N° 2570 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005 AVIS PRÉSENTÉ AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2006 (n° 2540), TOME XIII TRANSPORTS SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES PAR M. JEAN-Yves BESSELAT Député. -- Voir le numéro : 2568 (annexe 38). INTRODUCTION 5 I.- AU-DELÀ D'UNE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE ÉCLATÉE, LES CRÉDITS ESSENTIELS DESTINÉS AU MONDE MARITIME ONT ÉTÉ PRÉSERVÉS 7 A.- LA MISE EN œUVRE CRITICABLE DE LA LOI ORGANIQUE DANS LE DOMAINE DES AFFAIRES MARITIMES 7 1. L'éclatement des crédits destinés à la mer nuit à leur compréhension 7 a) Les crédits de l'ENIM sont transférés dans la mission « Régimes sociaux et de retraite » 7 b) Une perte de lisibilité des implications terrestres de la politique maritime 8 2. Une application incomplète des principes de la loi organique 9 a) Les « objectifs » retenus pour ce programme pourraient être moins nombreux et mieux hiérarchisés 9 b) Les « actions » retenues polarisent les interventions du ministère sur la réorganisation administrative 10 B.- LES CRÉDITS DESTINÉS À LA MER SERONT GLOBALEMENT STABILISÉS EN 2006 11 1. A périmètre constant, le budget de la mer augmente si l'on prend en compte certains facteurs conjoncturels 12 2. En utilisant la nouvelle nomenclature, les crédits destinés à la sécurité et aux affaires maritimes augmentent significativement 13 II.- DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE DIFFICILE, L'ÉTAT GARANTIT LA QUALITÉ DE SON ACTION EN FAVEUR DES GENS DE MER 15 A.- L'ACTION SOCIALE EN FAVEUR DES MARINS RESTE UNE PRIORITÉ BUDGÉTAIRE 15 1. La poursuite de la clarification du financement de l'ENIM 15 2. La stabilisation des crédits destinés aux marins abandonnés 18 B.- LA FORMATION MARITIME AU CœUR DE L'ACTION DE L'ÉTAT EN FAVEUR DE LA MER 18 III.- LA SÉCURITÉ MARITIME DOIT RESTER LA PRIORITÉ DU GOUVERNEMENT 20 A.- LES LEÇONS DES CATASTROPHES MARITIMES RÉCENTES DOIVENT ÊTRE PRISES EN COMPTE 20 1. L'adaptation de la réglementation permettra de prévenir les risques 20 a) Au niveau national 22 b) Au niveau communautaire 24 c) Au niveau international 25 2. Le coût d'un naufrage doit engager le Gouvernement à renforcer sa politique de prévention 26 B.- LA MOBILISATION DES MOYENS NÉCESSAIRES PERMETTRA D'ÉVITER LES CATASTROPHES FUTURES 27 1. Les moyens destinés aux CROSS permettront de poursuivre le plan de modernisation des installations 28 2. Les moyens destinés à la signalisation maritime enregistrent une baisse conjoncturelle 30 3. Les crédits destinés au contrôle des navires et à la surveillance des affaires maritimes enregistrent des évolutions contrastées 31 a) Une baisse substantielle des crédits destinés au contrôle des navires 31 b) Une gestion par à-coups des crédits destinés à la surveillance des affaires maritimes 32 IV.- UNE ÉVOLUTION POSITIVE DES CRÉDITS DESTINÉS À LA MODERNISATION DES PORTS ET AU SOUTIEN À NOTRE FLOTTE DE COMMERCE 34 A.- LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DESTINÉS AUX PORTS DOIVENT ÊTRE CONFORTÉS 34 B.- ÉVITER LES FAUX DÉBATS POUR PRIVILÉGIER LES BONS OBJECTIFS PERMETTANT DE SOUTENIR LA FLOTTE DE COMMERCE 36 1. Le RIF et la SNCM ont occupé les débats sur le soutien à notre flotte de commerce 37 a) La mise en place du RIF 37 b) L'ouverture du capital de la SNCM a été menée en toute transparence 38 2. Les moyens destinés aux instruments fiscaux et sociaux de soutien à la flotte de commerce sont considérablement augmentés 39 a) Le dispositif des allègements de charges sociales 39 b) Les dispositifs d'allègement de charge fiscale 40 EXAMEN EN COMMISSION 45 MESDAMES, MESSIEURS, En 2005, le monde maritime français semble avoir été traversé par une certaine effervescence. La forte croissance du trafic maritime mondial - de l'ordre de 8 % par an, sans variation conjoncturelle majeure - fait naître des espoirs importants du côté des personnels navigants, des jeunes en formation et, plus généralement, du monde de l'économie maritime. Le vote, par le Parlement, de la loi du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français, a été une occasion inédite de confronter et de chercher à harmoniser les craintes des uns et les espoirs des autres. Dans la lignée de cette loi fondatrice, le présent projet de budget réussira-t-il également à concilier des attentes aussi différentes ? La réponse à cette question est rendue difficile cette année du fait de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. Une mise en œuvre relativement critiquable de ses dispositions a conduit à éclater la présentation des crédits de la mer entre plusieurs missions et programmes. Il reviendra à votre rapporteur le soin de ne pas se limiter à contrôler la pertinence de l'affectation des crédits destinés à la sécurité et aux affaires maritimes, comme le lui imposerait normalement la nouvelle maquette budgétaire, mais bien de retrouver les crédits destinés à financer la politique de la mer en général, où qu'ils se trouvent, afin de juger de leur utilité et de leur efficacité. Après avoir fait ce travail de synthèse, il apparaît que, dans le contexte budgétaire actuel, la prévision des crédits nécessaires pour financer la politique de la mer a été réalisée dans un souci d'économie et d'assainissement financier. Néanmoins, votre rapporteur tient à garantir que les crédits essentiels nécessaires à cette politique ont été confortés, c'est-à-dire les crédits destinés à la formation maritime, à la sécurité et à la sûreté maritime et au soutien à la flotte de commerce et au projet « Port 2000 ». Ces objectifs constituent d'ailleurs la priorité de l'action du Gouvernement depuis le Comité interministériel de la mer du 16 février 2004, qui a ajouté aux trois objectifs mentionnés ci-dessus le développement durable de la mer et de sa partie littorale. I.- AU-DELÀ D'UNE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE ÉCLATÉE, LES CRÉDITS ESSENTIELS DESTINÉS AU MONDE MARITIME ONT ÉTÉ PRÉSERVÉS Comme chacun sait, le projet de loi de finances pour 2006 sera, pour la première fois, présenté selon la nouvelle nomenclature prévue par l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF). Les principes ayant prévalu à la rédaction de cette loi organique ont fait l'objet d'un large consensus entre le Gouvernement et le Parlement dans ses différentes composantes, et votre rapporteur souscrit également aux principes d'efficacité de gestion et de clarté de présentation mis en avant. Entre le moment où les principes ont été formulés, en 2001, et leur entrée en vigueur à compter du 1er janvier 2006, il revenait aux ministères, sous le contrôle de la commission des Finances, de réfléchir à une organisation plus rationnelle de leurs missions, afin de mettre en adéquation les objectifs et les moyens correspondants. S'agissant du ministère de l'Équipement, l'exercice s'annonçait difficile, tant il est vrai que les missions sont nombreuses et leur identification parfois difficile. Néanmoins, votre rapporteur a toujours plaidé pour le maintien d'une certaine unité de présentation des crédits destinés à la mer, considérant qu'il s'agit d'une politique globale, impliquant autant le monde de la mer que le monde de la terre dans sa frange littorale. Cette approche, par ailleurs soutenue par de nombreux élus du littoral, n'a pas été prise en compte par les services du ministère ; désormais, tout citoyen désirant connaître les moyens destinés à la politique de la mer devra se livrer à un exercice compliqué de dissection de deux missions et trois programmes différents. Par-delà cet éclatement, votre rapporteur se veut néanmoins rassurant sur l'orientation des crédits destinés à la mer, en cohérence avec les évolutions enregistrées en 2004 et 2005. A.- LA MISE EN œUVRE CRITICABLE DE LA LOI ORGANIQUE DANS LE DOMAINE DES AFFAIRES MARITIMES 1. L'éclatement des crédits destinés à la mer nuit à leur compréhension a) Les crédits de l'ENIM sont transférés dans la mission « Régimes sociaux et de retraite » La présentation actuelle des crédits de la mer avait l'inconvénient majeur de refléter essentiellement les variations de la subvention de l'Etat à l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM). En effet, cette subvention représentait en 2005 près de 77 % des crédits de la mer. Durant ces dernières années, cette subvention avait tendance à augmenter de manière assez significative, dans la mesure où le Gouvernement avait entrepris de clarifier le financement de l'Établissement, en mettant fin au mécanisme complexe de la compensation inter-régimes. Ce décroisement avait rendu nécessaire l'augmentation de la subvention à l'Établissement de 5,7 % en 2005 et de 7,66 % en 2004. Cette augmentation de la subvention à l'ENIM était par conséquent en grande partie à l'origine de l'augmentation de 4,4 % en 2005 et de 6 % en 2004 des crédits de la mer. En somme, la subvention à l'Établissement nuisait à la compréhension immédiate de la tendance des crédits destinés à la mer. Il est donc normal et opportun que les crédits de l'ENIM soient transférés vers la mission « Régimes sociaux et de retraite », où ils seront examinés avec les autres régimes dits « spéciaux » des transports terrestres, des mines, de la Seita et de l'imprimerie nationale. En conséquence, le périmètre des crédits soumis au contrôle de votre rapporteur est, en principe, restreint de plus de 80 % : alors que les crédits de la section budgétaire « Mer » dépassaient le milliard d'euros, les crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes » avoisinent les 140 millions d'euros, compte tenu des autres changements de périmètre exposés ci-dessous. b) Une perte de lisibilité des implications terrestres de la politique maritime Si le transfert des crédits de l'ENIM vers une autre mission se justifie pleinement, votre rapporteur est plus réservé sur le transfert, au sein de la mission « Transports », de certains crédits intimement liés à la politique de la mer vers le programme « Transports terrestres et maritimes ». Selon les informations fournies à votre rapporteur, il s'agit des crédits suivants : - les crédits de fonctionnement destinés au transport maritime, aux ports et au littoral, inscrits dans l'article 80 du chapitre 34-98 ; - les crédits destinés à l'entretien du domaine public maritime, inscrits à l'article 10 du chapitre 35-33 ; - les crédits destinés à l'entretien et à l'exploitation des ports maritimes, inscrits au chapitre 35-34 ; - les crédits participant aux dépenses des ports autonomes maritimes, inscrits au chapitre 44-34 ; - les crédits destinés à subventionner le lancement des liaisons de transport maritime à courte distance (article 60 du chapitre 45-35) ; - les crédits destinés à financer certaines subventions à des organismes actifs dans le domaine des transports maritimes ; - les crédits destinés aux investissements et aux subventions d'investissement réalisés dans le domaine des ports maritimes et de la protection du littoral (chapitres 53-30 et 63-30), à l'exception de ceux destinés à la lutte contre la pollution accidentelle du littoral et de la mer ; En 2005, ces crédits représentaient un total proche de 120 millions d'euros. On comprend la logique de leur rattachement au programme « Transports terrestres et maritimes » : les ports et le domaine public maritime sont des espaces proprement terrestres ayant une fonction de transport importante, souvent en liaison avec un axe routier ou ferroviaire. Il en est de même du transport maritime de courte distance. Néanmoins, une logique concurrente plaide pour le rattachement des crédits des ports au programme traitant plus spécifiquement de la mer, tant il est vrai que les ports sont dépendants de la politique menée en faveur de la flotte de commerce, de la sécurité maritime et plus généralement en faveur du monde de la mer. Pour la deuxième année consécutive, votre rapporteur se fait donc l'avocat du rattachement des crédits destinés aux ports, au domaine public maritime et au transport maritime à courte distance au programme « Sécurité et affaires maritimes ». 2. Une application incomplète des principes de la loi organique a) Les « objectifs » retenus pour ce programme pourraient être moins nombreux et mieux hiérarchisés Conformément à l'article 7 de la loi organique, « un programme regroupe les crédits destinés à mettre en œuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère et auquel sont associés des objectifs précis, définis en fonction de finalités d'intérêt général, ainsi que des résultats attendus et faisant l'objet d'une évaluation ». D'après le document de présentation budgétaire fourni par l'administration des Finances, les objectifs retenus sont les suivants : - objectif 1 : « renforcer l'efficacité du dispositif de sauvegarde des personnes et des biens en améliorant la sécurité et la sûreté de la circulation maritime » ; - objectif 2 : « lutter contre les pollutions marines par une meilleure identification des sources de pollution et la poursuite des contrevenants » ; - objectif 3 : « promouvoir une formation maritime de qualité au service de l'emploi maritime » ; - objectif 4 : « assurer aux gens de mer des conditions de travail et de vie décentes et de qualité » ; - objectif 5 : « mieux contrôler les activités maritimes » (selon les informations complémentaires du ministère, cet objectif vise à mettre l'accent sur le rôle de la coordination interministérielle s'agissant du contrôle des activités maritimes, notamment dans le domaine des pêches, en cohérence avec les objectifs de l'Union européenne) ; - objectif 6 : « renforcer les moyens consacrés aux missions opérationnelles ou au contact des usagers, par une rationalisation des tâches administratives » ; - objectif 7 : « améliorer l'efficacité des dispositifs d'aide à la flotte de commerce ». L'articulation du programme « Sécurité et affaires maritimes » autour de ces 7 objectifs appelle certains commentaires. En premier lieu, il apparaît au premier regard que le nombre des objectifs est trop nombreux ; il s'ensuit d'ailleurs que certains objectifs semblent se recouper. Ainsi, l'objectif 5, relatif au contrôle des activités maritimes, semble déjà faire l'objet des objectifs 1 et 2, tant il est vrai que le contrôle des activités maritimes passe par le développement de la sécurité maritime et la poursuite des contrevenants. En outre, et c'est plus grave, ces objectifs reflètent une vision trop administrative de la politique de la mer. Ainsi, les objectifs 5 et 6 visent tous deux à une meilleure organisation de l'administration de la mer, soit par le biais du renforcement de la coopération interministérielle, soit par le biais d'une rationalisation des fonctions administratives ; or, il faut rappeler que les efforts de rationalisation du fonctionnement de l'administration sont les corollaires de l'identification d'objectifs précis, et ne doivent pas devenir des objectifs en eux-mêmes. Enfin, votre rapporteur s'émeut de constater que le soutien à la flotte de commerce est le 7ème et dernier objectif, alors qu'il n'a de cesse, notamment en tant que rapporteur du projet de loi relatif à la création du registre international français, de rappeler l'importance de la promotion de notre pavillon dans le domaine de la marine marchande. En somme les objectifs retenus pourraient être, beaucoup plus simplement, la promotion de la sécurité et de la sûreté maritime (la lutte contre les pollutions marines en constituant un aspect essentiel), la garantie de la qualité de la formation et des conditions de travail des gens de mer et le soutien à la flotte de commerce. b) Les « actions » retenues polarisent les interventions du ministère sur la réorganisation administrative En toute logique, les objectifs retenus ne pouvaient aboutir à un choix d'actions que votre rapporteur puisse trouver véritablement convainquant. Ainsi, sur les 5 actions choisies - sécurité et sûreté maritimes, gens de mer et enseignement maritime, flotte de commerce, action interministérielle de la mer, soutien au programme - seules les trois premières sont effectivement tournées vers la mer. L'action 4 intitulée « Action interministérielle de la mer » retrace essentiellement les moyens de fonctionnement des services déconcentrés, actuellement inscrits au chapitre 34-98. En outre, l'action 5 intitulée de manière sibylline « Soutien au programme » regroupe les moyens des personnels de l'administration centrale et certains moyens de fonctionnement des services déconcentrés. Votre rapporteur s'interroge sur l'articulation de ces deux actions avec le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement », qui regroupe certains crédits de personnel du ministère de l'Équipement. A l'évidence, la gestion des personnels a pesé sur l'organisation de la mission « Transports », sachant que la logique de la LOLF aurait voulu que les personnels et les moyens de fonctionnement (ex-titre III et IV) soient répartis entre les différents programmes et actions en fonction des besoins, et non qu'ils soient regroupés dans des actions spécifiques. D'ailleurs, l'indicateur de performance associé aux actions 4 et 5 - le pourcentage des personnes affectées à des missions opérationnelles par rapport au nombre de personnes affectées à des missions de gestion administrative - paraît bien peu intéressant pour qui se préoccupe de l'avenir de notre monde maritime, outre le fait qu'il paraît très hasardeux à calculer. B.- LES CRÉDITS DESTINÉS À LA MER SERONT GLOBALEMENT STABILISÉS EN 2006 Traditionnellement, le débat budgétaire devant le Parlement s'apparente à un exercice de calcul de l'évolution des crédits par rapport à l'année précédente. Outre le fait que cette approche n'est pas toujours concluante - des crédits en recul peuvent être mieux utilisés -, elle sera très compliquée et approximative cette année s'agissant des crédits destinés à la mer. Outre le transfert des crédits de l'ENIM dans une autre mission et des crédits destinés aux ports dans un autre programme, les crédits de personnel et de fonctionnement ont été souvent, en partie seulement, transférés dans le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement ». Enfin, certains des crédits de l'actuelle section budgétaire « Mer » seront retracés dans le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), mais ce budget ne sera définitivement voté par son conseil d'administration qu'au début de l'année 2006. En particulier, certains crédits destinés aux investissements dans les ports maritimes actuellement inscrits dans les chapitres 53-30 et 63-30 de la section budgétaire « Mer », seront financés par l'AFITF au titre de la réalisation des engagements résultant des contrats de plan Etat-régions. Compte tenu de cette difficulté, tenant à l'entrée en vigueur de la nouvelle nomenclature, votre rapporteur s'attachera essentiellement à vérifier l'équilibre des grandes masses budgétaires, en contrôlant plus spécifiquement les dépenses liées aux priorités que sont la sécurité maritime, la formation maritime et le soutien à la flotte de commerce. 1. A périmètre constant, le budget de la mer augmente si l'on prend en compte certains facteurs conjoncturels Pour comparer les crédits de 2005 et 2006, deux méthodes sont possibles : soit l'on peut reconstituer le budget 2006 en utilisant la nomenclature issue de l'ordonnance de 1959, soit l'on peut utiliser la nouvelle nomenclature résultant de la LOLF en la projetant de manière fictive pour le budget de 2005. Votre rapporteur utilisera ces deux méthodes, permettant de faire la jonction entre sa mission de rapporteur des crédits de la section budgétaire « Mer » au titre de l'année 2005 et celle de rapporteur des crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes » au titre de l'année 2006. En utilisant la nomenclature issue de l'ordonnance de 1959, il apparaît que les crédits prévus par le budget de 2006 enregistrent une hausse légère, ainsi que le met en évidence le tableau ci-dessous :
Ce tableau, permettant de comparer les budgets 2005 et 2006 « à périmètre constant » appelle les précisions suivantes : - la subvention de l'Etat à l'ENIM a volontairement été exclue du tableau, dans la mesure où cette subvention enregistre cette année une baisse importante, de 16,77 %, due au basculement du financement de l'ENIM vers la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM-TS). Ce basculement est prévu par l'article 42 du projet de loi de finances pour 2006 ; - en outre, ce tableau intègre les financements complémentaires prévus par l'AFITF, destinés aux investissements dans les ports maritimes (13,6 millions d'euros à inscrire dans l'actuel chapitre 53-30) et aux subventions d'investissement dans ces ports (1,8 million d'euros à inscrire sur l'actuel chapitre 63-30), auxquels il faut ajouter les 34 millions d'euros versés par l'Etat à RFF pour réaliser la liaison ferroviaire avec « Port 2000 ». Ce tableau présente donc l'intérêt de rendre véritablement compréhensible l'évolution des crédits destinés à la mer. Il reflète en outre la baisse significative des crédits du titre V, due à la fin du programme « Port 2000 » sur laquelle votre rapporteur reviendra en détail ultérieurement. 2. En utilisant la nouvelle nomenclature, les crédits destinés à la sécurité et aux affaires maritimes augmentent significativement En recréant fictivement le budget de 2005 à partir de la nouvelle nomenclature prévue par la loi organique, afin de comparer plus spécifiquement les crédits destinés au programme « Sécurité et affaires maritimes », on constate que les crédits augmentent de manière assez significative. On constate que la hausse globale des crédits du programme provient de la forte augmentation des crédits des actions 4 et 5. S'agissant des crédits destinés au soutien à notre flotte de commerce, cette augmentation provient de l'entrée en vigueur de l'article 10 de la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français, prévoyant l'exonération de la totalité des charges patronales dues à l'ENIM pesant sur les navires battant pavillon français soumis à la concurrence internationale. Cette augmentation globale provient également de l'augmentation de près de 30 % des crédits de l'action 5 intitulée « Action interministérielle de la mer », destinés à permettre une amélioration de l'exercice des pouvoirs de police de l'Etat en mer, mais aussi du contrôle des pêches, conformément aux engagements internationaux de la France. Évolution des crédits destinés à la sécurité et aux affaires maritimes (en millions d'euros)
II.- DANS UN CONTEXTE BUDGÉTAIRE DIFFICILE, L'ÉTAT GARANTIT LA QUALITÉ DE SON ACTION Certains débats récents entourant le monde de la mer sont l'occasion pour l'opposition de faire croire que le Gouvernement actuel cherche à se désengager de la politique maritime qu'il a menée depuis le début de la législature, et particulièrement de sa politique en faveur des gens de mer. Il y a évidemment le conflit de la SNCM, largement médiatisé, mais aussi la controverse suivant la création du registre international français et, plus localement, le blocage du port de Roscoff par des syndicalistes pour protester contre le « dumping social » pratiqué par la compagnie Irish ferries à bord des navires tels que le Normandy. Pourtant, la polémique ne peut changer la réalité des chiffres présentés dans le projet de budget pour 2006, qui mettent en évidence le fait que l'Etat consacrera encore d'importants moyens aux gens de mer, à leur protection sociale, à leur formation et à l'amélioration des structures de gestion du monde de la mer. A.- L'ACTION SOCIALE EN FAVEUR DES MARINS RESTE UNE PRIORITÉ BUDGÉTAIRE 1. La poursuite de la clarification du financement de l'ENIM Pour l'année 2006, la subvention budgétaire à l'ENIM devrait enregistrer une baisse importante, de 16,8 %, due à la prise en charge d'une partie du financement de l'Établissement par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés. En 2004, dernier exercice clos, l'exécution budgétaire s'est soldée par un excédent de 3,9 millions d'euros contre un excédent de plus de 35 millions d'euros en 2003 et un déficit de 42 millions d'euros en 2002. Au titre de cet exercice, les charges définitives se sont établies à 1 506,8 millions d'euros, inférieures de 1,36 % à la prévision initiale fixée par le budget pour 2004. Les charges de retraite gérées par la Caisse de retraite des marins ont représenté une part prépondérante de ces charges, puisqu'elles ont atteint 1 028 millions d'euros contre 1 014 millions d'euros en 2003, auxquelles il faut ajouter les charges de pensions de la caisse générale de prévoyance (CGP) d'un montant de 59,7 millions d'euros. En 2004, les ressources se sont établies à 1 510 millions d'euros ; les recettes propres - produits des cotisations et des contributions - se sont élevées à 200 millions d'euros, en diminution de plus de 5 %. Les compensations et les transferts sociaux baissent de 5,5 % pour s'établir à 493,99 millions d'euros. S'agissant de l'année 2005, dont l'exercice n'est pas clos, les dépenses comme les ressources, telles qu'il est possible de les appréhender après un semestre d'exécution budgétaire, devraient être conformes aux prévisions, sous réserve de mesures nouvelles ou imprévisibles. Le budget de l'Établissement pour 2006, actuellement en cours de préparation, s'appuyant sur les dernières hypothèses économiques et sociales retenues par le Gouvernement, prévoit une augmentation du budget global de l'ENIM de 0,96 %. Rappelons que ce budget a également augmenté de 1,25 % en 2005, ce qui représente une tendance de longue période comparable à celle des autres régimes de sécurité sociale. Comme les années précédentes, ces hypothèses économiques font ressortir une dégradation lente mais constante du ratio entre les actifs et les pensionnés, ce qui n'est pas propre au régime des marins mais appelle une certaine vigilance de l'Etat quant à l'avenir de ce régime de retraite.
Les prévisions de dépenses sont fondées sur les éléments suivants : - les charges de la Caisse de retraite des marins sont évaluées à 1 070,6 millions d'euros, contre 1 052,3 millions d'euros en 2005. Ce montant résulte notamment de l'évolution des salaires forfaitaires ; - les pensions de la Caisse générale de prévoyance subissent l'incidence de l'évolution des salaires forfaitaires et du nombre des prestataires ; - s'agissant des prestations servies par la Caisse générale de prévoyance, les tendances générales observées ou prévues en matière d'assurance maladie ainsi que les paramètres propres au régime ont conduit à une évaluation des dépenses de 348,7 millions d'euros. S'agissant des recettes, les principales évolutions sont les suivantes : - les recettes propres devraient enregistrer une diminution sensible par rapport à 2005, résultant notamment de la baisse du nombre des actifs, et de l'incidence des dispositifs d'exonération prises durant l'année 2005 ; - le projet de budget pour 2006 prévoit en outre des recettes de 365 millions d'euros perçues au titre de la compensation maladie et vieillesse entre les régimes, ce qui représente une baisse de 3,95 % ; - du fait des évolutions précédemment décrites, les produits devraient atteindre 703,3 millions d'euros et des charges devraient s'élever à 1 561,5 millions d'euros. La subvention d'équilibre s'établit donc à 858,18 millions d'euros, ce qui représente une augmentation de 4,4 % par rapport à 2005. Comme indiqué précédemment, cette subvention sera à la charge de l'Etat à hauteur de 684 millions d'euros, et à la charge de la CNAM-TS à hauteur de 174 millions d'euros. Évolution du budget de l'ENIM en 2006
2. La stabilisation des crédits destinés aux marins abandonnés L'ENIM ne constitue pas le seul levier budgétaire permettant de mener une politique sociale dans le domaine maritime. Ainsi, 25 000 euros de crédits, actuellement inscrits à l'article 40 du chapitre 46-32, permettent d'octroyer une aide sociale d'urgence aux marins abandonnés dans les ports français en 2005 et 2006. Cette dotation est en recul sensible par rapport au montant de près de 62 000 euros mobilisé en 2004. Néanmoins, votre rapporteur se veut rassurant sur l'efficacité des fonds ainsi mobilisés. En effet, il faut rappeler que les navires abandonnés peuvent désormais être vendus, pour couvrir les créances salariales des marins. Le produit des ventes est reversé à l'Association pour la gestion des institutions sociales maritimes (AGISM) qui prend en charge les marins abandonnés dans les ports français. Il faut en outre rappeler que la France milite auprès des instances internationales, notamment l'Organisation internationale du travail et l'Organisation maritime internationale, afin de mettre en place un système d'assurance financé au niveau international. Chacun peut, enfin, se féliciter de la ratification par le Parlement de plusieurs conventions de l'Organisation internationale du travail (1), notamment la convention n° 166 prévoyant désormais clairement dans notre droit interne que le rapatriement des marins abandonnés dans les ports français sera effectué à la charge de l'armateur. B.- LA FORMATION MARITIME AU CœUR DE L'ACTION DE L'ÉTAT EN FAVEUR DE LA MER La formation maritime est un levier privilégié dont disposent l'Etat et les régions pour soutenir notre flotte de commerce et permettre à de très nombreux jeunes de tirer parti de la forte croissance enregistrée ces dernières années dans le domaine de la flotte de commerce. A cet égard, votre rapporteur est satisfait de constater que ce projet de budget est à la hauteur de l'enjeu ; les crédits destinés à la formation maritime sont en effet en légère progression, passant de 32,5 millions d'euros en 2005 à 32,9 millions d'euros en 2006. Pour la deuxième année consécutive, les moyens destinés aux quatre Écoles nationales de la marine marchande ont simplement été reconduits. Dans le contexte budgétaire actuel, il faut se satisfaire de la préservation de ces crédits essentiels, même si votre rapporteur estime que l'avenir et la qualité de notre flotte de commerce se jouent à ce niveau, déterminant ensuite l'employabilité du personnel navigant français. Par ailleurs, les crédits destinés aux lycées professionnels maritimes sont en augmentation, notamment en fonctionnement. Cette augmentation résulte notamment du passage sous statut public des personnels de l'Association de gérance des écoles de formation maritime et aquacole (AGEMA), réalisée en 2004 mais ayant des incidences financières au titre du budget 2006. En outre, le tableau ci-dessous met en évidence la stabilité des crédits destinés à financer les bourses aux élèves. Si l'enveloppe destinée aux élèves des Écoles de la marine marchande augmente très légèrement, celle destinée aux élèves des lycées professionnels est simplement reconduite. Évolution des crédits destinés à la formation maritime (en millions d'euros)
III.- LA SÉCURITÉ MARITIME DOIT RESTER LA PRIORITÉ L'année 2005 a été émaillée de quelques incidents qui sont autant de signaux démontrant qu'il faut absolument rester mobilisé dans le domaine de la sécurité maritime. Ainsi, la lecture de la presse spécialisée permet de noter certains incidents préoccupants. A titre d'exemple, une collision a eu lieu le mardi 2 août dernier entre un petit cargo, nommé le Dogger, et un porte-conteneurs, le Sierra Express, peu après 6h00 du matin, à 40 milles au nord de Roscoff dans le rail d'Ouessant. Les deux navires se situaient sur la voie descendante du dispositif de séparation du trafic du rail. Selon les éléments recueillis par la préfecture maritime de Brest, la météo était excellente. Le Sierra Express, qui venait du Havre a tenté de dépasser le Dogger, mais a été victime d'une avarie de barre, et serait de ce fait entré en collision avec le petit cargo. La collision a entraîné une brèche de 5 mètres de long sur le flan tribord du porte-conteneurs. Le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) a donné l'alerte à 6h18, et l'abeille Bourbon a été aussi tôt envoyée dans la zone de la collision. Par chance, le Dogger a pu être pris en charge par le remorqueur britannique Anglian Princess, tandis que le Sierra Express a pu rallier le port de Falsmouth par ses propres moyens. Cet exemple, qui n'a pas retenu l'attention des médias dans la mesure où il ne concernait pas de navires ayant une cargaison dangereuse, montre pourtant à quel point il faut rester vigilant s'agissant de la sécurité maritime. Il appelle en outre les responsables politiques à vérifier que les leçons de chaque accident maritime sont prises en compte par les autorités administratives compétentes. A.- LES LEÇONS DES CATASTROPHES MARITIMES RÉCENTES DOIVENT ÊTRE PRISES EN COMPTE 1. L'adaptation de la réglementation permettra de prévenir les risques Le début de la présente décennie (2) a été assez funeste du point de vue des accidents maritimes. Avec quelques années de recul, il devient possible de tirer les enseignements de ces accidents, et surtout de dresser un bilan des mesures qui ont été prises pour les prévenir. rappel des principaux naufrages
Ce récapitulatif permet de constater que les causes des principaux naufrages résultent soit d'une avarie soit d'une collision, c'est-à-dire de causes tenant à la qualité du navire ou à la qualité de l'organisation de la navigation. Ces deux domaines ont donc naturellement constitué les axes des interventions visant à améliorer la sécurité maritime aux niveaux national, communautaire et international. La modification des mesures législatives et réglementaires a d'abord permis d'améliorer l'encadrement pénal des rejets illicites. La loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République a permis de créer en Méditerranée, où la France n'a pas revendiqué de zone économique exclusive pour des raisons internationales notamment liées à la pêche, des mesures coercitives pour les navires étrangers pouvant être la cause d'une pollution. Conformément au décret n° 2004-33 du 8 janvier 2004, les autorités françaises peuvent exercer dans cette zone de protection les compétences reconnues par le droit international dans le domaine de la protection et de la préservation du milieu marin, de la recherche scientifique, ainsi que de la mise en place et de l'utilisation d'îles artificielles. Le décret permet en outre de rendre applicable, dans une zone qui s'étend jusqu'à 100 kilomètres des côtes, les sanctions pénales applicables en vertu du droit interne pour les pollutions marines. Le tribunal maritime du littoral de Marseille est compétent pour la poursuite, l'instruction et le jugement de toutes les infractions et pollutions constatées dans cette zone. Au niveau judiciaire, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptations de la justice aux évolutions de la criminalité a attribué et harmonisé la compétence des déversements illicites en mer au tribunal de grande instance de Paris, ainsi qu'aux tribunaux maritimes du littoral du Havre, de Brest et de Marseille. Cette même loi a en outre augmenté les sanctions pénales dont sont passibles les personnes responsables de tels actes illicites. Variant suivant le type de navire, le lieu de l'infraction et son importance, ces peines peuvent aller jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 1 million d'euros d'amende pour les infractions les plus graves. Elles s'appliquent au capitaine ou aux responsables de bord, ainsi qu'aux dirigeants, propriétaires, exploitants du navire ou toute autre personne exerçant un pouvoir de contrôle ou de direction dans la gestion ou la marche du navire. Les personnes morales peuvent être reconnues responsables dans les mêmes conditions que les personnes physiques, avec des peines adaptées à leur nature juridique. La portée de ces dispositions pénales est cependant fortement limitée par le droit international, puisque seules les dispositions relatives aux amendes sont applicables aux navires étrangers responsables d'une pollution dans notre zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique. Par ailleurs, votre rapporteur estime que les sanctions prévues par cette loi sont excessivement lourdes et méritent d'être adaptées. Les différents naufrages du début de notre décennie ont ensuite conduit à améliorer le dispositif réglementaire relatif à la mise en œuvre du plan POLMAR. Ainsi, l'instruction du Premier ministre du 2 avril 2001 relative à l'intervention des pouvoirs publics en cas d'accidents maritimes majeurs fixe les grands principes d'organisation des interventions publiques dans de tels cas. Elle vise notamment à améliorer la coordination interministérielle et inter-départementale, en renforçant notamment le rôle du préfet. D'importants exercices de simulation ont été mis en place. En outre, l'instruction du Premier ministre du 4 mars 2002 relative à la lutte contre la pollution du milieu marin prévoit les mesures relatives à la gestion des produits polluants récupérés suite à une pollution marine accidentelle. Elle précise, dans ce domaine, le rôle de chaque acteur public. Dans le domaine de la réception des déchets d'exploitation dans les ports français, la directive 2000/59/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2000 sur les installations de réception portuaires pour les déchets d'exploitation des navires et les résidus de cargaison a été transposée par la loi n° 2001-43 du 16 janvier 2001 et le décret n° 2003-920 du 22 septembre 2003, qui précise les modalités de réalisation des installations de réception de tels déchets, leur fonctionnement et leur gestion. La loi prévoit notamment que les coûts de réception et de traitement des déchets sont à la charge de l'armateur et font l'objet d'une redevance portuaire intégrée aux droits de port. Le décret prévoit pour sa part que le capitaine d'un navire a l'obligation de présenter aux ports d'escale français les documents permettant de vérifier le dépôt éventuel de ses déchets et résidus dans le port d'escale précédent. Enfin, l'ordonnance n° 2004-691 du 12 juillet 2004 et le décret n° 2005-255 du 14 mars 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports rend l'ensemble de ces dispositions applicables dans les ports décentralisés. S'agissant des lieux de refuge pour les navires en difficulté, dont la nécessité a été mise en évidence lors du naufrage du Prestige, prévus par l'article 20 de la directive 2002/59/CE du Parlement et du Conseil du 27 juin 2002 relative à la mise en place d'un système communautaire de suivi des navires et d'information, le Gouvernement s'est pour l'instant limité à prendre les deux mesures suivantes : - l'instruction du Premier ministre du 29 juillet 2004 a permis de faciliter la collecte des informations nécessaires à la désignation de ces lieux refuges ; - l'ordonnance du 12 juillet 2004 précitée a prévu une nouvelle disposition, insérée dans le code des ports maritimes, autorisant le ministre chargé des ports maritimes à enjoindre à l'autorité portuaire d'accueillir un navire en difficulté pour des motifs de sécurité des personnes ou des biens ou de risque d'atteinte à l'environnement. Selon les informations fournies à votre rapporteur, la position de la France, exprimée auprès des autorités communautaires, consiste à ne pas désigner de lieux refuges déterminés, mais à prévoir les mesures législatives et réglementaires permettant de traiter chaque situation au cas par cas. Votre rapporteur s'interroge sur l'opportunité de cette position, craignant que, lorsque se présentera un risque de pollution importante, il soit très difficile de trouver rapidement un lieu de refuge si celui-ci n'a pas été déterminé à l'avance. Dans le domaine financier enfin, l'instruction du 4 mars 2002 relative au fonds d'intervention contre les pollutions marines accidentelles facilite l'accès au fonds POLMAR lors de pollutions de faible ampleur. Votre rapporteur ne reviendra que rapidement sur les mesures des paquets dits « Erika I » et « Erika II », dans la mesure où elles sont entrées en vigueur depuis un certain temps et où ces mesures ont été exposées lors de l'examen des précédentes lois de finances.
En complément, et pour tirer les conséquences d'accidents plus récents, la Commission a consulté les Etats membres en mai 2004 sur le contenu d'un futur « paquet Erika III », avec les propositions suivantes : - le renforcement du mécanisme de compte rendu des déficiences des navires par les pilotes et des mesures visant à atteindre des taux d'inspection suffisants dans tous les ports de l'Union européenne, afin d'éviter l'émergence de ports dits « de complaisance » ; - la création d'un outil commun d'information et d'enquête sur les conditions des futurs accidents maritimes, sous l'égide de l'Agence européenne pour la sécurité maritime ; - la création d'un régime de responsabilité pour le transport de passagers ; - un renforcement des dispositifs d'indemnisation des victimes d'une pollution marine. Dans ces domaines, les autorités communautaires n'ont pas encore élaboré de nouvelle réglementation. En revanche, à la demande de la France, la Commission a présenté une proposition de directive relative à la pollution causée par les navires et à l'introduction de sanctions pénales en cas d'infraction. Cette proposition vise à transposer au niveau communautaire des recommandations formulées par l'Organisation maritime internationale (OMI). Outre la modification de la convention MARPOL, adoptée lors de l'assemblée extraordinaire de l'OMI le 4 décembre 2003, visant à interdire l'utilisation des pétroliers à simple coque pour le transport des produits pétroliers lourds et à accélérer leur retrait progressif pour des pétroliers à simple coque transportant d'autres substances, l'OMI a examiné une proposition, émanant de six pays dont la France (3), visant à créer une zone maritime particulièrement vulnérable dans les eaux de l'Atlantique, de la Manche et de la Mer du Nord. Le comité de l'OMI a décidé de créer une telle zone dans les eaux de l'Europe de l'Ouest, visant à imposer à tous les pétroliers pénétrant dans cette zone l'obligation de se signaler aux autorités maritimes compétentes, et instaurant une surveillance accrue des mouvements de pétroliers à simple coque transportant des hydrocarbures lourds. L'OMI continue enfin à promouvoir la mise en œuvre de la convention dite « HNS » (pour « Hazardous and noxious substances ») adoptée le 3 mai 1996 à Londres. Cette convention prévoit un régime renforcé de responsabilisation et d'indemnisation des dommages résultant du transport de substances nocives et potentiellement dangereuses. Cette convention a pour l'instant été signée par 12 Etats, et ratifiée par seulement 8 Etats, alors que l'article 46 de cette convention prévoit son entrée en vigueur 18 mois après sa ratification par le 12ème Etat. La France ne fait pas partie des Etats signataires, au grand étonnement de votre rapporteur ; selon les informations fournies par le ministère compétent, le Gouvernement rencontrerait des difficultés pour appréhender sa mise en œuvre, dans la mesure où elle suppose de prévoir les mesures appropriées pour les 5 000 substances ou produits susceptibles d'entrer dans le champ de la convention. En décembre 2004, une mission du conseil général des ponts et chaussées et du conseil général des mines a été chargée d'étudier les modalités concrètes de mise en œuvre de cette convention. En l'état des travaux de cette mission, il apparaît qu'une réflexion internationale complémentaire est nécessaire pour la préciser. 2. Le coût d'un naufrage doit engager le Gouvernement à renforcer sa politique de prévention Quelques années après les naufrages de l'Erika et du Prestige, il est désormais possible d'évaluer, pour les différents acteurs, le coût des pollutions qui ont touché le littoral de cinq départements en 1999 et de 13 départements en 2002. S'agissant de l'Erika, le bureau des indemnisations du FIPOL de Lorient a reçu près de 7 000 demandes pour un montant total de plus de 206 milliards d'euros. Près de 53 % de ces demandes proviennent de professionnels du tourisme qui ont été gravement affectés par les marées noires. Actuellement, 85 % des demandes ont abouti à des indemnisations. ÉVOLUTION DES DEMANDES D'INDEMNISATION REÇUES PAR LE FIPOL
S'agissant du naufrage du Prestige, le bureau du FIPOL à Bordeaux a reçu, au 1er août 2005, 404 demandes d'indemnisation pour un montant total de plus de 96 milliards d'euros, y compris celle de l'Etat. A cette date, 75 % des dossiers reçus ont été évalués, pour un montant total de 6,8 milliards d'euros. Les dépenses pour l'Etat français sont évidemment très importantes ; pour l'Erika, le préjudice de l'Etat français s'élève à 195 milliards d'euros. Sur ce montant, 9 milliards d'euros ont été pris en charge sur le budget des administrations et 169 milliards proviennent du fonds d'intervention POLMAR (dont 131 milliards pour le plan POLMAR-terre). S'agissant du Prestige, le préjudice de l'Etat est fixé à près de 16,5 milliards d'euros, dont 14,6 milliards d'euros ont été pris en charge par le budget des administrations. On constate évidemment que les montants sont extrêmement importants ; par conséquent, tout doit être fait, y compris dans un souci d'économies budgétaires, pour éviter une nouvelle catastrophe. B.- LA MOBILISATION DES MOYENS NÉCESSAIRES PERMETTRA D'ÉVITER LES CATASTROPHES FUTURES A la lumière des expériences passées, il apparaît de plus en plus nécessaire de mobiliser les moyens permettant d'éviter de nouvelles catastrophes, non seulement en raison de leurs incidences sur l'environnement, mais aussi en raison de leur impact financier pour les victimes, quelles soient des particuliers, des entreprises ou des collectivités. A cet égard, le montant des crédits prévus par le présent projet de budget peu paraître décevant, dans la mesure où les crédits de l'actuelle action « Sécurité et sûreté maritimes » enregistrent un repli de près de 3 % par rapport à ce qu'ils auraient été en 2005 avec la même nomenclature. Évolution des crédits de l'action « Sécurité et sûreté maritime » (en milliers d'euros)
Cette évolution globale mérite cependant une analyse détaillée, permettant de démontrer que les crédits essentiels destinés à la sécurité maritime seront préservés. 1. Les moyens destinés aux CROSS permettront de poursuivre le plan de modernisation des installations La prévention des naufrages passe par le renforcement des moyens des sept CROSS de Gris-Nez, Jobourg, Corsen, Etel et La Garde en métropole, et de Fort de France et la Réunion en outre-mer. Ces services spécialisés des affaires maritimes ont en effet pour fonction essentielle de coordonner l'emploi des moyens navals et aériens des administrations concourant à l'action de l'Etat en mer (marine nationale, armée de l'air, gendarmerie nationale, douanes, sécurité civile et affaires maritimes). A cette fin, ils sont chargés de l'exécution de six missions principales : la recherche et le sauvetage des personnes en détresse en mer, la surveillance de la circulation maritime (principalement pour les CROSS Gris-Nez, Jobourg et Corsen), la surveillance des pêches maritimes, la surveillance des risques de pollution maritime, la diffusion des renseignements de sécurité maritime, la réception des alertes de sûreté des navires. Les infrastructures des CROSS font l'objet d'un programme permanent de modernisation résultant d'engagements internationaux auprès de l'OMI ou de l'Union européenne. Ces programmes visent à renforcer la surveillance du trafic maritime grâce au renouvellement et à l'extension de la couverture radar des trois CROSS de la Manche, et à la mise en place des stations côtières d'identification automatique des navires. Les moyens mobilisés devraient également permettre de mettre en place, en France, le système national d'information sur le trafic maritime dénommé « Trafic 2000 », ainsi que sa connexion aux systèmes européens d'information. Enfin, ce programme d'investissement devrait permettre d'améliorer la couverture radio de nos côtes. L'exécution de ce programme pluriannuel a déjà permis la réalisation des opérations suivantes : - la mise en service de 2 stations Navtex (5), à Ouessant et a La Garde pour la Méditerranée ; - la première tranche de modernisation des infrastructures immobilières des CROSS ; - la mise en place de deux nouvelles stations de radio pour les zones situées au large d'Ouessant pour l'Atlantique, et de Porquerolles pour la Méditerranée ; - la mise en place d'un dispositif de surveillance du trafic maritime dans les bouches de Bonifacio ; - l'expérimentation d'un démonstrateur de gestion du trafic maritime à partir du CROSS Jobourg. En 2005, les crédits prévus en investissement par la loi de finances initiale ont permis l'avancement des programmes suivants : - la poursuite des opérations d'amélioration de la couverture radio maritime de sécurité ; - la sécurisation des réseaux de télécommunication des CROSS Jobourg et Gris-Nez ; - la poursuite du programme pluriannuel de réparation, d'entretien et de renouvellement des équipements techniques des CROSS, ainsi que l'entretien immobilier des centres ; - la mise en œuvre d'un nouveau plan d'équipement pour renforcer la sécurité maritime et compléter le dispositif et les moyens de prévention et d'intervention de l'Etat en mer ; - la mise en place du réseau d'information sur le trafic maritime intitulé « Trafic 2000 » en collaboration avec la marine nationale et les ports. En 2006, la poursuite de ce programme permettra de continuer la rénovation des équipements dont l'installation date des années 1980. En particulier, d'importants moyens seront mobilisés pour le programme RECORAM - acronyme de « remplacement à l'identique des matériels existants » - pour les CROSS de la Manche, dont la rénovation devrait être terminée en 2006. En outre, les moyens mobilisés permettront de poursuivre la mise en place du système « Trafic 2000 » et du système « SPATIONAV » qui vise à améliorer le traitement et le partage des informations avec la marine nationale. Il faut néanmoins souligner que la rénovation des radars de la Manche ne permettra de remettre à niveau que le contrôle du rail montant ; ces radars ne permettent pas, en l'état, de contrôler le rail descendant. Votre rapporteur appelle donc le Gouvernement à financer l'acquisition de radar à haute fréquence, dont la portée est de l'ordre de 250 miles nautiques, permettant non seulement de balayer les deux rails, mais aussi de contrôler les courants marins, les éventuelles nappes d'hydrocarbures et de surveiller les navires incontrôlés dans une perspective de lutte contre le terrorisme. De tels radars ont déjà été installés au Canada, où ils ont prouvé leur efficacité. 2. Les moyens destinés à la signalisation maritime enregistrent une baisse conjoncturelle Au sein des crédits destinés à l'action « Sécurité et sûreté maritimes », les crédits finançant la signalisation maritime, dont bénéficie à titre principal le bureau des phares et balise, enregistrent une légère baisse en autorisation d'engagement et une baisse de 5,4 % en crédits de paiement par rapport à l'année 2005. Rappelons qu'un plan de modernisation de la signalisation maritime a été lancé en 1998, avec les objectifs suivants : - mettre en place des stations d'émission de corrections différentielles GPS (Global Positioning System), le plan ayant pour objectif de doubler le nombre de ces stations émettrices en France métropolitaine. Pour répondre aux exigences de l'Organisation maritime internationale, il a en outre été décidé d'implanter des stations émettrices outre-mer. Parallèlement, l'étude et le développement de nouvelles balises répondeuses radar (RACON) ont été mis en œuvre ; - installer des bouées de nouvelle génération, qui offriront une meilleure visibilité pour les usagers et remplaceront les bouées en acier inadaptées aux nouveaux baliseurs. 400 bouées sont ainsi prévues pour équiper le littoral de la Mer du Nord, de la Manche et de l'Atlantique ; - moderniser la flottille en remplaçant trois baliseurs océaniques, deux baliseurs côtiers et quatorze bateaux de travaux et vedettes est prévu. Compte tenu des contraintes budgétaires, le remplacement des baliseurs du Verdon et de Saint-Nazaire a été différé, d'où des surcoûts générés par la nécessité de maintenir un effectif suffisant pour le fonctionnement de navires dont l'effectif est important et de maintenir en état des navires de plus de soixante ans, donc plus coûteux ; - remettre à niveau les établissements de signalisation maritime : 21 millions d'euros seront nécessaires pour achever ce programme de réfection. En effet, comme il a été reporté pour permettre la réalisation du programme des baliseurs, l'ensemble du parc de ces établissements continue à se détériorer, ce qui oblige à augmenter les estimations initiales de 28 millions d'euros. Cette estimation ne prend pas en compte la réfection du phare de Cordouan, en attente d'un financement particulier, et dont le coût de remise en état a été chiffré en 1997 à 13,7 millions d'euros. Compte tenu des prévisions d'allocation des crédits de paiement, le programme de renouvellement de la flottille devait être achevé en 2008 et celui de remise à niveau des établissements de signalisation maritime en 2009. S'agissant de l'année 2006, la baisse des crédits résulte de la fin des travaux de rénovation du phare de Cordouan, qui ne seront pas reconduits en 2006. 3. Les crédits destinés au contrôle des navires et à la surveillance des affaires maritimes enregistrent des évolutions contrastées Les moyens destinés au contrôle des navires et des affaires maritimes se répartissent entre : - le dispositif de contrôle et de surveillance des affaires maritimes, comprenant d'une part une flottille de trois vedettes régionales et de deux patrouilleurs de haute mer, et d'autre part un réseau de 21 unités littorales des affaires maritimes (ULAM) qui assurent des missions de surveillance et de police, de contrôle technique de certaines catégories de navires et de proximité administrative ; - le dispositif des 15 centres de sécurité des navires (CSN) qui assurent les visites des navires français et, dans le cadre du Mémorandum de Paris, le contrôle des navires étrangers en escale dans les ports français, avec pour objectif l'inspection de plus de 25 % des navires étrangers. Conformément à la nouvelle nomenclature budgétaire, les crédits destinés aux centres de sécurité des navires sont présentés dans l'action « Sécurité et sûreté maritimes », et font l'objet de la sous-action « Contrôle des navires », tandis que les crédits destinés à la surveillance des affaires maritimes sont retracés dans la nouvelle « Action interministérielle de la mer ». Évolution des crédits destinés au contrôle des navires (en milliers d'euros)
Comme le montre ce tableau, l'évolution des crédits est très contrastée suivant l'action considérée. a) Une baisse substantielle des crédits destinés au contrôle des navires Les moyens destinés au contrôle des navires par les centres de sécurité des navires enregistrent une baisse de 12 %, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement. Cette évolution pourrait être préoccupante, si elle ne pouvait être expliquée par des éléments conjoncturels. En effet, les crédits affectés à cette sous-action se répartissent entre les crédits de fonctionnement des CSN, et les crédits informatiques consacrés au suivi des navires. Selon les informations fournies à votre rapporteur, les crédits de fonctionnement seront stables en 2006. En revanche, les crédits informatiques enregistrent une baisse sensible, provenant de l'achèvement du nouveau système d'information en matière de sécurité des navires (SIRENAC) dans le courant de l'année 2006. La réduction de ces crédits n'altère donc pas notre capacité de contrôle dans ce domaine. La question des moyens humains destinés au contrôle des navires est également essentielle. Rappelons que l'objectif de contrôle de 25 % des navires étrangers en escale dans les ports français a imposé la programmation d'un doublement du nombre des inspecteurs des affaires maritimes entre 2001 et 2006, pour atteindre le nombre de 130. Ces inspecteurs sont chargés de la délivrance et du renouvellement des titres de sécurité des navires contrôlés, et effectuent des audits des navires soumis au code international de la gestion de la sécurité. Aujourd'hui, l'effectif des inspecteurs de la sécurité des navires s'élève à 129, dont une partie seulement est habilitée à effectuer les contrôles des navires étrangers. Cette limitation risque de conduire à contrôler davantage les navires français, ce qui n'est évidemment pas l'effet recherché. Selon les informations fournies à votre rapporteur, cette proportion devrait néanmoins augmenter d'une dizaine d'inspecteurs par an, dans la mesure où l'habilitation à contrôler les navires étrangers suppose une ancienneté de deux ans à ce poste ; dans les prochaines années, les inspecteurs nouvellement recrutés vont donc bénéficier progressivement de cette nouvelle compétence. En outre, le taux de contrôle des navires a atteint 27 % en 2004, grâce à la mobilisation d'inspecteurs et le recrutement de vacataires chargés d'assister les inspecteurs, afin de tenir compte de la durée de formation des inspecteurs (18 mois). L'objectif du doublement du nombre des inspecteurs ayant été atteint, le présent projet de budget ne prévoit pas de nouvelle création de postes. b) Une gestion par à-coups des crédits destinés à la surveillance des affaires maritimes Lors de l'examen du projet de budget pour 2005, votre rapporteur s'alarmait de la baisse importante des crédits destinés à la surveillance des affaires maritimes, qui sont l'un des maillons essentiels permettant à l'Etat d'assurer ses missions régaliennes en mer. En effet, entre 2004 et 2005, la dotation de fonctionnement du dispositif de contrôle et de surveillance enregistrait une baisse de 22 %, tandis que les crédits d'investissement passaient de près de 3 millions d'euros à 700 000 euros, ce qui représentait une baisse considérable. Cette baisse avait alors été expliquée par l'achèvement du second patrouilleur de haute mer, s'agissant des crédits d'investissement. Cet achèvement avait permis de faire cesser l'activité de la vedette régionale « Tournepierre » et de retirer de la flotte la vedette régionale « Armoise ». C'est donc avec une certaine satisfaction que votre rapporteur voit cette année les crédits destinés à cette politique enregistrer une augmentation de près de 30 %, même si chacun peut s'interroger sur les causes d'une gestion pluriannuelle aussi chaotique des crédits destinés à une politique dont les axes essentiels sont très prévisibles. Selon les informations fournies à votre rapporteur, les moyens de fonctionnement de cette action s'élèveront en 2006 à près de 774 000 euros, permettant d'assurer l'entretien des patrouilleurs - à hauteur de 300 000 euros -, des vedettes régionales et côtières et des embarcations légères (474 000 euros). Ce chiffre est comparable à celui prévu dans la loi de finances initiale pour 2005. S'agissant par ailleurs des moyens d'investissement, ils devraient remonter à près de 2,7 millions d'euros en 2006, alors qu'ils étaient de 700 000 euros en 2005 et de près de 3 millions d'euros en 2004. Les variations de ce poste budgétaire peuvent surprendre ; selon les informations fournies à votre rapporteur, ces crédits doivent permettre de préserver la capacité d'intervention du dispositif de contrôle et de surveillance, mais aussi de lancer le projet Radarsat 2 et du Fish monering center (FMC), permettant tous deux de fournir un effort important en matière de contrôle des pêches, conformément aux directives fixées dans le cadre de la politique commune des pêches au niveau communautaire. Programme des investissements dans le domaine de la surveillance maritime en 2006 (en milliers d'euros)
IV.- UNE ÉVOLUTION POSITIVE DES CRÉDITS DESTINÉS A.- LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DESTINÉS AUX PORTS DOIVENT ÊTRE CONFORTÉS L'Etat ne saurait être considéré comme le seul responsable de la situation financière des ports autonomes français. Comme leur nom l'indique, ces structures doivent être gérées de manière autonome, comme des activités commerciales classiques, d'autant plus qu'elles s'insèrent dans un secteur, le trafic maritime, totalement mondialisé. Pourtant, l'Etat garde la maîtrise d'une part importante du financement des ports autonomes. Conformément à l'article L. 111-4 du code des ports maritimes, « l'Etat supporte les frais d'entretien et de l'exploitation des écluses d'accès, de l'entretien des chenaux d'accès, de la profondeur des avant-ports, des ouvrages de protection contre la mer. Il supporte, dans les mêmes conditions, pour l'exécution de ces travaux, les dépenses relatives aux engins de dragage dont le régime de propriété et les conditions d'exploitation sont fixés par décret en Conseil d'Etat. » En outre, l'article L. 111-5 du même code prévoit que l'Etat participe à 80 % aux dépenses résultant des opérations de creusement des bassins, de création et d'extension des chenaux d'accès, et de construction des ouvrages de protection contre la mer. Enfin, l'Etat participe à hauteur de 60 % aux charges de création, d'extension ou de renouvellement des ouvrages d'infrastructures. S'agissant des ports d'intérêt national, les financements de l'Etat représentent généralement près du tiers des coûts liés à l'entretien des infrastructures. C'est dire que les crédits examinés chaque année en loi de finances initiale destinés aux ports maritimes sont importants. Il est donc important que l'Etat dote au mieux ses ports, et fasse notamment un effort particulier en faveur de la capitalisation du port du Havre et de la mise en œuvre du projet Fos 2XL à Marseille. S'agissant du projet de budget pour 2006, votre rapporteur est satisfait de constater que les moyens mobilisés permettront à l'Etat de répondre aux missions qui lui sont conférées par la loi dans les ports autonomes, et d'honorer ses engagements contractuels dans le financement des ports d'intérêt national. Comme l'indique le tableau ci-dessous, les crédits destinés aux ports maritimes augmentent, à périmètre constant, de 7,1 %. Évolution des crédits destinés aux ports maritimes (en millions d'euros)
Ce tableau appelle certains commentaires permettant d'en faciliter la compréhension : alors que dans le budget de 2005, l'ensemble des crédits destinés aux ports maritimes étaient présentés dans la section budgétaire « Mer », une partie d'entre eux feront l'objet, à compter de 2006, d'un financement extrabudgétaire, par le biais de l'AFITF, à hauteur de 7 millions d'euros. Sans prendre en compte ce complément, les crédits proprement budgétaires consacrés aux ports maritimes seraient en 2006 de 92,4 millions d'euros, en fonctionnement et en investissement, ce qui représente une baisse assez marquée (-17,4 %). Cette baisse résulte en grande partie de la fin du projet « Port 2000 » au Havre, bénéficiant en 2005 de 19 millions d'euros de crédits. En 2006, les crédits budgétaires seront nuls, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de financements pour l'achèvement définitif du projet. En effet, les travaux en cours pourront être terminés grâce à un financement complémentaire de près de 8 millions d'euros versés par le biais du contrat de plan Etat-région. Etat de l'avancement du projet Port 2000 au Havre Rappelons que le projet Port 2000 a pour ambition de faire du port du Havre une plate-forme majeure à l'échelle européenne pour le trafic des conteneurs en répondant à trois impératifs principaux : - améliorer la qualité des services aux navires ; - diminuer le coût des transferts entre les navires et les transports terrestres ; - absorber la croissance du trafic maritime. Le projet, dont les modalités ont été fixées en décembre 1998 pour un montant de 568 millions d'euros aux conditions économiques de juin 2000, prévoyait la construction des installations suivantes : - un accès nautique sécurisé par la création d'une digue de 5 000 mètres et un nouveau chenal d'accès maritime ; - un potentiel de 12 postes à quai associés à de larges terre-pleins favorisant simultanément le service rapide aux navires et aux conteneurs et le rendement élevé des équipements ; - des transferts aisés de conteneurs entre les terminaux et les différents modes de transport terrestre par navettes routières multi-chariots circulant en site propre ; - des dessertes ferroviaires de proximité permettant la formation de trains au plus proche des quais. Les travaux portant directement sur le port sont menés dans les temps, puisque la première phase des travaux portant sur la construction de 4 postes à quai est terminée, et devrait aboutir à leur mise en exploitation dans le courant de l'année 2005. Le développement important du trafic permet en outre d'envisager la réalisation, à l'horizon de 2007 ou 2008, de deux nouveaux postes à quai sur les 6 prévus dans les enquêtes relatives à la seconde phase des travaux de Port 2000 réalisées le 6 novembre 2001. En outre, la construction d'un quai de 1 400 mètres est achevée, puisque les opérations préalables à la réception de l'ensemble de l'ouvrage ont eu lieu le 7 avril 2005. La digue d'accès provisoire en travers du chenal, d'une longueur de 645 mètres, est terminée depuis le 30 janvier 2004, ainsi que les digues extérieures de près de 6 kilomètres. Enfin, la réalisation des dessertes ferroviaire, routière et fluviale du port avance progressivement. Rappelons que le projet Port 2000 a vocation à être un exemple en termes d'intermodalité. Ainsi, la première phase de remblai des rampes de l'ouvrage ferroviaire d'accès aux voies ferrées de « Port 2000 » est terminée. La pose des rails de la voie ferrée Nord, qui desservira les quatre postes à quai, est achevée, ainsi que les modifications de deux passages à niveau facilitant l'exploitation des voies ferrées. S'agissant ensuite de la desserte routière, les travaux relatifs aux plates-formes d'assise des réseaux et à l'assainissement des terminaux progressent ; le lancement des appels d'offres européens devrait aboutir à l'attribution des marchés correspondant dans le courant de l'année. S'agissant enfin de la desserte fluviale, il faut rappeler que le projet initial ne prévoyait pas de connexion fluviale. Un groupe de travail a donc été lancé, concluant à la nécessité de réaliser cette connexion par le biais d'une écluse fluviale, dont le coût est estimé à 100 millions d'euros. Ce projet a été validé par le CIADT de décembre 2003 ; en attendant sa réalisation, le recours à des barges armées à la navigation maritime est envisagé. En prenant en compte le versement de l'AFITF, on obtient un budget de 99,4 millions d'euros en crédits de paiement, ce qui représente une progression de 7,1 % par rapport à 2005. B.- ÉVITER LES FAUX DÉBATS POUR PRIVILÉGIER LES BONS OBJECTIFS PERMETTANT DE SOUTENIR LA FLOTTE DE COMMERCE Durant l'été et au début de cet automne, le monde de la flotte de commerce a été secoué par deux importants débats, dont l'un a largement été relayé dans la presse nationale. Il s'agit d'une part du débat relatif à la mise en place du registre international français (RIF), et d'autre part, de celui relatif à l'ouverture du capital de la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM). Dans les deux cas, les faux arguments ont souvent été mieux relayés que les analyses de fonds ; votre rapporteur voudrait en conséquence mettre en lumière son point de vue sur ces débats, qui ne doivent pas conduire à occulter les autres aspects fondamentaux de la politique maritime, notamment en faveur de la flotte de commerce. 1. Le RIF et la SNCM ont occupé les débats sur le soutien à notre flotte de commerce - Le vote de la loi du 3 mai 2005 Votre rapporteur a eu le privilège de participer, en tant que rapporteur de la proposition de loi, au fructueux débat qui a précédé le vote de la loi n° 2005-412 du 3 mai 2005 relative à la création du registre international français. Au-delà de tout clivage politique, chacun doit se satisfaire que notre politique maritime ait pu faire l'objet d'un débat aussi intéressant, ce qui arrive relativement rarement au Parlement. On le sait, la première lecture de la proposition de loi au Sénat a abouti à une situation de blocage, résultant d'une incompréhension sur la portée du texte dans les milieux syndicaux. A la demande du ministre, une médiation a été organisée par M. Bernard Scemama, alors président de l'ENIM, pendant laquelle les points de vue ont été considérablement harmonisés entre les armateurs et les syndicats. Lors de l'examen à l'Assemblée nationale, en mars de cette année, le volet social de la proposition de loi a été renforcé sur les trois points suivants : - alors que, dans la proposition de loi issue du Sénat, seuls le capitaine et l'officier chargé de sa suppléance devaient être de nationalité française à bord d'un navire immatriculé au RIF, l'Assemblée nationale a introduit une disposition prévoyant que ces navires auront un quota de marins communautaires de 25 %, et de 35 % pour les navires bénéficiant du dispositif du GIE fiscal. Concrètement, un navire immatriculé au RIF ayant 16 marins - ce qui est la moyenne pour les navires de commerce -, aura quatre marins communautaires, dont deux français et un élève officier de nationalité française. Pour les navires bénéficiant du GIE fiscal, il y aura 6 marins de nationalité communautaire, dont deux sont français. Cette mesure, très favorable au développement de l'emploi maritime français, constituait une avancée importante en direction des syndicats ; - à l'article 13, l'Assemblée nationale a introduit une disposition prévoyant que les rémunérations à bord des navires immatriculés au RIF ne pourront être inférieures aux montants fixés par l'International transport worker's federation (ITF), c'est-à-dire à plus de 800 dollars mensuels, alors que la proposition de loi issue du Sénat prévoyait de fixer ce montant en référence aux planchers de l'OIT, c'est-à-dire environ 500 dollars mensuels ; - enfin, conformément aux conclusions de la mission de médiation, il a été décidé de ne pas autoriser la création de société de manning sur le sol français, dans la mesure où les syndicats de marins estimaient que ce type de sociétés risquerait de mettre en péril la stabilité de l'emploi maritime ainsi que la qualité des conditions de travail. Ces trois avancées sociales ont permis que la proposition de loi soit votée définitivement par le Sénat en deuxième lecture, sans que la promulgation de la loi ne donne lieu aux grèves de marins importantes annoncées par certains. - La mise en œuvre réglementaire de la loi est en bonne voie Une fois la polémique écartée, reste à votre rapporteur le soin de contrôler que la loi du 3 mai dernier sera mise en œuvre rapidement, notamment par le pouvoir réglementaire. La loi du 3 mai 2005 comporte 4 renvois au pouvoir réglementaire : - le décret déterminant le port d'immatriculation ainsi que les modalités conjointes de francisation et d'immatriculation des navires au registre international français dans le cadre d'un guichet unique ; - un arrêté fixant les modalités de la formation embarquée à bord des navires immatriculés au RIF, à défaut de convention ou accord de branche étendu conclu avant le 1er janvier 2006 ; - un arrêté fixant le niveau minimal des rémunérations des navigants, par référence aux rémunérations de l'ITF ; - le décret fixant les conditions d'exploitation de casinos à bord des navires de commerce transportant des passagers. Selon les informations fournies à votre rapporteur, l'arrêté relatif aux rémunérations, ainsi que le décret relatif à l'exploitation des casinos seront prêts avant la fin de l'année 2005. Le décret relatif au port d'immatriculation des navires au RIF pose des problèmes plus importants : initialement, le port de Marseille semblait devoir accueillir ces nouvelles immatriculations, mais ses capacités, notamment humaines, ne seraient pas assez importantes pour faire face à cette nouvelle mission. Le choix définitif du port d'immatriculation devrait intervenir, en tout état de cause, avant la fin de l'année. Ainsi, le registre pourrait être opérationnel au début de l'année 2006. b) L'ouverture du capital de la SNCM a été menée en toute transparence La rentrée parlementaire a été largement marquée par le conflit à la SNCM ; sans entrer dans le détail de la grève, de ses modalités et de ses conséquences financières, votre rapporteur voudrait simplement rappeler les conditions dans lesquelles a été prévue l'ouverture du capital de l'entreprise. Rappelons à titre préliminaire que la situation financière de l'entreprise se dégrade progressivement depuis plusieurs années. Malgré une recapitalisation de 69 millions d'euros en 2003, elle risque d'être contrainte au dépôt de bilan sous peu. Les 26 janvier et 17 février derniers, le Gouvernement a annoncé en toute transparence qu'il allait engager la recherche d'un partenaire privé pour entrer dans son capital. Près de 70 investisseurs industriels et financiers, français ou européens, ont été contactés, avec pour objectif de déterminer les conditions financières d'une offre visant à conforter le projet industriel de la SNCM. A l'issue de cette première phase, les services de l'Etat ont reçu, le 15 septembre dernier, deux offres fermes d'apport en capital, reposant sur une recapitalisation préalable de l'Etat, émanant des groupes français Butler Capital Partners (BCP) et Caravelle. Après avoir participé aux différentes consultations, le groupe Connex a finalement décidé de ne pas remettre d'offre. Après un examen approfondi des deux offres, la proposition de BCP est apparue comme la plus solide et la plus acceptable du point de vue financier. Prenant acte de l'ampleur du conflit suscité par l'ouverture du capital de l'entreprise, le Gouvernement a proposé un montage avec le groupe Connex au côté du groupe BCP, avec le maintien à hauteur de 25 % de la part de l'Etat associée à une part de 9 % réservée aux salariés. Après un conflit social de trois semaines, l'ensemble des parties concernées, notamment les syndicats, semblent avoir compris que cette solution était la seule permettant d'éviter le dépôt de bilan de l'entreprise. Le montage doit désormais être soumis aux instances représentatives du personnel de la SNCM, ainsi qu'à la Commission des participations et des transferts et à la Commission européenne, avant de pouvoir être mis en œuvre. 2. Les moyens destinés aux instruments fiscaux et sociaux de soutien à la flotte de commerce sont considérablement augmentés a) Le dispositif des allègements de charges sociales La part la plus significative des crédits destinés aux allègements de charge sociale est constituée par le remboursement des charges sociales patronales afférentes aux risques vieillesse, maladie et accidents du travail des personnels navigant sur les navires sous registre métropolitain ou des départements d'outre-mer. Les remboursements ont porté en 2003 sur un montant total de 38,75 millions d'euros. En 2004, la dotation s'est élevée à 44 millions d'euros, ce qui a permis de rembourser l'intégralité des charges dues à l'ENIM et à l'URSAFF par les armements éligibles. Suite aux décisions du Comité interministériel de la mer du 2 juin 2000, le dispositif a été étendu, à compter de 2002, au remboursement des charges relatives aux contributions d'allocations familiales et de chômage. Ce remboursement a été réalisé pour la première fois en 2003, mais en raison de l'insuffisance des crédits, il n'a été opéré qu'à hauteur de 80 % pour les armements à passagers (pour un montant total de près de 10 millions d'euros) et à hauteur de 60 % pour les autres armements (pour un montant total de 4,6 millions d'euros), soit au total 14,65 millions d'euros. Pour l'année 2006, l'article 10 de la loi du 3 mai 2005 précitée prévoit, à compter du 1er janvier 2006 une exonération à 100 % des charges patronales dues à l'ENIM pour les équipages embarqués à bord des navires de commerce battant pavillon français affectés à des activités de transports maritimes soumises à la concurrence internationale. Il n'est donc pas prévu, en 2006, de rembourser les charges de l'ENIM acquittées en 2005, sachant par ailleurs que cette modification sera neutre pour les entreprises de travail maritime. Le projet de budget pour 2006 prévoit donc un montant de 38,2 millions d'euros de subvention à l'ENIM pour compenser l'exonération votée dans la loi du 3 mai 2005. Il prévoit en outre 4,4 millions d'euros destinés au remboursement des charges dues à l'URSSAF pour les navigants non affiliés à l'ENIM, et 15 millions d'euros pour le remboursement des charges relatives aux allocations familiales et au chômage des armements à passagers. Par ailleurs, la dotation correspondant au remboursement par l'Etat à la Compagnie générale maritime et financière de certaines charges sociales a été ramenée à 15,8 millions d'euros en 2005, compte tenu d'une réduction des besoins. Rappelons que ce remboursement vise à compenser les charges liées aux personnels sédentaires de l'ancienne Compagnie générale maritime (CGM). Le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une dotation de 15,5 millions d'euros. b) Les dispositifs d'allègement de charge fiscale Outre les allègements de charges sociales, les armements de notre flotte de commerce bénéficient d'allègements de charges fiscales, concernant en premier lieu la taxe professionnelle. Jusqu'à la fin de l'année 2002, cet allègement a reposé sur un dispositif mis en place en 1988 conduisant au remboursement de la part maritime de cette taxe l'année suivant son acquittement par l'armement. Ce dispositif concernait 160 armements, mais son coût s'est révélé trop important, notamment en 2002 où les 7,4 millions d'euros votés en loi de finances initiale ont été très insuffisants pour couvrir le coût de 22,8 millions d'euros de ce dispositif. La loi de finances initiale pour 2003 a donc simplifié ce dispositif en remplaçant le remboursement par un dégrèvement de la part maritime de la taxe professionnelle, accordé sur demande des armements auprès des services des impôts. Ce dégrèvement, qui ne modifie pas le produit fiscal de la taxe professionnelle revenant aux collectivités locales et à leurs groupements, reste à la charge de l'Etat et est désormais inscrit sur le budget des charges communes. Les crédits affectés à ce dispositif se sont élevés en 2005 à 15,46 millions d'euros. Pour l'année 2006, le présent projet de budget prévoit le même montant pour financer ce dégrèvement. Le second dispositif d'allègement fiscal dont bénéficie notre flotte de commerce a été créé par l'article 19 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, sous la forme d'une option pour la taxation forfaitaire au tonnage, venant se substituer à l'imposition sur les sociétés normalement applicable, et dont l'objectif est de maintenir et de développer les activités maritimes dont le centre de décision effectif est situé sur le territoire français. Rappelons que ce dispositif, inspiré du droit anglais ou néerlandais, consiste en la taxation d'un bénéfice déterminé forfaitairement, par l'application d'un barème au tonnage des navires exploités par l'armement. Ce dispositif est optionnel et s'applique par période de 10 ans, pour un coût total annuel de 9 millions d'euros. Le régime de la taxe au tonnage peut être choisi par les entreprises dont le chiffre d'affaires provient pour 75 % au moins de l'exploitation de navires armés au commerce et : - qui ont une jauge brute égale ou supérieure à 50 unités du système de jaugeage universel (UMS) ; - qui, soit sont possédées en pleine propriété ou en copropriété, soit sont affrétées coque nue ou à temps ; - qui sont affectées au transport de personnes ou de biens, au remorquage en haute mer, au sauvetage ou à d'autres activités d'assistance maritime ; - dont la gestion stratégique et commerciale est assurée à partir de la France ; - qui n'ont pas été acquises, pendant la période d'application du régime de la taxe au tonnage, auprès de sociétés liées directement ou indirectement et n'ayant pas opté elles-mêmes pour ce régime. Le régime de la taxe au tonnage offre un nouveau mode de détermination du résultat imposable en appliquant à chacun des navires, par jour et par tranche de jauge nette de 100 UMS, le barème suivant :
Ce barème s'applique également pendant les périodes d'indisponibilité des navires. Pour les sociétés qui sont membres d'un groupe, l'option n'est valable que si elle est exercée par l'ensemble des sociétés membres du groupe susceptibles de bénéficier de ce régime. L'option est formulée pour une période irrévocable de dix années et est renouvelable au terme de cette période. Le régime de la taxe au tonnage prend fin lorsque la société : - ne possède ou n'affrète plus aucun navire éligible ; - ne remplit plus la condition de pourcentage minimum de chiffre d'affaires provenant de l'exploitation de navires armés au commerce ; - devient membre d'un groupe dont les sociétés membres susceptibles de bénéficier de la taxe au tonnage n'ont pas exercé cette option. Quatorze entreprises, parmi les plus importantes, ont opté en 2003 pour la taxe au tonnage, sachant que le chiffre n'est pas encore connu pour l'année 2004. L'évaluation de cette dépense fiscale a été évaluée, pour l'année 2006, à 115 millions d'euros, soit le même montant qu'en 2005. Par ailleurs, afin d'encourager les investissements maritimes, le dispositif du groupement d'intérêt économique (GIE) fiscal, faisant l'objet des articles 39 C et 39 CA du code général des impôts, a été mis en place en 1998 pour permettre aux investisseurs et à l'exploitant du navire de bénéficier d'un avantage fiscal, variable selon le type d'opération, se situant en moyenne entre 20 et 25 % du montant investi. Il permet notamment de bénéficier d'un amortissement exceptionnel ainsi que de l'absence d'imposition sur les plus-values de cession. Pour bénéficier de ce mécanisme, la revente du navire à l'utilisateur doit intervenir lorsqu'au moins les deux tiers de la durée normale d'amortissement du bien sont écoulés (soit 5 ans 1/3). Ce dispositif fiscal permet de favoriser l'investissement maritime et donc d'accroître le nombre et de moderniser les navires qui battent pavillon français. En 2004, 14 dossiers ont été déposés pour 22 navires, et 11 navires ont été agréés ou pré-agréés, pour un investissement total de 1 942 millions d'euros. Le montant de l'avantage fiscal global pour l'année 2004 s'élève à 667 millions d'euros, auxquels il faut ajouter 551 millions d'euros pour les pré-agréments, soit un total de 1 238 millions d'euros. Le dispositif du GIE fiscal a fait l'objet, le 19 février 2004, d'une demande de renseignements de la part de la Commission européenne, qui souhaite apprécier la conformité de ce dispositif au droit communautaire de la concurrence. Le 14 décembre 2004, la Commission a ouvert une procédure à l'encontre du dispositif, considérant qu'il était constitutif d'une aide d'Etat incompatible avec le traité instituant la Communauté européenne. De ce fait, le dispositif du GIE fiscal est aujourd'hui en sommeil ; comme le montre le tableau ci-dessous, le nombre des dossiers déposés a considérablement baissé en 2004 et en 2005. En attendant que la situation soit clarifiée au niveau communautaire, le dispositif du GIE fiscal est de fait inopérant. Votre rapporteur appelle le Gouvernement à faire tout ce qui est possible pour que cet avantage fiscal puisse être à nouveau mis en œuvre, afin d'éviter que certains armateurs ne soient tentés d'immatriculer leurs navires à l'étranger. BILAN DU GIE FISCAL AU 30 JUILLET 2005
Source : Ministère de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer * * * En conclusion, votre rapporteur estime que le présent projet de budget, en dépit de ses difficultés de lecture, permet de préserver les crédits essentiels destinés à la sécurité maritime et au soutien à la flotte de commerce. Hors du cadre strictement budgétaire, il faut également rappeler les attentes du monde du commerce maritime s'agissant de la mise en place du RIF et du déblocage, au niveau communautaire, du dossier du GIE fiscal. Lors de sa réunion du 12 octobre 2005 (6), la Commission a entendu M. Dominique Perben, ministre des Transports, de l'Équipement, du Tourisme et de la Mer, sur les crédits de la sécurité et des affaires maritimes pour 2006. Après une présentation des crédits de la mission « Transports » par le ministre, M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis pour le programme sécurité et affaires maritimes, a indiqué partager l'optimisme du ministre quant à la modernisation des Centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), puisque les crédits 2006 vont permettre de terminer le programme de rénovation des radars surveillant le trafic dans la Manche. Les crédits alloués à la signalisation maritime, en hausse de 8 %, permettront de poursuivre la modernisation des Unités littorales des affaires maritimes (ULAM), et des sémaphores. Quant à la somme destinée au contrôle et à l'inspection des navires, elle permettra de maintenir l'effort de la France à un niveau supérieur à celui requis par l'Union européenne. Par conséquent, il a estimé que les crédits inscrits en faveur de la sécurité maritime étaient à la hauteur de l'enjeu. Le rapporteur pour avis, a également exprimé sa satisfaction à propos de l'enseignement maritime, dont le budget progresse de 12 %, au profit de l'ensemble des filières de l'enseignement maritime, c'est-à-dire aux lycées maritimes et aux écoles de la marine marchande. Les crédits de la flotte de commerce augmentent de 20 %, ce qui confortera les capacités de remboursement des charges sociales et d'exonération des navires français. En corollaire, le rapporteur pour avis a posé deux questions au ministre. Premièrement, quand les autorités communautaires formuleront-elles une réponse définitive à propos du groupement d'intérêt économique fiscal (GIE), une mesure efficace adoptée en 1998 mais qui n'avait pas été notifiée ? En outre, les décrets d'application de la loi relative au registre international français seront-ils pris avant la fin de l'année ? Les crédits d'équipement des ports accusent une légère régression compte tenu de l'achèvement du projet Port 2000, plus gros dossier d'investissement portuaire français, qui voit par conséquent ses crédits baisser de 10 millions d'euros en 2006. Le rapporteur pour avis a regretté n'avoir pas retrouvé, dans les documents budgétaires mis à sa disposition, les crédits dégagés par l'État en faveur des travaux de liaison entre le futur Port 2000 et la voie ferrée actuelle Paris-Le Havre. Il a regretté que cette liaison ne soit que très lentement mise en œuvre par la SNCF et RFF. Enfin, les crédits à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) sont maintenus. Jugeant satisfaisants les moyens affectés au budget de la mer, le rapporteur pour avis a invité la Commission à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Transports ». M. Daniel Paul, s'exprimant au nom du groupe communiste, a prévenu qu'il ne serait pas aussi dithyrambique que son collègue Jean-Yves Besselat. Il a évoqué les problèmes rencontrés par les ports du Havre et de Rouen concernant le contournement ferroviaire de la région parisienne. Il a estimé que l'État ne semblait pas disposé à traduire en actes l'ambition qu'il fait mine de partager avec les autorités portuaires, car le soutien financier requis pour ce contournement tarde à être débloqué : sur les 160 à 500 millions nécessaires - la fourchette est large - pour que les deux ports se développent au niveau de ceux d'Anvers et de Rotterdam, seuls 68 millions ont été débloqués. Le car-ferry transmanche entre Le Havre et Portsmouth vient de changer de propriétaire : la compagnie P&O s'est retirée, jetant 3 000 salariés de France et de Grande-Bretagne au chômage, et la reprise est assurée par Louis Dreyfus. Constatant que tous ces navires battent pavillon étranger et sont armés par des équipages étrangers, M. Daniel Paul a considéré qu'il serait intéressant que l'inspection du travail y effectue des contrôles et a déploré que ce soit impossible. Enfin, il a évoqué l'expérience d'autoroute de la mer menée entre les ports de Toulon et de Rome et s'est enquis des aides qui pourraient être apportées à cette alternative non pas décisive mais intéressante face à l'engorgement des réseaux routiers, en particulier sur le littoral. En réponse aux différents intervenants, le ministre a apporté les éléments d'information suivants : - Le transport maritime courte distance bénéficie d'une aide d'un million d'euros sur trois ans. Les autoroutes de la mer visent un objectif autrement plus ambitieux et supposent la mise au point de projets avec les entreprises et armateurs concernés. L'Espagne paraît intéressée, aussi bien sur la côte atlantique que dans la Méditerranée, ainsi que les Pays-Bas, mais force est de constater que cette volonté tarde à se concrétiser. Un séminaire gouvernemental avec les Espagnols est prévu pour la semaine prochaine. Ce serait à l'évidence un bon moyen de soulager nos autoroutes d'une partie du trafic. - Le difficile dossier de la SNCM a été l'occasion de discuter avec les organisations syndicales des problèmes de concurrence. Une modification des règles en matière d'inspection du travail maritime pourrait être proposée dans le cadre du projet de loi sur les transports, qui devrait être discuté à l'Assemblée en décembre, afin de combler un vide juridique : les inspecteurs du travail maritime n'ont en effet pas le droit de demander la nationalité des marins des bateaux qu'ils contrôlent, à moins de faire appel à la police de l'air et des frontières ou à la police maritime. Il convient de mettre un terme à cette situation absurde. Parallèlement, les moyens de l'inspection du travail seront renforcés. - Afin de répondre à la situation créée par l'absence d'obligation de pavillon sur les transports de passagers intracommunautaires, le ministre a envisagé que la France prenne une initiative au niveau communautaire visant à imposer des conditions sociales communautaires sur ce type de transport. Cette question avait déjà fait l'objet d'une tentative en 1998 et avait été depuis abandonnée. C'est pourtant un réel problème tant le plan social que sur celui de l'égalité devant la concurrence. - Pour ce qui est de la sécurité en mer, le programme de modernisation de la couverture radar est en cours de réalisation : la rénovation de celui de Saint-Frieux est prévue pour 2006. La mise en réseau des radars, des sémaphores de la marine nationale, des CROSS et des centres opérationnels de la marine est également prévue. - La totalité des crédits budgétaires prévus au titre de Port 2000 a été mise en place dans les lois de finances. Grâce à des reports les années précédentes, 8 millions de crédits de paiement seront versés en 2006 pour ce projet. À ces montants s'ajoutent 35 millions d'euros en autorisations d'engagement en 2005 et 2006 pour les investissements sur les dessertes ferroviaires. Enfin, l'AFITF consacrera 13,6 millions d'euros en 2005 et 2006 à l'interface maritime, ferroviaire et fluviale et aux études de maîtrise fluviale. Encore faut-il maintenant que l'organisation du travail portuaire évolue, elle aussi, de manière satisfaisante afin que Le Havre puisse faire jeu égal avec les grands ports de la façade atlantique de l'Europe. - S'agissant du registre international français, les textes d'application sont en cours de finalisation. Le GIE, qui conditionne la réussite du RIF, fait encore l'objet de discussions avec la Commission qui n'a pas encore réagi à la réponse que la France lui a apportée. Une nouvelle réunion technique se tiendra très prochainement. Il sera alors possible de proposer un dispositif comparable à celui du GIE fiscal malheureusement contesté par Bruxelles, et qui permette de restaurer la place de la flotte marchande française. · · · La Commission a ensuite examiné les crédits de la mission « Transports ». Elle a approuvé les conclusions du rapporteur Jean-Yves Besselat sur les crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes ». En conséquence, elle a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Transports ». --____-- --------- N° 2570-13 - Avis présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540), tome XIII : Sécurité et affaires maritimes (M. Jean-Yves Besselat) 1 () Loi n° 2004-146 du 16 février 2004 autorisant la ratification des conventions de l'Organisation internationale du travail n°163 concernant le bien-être des gens de mer, en mer et dans les ports, n° 164 concernant la protection de la santé et les soins médicaux des gens de mer, n° 166 concernant le rapatriement des marins, n° 178 concernant l'inspection des conditions de travail et de vie des gens de mer, n° 179 concernant le recrutement et le placement des gens de mer, n° 180 concernant la durée du travail des gens de mer et les effectifs de navire, n° 185 concernant les pièces d'identité des gens de mer (révisée), et du protocole relatif à la convention n° 147 concernant les normes minima à observer sur les navires marchands. 2 () Le naufrage de l'Erika, ayant eu lieu à la fin du mois de décembre 1999, peut y être rattaché. 3 () Les autres pays sont le Royaume-Uni, la Belgique, l'Irlande, l'Espagne et le Portugal. 4 () Ces chiffres ne comprennent pas la demande d'indemnisation de l'Etat français. 5 () Le Navtex est un service international relevant du système mondial de détresse et de sécurité en mer, permettant l'émission des bulletins météorologiques, des avertissements de navigation ainsi que des messages pour les services de pilotage. 6 () Ce compte-rendu est constitué d'un extrait de l'audition ayant eu lieu le 12 octobre 2005, composé uniquement des interventions relatives au secteur de la mer. - Cliquer ici pour retourner au sommaire général - Cliquer ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires © Assemblée nationale |