-22 « Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'État ». Ce compte retrace les flux de recettes et de dépenses résultant de la conclusion de swaps de taux d'intérêt entre l'État et des contreparties sélectionnées, établissements financiers avec lesquels l'AFT travaille habituellement.

La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances a confirmé l'existence du compte de commerce, en transformant son objet et en élargissant son champ d'intervention. En effet, le II de l'article 22 de la LOLF prévoit que « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l'État, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées sur un compte de commerce déterminé. Ce compte est divisé en sections distinguant les opérations selon leur nature. Chaque section est dotée d'une autorisation de découvert [...] ».

De ce fait, le compte de gestion de la dette et de la trésorerie de l'État devra retracer, non seulement les opérations de gestion active de la dette via des produits financiers dérivés, mais aussi les opérations relevant du service primaire des intérêts de la dette, à savoir le versement des intérêts échus (en dépenses) et l'encaissement des coupons courus ou des revenus tirés de la rémunération de la trésorerie (en recettes). Cependant, une confusion totale, sur un même support budgétaire, entre les opérations primaires et les opérations de gestion active n'aurait pas été un facteur de transparence pour le Parlement. Elle aurait pu également gêner la conduite des actions entreprises, au jour le jour, par l'AFT.

Selon l'Agence France Trésor, deux schémas de structuration du compte peuvent être envisagés :

- une structuration en deux sections distinguant la gestion primaire de la dette (qui s'impute actuellement sur les crédits du budget général) et les opérations de gestion active (qui s'imputent sur l'actuel compte de commerce n° 904-22) ;

- un schéma avec trois sections, correspondant à la répartition des dépenses entre dette négociable, dette non négociable et gestion active de la dette.

Le choix entre ces deux schémas dépend des options retenues, d'une part, en matière d'articulation du compte avec le budget général et, d'autre part, en matière d'autorisation de découvert à consentir sur les sections.

A cet égard, votre Rapporteur spécial estime que les éventuelles opérations conduites en liaison avec la Caisse de la dette publique (CDP) devraient être retracées sur une section spécifique. Il ne paraît pas approprié de « mélanger » les flux de recettes et de dépenses relevant de la mise en œuvre de produits dérivés (swaps de taux ou autres) et ceux résultant de versements ou d'encaissements effectués entre l'État et la CDP, nonobstant leur présentation sous le libellé commun de « gestion active » de la dette :

- les opérations sur produits dérivés ont pour but de déconnecter la durée de vie apparente de la dette de la durée de vie des titres émis par l'État ;

- les opérations conduites avec la CDP ont essentiellement pour but de pallier des défaillances de marché.

Si l'on veut véritablement s'inscrire dans la logique de la LOLF, qui consiste à regrouper les dépenses en fonction de leur finalité, il n'est pas possible d'assimiler ces chefs de dépenses et de recettes, qui constituent deux catégories incontestablement distinctes. La formulation souple retenue par la LOLF pour définir les sections du compte de commerce traduit justement le souhait de ne pas limiter a priori le compte à deux sections : cette souplesse doit être mise à profit.

2.- L'articulation entre le programme et le compte de commerce

Les travaux préparatoires de la LOLF suggèrent que ses concepteurs avaient à l'esprit un mécanisme dans lequel le compte serait alimenté par des versements du budget général. En effet, l'article 10 de la LOLF dispose que les crédits relatifs aux charges de la dette sont évaluatifs et ouverts sur un programme spécifique. Un compte de commerce n'étant pas doté de crédits, la formulation renvoie quasi explicitement à un programme du budget général. La dépense serait donc constituée par des versements du budget général au profit du compte de commerce. Là encore, une option se présente quant au mode d'alimentation du compte. On peut envisager :

- une seule subvention destinée à assurer son équilibre global, à répartir entre les différentes sections ;

- une ou plusieurs subvention(s) destinées à une ou plusieurs section(s) déterminées, l'équilibre global du compte n'étant pas recherché, mais seulement l'équilibre de chaque section bénéficiant d'une subvention.

La solution la plus proche de la situation actuelle - que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie propose de retenir - consiste à choisir une structuration du compte en deux sections, en distinguant les opérations de gestion primaire de la dette et les opérations de gestion active. Seule la section primaire serait alimentée par une subvention d'équilibre du budget général. Elle serait subdivisée en trois sous-sections correspondant aux actions portées sur le budget général : Dette négociable ; Dette non négociable ; Trésorerie de l'État. Comme aujourd'hui, les swaps de taux d'intérêt auraient un impact sur le solde budgétaire mais pas sur la norme d'évolution des dépenses. Le budget général retracerait la charge nette du service primaire de la dette, traduite directement dans le montant des crédits et le niveau de leur consommation alors qu'à l'heure actuelle, il faut défalquer des crédits bruts inscrits sur le titre Ier du budget des Charges communes le montant des recettes en atténuation des charges de la dette, principalement portées par la ligne 806.

Les informations transmises à votre Rapporteur spécial suggèrent qu'un versement hebdomadaire pourrait constituer la solution la plus appropriée. Ceci conduirait à ne prévoir qu'une autorisation de découvert à caractère limitatif et d'un montant limité, car les dépenses relatives au paiement des intérêts de la dette sont faciles à prévoir à l'horizon d'une semaine.

Il va de soi que, compte tenu des orientations présentées ci-avant, les dépenses du budget général constitutives du versement hebdomadaire seraient réparties, en tant que de besoin, entre les trois actions du programme concerné.

C.- LE REMODELAGE ET L'ENRICHISSEMENT DES OBJECTIFS

1.- L'endettement de l'État : une donnée qui s'impose au gestionnaire de la dette

Intuitivement, le lien entre le déficit budgétaire et l'accroissement de la dette de l'État est évident. L'article d'équilibre du projet de loi de finances vise précisément à autoriser le ministre chargé du budget à procéder à des emprunts « pour couvrir l'ensemble des charges de trésorerie », en particulier celles qui ne peuvent être couvertes par des ressources permanentes.

Dans cette perspective, le gestionnaire de la dette doit seulement prendre acte du stock de dette en début d'année et du déficit d'exécution des lois de finances, puis dans le cadre de ses compétences propres et des autorisations relatives aux opérations de trésorerie, qui sont délivrées par le Parlement, développer une stratégie de financement et appliquer ses décisions de gestion afin que l'État soit en mesure d'honorer ses engagements financiers en toute circonstance, au meilleur coût pour le contribuable.

Pour autant, le déficit budgétaire tel qu'il est déterminé par la loi de finances ne peut expliquer en totalité les variations annuelles de l'encours de dette. D'une part, le déficit « en exercice », relatif à l'exercice budgétaire, n'est pas égal au déficit « en gestion », qui porte sur l'année calendaire ; seul celui-ci peut permettre de déterminer la contribution annuelle du déficit à la dette. D'autre part, l'État enregistre des flux nets de dette qui concourent à la variation totale de son encours, sans avoir de traduction budgétaire.

Un exercice budgétaire se déroule sur trois années calendaires : certaines dépenses sont payées par anticipation l'année précédente ; l'essentiel du budget s'exécute au cours de l'année éponyme ; certaines dépenses et recettes sont enregistrées l'année suivante, au cours de la « période complémentaire ». Réciproquement, une année calendaire voit s'exécuter trois exercices budgétaires distincts : l'exercice précédent (pour sa période complémentaire), l'exercice principal et l'exercice suivant (pour les dépenses payées par anticipation). Le tableau ci-après présente les éléments permettant de déterminer les soldes budgétaires pour 2003, respectivement en exercice et en gestion.

EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES EN 2003 (y compris FMI et FSC)

(en millions d'euros)

Année 2002

Année 2003

Année 2004

Solde d'exécution des lois de finances pour 2003 (exercice)

Exercice 2002

+ 417

Exercice 2003

- 3.219 (a)

- 54.202

+ 1.568 (b)

- 55.853

Exercice 2004

- 3.133

Comptes d'attente

- 45

Solde d'exécution des lois de finances en 2003 (gestion)

- 56.963

(a) Dépenses payées par anticipation en 2002.

(b) Solde de la période complémentaire en 2004.

Source : Situation résumée des opérations du Trésor (SROT) au 31 décembre 2003.

L'évaluation des flux nets de dette ne peut reposer sur la présentation traditionnelle de l'encours de la dette de l'État, telle qu'elle figure, par exemple, dans le tableau de la page 30. En effet, la dette y est considérée sous l'angle de ses instruments de financement : titres de la dette négociable (OAT, BTAN et BTF) et postes de la dette non négociable (dépôts des correspondants du Trésor, engagements de l'État, etc.). Au contraire, la notion de « flux net de dette » se réfère au fait générateur de l'endettement, indépendamment de son mode de financement. A ce titre, la prise en charge par l'État d'engagements divers (créances de TVA, emprunts repris à divers organismes, etc.) participe clairement des flux nets de dette enregistrés les années où sont effectuées ces prises en charge. De même, les décisions prises en matière d'émission des titres d'État génèrent des primes et décotes à l'émission, qui traduisent en matière comptable le décalage entre l'encours nominal des titres et l'encaissement en trésorerie.

- -

ENCOURS DE LA DETTE DE L'ÉTAT AU 31 DÉCEMBRE (a)

(en milliards d'euros)

1980

1990

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

1.- Dette négociable

30,01

208,48

431,33

474,44

514,91

560,25

583,13

616,34

653,36

717,27

787,81

Part dans la dette publique totale (en %)

47,1%

76,8%

86,9%

87,9%

89,1%

91,4%

89,2%

90,2%

90,3%

92,8%

95,2%

A.- Dette à long terme

17,36

124,65

270,49

308,29

330,87

363,53

395,17

419,20

442,55

477,86

511,60

dont OAT

103,43

251,91

289,70

329,44

362,11

394,68

419,12

442,47

477,79

511,53

(pour mémoire : OAT émises au profit du FSR)

(1,87)

(3,00)

(0,40)

(0,70)

(0,70)

-

-

-

-

B.- Bons du Trésor à court et moyen terme

12,65

83,83

160,84

166,16

184,04

196,72

187,96

197,14

210,81

239,40

276,21

BTF

44,92

41,26

41,23

47,19

33,69

43,01

52,44

88,18

108,70

(pour mémoire : BTF émis au profit du FSR)

-

-

-

-

-

-

-

-

-

BTAN

115,93

124,89

142,81

149,52

154,27

154,13

158,37

151,23

167,51

(pour mémoire : BTAN émis au profit du FSR)

(0,91)

(0,20)

(0,25)

(0,20)

(0,15)

-

-

-

-

II.- Dette non négociable

33,76

63,12

64,79

65,57

62,91

52,79

70,30

67,02

70,37

56,01

39,49

A.- Engagements de l'État et dette d'organismes supprimés prise en charge par l'État

0,91

12,14

10,44

8,34

5,68

4,30

3,38

2,60

2,12

0,93

0,88

B.- Bons du Trésor sur formules

7,41

4,61

1,55

1,47

2,14

2,31

2,05

1,76

1,42

0,56

0,20

C.- Bons souscrits par des organismes internationaux

2,11

5,83

8,99

8,70

8,59

7,60

10,28

12,13

11,20

10,54

9,09

D.- Dépôts des correspondants du Trésor et des particuliers

24,85

49,29

58,33

60,26

63,17

68,79

74,19

68,49

66,16

71,19

56,56

E.- Dette nette du Trésor envers la Banque de France (b)

- 2,75

- 11,28

- 6,78

- 0,66

- 4,07

- 11,46

0,57

- 0,58

- 1,45

- 0,29

- 0,15

F.- Créances nettes (-) des opérations de pension (c)

- 9,76

- 14,64

- 14,77

- 20,98

- 22,48

- 19,77

- 11,29

- 29,22

- 29,54

G.- Divers (d)

1,23

2,52

2,03

2,09

2,17

2,23

2,31

2,39

2,22

2,30

2,45

Dette totale de l'état

63,77

271,59

496,12

540,01

577,82

613,04

653,42

683,36

723,74

773,27

827,30

En % du PIB

14,9%

27,4 %

42,0%

44,5%

46,2%

46,9%

48,2%

48,1%

49,0%

50,6%

53,1%

(a) Hors titres émis au profit du Fonds de soutien des rentes (FSR).

(b) Concours de la Banque de France au Trésor (= dette du Trésor) - compte courant du Trésor à la Banque de France (= créance du Trésor).

(c) Valeur des titres pris en pension - valeur des titres mis en pension. Ces créances nettes, venant en atténuation de la dette de l'État, sont affectées d'un signe (-).

(d) Depuis 1990, est prise en compte uniquement la dette résultant de l'émission des monnaies métalliques.

Source pour les années 1990 à 2002 : SROT au 31 décembre. Source pour les années antérieures : Compte de la dette publique.

LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA GESTION DE LA DETTE
ET DE LA TRÉSORERIE DE L'ÉTAT
(notions fondamentales sur les « valeurs du Trésor »)

Au milieu des années 1980, il est apparu que les besoins de financement de l'État devaient s'accroître très fortement et que le Trésor ne pourrait plus recourir à ses moyens traditionnels de financement, à savoir principalement l'accès à des ressources non négociables, à bon marché.

Le Trésor s'est fait alors l'instigateur et l'acteur principal d'une réforme visant à modifier profondément la nature des titres émis par l'État, ainsi que les conditions de leur mise sur le marché et de leur négociation sur le marché secondaire. Par là même, il a impulsé des mutations essentielles pour le financement de l'économie française. Trois principes structurent la politique d'émission.

1/ La simplicité. La dette négociable de l'État a été réorientée autour de trois composantes standardisées, les « valeurs du Trésor ». Elles se distinguent par leurs échéances, qui couvrent tous les domaines de la courbe des taux :

- les BTF (bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés) couvrent les besoins de trésorerie à court terme : leur durée de vie à l'émission est inférieure à un an. Ils financent les décalages temporaires de trésorerie entre les encaissements et les décaissements. Les BTF sont aussi une variable d'ajustement dans le programme de financement ; ainsi, leur encours peut varier d'une année sur l'autre ;

- les BTAN (bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel), dont la durée de vie à l'émission est de 2 ou 5 ans, assurent un financement à moyen terme ;

- les OAT (obligations assimilables du Trésor) sont l'instrument du financement à long terme du Trésor : leur durée de vie à l'émission peut aller jusqu'à 30 ans. Une ligne d'OAT à 10 ans est émise chaque année, et sert d'emprunt de référence au marché obligataire français.

Le Trésor n'a plus recours que de façon exceptionnelle à des emprunts spécifiques. Depuis 1990, seul l'emprunt 6% 1997 émis en juillet 1993 échappe aux trois catégories définies plus haut.

2/ La transparence. Pour assurer le placement de ses titres, le Trésor a fait le choix d'une procédure assurant l'égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence : l'adjudication « à prix demandé ». Avant chaque adjudication, le Trésor annonce le volume total de titres qu'il souhaite émettre. Les offres des investisseurs soumissionnaires sont compilées par la Banque de France et présentées au Trésor de façon anonyme, classées selon leur prix. Le Trésor décide du montant des soumissions qu'il retient, dans la limite de la fourchette annoncée auparavant.

Par ailleurs, le Trésor publie en début d'année un calendrier prévisionnel d'émission et s'attache à respecter la régularité des appels au marché. Ainsi, une adjudication d'OAT a lieu le premier jeudi de chaque mois et les BTAN sont adjugés le troisième jeudi de chaque mois (sauf en avril, août et décembre). Les BTF sont adjugés chaque lundi.

La procédure de syndication, qui consiste à préplacer le montant de l'emprunt auprès d`un syndicat d'établissements financiers chargé d'assurer ensuite son véritable placement auprès des investisseurs, n'est plus utilisée que de façon exceptionnelle. L'État y a recours pour le premier placement de titres aux caractéristiques innovantes.

3/ La liquidité. Attirer les investisseurs vers la dette de l'État supposait que fût rénové par ailleurs, pour le dynamiser, le marché secondaire. Le dynamisme du marché repose en partie sur la liquidité des titres qui peuvent s'y négocier. C'est pourquoi le Trésor a fait le choix d'émettre des titres dits « assimilables », qui peuvent être rattachés à des lignes déjà existantes présentant les mêmes caractéristiques. Les titres nouvellement émis deviennent, après le versement de leur premier coupon, totalement indiscernables des titres anciens composant la ligne.

Le gisement total de la ligne peut ainsi devenir important, favorisant la liquidité des échanges. Une vingtaine de lignes ont un encours dépassant 15 milliards d'euros. Plus de 30 autres lignes ont un encours dépassant 10 milliards d'euros.

La détermination des flux annuels nets de dette et leur interprétation nécessitent d'une part, de définir précisément le périmètre retenu pour la mesure de la dette, d'autre part d'analyser dans le détail la nature des opérations de trésorerie effectuées au cours de l'année. Dans l'ensemble du présent rapport, la dette de l'État est définie comme la somme des agrégats suivants :

- les titres de la dette négociable, hors titres éventuellement émis au profit de la Caisse de la dette publique, remplaçant le Fonds de soutien des rentes depuis le 1er janvier 2003 (qui n'ont pas vocation à être vendus sur le marché et qui ne portent pas intérêt) ;

- plusieurs agrégats de dette non négociable : les engagements divers de l'État ; les bons du Trésor sur formule et les bons du Trésor souscrits par des organismes internationaux ; les emprunts anciens à caractéristiques spéciales ; les dépôts des correspondants ; les concours de la Banque de France au Trésor (éteints depuis 2003) ; la dette résultant de l'émission des monnaies métalliques.

Par ailleurs, pour tenir compte des modalités de gestion de la dette par le Trésor, il est effectué une « consolidation » entre le concours de la Banque de France au Trésor et le compte courant du Trésor à la Banque de France, afin de raisonner en termes de dette nette de la position créditrice du Trésor auprès de la Banque de France. Dans le même esprit, le montant des créances résultant des opérations de placement à court terme (prises en pension de titres publics par le Trésor, placements sur le marché interbancaire ou auprès d'États membres de la zone euro) est défalqué du montant brut de la dette, puisque ces opérations sont « interchangeables » avec un maintien des liquidités correspondantes sur le compte courant du Trésor à la Banque de France. Ainsi, la définition retenue pour la dette tient compte de la trésorerie disponible de l'État mais n'est pas affectée par ses modalités d'utilisation.

Votre Rapporteur spécial rappelle que la dette est comptabilisée en « droits constatés » dans la comptabilité générale de l'État depuis 1999. Le rapport sur L'exécution des lois de finances pour l'année 1999 ainsi que le rapport sur L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, établis par la Cour des comptes à l'appui des projets de loi de règlement définitif des budgets 1999 et 2000, donnent sur cette question des informations très détaillées, auxquelles votre Rapporteur spécial ne peut que renvoyer (2).

Pour sa part, le présent rapport spécial doit analyser la dette de l'État au regard de considérations financières et budgétaires, et non de considérations comptables. C'est pourquoi le tableau sur l'encours de la dette de l'État, présenté en page 30, ainsi que l'ensemble des montants relatifs à la dette font référence à des valeurs nominales et non à des valeurs comptables intégrant les droits constatés.

- -

ANALYSE DES FACTEURS DE VARIATION DE LA DETTE DE L'ÉTAT (a)

(en milliards d'euros)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

Dette (en fin d'année)

540,01

577,82

613,04

653,42

683,36

723,74

773,27

827,30

Déficit (en gestion)

+ 45,89

+ 40,24

+ 33,55

+ 39,85

+ 28,48

+ 39,34

+ 50,24

+ 56,96

A. Opérations relatives à la dette

1. Dette Monnaies métalliques

+ 0,06

+ 0,08

+ 0,06

+ 0,07

+ 0,09

- 0,17

+ 0,08

+ 0,15

2. Charges à étaler

- 2,07

- 1,99

- 1,39

+ 0,57

- 0,30

- 1,56

- 1,12

- 1,23

a. primes et décotes à l'émission

(- 0,18)

(- 0,36)

(- 0,40)

(+ 1,32)

(+ 0,36)

(- 1,16)

(+ 0,02)

(- 1,21)

b. prise en charge d'engagements

(+ 0,08)

(+ 0,02)

-

-

-

-

-

-

c. à déduire : amortissement d'engagements (-)

(- 1,96)

(- 1,65)

(- 0,99)

(- 0,75)

(- 0,65)

(- 0,40)

(- 1,15)

(- 0,02)

3. Part annuelle des décotes et primes (b)

-

-

-

- 0,05

+ 0,05

+ 0,01

- 0,04

- 0,23

4. Supplément résultant d'indexation (b)

-

-

-

+ 0,05

+ 0,03

- 0,05

+ 0,11

+ 0,15

5. Pertes (+) et profits (-)

+ 0,30

+ 0,39

+ 3,29

+ 0,78

+ 1,11

+ 1,62

+ 1,48

+ 0,32

a. amortissements non budgétaires

(+ 1,41)

(+ 1,21)

(+ 0,99)

(+ 0,75)

(+ 0,65)

(+ 0,40)

(+ 1,15)

(+ 0,02)

b. autres pertes et profits

(- 1,11)

(- 0,83)

(+ 2,30) (c)

(+ 0,04)

(+ 0,46)

(+ 1,22)

(+ 0,32)

(+ 0,30)

6. Opérations diverses sur la dette

-

-

-

-

-

-

-

-

Sous-total Opérations relatives à la dette

- 1,70

- 1,53

+ 1,97

+ 1,43

+ 0,99

- 0,16

+ 0,50

- 0,84

B. Opérations relatives à la trésorerie

1. Opérations bancaires

- 1,18

- 0,52

+ 1,03

+ 0,66

- 0,67

+ 2,03

- 1,58

- 3,81

2. Variations de liquidité

- 0,39

+ 0,25

- 1,37

- 0,02

+ 0,19

- 0,10

- 0,23

+ 0,33

Sous-total Opérations relatives à la trésorerie

- 1,56

- 0,27

- 0,34

+ 0,64

- 0,48

+ 1,93

- 1,81

- 3,48

C. Opérations relatives à la gestion courante

1. Tiers débiteurs et créditeurs

+ 0,90

+ 0,30

- 0,85

- 0,06

- 0,07

- 1,41

+ 0,92

+ 0,14

2. Liaisons internes et régularisations

+ 0,37

- 0,93

+ 0,88

- 1,47

+ 1,03

+ 0,67

- 0,30

+ 1,24

Sous-total Opérations relatives à la gestion courante

+ 1,26

- 0,63

+ 0,03

- 1,53

+ 0,95

- 0,74

+ 0,62

+ 1,38

Flux net de dettes (A+B+C)

- 2,00

- 2,43

+ 1,66

+ 0,54

+ 1,46

+ 1,04

- 0,70

- 2,94

Variation totale de la dette sur l'année précédente

+ 43,89

+ 37,81

+ 35,21

+ 40,39

+ 29,94

+ 40,37

+ 49,54

+ 54,03

(a) Dans le tableau, les nombres sont affectés d'un signe (+) lorsqu'ils accroissent la dette, d'un signe (-) lorsqu'ils la font décroître.

(b) Rubriques introduites dans la comptabilité de l'État en 1999.

(c) Dont 2,77 milliards d'euros au titre de l'apurement de l'écart d'intégration des dépôts particuliers aux CCP.

Sources : SROT au 31 décembre, Compte général de l'administration des finances

Le tableau présenté en page 33 décrit, depuis 1996, les facteurs de l'endettement de l'État. Il permet, dans un premier temps, d'isoler l'accroissement de dette résultant du déficit en gestion de l'accroissement résultant d'un flux net de dettes. Leurs contributions respectives peuvent connaître de fortes variations d'une année sur l'autre. Ainsi, entre 1994 et 1995, le déficit en gestion a augmenté très sensiblement, passant de 43,9 milliards d'euros à 52,5 milliards d'euros. Ce phénomène a été plus que compensé par la forte diminution des flux nets de dette, qui sont revenus de + 23,7 milliards d'euros à + 0,8 milliard d'euros.

Les années 1993 et 1994 ont connu d'importantes prises en charge d'engagements à étaler sur plusieurs exercices. Il s'agit des créances de TVA constituées au profit des entreprises à la suite de la suppression du décalage d'un mois de TVA. Les prises en charge se sont poursuivies les années suivantes, les masses concernées étant cependant toujours plus réduites. L'amortissement d'une partie de ces créances, par annuités, se reflète sur la ligne 2.c, à hauteur de moins d'un milliard d'euros en 1996 et au-delà. Le plan de soutien à la croissance, décidé à l'automne 2001 par le Gouvernement précédent, a prévu d'amortir en totalité, en 2002, le stock de créances subsistant dans les comptes de l'État. Il en résulte un rebond des amortissements constatés sur la ligne 2.c.

Les pertes et profits portés sur la ligne 5.b du tableau concernent essentiellement les emprunts et engagements, sauf opération exceptionnelle (reprise de la dette de l'ACOSS en 1994, apurée l'année même ; apurement de l'écart d'intégration des dépôts CCP de l'ex-budget annexe des PTT en 1998).

Le tableau permet de constater que le rythme de traitement des règlements bancaires et la fluctuation des encaisses peuvent avoir une influence non négligeable sur l'encours de dette.

2.- Les objectifs et indicateurs assignés à la gestion de la dette

· En 2003 et 2004, les objectifs assignés au programme « gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » ont été présentés de façon hiérarchisée, dans une perspective bien plus conforme à la logique de la LOLF que la première formulation retenue en 2002. La qualité du dialogue qui s'est établi, à cette occasion, entre l'Agence France Trésor et les commissions des finances des deux assemblées y est sans doute pour beaucoup.

En 2003, la gestion de la dette s'est vue assignée un unique objectif (« minimiser à moyen terme la charge de la dette, dans des conditions de sécurité absolues »), qui était assorti de deux composantes opérationnelles concourant à sa réalisation :

- « une stratégie d'émission primaire en bonne adéquation avec les attentes du marché et qui cherche à anticiper les futurs besoins de celui-ci » ;

- « une gestion active de la dette, articulée autour d'une stratégie de réduction de la durée de vie moyenne ».

L'exercice conduit à l'occasion de la construction du projet de loi de finances pour 2005 a permis à l'AFT d'approfondir une nouvelle fois le travail de réflexion sur la nature des objectifs que doit - et que peut - se fixer le gestionnaire de la dette. Il est apparu que l'objectif formulé en 2003 et 2004 était peut-être trop « littéraire » et, surtout, difficile à mesurer objectivement à l'aide d'indicateurs précis. La structuration du programme en actions a conduit l'AFT à indiquer que :

- la finalité générale de l'action « Gestion de la dette négociable » consiste à minimiser à moyen terme la charge de la dette pour le contribuable, dans des conditions de sécurité absolues ;

- trois objectifs sont fixés au gestionnaire dans le cadre de cette action au sens de la LOLF : 1/ couvrir le programme d'émission en toute sécurité ; 2/ améliorer la pertinence des choix relatifs à la mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire ; 3/ réduire la durée de vie moyenne de la dette après swaps ;

- deux volets sont actionnés pour répondre à la finalité définie ci-avant : 1/ la gestion de la dette obligataire, essentiellement à travers la politique d'émission ; 2/ la gestion du portefeuille de produits dérivés, pour agir sur la durée de vie apparente de la dette sans interférer avec les contraintes propres de la politique d'émission.

Votre Rapporteur spécial adhère sans réserve à la formule retenue pour définir la finalité de l'action « Gestion de la dette », qui repose sur quatre éléments essentiels :

- l'affirmation que le gestionnaire de la dette a pour mission de contribuer à la réduction de la dépense publique, compte tenu de la contrainte fondamentale qui s'impose à lui : le fait qu'il existe une dette de l'État, qui s'accroît en fonction des décisions des autorités politiques et des aléas de la conjoncture économique ;

- la reconnaissance de ce qu'il faut consentir à une certaine variabilité de la charge de la dette, d'une année sur l'autre, et que la performance de la gestion doit être jugée dans la durée ;

- la réaffirmation que la gestion de la dette ne doit pas contrevenir à la mission première et fondamentale du gestionnaire, qui est de permettre à l'État de faire face à ses engagements, à toute heure et en toutes circonstances ;

- le refus de toute intervention spéculative sur les marchés financiers, qui pourrait procurer des économies supplémentaires mais ferait courir à l'État des risques incompatibles avec une bonne gestion des deniers publics.

· Le premier objectif (« couvrir le programme d'émission en toute sécurité ») n'appelle pas de commentaire très développé : c'est le rôle essentiel des Trésors nationaux que d'assurer, tout au long de l'année, la couverture du besoin de financement, avec une marge de sécurité suffisante. Au plan purement technique, il s'agit surtout d'un préalable à partir duquel pourront se développer les autres dimensions de la gestion de la dette, axées sur la maîtrise à moyen terme de la charge d'intérêt.

Deux indicateurs sont associés à cet objectif. Le premier dénombre les adjudications de titres éventuellement non couvertes, avec pour objectif zéro. Comme l'indique l'AFT dans l'avant projet de PAP, « même si l'expérience rencontrée par quelques autres États européens, en 2003 notamment, montre que la survenance d'adjudications non couvertes peut n'avoir aucune conséquence sur la pleine réalisation d'un programme annuel et sur la réputation de l'émetteur, il n'en reste pas moins que l'objectif d'un Trésor est bien de couvrir chacune de ses adjudications ». Cette cible est respectée depuis les débuts de la politique de modernisation des émissions du Trésor, dans le milieu des années 1980.

Le second indicateur est le taux de couverture moyen des adjudications, rapport entre les montants proposés à l'achat par les investisseurs et les montants proposés à la vente par l'AFT. Un taux de couverture élevé traduit une forte appétence des investisseurs pour les titres de la République française. Dès lors que l'adjudication est « couverte », le taux de couverture est au moins égal à 100%. En 2003, il s'est élevé à 241% pour les OAT et BTAN et à 359% pour les BTF. Comme l'indique l'AFT dans l'avant projet de PAP, « les seuils fixés pour les taux de couverture des adjudications correspondent à ceux au-dessus desquels une adjudication est considérée par le marché, en l'état actuel, comme bien couverte. Le comportement de soumission aux adjudications dépend du contexte, notamment de l'appétit des investisseurs finaux et de la concurrence entre intermédiaires ; aussi ces seuils peuvent-ils évoluer avec le temps. Par défaut, l'Agence France Trésor a fixé comme objectif de long terme les niveaux qualifiés de bons par le marché actuel », c'est-à-dire 150% pour les OAT et BTAN et 200% pour les BTF.

On notera que l'indicateur est calculé en moyenne sur l'ensemble de l'année. Il est donc susceptible de masquer l'existence d'une adjudication mal couverte, phénomène qui pourrait être significatif d'une erreur d'appréciation de l'AFT dans la définition des titres proposés à la vente. De ce fait, l'analyse des résultats obtenus ne devra pas se limiter à la valeur « brute » de l'indicateur, mais préciser si une ou plusieurs adjudications s'en sont écartées sensiblement. Votre Rapporteur spécial travaillera dans le courant de l'année sur la nature et le degré de précision des informations qui, intégrées dans le PAP ou préparées en réponse au questionnaire budgétaire, éclaireront les résultats effectifs de l'année écoulée.

· La stratégie de réduction de la durée de vie de la dette nécessite des développements plus nourris. Décidée et formulée à l'occasion de la loi de finances initiale pour 2002, elle constitue en effet une rupture fondamentale avec la stratégie développée sans relâche depuis le début de la modernisation de la dette, au milieu des années 1980. Les efforts du Trésor consistaient alors à allonger la durée de vie de la dette afin de mettre l'État le plus possible à l'abri des mouvements de taux qui affectaient parfois violemment les échéances courtes.

Depuis la loi de finances initiale pour 2002, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a fixé comme objectif à la politique de la dette de réduire la durée de vie moyenne de la dette négociable. Cette décision se fonde sur des considérations classiques en matière de configuration de la courbe des taux d'intérêt.

Les taux auxquels il est possible de s'endetter sur des maturités courtes (1 mois, 3 mois, 1 an, 2 ans) sont, en moyenne, inférieurs aux taux qu'il faut payer en s'endettant à plus long terme. L'explication théorique de ce constat « historique » est simple : un emprunt est d'autant plus risqué qu'il a une maturité élevée. Deux risques peuvent être évoqués à titre principal : en premier lieu, les taux d'intérêt instantanés du marché peuvent, au fil du temps, s'écarter fortement et durablement du taux d'intérêt auquel a été conclu l'emprunt ; en second lieu, le risque de défaillance du débiteur augmente avec l'horizon temporel. Il en résulte que le taux applicable aux opérations de longue maturité doit intégrer une « prime de risque », d'autant plus élevée que la maturité est longue.

Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, depuis 1994 (ce qui exclut les périodes de crise monétaire pendant lesquelles les taux courts français ont été particulièrement élevés pour défendre le franc), les taux longs ont été supérieurs aux taux courts dans 95% des cas, l'écart moyen entre les taux à 3 mois et les taux à 10 ans s'établissant à 160 points de base. Cette situation n'est pas spécifique à la France : ces écarts sont d'environ 120 points de base et 200 points de base aux États-Unis et en Allemagne respectivement.

COURBE DES TAUX « ZÉRO COUPON »

(abscisse = années)

graphique

Source : Banque de France

La courbe des taux peut se trouver déformée dans sa partie très courte (inférieure à un an), comme le montre le graphique ci-dessus. Par ailleurs, la courbe des taux peut être « aplatie », comme c'est souvent le cas au Royaume uni, où l'écart entre le taux à 3 mois et le taux à 10 ans peut être inférieur à 80 points de base. Elle peut même être inversée sur sa partie longue, comme au Royaume-Uni, où le taux à 30 ans est actuellement inférieur au taux à 10 ans.

Néanmoins, on peut tirer parti de la configuration « standard » des taux d'intérêt pour réduire le coût de la dette en réduisant sa durée de vie moyenne.

Une telle démarche n'a pas que des conséquences positives. Elle entraîne une augmentation de la variabilité du coût de la dette, c'est-à-dire du risque que ce coût évolue brutalement à la hausse ou à la baisse d'un exercice à l'autre, en fonction de l'évolution des taux sur la partie courte de la courbe.

Considérons, par exemple, deux stocks de dette équivalents mais différant par leur durée de vie moyenne : 6 ans pour l'un, 4 ans pour l'autre. Dans la première configuration, un sixième du stock de dette doit être renouvelé chaque année, dans la seconde un quart, les émissions nouvelles se faisant au taux du marché. Le stock de dette intègre d'autant plus rapidement les fluctuations annuelles des taux d'intérêt que la proportion qui est renouvelée chaque année est importante. Il en découle que la charge de la dette est plus variable, car l'expérience montre que les taux d'intérêt à long terme sont plus stables dans le temps que les taux d'intérêt à court terme.

On voit que la réduction de la durée de vie moyenne de la dette doit tenir compte d'un arbitrage indispensable entre, d'une part, la diminution moyenne de sa charge qui en est espérée et, d'autre part, l'augmentation de la variabilité de cette charge que le débiteur est prêt à assumer.

A cet égard, votre Rapporteur spécial regrette que, contrairement à l'année 2002, le programme 2005 ne présente pas d'évaluation chiffrée portant sur les effets théoriques d'une modification de la durée de vie moyenne de la dette sur le couple risque-coût. Le fascicule des Charges communes pour 2002 incluait un graphique montrant le résultat de modélisations effectuées par l'Agence France Trésor et illustrant, sous une forme très concrète, les « lieux » du compromis nécessaire entre réduction de la durée de vie et augmentation de la variabilité de la charge de la dette. On doit considérer que la capacité d'appréciation du Parlement sur la pertinence de la stratégie proposée s'en trouve amoindrie.

· L'objectif qui consiste à « améliorer la pertinence des choix relatifs à la mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire » traduit l'arrivée à maturité des réflexions engagées dès 2003 par l'AFT en vue de définir de véritables indicateurs permettant d'apprécier sur une base objective, sinon de mesurer, la performance de la gestion de la dette.

Le montant global du programme de financement et les dates d'adjudication qui sont annoncées en décembre pour l'ensemble de l'année à venir, sont des paramètres exogènes à l'AFT. Par contre, l'Agence dispose de marges de manœuvre pour ce qui concerne le « timing » du volume à émettre au fil de l'année et le choix des maturités finalement émises un jour d'adjudication donné. Pour mesurer a posteriori la qualité des choix effectués par l'Agence, il est nécessaire de disposer de deux indicateurs construits chacun pour refléter spécifiquement les résultats associés à l'un de ces degrés de liberté. Dans ces simulations, tous les produits financiers utilisés par l'AFT sont pris en compte, non seulement les obligations classiques à moyen et long terme, mais aussi les produits plus innovants que sont les obligations indexées et les swaps de taux. Toutefois, les BTF, qui sont émis de façon quasi-linéaire (chaque semaine) et pour des volumes très réguliers, seront exclus, au moins dans un premier temps, de l'analyse. Il s'agit donc de mesurer la pertinence des choix de l'émetteur au regard de la stratégie de financement mise en œuvre au cours de l'année :

- soit par rapport à une stratégie « aveugle », c'est-à-dire conduisant à réaliser le programme d'emprunt de l'année de façon linéaire, indépendamment de toute prise en compte des informations de marché ;

- soit par rapport à une stratégie normative qui aurait été définie en début d'année et qui aurait été appliquée sans dévier.

Votre Rapporteur spécial apprécie l'effort d'explication qu'a consenti l'Agence France Trésor à l'occasion du présent projet. Ces explications sont nécessaires pour prendre la mesure des performances que l'on est en droit d'attendre de la part du gestionnaire.

LES LIMITES DES INDICATEURS « TEMPS » ET « ALLOCATION »

La marge de manœuvre de l'Agence est en pratique faible, en raison des volumes d'émission qu'elle doit réaliser et de la nécessité correspondante d'une action qui soit lisible pour le marché et ne le prenne pas par surprise. Ceci veut dire en fait qu'il ne lui faut pas viser des fluctuations fortes par rapport au résultat des automates. Par ailleurs, comme le marché réagit aux variations de l'offre et de la demande et les anticipe, une obligation faisant l'objet d'une émission voit son taux monter dès l'annonce de l'adjudication. En conséquence, une gestion qui serait effectivement passive (soit linéaire, soit conforme à un schéma fixé pour l'année) enregistrerait nécessairement une sous-performance par rapport à l'automate qu'elle entendrait respecter strictement. Symétriquement, tout lancement d'une nouvelle ligne est pénalisant par rapport aux automates. L'interprétation des objectifs et des résultats doit donc tenir compte de ces contraintes.

Source : Agence France Trésor, octobre 2004.

En 2003, l'AFT a obtenu un résultat proche de l'automate pour l'indicateur « temps », en faisant mieux que lui à hauteur de 4 points de base. « Cette sur-performance vient principalement de la date d'émission du nouveau BTAN 5 ans de maturité 12 juillet 2008, émis en juin 2003 au moment où le taux à 5 ans était au plus bas ». Pour l'indicateur « allocation », le résultat accorde un point de base au bénéfice de l'AFT. En effet, il n'y a pas eu d'écart notable par rapport au calendrier et à la répartition des lignes prévues en décembre 2002. Pour l'année 2005 comme pour les années suivantes, l'AFT vise des fluctuations par rapport aux automates qui restent dans des marges étroites, « compte tenu de la nécessité d'une action qui soit lisible par le marché et ne le prenne pas par surprise ». De ce fait, la marge cible est fixée par l'AFT à +/- 10 points de base.

Il convient de noter que, du fait que le programme d'émission est conçu comme un « tout » pour l'année entière, il n'est pas possible d'évaluer en cours d'année la performance du gestionnaire par l'intermédiaire des indicateurs.

En complément des deux indicateurs sus-mentionnés, l'AFT a accédé au vœu de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, exprimé par votre Rapporteur spécial et par son prédécesseur sous la précédente législature, qui souhaitaient que l'analyse de la performance ne laisse pas de côté la position relative de la France en matière de taux d'intérêt vis-à-vis de ses partenaires. Le taux d'intérêt est une « mesure » synthétique du coût de la dette et peut, de ce fait, refléter en partie la qualité de sa gestion et des choix qui ont été retenus en matière d'émission.

Il est vrai qu'estimer l'efficacité de la politique de gestion de la dette au regard de la finalité première que s'assigne le gestionnaire - minimiser la charge d'intérêt à moyen terme - paraît assez malaisé : la charge de la dette ou sa volatilité ne sont pas de bons indices pour apprécier une qualité de gestion, car ils dépendent également de comportements généraux de marché qui restent hors de contrôle du gestionnaire. Pour sa part, la liquidité de la dette est un concept multiforme (3) qui se laisse difficilement inscrire dans une démarche normative. En effet, l'évolution de la charge de la dette d'une année sur l'autre dépend, au premier chef, de l'effet taux et de l'effet volume :

- l'effet taux résulte du refinancement, au taux actuel du marché, des titres arrivés à échéance qui portent un taux différent ;

- l'effet volume traduit l'augmentation de la charge de la dette qui résulte de l'accroissement de son volume, notamment du fait du déficit budgétaire.

Ces deux phénomènes échappent largement au gestionnaire de la dette, puisque le niveau des taux d'intérêt comme leur volatilité sont en grande partie exogènes à ses décisions - surtout depuis l'avènement de la zone euro, qui a supprimé les barrières de change entre les États membres et facilité la constitution progressive d'un marché des capitaux unifié.

L'Agence France Trésor a introduit dans le programme 2003 un indicateur synthétique des écarts de taux entre la France et les autres États membres de la zone euro. Il vise à permettre une comparaison externe du coût de financement de l'État français et, par là même, une évaluation du crédit de la signature de l'État vis-à-vis des autres émetteurs.

L'écart de taux vis-à-vis de l'Allemagne, mesuré par la différence entre le taux de l'obligation de référence française et allemande de maturité 10 ans, jouait ce rôle depuis la fin des années 1980 pour la plupart des observateurs. Pour la France comme pour la plupart des autres pays, la « convergence européenne » a eu pour effet de réduire drastiquement cet écart de taux qui, au très faible niveau actuel (moins de 10 points de base), est déterminé principalement par de pures données techniques comme l'écart entre les dates d'échéances ou le calendrier d'ouverture de nouvelles lignes.

Si la maturité 10 ans constitue une référence historique, les principaux émetteurs souverains ont aujourd'hui plusieurs maturités de référence sur lesquelles ils assurent la liquidité en réalisant des émissions régulières. C'est pourquoi l'Agence France Trésor s'est proposée de construire un indicateur permettant, d'une part, de comparer les titres de la dette française à tous ceux des émetteurs souverains de la zone euro et, d'autre part, de mener cette comparaison sur l'ensemble de la courbe des taux.

L'INDICATEUR SYNTHÉTIQUE DE QUALITÉ DE SIGNATURE

(niveau 0% : moyenne de la zone euro)

graphique
graphique

Source : fascicule des Charges communes (PLF 2005).

Le graphique ci-dessus retrace l'évolution, depuis un peu plus d'un an, de cet indicateur pour la dette française et pour celle de quelques autres pays européens. Il montre, en particulier, que la situation relative de la France par rapport à l'Allemagne s'est améliorée sur la période mais que la situation des deux pays se dégrade par rapport aux conditions moyennes des États de la zone euro.

Là encore, l'AFT a tenu à souligner les limites de l'indicateur présenté au Parlement : « l'évolution de cet indicateur n'est que très secondairement guidée par la qualité de la gestion de la dette par l'Agence France Trésor. Les spreads sont en effet un reflet de l'appréciation de la signature de la République par les marchés, laquelle dépend avant tout de l'évolution des finances publiques et de l'économie nationale. Il s'agit donc fondamentalement d'un indicateur de résultat de toute la nation. C'est pourquoi il est illusoire d'assigner à l'Agence un objectif pour les années qui viennent dans le cadre de ce programme. On peut en revanche assigner à la France un objectif collectif de conserver des conditions parmi les meilleures de la zone euro ».

3.- Les objectifs et les indicateurs assignés à la gestion de la trésorerie

· Le débat parlementaire s'est intéressé, traditionnellement, aux évolutions de la dette. Cependant, la transformation des modalités d'émission de titres publics, engagée en 1985, a conduit à imbriquer de plus en plus étroitement les problématiques respectives de la trésorerie et de la dette.

Il est vrai que l'endettement de l'État a pour objectif de garantir que sa trésorerie reste toujours suffisante pour lui permettre de respecter ses engagements financiers. L'acte principal paraît donc être l'endettement, la gestion de la trésorerie n'étant que secondaire.

Or, la trésorerie de l'État enregistre chaque jour des mouvements très importants (25,7 milliards d'euros en 2003), effectués pour le compte de l'État lui-même (opérations budgétaires et opérations de trésorerie) ou pour le compte de ses correspondants, qui ont déposé leurs fonds auprès du Trésor.

RÉPARTITION MOYENNE DES FLUX DE TRÉSORERIE EN 2003

(flux moyen journalier = 25,7 Md€)

graphique
graphique

Source : Agence France Trésor

Par ailleurs, la politique d'assimilation des titres d'État concentre sur un nombre restreint de jours, dans l'année, les remboursements de titres échus et le versement des intérêts.

Ainsi, la date du 25 avril 2005 verra l'État payer 13,1 milliards d'euros au titre des intérêts versés sur 16 lignes d'OAT dont les échéances s'étalent de 2005 à 2035, ainsi que le remboursement d'une ligne d'OAT venant à échéance, pour 17,7 milliards d'euros. Par ailleurs, 13,1 milliards d'euros ont été payés le 25 octobre 2004 au titre des intérêts sur 15 autres lignes d'OAT. Le mois de juillet 2005 verra le paiement de 3,5 milliards d'euros d'intérêts sur les cinq lignes de BTAN correspondantes, auxquels s'ajouteront 20,6 milliards d'euros pour le remboursement d'une ligne arrivant à échéance.

FLUX DE CAPITAL ET D'INTÉRÊT D'OCTOBRE 2004 À SEPTEMBRE 2005
(sur la base de l'encours au 30 septembre 2004)

(en milliards d'euros)

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Source : Agence France Trésor, Bulletin mensuel, octobre 2004.

Il en résulte de fortes contraintes sur la trésorerie de l'État, qui imposent, par exemple, de recourir à un volume croissant de BTF afin de « préfinancer » de façon progressive l'arrivée à échéance de lignes dont les volumes sont plus importants au fil des années.

La modernisation de la gestion de la dette, engagée il y a plus de quinze ans, a donc des répercussions sur la gestion de la trésorerie, qui aggravent les tensions « naturelles » dues aux décalages quotidiens entre encaissement des recettes et paiement des dépenses budgétaires classiques.

· Le solde du compte du Trésor ouvert dans les livres de la Banque de France doit toujours rester créditeur. La France a rompu depuis de nombreuses années avec la pratique dangereuse du « financement monétaire » du Trésor. D'ailleurs, le traité de Maastricht interdit aux banques centrales d'accorder des concours financiers aux États membres.

Les sommes inscrites sur le compte étant rémunérées à un taux inférieur au taux de l'argent au jour le jour (taux interbancaire de la zone euro), il est légitime de fixer au gestionnaire de la dette et de la trésorerie les deux objectifs suivants :

- limiter au minimum l'encours créditeur du compte du Trésor auprès de la Banque de France ;

- placer les excédents ponctuels de trésorerie de façon à obtenir la meilleure rémunération possible.

Les indicateurs retenus pour juger de la performance de la gestion sont aisés à identifier. Il s'agit, pour le premier objectif, du solde du compte du Trésor en fin de journée et, pour le second objectif, du taux de rémunération moyen applicable à la trésorerie placée sur le marché.

¬ S'agissant du premier objectif et de l'indicateur qui lui est associé, votre Rapporteur spécial rappelle qu'une nouvelle convention de tenue du compte de l'État à la Banque de France est entrée en vigueur le 1er mai 2002 après un travail de réécriture très précis qui a nécessité plus d'un an. Actualisant et complétant la dernière convention de ce type, qui datait de 1994, elle précise tous les instruments mobilisés par la Banque de France pour permettre à son client, l'État, de suivre en temps réel l'imputation sur son compte des 25 Md€ d'opérations quotidiennes en recettes, dépenses ou opérations de marché. Des règles de sécurité nouvelles ont été mises en place qui assurent à l'État de ne pas voir son solde se dégrader après 16 heures 15 en raison d'une imputation tardive de certaines opérations de dépenses urgentes. Cela permet à l'Agence France Trésor de diminuer son encaisse de précaution plus rapidement en cours de journée, dans des conditions de marché satisfaisantes (c'est-à-dire dans la plupart des cas avant 17 heures, heure à laquelle la plupart des contreparties éligibles (SVT) offrent encore des taux de placement attractifs).

Il apparaît que plusieurs facteurs peuvent expliquer que le Trésor laisse en fin de journée un solde créditeur plus important que l'objectif annuel retenu :

- d'une part, il arrive que les taux de marché soient inférieurs, en fin de journée, au taux offert par la Banque de France. C'est notamment le cas les jours marquant la fin de la période de constitution des réserves obligatoires des établissements de crédit auprès du système européen de banques centrales. Dans ces conditions, l'acte de bonne gestion consiste à laisser les fonds disponibles sur le compte à la Banque de France, mieux rémunéré ;

- d'autre part, les jours de règlement des paies et des pensions dans les départements d'outre-mer oblige à laisser un solde créditeur compris entre 250 et 300 millions d'euros, car l'interdiction de découvert vaut pour l'ensemble consolidé compte du Trésor - compte de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM). Or, du fait du décalage horaire, le paiement des paies et des pensions a lieu après la fermeture des marchés à Paris, à un moment où l'AFT n'a plus la possibilité de corriger une évaluation prévisionnelle qui se révèlerait erronée. Le compte du Trésor doit donc être approvisionné de façon à conserver une marge de sécurité et à assurer le bon fonctionnement de l'IEDOM.

Comme l'indique l'Agence France Trésor dans le fascicule des Charges communes, « l'objectif de limitation du montant du compte de la Banque de France est naturellement poursuivi pour autant qu'il n'entre pas en contradiction avec l'intérêt financier de l'État et qu'il ne conduise pas à prendre des risques opérationnels accrus ».

En conséquence, l'Agence propose de reconduire l'objectif d'un solde moyen limité à 100 millions d'euros en fin de journée, s'entendant du solde de l'État hors jours de « faibles taux » en fin de journée et hors jours de paies et pensions dans les départements d'outre-mer. Une telle proposition recueille l'assentiment de votre Rapporteur spécial.

Le solde moyen en fin de journée était égal à 500 millions d'euros en 2001, 455 millions d'euros en 2002 et 113 millions d'euros en 2003. Les progrès sont donc très sensibles, mais la comparaison entre 2003 et les années précédentes est biaisée par le fait que la définition de l'indicateur a été ajustée pour exclure les journées de « faibles taux » et les journées de « gros flux » avec l'outre-mer.

Pour avoir une idée de l'ordre de grandeur de la correction ainsi effectuée, votre Rapporteur spécial rappelle que, selon les données présentées dans le fascicule des Charges communes au titre des mois écoulés de 2003, le solde moyen hors « jours exceptionnels » s'établissait à 128 millions d'euros, au lieu de 179 millions d'euros pour le solde « tous jours ouvrables ».

¬ Depuis la loi de finances initiale pour 2003, le second objectif est analysé à travers deux indicateurs : le taux de rémunération moyen des dépôts sur le marché interbancaire et le taux de rémunération moyen des opérations de pension livrée effectuées par le Trésor. Le niveau de ces taux doit être comparé à une référence incontestable pour juger de la qualité de gestionnaire de l'État.

Le placement des excédents ponctuels de trésorerie, qui font l'objet d'opérations de dépôt sur le marché interbancaire et d'opérations de pension livrée auprès de contreparties sûres (les SVT et certains États européens) vise à obtenir le meilleur taux de rémunération. Un bon critère de référence est le taux de l'EONIA (European Overnight Interbank Average). Ce taux, calculé tous les soirs par la Fédération bancaire européenne, représente le taux moyen auquel un panel d'établissements bancaires de la zone euro a prêté sur le marché interbancaire pendant la journée écoulée. Les services de trésorerie des grands établissements financiers et des grandes entreprises le retiennent comme critère de rémunération de leurs placements au jour le jour.

Le programme « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » de 2004 assignait comme objectif chiffré à l'AFT d'obtenir une rémunération égale à l'EONIA pour ses placements interbancaires. L'AFT a atteint cette rémunération depuis le début de l'année. Ce résultat est notamment lié à des actions ciblées de l'AFT qui ont permis de stimuler la concurrence entre SVT, tant sur le marché de la pension livrée que sur le marché interbancaire. Par ailleurs, la nouvelle convention de compte avec la Banque de France a permis d'améliorer les conditions de gestion de la trésorerie et de gagner environ 2 points de base sur les placements effectués sur le marché interbancaire.

L'objectif fixé pour 2005 consiste à confirmer la moyenne des placements interbancaires à EONIA, ce qui représente une amélioration de près de 3 points de base par rapport aux résultats obtenus en 2000.

Pour la rémunération des opérations de pension, l'Agence France Trésor propose de retenir, en 2005 comme en 2004, l'objectif d'EONIA - 2 points de base. Le décalage avec les opérations de dépôt sur le marché interbancaire s'explique par le fait que les opérations de pension livrée sont par construction généralement effectuées à un taux inférieur à l'EONIA. Cela est lié à l'existence d'un collatéral en papier d'État qui annule, pour l'État, le risque lié à la défaillance de la contrepartie pendant la durée de l'opération.

Votre Rapporteur spécial rappelle que les opérations de pensions, qui reposent sur l'échange d'un titre d'État, contribuent à animer le marché secondaire de la dette, ce qui doit renforcer son attractivité auprès des investisseurs et peut avoir pour conséquence (« mais non directement quantifiable ») d'en diminuer le coût à l'émission.

¬ La bonne gestion de la trésorerie de l'État suppose que le gestionnaire dispose d'une grande visibilité sur les évolutions qui sont susceptibles d'affecter le niveau du compte du Trésor dans le courant de la journée ou dans la journée suivante. C'est à cette condition seulement qu'il lui est possible d'évaluer le niveau prévisible de la trésorerie disponible et de décider des interventions qu'il convient de réaliser pour placer cette trésorerie et obtenir la meilleure rémunération possible.

L'AFT a donc décidé d'ajouter aux deux objectifs désormais classiques assignés à la gestion de trésorerie un nouvel objectif, relatif à la qualité de l'information préalable fournie par les correspondants du Trésor sur leurs opérations financières affectant le compte de l'État auprès de la Banque de France.

A première vue, ce nouvel objectif est quelque peu paradoxal : il fait intervenir, non pas seulement le comportement de l'Agence France Trésor, mais aussi celui des correspondants, qui peuvent être plus ou moins diligents dans l'annonce de leurs opérations financières. Dans un premier temps, l'AFT a décidé de limiter le champ de cet objectif aux seules collectivités locales, compte tenu, notamment, de l'obligation d'annoncer la veille de leur réalisation les mouvements supérieurs à un million d'euros, qui a été instaurée par l'article 117 de la loi de finances initiale pour 2004.

L'indicateur associé à cet objectif est le taux d'annonce par les collectivités territoriales de leurs opérations financières supérieures à un million d'euros et affectant le compte du Trésor. Ce taux était égal à 91% en 2003 et l'objectif fixé pour 2004 est 95%. Le taux réalisé au 1er juillet 2004 est en deçà de la cible, puisqu'il n'atteint que 89%. L'AFT se fixe une cible ambitieuse pour 2005, avec un taux d'annonce qui devrait atteindre 100%.

Même en tenant compte de sa limitation au seules collectivités territoriales, la pertinence d'un objectif et d'un indicateur qui échappent très largement à la décision du gestionnaire ne peut manquer d'être évoquée. L'AFT la justifie de la façon suivante : « les résultats obtenus dépendent des collectivités locales, qui ne sont pas tenues par le programme. Cependant l'action des services de l'État joue aussi un rôle considérable et c'est pour cela que le niveau effectif du taux d'annonce préalable peut constituer un indicateur de résultat. En effet, les comptes des collectivités locales sont tenus par le réseau de la Direction générale de la comptabilité publique, l'information sur les annonces est transmise par les comptables du réseau et non par les services des collectivités locales, la supervision de la qualité de cette transmission est exercée conjointement par les services centraux de la Direction générale de la comptabilité publique et par l'Agence France Trésor. Concrètement, le mécanisme des annonces préalables a donné lieu en 2004 à l'organisation de journées d'études animées par la Direction générale de la comptabilité publique et l'Agence France Trésor dans les trésoreries générales de région : l'efficacité et la fluidité du dispositif administratif de l'État sont donc bien un facteur du succès du système d'annonce, aussi bien que la coopération des collectivités locales ».

Votre Rapporteur spécial ne peut s'empêcher de penser que, nonobstant les actions de mobilisation conduites sous l'égide de la DGCP et de l'AFT auprès du réseau des comptables, l'intégration du taux d'annonce des opérations financières des collectivités territoriales au sein des objectifs assignés à la gestion de la trésorerie de l'État traduit également la volonté de « mettre sous pression » les collectivités et de porter sur la place publique les conséquences de leur comportement - vertueux ou négligent.

4.- La maîtrise des risques : un objectif transverse

· Une présence accrue sur le marché financier et la mise en œuvre d'instruments toujours plus sophistiqués exposent l'État à des risques similaires à ceux rencontrés par les établissements financiers.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a défini un ensemble de mesures destinées à maîtriser les risques précités. Le cadre de contrôle mis en œuvre s'inspire des recommandations de la Commission de réglementation bancaire et financière (CRBF 97-02), tout en les adaptant aux spécificités de l'action de l'État. Il est apparu essentiel de respecter les règles suivantes :

- instaurer un contrôle permanent (au sein de chaque unité opérationnelle) et périodique de l'efficacité des premiers contrôles réalisés ;

- garantir l'indépendance des fonctions (par exemple entre l'initiation, la validation et le contrôle des risques associés aux opérations) ;

- définir des limites internes ;

- assurer le respect de la « piste d'audit » (c'est-à-dire la reconstitution de l'ordre logique des opérations et des flux associés).

L'ÉTAT FACE AU RISQUE FINANCIER

_ Les risques de marché : le risque structurel est le risque de taux d'intérêt encouru en cas de variation des taux affectant l'ensemble des opérations de bilan et de hors bilan.

_ Le risque de contrepartie : ce risque est celui de la défaillance d'une contrepartie. Toute défection d'une contrepartie, quelle que soit la nature de l'opération (souscription à l'émission, pensions, swaps...), obligerait à renégocier aux conditions de marché du moment une nouvelle opération. Ces conditions de marché pouvant être moins favorables, la défaillance, même momentanée, est susceptible d'engendrer un surcoût.

_ Le risque de règlement : ce risque survient en cas de non versement par une contrepartie donnée des sommes dues à la suite d'une erreur matérielle ou d'un défaut des circuits de paiement. Certains systèmes de place sont sécurisés, tels ceux d'Euroclear, mais les circuits de dénouement d'autres opérations (swaps...), notamment de gré à gré, n'offrent pas la même sécurité.

_ Les risques opérationnels et informatiques : il s'agit des risques qui ne sont ni de crédit ni de marché. A titre d'exemple, on peut citer les risques de traitement des opérations résultant d'une absence de procédure formalisée ou d'une insuffisance de formation du personnel, les risques de pertes d'information (p.ex. : date et montant exact à payer sur une ligne) suite à une défaillance du système d'information et les risques de litiges suite à une mauvaise rédaction d'un contrat financier.

_ Le risque d'écart prévision / réalisation : la gestion du compte pivot du Trésor impose une information en amont par les différentes directions du ministère, les collectivités locales et les autres correspondants du Trésor des flux qui viendront impacter le compte les jours suivants. Tout défaut dans cette procédure d'annonce préalable par les correspondants de la trésorerie induit des écarts prévision / réalisation qui peuvent nuire à la gestion optimale de la trésorerie.

Source : Agence France Trésor

Conformément à ces principes et à l'article 5 de l'arrêté du 8 février 2001, l'Agence France Trésor s'est dotée d'un cahier des procédures et d'une charte de déontologie, publiés dans un arrêté du 18 septembre 2001 :

- le cahier des procédures définit le cadre général dans lequel opère l'Agence, détaille les normes de gestion, d'organisation et de contrôle auxquelles elle devra se conformer. Il complète les règles existantes pour les opérations de dette et de placement par un cadre détaillé pour les opérations de swaps ;

- la charte de déontologie s'inspire des textes existants dans le secteur financier. Elle précise l'ensemble des règles auxquelles doit se plier toute personne travaillant pour le compte ou dans le cadre de l'Agence France Trésor.

· Comme l'indique l'AFT, le contrôle des risques constitue un objectif transversal qui concerne aussi bien la gestion de la dette négociable que la gestion de la trésorerie. Pour une large part, les deux domaines sont d'ailleurs fortement entremêlés. La bonne qualité du contrôle des risques, en vue de minimiser la survenance d'incidents, sera évaluée à travers deux indicateurs, eux-mêmes décomposés en sous-indicateurs.

¬ Le premier indicateur vise à apprécier la qualité du système de contrôle mis en place par l'Agence France Trésor. Il repose sur deux sous-indicateurs :

- l'évaluation du nombre d'incidents ou d'infractions au cahier interne des procédures. Ceci permet de mesurer la qualité de l'organisation de l'AFT et le respect interne de ses contraintes ;

- la notation externe du contrôle interne. Il s'agit de bâtir un indicateur reposant cette fois sur un regard extérieur et professionnel : celui des auditeurs externes réalisant annuellement un audit des opérations de l'Agence. En effet, l'un des volets de leur mission consiste à vérifier l'adéquation des procédures de l'Agence à ses activités et aux risques associés en prenant comme texte de référence le règlement CRBF 97-02. Cette évaluation de l'adéquation du dispositif existant aux dispositions réglementaires en vigueur dans les établissements financiers porte sur les domaines suivants : 1/ système de contrôle des opérations et des procédures internes ; 2/ organisation comptable et traitement de l'information ; 3/ système de mesure des risques et des résultats ; 4/ système de surveillance et de maîtrise des risques ; 5/ système de documentation et d'information. L'évaluation sera transcrite par une note allant de 1 à 4 (donnée spontanément par l'auditeur externe pour 2003 et qui sera expressément demandée dans les appels d'offres pour les audits externes réalisés à partir de 2005).

¬ Le deuxième indicateur vise à apprécier la gravité des incidents d'exécution qui peuvent survenir à l'occasion des opérations de gestion de la dette et de la trésorerie.

Sur 10.500 opérations réalisées environ chaque année (soit, chaque jour, 40 à 50 opérations), il peut arriver que certaines ne se déroulent pas comme prévu. C'est par exemple le cas lorsqu'une contrepartie d'une opération de pension n'est pas en mesure de livrer en fin de journée les titres qui devaient constituer une garantie en cas de défaillance. Il peut également arriver que des sommes dues par une banque ne soient pas réglées à bonne date. Ces différents types d'incidents font peser des risques de gravité inégale au regard de la mission de l'Agence France Trésor et sont donc classés en trois catégories différentes :

- premier sous-indicateur : le nombre des incidents qui dégradent le niveau du compte à la Banque de France. C'est le cas typique - heureusement très rare - d'une contrepartie qui n'honorerait pas en temps et heure ses engagements financiers ;

- deuxième sous-indicateur : le nombre des incidents qui ne dégradent pas ou même qui peuvent améliorer le solde à la Banque de France. Ces incidents ne présentent pas un degré de gravité aussi élevé que les précédents mais reflètent néanmoins un disfonctionnement (c'est le cas mentionné ci-dessus de non-livraison de titres pour une opération de pension livrée). L'Agence France Trésor se retrouve en fin de journée avec un solde supérieur à ce qu'elle avait anticipé, et ne peut pas toujours replacer les fonds pour les faire fructifier, ou le fait à des conditions financières moins bonnes ;

- troisième sous-indicateur : le nombre des incidents liés aux systèmes pris au sens large. Il peut s'agir de panne ou de mauvais fonctionnement des systèmes internes d'information de l'AFT, de problèmes liés aux systèmes de place (par exemple ceux gérés par Euroclear) ou d'un mauvais fonctionnement de l'informatique de la Banque de France.

· S'agissant de la qualité du système de contrôle, évaluée dans le cadre du premier indicateur, l'AFT rappelle que le cahier interne des procédures a été finalisé en 2004 et que le sous-indicateur correspondant est donc inopérant pour 2003. Les résultats relevant du deuxième sous-indicateur sont présentés en ces termes : « les commentaires des auditeurs externes en 2003 sur le contrôle interne ont été les suivants : 1/ à environnement constant, malgré le caractère très largement manuel des contrôles, les procédures permettent de sécuriser le traitement des opérations et de l'information financière ; 2/ les modifications d'organisation consécutives à la mise en place du nouveau système d'information devraient permettre de réfléchir au positionnement de la fonction de contrôle ; 3/ un reporting consolidé de l'activité, des résultats et des risques devrait être élaboré ; 4/ le cahier de procédures doit être révisé et complété ».

S'agissant des incidents opérationnels, l'AFT a subi, en 2003, trois incidents qui ont dégradé le solde du compte de l'État à la Banque de France, 28 incidents qui n'ont pas dégradé, voire ont amélioré, ce même solde et 6 incidents liés aux systèmes. L'essentiel des incidents constatés en 2003 (28 sur 37) concerne la non-livraison de titres sur opérations de pensions livrées. Ils n'ont pas eu d'impact sur la rémunération du compte et l'ont même améliorée dans la moitié des cas. Les incidents ayant dégradé le compte sont dus au non-versement à bonne date de sommes dues par les contreparties, sans incidence significative sur le niveau du compte. Les incidents systèmes proviennent essentiellement de problèmes téléphoniques.

Les perspectives pour 2005 et les cibles affichées par l'AFT pour les indicateurs et les sous-indicateurs associés reposent sur trois considérations :

- les règles de fonctionnement interne ayant été précisées en 2004 dans le cahier de procédures et portées une nouvelle fois à la connaissance des agents, le nombre des incidents ou infractions au cahier interne de procédures devrait être minimal ;

- l'amélioration des notes attribuées par l'auditeur externe est, à l'exception de la note relative au système de documentation et d'information, largement dépendante de la refonte du système d'information, qui ne devrait pas être achevée avant la fin de l'année 2005 ;

- l'Agence France Trésor est dépendante pour la bonne exécution de ses opérations des diligences mises en place par ses contreparties et ses partenaires. C'est pourquoi il est difficile de fixer des objectifs précis pour l'indicateur relatif aux incidents d'exécution des opérations de dette et de trésorerie. Néanmoins, l'Agence peut engager dans certains domaines des actions pouvant conduire à la diminution des incidents. C'est le cas pour les incidents les plus fréquents (non-livraison de titres sur opérations de pensions), sujet sur lequel elle a lancé un groupe de travail avec la place de Paris.

5.- Une innovation : l'objectif fixé à la gestion de la dette non négociable

La dette financière non négociable est composée des bons du Trésor sur formules et de divers emprunts d'État restés sous forme « papier » lors de l'opération de dématérialisation des titres intervenue en 1984. L'ensemble des emprunts concernés est aujourd'hui totalement amorti à l'exception de la dette perpétuelle (majorat, dotations et rentes viagères) et de l'emprunt 4,5% de 1952 à capital garanti. L'amortissement de ce dernier emprunt intervient chaque année par tirage au sort, la dernière échéance étant prévue en 2006.

En l'absence d'émissions nouvelles depuis le 1er janvier 1999, date à laquelle les bons du Trésor sur formule ont été supprimés, la gestion de la dette non négociable est aujourd'hui limitée aux opérations de remboursement des titres en capital et en intérêts, ainsi qu'à la comptabilisation des emprunts prescrits.

Le traitement des opérations de remboursement de la dette non négociable nécessite d'être réalisé dans des conditions de sécurité optimum tant pour l'État émetteur que pour les souscripteurs. L'ancienneté des titres composant la dette financière non négociable, de même que la diversité des emprunts et des règles encadrant leurs modalités de remboursement sont donc autant de facteurs potentiels de risque qu'il convient d'encadrer afin de conserver une maîtrise totale sur les circuits comptables et financiers liés à ces opérations. Compte tenu de l'ancienneté des titres et de la complexité de la réglementation, il a été décidé en 2003 de renforcer les outils destinés à gérer les opérations de remboursement des emprunts non dématérialisés dont le volume est le plus significatif (bons du Trésor sur formules, emprunt obligatoire 1983 et emprunt libératoire 1976).

L'indicateur retenu est le taux de rejet sur les opérations de remboursement de la dette non négociable, qui s'obtient en fin d'exercice par la comparaison entre le nombre de rejets et le nombre d'opérations présentées au remboursement. Le taux réalisé a été zéro en 2003, valeur qui constitue également la cible fixée pour 2004, 2005 et les années ultérieures.

II.- DES INSTRUMENTS DE GESTION ÉPROUVÉS

Pour faire face à ses engagements, maintenir un solde créditeur en fin de journée sur son compte à la Banque de France et maîtriser ses risques, l'État utilise une gamme d'instruments financiers et met en œuvre diverses procédures. Certains, comme le programme d'emprunt, sont désormais classiques ; d'autres, comme les outils de gestion de la trésorerie, ont été adaptés dans les années récentes ; d'autres, comme le programme de swaps, sont tout à fait nouveaux.

A.- LA POLITIQUE D'ÉMISSION S'EFFORCE DE RÉPONDRE AUX ATTENTES DU MARCHÉ

L'encadré présenté au début du présent chapitre rappelle succinctement les principales caractéristiques des titres à court, moyen et long terme qui constituent aujourd'hui l'essentiel de la dette négociable, les emprunts anciens ne représentant plus qu'un montant résiduel.

1.- La diversité maîtrisée des emprunts de l'État

· Dès avant la généralisation des titres assimilables, le Trésor avait éprouvé le besoin d'étendre la panoplie des effets financiers offerts aux investisseurs en mettant au point des emprunts à taux variable. Il a donc proposé des produits dont les taux étaient indexés, au choix, sur :

- une référence courte : une moyenne de taux mensuels de BTF à treize semaines (taux dit « TMB »), un taux révisable à périodicité trimestrielle fondé sur le taux de rendement des BTF (taux dit « TRB ») ;

- une référence longue : taux révisable en fonction des taux de rendement moyens mensuels des emprunts d'État à taux fixe d'échéance supérieure à sept ans (taux dit « TRA ») ou taux de rendement d'un échantillon d'emprunts d'État sur le marché secondaire (taux dit « TME »).

Ces produits se sont révélés être en décalage avec les souhaits des investisseurs vers la fin des années 1980. Par ailleurs, la stabilisation de la hausse des prix à un niveau modéré, la diminution générale des taux et leur moins grande volatilité ont rendu moins attractives les émissions de titres à taux variable. Ainsi, le Trésor a interrompu ses émissions à partir de novembre 1990. Le dernier emprunt de ce type a été amorti au mois de janvier 2001.

· Pourtant, le souci de fournir aux investisseurs un produit simple à utiliser et performant, ainsi que la volonté d'occuper un segment du marché susceptible d'asseoir sa position comme émetteur de référence, ont amené le Trésor à concevoir, en 1996, une nouvelle OAT à taux variable. Cette OAT est indexée sur un indice de rendement des emprunts d'État à long terme, le TEC 10 (« taux de l'échéance constante à 10 ans »), calculé comme le taux de rendement d'une OAT fictive de maturité exactement égale à 10 ans.

Les OAT TEC 10 sont dotées d'un coupon trimestriel. En effet, ces titres offrant l'intérêt de présenter un coupon proche du taux du marché, il a été jugé préférable d'opter pour un détachement trimestriel plutôt que pour un coupon « classique » à détachement annuel.

Au 30 septembre 2004, l'encours des deux lignes d'OAT TEC 10 existantes s'établit à 21,7 milliards d'euros et représente 3,9% de l'encours total des OAT.

· En 1998, le Trésor a souhaité offrir un autre produit innovant, à travers une obligation dont le taux d'intérêt serait indexé sur l'inflation, l'OATi, afin de répondre aux besoins de certains investisseurs. A cette fin, l'article 19 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a autorisé l'indexation sur le niveau général des prix, dans des conditions fixées par décret, des titres de créances et des instruments financiers à terme mentionnés au 2° et au 4° de l'article premier de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières.

L'émission de titres indexés sur l'inflation a pour but de proposer aux investisseurs un support qui leur garantisse un rendement réel déterminé, assorti d'une part variable de rémunération visant à compenser le plus exactement possible l'érosion du capital due à la hausse générale des prix. Cette formule présente des avantages tant pour l'investisseur que pour l'émetteur :

- le premier bénéficie d'une garantie sur la valeur réelle de son capital, ce qui est essentiel pour des investisseurs dont les placements doivent couvrir des engagements à long terme (caisses de retraite, assureurs, etc.) ;

- le second évite d'intégrer au taux d'intérêt servi sur son titre la « prime de risque » généralement exigée des souscripteurs pour se protéger contre le risque d'erreur dans la prévision d'inflation sous-jacente à la formation des taux. En d'autres termes, l'émetteur s'expose à l'inflation mais encaisse la prime de risque.

Sous le bénéfice de l'autorisation parlementaire accordée en juillet 1998, le Trésor a conçu une première ligne d'OATi, émise en septembre 1998, arrivant à échéance en avril 2009. Le succès rencontré par ce produit a amené le Trésor à proposer, en septembre 1999, une seconde ligne d'OATi, sur une échéance à trente ans (juillet 2029). Les caractéristiques générales des OATi sont les suivantes :

- le taux facial retenu est égal à 3% pour l'OATi d'échéance avril 2009 et 3,4% pour l'OATi d'échéance juillet 2029 ;

- l'indicateur d'inflation est l'indice des prix hors tabac de l'INSEE ;

- le coupon est calculé en appliquant le taux facial du titre à un capital revalorisé en fonction de l'indice d'indexation au moment du détachement du coupon ; par ailleurs, le montant du capital remboursé à l'échéance est lui aussi égal au montant nominal revalorisé de l'inflation écoulée sur l'ensemble de la durée de vie du titre désormais échu ;

- le coupon est détaché chaque année, le 25 juillet.

Les OATi doivent être considérées comme un élément de la gamme diversifiée de titres négociables que la République française est susceptible de proposer aux investisseurs. Ainsi, au 30 septembre 2004, l'encours total des OATi s'élève à 38,3 milliards d'euros et représente 6,9% de l'encours total des OAT. L'instrument « OATi » étant désormais bien acclimaté, une ligne d'OATi est émise chaque année sur l'échéance 10 ans. La souche à 30 ans a été réabondée en 2002.

· Le 2 octobre 2001, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a décidé de proposer aux investisseurs européens une nouvelle OAT indexée sur l'inflation, en retenant cette fois comme indice d'indexation l'indice des prix harmonisé (hors tabac) de la zone européenne établi par Eurostat. Cette nouvelle OAT, dite OATei, d'échéance 10 ans, a vocation à constituer le premier point de la courbe des taux réels de la zone euro et à devenir ainsi une référence quasi nécessaire pour l'ensemble des dettes souveraines européennes.

Le lancement de l'OATei juillet 2012, le 25 octobre 2001, a connu un vif succès et a contribué à asseoir la notoriété de la dette française vis-à-vis de l'étranger puisque près des trois quarts des montants émis ont été achetés par des investisseurs étrangers (en zone euro et hors zone euro). Il s'agit notamment de fonds monétaires, de fonds européens d'actifs à long terme, de structures financières spécialisées dans la gestion actif / passif et de banques centrales.

Forte de ce succès, l'Agence France Trésor a émis en octobre 2002 une nouvelle OATei, d'échéance 30 ans (soit juillet 2032) et de coupon réel 3,15%. Cette nouvelle émission a également été bien accueillie. Elle a été abondée par la suite. Au 30 septembre 2004, l'encours des OATei s'élève à 27,5 milliards d'euros, soit 5% de l'encours total des OAT.

· Depuis 1991, le Trésor offre aux investisseurs la possibilité de démembrer leurs titres (OAT et BTAN) afin de séparer les flux d'intérêt et le remboursement du capital et de disposer ainsi d'un ensemble de titres (certificat de principal et certificats d'intérêt) négociables séparément et représentatifs d'autant de titres dits à « coupon zéro ». Depuis janvier 1994, toutes les OAT d'échéance avril et octobre sont démembrables. En moyenne, l'encours des titres démembrés s'établit à 10,6% de l'encours total sous-jacent, mais ces proportions peuvent varier de 0,1% à 75% selon les lignes considérées (4).

Les raisons de l'acquisition d'une obligation démembrée sont essentiellement la couverture d'un engagement à un horizon déterminé, par un actif de même duration (5) et sans risque de réinvestissement d'un coupon annuel. Par ailleurs, en raison de la duration plus élevée de l'obligation démembrée par rapport à l'obligation « complète » sous-jacente, les investisseurs peuvent augmenter la sensibilité de leur portefeuille obligataire aux variations de taux d'intérêt, donc améliorer leur performance - au risque de pertes supérieures si les évolutions du marché sont contraires aux anticipations desdits investisseurs.

LES PERSPECTIVES EN MATIÈRE D'ÉMISSIONS À TAUX VARIABLE

On observe depuis plusieurs mois que les souches existantes d'OAT TEC 10 n'ont pas été abondées et qu'aucune souche nouvelle n'a été émise. En réponse à une question de votre Rapporteur spécial, l'Agence France Trésor a fait savoir que « le développement massif du marché des swaps intervenu depuis [les premières émissions] a consacré les indices CMS [Constant Maturity Swaps] comme référence de marché, entraînant progressivement une certaine baisse d'intérêt pour le TEC 10, ce qui a conduit les SVT à ne plus demander d'adjudication d'OAT TEC 10 lors des réunions précédant les adjudications ».

Votre Rapporteur spécial a également souhaité savoir si le lancement des lignes d'OAT indexées sur l'inflation européenne (OATei) ne risquait pas de nuire au développement des lignes d'OAT indexées sur l'inflation française (OATi). Selon l'AFT, « la coexistence des deux indices est également un facteur positif pour la demande d'obligations indexée. Elle répond à l'existence de besoins différents de gestion actif / passif (selon que les bilans sont plus ou moins concentrés sur la France) ; elle permet aussi de répondre à la demande d'investisseurs souhaitant prendre position sur le différentiel d'inflation entre la France et la zone euro (et, par extension, avec les obligations indexées émises par les Trésors britannique et américain, entre la zone euro et les États-unis ou le Royaume-Uni) ».

Votre Rapporteur spécial relève que le segment des obligations à taux variable, et plus spécifiquement celui des obligations indexées, rencontre désormais un vif intérêt de la part des investisseurs et des marchés. Selon l'AFT, le volume mensuel moyen des transactions sur les titres proposés par la France est passé de 2 Md€ en 2002 à 10 Md€ en 2003. Les institutions financières consacrent aujourd'hui une part importante de leur recherche économique et financière aux produits indexés. Cela traduit le caractère opportun de l'engagement de l'Agence sur ce segment de marché.

2.- Une procédure d'émission transparente

Le Trésor a organisé des procédures permettant d'assurer la plus grande transparence et la meilleure prévisibilité autour de ses émissions.

· La prévisibilité s'appuie sur la publication, dans les tout premiers jours de l'année, d'un programme prévisionnel de financement de l'État qui fixe de façon quasi intangible le volume prévu des appels au marché pour les OAT, les BTAN et les BTF, compte tenu du besoin de financement évalué pour l'année. Le schéma actuel repose sur les principes suivants :

- sur le segment des OAT : émission chaque mois de deux OAT à 10 ans et d'une OAT plus longue (15 ou 30 ans) selon la demande ;

- sur le segment des BTAN : émission chaque mois de deux BTAN à 5 ans et de deux BTAN à 2 ans (par création ou réabondement d'anciens BTAN 5 ans) ;

- sur le segment des BTF : création d'une nouvelle ligne à 3 mois une semaine sur deux, réabondée la semaine suivante ; création chaque semaine d'une ligne à 6 mois ou à 1 an.

Le programme prévisionnel est complété par un calendrier indicatif annuel d'adjudication. Jusqu'en 2001, le calendrier était trimestriel, donc exerçait un effet plus contraignant sur le Trésor. Afin de répondre avec plus de souplesse à la demande du marché, le calendrier trimestriel a été supprimé en 2002. En raison de la faible activité des marchés aux mois d'août et décembre, les adjudications d'OAT et de BTAN ont été supprimées pour ces dates depuis 2002.

Depuis 1986, la République française n'a jamais annulé, reporté ou même diminué le montant d'une émission prévue. Ce n'est pas le cas d'autres pays européens, y compris dans les années les plus récentes. En 1998, l'Autriche a annulé une adjudication quelques jours avant sa tenue. De même, en juillet 1999, le gouvernement fédéral allemand a annulé avec une semaine de « préavis » une adjudication de titres à trente ans qui avait été annoncée dans le programme d'émission trimestriel.

· La transparence résulte du choix d'une procédure d'adjudication pour procéder au placement des titres, en lieu et place de la formule plus classique de la « prise ferme » des titres assurée par un syndicat d'émission, charge à celui-ci de replacer les titres ainsi acquis auprès de leur clientèle d'investisseurs finaux. L'adjudication consiste à mettre en concurrence, par le biais d'un appel d'offres, les établissements soumissionnaires qui proposent leur prix d'achat pour les titres émis par le Trésor. Les offres sont recueillies et classées par la Banque de France, qui les transmet au Trésor en conservant l'anonymat des soumissionnaires.

L'adjudication se fait selon la technique dite « à la hollandaise » : les titres sont servis au prix demandé par le soumissionnaire, en commençant par celui qui propose le prix le plus élevé. Au vu des prix et des volumes offerts pour chaque mise en adjudication, le Trésor arrête le montant des soumissions qu'il retient sur chacune des lignes, le total se situant à l'intérieur de la fourchette globale annoncée pour les BTAN et les OAT et respectant, aux arrondis près, le montant exact annoncé pour les BTF.

Les offres passées à des prix supérieurs au prix limite sont servies intégralement ; les offres passées au prix limite se voient affectées d'un coefficient de réduction de façon à servir les soumissionnaires concernés proportionnellement au volume de leur offre.

La France est aujourd'hui, parmi les grands émetteurs souverains, celui dont les délais d'adjudication sont les plus courts. Moins de dix minutes s'écoulent entre la clôture des offres et l'annonce des résultats par le Trésor.

La procédure de syndication reste cependant utilisée pour la première émission de titres innovants (OAT TEC 10 2006 en avril 1996, OATi juillet 2009 en septembre 1998, OATi juillet 2029 en septembre 1999, OATei juillet 2012 en octobre 2001, OATei juillet 2032 en octobre 2002 et OATei juillet 2020 en janvier 2004 pour les plus récentes).

· La politique d'émission s'appuie, depuis 1986, sur un réseau d'établissements chargés d'assurer le placement des valeur du Trésor et la liquidité du marché secondaire de la dette. Directement inspiré du système américain des Primary Dealers, les « spécialistes en valeurs du Trésor » (SVT) s'engagent à respecter les termes d'un cahier des charges spécifique, remplacé, depuis février 2003, par une Charte définie en commun par l'Agence et les SVT.

La composition du groupe des SVT a évolué dans le temps. Au nombre de treize lors de la première sélection, il est depuis très sensiblement élargi afin que soit représentée la diversité des établissements actifs sur le marché des emprunts d'État français : grandes banques de réseau, établissements spécialisés, institutions d'origine française et étrangère. Depuis le renouvellement effectué en juillet 2003, le groupe des SVT comporte sept établissements français et quinze établissements non-résidents - dont six américains, deux allemands, deux britanniques, un néerlandais et deux suisses - qui comptent parmi les acteurs les plus importants sur les marchés obligataires mondiaux.

Au nombre des obligations auxquelles doivent satisfaire les SVT, il y a la participation à la formation de prix représentatifs sur l'ensemble des valeurs du Trésor négociées, la réalisation d'un pourcentage minimum de transactions et l'affichage en tout temps, pour des montants déterminés, de prix d'achats et ventes fermes, la promotion de la dette de l'État à l'étranger, l'information régulière du Trésor sur l'état des marchés et le conseil pour sa politique d'émission, etc.

Un tel système, essentiellement focalisé sur la participation au marché primaire (les adjudications hebdomadaires et mensuelles de valeurs du Trésor) était financièrement avantageux pour l'État puisqu'il stimulait la concurrence entre SVT au moment du placement initial des titres.

Cette stratégie a montré quelques limites, notamment lorsqu'il est apparu que les prix proposés par certains SVT particulièrement « agressifs » étaient supérieurs à ceux qui se négociaient au même moment sur le « marché gris » (marché quasi virtuel où les intervenants s'échangent des titres sur le point d'être émis, mais qui, formellement, n'existent pas encore). Comme l'indique l'Agence, cette stratégie « tendait, à moyen terme, à séparer le marché primaire du marché secondaire et, in fine, se révélait préjudiciable à l'équilibre financier de l'activité des SVT et donc à la stabilité du marché primaire ». De ce fait, l'accent est désormais mis sur la qualité globale des prestations fournies par les SVT à l'État : participation au marché primaire, animation du marché secondaire, conseils à l'émetteur.

Votre Rapporteur spécial considère que le rééquilibrage des relations entre l'État et les SVT est une bonne décision.

En contrepartie de leurs engagements, les SVT disposent de deux droits spécifiques par rapport aux autres intervenants de marché : ils peuvent démembrer et remembrer les OAT ; ils peuvent présenter des offres non concurrentielles (6) lors des adjudications, avant ou après la séance.

B.- L'INSTRUMENT PRINCIPAL DU FINANCEMENT : LE PROGRAMME D'EMPRUNT

La prise en charge du déficit budgétaire ne suffit pas à décrire les opérations que doit effectuer le Trésor pour couvrir, chaque année, l'ensemble des charges de trésorerie supportées par l'État. Aux besoins découlant de l'exécution des lois de finances, il faut en effet ajouter les charges résultant de l'amortissement des dettes et engagements échus.

Dans le cadre du programme « gestion de la dette et de la trésorerie de l'État », un tableau de financement est désormais inclus dans le fascicule des Charges communes. C'est une première étape vers 2006 où, lorsque seront entrées en vigueur l'ensemble des dispositions de la LOLF, un tableau de financement sera intégré dans l'article d'équilibre et soumis, au même titre que le classique tableau d'équilibre, au vote du Parlement.

De plus, l'horizon du programme d'emprunt prévisionnel associé au projet de loi de finances pour 2005 s'étend bien au-delà de 2005, puisque des projections
- à caractère conventionnel - portant sur les années 2006 à 2008 illustrent l'effet, sur le besoin de financement de l'État de trois hypothèses différentes de déficit (45 milliards d'euros, 22,5 milliards d'euros et zéro) sur chacune de ces années). Selon l'Agence France Trésor, « ces hypothèses sont des hypothèses d'école volontairement simplifiées qui ne présagent absolument pas des intentions du Gouvernement français. Elles sont seulement destinées à illustrer l'acquis du besoin de financement et le phénomène de « boule de neige » engendré par les choix budgétaires antérieurs ».

En prévision, le programme d'emprunt éclaire l'origine du besoin de financement qui sera supporté par l'État l'année considérée et définit la structure des ressources qui seront utilisées pour couvrir ce besoin de financement. En exécution, le tableau de financement retrace les conditions d'exécution des lois de finances, l'effet des éventuels rachats de titres avant échéance et l'évolution effective des ressources « courtes » du Trésor, dont certaines échappent à son contrôle, comme les comptes de dépôt des correspondants.

1.- Le financement définitif de l'État en 2003

· L'augmentation du besoin de financement de l'État entre les évaluations associées à la loi de finances initiale pour 2003 (108,5 milliards d'euros) et les résultats d'exécution (127,2 milliards d'euros) résulte de plusieurs phénomènes.

La détérioration du déficit en gestion par rapport au déficit en exercice prévu en loi de finances initiale (+ 12,4 milliards d'euros) résulte de deux facteurs principaux. En premier lieu, le solde négatif de l'exercice 2003 a été réalisé à hauteur de 97% environ pendant l'année 2003 (54,2 milliards d'euros). En second lieu, l'année 2003 a supporté une charge supplémentaire d'environ 1,1 milliard d'euros par rapport au déficit en exercice, au titre des opérations de la période complémentaire et des dépenses payées par anticipation sur 2004.

Le programme de rachat de titres, portant à la fois sur les OAT et sur les BTAN, a impacté le tableau de financement à hauteur de 7,4 milliards d'euros. Votre Rapporteur spécial a décidé, par convention, d'inclure dans la ligne « amortissement de titres échus » les rachats de titres effectués avant échéance sur des titres qui étaient échus dans l'année.

LE BESOIN DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT EN 2003 : DE LA PRÉVISION À L'EXÉCUTION

(en milliards d'euros)

Besoin de financement prévu en LFI 2003

108,5

Détérioration du solde à financer (a)

+ 12,4

1. Déficit en exercice (LFI 2003)

(44,6)

2. Déficit en gestion (exécution 2003)

(57,0)

Écart [(2) - (1)]

(+ 12,4)

Rachats d'OAT avant échéance

+ 3,6

Rachats de BTAN avant échéance

+ 3,7

Amortissement d'engagements de l'État

- 1,0

Autres

0,0

Besoin de financement constaté en 2003

127,2

(a) La détérioration du solde à financer est affectée du signe (+) puisqu'elle augmente le besoin de financement.

Par ailleurs, l'amortissement des engagements repris par l'État n'a joué que pour 0,05 milliard d'euros alors qu'un milliard d'euros avait été pris en compte à titre provisionnel dans le tableau de financement initial. Cet écart est dû, pour l'essentiel, à la différence des méthodes de comptabilisation entre les prévisions fournies par la direction du Trésor et les calculs effectués ex post par votre Rapporteur spécial, à partir des documents établis par la direction générale de la comptabilité publique.

- -

TABLEAU DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT (y compris FMI et FSC)

(en milliards d'euros)

1999

2000

2001

2002

2003

2004
révisé

2005
(conventionnel)

Pour mémoire : Déficit en exercice

34,31

31,03

31,22

48,69

55,85

49,1

44,9

Déficit en gestion

39,85

28,48

39,34

50,24

56,96

49,1

44,9

Remboursement des OAT et titres longs émis par l'État

13,25

24,25

29,63

19,44

33,90

36,0

33,8

Amortissement des OAT et titres échus (a)

(11,51)

(14,19)

(14,78)

(14,61)

(30,30)

Rachats de titres avant échéance et paiement par remise du 6% 1997

(1,71)

(9,65)

(13,82)

(4,57)

(3,33)

Pertes (+) et profits (-) sur remboursements

(0,02)

(0,41)

(1,04)

(0,26)

(0,26)

Remboursement des BTAN

32,44

43,02

37,74

50,20

36,33

30,5

39,3

Amortissement des titres échus (a)

(29,63)

(42,96)

(36,51)

(44,75)

(32,23)

Rachats de titres avant échéance

(2,81)

(0,05)

(1,22)

(5,42)

(4,07)

Pertes (+) et profits (-) sur remboursements

(0,01)

(0,00)

(0,01)

(0,04)

(0,04)

Amortissement des engagements repris par l'État

0,92

0,79

0,48

1,19

0,05

-

-

Besoin de financement à moyen et long terme

86,45

96,53

107,18

121,07

127,24

115,6

118,0

Recettes en trésorerie des émissions obligataires

43,69

47,47

52,48

54,03

67,25

70,8

68,4 (c)

Émission d'OAT (valeur nominale)

(44,81)

(47,63)

(51,62)

(53,90)

(66,31)

Pertes (-) et profits (+) sur émissions

(- 1,12)

(- 0,16)

(+ 0,85)

(+ 0,13)

(+ 0,94)

Recettes en trésorerie des émissions de BTAN

37,02

42,57

42,10

42,88

53,07

51,2

49,6 (c)

Émission de BTAN (valeur nominale)

(37,18)

(42,87)

(41,98)

(43,02)

(52,58)

Pertes (-) et profits (+) sur émissions

(- 0,16)

(- 0,30)

(+ 0,12)

(- 0,13)

(+ 0,49)

Financement à moyen et long terme

80,71

90,05

94,58

96,91

120,32

122,0

118,0

Solde net des émissions de BTF

- 13,51

+ 9,33

+ 9,43

+ 35,74

+ 20,52

- 9,6

-

Variation des comptes de dépôt des correspondants du Trésor

+ 5,40

- 5,70

- 2,34

+ 5,03

- 14,63

+ 3,2

-

Diminution des avoirs nets du Trésor auprès de la Banque de France (b)

+ 10,52

+ 1,56

+ 7,61

- 16,77

- 0,18

-

-

Divers (effets, encaisses, règlements en cours, bons non négociables...)

+ 3,32

+ 1,30

- 2,10

+ 0,16

+ 1,21

-

-

Capacité de financement

86,45

96,53

107,18

121,07

127,24

115,6

118,0

(a) Les rachats avant échéance de titres échus la même année sont intégrés dans la ligne relative aux amortissements et non dans celle relative aux rachats.

(b) Avant opérations de pensions.

(c) Hypothèses conventionnelles, qui ne préjugent en rien des choix définitifs que l'AFT arrêtera ultérieurement.

Sources : SROT, Compte de la dette publique, Situation mensuelle des opérations du Trésor au 31 décembre.

· Les amortissements d'OAT échues se sont élevés à 30,3 milliards d'euros en valeur nominale, portant sur trois lignes. Les amortissements de BTAN échus se sont élevés à 32,2 milliards d'euros en valeur nominale, portant sur deux lignes. Par ailleurs, les rachats de titres effectués au second semestre se sont élevés à 7,4 milliards d'euros, dont 3,3 milliards d'euros d'OAT et 4,1 milliard d'euros de BTAN. Les rachats ont été effectués à hauteur de 4,9 milliards d'euros sous forme d'adjudications à l'envers, à hauteur de 2,5 milliards d'euros sous forme de rachats de gré à gré sur le marché. Les charges de trésorerie résultant du solde des pertes et profits sur rachats anticipés se sont élevées à 301,1 millions d'euros.

Les engagements divers de l'État été amortis à hauteur de 48,6 millions d'euros, dont 21,4 millions d'euros au titre de l'apurement des créances de TVA et 21,7 millions d'euros au titre des primes de plans d'épargne populaire.

Au total, les charges de trésorerie ont représenté 57 milliards d'euros au titre du déficit en gestion et 70,3 milliards d'euros au titre des remboursements et amortissements.

· Pour couvrir ces charges de trésorerie, l'État a eu recours à des émissions d'OAT, à hauteur de 66,3 milliards d'euros en valeur nominale, et à des émissions de BTAN, à hauteur de 52,6 milliards d'euros en valeur nominale :

- les émissions d'OAT à 10 ans ont totalisé 37,9 milliards d'euros ;

- les émissions d'OAT à 15 ans ont totalisé 9,2 milliards d'euros ;

- les émissions d'OAT à 30 ans ont totalisé 3,2 milliards d'euros ;

- les émissions d'OAT indexées sur l'inflation ont totalisé 16 milliards d'euros, dont 13,8 pour les OAT indexées sur l'inflation française et 2,2 pour les OAT indexées sur l'inflation européenne ;

- les émissions de BTAN à 2 ans ont représenté 15,9 milliards d'euros ;

- les émissions de BTAN à 5 ans ont représenté 36,7 milliards d'euros.

Les ressources à court terme ont été profondément modifiées par rapport à la prévision initiale, ce qui n'est pas étonnant au vu du caractère relativement conventionnel de celle-ci : le solde des émissions de BTF a atteint + 20,5 milliards d'euros, soit un niveau supérieur de 3 milliards d'euros à la prévision initiale ; les ressources apportées par les correspondants du Trésor ont reculé de 14,6 milliards d'euros par rapport à 2002 alors qu'une diminution de 15,4 milliards d'euros avait été prévue ; le Trésor n'a réduit que de 0,2 milliard d'euros ses avoirs auprès de la Banque de France, alors qu'un repli de 5 milliards d'euros avait été pris en compte dans la construction du programme de financement ; les ressources diverses ont progressé de 1,2 milliard d'euros.

2.- Les prévisions de financement de l'État en 2004

L'évolution éventuelle du déficit budgétaire entre les prévisions de la loi de finances initiale et les dernières prévisions d'exécution modifient les conditions de financement des opérations de trésorerie, étant entendu que, conformément à un principe jugé essentiel, le programme de financement à moyen et long terme reste inchangé. L'ajustement s'effectue uniquement sur les ressources à court terme. Le programme « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » inclus dans le projet de loi de finances pour 2005 présente une version révisée du tableau de financement pour 2004, arrêté en fonction des informations disponibles au mois de septembre. C'est cette version que votre Rapporteur spécial a choisi de commenter.

En 2004, le besoin de financement serait plus faible qu'en 2003, notamment en raison de la réduction du déficit budgétaire. Les amortissements d'OAT et de BTAN passeraient respectivement de 33,9 milliards d'euros et 36,3 milliards d'euros en 2003 à 36 milliards d'euros et 30,5 milliards d'euros en 2004, soit un total passant de 70,2 milliards d'euros en 2003 à 66,5 milliards d'euros en 2004. Les charges dues à l'amortissement des engagements repris par l'État seraient nulles en 2004 alors qu'elles ont atteint 48,6 millions d'euros en 2003. Cette dernière hypothèse est toujours constituée de façon assez normative.

Le déficit budgétaire allégerait également l'évolution du besoin de financement, en passant de 57 milliards d'euros en 2003 à 49,1 milliards d'euros en 2004. Ce chiffre doit être relativisé. En effet, par convention, les déficits en gestion pris en compte dans le tableau de financement pour les exercices en cours (2004) et à venir (2005) sont égaux aux déficits en exercice des années éponymes, prévus dans les lois de finances initiales. Il est impossible de connaître actuellement le montant des dépenses et recettes effectuées en 2004 au titre de l'exercice 2004, le montant des dépenses et recettes effectuées en 2005 au titre de la période complémentaire de l'exercice 2004, et le montant des dépenses de l'exercice 2005 payées par anticipation en 2004.

Toute comparaison directe entre les besoins de financement de l'année écoulée et de l'année en cours ou à venir, notamment au regard de la contribution du déficit budgétaire, est donc délicate et entachée de nombreux facteurs de perturbation de nature méthodologique.

En termes d'exercice, le déficit prévisionnel pour 2004 est inférieur de 6,8 milliards d'euros environ au déficit de 2003 en exécution (7).

Au total, le besoin de financement de l'État en 2004, tel que déterminé en fonction des prévisions d'exécution au mois de septembre 2004, s'élèverait à 115,6 milliards d'euros. Le programme de financement de l'État pour 2004 indique que ces charges devraient être couvertes par l'émission de 70,8 milliards d'euros d'OAT et 51,2 milliards d'euros de BTAN - ces montants s'entendant des recettes en trésorerie, nettes des éventuels rachats effectués sur le marché - et par un solde net négatif des émissions de BTF de 9,6 milliards d'euros, au lieu de zéro dans le programme initial. La variation des comptes de dépôts des correspondants du Trésor devrait, en revanche, apporter 3,2 milliards d'euros de ressources.

3.- Le programme de financement de l'État en 2005

· Eu égard aux observations méthodologiques présentées ci-avant, le déficit retenu pour construire le programme de financement de l'État passerait de 49,1 milliards d'euros en 2004 (prévision de septembre 2004) à 44,9 milliards d'euros en 2005, soit une diminution de 4,2 milliard d'euros.

En 2005, l'amortissement des emprunts arrivant à échéance représente une charge de trésorerie de 73,1 milliards d'euros au lieu de 66,5 milliards d'euros en 2004. Les amortissements de titres échus sont, depuis plusieurs années, supérieurs au montant du déficit :

- les amortissements de titres longs s'élèveraient à 33,8 milliards d'euros, au lieu de 36 milliards d'euros en 2004. Seraient ainsi amorties deux lignes d'OAT, portant des taux faciaux élevés (OAT 7,5% avril 2005, OAT 7,75% octobre 2005) ;

- les amortissements de BTAN s'établiraient à 39,3 milliards d'euros, au lieu de 30,5 milliards d'euros en 2004. Deux lignes seraient amorties, portant un taux d'intérêt de 3,5% et 5%, respectivement.

Enfin les amortissements d'engagements repris par l'État sont provisionnés pour une valeur nulle. En l'absence de reprise par l'État de nouveaux engagements, ces charges de trésorerie tendent à décroître régulièrement, sauf événement exceptionnel. Cependant, les estimations portées dans le tableau de financement prévisionnel ont toujours un caractère quelque peu normatif.

ÉVOLUTION COMPARÉE DES DEUX GRANDES COMPOSANTES DU BESOIN DE FINANCEMENT DE L'ÉTAT

(en milliards d'euros)

graphique

· Le programme prévisionnel de financement pour 2005 indique que les ressources de trésorerie seront constituées par des ressources à moyen et long terme, à hauteur de 118 milliards d'euros.

Selon des indications préliminaires et conventionnelles données par l'Agence France Trésor, ce montant pourrait être réparti entre 68,4 milliards d'euros d'OAT et 49,6 milliards d'euros de BTAN, ces évaluations portant sur les entrées nettes en trésorerie, après prise en compte des pertes et profits à l'émission, qui découlent des choix techniques retenus pour chaque ligne émise. Votre Rapporteur spécial insiste sur le fait que ces deux derniers montants sont des évaluations conventionnelles, qui ne préjugent en rien des choix définitifs de l'AFT, lesquels seront arrêtés dans les derniers jours de décembre 2004 ou les premiers jours de janvier 2005.

Votre Rapporteur spécial rappelle que l'encaissement des coupons courus à l'émission vient abonder les recettes budgétaires de l'exercice et de la gestion en cours. Dans le tableau de financement, les coupons courus ne figurent donc pas sur les lignes relatives aux ressources procurées par les OAT et les BTAN : ils sont inclus dans l'évaluation du déficit, dont ils atténuent le montant.

C.- UNE « GESTION ACTIVE » QUI POURRAIT ENCORE DEVOIR SE PASSER DU PROGRAMME DE SWAPS DE TAUX D'INTÉRÊT

Les principales innovations en matière de gestion de la dette de l'État portent sur la redynamisation de la gestion active. Depuis l'année 2000, le Trésor met en œuvre un programme important de rachat de titres, à hauteur d'une dizaine de milliards d'euros chaque année. De plus, un portefeuille de swaps a été constitué à partir du dernier trimestre de l'année 2001, à la suite de la création du compte de commerce n° 904-22 « Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'État » par l'article 8 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2000.

1.- Un instrument classique : les interventions directes sur le stock de dette

Depuis 1991, l'article d'équilibre de la loi de finances autorise le ministre chargé des finances à utiliser diverses procédures pour intervenir sur le marché secondaire de la dette de l'État. Ces autorisations ont été complétées et précisées par décret en 1995.

Tout en ayant organisé, en 1991, 1992, 1994 et 1998, plusieurs opérations d'échange qui visaient à remodeler rapidement la structure de la dette de l'État, le Trésor a progressivement développé la gestion « au fil de l'eau », intervenant sur le marché directement ou par l'intermédiaire du Fonds de soutien des rentes.

Ces opérations sont retracées dans les arrêtés mensuels récapitulatifs des émissions de valeurs du Trésor évoqués ci-avant. Si une certaine confidentialité est évidemment nécessaire préalablement aux opérations de rachat, leur publication ultérieure au Journal officiel assure une publicité tout aussi nécessaire, dans le cadre d'un contrôle démocratique sur l'activité de l'administration.

· Tout en se fondant sur des opportunités de taux, les opérations du Trésor avaient traditionnellement deux vocations : lisser l'échéancier de la charge de trésorerie occasionnée par le service financier et le remboursement de certaines lignes de titres importantes - c'est en quelque sorte la contrepartie inéluctable de la politique d'assimilation - et retirer du marché des lignes jugées décotées.

L'échéancier de la dette négociable à moyen et long terme, à la date du 30 septembre 2004, montre une concentration des échéances de remboursement sur une période de dix ans, de 2005 à 2014. Les montants à rembourser atteignent 20 à 95 milliards d'euros selon les années. Les échéances postérieures sont comprises entre 10 et 25 milliards d'euros.

L'échéancier présenté ci-après (tableau et graphique) donne une vue de ce que seront, dans le futur, les charges de remboursement d'emprunts. Cette vue est, en termes photographiques, un « instantané » : elle ne peut retracer que l'encours et la structure de la dette tels qu'ils sont définis aujourd'hui. L'ampleur des déficits des années à venir ainsi que les modalités de leur financement sont, par nature, éludés. Ainsi, le volume des BTAN et des OAT a vocation, d'une part, à « glisser » progressivement sur l'axe du temps au fil du refinancement de la dette et, d'autre part, à s'accroître à due proportion des déficits futurs.

Les rachats sur le marché ont trois conséquences :

- ils sont suivis de l'annulation des titres rachetés, qui intervient à la date de règlement ; ces titres « disparaissent » ainsi définitivement de la dette de l'État : le Trésor ne dispose pas d'un portefeuille de titres ;

- ils donnent lieu à la constatation de pertes et profits, selon que les titres sont rachetés respectivement au-dessus ou au-dessous de leur valeur nominale. Ces pertes et profits ne sont pas retracés dans les documents budgétaires, puisqu'ils constituent des opérations de trésorerie au sens de l'article 15 de l'ordonnance organique. Le Parlement ne peut officiellement en prendre connaissance qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement, sous une forme agrégée. Cependant, la publication par la direction de la comptabilité publique dans les Notes bleues de la Situation mensuelle des opérations du Trésor permet aux initiés de découvrir chaque mois le montant des pertes et profits dus aux opérations de tout ordre faites sur la dette. La Situation résumée des opérations du Trésor, publiée chaque mois au Journal officiel, ne comporte, pour sa part, pas d'indications très précises sur les pertes et profits supportées par l'État du fait de la gestion active de la dette. Peut-être conviendrait-il de remédier à cette obscurité ;

- ils donnent lieu à une dépense budgétaire correspondant au paiement par l'État du coupon ayant couru depuis la date du dernier versement de coupon.

ÉCHÉANCIER DE LA DETTE NÉGOCIABLE À LONG ET MOYEN TERME
(selon l'encours au 30 septembre 2004)

(en milliards d'euros)

Année

OAT

BTAN

Total

2004

11,19

11,19

2005

33,42

35,69

69,12

2006

46,75

47,29

94,04

2007

36,41

29,99

66,40

2008

42,19

36,67

78,86

2009

63,97

29,14

93,11

2010

31,16

31,16

2011

38,42

38,42

2012

55,96

55,96

2013

49,58

49,58

2014

23,33

23,33

2016

16,65

16,65

2019

22,86

22,86

2020

5,18

5,18

2022

1,24

1,24

2023

10,61

10,61

2025

8,51

8,51

2028

0,01

0,01

2029

21,06

21,06

2032

25,76

25,76

2035

6,59

6,59

Total

550,86

178,78

729,65

Source : bulletin mensuel de l'AFT (octobre 2004) et résultat des adjudications de septembre.

graphique

Source : bulletin mensuel de l'AFT (octobre 2004) et résultat des adjudications de septembre.

A l'origine, les interventions du Trésor ont pris la forme d'adjudications dites « à l'envers », dont la procédure est identique à celle des adjudications classiques. Au lieu de proposer un prix d'achat pour des titres qui seraient mis par l'État sur le marché, les SVT proposent un prix de vente pour les titres dont ils souhaitent se défaire. Le Trésor annonce à l'avance les lignes qu'il se propose de racheter et indique, sous forme de fourchette, le volume de l'opération.

Puis, le Trésor s'est orienté vers des achats directs de marché. Jusqu'en 1999, il attendait le dernier trimestre de l'année afin de disposer d'une meilleure visibilité sur l'exécution budgétaire et les conditions de réalisation du programme de financement arrêté en début d'année. Le rapprochement des entrées en trésorerie déjà comptabilisées - pour les émissions accomplies - ou calées sur le programme de financement - pour les émissions restant à venir - avec les perspectives des besoins de trésorerie permettent de dégager des marges de manœuvre pour procéder au rachat de certaines lignes décotées ou souffrant d'un manque de liquidité signalé par les SVT.

· Depuis 1999, le Trésor a décidé de ne plus limiter ses interventions au dernier trimestre mais d'y procéder tout au long de l'année, en fonction des besoins et des opportunités. Il faut voir là, peut-être, l'une des libertés supplémentaires procurées aux émetteurs par l'atténuation de leur poids relatif au sein d'un marché européen des capitaux plus vaste que les simples marchés nationaux. Cependant, un seul achat a été effectué au premier semestre, le Trésor reprenant ses interventions de marché à partir du mois d'octobre, restant fidèle en cela au schéma classique. En 2000, les achats se sont faits importants dès le premier semestre puisque, sur cette période, la valeur nominale des titres acquis était égale à 3,6 milliards d'euros.

Mais le changement le plus notable tient à l'articulation désormais plus visible entre la réalisation du programme d'émission et les rachats de titres avant échéance. Il apparaît que l'AFT - comme, d'ailleurs, un certain nombre de ses homologues étrangers - « prend de l'avance » sur son programme d'émission pendant le premier semestre de l'année, c'est-à-dire émet à moyen et long terme une plus grande quantité de titres que celle qui serait strictement nécessaire à la couverture des charges de trésorerie de l'État. L'AFT se constitue donc au fil des mois une « réserve financière », qu'elle utilisera à racheter des titres dans la seconde partie de l'année. Ainsi, elle conserve la capacité d'intervenir sur le marché même si les conditions d'exécution du budget - qui orientent en grande partie la structure du programme d'émission - s'éloignent des prévisions initiales.

On voit le « saut qualitatif » qui a été introduit de la sorte dans la gestion de la dette : les interventions de l'AFT ne sont plus conditionnées par une évolution plus favorable que prévu du déficit budgétaire ou par une augmentation plus forte que prévu de ses ressources liquides. Elles s'appuient sur la constitution progressive et délibérée d'une marge de manœuvre financière, librement utilisable si les conditions de marché le permettent.

L'examen du tableau de financement présenté en page 60 montre que les rachats de titres ont atteint des montants conséquents, ces quatre dernières années : 9,7 milliards d'euros en 2000 et 15 milliards d'euros en 2001, dans un contexte budgétaire encore aisé ; 10 milliards d'euros en 2002 et 7,4 milliards d'euros en 2003, malgré des conditions budgétaires médiocres. Les perspectives encore incertaines pour 2004 et le niveau du déficit prévu pour 2005 ont semblé devoir motiver une plus grande réserve de la part de l'Agence France Trésor. Celle-ci indique, dans le programme prévisionnel de financement pour 2005, que les rachats en 2004 et les années suivantes « seront en toute hypothèse de faible montant au regard » des amortissements de titres venant à échéance.

2.- Le programme de swaps pourra-t-il être repris en 2005 ?

· Les swaps de taux d'intérêt sont des contrats négociés entre deux parties qui décident de s'échanger les flux d'intérêt correspondant, d'une part, à une échéance fixe (en général) moyenne ou longue et, d'autre part, à une échéance variable courte. Les swaps de taux dans la zone euro sont, en règle générale, des swaps taux fixes contre Euribor (taux interbancaire d'échéance inférieure à un an).

Sans intervenir sur l'encours de la dette, il est donc possible de réduire sa durée de vie apparente en concluant avec une contrepartie déterminée un swap de taux visant à percevoir le taux fixe long et à payer le taux variable court. Ainsi, le débiteur paye le taux fixe long sur l'emprunt qu'il a émis, reçoit le taux fixe long du fait du swap et paye le taux variable court du fait du swap. S'il veut éviter d'être exposé à une charge d'intérêt variable, le débiteur peut conclure un swap inverse avec une autre contrepartie, en recevant le taux variable court et en payant un taux fixe associé à une maturité intermédiaire. Dans ces conditions, l'ensemble des instruments financiers utilisés (emprunt, swap taux long / taux court et swap taux court / taux moyen) aboutit à ce que le débiteur paye sur sa dette à long terme un taux d'intérêt à moyen terme.

Le marché européen des swaps, quoique profond, n'a pas une capacité d'absorption illimitée. C'est pourquoi il convient d'approuver la démarche de l'Agence France Trésor, qui a indiqué d'emblée que le programme serait progressif et tiendrait le plus grand compte des réactions du marché. Il faut rappeler, par exemple, que plusieurs États européens ont annoncé leur intention de poursuivre une politique similaire à celle engagée par la France.

Certes, les besoins des États ne sont pas nécessairement identiques. Il est notoire, par exemple, que le Trésor italien, qui est essentiellement endetté à court terme, chercherait plutôt à allonger la maturité de sa dette, ce qui constitue un facteur d'équilibrage du marché. De même, la présence plus forte des entreprises sur le marché des titres de créances négociables - qui sont des titres à court ou moyen terme - peut susciter des transactions visant à allonger la maturité de leur dette.

Il n'en reste pas moins que la démarche retenue par l'Agence France Trésor est empreinte de sagesse et qu'il est prudent de faire le plus grand cas des capacités réelles d'absorption du marché. A titre d'illustration, on peut évaluer à 11.000 milliards d'euros le montant sous-jacent du marché des swaps de taux d'intérêt en euro de durée supérieure à 5 ans (8). Avec 120 milliards d'euros, le programme français représente environ 1% ce marché.

En présentant le programme « Gestion de la dette » pour 2002, le précédent Gouvernement avait indiqué qu'il était envisagé de constituer un portefeuille de swaps de 40 milliards d'euros d'ici à la fin 2001 et de 120 milliards d'euros à la fin de 2002. Le portefeuille devait donc couvrir plus de 15% du stock de dette. Votre Rapporteur spécial a déjà indiqué que, face à une trop grande volatilité du marché (notamment à partir de l'été 2002), l'Agence France Trésor a interrompu le programme de swaps et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a officiellement annoncé sa suspension au début du mois de septembre 2002. De fait, le montant nominal des swaps conclus jusqu'à l'interruption du programme s'élève à 61,2 milliards d'euros seulement.

COMPARAISON DES TAUX SWAPS ENTRE 2001 ET 2004 (courbe euro)

Automne 2001

6 novembre 2002

28 octobre 2003

4 novembre 2004

Écart 2004/2003

2 ans

4,09%

3,32%

2,85%

2,57%

- 0,28%

5 ans

4,58%

4,08%

3,76%

3,25%

- 0,51%

10 ans

5,20%

4,74%

4,44%

3,96%

- 0,48%

30 ans

5,70%

5,16%

5,08%

4,59%

- 0,49%

Source : AFT, CDC Ixis (Chronique des marchés, 4 novembre 2004)

La reprise du programme de swaps - qui n'est pas remise en cause dans son principe - est conditionnée à une normalisation des conditions de marché qui donnerait une incitation supplémentaire à l'arbitrage financier entre le paiement d'un taux long et celui d'un taux à moyen terme.

· Les dépenses et recettes résultant des opérations sur instruments financiers à terme sont retracées sur le compte de commerce n° 904-22 intitulé « Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'État », créé par l'article 8 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000. Jusqu'ici, l'Agence France Trésor n'a conclu que des swaps de taux d'intérêt.

Le programme de swaps a été engagé au dernier trimestre de l'année 2001, pour un montant nominal de 37,2 milliards d'euros et poursuivi en février et juillet 2002, pour 24 milliards d'euros supplémentaires. Les dépenses et les recettes résultant d'un swap ne sont constatées qu'après la conclusion du contrat, tous les six mois. De ce fait, les recettes et dépenses enregistrées sur le compte de commerce ont été nulles en 2001 mais ont commencé à impacter le compte à partir du second trimestre de l'année 2002.

Le solde du compte de commerce a été positif de 155,4 millions d'euros en 2002, au lieu des 200 millions d'euros prévus dans la loi de finances initiale, en raison de la suspension du programme à partir de l'été. En 2003, un solde positif de 235 millions d'euros a été constaté. Il progresserait à 290 millions d'euros en 2004 puis 347 millions d'euros en 2005.

D.- LES INSTRUMENTS DE GESTION DE LA TRÉSORERIE

Selon les informations communiquées par l'Agence France Trésor, depuis le 1er janvier 2000, la trésorerie est gérée selon les principes suivants :

- les besoins de financement infra-annuels sont couverts par les émissions hebdomadaires de BTF, les besoins à un an et à 3 mois étant évalués chaque semaine à partir des informations communiquées à l'Agence. Les BTF sont utilisés, notamment, pour « préfinancer » l'amortissement des lignes d'OAT et de BTAN. Les BTF ont également vocation à assurer le « bouclage » du financement de l'État pour tenir compte des conditions d'exécution des lois de finances et de l'évolution des autres ressources courtes du Trésor ;

- les besoins infra-hebdomadaires de trésorerie sont couverts par la mise en pension de titres d'État (si celui-ci en dispose à la suite d'opérations de prise en pension) ou, le plus souvent, par des emprunts « en blanc » sur le marché interbancaire ou auprès d'États membres de la zone euro ;

- les excédents ponctuels de trésorerie sont placés sur le marché interbancaire ou auprès d'États membres de la zone euro, dans le cadre de prêts « en blanc » pour des maturités très courtes (de un à quelques jours) et par des prises en pension de titres d'État pour des maturités plus longues (de l'ordre de la semaine). Des rachats de titres d'État dans les mois précédant leur amortissement sont également réalisés.

1.- Les opérations de pension de titres conduites par l'AFT

· Depuis 1995, le placement des liquidités de l'État tire bénéfice du développement des opérations temporaires sur titres, notamment de la pension livrée. Les avantages de la pension livrée sur les prêts-emprunts en blanc en termes de sécurité financière ont amené à l'encadrer par un véritable statut juridique en 1994 (9), alors que les opérations de pension étaient auparavant régies par une simple convention de place.

La clarification du régime juridique de la pension a conduit à un essor considérable des échanges temporaires de titres et espèces effectués dans ce cadre. Le montant mensuel des pensions à taux fixe traitées par les SVT, qui s'élevait à 100 milliards d'euros au milieu de 1994, a atteint environ 300 milliards d'euros en décembre 1994. Le cap des 500 milliards d'euros mensuels a été franchi en août 1995. Après, la tendance se révèle irrégulière, certains mois étant l'occasion d'échanges soutenus, jusqu'à 600 milliards d'euros, d'autres enregistrant une baisse à 400 milliards d'euros.

Après un record absolu au mois de septembre 1998, où les opérations de pension ont porté sur plus de 750 milliards d'euros, les transactions se sont repliées jusqu'au premier semestre de l'année 2000, où elles ont parfois atteint 150 milliards d'euros seulement. Depuis cette date, les transactions mensuelles oscillent entre 150 et 300 milliards d'euros.

TRANSACTIONS MENSUELLES SUR PENSIONS À TAUX FIXE DES SVT

(en milliards d'euros)

graphique

Source : Agence France Trésor.

Le Trésor est lui-même un intervenant usuel sur le marché de la pension livrée. Il utilise cet outil pour réguler sa trésorerie et lisser le niveau de son compte courant auprès de la Banque de France, en s'efforçant de placer ses liquidités à un taux supérieur à celui offert par la Banque.

L'encours des titres pris en pension en fin de mois est publié dans l'arrêté mensuel récapitulatif des émissions de valeurs du Trésor, publié au Journal officiel, ainsi que l'encours moyen pendant le mois. Toutes ces pensions s'effectuent à taux fixe. En 1997, le Trésor a réalisé 280 opérations de pension livrée, pour un volume total d'opérations égal à 235,87 milliards d'euros. En 1998, 296 opérations ont porté sur 260,58 milliards d'euros. En 1999, le Trésor a réalisé 282 opérations, pour un montant total de 373,46 milliards d'euros.

En 2000, le montant total des pensions inscrit dans le compte général de l'administration des finances s'élève à 321,71 milliards d'euros. Le repli du volume des pensions effectuées par le Trésor résulte du transfert des placements du Trésor vers les formes plus rémunératrices et plus souples que sont les prêts en blanc sur le marché interbancaire et les dépôts auprès des États de la zone euro, évoqué ci-après. En 2001, l'activité du Trésor a une nouvelle fois reflué, puisque les opérations de pension ont porté sur 312,06 milliards d'euros. L'année 2002 a vu un renversement de tendance : les prises en pension ont généré des flux de 572 milliards d'euros. La mise en œuvre des pensions sur titres s'est encore intensifiée en 2003, puisque ces opérations ont généré des flux entrants et sortants de 942,3 milliards d'euros.

· Les opérations de pension permettent au Trésor de percevoir des intérêts sur les liquidités qu'il fournit à ses contreparties en échange de la conservation de leurs titres pendant la durée spécifiée de la pension.

Réciproquement, en cas de décalage entre la prévision d'encaisse sur son compte courant à la Banque de France et sa réalisation effective, le Trésor peut être amené à se procurer des liquidités, de façon ponctuelle et très exceptionnelle, en mettant en pension des titres qu'il détient. Cette situation est rare car les méthodes de prévision de son encaisse par le Trésor sont très fiables. Par ailleurs, le Trésor n'étant pas habilité à détenir un « fonds de portefeuille » de titres publics, la mise en pension ne peut que reposer sur la mobilisation de titres auparavant pris en pension par le Trésor auprès des SVT. De façon symétrique à l'encaissement d'intérêts sur les prises en pension, le Trésor paie des intérêts à ses contreparties sur les titres mis par lui en pension auprès d'elles.

RECETTES ET DÉPENSES RÉSULTANT DES OPÉRATIONS DE PENSION

(en millions d'euros)

Année

Intérêts perçus

Intérêts payés

Frais de gestion

Solde

1996

+ 290,42

0,00

- 4,24

+ 286,18

1997

+ 327,61

- 0,17

- 4,44

+ 323,02

1998

+ 419,46

- 1,48

- 6,57

+ 411,41

1999

+ 423,79

0,00

- 5,08

+ 418,72

2000

+ 362,22

- 0,95

- 8,36

+ 352,91

2001

+ 216,35

- 0,05

- 4,81

+ 211,49

2002

+ 382,50

- 0,12

- 4,42

+ 377,95

2003

+ 619,42

- 0,10

- 5,42

+ 613,90

L'ensemble de ces opérations génère des frais de gestion, dus à Euroclear France au titre de la gestion des OAT et BTAN sur le compte ouvert dans ses livres par le Trésor. Le solde des ressources et charges afférentes aux pensions est très largement positif et vient donc en atténuation des charges de la dette de l'État.

L'efficacité remarquable du marché de la pension livrée est désormais avérée : un seul incident sérieux a été enregistré, en décembre 1996, par défaut de livraison des titres dus par une contrepartie. Selon les informations fournies par la direction du Trésor à votre Rapporteur spécial, aucun autre incident sérieux n'a eu lieu depuis cette date. En particulier, la transition monétaire entre le franc et l'euro, au cours du premier week-end de janvier 1999, puis le passage à l'an 2000 se sont déroulés sans problème.

2.- L'essor des opérations interbancaires ou avec d'autres États membres de la zone euro

La loi de finances initiale pour 2000 a autorisé le Trésor à effectuer des dépôts sur le marché interbancaire de la zone euro ou auprès d'États de cette même zone. Ces opérations sont réalisées par adjudication auprès des SVT et des États avec lesquels l'État a conclu une convention de prêts. Il s'agit de la Belgique, des Pays-Bas et de la Finlande. Elles respectent une procédure de limites, qui fixe le montant maximum susceptible d'être prêté à la contrepartie.

ENCOURS MOYEN MENSUEL DES PLACEMENTS DE TRÉSORERIE DE L'ÉTAT

(en milliards d'euros)

graphique

Source : arrêtés mensuels récapitulatifs des émissions de valeurs du Trésor.

L'encours en fin de mois et l'encours moyen sur le mois des dépôts interbancaires et des dépôts auprès d'autres États membres de la zone euro est publié chaque mois dans les arrêtés récapitulatifs relatifs aux émissions des valeurs du Trésor. Aucun emprunt n'a été effectué auprès d'un Trésor étranger en 2002 ou 2003 et à la dernière date connue de 2004.

Les volumes concernés par les opérations de financement à court terme pendant une année sont retracés dans les comptes de l'État. La balance générale des comptes, annexée au projet de loi de règlement du budget 2003, montre que ces opérations atteignent des montants non négligeables.

DETTES RÉSULTANT DES OPÉRATIONS DE REFINANCEMENT À COURT TERME

(en millions d'euros)

compte

au 1/01/03

Débit

Crédit

au 31/12/03

Mises en pension de titres d'État

467.1

-

2.610,9

2.610,9

-

Emprunts interbancaires

467.2

-

3.940,0

3.940,0

-

Emprunts auprès des États de la zone euro

467.3

-

-

-

-

Source : Compte général de l'administration des finances, Balance générale des comptes 2003.

3.- La nécessité de surveiller le bon fonctionnement du marché

La gestion de la trésorerie de l'État est devenue de plus en plus sophistiquée et, de ce fait, tributaire du bon fonctionnement du marché financier. Votre Rapporteur spécial a exposé dans les développements antérieurs les actions entreprises par l'Agence France Trésor pour maîtriser les risques générés par ses activités. Par ailleurs, l'AFT exerce un rôle de « surveillance » du marché, afin de limiter les difficultés qui pourraient affecter les échanges portant sur les titres de sa dette et, par voie de conséquence, pourraient éroder la confiance dans ces titres - non pour leurs qualités intrinsèques (le « crédit de l'État ») mais pour leur rôle essentiel dans le fonctionnement quotidien des marchés, puisque les titres d'État, actifs sans risque, sont le moyen principal d'ajustement de la liquidité bancaire et financière en temps réel.

Depuis 2003, l'Agence France Trésor dispose d'un instrument rénové : la Caisse de la dette publique (CDP), créée par l'article 125 de la loi de finances initiale pour 2003 en remplacement du fonds de soutien des rentes et de la Caisse d'amortissement de la dette publique.

La CDP peut effectuer, sur les marchés financiers, toutes les opérations concourant à la qualité de la signature de l'État. Elle peut notamment acheter les titres émis par l'État, garantis par lui ou émis par des établissements ou des entreprises publics, en vue de leur conservation, de leur annulation ou de leur cession. Elle peut se voir attribuer tout titre de dette publique négociable émis par l'État dans le cadre de l'autorisation donnée chaque année à cette fin, par la loi de finances, au ministre chargé de l'économie. Elle est autorisée à prêter et à vendre ces titres. L'État peut accorder à la CDP des dotations, des prêts ou avances budgétaires ainsi que des avances de trésorerie.

La Caisse de la dette publique est intervenue pour la première fois en 2003. L'OATi 2,5% juillet 2013 a été créée par adjudication le 6 février 2003. Entre l'annonce de la création et la tenue de l'adjudication, les SVT en ont collectivement placé auprès des investisseurs de telles quantités que le montant adjugé a été absorbé, laissant un flottant insuffisant pour assurer la liquidité. Moins de deux semaines plus tard, des défauts de livraison ont commencé à se déclarer pour des tailles significatives sur le marché de la pension livrée, la perspective du défaut dissuadant les détenteurs de prêter leurs titres.

L'AFT a donc été conduite à activer la Caisse de la dette publique. Une réserve de titres d'un milliard d'euros a été créée, qui a été mise à la disposition des SVT, à un coût qui rendait indifférent le fait de faire défaut ou d'honorer ses engagements. La CDP a prêté 820 millions d'euros en cumulé pendant la durée de la facilité, montant assez faible mais qui a permis de rendre son efficience au marché, en « décrispant » les prêteurs potentiels. Lors de l'adjudication suivante, l'OATi 2,5% juillet 2013 a été abondée, ce qui a augmenté l'encours disponible. Il n'a pas été constaté de tension depuis lors, c'est pourquoi les titres qui avaient été avancés à la CDP ont, depuis, été annulés.

III.- LE RETOUR DE LA CHARGE DE LA DETTE SUR UN SENTIER DE CROISSANCE PLUS SOUTENU

Le budget des Charges communes proposé pour 2005 confirme que la charge nette de la dette augmente désormais à un rythme tendanciel plus modéré qu'au début des années 1990, mais qui reste pourtant soutenu.

Sur le long terme, la modération de la charge de la dette reste largement conditionnée à une poursuite de la réduction du déficit budgétaire. En effet, au fur et à mesure que se renouvelle le stock de dette, son taux effectif moyen diminue et se rapproche de celui observé sur le marché. L'« effet taux » favorable dont bénéficient les finances de l'État depuis plusieurs années s'estompe peu à peu.

A.- DES HYPOTHÈSES DE TAUX D'INTÉRÊT QUI REFLÈTENT LE « POINT BAS » ATTEINT EN 2004

1.- Les hypothèses de taux associées au projet de loi de finances pour 2005

Conformément à une tradition désormais établie, le Gouvernement a choisi de retenir pour référence de taux le « consensus de marché » constaté pendant l'été 2004, moyenne des prévisions des principaux intervenants sur le marché obligataire. Cette méthode a l'avantage de fonder les hypothèses de taux sur des évaluations en phase avec le sentiment des opérateurs.

Elle peut contribuer à éviter les erreurs d'appréciation qui entachaient inévitablement les évaluations à caractère normatif affichées avant 1996. Dans le projet de loi de finances pour 1996, le choix avait été fait, pour la première fois, de s'éloigner de cette approche normative, pour retenir le niveau des taux constaté en septembre 1995. Le recours au « consensus de marché », s'il ne peut bien sûr prétendre à l'infaillibilité, donne cependant plus de garantie.

HYPOTHÈSES DE TAUX D'INTÉRÊT MOYENS PONDÉRÉS DANS LE PLF 2005

Court terme
(BTF 3 mois)

Moyen terme
(BTAN)

Long terme
(OAT 10 ans)

2004

-

2,9%

4,0%

2005

2,4%

-

-

Source : Agence France Trésor.

Les hypothèses présentées dans le tableau ci-avant ne constituent pas une prévision des choix à venir en matière de politique monétaire, et ne sauraient être interprétées comme une anticipation officielle de l'évolution des taux.

L'intérêt des bons du Trésor à court terme étant précompté, le taux le plus approprié pour déterminer la charge de la dette y afférente en 2005 est le taux à court terme prévu pour l'année 2005.

graphique

Graphique établi d'après les données contenues dans les arrêtés mensuels récapitulatifs des émissions de valeurs du Trésor.

En revanche, pour les titres émis à moyen et long terme, la technique d'assimilation impose de percevoir, à l'émission, le montant du coupon couru depuis la date de versement du coupon précédent. Ainsi, les émissions de référence changeant tous les six mois, la charge brute des émissions d'une année est compensée à hauteur des trois quarts, environ, par les recettes de coupons courus encaissées cette même année.

Dans ces conditions, la charge nette de la dette à moyen et long terme dépend, pour l'essentiel, du niveau des taux d'intérêt servis sur l'encours à moyen et long terme de l'année précédente.

Pour les taux à moyen et long terme, le meilleur accord entre prévision et réalisation découle, évidemment, du fait que la prévision est formulée pendant l'été de l'année concernée, donc bénéficie d'un acquis portant sur un semestre.

2.- Les perspectives d'évolution des taux d'intérêt

L'hypothèse de taux à court terme retenue pour l'année 2005 marque une légère hausse par rapport à l'hypothèse sur laquelle est fondée la loi de finances initiale pour 2004. Après un minimum observé en avril 2004, les taux à l'émission constatés sur les BTF à 3 mois se sont stabilisés autour de 2%, niveau constaté depuis le second semestre 2003.

· Le prix très peu élevé des liquidités à court terme en 2003 et 2004 a reflété la politique monétaire du Système européen de banques centrales (SEBC). Dans un contexte de faibles pressions inflationnistes, les perspectives de croissance ont été considérées comme trop fragiles pour engager en 2003 ou 2004 un relèvement des taux directeurs : depuis juin 2003, le taux principal de refinancement est fixé à 2%.

graphique

graphique

Graphiques établis d'après les données contenues dans les arrêtés mensuels récapitulatifs des émissions de valeurs du Trésor.

Lors de la réunion du 4 novembre 2004, le Conseil des gouverneurs de la BCE a décidé de ne pas modifier ses taux directeurs, le taux principal de refinancement restant fixé à 2% et les taux de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt restant également inchangés à 3% et 1%, respectivement. En effet, pour le Conseil des gouverneurs, les perspectives globales demeurent conformes à la stabilité des prix à moyen terme.

Les informations disponibles signalent une poursuite de la reprise économique dans la zone euro. Les enquêtes effectuées jusqu'en septembre font état d'un maintien de la croissance de la production industrielle et dans le secteur des services. De plus, le retour progressif de la confiance des consommateurs se confirme et « des signes d'amélioration des perspectives de l'emploi sont perceptibles », bien que les indicateurs disponibles relatifs aux dépenses des ménages n'aillent pas encore dans le sens d'une accélération immédiate de la croissance de la consommation. Dans l'ensemble, « le rythme de croissance observé dans la zone euro au premier semestre 2004 devrait globalement se maintenir au cours des prochains trimestres ».

En ce qui concerne les prix à la consommation, l'évolution des marchés pétroliers a eu une incidence directe sur l'indice des prix harmonisé de la zone euro. Après une hausse des prix de 1,7% en rythme annuel au premier trimestre 2004, l'inflation a atteint 2,3% aux deuxième et troisième trimestres. Les perspectives pour octobre donnée dans l'estimation préliminaire d'Eurostat (2,5%) ont été jugées « inquiétantes » par M. Jean-Claude Trichet, président de la BCE. Il semble peu probable que le taux d'inflation annuel revienne au-dessous de 2% d'ici la fin de l'année. À plus long terme, cependant, les informations disponibles n'indiquent pas un renforcement des tensions inflationnistes sous-jacentes dans la zone euro. L'évolution récente des salaires est restée modérée, et cette tendance devrait se poursuivre. « A condition qu'aucun nouveau choc important n'affecte les prix, le rythme annuel d'inflation devrait revenir en deçà de 2% en 2005 ».

La liquidité dans la zone euro demeure « nettement supérieure au niveau nécessaire au financement d'une croissance non inflationniste ». Cet excès de liquidité résulte principalement d'arbitrages de portefeuille opérés antérieurement. « Si une part significative de ces avoirs devait être transformée en encaisses de transaction, notamment en période de raffermissement de la confiance et de l'activité économique, les risques inflationnistes se renforceraient. En outre, un excès de liquidité important et la forte croissance du crédit pourraient être à l'origine d'une vive hausse des prix des actifs ».

· Depuis 2003, en l'absence de reprise économique franche et généralisée, les anticipations des marchés financiers fluctuent selon le sentiment prévalant en matière de prévisions de croissance et d'inflation, sans méconnaître les facteurs géopolitiques qui échappent en grande partie à l'appréciation économique. Lorsque les marchés se plaisent à espérer en une reprise ou lorsqu'ils craignent une remontée de l'inflation, les anticipations de taux d'intérêt se redressent. Lorsqu'au contraire, leurs espoirs s'érodent parce que la reprise paraît plus fragile et que les indicateurs réels ne montrent pas de signe de retournement, alors les conditions de financement deviennent plus accommodantes. Parallèlement, le degré plus ou moins élevé d'aversion pour le risque provoque des mouvements de bascule entre les flux financiers dirigés vers les marchés d'actions et ceux dirigés vers les marchés obligataires.

Vu l'état hésitant de la conjoncture économique au sein de la zone euro, le consensus des économistes conserve un profil très « mesuré » au regard de la remontée attendue des taux courts. Les anticipations de taux déduites des contrats à terme Euribor 3 mois se sont réduites : au début du mois d'octobre 2004, un niveau de 2,94% était attendu pour le mois de décembre 2005 ; il n'est plus que de 2,60% au début du mois de novembre (10). La courbe des taux anticipés suggère une augmentation mesurée jusqu'au troisième trimestre 2005, plus franche ensuite. Ainsi, le taux à 3 mois, égal à 2,16% au comptant, pourrait passer à 2,18% en décembre 2004, 2,27% en mars 2005, 2,36% en juin 2005, 2,46% en septembre 2005 puis 2,6% en décembre 2005.

Après s'être sensiblement tendus entre mars et juin 2004, sur le fondement d'une réappréciation positive des perspectives de croissance de la zone euro, les taux à 10 ans se sont progressivement repliés et sont revenus aux environs de 4%. En effet, l'économie européenne n'a pas semblé vouloir confirmer l'entrée dans une phase de franche reprise qui était espérée auparavant, et l'augmentation des prix du pétrole a été vue comme devant peser sur la croissance (ce qui conduit à une diminution des taux d'intérêt) plus que comme devant aggraver l'inflation (ce qui amène les taux à augmenter).

TAUX D'INTÉRÊT À 10 ANS EN FRANCE ET AUX ÉTATS-UNIS

graphique

Source : Banque de France, Bulletin, octobre 2004

Le consensus des économistes (octobre 2004) prévoit une correction obligataire sur les titres américains, sur la base d'une consolidation de la croissance et d'un repli progressif de la politique accommodante mise en œuvre jusqu'ici par la Réserve fédérale. Pour l'Europe, le consensus table sur une remontée des taux d'intérêt atténuée (4,6% en octobre 2005), les mêmes facteurs étant moins intenses qu'aux États-Unis.

En tout état de cause, les taux longs ne devraient pas connaître de forts décalages à la hausse tant que l'horizon économique de la zone euro ne sera pas durablement éclairci. De plus, les contraintes imposées aux finances publiques par le pacte de stabilité - qui limite la capacité de réaction de la politique budgétaire à un simple « accompagnement » du repli de la croissance, grâce aux stabilisateurs automatiques - devraient rassurer les marchés dans leurs anticipations d'inflation à moyen terme.

B.- LA CHARGE DE LA DETTE PROGRESSERAIT DE 3,1% PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2004

Avec 42,4 milliards d'euros de crédits bruts, 2,5 milliards d'euros de recettes d'ordre et un solde positif des opérations de swaps évalué à 347 millions d'euros, la charge nette de la dette s'établirait en 2005 à 39,5 milliards d'euros. Elle augmenterait de 1,2 milliard d'euros (soit 3,1%) par rapport à la loi de finances initiale pour 2004.

Le projet de loi de finances pour 2005 confirme la rupture qui est apparue, depuis 1997, dans le rythme de progression de la charge de la dette de l'État. Alors que, depuis le début des années 1990, cette charge augmentait chaque année d'environ 3 milliards d'euros (11), un ralentissement est apparu dès 1996, avec une augmentation limitée à 2 milliards d'euros.

En fait, indépendamment des inévitables fluctuations qui font dévier les résultats annuels de leur tendance de moyen terme, les finances de l'État ont largement profité de la baisse des taux, qui a allégé peu à peu la charge du stock de dette et a limité les charges découlant de l'endettement annuel supplémentaire.

1.- Le service de la dette négociable

Avec un montant de crédits demandés égal à 41,9 milliards d'euros, le service de la dette négociable représente 99% de la charge brute totale de la dette. La technique de l'assimilation utilisée pour les émissions de titres à moyen et long terme exige cependant de considérer de préférence la charge de la dette nette des recettes de coupons courus.

Celle-ci s'élèverait en 2005 à 39,9 milliards d'euros, progressant de 3,8% (1.452,3 millions d'euros) par rapport à l'évaluation initiale pour 2004.

CHARGE NETTE DE LA DETTE NÉGOCIABLE (titre I, première partie)

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

LFI 2004

PLF 2005

Charge brute de la dette négociable

38.136,45

39.286,25

39.377,69

40.510,1

41.921,40

à déduire : recettes sur coupon couru

2.110,97

2.052,48

1.767,04

2.074,0

2.033,00

Charge nette de la dette négociable

36.025,49

37.233,76

37.610,65

38.436,1

39.888,40

L'augmentation de l'hypothèse de taux d'intérêt servi sur les BTF se reflète imparfaitement dans l'évolution de la charge de la dette à court terme en 2005. En effet, la dotation proposée sur l'article 10 du chapitre 11-06 se monte à 2,39 milliards d'euros au lieu de 2,38 milliards d'euros en 2004. Cette charge d'intérêt correspond à un encours moyen de 99,7 milliards d'euros supportant le taux d'intérêt retenu comme hypothèse, c'est-à-dire 2,4%.

En fait, la charge réelle des BTF en 2004 devrait avoisiner 2,2 milliards d'euros, du fait de l'intervention de deux phénomènes de sens opposés : l'encours moyen des BTF, évalué à 113,3 milliards d'euros dans la loi de finances initiale pour 2004, devrait être ramené à 107 milliards d'euros ; le taux d'intérêt moyen sur l'année peut être évalué à 2,05% environ, alors que l'hypothèse de taux à court terme retenue en 2004 était de 2,1%.

Dans ces conditions, l'évolution prévue entre les paramètres estimés pour 2004 et prévus pour 2005 montre que :

- l'augmentation des taux d'intérêt entre 2004 (2,05%) et 2005 (2,4%), appliqué à l'encours moyen de BTF pendant l'année 2004, générerait une charge supplémentaire de 374,5 millions d'euros (« effet taux ») ;

- la diminution de l'encours moyen entre 2004 (107 milliards d'euros) et 2005 (99,7 milliards d'euros) générerait une économie de 176,2 millions d'euros (« effet volume »).

Il est possible de justifier de façon similaire l'économie ou l'aggravation de la charge budgétaire découlant de l'évolution simultanée des encours et des taux servis sur les BTAN et les OAT. Le refinancement de 36 milliards d'euros d'OAT et de 30,5 milliards d'euros de BTAN devrait permettre de constater une économie nette d'environ 1,2 milliard d'euros. En revanche l'augmentation de l'encours des OAT devrait générer une charge de 1,4 milliard d'euros, tandis que l'augmentation de l'encours des BTAN générerait une charge de 601 millions d'euros.

ÉVALUATION DE L'ÉVOLUTION DE LA CHARGE À MOYEN ET LONG TERME

(en milliards d'euros)

Montant

Charge

A.- Évaluation de l'effet taux

1. Titres échus en 2004

OAT (taux moyen constaté = 6,75%)

36,00

- 2,36

BTAN (taux moyen constaté = 3,71%)

30,47

- 1,13

Sous-total titres échus

66,48

- 3,49

2. Titres émis en contrepartie

OAT (hypothèse de taux = 4,00%)

36,00

+ 1,44

BTAN (hypothèse de taux = 2,90%)

30,47

+ 0,88

Sous-total titres émis

66,48

+ 2,32

3. Effet taux (2 - 1)

- 1,17

B.- Évaluation de l'effet volume

1. OAT émises hors amortissement (taux = 4,00%)

34,80

+ 1,39

2. BTAN émis hors amortissements (taux = 2,90%)

20,73

+ 0,60

3. Effet volume (1 + 2)

+ 1,99

Avec un montant total de 37,5 milliards d'euros, la charge nette de la dette négociable à moyen et long terme augmenterait de 1.439,5 millions d'euros par rapport à l'évaluation initiale pour 2004. Les intérêts nets d'OAT s'alourdiraient de 1.011,5 millions d'euros et les intérêts nets de BTAN de 428 millions d'euros.

CHARGE NETTE DE LA DETTE NÉGOCIABLE À MOYEN ET LONG TERME

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

LFI 2004

PLF 2005

A.- Service des emprunts d'État et des obligations assimilables du Trésor (OAT) (chapitre 11-05)

28.614,74

29.114,71

30.132,16

30.796,1

32.057,6

B.- Recettes de coupon couru sur OAT

1.227,55

1.272,46

1.207,70

1.386,0

1.636,0

C.- Charge nette des emprunts et OAT (A-B)

27.387,19

27.842,26

28.924,47

29.410,1

30.421,6

D.- Intérêts des bons du Trésor à taux fixes et intérêts annuels (BTAN) (chapitre 11-06, article 20)

7.386,26

7.629,93

6.806,59

7.335,0

7.472,0

E.- Recettes de coupon couru sur BTAN

883,42

780,03

559,35

688,0

397,0

F.- Charge nette des BTAN (D-E)

6.502,84

6.849,90

6.247,24

6.647,0

7.075,0

Total des charges brutes (A+D)

36.001,00

36.744,64

36.938,75

38.131,0

39.529,6

Total des recettes de coupon couru (B+E)

2.110,97

2.052,48

1.767,04

2.074,0

2.033,0

Total des charges nettes (C+F)

33.890,03

34.692,16

35.171,71

36.057,1

37.496,6

Source : direction du Trésor, direction générale de la comptabilité publique.

2.- Le service de la dette non négociable

Avec moins de 1% des dépenses enregistrées au titre de la charge de la dette, le service de la dette non négociable ne représente plus, en valeur absolue, que 349,4 millions d'euros.

· La dotation demandée au titre des comptes de dépôt au Trésor (chapitre 12-01, article 10) était évaluée à 137 millions d'euros dans la loi de finances pour 2004. Elle est fixée à 82,4 millions d'euros dans le présent projet compte tenu du léger recul envisagé pour le montant des dépôts des correspondants.

· La souscription des bons du Trésor auprès du public a été autorisée à l'occasion de la création des « bons de la Défense nationale » par arrêté du 13 septembre 1914. Depuis, des bons du Trésor à court terme ont été offerts à la clientèle privée sous des dénominations diverses, pour des durées variables (entre 1 an et 5 ans), et assortis de taux d'intérêt fixes ou variables.

Le décret n° 75-1288 du 30 décembre 1975 a autorisé l'émission de bons du Trésor à intérêt progressif, d'une durée maximale de 5 ans. Sauf dispositions contraires des décrets d'émission, ces bons ne pouvaient être souscrits par les banques, établissements financiers, sociétés d'assurance et de capitalisation et autres organismes soumis aux dispositions de l'ordonnance n° 45-679 du 13 avril 1945 relative au dépôt en compte courant des valeurs du Trésor à court terme. Le décret n° 86-843 du 11 juillet 1986 a réservé ces bons aux personnes physiques, aux associations, aux collectivités locales et à leurs établissements publics (sauf autorisation spécifique du ministre chargé des finances). Le décret n° 98-1206 du 28 décembre 1998 a mis fin à l'émission des bons du Trésor à intérêt progressif à compter du 1er janvier 1999.

Les bons peuvent être présentés au remboursement à tout moment à partir du 3ème mois qui suit leur date d'émission ; ils sont remboursés selon un barème trimestriel publié à l'émission. Les porteurs peuvent obtenir le remboursement des bons pendant trente ans à compter de leur date d'amortissement. Les intérêts sont payables en totalité lors du remboursement.

Les bons du Trésor à intérêt progressif voyaient traditionnellement leur encours décroître régulièrement. Entre 1993 et 1997, les taux servis sur ces bons sont devenus de plus en plus attractifs par rapport à la rémunération d'instruments similaires (12). De ce fait, les souscriptions se sont accrues à compter de 1995 et sont même devenues supérieures aux amortissements en 1997 et 1998, conduisant ainsi à une augmentation de l'encours total des bons à intérêt progressif en fin d'année. L'émission des bons étant est définitivement arrêtée depuis le 1er janvier 1999, l'encours décroît désormais inéluctablement.

L'ENCOURS DES BONS DU TRÉSOR À INTÉRÊT PROGRESSIF
ET SES FACTEURS DE VARIATION

(en millions d'euros)

graphique

Source : Compte de la dette publique, années 1990 à 2002

La charge d'intérêts pour 2004 est évaluée à 55 millions d'euros. Une dotation de 35 millions d'euros est demandée pour 2005. Cette évaluation paraît compatible avec un processus progressif de remboursement effectif.

· Les crédits du chapitre 12-03, article 10, concernent la rémunération des dépôts des instituts d'émission d'outre-mer et des banques centrales africaines de la zone franc, qui font partie des « correspondants du Trésor ».

¬ L'institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) et l'institut d'émission d'outre-mer (IEOM) effectuent les transferts publics et privés entre la métropole et les collectivités situées dans leur zone de compétence : les DOM et Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte (depuis 1999) pour l'IEDOM, les TOM pour l'IEOM. Depuis 1997, les crédits du paragraphe 11 de l'article 10 financent uniquement la rémunération du compte d'opérations de l'IEOM auprès du Trésor. Celui-ci applique un taux de rémunération de 8,5% sur une assiette égale à 60% du solde moyen de ce compte.

En 2003, la dépense s'est établie à 13,6 millions d'euros au lieu de 13 millions d'euros en 2002. La dépense devrait s'établir à 14,1 millions d'euros en 2004, compte tenu d'une légère progression de l'encours moyen du compte (+ 4,62%). Une hypothèse similaire ayant été reconduite pour 2004 (+ 1,2%), la dotation demandée s'élève à 14,3 millions d'euros.

¬ Le paragraphe 12 du même article retrace les crédits consacrés à la rémunération des dépôts de certaines banques centrales de la zone franc. L'accord de coopération monétaire entre la République française et les pays de la zone franc institue pour chacune des trois banques centrales un compte courant, intitulé « compte d'opérations » ouvert à l'agence comptable centrale du Trésor.

La libre convertibilité de la monnaie de chaque zone est assurée par le droit de tirage illimité dont dispose la banque centrale concernée sur son compte d'opérations, en cas d'épuisement de ses réserves en devises. En contrepartie de ce droit de tirage, les banques centrales sont tenues de déposer 65% au moins de leurs avoirs extérieurs nets (réserves de change) sur leur compte d'opérations.

Les soldes positifs de comptes d'opérations sont rémunérés par l'État sur une base trimestrielle, au taux de la facilité marginale de la Banque centrale européenne. Avant l'instauration de l'euro, le taux de rémunération était celui de la Banque de France pour les prises en pension de 5 à 10 jours.

La dévaluation du franc CFA en 1994 et les mesures d'allégement de la dette ont contribué à l'amélioration de la balance des paiements des États de la zone franc et à un redressement des disponibilités extérieures. Le niveau du compte dépend également de la politique de placement des banques centrales, puisque celles-ci ont la faculté, mais non l'obligation, de placer jusqu'à 35% de leurs disponibilités en devises hors du compte d'opérations.

La prévision pour 2005 est fondée sur un taux moyen de rémunération de 3% (taux actuel de la BCE) et sur la base d'un niveau moyen du compte d'opération des trois banques centrales égal à 7,1 milliards d'euros, stable par rapport à 2004. Au total, la charge d'intérêt prévue au titre des banques centrales de la zone franc est évaluée à 215,7 millions d'euros.

En définitive, les crédits demandés en 2005 sur l'article 10 s'établissent à 230 millions d'euros.

· Le chapitre 12-05 « Service de la dette de divers organismes, d'emprunts, d'annuités et d'intérêts divers » retrace les charges d'intérêt afférentes aux emprunts ou engagements pris en charge par l'État. Le remboursement du principal relève des opérations de trésorerie et n'apparaît donc pas dans le budget, en conformité avec les dispositions de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.

Après l'amortissement définitif, en 2000, de la dette reprise par l'État du Fonds spécial de grands travaux et de la Société de développement de véhicules automobiles, seule reste servie par l'État la dette reprise de la Société pour la mise en valeur agricole de la Corse (encours initial = 10,24 millions d'euros), qui génère une charge d'intérêt de 0,4 million d'euros seulement. L'amortissement définitif de cet engagement est prévu en 2015.

· Les dotations demandées pour couvrir les charges diverses résultant de la gestion de la dette et des frais de trésorerie, qui forment la 3ème partie du titre I, s'élèveraient en 2005 à 85 millions d'euros. L'évaluation proposée n'a pas de réelle signification puisque beaucoup de lignes ne sont dotées que pour mémoire dans la loi de finances initiale. Cependant, la dotation est représentative de la dépense réelle puisque celle-ci s'établit à 50 millions d'euros environ depuis 2000. L'essentiel des crédits initiaux se rapporte aux commissions de placement et de services financiers, en particulier pour toutes les OAT émises au profit des particuliers. La charge de ces commissions, versées aux établissements financiers, trouve sa contrepartie en recettes d'ordre, au titre des « recettes diverses » de la ligne 806.

3.- Une augmentation sensible des recettes d'ordre

Depuis la loi de finances pour 1995, la notion de « recettes d'ordre », au sens où l'entend le Gouvernement, recouvre trois catégories d'opérations :

- les recettes en atténuation des charges de la dette et des frais de trésorerie. En cohérence avec la présentation habituelle des dépenses hors FSC, ces recettes d'ordre sont elles aussi présentées hors FSC. Elles sont retracées à la ligne 806, tandis que les recettes en provenance du FSC sont isolées sur la ligne 817-02 depuis la loi de finances initiale pour 1997. Cette catégorie de recettes inclut les intérêts servis par les titres émis au profit du Fonds de soutien des rentes remplacé, depuis 2003, par la Caisse de la dette publique ;

- les intérêts versés par le Fonds de soutien des rentes ou la Caisse de la dette publique, au titre des avances que lui accorde l'État ; ces recettes sont inscrites à la ligne 411-02 depuis la loi de finances pour 1997 ;

- jusqu'en 1995, les « recettes d'ordre » incluaient également les intérêts des avances versées par le Trésor à l'ACOSS ; en effet, il était admis que les intérêts de ces avances venaient « directement » en atténuation des charges d'intérêt exposées par le Trésor au titre des BTF émis à cette occasion. La Cour des comptes a plusieurs fois contesté cette interprétation extensive de la notion de recettes d'ordre. Depuis la loi de finances pour 1997, les recettes au titre des intérêts d'avances à l'ACOSS ont vocation à figurer à la ligne 411 ; cependant, l'État n'a plus consenti d'avances à l'ACOSS depuis 1995.

ÉVOLUTION RÉCENTE DES RECETTES EN ATTÉNUATION DES CHARGES DE LA DETTE

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

LFI 2004

PLF 2005

I.- Ligne 806

graphique

graphique

Rémunération du compte du Trésor à la Banque de France (806-02)

34,33

15,65

4,06

315,0

460,0

Rémunérations des pensions sur titres d'État (806-05)

216,35

382,50

619,42

Coupons courus sur OAT (806-12)

1.227,55

1.272,46

1.207,70

1.386,0

1.636,0

Coupons courus sur BTAN (806-22)

883,42

780,03

559,35

688,0

397,0

Dépôts sur marché interbancaire

190,42

110,44

87,74

Dépôts chez États de la zone euro

14,76

16,64

27,36

Recettes du FSR (806-52)

8,06

6,67

0,11

-

-

Divers (806-15, 806-55, 806-82, 806-92)

35,32

29,77

13,91

15,0

15,0

Sous-total Ligne 806 (hors FSC)

2.610,12

2.614,14

2.519,64

2.404,0

2.508,0

II.- Intérêts d'avances FSR/CDP (ligne 411)

25,17

21,83

23,70

-

-

TOTAL Recettes d'ordre hors FSC

2.635,38

2.635,97

2.543,35

2.404,0

2.508,0

FSC (817 ; ligne 806-72 avant 1997)

12,14

1,32

0,28

-

-

TOTAL Recettes d'ordre y compris FSC

2.647,52

2.637,28

2.543,63

2.404,0

2.508,0

Sources : direction du budget et Situation du recouvrement des recettes de l'État au 31 décembre (direction générale de la comptabilité publique).

Les recettes d'ordre sont évaluées dans le projet de loi de finances pour 2005 à 2,5 milliards d'euros, soit 104 millions d'euros de plus que dans l'évaluation initiale pour 2004.

L'augmentation du taux à court terme (30 points de base) retenue à titre d'hypothèse dans le présent projet de loi de finances se reflète très bien dans l'augmentation attendue des recettes tirée de la rémunération de la trésorerie de l'État (compte du Trésor à la Banque de France, opérations de pension, prêts sur le marché monétaire, etc.). Votre Rapporteur spécial rappelle, cependant, que les recettes effectivement perçues dépendent largement des conditions générales d'exécution de la loi de finances, qui sont un déterminant essentiel du niveau des encaisses liquides du Trésor, et des opérations visant à préparer le refinancement de lignes importantes d'OAT et de BTAN arrivant à échéance.

Les recettes de coupon couru sont difficiles à évaluer ex ante. En particulier, selon la direction du Trésor, il n'est pas approprié de rapprocher le tableau de financement prévisionnel et les anticipations de taux. En effet, le volume des recettes de coupon couru résulte majoritairement de paramètres liés à la technique d'émission : dates d'adjudication, choix des lignes de titres et volumes d'émission assurés sur ces lignes.

C.- L'EFFET « BOULE DE NEIGE » SERAIT MOINS VIRULENT EN 2005

La forte croissance enregistrée à la fin de la décennie précédente a joué comme un euphorisant néfaste quant à l'appréciation de l'état réel des comptes publics en général et de ceux de l'État en particulier. Elle a fait croire, à tort, que la dynamique autonome de la dette (l'effet « boule de neige ») était enfin remise sous contrôle et elle a occulté le fait que le patrimoine net de l'État ne s'est pas accru à due concurrence de son endettement, ce qui traduit un appauvrissement de l'institution publique.

L'endettement public n'est pas une fatalité ni une charge nécessairement improductive qui pèserait sur les capacités de production de la Nation. La théorie de la « règle d'or » des finances publiques affirme, par exemple, que le déficit public n'introduit pas de distorsions et reste supportable s'il est inférieur au montant de l'investissement public. Fondée sur la méfiance vis-à-vis du processus même de l'endettement, elle en reconnaît pourtant la légitimité dès lors qu'il constitue la contrepartie d'une augmentation du patrimoine de la collectivité endettée. Chacun sait, cependant, que le processus réel d'endettement des deux dernières décennies s'écarte largement des conditions, supposées idéales, définies par la « règle d'or »...

Au demeurant, la « règle d'or » n'est pas par elle-même une garantie de saine gestion des finances publiques. Si, par exemple, le coût de la dette est structurellement supérieur au revenu tiré des actifs acquis par endettement, la situation patrimoniale de la collectivité est en fait dégradée. Or, c'est justement le propre des investissements publics de créer des « externalités », qui bénéficient à l'ensemble des agents privés et publics mais ont des « taux de retour » directs très faibles pour la collectivité qui réalise ces investissements. Considéré du point de vue de cette collectivité, l'investissement est, en règle générale, une dépense monétaire qui génère d'autres dépenses monétaires (entretien, renouvellement, fonctionnement courant associé à l'investissement, etc.).

Par ailleurs, une règle rigide comme l'est la « règle d'or » occulte le débat nécessaire sur le niveau d'endettement optimal d'une collectivité, du secteur public en général et d'une économie dans son ensemble. Les économistes discutent de façon récurrente de l'effet de l'endettement public sur les marchés financiers, les uns estimant que l'excès d'endettement crée un « effet d'éviction » vis-à-vis des titres privés, les autres indiquant que le marché des titres publics est un élément indispensable de la liquidité générale, du bon fonctionnement des marchés et d'une formation efficace des prix des actifs financiers.

Par ailleurs, il est clair qu'une économie qui connaît des taux de croissance suffisamment élevés peut absorber sans dommage l'augmentation de la dette, dès lors que la dynamique de l'endettement reste maîtrisée.

Cependant, il est des situations où la dette peut devenir « proliférante ».

A l'évidence, le ratio d'endettement reste stable dès lors que l'encours de la dette s'accroît au même rythme que le PIB en valeur. Or, sous réserve de la non prise en compte des flux nets de dettes, la variation de la dette découle directement du déficit budgétaire. Celui-ci peut se décomposer en deux parties : d'une part, la charge des intérêts de la dette et, d'autre part, le solde budgétaire dit « primaire » qui est justement défini comme la différence entre le solde total et la charge d'intérêt. Celle-ci peut être calculée en appliquant à l'encours de dette un taux d'intérêt représentatif de son coût moyen, appelé « taux apparent » de la dette.

Il apparaît que, si le taux apparent de la dette est supérieur au taux de croissance en valeur du PIB, la proportion de la dette dans le PIB s'accroît même en présence d'un solde primaire nul : c'est l'effet « boule de neige ». Stabiliser la dette nécessite alors de dégager un solde primaire positif.

Le niveau du solde primaire qui permet de stabiliser le ratio dette / PIB dépend de trois paramètres : le taux de croissance du PIB (r), le coût moyen de la dette (d) et le montant de la dette (de l'année précédente). L'effort budgétaire qu'il convient d'accomplir doit tendre à égaliser le coût moyen de la dette et le taux de croissance du PIB en valeur. Le solde primaire stabilisant est donc déterminé par l'application à l'encours de dette existant du différentiel d - r. Si le solde primaire effectif est inférieur au solde primaire stabilisant, le poids relatif de la dette dans le PIB s'accroît mécaniquement. Si, au contraire, le solde primaire effectif est supérieur au solde primaire stabilisant, la dette devient maîtrisée : sa part dans le PIB se réduira. Il en est de même de la comparaison entre solde effectif et solde stabilisant.

Comme cela était prévisible, l'effort budgétaire à fournir est d'autant plus important que le pays est endetté et que le taux de croissance est faible. Inversement, une accélération de la croissance exerce un effet stabilisateur plus important pour un pays très endetté que pour un pays peu endetté.

Au plus fort de la récession, en 1993, il aurait fallu réduire le déficit à 9,5 milliards d'euros seulement pour stabiliser le poids de la dette de l'État dans le PIB ; le déficit effectif a atteint 48,6 milliards d'euros... L'amélioration de la conjoncture économique obtenue ensuite, grâce à l'action des Gouvernements de l'époque, a permis d'abaisser le montant du solde stabilisant : il s'est établi aux environs de 20 milliards d'euros de 1994 à 1996. Cependant, le déficit effectif s'est maintenu entre 44 et 53 milliards d'euros.

La dynamique de la croissance observée entre 1997 et 2000 a réduit considérablement l'effort apparent à consentir pour la maîtrise de l'endettement : en 2000, il suffisait d'un déficit de 34,6 milliards d'euros pour stabiliser la dette. Comme le déficit effectif s'est établi à 28,5 milliards d'euros (en gestion), le poids de la dette a, en fait, reculé pour la première fois depuis 1989.

Mais les premiers effets du ralentissement économique et l'incapacité du Gouvernement précédent à endiguer durablement la croissance des dépenses ont, dès 2001, entraîné solde effectif et solde stabilisant sur des trajectoires divergentes et rétabli un écart significatif entre eux deux. Alors qu'il aurait fallu ramener le déficit à 29,7 milliards d'euros pour stabiliser le poids de la dette, celui-ci s'est en fait établi à 39,3 milliards d'euros (en gestion).

SOLDE STABILISANT ET SOLDE EFFECTIF DEPUIS 1986

graphique

Source : Comptes nationaux (juillet 2004) et documents budgétaires

Les années 2002 et 2003 ont vu les finances de l'État affectées par un redoutable effet de ciseau : la chute de la croissance a fortement aggravé la contrainte posée en termes de solde stabilisant, qui est remonté à 18,4 milliards d'euros en 2003 ; les pertes de recettes ont porté le déficit effectif à 57 milliards d'euros (en gestion) en 2003.

Dès 2004, la stratégie économique et budgétaire du Gouvernement a commencé à porter ses fruits : le taux d'intérêt implicite sur l'ensemble de la dette devrait revenir de 4,9% à 4,6%, réduisant ainsi le coût moyen de l'endettement ; le retour de la croissance serait plus vif qu'anticipé en loi de finances initiale, puisque celle-ci a été construite sur une hypothèse de croissance de 1,7% alors que le rythme d'augmentation du PIB devrait s'établir à 2,5%. En conséquence, le niveau du déficit nécessaire pour stabiliser la dette doit être abaissé à 39,8 milliards d'euros. La reconduction de ces hypothèses en 2005 porterait le solde stabilisant à 40,8 milliards d'euros. Dans le même temps, les choix budgétaires pertinents retenus dès l'origine par le Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin permettront de ramener le déficit effectif à 49,1 milliards d'euros en 2004 et 44,9 milliards d'euros en 2005.

L'effet « boule de neige » n'est donc pas encore surmonté. Il revient à la majorité de persévérer dans l'effort, pour qu'enfin la dynamique implacable de l'endettement soit remise sous contrôle.

1 () « projet annuel de performance », annexe explicative du projet de loi de finances, dont la publication est prévue par l'article 51 de la LOLF.

2 () Cour des comptes, L'exécution des lois de finances pour l'année 1999, juin 2000 (p. 276) ; L'exécution des lois de finances pour l'année 2000, juin 2001 (p. 143).

3 () On peut citer, par exemple : le volume des transactions sur le marché secondaire de la dette, l'articulation du marché des titres avec un marché de produits dérivés performant et actif, l'écart entre cours vendeur et cours acheteur pour les transactions sur titres publics, la volatilité des cours, etc. Tous ces éléments donnent des informations sur la capacité du marché à absorber un volume important d'achats ou de ventes sans décalage sensible des cours, ce qui est la définition de la liquidité (possibilité de réaliser des transactions sans risque en capital).

4 () Encours déterminés au 30 septembre 2004 ; source : Bulletin mensuel de l'Agence France Trésor.

5 () La duration d'une obligation est la valeur moyenne, exprimée en année, des flux (coupons et remboursement du principal) actualisés au taux du marché et pondérés par leur durée. La duration permet de mesurer la rapidité avec laquelle l'investisseur « récupère » son capital et de comparer, à cet égard, des titres de caractéristiques différentes (taux d'intérêt, échéance, remboursement in fine ou par tranche, remboursement au pair ou avec une prime, etc.).

6 () Les offres « non concurrentielles » s'entendent des offres qui sont présentées par les SVT en dehors de la procédure d'adjudication, en fin de séance. Ne participant pas au processus concurrentiel de détermination du prix des titres placés par le Trésor, elles interviennent en surnombre du volume plafond d'émission annoncé par celui-ci et sont servies au taux moyen pondéré des titres de même nature qui résulte de l'adjudication achevée.

7 () Ce déficit étant mesuré y compris opérations avec le FMI.

8 () Estimation effectuée à partir des données publiées par la Banque des règlements internationaux dans sa publication trimestrielle Activité bancaire et financière internationale (juin 2004).

9 () Cette clarification du régime juridique a été opérée par la loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l'assurance, au crédit et aux marchés financiers. Les dispositions principales de cette loi sont désormais codifiées dans le Code monétaire et financier, pour ce qui concerne les pensions livrées.

10 () Source : Ixis CIB, Chronique des marchés (4 octobre et 4 novembre 2004).

11 () A l'exception notable de l'année 1993, où la charge nette de la dette ne s'était accrue que de 365 millions d'euros, grâce au niveau très élevé des recettes d'ordre : 840 millions d'euros d'intérêts d'avances, 365 millions d'euros représentant un résultat excédentaire du Fonds de soutien des rentes et 2,4 milliards d'euros de recettes de coupons courus.

12 () Du 15 juillet 1993 au 31 mai 1997, les taux de rendement actuariel brut s'établissaient à 4% à l'issue d'un délai de détention des bons d'un an, 4,5% au bout de 2 ans, 5% au bout de 3 ans, 5,5% au bout de 4 ans et 6% au bout de 5 ans.


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