N° 2570 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005 AVIS PRÉSENTÉ AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L'ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2006 (n° 2540), TOME XIV TRANSPORTS TRANSPORTS AÉRIENS CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS PAR MME ODILE SAUGUES Députée. -- Voir le numéro : 2568 (annexe 38). INTRODUCTION 5 I.- LE PREMIER BUDGET EN APPLICATION DE LA LOLF 9 A.- UN PROGRAMME ET UNE MISSION 9 1. Une comparaison particulièrement difficile pour 2006 9 2. Le programme « Transports aériens » 10 3. La mission budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » 12 a) Soutien aux prestations de l'aviation civile 12 b) Navigation aérienne 13 c) Contrôle et certification 13 d) Formation aéronautique 14 4. Une hausse trompeuse et des problèmes non résolus 15 a) Une hausse trompeuse 15 b) Un problème non résolu : les crédits de l'ex FIATA 16 c) Le problème de l'Outre-mer 16 B.- LA RÉFORME DE LA DGAC 17 C.- LA MISE EN œUVRE DE NOUVELLES REDEVANCES 18 II.- UNE REPRISE FRAGILE DU TRAFIC, QU'IL FAUT CONSOLIDER 22 A.- UNE REPRISE RÉELLE DU TRAFIC 22 1. Un rattrapage en 2004, la poursuite de la reprise en 2005 22 2. Quelles perspectives ? 23 a) Les hypothèses retenues par le Gouvernement 23 b) Les prévisions des organisations internationales 23 c) Des hypothèses de trafic volontairement basses ? 25 3. La taxe de solidarité pour financer l'aide au développement 25 B.- UN SECTEUR QUI DOIT ENCORE ÊTRE SOUTENU 27 1. La poursuite de la recomposition du transport aérien 27 a) La situation contrastée des compagnies dans le monde 27 b) L'essor préoccupant des compagnies à bas prix 29 2. Des répercussions sur les autres acteurs du transport aérien 31 a) Les aéroports régionaux 31 b) Les aéroports franciliens : comment relier investissements et redevances ? 33 C.- LA PERSISTANCE DE MENACES QUI RENDENT NÉCESSAIRE UN BUDGET DE SOUTIEN 37 III.- SÉCURITÉ ET ENVIRONNEMENT : DEUX DÉFIS POUR LE TRANSPORT AÉRIEN 39 A.- LA SÉCURITÉ A UN COÛT 39 1. L'illusion de la sécurité low cost 39 2. La succession d'accidents de l'été 2005 39 3. La liste noire 40 4. Donner au BEA les moyens d'action nécessaires 42 B.- ACCOMPAGNER LA CROISSANCE DANS LE RESPECT DE L'ENVIRONNEMENT 43 1. La lutte contre les nuisances aéroportuaires 43 2. La lutte contre l'effet de serre 44 3. Le développement des communautés aéroportuaires 46 EXAMEN EN COMMISSION 49 MESDAMES, MESSIEURS, Si, à l'automne 2004 le président de l'International Air Transport Association, IATA, parlait de l'état de « sinistre absolu » du secteur du transport aérien et des conséquences pour les compagnies aériennes ainsi que de l'état du trafic et de la conjoncture mondiale, un an plus tard, la situation est extrêmement contrastée selon les pays et les acteurs concernés. La reprise du trafic est incontestable, mais elle ne profite pas à tout le monde, des zones comme l'Amérique Latine ou l'Asie sont particulièrement dynamiques, tout comme les pays de l'Est qui viennent d'adhérer à l'Union européenne. Les vols longs courriers connaissent une forte croissance mais le trafic domestique stagne en France, (difficultés pour Air Horizons créée il y a un an). L'Italie connaît encore des difficultés avec Alitalia, la Grèce avec Olympic Airlines. Quant aux USA, Delta Airlines et Northwest sont placées sous la protection du chapitre 11 de la loi sur les faillites. L'accentuation de la pression concurrentielle, qui va continuer à peser du fait de la libéralisation du transport aérien, va générer des surcapacités prévisibles sur l'Atlantique Nord, s'ajoutant au développement de l'offre des compagnies du Moyen-Orient, positionnées sur les grands flux Europe/Asie. Les menaces persistent dans le monde de l'aérien. Une crise sanitaire (grippe aviaire) pourrait, comme ce fut le cas au moment du SRAS, plonger à nouveau l'économie des transports aériens dans plusieurs années de crise. Le risque d'attentat, a déjà entraîné une hausse considérable des dépenses de sûreté. S'il se concrétisait, les conséquences, semblables à celles du 11 septembre 2001, seraient évidemment terribles. Mais c'est d'abord la facture pétrolière qui limite la croissance. Les pertes dues à la hausse du prix du carburant sont estimées à près de 7,5 milliards de dollars pour 2005. Ce surcoût pèse sur les compagnies, notamment sur les « low costs », très sensibles à la variable prix, et sur celles qui ne disposent pas d'une bonne couverture. Il est également répercuté sur le prix du billet dont s'acquittent les passagers, et risque donc de ralentir le développement des transports aériens. D'autre part, les acteurs du transport aérien sont confrontés à des enjeux considérables. Le premier d'entre eux est celui de la sécurité. La tragique série d'accidents de cet été se poursuit, après trois crashs très meurtriers en août, ceux d'un Boeing de la compagnie indonésienne Mandala Airlines en septembre, et d'un appareil de la compagnie Bellview Airlines au Nigeria fin octobre. Compte tenu de l'augmentation du trafic et malgré les progrès accomplis pour diminuer les risques d'erreur humaine et de problèmes techniques, la fréquence des accidents pourrait devenir très inquiétante. La congestion des aéroports, à propos de laquelle la Commission européenne a lancé une consultation illustre le conflit d'intérêts qui pèse sur les transports aériens : comment assurer la croissance du trafic et des échanges sans accroître à mesure les nuisances, notamment sonores, dont souffrent les riverains des aéroports, ou les émissions de gaz à effet de serre, dont la réduction est devenue un enjeu mondial ? Dans ce contexte, on attendrait de l'Etat un budget de soutien. En effet, si les transports aériens sont particulièrement sensibles à la conjoncture économique globale, ils constituent également un facteur de croissance important. Ils représentent la quatrième branche la plus dynamique de l'économie française. La branche « transports aériens » contribue à environ 1 % du PIB français, pour 17 milliards d'euros en 2004. Chaque emploi direct créé génère au moins trois emplois indirects ou induits. La Fédération nationale de l'aviation marchande (FNAM) estime à 400 000 le total des emplois découlant de l'activité du transport aérien. Cet effet positif sur l'emploi est particulièrement sensible au niveau des plates-formes aéroportuaires. Selon l'Airports Council International (ACI) Europe, un trafic d'un million de passagers sur un aéroport génère en moyenne 4000 emplois. Les aéroports de Paris concentrent 6 % de l'emploi régional, avec un rythme de croissance de 5 % en 2004, soit nettement plus que la moyenne nationale. Les emplois dans le secteur aérien sont aussi qualifiés que productifs : chacun d'eux génère une valeur ajoutée de 80 000 euros, contre 50 000 euros pour un emploi moyen français. Cependant, comme l'an dernier, le Gouvernement a choisi de faire peser sur les compagnies aériennes l'incertitude sous-jacente aux prévisions de trafic qui fondent le calcul des taxes et des redevances. Les acteurs du transport aérien sont ainsi amenés à contribuer plus que de raison aux finances publiques. Quant à la hausse des crédits, elle tient essentiellement à la mise en œuvre du changement de statut d'Aéroports de Paris, conformément à la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports, à la mise en place d'un compte d'affectation spéciale Pensions et à la mise aux normes des prestations familiales. Enfin, ce budget est discuté alors que le Président de la République a annoncé la création d'une taxe supplémentaire sur les billets d'avion destinée à contribuer au financement de l'aide au développement, et dont votre rapporteure estime qu'il s'agit pour le moins d'une fausse bonne idée. L'indispensable solidarité, pour être efficace, ne doit pas reposer sur un seul secteur dont elle risque d'aggraver les difficultés. Ce budget ne lui paraissant pas à la hauteur des enjeux, votre rapporteure vous propose d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits du transport aérien pour 2006. I.- LE PREMIER BUDGET EN APPLICATION DE LA LOLF A.- UN PROGRAMME ET UNE MISSION 1. Une comparaison particulièrement difficile pour 2006 La présentation et la répartition des crédits du transport aérien sont assez fortement modifiées par rapport au PLF 2005. Les moyens alloués à la recherche aéronautique font désormais partie du programme « recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat » de la mission « recherche et enseignement supérieur ». Même si le ministère de l'équipement et des transports reste responsable de la gestion d'une partie de ces crédits, ils ne sont plus inscrits au budget des transports, et ne rentrent donc plus strictement dans le champ de cet avis. Le périmètre du budget annexe de l'aviation civile (BAAC), devenu le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qui fait l'objet d'une mission, et celui du budget général (programme « transports aériens » de la mission « transports ») ont été fortement modifiés. Au 1er janvier 2006 entreront en vigueur les dispositions de la LOLF concernant les budgets annexes. Conformément à l'article 18 de la loi organique, qui prévoit que « des budgets annexes peuvent retracer, dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'Etat non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances, lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services » le BAAC ne pourra plus être alimenté par des taxes, mais uniquement par des redevances, et son périmètre sera réduit en conséquence. L'impact lié à la mesure du transfert des activités régaliennes du BAAC vers le budget général est de 72 millions d'euros. De plus, le découpage des programmes en actions a très fortement évolué par rapport à la maquette présentée en Conseil des ministres le 16 juin 2004, et à la préfiguration de la présentation LOLF du PLF 2005. Les crédits concernés par l'avis budgétaire sont désormais ceux des actions, programmes et missions décrits ci-dessous. LES CRÉDITS DES TRANSPORTS AÉRIENS ET DE LA MÉTÉOROLOGIE (en millions d'euros)
(1) Dans le projet de loi de finances pour 2006. Source : projet de loi de finances pour 2006. 2. Le programme « Transports aériens » La maquette du programme « Transports aériens » a été totalement repensée, pour mieux refléter la nouvelle organisation de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) mise en place au cours du 1er semestre 2005, ainsi que le transfert des activités régaliennes du budget annexe de l'aviation civile sur ce programme du budget général. Ce programme compte cinq actions. o Action 1 : Affaires techniques, prospective et soutien au programme Cette action retrace principalement les missions dévolues à la Direction des affaires stratégiques et techniques (DAST) : réglementation technique applicable en France dans le domaine de l'aviation civile, élaboration des orientations stratégiques du secteur et sûreté-défense. Elle comporte également une composante générale relative aux moyens de soutien de la DGAC non rattachables au budget annexe de l'aviation civile : quote-part des frais généraux de la DGAC et des personnels de soutien, personnels et moyens de la direction des programmes aéronautiques et de la coopération, personnels et moyens de l'inspection générale de l'aviation civile. o Action 2 : Régulation du transport aérien Cette action est animée par la Direction de la régulation économique (DRE) qui a en charge les questions économiques, juridiques et sociales relatives aux acteurs du transport aérien. Outre les crédits de péréquation des lignes d'aménagement du territoire de l'ex-FIATA budgétisé en 2005, cette action comprend également les emplois, les crédits de fonctionnement et d'investissement (études, statistiques, informatique) correspondant à sa mission de régulateur avec les entreprises de transport aérien. o Action 3 : Régulation des aéroports Cette action est également animée par la Direction de la régulation économique qui a en charge la politique aéroportuaire. L'action regroupe les crédits de subventions de sécurité - sûreté aéroportuaires de l'ex-FIATA ainsi que les emplois et crédits aéroportuaires inscrits jusqu'en 2005 sur le budget annexe de l'aviation civile (investissements essentiellement). o Action 4 : Enquêtes de sécurité aérienne Cette action correspond au bureau d'enquêtes et d'analyse pour la sécurité de l'aviation civile (BEA). Les moyens du BEA (effectifs et crédits) étaient jusqu'à présent inscrits sur le BAAC. Cette mission régalienne est désormais retracée sur le programme transports aériens. o Article 5 : ACNUSA L'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) émet des recommandations sur toute question relative à la mesure du bruit et notamment à la définition d'indicateurs adéquats, à l'évaluation de la gêne sonore, à la maîtrise des nuisances sonores issues du transport aérien et de l'activité aéroportuaire ainsi qu'à la limitation de leur impact sur l'environnement. L'ACNUSA dispose également du pouvoir, sur proposition de la commission nationale de prévention des nuisances, de prononcer des sanctions administratives à l'encontre des personnes morales ou physiques ne respectant pas les mesures prises par le ministre chargé de l'aviation civile sur un aérodrome (restriction d'usage de certains appareils, procédures particulières et horaires d'atterrissage et de décollage, etc..). Les autorités publiques, les agents publics, les exploitants d'aérodromes et les transporteurs aériens ne peuvent s'opposer à l'action de l'ACNUSA et doivent prendre toutes mesures utiles pour la faciliter. L'ACNUSA établit chaque année un rapport public rendant compte de son activité. Elle peut y suggérer toutes modifications législatives ou réglementaires qui lui paraissent nécessaires pour tenir compte des évolutions techniques et des progrès de la connaissance en matière de santé humaine. ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME TRANSPORTS AÉRIENS,
Source : documents budgétaires. 3. La mission budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » La mission du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » est constituée de quatre programmes : a) Soutien aux prestations de l'aviation civile Ce programme a vocation à regrouper l'ensemble des fonctions support de la mission « Contrôle et exploitation aériens » correspondant au budget annexe de l'aviation civile, et à assurer leur mise en œuvre au profit des directions et services agissant dans ce cadre : la direction des services de la navigation aérienne, la direction du contrôle de la sécurité, les directions de l'aviation civile et le service technique de l'aviation civile pour la part de leur activité correspondante ainsi que le service d'exploitation de la formation aéronautique. Il s'inscrit dans une démarche de gestion au profit d'activités de prestations de service tournées vers la satisfaction des besoins des usagers qui fait appel à des compétences spécialisées dans les domaines du management, de la gestion des ressources humaines, des questions juridiques, des questions financières et plus généralement à une expertise dans le domaine réglementaire et de l'organisation de l'Etat. Alors que les activités des autres programmes de la mission s'exercent essentiellement directement au profit d'usagers extérieurs, la finalité de ce programme s'exerce au profit de bénéficiaires internes à la DGAC, services et agents eux-mêmes. Le programme assure au profit des services ou parties de service relevant du budget annexe une triple fonction de direction, de pilotage des politiques et de gestion des ressources correspondant aux deux actions suivantes : - ressources humaines et management ; - affaires financières et logistique. Ce programme doit permettre à l'Etat d'assurer un écoulement sûr et régulier du trafic aérien, en tenant compte des contraintes environnementales, et d'optimiser l'utilisation de l'espace aérien qui accueille des circulations aériennes civiles et militaires. Le choix a été fait d'assurer les services de navigation aérienne dans leur globalité c'est-à-dire le contrôle de la circulation aérienne proprement dit, mais aussi les services de communication, de navigation et de surveillance ainsi que le service d'information aéronautique. La direction des services de la navigation aérienne (DSNA) constitue le prestataire de services de la navigation aérienne national, intégré, doté de moyens techniques, financiers et humains. La DSNA rend les services aux usagers par cinq centres en route de la navigation aérienne (CRNA), et par les organismes chargés du contrôle d'approche et d'aérodrome sur près de 90 aérodromes en métropole et outre-mer. Le programme correspond à cette prestation de services, séparée fonctionnellement des autorités nationales réglementaires et de surveillance. Il vise à développer la sécurité et la capacité d'écoulement du trafic, avec des moyens modernisés et harmonisés, pour offrir à ses usagers une qualité de service élevée, dans le respect de la priorité accordée à la protection des passagers, des populations survolées et des biens. Le regroupement dans le programme, au sein même de la DSNA, des organismes des aéroports parisiens, de province et d'outre-mer mais aussi des services techniques centraux, et de l'information aéronautique, se traduit également par une simplification des circuits financiers et une transparence améliorée. Enfin, le programme couvre la formation des personnels techniques spécifiques nécessaires au prestataire de services. Le programme « Surveillance et certification » a pour vocation de retracer les actions exercées par la direction générale de l'aviation civile pour s'assurer du respect des dispositions législatives et réglementaires nationales et internationales applicables dans le domaine de la sécurité et de la sûreté. Garante du haut niveau de sécurité et de sûreté en aviation civile, la DGAC place ces actions dans un environnement aujourd'hui mondialisé. Néanmoins, elle développe également une importante politique de déconcentration des tâches et des décisions au niveau le plus approprié. Responsable de la sécurité et de la sûreté, la DGAC veille au maintien de la sécurité du transport aérien à son plus haut niveau et adapte en permanence ses méthodes de contrôle et de surveillance aux évolutions de la réglementation, des pratiques et des procédures définies par les normes internationales. La DGAC travaille en coopération avec les acteurs institutionnels, économiques et industriels de l'aéronautique civile. Elle est en contact permanent avec les acteurs européens et internationaux, les autres administrations sur les sujets ayant trait à la sécurité et à la sûreté. Le programme « Formation aéronautique » retrace les activités de formation aux métiers de l'aéronautique dont la direction générale de l'aviation civile a la charge et qui sont mises en œuvre par deux opérateurs spécialisés, l'école nationale de l'aviation civile, établissement public à caractère administratif, et le service d'exploitation de la formation aéronautique, service à compétence nationale de la DGAC. Exercées au profit du secteur aérien français ou de la DGAC elles-mêmes, ces formations contribuent au maintien du haut niveau de sécurité du transport aérien français et au rayonnement de l'industrie aéronautique ; elles servent de référence au secteur privé. Le maintien du haut niveau de sécurité passe en premier lieu par la compétence professionnelle des personnels opérationnels pilotes et contrôleurs aériens sur lesquels repose la sécurité immédiate du trafic aérien. Pour maintenir tout au long de leur carrière leur niveau de compétence, ces derniers doivent bénéficier d'une formation initiale de haut niveau, s'appuyant sur des modes de recrutement exigeants. A cet égard, la formation française, héritière d'une longue tradition, est reconnue comme étant aux meilleurs standards internationaux. Les autres acteurs de la chaîne de sécurité que sont les ingénieurs, les électroniciens et les techniciens contribuent également aux performances et à la sécurité du système. Le rayonnement de l'industrie aéronautique française nécessite que la vente des matériels et produits aéronautiques soit accompagnée de la formation de leurs utilisateurs. Ces actions concernent les mêmes catégories de personnels : pilotes à l'appui de la vente d'avions, contrôleurs et électroniciens à l'appui de systèmes de contrôle aérien, ingénieurs et techniciens à l'appui du développement des autorités et opérateurs de navigation aérienne d'autres pays. La formation des contrôleurs aériens et des pilotes obéit à des normes internationales de sécurité se traduisant par la délivrance de licences qui doivent être renouvelées périodiquement. Depuis quelques années pour les pilotes, à partir de 2005 pour les contrôleurs, ces licences font l'objet de directives européennes que les entreprises et administrations françaises et bien sûr les écoles de formation doivent respecter. Ces exigences se traduisent pour ces écoles par la recherche de standards de qualité élevés. EVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION CONTRÔLE
Source : documents budgétaires. 4. Une hausse trompeuse et des problèmes non résolus 166 millions d'euros sont prévus dans le PLF 2006 pour le programme « Transports aériens » du budget général, et 1 728 millions pour la mission « Contrôle et exploitation aériens » du budget annexe (complétés par 192 millions d'euros d'autofinancement). Les crédits du transport aérien prévus pour 2006 s'élèvent donc à 1 894 millions pour 2006, alors qu'ils n'étaient en 2005 que de 1 654 millions, soit une progression de 14,5 % à périmètre constant, correspondant à 250 millions supplémentaires. Toutefois, on peut parler d'une progression en trompe-l'œil, dans la mesure où cette hausse des crédits est due pour une grande part au remboursement des immobilisations réalisées par Aéroports de Paris (ADP) pour la navigation aérienne, transférées à la DGAC. Ce remboursement par l'Etat de 152,5 millions à ADP, qui est une conséquence du changement de statut prévu par la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports, explique plus de la moitié de la hausse du budget (budget annexe). D'autre part, le relèvement des pensions civiles lié à la création du compte d'affectation spéciale « Pensions » et le nouveau mode de gestion des prestations familiales contribuent à la hausse du budget annexe pour près de 43 millions d'euros, et à celle du budget général pour plus de 10 millions. b) Un problème non résolu : les crédits de l'ex FIATA Depuis le 1er janvier 2005, les crédits de l'ancien fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA), qui constituait le compte d'affectation spéciale n° 902-25 ont été versés au budget général, conformément à la LOLF. Votre rapporteure avait émis l'an dernier de fortes réserves concernant le montant et l'emploi de ces crédits et se voit obligée de les réitérer. Ces crédits servent à des subventions aux entreprises de transport aérien en vue d'assurer l'équilibre des dessertes aériennes réalisées dans l'intérêt de l'aménagement du territoire, et certaines dépenses concernant les services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs (SSLIA), la sûreté, la lutte contre le péril aviaire et les mesures effectuées dans le cadre des contrôles environnementaux. Les crédits demandés dans le PLF 2006 pour le soutien aux liaisons aériennes (action régulation économique, budget général) sont en baisse. Aucune autorisation d'engagement n'est prévue, et il n'est pas envisagé de signature de nouvelles conventions en 2006. On peut donc s'inquiéter pour la survie de certaines lignes et s'interroger sur l'importance accordée à l'aménagement du territoire. Les crédits de paiements prévus s'élèvent à 19,6 millions, et seront complétés par 2 millions de reports de crédits, soit au total 21,6 millions d'euros, qui se décomposent ainsi : 18,1 millions pour le versement d'acomptes exigibles en 2006, et 3,4 millions pour le versement de soldes. En 2005, 21,6 millions étaient inscrits en crédits de paiement, complétés par 6,5 millions de reports de crédits. Le budget de soutien aux liaisons aériennes était déjà en baisse en 2005 par rapport à 2004, année où 28 millions étaient prévus en crédits de paiement. La loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'Outre-mer (LOPOM) avait prévu une dotation de continuité territoriale de 30 millions en 2004 et 31 millions en 2005, financés par les crédits du FIATA. Votre rapporteure avait dénoncé ce mode de financement, qui conduisait à augmenter le taux de la taxe d'aviation civile (TAC), alors qu'il s'agit de dépenses de solidarité nationale, qui ne doivent pas peser uniquement sur les compagnies aériennes. D'autres mesures permettent en effet de financer la continuité territoriale : le financement par l'Etat de liaisons d'aménagement outre-mer (financement du déficit d'exploitation de certaines lignes faisant l'objet d'obligations de service public, conjointement avec les collectivités locales), aides fiscales à l'investissement, exonérations de charges patronales de sécurité sociale par exemple. En 2004, le ministère de l'Outre-mer avait finalement pris en charge directement 12 millions, dont l'équivalent a alors été affecté au BAAC. En 2005, la contribution du produit de la TAC au financement de la mesure outre-mer a pourtant été maintenue à hauteur de 30 millions. Dans le PLF 2006, cette mesure est reconduite et représente 9,14 % du produit estimé de la TAC pour 2006. C'est un montant qui est loin d'être négligeable compte tenu de la situation actuelle encore fragile des acteurs du transport aérien. Votre rapporteure dénonce la baisse des crédits de soutien aux liaisons aériennes, et déplore que ce budget continue de faire peser sur le secteur des transports aériens le financement de politiques qui relèvent de la solidarité nationale. La réorganisation de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) est effective depuis le 3 mars 2005, date de publication au journal officiel de cinq décrets pris en Conseil d'Etat. Ces textes réglementaires ont formalisé en particulier la création d'un régulateur, d'une autorité de surveillance et d'une direction des services de navigation aérienne érigée en service à compétence nationale et non plus en direction d'administration centrale, qui correspondent aux trois pôles : un pôle régalien, un pôle surveillance et certification, un pôle « prestataires ». La réorganisation de la DGAC traduit une meilleure adéquation aux principes de la réforme de la LOLF, mais aussi la mise en œuvre des quatre règlements européens « Ciel unique » du 10 mars 2004 qui encadrent désormais les conditions de gestion de l'espace aérien et de fourniture des prestations de services en matière de navigation aérienne et la création en 2002, par un autre règlement européen, de l'agence européenne de la sécurité aérienne (AESA). Elle est également conforme aux recommandations de la mission parlementaire sur la sécurité du transport aérien de voyageurs de juillet 2004. Avant cette réforme, l'administration centrale était organisée suivant une logique sectorielle verticale, avec cinq directions ou services à caractère technique (direction de la navigation aérienne, direction des transports aériens, direction des programmes aéronautiques civils, service des bases aériennes, service de la formation aéronautique et du contrôle technique), et deux services de soutien horizontaux (service des ressources humaines et service des affaires financières). La DGAC est maintenant structurée autour de cinq grandes directions d'administration centrale et d'un grand service à compétence nationale : - la direction des affaires stratégiques et techniques (pôle régalien) ; - la direction de la régulation économique (pôle régalien) ; - la direction des programmes aéronautiques et de la coopération (pôle régalien) ; - la direction du contrôle de la sécurité (pôle surveillance et certification) ; - le secrétariat général (fonction support) ; - la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), service à compétence nationale (pôle « prestataires »). De manière plus précise, les trois pôles représentant les grands métiers et fondant désormais l'organisation de la DGAC s'articulent de la manière suivante : - le pôle régalien comprend la définition de la stratégie à mener (dans le cadre français et également dans celui de l'Union européenne ou des grandes organisations et instances internationales) et l'élaboration de la réglementation liée à la sécurité et à la sûreté, la régulation économique du secteur. Ses activités s'exercent essentiellement dans trois des cinq directions d'administration centrale de la DGAC ; - le pôle de contrôle de la mise en œuvre de la réglementation comporte une double dimension de certification et de surveillance des différents opérateurs, qu'il s'agisse de constructeurs, de compagnies aériennes, d'aéroports, d'écoles de formation, de sociétés de prestations aéroportuaires, d'ateliers d'entretien, ou de l'opérateur public de la navigation aérienne. Il est largement financé par des redevances et travaille en étroite complémentarité avec les instances et organismes européens et internationaux du secteur, dont l'Agence européenne de sécurité aérienne et Eurocontrol. Il correspond au programme « Surveillance et certification ». Ses activités sont réparties entre une structure de pilotage en administration centrale (la direction du contrôle de la sécurité), assistée d'un service à compétence nationale (service technique de l'aviation civile), et les services déconcentrés ; - le pôle « prestataires », pôle d'opérateurs publics intégrés à la DGAC regroupe le prestataire français des services de la navigation aérienne, et un prestataire en matière de formation aéronautique. Son organisation répond à l'obligation européenne de séparer l'autorité nationale de surveillance (pôle de contrôle de la mise en œuvre de la réglementation ci-dessus) et le prestataire de services. Il correspond aux deux programmes « Navigation aérienne » et « Formation aéronautique » et regroupe deux services à compétence nationale (la DSNA, direction des services de la navigation aérienne, et le service d'exploitation de la formation aéronautique), ainsi que l'établissement public administratif d'enseignement supérieur qu'est l'école nationale de l'aviation civile (ENAC). C.- LA MISE EN œUVRE DE NOUVELLES REDEVANCES L'article 120 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 a institué des redevances pour les prestations de contrôle technique assurées par la DGAC, afin d'assurer la conformité du budget annexe aux dispositions de la LOLF, d'accompagner la réorganisation de la DGAC et de mieux assurer les conditions de concurrence au sein du marché européen. Dans sa nouvelle configuration, le budget annexe retrace le produit des recettes et des dépenses correspondant, outre aux activités de la navigation aérienne, aux prestations de contrôle technique en matière de sécurité et de sûreté, ainsi que les prestations relatives aux formations aéronautiques. Les activités régaliennes (élaboration des politiques de l'Etat, réglementation, régulation économique...) sont financées par le budget général. Les missions autres que la navigation aérienne sont financées essentiellement par le produit d'une taxe, la taxe de l'aviation civile (TAC), assise sur le passager ou la tonne embarquée, qui est acquittée par les entreprises de transport public. Cette pratique aboutit à faire financer par les entreprises de transport public des prestations qui ne sont pas directement assurées à leur profit (formation aéronautique, contrôle des gestionnaires d'aéroports). Elle est en opposition avec la politique suivie par la plupart des pays européens et l'Union européenne. Des pays tels que l'Angleterre et l'Allemagne, exigent à l'occasion de chaque prestation aussi élémentaire que la délivrance d'une licence de pilote, une redevance en contrepartie du service rendu. L'Union européenne, qui a créé un organisme technique spécialisé afin notamment d'assurer la certification des aéronefs, a prévu que ces opérations seraient financées par les industriels par la voie de redevances, ce qui pose problème en termes d'égalité des conditions de concurrence. Les nouvelles redevances correspondent aux activités suivantes : - contrôle de la conception des aéronefs, et délivrance de documents de navigabilité ; une large part de cette activité est toutefois aujourd'hui déléguée à l'agence européenne pour la sécurité aérienne (AESA). Celle-ci percevra les redevances correspondantes, mais dans la mesure où pour un temps du moins, elle continuera à s'appuyer sur des expertises de la DGAC qui lui facturera ses prestations ; - surveillance des compagnies aériennes (domaines autres que l'entretien) ; - contrôle de la formation des personnels navigants : agrément des écoles et des moyens de simulation, organisation des examens, délivrance des titres, pour les navigants privés et professionnels ; - autorisation de manifestation aérienne ; - certification des aéroports ; - approbation des programmes et matériels de sûreté ; - certification des prestataires de navigation aérienne. Le coût des prestations soumises à redevances à compter de 2006 s'élève à 69,1 millions d'euros. La totalité des coûts des activités qui peuvent être soumises à redevances ne sera pas recouvrée en 2006, s'agissant d'une perception nouvelle ; une montée en puissance est à prévoir. Le coût intégral des redevances serait très difficile à supporter pour certains acteurs, notamment pour les plus petites structures et pour les pratiquants de l'aviation légère. Des taux de recouvrement bas ont donc été fixés en 2006 pour un certain nombre de prestations. Les discussions se poursuivent avec les usagers pour étudier les évolutions à prévoir pour les années suivantes. Les dispositions de la loi publiée le 30 décembre doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat et des arrêtés d'application. Le décret précisera les redevances créées et les modalités de facturation. On distingue deux grandes catégories : - Les prestations continues pour les entreprises La délivrance, puis le renouvellement d'un agrément, repose sur des audits permettant de vérifier la conformité à un référentiel réglementaire (organisation générale, compétence des personnels, outillages, procédures, système de qualité interne), sur une surveillance continue du respect des justifications données lors de l'audit et sur le traitement des demandes spécifiques (évolutions, modifications, autorisations particulières) qui surviennent dans l'exercice de l'activité. Cet agrément autorise l'entreprise à exercer son activité, et lui donne certains privilèges (comme d'obtenir sans vérification supplémentaire des autorisations pour les produits ou services qu'elle délivre). Pour une activité donnée, le montant de la redevance imputable à chaque entreprise sera calculé à partir du volume des contrôles à réaliser, des caractéristiques de l'activité, et du coût unitaire de la surveillance. - Délivrances d'autorisations ponctuelles Chaque autorisation fait l'objet d`une redevance, fixée par un tarif publié, calculé à partir du coût complet de l'ensemble des actes identiques. Les tarifs publiés sont inférieurs ou égaux au coût calculé pour tenir compte des difficultés évoquées par certaines catégories d'usagers. Le coût des missions qui donneront lieu à perception d'une redevance était précédemment supporté par la taxe de l'aviation civile, créée par l'article 51 de la loi de finances pour 1999. Il était prévu que corrélativement à la mise en place de cette réforme, le Gouvernement proposerait la réduction à due concurrence du montant de la taxe de l'aviation civile. Une recette de 35 millions d'euros au titre de ces nouvelles redevances est prévue dans le projet de loi de finances pour 2006. En conséquence, il est proposé une baisse équivalente du produit de la taxe de l'aviation civile, correspondant à une baisse uniforme de 56 centimes d'euro par passager. Le taux de la TAC sur le fret embarqué ne diminue pas. Une partie de la taxe devra rester affectée au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », afin de couvrir notamment les coûts de contrôle technique qui ne seront pas recouvrés en totalité dans la phase de mise en œuvre du nouveau dispositif. Ces incertitudes concernant les modalités définitives que prendront ces redevances ne sont pas négligeables, compte tenu de la contestation par les acteurs du transport aérien du taux de la TAC prévu par le Gouvernement, et des hypothèses de trafic sur lesquels il est fondé. II.- UNE REPRISE FRAGILE DU TRAFIC, QU'IL FAUT CONSOLIDER A.- UNE REPRISE RÉELLE DU TRAFIC 1. Un rattrapage en 2004, la poursuite de la reprise en 2005 L'année 2004 a constitué une année de reprise pour l'activité du transport aérien mondial après trois années de stagnation, alors que l'année 2003 avait été perturbée par les événements d'Irak et la survenue du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). On constate que le trafic passagers de 2004, exprimé en passagers-kilomètres transportés (PKT), a dépassé d'environ 13 % le niveau atteint en l'an 2000, dernière année de croissance du trafic aérien. Pour les services réguliers assurés par l'ensemble des compagnies mondiales, l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) enregistre pour l'année 2004 un peu plus de 1,9 milliard de passagers réguliers et quelque 38 millions de tonnes de fret transportées. Ces chiffres représentent une augmentation par rapport à 2003 d'environ 13 % du trafic total régulier, exprimé en tonnes kilomètres transportées totales (TKT). Le trafic total de passagers et de fret, exprimé en PKT et TKT, a enregistré respectivement une augmentation d'environ 14 % et 11 %. Le trafic international régulier des compagnies aériennes mondiales, présente une évolution supérieure d'environ 2 % aux chiffres précédents. En 2004, les compagnies membres de l'Association of European Airlines (AEA) ont enregistré une forte progression de leur trafic passagers total régulier de 9,2 % par rapport à 2003. Leur coefficient de remplissage moyen progresse, à 74,6 % contre 73,4 % l'année précédente. Leur trafic de fret témoigne lui aussi d'une bonne tenue en 2004, avec une progression de 10,6 %. Il atteint 36 milliards de TKT. Les premiers résultats de l'année 2005 témoignent d'une nouvelle progression du trafic au premier semestre, à un rythme cependant moins soutenu (+8,8 %). Les résultats apparaissent contrastés selon les régions d'origine des compagnies. Celles du Moyen-Orient et d'Amérique latine affichent une progression de l'ordre de 15 % tandis que les compagnies européennes et asiatiques annoncent une augmentation de leur activité de transport de passagers respectivement de 6,3 % et 8,1 %. S'agissant de l'activité fret, la progression modeste du trafic des compagnies membres de l'IATA (+2,9 %) semble refléter le ralentissement de l'économie mondiale. Au premier semestre 2005, les compagnies européennes ont enregistré pour l'ensemble de leurs vols réguliers, une hausse de 5,9 % pour le trafic de passagers (PKT). Le coefficient de remplissage s'établit à 74,4 %, en hausse d'un point par rapport à l'année précédente. Le trafic de fret des compagnies européennes a augmenté (exprimé en TKT) de 2,5 % par rapport au premier semestre de l'année précédente. Les compagnies américaines membres de l'Air Transport Association (ATA) enregistrent sur les six premiers mois de l'année 2005 une augmentation du trafic de passagers de 6,1 % (en PKT) sur l'ensemble de leur trafic. Le coefficient de remplissage pour l'ensemble du réseau a augmenté de 2,5 points, atteignant 77,7 % sur la période. En ce qui concerne la France, le trafic aérien a connu en 2004 une croissance de 6,3 % par rapport à 2003. Le nombre de passagers transportés est passé de 99,6 à 105,9 millions. La crise amorcée en 2001 aura duré trois ans ; en effet, le niveau atteint en 2000 (101,8 millions de passagers) n'aura été dépassé qu'en 2004. La reprise s'explique par la tonicité du trafic international et l'activité des compagnies à bas coûts étrangères. Celles-ci ont transporté 11 millions de passagers en 2004, affichant une augmentation de l'ordre de 40 % de leur trafic par rapport à celui de 2003. En revanche, le trafic du réseau intérieur métropolitain a continué de diminuer (-2,3 %) ; sur ce réseau, la concurrence du TGV et la disparition au début de 2004 du transporteur Air Littoral, après celle des transporteurs Air Lib et Aeris les années précédentes, expliquent la poursuite du mouvement de repli. Le trafic métropole-outre-mer (+4,7 %) est, quant à lui, reparti à la hausse même s'il reste globalement inférieur à ce qu'il était en 2000. a) Les hypothèses retenues par le Gouvernement Pour 2006, la DGAC prévoit une croissance globale comprise entre 3 et 3,5 % en termes de passagers, marquée par un nouveau recul du trafic intérieur (-0,6 %) et une croissance de 4,2 % du trafic international (le taux étant identique pour les trafics européens et extra-européens). b) Les prévisions des organisations internationales L'IATA a prévu en octobre 2004 une croissance du trafic régulier de passagers entre 2004 et 2008 de +5 % par an, dont +6 % par an pour le trafic international et seulement +4,5 % l'an pour le trafic intérieur. Pour les années 2005 et 2006, les perspectives sont respectivement au niveau mondial de +5,7 % et +4,4 %. TRAFIC MONDIAL DE PASSAGERS
TRAFIC TOTAL DE PASSAGERS : FRANCE
Source : IATA Passenger Forecast 2004-2008 - Octobre 2004 * : t.c.a.m. : taux de croissance annuel moyen La prévision de l'IATA pour la France est de +4,5 % sur la période 2004-2008. Elle est légèrement inférieure à celle retenue pour le niveau mondial (+5,0 % l'an) ; elle est de +4,7 % et +4,3 % pour les années 2005 et 2006, en termes de passagers. L'OACI prévoit une croissance mondiale du trafic aérien en termes de passagers-kilomètres-transportés de 5,4 % en 2005 et 5,2 % en 2006. La prévision par région pour 2005 est de +5,3 % pour l'Europe,+4,2% pour l'Amérique latine, +6,8 % pour l'Asie, +6,9 % au Moyen-Orient et +4,5 % en Amérique du Nord. Pour autant, comme il s'agit de passagers-kilomètres-transportés, la comparaison avec des prévisions en termes de passagers doit être diminuée de - 0,8 point pour prendre en compte l'évolution moyenne annuelle de la longueur de l'étape. Les prévisions d'Eurocontrol sont établies en termes de mouvements. Les prévisions à moyen terme (2)sont établies sur la base de trois scénarios ; ils distinguent les vols au départ et à l'arrivée des aéroports français et les survols.
Source : Prévisions Eurocontrol (Février 2005) Globalement, ces prévisions en mouvements tablent sur une croissance de 2 % à 5 % l'an, avec un léger ralentissement de la progression en fin de période. Il convient d'ajouter au moins un point de croissance, compte tenu de l'augmentation de l'emport moyen, pour obtenir l'évolution correspondante en termes de passagers. La DGAC souligne que ces prévisions s'inscrivent dans un contexte de forte hausse du prix du pétrole, et que les craintes de ralentissement de la demande, liées à la fragilisation de la rentabilité des entreprises et à la hausse des tarifs aériens, semblent se révéler infondées car on ne peut que constater la robustesse de la croissance du trafic. On peut donc s'étonner de la prudence de ses prévisions. c) Des hypothèses de trafic volontairement basses ? Les hypothèses de la DGAC sont assez nettement inférieures à celles des compagnies aériennes pour 2006, comme elles l'avaient été en 2005. Les compagnies estiment que les écarts d'appréciation, sur trois ans atteignent 10 à 15 %, ce qui a de fortes répercussions sur les charges aéronautiques. La Fédération nationale de l'aviation marchande (FNAM) rappelle que les charges aéronautiques pèsent pour 3 milliards d'euros en 2005, alors que la production annuelle du secteur aérien français est évaluée à 17 milliards d'euros, et la valeur ajoutée à 6 milliards d'euros. Selon les estimations de la FNAM communiquées à votre rapporteure, les charges aéronautiques auront doublé en dix ans, alors que dans le même temps le trafic passagers augmentait d'un peu moins de 48 % et l'inflation de 15,4 % seulement. Une certaine prudence est certes de mise. Ainsi, en 2003 et 2004, les hypothèses avaient été trop optimistes, comme l'ont montré les informations disponibles sur l'exécution des lois de finances pour 2003 et 2004. Cependant, en retenant des hypothèses basses de trafic, la DGAC, pour maintenir le produit global des taxes et redevances, est amenée à déterminer des taux élevés, ce qui pèse sur les compagnies aériennes, et indirectement, sur le prix du billet. Les anticipations pessimistes risquent ainsi d'entraîner une spirale de déclin... Aussi votre rapporteure vous suggère de faire supporter l'incertitude des prévisions à l'Etat, et non aux transporteurs. Une solution serait donc de retenir des prévisions de trafic plus optimistes, ce qui autoriserait une baisse des taux ; l'ajustement étant toujours possible l'année suivante, mais aux frais de l'Etat et pas des entreprises du secteur. Rappelons qu'en l'absence d'ajustement, le surplus du produit de la TAC alimente le budget général de l'Etat et contribue au financement de dépenses sans lien avec le transport aérien. Il est d'autant plus nécessaire de ne pas accabler les compagnies que celles-ci, après des années difficiles depuis 2001, continuent de souffrir de l'évolution des cours du pétrole, alors que le carburant représente le cinquième des coûts d'exploitation des transporteurs aériens, et que son prix peut varier du simple au double sur une année. 3. La taxe de solidarité pour financer l'aide au développement Les chiffres indiqués ci-dessus sur le poids des charges aéronautiques ne tiennent pas compte de la taxe de solidarité annoncée par le Président de la République, qui devrait entraîner 14 % de prélèvements supplémentaires sur les compagnies aériennes, pour un produit de 430 millions d'euros, selon les estimations de la profession. En supposant que le tarif appliqué soit de 5 euros pour les passagers basse contribution et de 25 euros pour les passagers haute contribution, que la taxe ne soit pas perçue pour les passagers en correspondance afin d'éviter des détournements de trafic, et que la proportion des passagers basse et haute contribution des compagnies étrangères opérant en France soit du même ordre que pour les compagnies françaises, la taxe de solidarité pourrait, selon les estimations de la FNAM, réduire de 600 000 le nombre de passagers pour le trafic domestique, de 300 000 pour le moyen courrier international et de 150 000 pour le long courrier. Le Président de la République, dans son discours devant le Forum économique mondial de Davos le 26 janvier 2005, a évoqué trois pistes pour améliorer le financement de l'aide au développement, dont « un faible prélèvement sur les trois milliards de billets d'avion vendus chaque année dans le monde. A titre d'exemple, une contribution d'un dollar par billet rapporterait, sans compromettre l'équilibre économique du secteur, au moins trois milliards de dollars ». Le Premier ministre a repris cette idée lors de la dernière Assemblée générale des nations unies. Personne ne conteste que l'augmentation de l'aide publique au développement est nécessaire. Mais pourquoi faire peser cette augmentation sur un secteur précis ? Il serait bien plus juste et cohérent de chercher des financements collectifs, puisqu'il s'agit d'un objectif de solidarité générale. Le Président de la République avait ainsi envisagé la facilité financière internationale, proposition britannique qui permettrait de lever sans délai des sommes très importantes sur les marchés financiers, et recommandé d'explorer la voie d'une contribution sur les transactions financières internationales, conçue de manière à ne pas entraver le fonctionnement normal des marchés. Ce prélèvement, qui permettrait de mobiliser dix milliards de dollars par an reposerait sur trois exigences principales : un très faible taux, au maximum d'un dix millième ; appliqué à une fraction des transactions financières internationales, qui représentent quelque trois mille milliards de dollars par jour. Il serait fondé sur la coopération des grandes places financières mondiales pour éviter les effets d'évasion. Ces effets sont particulièrement menaçants, si l'on envisage la mise en œuvre d'une taxe de solidarité assise sur les billets d'avions dans les conditions actuelles. Les conséquences en seraient moindres pour les acteurs du trafic aérien si trois conditions étaient réunies, ce qui est loin d'être le cas : toutes les compagnies devraient payer cette taxe, à moins de distorsions de concurrence néfastes pour les entreprises françaises dans un environnement globalisé. La taxe ne devrait pas affecter la compétition entre les différents modes de transports. Sur les trajets domestiques ou européens de faible distance, pourquoi taxer les compagnies aériennes mais pas le TGV ? Enfin, il ne faudrait pas que certains passagers acquittent deux fois la taxe pour un même trajet, alors que toute l'économie du transport aérien est construite sur les hubs et les vols en correspondance. Aucun dispositif de cet ordre ne figure dans le projet de loi de finances pour 2006, et c'est heureux. Votre rapporteure estime toutefois inquiétantes les déclarations du ministre du budget, M. Jean-François Copé lors de la discussion de la première partie du PLF 2006, donnant un avis défavorable à un amendement proposant de taxer les transactions financières, et invitant M. Didier Migaud à le retirer pour « soutenir psychologiquement l'action du Président de la République, qui a saisi une excellente opportunité en proposant de taxer les billets d'avion ». Rappelons que l'Intergroupe Ciel et Espace du Parlement européen a exprimé ses craintes qu'une nouvelle taxe imposée au secteur des transports se répercute sur le reste de l'économie et sur la croissance, alors que les compagnies aériennes sont déjà durement frappées par la hausse des prix du pétrole, et que cette taxe entraîne une augmentation du prix du billet, au détriment des usagers, notamment les plus modestes. Il faut en effet abandonner l'image du transport aérien comme d'un loisir de privilégiés. Plus d'un Français sur quatre prend l'avion au moins une fois par an aujourd'hui, contre moins d'un Français sur six il y a quinze ans. Si l'option finalement choisie était une taxation facultative, la décision d'un Etat membre d'imposer unilatéralement une taxe aux compagnies présentes sur son territoire pourrait fausser la concurrence à l'intérieur du marché unique. C'est pourquoi l'Intergroupe a réclamé l'abandon pur et simple de ce projet, ce qui serait une sage décision. B.- UN SECTEUR QUI DOIT ENCORE ÊTRE SOUTENU 1. La poursuite de la recomposition du transport aérien a) La situation contrastée des compagnies dans le monde Les données sur la reprise du trafic en 2004 et en 2005, comme les prévisions pour 2006 l'indiquent clairement : la reprise du trafic reste fragile. De plus, la croissance du trafic aérien est portée avant tout par les vols longs courriers. Le trafic domestique stagne voire régresse, en France comme aux Etats-Unis, et la concentration des entreprises du secteur n'est pas terminée, avec les risques que cela comporte pour l'emploi. Alors même que la France compte de grands champions nationaux parmi les industriels, les compagnies aériennes et les sociétés aéroportuaires, elle n'est pas épargnée par les difficultés du transport aérien. Ainsi, entre 1996 et 2004, la part du pavillon français dans l'activité aérienne internationale au départ de la France est passée de 42,7 % à 37,4 %. Le nombre global d'entreprises autorisées à effectuer des transports publics en France est en diminution constante depuis 2002. Fin juillet 2005, il n'y avait plus que 110 opérateurs autorisés à effectuer des transports aériens publics en France, soit six de moins qu'en 2004. Après avoir diminué d'une centaine d'appareils entre 2002 et 2004, la flotte a recommencé à augmenter, comptant 911 avions et hélicoptères. La situation reste difficile pour les opérateurs d'hélicoptères. Celle de l'aviation d'affaires reste pratiquement stable. Avec la fin des faillites retentissantes de compagnies de ligne, la situation s'est améliorée, mais le nombre de passagers reste inférieur de près de 4,5 millions à celui de l'an 2000. La situation des compagnies françaises tient d'abord au succès du rapprochement entre Air France et KLM qui a permis au groupe de dégager, au cours de l'exercice 2004-2005, 115 millions d'euros de synergies. Rappelons que le capital d'Air France-KLM n'est plus désormais détenu qu'à hauteur de 18,6 % par l'Etat, et 16,3 % par les salariés, les autres actionnaires détenant, quant à eux, 62,7 % (capital flottant). Le transport aérien français reste très concentré depuis la disparition de grandes compagnies aériennes comme Air Lib et Air Littoral. Les transporteurs régionaux, en dehors du groupe Air France et de ses filiales, se positionnent pour l'essentiel sur des liaisons subventionnées par l'Etat et les collectivités locales (Airlinair, Twinjet, Hex'air et Finist'air). Parmi les compagnies desservant l'outre-mer au départ de la métropole (hors Air France), Air Austral, Air Caraïbes et Corsair ont mis en œuvre un développement de leur flotte et de leur programme. Les principales compagnies charter françaises (Air Horizons, Blue Line, Star Airlines, Air Méditerranée, Aigle Azur) ont connu deux exercices 2004 et 2005 satisfaisants avec une activité en hausse. Ce développement est une des conséquences de l'accident, fin 2003, de Charm el-Cheikh qui a conduit de nombreux voyagistes à modifier leur politique d'affrètement et à faire de plus en plus appel aux compagnies françaises. Grâce à leurs bons résultats, ces compagnies ont pu ces dernières années financer le renouvellement, puis le développement de leur flotte. Aux Etats-Unis, les douze « majors », dont les trois plus grandes compagnies à bas coûts (Southwest Airlines, America West et American Trans Air-ATA) ont enregistré sur l'année 2004 un résultat d'exploitation global négatif de -3,75 milliards de dollars, mais moins mauvais que celui de l'année 2003 (-4,77 milliards de dollars). Les plus grandes d'entre elles sont dans une situation délicate. Delta Airlines connaît la situation la plus difficile avec un résultat négatif atteignant -1,6 milliard de dollars. Cette compagnie s'est placée le 14 septembre 2005 sous la protection de la loi américaine sur les faillites (Chapitre 11), comme Northwest Airlines. La dégradation moins prononcée des résultats en 2004 ne doit pas faire oublier que si le trafic des compagnies s'est amélioré, celles-ci doivent toujours faire face à l'accroissement des coûts de sûreté et des coûts salariaux, à une nouvelle poussée à la hausse du prix du carburant, et à une concurrence tarifaire toujours accrue due au développement des ventes directes par Internet et à celui des compagnies à bas coûts. Cependant, si on les considère dans leur ensemble, la part de trafic de ces dernières dans le trafic domestique américain n'a guère progressé par rapport à l'année précédente (23,5% pour le premier trimestre 2005). Les compagnies aériennes européennes ont mieux résisté aux trois années de crise que leurs homologues américaines. Pour 2004, les compagnies membres de l'AEA affichent dans leur ensemble un résultat net positif de 0,4 milliard de dollars auquel ont contribué positivement Air France-KLM, Iberia, British Airways et Swiss alors qu'Alitalia et SAS affichent des résultats négatifs. AF-KLM s'adjuge désormais la première place pour le trafic de passagers. Deux compagnies à bas coûts ont rejoint le groupe des dix premières compagnies européennes en raison d'une vive croissance de leur activité : la compagnie Ryanair dont le trafic de passagers, exprimé en PKT, a crû de 34,7 % et easyJet dont le trafic a progressé de 24,8 %. La pression concurrentielle exercée par les compagnies à bas coûts pourrait s'accentuer avec l'élargissement de l'Union européenne et la croissance d'acteurs européens orientaux comme SkyEurope notamment. En Asie, le rebond inattendu du trafic passager en 2004 s'est traduit par des recettes plus élevées et une meilleure rentabilité, malgré des coûts pétroliers en hausse. Les compagnies dont le trafic s'est le plus développé, en termes de PKT, sont Viet Nam Airlines (44,0 %), Cathay Pacific (33,9 %) et China Airlines (25,1 %). b) L'essor préoccupant des compagnies à bas prix Les compagnies à bas prix sont présentes sur le marché français depuis 1996, mais leur essor ne s'est réellement fait sentir que dans le début des années 2000. Elles ont poursuivi leur développement pendant les trois années de crise. Cet essor rapide s'est accompagné de la disparition de certaines compagnies, du retrait du marché d'autres compagnies et de rachats par les plus robustes.
Le développement initial des compagnies à bas coûts en Europe qui s'était réalisé surtout à partir des îles britanniques, profitant ainsi à la fois d'un marché potentiel très important et de conditions sociales et fiscales particulièrement avantageuses, s'est modifié. Les plus importantes, Ryanair et EasyJet, se sont tournées vers le continent européen pour développer de nouvelles bases d'exploitation. Ces deux compagnies ont dominé très rapidement le marché français, grâce à la mise en place progressive de dessertes domestiques sur des lignes à très fort potentiel. La domination d'easyJet se confirme en 2004 puisque celle-ci détient 44 % du marché français et Ryanair voit sa part réduite à 28 %. Le trafic de passagers des compagnies à bas coûts en France a atteint environ 5,2 millions passagers en 2002, 7,9 millions en 2003 et 11 millions en 2004, soit une augmentation de 40 % environ entre 2003 et 2004 (après une augmentation de 86 % entre 2001 et 2002 et de plus de 50 % en 2003). Cette très forte progression du trafic s'accompagne d'une position concurrentielle de plus en plus forte. Au cours du premier semestre 2005, les compagnies à bas coûts européennes ont transporté, sur des liaisons touchant la France, 5,5 millions de passagers, soit un trafic en augmentation de 15 %. L'essor des compagnies à bas coûts a d'abord largement concerné les régions françaises ; leur activité sur les deux grands aéroports parisiens s'est développée plus récemment, en particulier depuis 2003. Au total, en 2004, plus de trente d'aéroports étaient desservis par des transporteurs à bas coûts, avec Nice à leur tête, qui accueille à mi-2005 quatorze compagnies desservant un total de 42 destinations. On notera l'importance que cette activité représente pour trois d'entre eux (Beauvais - 94 %, Carcassonne - 100 % et Bergerac - 93 %).
Source : DGAC/DRE/DOE Le modèle économique de ces compagnies répond aux attentes d'une partie importante de la clientèle voyageant sur des liaisons court-courriers de point à point ; sur ce segment, leur part de marché devrait devenir prédominante. L'augmentation de certains coûts (carburant, sûreté), la rareté des créneaux horaires disponibles sur certains grands aéroports, et la concurrence des services ferroviaires à grande vitesse, notamment en France pourrait toutefois nuancer ce phénomène. Le trafic des compagnies à bas coûts de et vers la métropole pourrait atteindre 17 millions de passagers en 2009, soit 14,3 % du trafic de la métropole. Dans cette hypothèse, le trafic de ces compagnies représenterait 5,5 % du trafic intérieur, et 29 % du trafic avec les pays de l'Union européenne et de l'espace économique européen. En gagnant environ 6 millions de passagers, ces compagnies pourraient assurer le tiers de la croissance du trafic aérien touchant la métropole. 2. Des répercussions sur les autres acteurs du transport aérien - l'encadrement des pratiques des compagnies à bas coûts sur les aéroports Certains des transporteurs à bas coûts présents sur le marché français, notamment Ryanair, subordonnent l'ouverture ou le maintien de dessertes aériennes à l'octroi d'avantages par les gestionnaires d'aéroport et les collectivités publiques, provoquant une concurrence dommageable entre ces derniers. Les pratiques constatées sur les aéroports français depuis 1996 sont variées. La durée des contrats serait en général de cinq ans, susceptible d'être renouvelée deux fois. L'assistance en escale peut, selon les cas, être fournie gratuitement par le personnel de l'aéroport ou plus généralement donner lieu à un plafonnement par touchée du montant versé par Ryanair, inférieur au coût supposé des prestations dont la compagnie a bénéficié. Dans la majorité des cas, et de façon systématique pour les contrats les plus récents, les redevances réglementées sont facturées et payées normalement par Ryanair, mais elles ont fait l'objet d'un forfait inférieur au montant résultant de l'application des tarifs publics et du coût présumé de l'assistance en escale. La rédaction des contrats ne permet pas d'identifier clairement si les contreparties financières constituent une aide à la promotion ou au démarrage d'une liaison, une aide à la promotion touristique d'une région ou les deux à la fois. Après avoir traité en 2004 des conditions d'implantation de Ryanair sur l'aéroport de Charleroi en Belgique, la Commission européenne a lancé une consultation auprès des Etats membres autour d'un projet de lignes directrices sur le financement des aéroports et les aides d'Etat au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d'aéroports régionaux, publiées le 6 septembre 2005. Désormais, la compatibilité des aides individuelles accordées aux compagnies pour l'ouverture de lignes nouvelles devra s'apprécier au regard des principes et critères suivants. · Aéroports régionaux : les aides peuvent être versées pour des routes reliant un aéroport régional (volume annuel inférieur à 5 millions de passagers) à un autre aéroport de l'Union européenne. · Nouvelles routes : les aides ne s'appliquent qu'à l'ouverture de nouvelles routes ou de nouvelles fréquences, provoquant un accroissement du volume net de passagers. Ainsi, les aides ne doivent pas encourager un simple détournement de trafic d'une ligne ou d'une compagnie vers une autre. Une nouvelle route aérienne ne peut pas non plus bénéficier d'aide au démarrage s'il existe sur cette route un acheminement alternatif par un service ferroviaire à grande vitesse. · Viabilité et dégressivité dans le temps : la ligne aidée doit s'avérer viable à terme, c'est-à-dire couvrir au moins ses coûts, sans financement public. C'est pourquoi les aides au démarrage doivent être dégressives et limitées dans le temps. · Compensation des coûts additionnels de démarrage : le montant de l'aide doit être strictement fonction des coûts additionnels de démarrage qui sont liés au lancement de la nouvelle route ou fréquence et que l'opérateur aérien n'aurait pas à supporter en rythme de croisière. · Intensité et durée : l'aide dégressive peut-être accordée pour une durée maximale de trois ans (cinq ans pour les régions défavorisées et ultrapériphériques). De plus, le montant de l'aide ne peut dépasser, chaque année, 50 % du montant des coûts éligibles de cette année et, sur la durée de l'aide, une moyenne de 30 % des coûts éligibles. Elle devra être arrêtée dès que les objectifs en termes de passagers seront atteints ou que la rentabilité de la ligne sera avérée. · Lien avec le développement de la ligne : le versement de l'aide doit être lié au développement effectif du nombre de passagers transportés. Ainsi, afin de préserver à l'aide son caractère incitatif, la Commission établit une relation entre la dégressivité de son montant unitaire par passager et l'augmentation effective du trafic. · Attribution sans discrimination : toute entité publique envisageant d'octroyer à une compagnie une aide au démarrage d'une nouvelle route doit rendre son projet public dans un délai suffisant et avec une publicité suffisante pour permettre à toutes les compagnies aériennes intéressées de proposer leurs services. · Impact sur les autres routes et plan d'affaires : toute compagnie aérienne proposant un service à une entité publique souhaitant accorder une aide au démarrage doit remettre lors de l'expression de sa candidature un plan d'affaires démontrant la viabilité, pendant une période substantielle, de la ligne après l'extinction de l'aide. Une analyse d'impact de la nouvelle route sur les lignes concurrentes devra être réalisée par l'entité publique avant l'octroi de l'aide au démarrage. · Sanctions : les aides doivent prévoir des mécanismes de sanction dans la mesure où un transporteur ne respecterait pas les engagements qu'il a pris : système de récupération de l'aide ou de saisie d'une garantie préalablement déposée. · Non cumul : les aides au démarrage ne pourront pas être cumulées avec d'autres types d'aide octroyées pour l'exploitation d'une ligne, comme les aides à caractère social accordées à certains types de passagers ou les compensations de service public. Votre rapporteure salue la publication de ces lignes directrices, qui devrait renforcer l'encadrement des pratiques prédatrices des compagnies à bas prix. - l'activité des aéroports régionaux Après trois années de baisse, le trafic total de passagers des dix principaux aéroports régionaux français a augmenté de 2,5 % en 2004, par rapport à 2003, mais leur nombre (38 ,4 millions) reste cependant nettement inférieur aux niveaux atteints en 2000 (40,8 millions). Sept aéroports voient leur trafic de passagers augmenter, les plus fortes progressions étant enregistrées à Marseille et à Toulouse (croissance du trafic international de près de 15 %). En revanche, le trafic est en repli à Strasbourg ( - 6 %), qui subit la perte de l'activité de Ryanair, Montpellier (-15,4 %) pénalisé lui par la disparition d'Air Littoral, et Lille, du fait de la concurrence du TGV. Nice renoue avec la croissance (+2,2%), Lyon retrouve son niveau d'avant 2001 (plus de six millions de passagers). Bordeaux (+3,6%), Bâle-Mulhouse (+2,5%) progressent grâce notamment aux compagnies à bas tarifs. Après avoir fait son entrée en 2004 dans le cercle des aéroports millionnaires, Beauvais, troisième aéroport du marché parisien, devrait frôler en 2005 les deux millions de passagers. Les compagnies low costs sont donc pour beaucoup dans le trafic des aéroports régionaux. La plupart des grands aéroports régionaux sont engagés dans un processus de transformation de leur statut d'établissements publics en sociétés d'exploitation aéroportuaire, comme le permet la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports. b) Les aéroports franciliens : comment relier investissements et redevances ? - les investissements réalisés par ADP pour accompagner la croissance du trafic Avec 75,3 millions de passagers accueillis en 2004, les aéroports parisiens (Charles de Gaulle, Orly et le Bourget) ont connu une hausse de leur activité de 6,6 % par rapport à 2003, largement supérieure à celle des aéroports régionaux. Ce niveau dépasse le trafic le plus fort des plates-formes qui avait été atteint en 2000 (73,6 millions de passagers). Pour faire face à la croissance du trafic et rester compétitif par rapport aux autres grands aéroports européen, ADP qui est le deuxième d'entre eux, est engagé dans un programme d'investissements de grande ampleur, à l'origine d'un endettement croissant. C'est ce besoin de financement qui justifie pour le Gouvernement la privatisation d'ADP. Source : Uccega. Le chiffre d'affaires réalisé par ADP a augmenté de 6,4 % en 2004.
La forte augmentation du produit des redevances aéronautiques s'explique par une hausse des tarifs de 5,5 % en moyenne au 1er avril 2004 et par l'augmentation du trafic. Le taux de la taxe d'aéroport est passé de 8,05 euros en 2003 à 8,20 euros en 2004 (7,95 euros en 2005). En 2004, la croissance des charges courantes d'exploitation (+6 % hors amortissements et provisions) est légèrement en retrait de celle du chiffre d'affaires (+6,4 %).
Le résultat financier s'élève à - 94 millions d'euros contre -87,5 millions d'euros en 2003. Le résultat exceptionnel s'établit à - 25,9 millions d'euros contre - 29,3 millions d'euros en 2003. Il intègre, suite à l'accident du terminal CDG2E, une provision de 75,5 millions d'euros pour dépréciation accélérée de la voûte de la jetée du terminal et un amortissement exceptionnel de 14,6 millions d'euros correspondant à la valeur nette comptable de la partie effondrée, qui a ensuite fait l'objet d'une sortie. Est inscrit un produit à recevoir de 80 millions d'euros au titre des assurances. Le résultat net du groupe est de 125,9 millions d'euros, soit une baisse de 2,3 % par rapport à 2003. Les investissements (556,4 millions d'euros) sont en retrait de 14 millions d'euros par rapport à 2003. L'endettement financier total passe de 2 350,3 millions d'euros fin 2003 à 2 507,1 fin 2004. Les principaux éléments du budget 2005 révisé en avril dernier sont les suivants (en millions d'euros) :
Ce budget repose sur une croissance prévisionnelle du trafic de 3,3 % aboutissant à un niveau de trafic de 77,5 millions de passagers. Le niveau d'investissements est estimé à 655 millions d'euros. ADP a réalisé depuis une dizaine d'années des investissements de capacité importants, pour la spécialisation des terminaux de Paris - Orly, la création et le développement du hub de Paris - Charles de Gaulle (aérogares, extension des terminaux, nouvelles pistes, aménagement des voies pour l'accueil des gros porteurs dont l'A380, plate-forme fret pour Federal Express, travaux du futur CDG Val). ADP prévoit d'investir encore 2 510 millions d'euros d'investissements sur la période 2006 - 2010 dont 1 116 millions d'euros d'investissements de capacité. Les opérations de capacité concernent principalement, sur l'aéroport de Paris-Le Bourget la création d'une aérogare d'affaires par la rénovation et l'adaptation d'un bâtiment existant au nord de l'esplanade de l'aéroport, sur Paris-Orly l'adaptation des infrastructures aux nouveaux gros porteurs et sur Paris-Charles de Gaulle l'achèvement de CDG Val, ligne de métro interne à la plate-forme ; la reconstruction et l'achèvement du terminal 2E ; le satellite S3 ; le Tri Bagages Est (TBE) ; le Terminal régional 2G ; l'accueil de l'A380. Par ailleurs, se poursuivront le développement et l'adaptation des infrastructures aéronautiques (voies de circulation et postes avion), ainsi que l'accroissement des capacités de stationnement en parcs automobiles éloignés. - Le contrat proposé par ADP pour 2006-2010 Le statut d'Aéroports de Paris a été modifié par la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports. ADP, établissement public, devient une société anonyme dont le capital initial est entièrement détenu par l'Etat. La loi offre également plus de souplesse au gestionnaire d'aéroport dans la définition des redevances aéroportuaires. Le décret nº 2005-827 du 20 juillet 2005 a précisé les modalités de cette réforme profonde. Les redevances pour service rendu sont définies aux articles R. 224-1 et R. 224-2 du code de l'aviation civile. Celles facturées directement aux compagnies aériennes sont principalement la redevance par passager, la redevance d'atterrissage, la redevance de stationnement et la redevance de balisage. D'autres redevances pour services rendus sont comptabilisées par ADP dans la catégorie des produits extra-aéronautiques. Les taux de ces redevances sont fixés pour chaque aéroport par son exploitant, après consultation des usagers. Pour Aéroports de Paris et les aéroports de l'Etat, le dispositif de contrôle par l'Etat de ces taux se placera désormais de manière préférentielle dans le cadre de contrats pluriannuels avec l'exploitant de l'aéroport. Ces contrats définiront notamment un plafond pour l'évolution des tarifs des redevances et des objectifs de qualité de service.
Les tarifs des principales redevances sont communs aux plates-formes de Paris-Orly et de Paris-Charles-de-Gaulle. Ils ont été relevés en moyenne de 5,5 % au 1er avril 2004 et de 4,0 % au 1er février 2005. Le montant perçu par Aéroports de Paris en 2004 s'élève à 556,3 millions d'euros, ventilé comme suit :
En 2004, le produit des redevances considérées représente 30,6 % du chiffre d'affaires. Ce produit est en augmentation de 13,6 % par rapport à 2003, du fait de la hausse du trafic et de l'augmentation des tarifs. En application des nouvelles dispositions législatives et réglementaires relatives aux redevances aéroportuaires, le contrat pluriannuel de régulation doit être conclu entre l'Etat et ADP avant la fin de l'année 2005. Le processus d'élaboration de ce contrat débute par des propositions de l'entreprise qui ont soulevé les protestations des compagnies aériennes. D'accord sur le programme d'investissement, elles contestent la hausse prévue de 6 % des redevances (3), assises sur des prévisions de trafic qu'elles jugent sous-estimées. Elles contestent aussi la rentabilité recherchée pour les capitaux investis, de l'ordre de 6 à 7 %, donc supérieure à celle des compagnies aériennes, qui n'est que de 4 à 5 %. Votre rapporteure, qui avait exprimé son opposition au changement de statut d'ADP lors des débats en avril dernier renouvelle ici son scepticisme quant au lien entre cette recherche de la rentabilité du capital pour les actionnaires, et la mission de service public d'ADP. L'introduction en bourse d'ADP, sous la forme d'une augmentation du capital, est maintenant annoncée pour le printemps 2006. C.- LA PERSISTANCE DE MENACES QUI RENDENT NÉCESSAIRE UN BUDGET DE SOUTIEN Si la reprise du trafic aérien peut à tout moment être remise en cause par des attentats ou des crises sanitaires, la menace la plus immédiate et la plus certaine reste la hausse du prix du carburant. La facture pétrolière ne représentait que 10 à 12 % des coûts directs des compagnies aériennes il y a quelques années, alors que la proportion est actuellement proche de 20 %. C'est considérable alors que les marges des compagnies aériennes traditionnelles sont de l'ordre de 4 à 6 %. La surcharge pétrolière est d'autant plus lourde pour les compagnies déjà fortement endettées, comme Delta Airlines. Les effets de cette hausse sur les coûts d'exploitation des compagnies ne se sont pas fait sentir immédiatement dans la mesure où la plupart d'entre elles s'étaient couvertes en achetant leur carburant. Les effets, pour les compagnies européennes, ont également été atténués par la bonne tenue de l'euro par rapport au dollar, monnaie dans laquelle sont exprimés les cours du baril de pétrole. Mais pour faire face à ces hausses, les compagnies ont finalement dû les répercuter en tout ou partie sur le prix du billet, généralement sous la forme de « surcharge » qu'elles ont annoncé vouloir supprimer lorsque le prix du pétrole aura retrouvé son cours antérieur. Cette répercussion a ses limites. Depuis plus de cinquante ans, la croissance du transport aérien va de pair avec la baisse des tarifs. Le développement des compagnies à bas prix, qui est pour beaucoup dans la reprise actuelle du trafic, pourrait être remis en question par cette hausse du pétrole. Le baril a atteint 70 dollars en août 2005, et il est très difficile de faire des estimations sur l'évolution des prix à l'avenir, les plus pessimistes prétendant que le pic de production est très proche, alors que la croissance rapide de la demande énergétique des pays émergents, notamment de la Chine et de l'Inde va accroître la hausse des prix. Cette évolution est particulièrement préoccupante pour le transport aérien, pour lequel des solutions alternatives au pétrole sont plus difficiles à mettre en place que pour d'autres modes de transport. Les kérosènes de synthèse, qui peuvent être produits à partir de gaz naturel, de charbon ou de biomasse, les biocarburants, les combustibles cryogéniques, voire à plus long terme les piles à combustible, présentent tous des caractéristiques techniques qui posent problème pour l'utilisation en vol, et exigent de lourds investissements en recherche et développement avant d'atteindre un seuil de rentabilité. Au prix croissant du baril de pétrole pourrait par ailleurs s'ajouter la taxation du kérosène dans le cadre de la lutte contre les émissions de CO2. Le renouvellement des appareils, au profit de modèles plus économes en carburant est contraint par les capacités de financement des compagnies. D'après l'International Air Transport Association (IATA), la facture pétrolière des compagnies aériennes va atteindre 83 milliards de dollars, soit 39 milliards de plus qu'en 2004. Fin mai, les pertes pour les compagnies se chiffraient à 6 milliards de dollars, sur la base de 47 dollars le baril. Depuis, elles sont estimées à 7,4 milliards. Ce surcoût est atténué par les efforts de productivité des compagnies, qui gagnent ainsi 2 à 3 %, et pourraient atteindre une réduction de leurs coûts hors pétrole de 4,5 %, notamment grâce à l'optimisation du nombre de passagers par vol. Un des enjeux porte sur la durée totale de déplacement. Alors que la vitesse de croisière des avions est à peu près constante depuis une quarantaine d'années, les temps de déplacement ne cessent de s'allonger, du fait de la congestion des aéroports, et d'une gestion parfois confuse du trafic, de l'éloignement des aéroports des centres urbains et de dessertes insuffisantes. Une meilleure réflexion sur cet environnement permettrait de garantir la compétitivité de l'aérien vis-à-vis d'autres modes de transport, sans aggraver la consommation de carburant. III.- SÉCURITÉ ET ENVIRONNEMENT : DEUX DÉFIS POUR LE TRANSPORT AÉRIEN 1. L'illusion de la sécurité low cost 10 000 billets d'avion aller-retour pour New-York soldés à 189 euros par le hard discounter Penny, 20 000 billets similaires offerts par les grands magasins Kardstadt pour l'achat d'un blouson à 200 euros. Ces exemples allemands récents illustrent à l'extrême la dérive du trafic aérien « low cost ». L'emploi généralisé de l'expression anglaise entretient d'ailleurs la confusion entre le bas prix et le bas coût. Si des efforts de productivité et des modèles de gestion performants peuvent expliquer pour partie les résultats impressionnants des compagnies à bas prix, votre rapporteure dénonce depuis longtemps certaines caractéristiques de ces compagnies. La gestion très rude des personnels relève souvent du dumping social ; la mise en concurrence dommageable des aéroports régionaux fait peser sur le contribuable local une part du financement de ces entreprises ; enfin, des économies condamnables sont réalisées aux dépens des règles de sécurité. Or la recherche effrénée du moindre prix apparaît comme un horizon inquiétant. Votre rapporteure tient ici à faire part de ses interrogations sur la mise en œuvre des règlements européen dits « ciel unique », qui prévoient l'ouverture à la concurrence du contrôle aérien. Dans ce cadre, la privatisation complète du service allemand de navigation aérienne, la Deutsche Flugsicherung (DFS), est prévue en juin prochain, après celle du britannique National Air Traffic Services (NATS). DFS a déjà fait part de son intention de proposer des services de contrôle aérien à bas coût. Cette baisse des coûts pourrait avoir de dangereuses conséquences en termes de personnel, ce qui affecterait la coopération entre les centres de contrôle, provoquerait des distorsions de concurrence entre compagnies, et diminuerait la sécurité des passagers. 2. La succession d'accidents de l'été 2005 Le bilan des catastrophes aériennes de cet été fait tristement écho à la prédiction des experts du transport aérien, (un accident aérien par semaine en 2020), rappelée par Mme Christine de Veyrac auteur du rapport de la commission des transports du Parlement européen sur le projet de règlement présenté par la Commission européenne le 16 février 2005, concernant l'information des passagers sur l'identité du transporteur aérien effectif et la communication des informations de sécurité par les Etats membres. - 2 août, Toronto : Plus de 300 personnes s'échappent d'un Airbus A340 d'Air France ; - 6 août, Méditerranée : 18 passagers meurent lorsqu'un avion tunisien transportant des touristes italiens s'abîme en mer au large de Palerme ; - 14 août, près d'Athènes : 121 victimes périssent lorsqu'un appareil de la compagnie chypriote Helios s'écrase après que son équipage a apparemment été victime d'une dépressurisation ; - 16 août, Venezuela : 161 passagers martiniquais meurent dans l'accident de la « West Caribbean Airways » colombienne ; - 23 août, Pérou : 40 personnes sont tuées lorsqu'un Boeing 737-200 de la compagnie péruvienne TANS s'écrase dans la jungle. - 5 septembre, Indonésie : les 117 passagers et membres d'équipage d'un appareil de la compagnie indonésienne Mandala Airlines sont tués ainsi que 30 personnes au sol, alors que l'avion s'écrase au décollage. - 22 octobre, Nigéria : 117 passagers et membres d'équipage disparaissent dans le crash d'un Boeing de la compagnie Bellview Airlines. Les gouvernements français et belges ont publié à la fin du mois d'août des « listes noires » qui ne concernaient pas les mêmes transporteurs aériens. En mai 2005, une compagnie turque, interdite dans quatre pays européens, dérouta ses vols sur la Belgique où elle n'était pas interdite. Ce manque de cohérence amène à une nouvelle demande de coordination plus étroite au niveau européen, déjà formulée par la mission parlementaire sur la sécurité du transport aérien de voyageurs que votre rapporteure avait eu l'honneur de présider à l'été 2004. A l'ouverture de la session de septembre du Parlement européen, la sécurité aérienne et le manque de cohérence des listes noires ont figuré parmi les premiers sujets à l'ordre du jour. Les députés européens et M. Jacques Barrot, le commissaire aux transports, se sont accordés sur l'utilité d'un travail collectif au sein de l'Union en vue d'identifier les compagnies aériennes dangereuses. La rapporteure du Parlement européen a proposé qu'une liste noire européenne des compagnies aériennes soit établie à partir de « critères de sécurité objectifs ». De plus, les compagnies seraient tenues d'informer les passagers de leur bilan en matière de sécurité. La députée demande que l'Agence Européenne de la Sécurité Aérienne (AESA) joue un rôle prépondérant dans les questions de sécurité aérienne et que soit étudiée la possibilité, pour l'UE, de délivrer des certificats de sécurité aux compagnies de pays tiers utilisant l'espace aérien communautaire. Lors du débat, le commissaire Barrot a demandé également que les pouvoirs de contrôle de l'Union soient élargis aux appareils de pays tiers lorsque ceux-ci survolent son territoire. Plusieurs solutions sont possibles pour cette liste noire : - une liste harmonisée, établie selon des critères fixés par un comité ad hoc associant les Etats membres et la Commission ; - une liste coordonnée, compilant des listes nationales avec coordination préalable et évaluation de la pertinence des mesures d'interdiction envisagées. Enfin, la solution qui semble la plus susceptible de donner de bons résultats selon votre rapporteure est celle d'une liste communautarisée, établie par la Commission, sur la base de critères communs, en associant l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA). Ces propositions pourraient être intégrées à la directive dite « SAFA », récemment renforcée après l'affaire de la compagnie Onur Air, pour prévoir à partir de mai 2006 la possibilité d'étendre une interdiction de vol imposée à une compagnie aérienne d'un pays tiers à l'ensemble des Etats membres de l'union européenne. Se pose aussi la question de l'inclusion dans la liste de compagnies qui n'ont pas de droits de trafic dans un Etat membre, mais qui se verraient refuser ces droits si elles les demandaient, car elles ne bénéficient pas d'un contrôle adéquat de la part de leurs autorités nationales. Le problème se poserait si ces compagnies mettaient des avions à disposition d'autres compagnies bénéficiant, elles, de droits de trafics dans l'UE et si des ressortissants communautaires voyageaient avec ces compagnies en dehors du territoire de l'UE. Dans son rapport, la mission de l'Assemblée nationale avait l'an dernier également souligné les difficultés de l'OACI à mener ses missions d'inspection et contrôles dans certains pays. L'OACI dispose en effet d'informations sur les défaillances éventuelles d'un pays dans la surveillance du « maintien de la compétence professionnelle des titulaires des licences et des qualifications, de la validité des certificats de navigabilité, de l'aptitude des exploitants aériens à maintenir la sécurité et la régularité des vols et à faire entretenir les aéronefs par des organismes de maintenance agréés ». Ces informations sont issues du programme d'audit de supervision de la sécurité de l'OACI qui doit s'appliquer à tous ses Etats membres de manière systématique et régulière. Début 2004, 181 des 188 membres avaient été audités, et 134 missions de suivi réalisées. Pourtant, la mission de l'Assemblée nationale soulignait déjà que plus d'un quart des Etats membres analysés n'avaient que peu progressé dans l'élimination des carences constatées lors des premiers audits. La plupart d'entre eux n'avaient pas clairement défini les fonctions et responsabilités de leurs sections de délivrance des licences du personnel et ne disposaient pas de responsables qualifiés dans ce domaine. Nombre d'entre eux étaient même dépourvus de procédures de certification des exploitants d'aéronefs. Les avions et compagnies aériennes enregistrées dans ces pays devraient donc automatiquement être inscrits sur la liste noire. Quant au projet de label bleu proposé par M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement et des transports après la catastrophe aérienne de Charm el-Cheikh, et poursuivi par M. Dominique Perben, il vise à répondre à une double exigence de transparence de l'information et de prévention des accidents dans le domaine des voyages à forfait incluant un transport aérien. Il pourra être obtenu par une démarche volontaire de certification par l'AFAQ-AFNO. Les premiers labels, accordés pour deux ans, devraient être attribués au premier semestre 2006. Si de tels labels peuvent apporter des améliorations en termes de transparence, la mission parlementaire doutait qu'ils puissent réellement accroître la sécurité : en effet, le coût de la certification serait à la charge des compagnies aériennes. Pour que les compagnies jouent le jeu, il faudrait que le poids des touristes français à l'étranger soit suffisant pour les y inciter. Or 10 % seulement de la population française part à l'étranger par le biais d'un agent de voyage, et les tours opérateurs français pèsent peu au regard de ceux d'Europe du Nord. Un tel label aurait donc peu de sens hors d'un cadre européen. 4. Donner au BEA les moyens d'action nécessaires Le bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) joue un rôle considérable dans l'amélioration de la sécurité aérienne. Ses crédits sont dorénavant retracés sur l'action : « enquêtes de sécurité aérienne », du programme « transport aérien » du budget général. 115 emplois équivalents temps plein (53 de catégorie A, 24 de catégorie B, et 38 de catégorie C) sont prévus en 2006, soit 120 agents hors laboratoires, et 22 agents affectés aux laboratoires. En 2005, ces effectifs étaient respectivement de 106 et 20 agents. Entre 2003 et 2005, les effectifs du BEA ont augmenté de 8 % par an, et les niveaux de recrutement de personnels hautement qualifiés et spécialisés se sont améliorés, en particulier grâce à la mise à disposition du BEA de 7 emplois de contractuels sur 2004, 2005 et 2006. Afin d'accélérer les travaux du BEA, particulièrement techniques, la mission d'information sur la sécurité du transport aérien de voyageurs, proposait, en juillet 2004, d'augmenter les effectifs du BEA de manière plus significative. Le directeur du BEA avait indiqué qu'il saurait facilement employer 130 à 150 personnes. La mission a estimé qu'une hausse de 20 % des effectifs était nécessaire à court terme, afin de revenir à des délais d'un an en moyenne. Les crédits de paiement seront de 3,8 millions en 2006 (contre 3,5 millions en 2005), soit une hausse de 9,4 %. Cette augmentation est indispensable, compte tenu des contraintes de financement qui pèsent sur le BEA. Leader mondial dans les enquêtes techniques, le BEA doit renouveler sans cesse ses équipements, pour faire face aux évolutions scientifiques et technologiques. Le BEA voit augmenter fortement ses contrats de maintenance (+4 %), dont le coût représente en 2005 35 % des crédits de fonctionnement. La hausse des tarifs aériens a également des répercussions sur le coût des déplacements professionnels des agents du BEA. (+8 %, compte tenu de la hausse des effectifs). Enfin, la direction générale de l'armement (DGA) limite la gratuité des examens aux fins d'enquête technique. Dans ces conditions, votre rapporteure regrette que la hausse des crédits du BEA ne soit pas plus conséquente. B.- ACCOMPAGNER LA CROISSANCE DANS LE RESPECT DE L'ENVIRONNEMENT 1. La lutte contre les nuisances aéroportuaires En France, la lutte contre le bruit au voisinage des aéroports repose essentiellement sur trois lois : la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 qui, à titre préventif, institue les plans d'exposition au bruit (PEB) et limite l'urbanisation au voisinage des aérodromes ; la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 qui, à titre curatif, organise un dispositif d'aide aux riverains et institue les plans de gêne sonore (PGS) ; la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999 qui, au titre de la transparence et de la concertation, a créé une autorité indépendante de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA). La lutte contre les nuisances engendrées par le transport aérien pose des problèmes de plus en plus aigus, malgré la limitation des mouvements d'aéronefs et les progrès dans la conception des avions et des trajectoires. Deux textes législatifs ont renforcé en 2003 les mesures destinées à améliorer la qualité de la vie des riverains des aéroports. La loi de finances rectificative pour 2003 a modifié substantiellement les modalités de financement et de gestion du dispositif d'aide à l'insonorisation des logements des riverains des aérodromes majeurs. En effet, elle a supprimé le volet « transport aérien » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour y substituer une nouvelle taxe, dénommée « taxe sur les nuisances sonores aériennes » (TNSA), dont le produit est intégralement affecté au financement des aides dont elle a confié la gestion aux exploitants des plates-formes aéroportuaires concernées en lieu et place de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Ces dispositions, alliées à une revalorisation des taux de la TNSA pour en multiplier le produit par cinq, doivent permettre d'accélérer les programmes d'insonorisation des logements situés dans les zones exposées au bruit du transport aérien, au voisinage des plates-formes traitant plus de 20 000 mouvements de plus de 20 tonnes. Enfin, l'article 12 de la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports a prévu que, en cas de non-paiement ou de paiement insuffisant des amendes administratives prononcées par l'ACNUSA, l'exploitant d'aérodrome ou l'autorité administrative de l'Etat compétente peuvent, après avoir mis le redevable en demeure de régulariser sa situation, requérir la saisie conservatoire d'un aéronef exploité par le redevable ou lui appartenant auprès du juge du lieu d'exécution de la mesure. Le produit de la TNSA devrait atteindre 31,4 millions d'euros en 2005. Sur le budget 2005 de l'ACNUSA, une somme de 100 000 euros est actuellement gelée ; si elle était annulée, l'enveloppe réservée aux activités de cette autorité serait réduite de presque 30 %. Elle ne pourrait faire face à certaines de ses dépenses, et devrait par exemple renoncer à des études prévues ou à la diffusion de certaines informations, ce qui pourrait nuire à sa crédibilité. Le budget de fonctionnement de l'ACNUSA n'augmente que de 3 000 euros par rapport à 2005. Ce n'est pas à la hauteur de l'augmentation du trafic, et des problèmes posés par la congestion menaçante des aéroports. Le conseil international des aéroports estime ainsi que les aérogares dans le monde seront confrontées en 2020 à un afflux d'un milliard de passagers excédant leurs capacités d'accueil. 2. La lutte contre l'effet de serre La question de l'imposition de taxes sur les carburants utilisés par l'aviation commerciale a fait l'objet depuis 1996 de nombreux débats au niveau communautaire et à l'OACI, renforcés par la signature du Protocole de Kyoto pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La question s'est posée alors de la possibilité de taxer le kérosène et d'évaluer les gains environnementaux que l'on pourrait attendre d'une telle mesure. Le carburant embarqué à bord des aéronefs pour des vols internationaux est en effet exempté de taxes en raison de recommandations de l'OACI, reprises dans la plupart des accords aériens bilatéraux. La taxation de ce carburant suppose donc la renégociation de ces accords. Les pays européens ont proposé à plusieurs reprises cette solution lors des assemblées générales de l'OACI, et n'ont jamais pu obtenir un consensus. En novembre 1996, la Commission européenne avait recommandé la taxation du kérosène. Les ministres de l'économie et des finances ont alors demandé une étude d'impact, publiée en 1999 qui concluait que la taxation du kérosène, même limitée aux vols intra-européens et imposée à l'ensemble des transporteurs risquait d'entraîner des détournements de trafic et des distorsions de concurrence défavorables aux transporteurs européens pour des effets environnementaux minimes. La conclusion du Conseil sur les résultats de cette étude a été reprise dans le considérant 23 de la directive 2003/96 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, qui autorise la taxation du kérosène consommé sur les vols intérieurs et, sous réserve d'accords particuliers entre les pays volontaires, sur les vols intracommunautaires entre ces pays, mais permet également aux Etats de continuer à exempter le kérosène. La mise en œuvre d'une telle taxation s'est avérée impraticable dans la mesure où tous les Etats membres ne l'adoptent pas. Les études réalisées pour la Commission montrent que le gain environnemental est infime, alors que les risques de distorsions de concurrence sont réels. Tirant déjà les conséquences de ces difficultés, la Commission dans sa communication « Le transport aérien et l'environnement » de novembre 1999 s'était engagée à proposer, en 2001, une redevance environnementale sur l'aviation (4) qui ne serait pas soumise aux mêmes contraintes juridiques vis-à-vis de transporteurs de pays tiers et pourrait échapper ainsi à certains inconvénients de la taxation des carburants. Elle n'a pas donné suite. Elle analysait, d'autre part, les avantages de la participation de l'aviation à un système d'échange de quotas d'émissions qui pourrait s'appliquer au niveau régional, l'une des solutions pouvant consister à attribuer des quotas aux aéroports qui les alloueraient selon des mécanismes compatibles avec ceux régissant l'attribution des créneaux. Enfin, la Commission indiquait qu'il convenait d'encourager les initiatives de l'industrie, telle la proposition de l'AEA d'établir un accord volontaire sur les émissions du transport aérien, et qu'elle explorerait cette voie, ce qui n'a pas été fait à ce jour. A l'occasion de l'examen de cette communication, le Parlement et le Conseil, sans se prononcer sur le choix des outils économiques, ont demandé à la Commission de leur présenter des propositions concrètes pour limiter la croissance des émissions de l'aviation. La Direction générale Environnement prévoit une nouvelle communication sur les outils économiques à appliquer à l'aviation. En France, après la publication du Plan Climat en août 2004, le Gouvernement a exposé sa position dans un mémorandum adressé à la Commission européenne. Il considère que l'Union européenne doit donner l'exemple en maîtrisant la croissance de ces émissions sur son territoire. A ce titre, il soutient le projet d'inclure les émissions de gaz carbonique des vols internes à l'Union européenne dans le système européen d'échange de quotas d'émissions. Il estime que l'Europe doit aussi collaborer avec ses principaux partenaires pour obtenir des résultats significatifs à l'échelle de la planète et proposer une stratégie globale de réduction de l'impact de l'aviation sur le climat reposant sur quatre piliers : - la participation de l'aviation aux échanges de quotas d'émission pour réduire l'impact des émissions de gaz carbonique selon le principe déjà agréé à l'OACI ; - l'élaboration de nouvelles normes internationales pour réduire les autres émissions de l'aviation qui contribuent à l'effet de serre (émissions en croisière d'oxydes d'azote et de particules, teneur en soufre du kérosène) ; - le renforcement de la coopération internationale pour la recherche sur l'impact de l'aviation et la création de partenariats pour le développement de technologies nouvelles pour l'aviation ; - des accords négociés avec les différents acteurs du transport aérien sur un ensemble d'actions permettant de réduire l'impact de l'aviation sur le climat. D'après les informations transmises à votre rapporteure, le Gouvernement ne considère pas la taxation du kérosène comme la mesure la plus apte à atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto, et n'envisage pas à court terme de modifier le régime d'exonération dont bénéficie le carburant utilisé pour l'aviation commerciale. Votre rapporteure souhaite que la remise en cause de cette exonération ne fasse pas non plus partie des financements innovants de l'aide publique au développement évoqués par le Président de la République dans le cadre du dernier sommet du G8 à Gleneagles ou de la soixantième Assemblée générale des Nations Unies. Chacun de ces problèmes graves mérite un débat clarifié et des solutions concertées. 3. Le développement des communautés aéroportuaires La loi n° 2004-172 du 23 février 2004 portant création des communautés aéroportuaires a mis en place un cadre juridique nouveau pour tenter d'améliorer les retombées économiques de l'activité des grands aéroports au bénéfice de leur population riveraine. Ce texte vise à associer, au sein d'un établissement public à caractère administratif, les collectivités territoriales, qui défendent les droits des riverains, et les acteurs économiques, qui bénéficieront de l'activité aéroportuaire, au soutien d'actions territoriales et de projets destinés à favoriser la correction des atteintes aéroportuaires à l'environnement et à la qualité de vie urbaine et rurale. Il permet aussi l'accès des riverains aux emplois et aux équipements collectifs et une meilleure diffusion de l'information relative aux impacts de l'aéroport sur son territoire et aux actions menées pour en corriger les effets. La communauté aéroportuaire est créée par le représentant de l'Etat dans la région, et sur proposition du conseil régional. Ses différentes ressources sont énumérées par la loi. Votre rapporteure avait regretté que les moyens prévus ne soient pas à la hauteur des ambitions du rapport de M. Le Grand, et déploré la précipitation dans laquelle a été discutée cette loi, qui n'a pas permis de clarifier les responsabilités des différents partenaires. Notons que le décret n° 2005-1282 relatif aux conseils d'administration des communautés aéroportuaires vient d'être publié, le 11 octobre 2005, un an et demi après le vote de la loi, ce qui devrait enfin permettre de démarrer les premières expériences, dans les régions comme Provence-Alpes-Côte-d'Azur et l'Ile-de-France, qui ont exprimé les premières leur intérêt. * * * En conclusion de ces analyses, votre rapporteure émet plusieurs réserves concernant la construction du projet de budget des transports aériens pour 2006. La première est de cohérence, puisqu'il met en œuvre la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports, à laquelle elle s'était opposée. La deuxième tient aux hypothèses de trafic retenues par le Gouvernement, qui paraissent sous-estimées, ce qui fera peser sur les acteurs du transport aérien des taxes et redevances lourdes. Le projet de taxe de solidarité, dont les effets pervers seraient supérieurs aux bénéfices escomptés, est révélateur de la politique budgétaire dans ce domaine. La troisième vient des orientations politiques retenues, qui amènent votre rapporteure à penser que ces crédits ne permettront pas de répondre correctement aux attentes des voyageurs en termes de sécurité, de sûreté et de protection de l'environnement. Par ailleurs, le soutien aux liaisons aériennes, en baisse, ne permet pas de signer de nouvelles conventions et nous interpelle sur l'importance accordée à l'aménagement du territoire et à la survie de certaines lignes, reposant la question du soutien aux entreprises du secteur aérien et de leur contribution à la croissance et à l'emploi. Lors de sa réunion du 12 octobre 2005 (5), la Commission a entendu M. Dominique Perben, ministre, des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur les crédits de son département pour 2006. Le ministre a déclaré que le budget de son ministère, en 2006, s'élèverait à 17 milliards d'euros, soit une progression de 5,8 %, significative de l'effort que le Gouvernement entend accomplir en faveur de l'équipement et des transports. Il a annoncé que des moyens nouveaux seraient consacrés à quatre objectifs ambitieux : lancer de grands projets d'infrastructures pour orienter l'avenir de la France ; répondre aux attentes quotidiennes des Français en améliorant la sécurité dans les transports, raison d'être du ministère ; être cohérent avec les objectifs du développement durable, en synergie avec le ministère de l'écologie et du développement durable ; réorganiser le ministère et ses services déconcentrés tout en maintenant, voire en améliorant la qualité des prestations offertes aux Français et aux collectivités territoriales. Le budget de la direction générale de l'aviation civile, progresse de 10,6 %, ce qui traduit un renforcement net des moyens du contrôle aérien : 300 personnes seront recrutées sur des postes de sécurité ; les contrôles exercés sur les compagnies aériennes et les avions seront accrus ; 73 millions d'euros sont prévus pour la modernisation des cinq centres de contrôle aérien en route et 53 millions pour les équipements de navigation aérienne des aéroports ; des études amont seront conduites sur les systèmes de sécurité de demain, systèmes d'avionique embarquée et de freinage électrique. Le ministre a ajouté qu'à la suite du crash au Venezuela, il avait proposé au Gouvernement la publication de listes et qu'un texte tendant à imposer aux voyagistes la transparence à propos des compagnies sur lesquelles elles font voyager leurs clients devrait paraître dans les prochaines semaines. Des discussions avec les autres ministres des transports européens sont engagées en vue de mettre au point d'ici fin 2006 des critères de contrôle communs et une liste commune des compagnies interdites, ce qui renforcerait la capacité de l'Europe à peser sur le marché international du transport aérien. Il conviendrait également de multiplier les audits des autorités de régulation dans les pays où sont immatriculées certaines compagnies aériennes. Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis pour les crédits du transport aérien, a précisé qu'il lui incombait de présenter le programme « transport aérien », intégré à la mission « Transports », et la mission « contrôle et exploitation aériens », correspondant à l'ancien budget annexe. Le périmètre du budget général a été fortement modifié. De plus, le découpage des programmes en actions a beaucoup évolué par rapport à la maquette présentée en Conseil des ministres le 16 juin 2004 et à la préfiguration de la présentation LOLF du PLF 2005, ce qui a compliqué certaines réflexions. S'agissant du programme « Transports aériens », les crédits de l'ex-FIATA, Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien, reculent. Le projet de budget pour 2006 n'autorisant pas d'engagement supplémentaire, aucune convention nouvelle ne pourra être signée en matière de liaisons aériennes. Par ailleurs, la survie de certaines lignes est toujours en suspens, de même, plus globalement, que la définition d'une politique forte d'aménagement du territoire. Les évolutions concernant le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) sont insuffisantes. Compte tenu de son rôle de leader mondial dans les enquêtes techniques sur les accidents, il doit sans cesse renouveler ses équipements pour faire face aux évolutions scientifiques et technologiques. Il est prévu que ses effectifs augmentent de 8 % par an alors que, pour revenir à un délai moyen d'un an pour la clôture des enquêtes prises en charge, 130 à 150 personnes ne seraient pas de trop, ce qui nécessiterait, à court terme, une croissance annuelle des effectifs de 20 %. L'objectif de 75 % des enquêtes clôturées en 2009 est insuffisant. La rapporteure pour avis, a demandé au ministre s'il avait bien pris conscience de l'importance des moyens destinés à assurer la sécurité des citoyens et la rapidité des enquêtes relatives aux accidents d'aéronefs. Si la somme de 100 000 euros actuellement gelée revenant à l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, devait être annulée, cela l'obligerait à renoncer à certaines dépenses, ce qui pourrait nuire à sa crédibilité. Le budget de fonctionnement de l'ACNUSA n'augmente que de 3 000 euros, chiffre insuffisant eu égard au développement du trafic aérien et des nuisances qui l'accompagnent. Si les crédits de la recherche ne sont plus inscrits dans le cadre de la mission transport, il n'en reste pas moins vrai qu'ils ont une forte répercussion sur ce secteur. La rapporteure pour avis a relevé que, depuis 2001, les budgets de recherche et technologie avaient régressé de 40 %, ce dont les industriels se sont alarmés, et qu'une menace de gel, déjà soulevée par la Mission d'information sur la sécurité du transport aérien de voyageurs, pesait pour 2005. Le budget de la mission « contrôle et exploitation aériens », qui correspond à l'ancien budget annexe, progresse. La rapporteure pour avis, a cependant estimé que cette progression était en trompe-l'œil, pour trois raisons, liées au changement de statut d'Aéroports de Paris, mesure à laquelle le groupe socialiste s'était opposé. Premièrement, le niveau d'endettement du budget annexe, en 2006, aurait dû diminuer de 10,7 millions d'euros, mais le recours à un emprunt destiné à financer le transfert à la DGAC des immobilisations effectuées par ADP pour la navigation aérienne, à hauteur de 152,5 millions, a accru artificiellement ce montant. Deuxièmement, les pensions civiles ont été relevées du fait de la création du compte d'affectation spéciale « Pensions ». Troisièmement, le nouveau mode de gestion des prestations familiales contribue à la hausse du budget annexe pour 42,7 millions d'euros. Ces trois mesures exigent 195,2 millions d'euros supplémentaires alors que le budget n'augmente que de 250 millions. La taxe de l'aviation civile finance le budget général et, encore en partie, la mission contrôle et exploitation aériens, car son remplacement par les redevances est progressif. La rapporteure pour avis s'est élevée contre le prélèvement de 9,14 % du produit estimé de la TAC pour 2006 afin de contribuer au financement de la dotation de continuité territoriale en faveur de l'outre-mer, procédé qu'elle a jugé injustifié dans la mesure où il n'appartient pas aux passagers de financer la continuité territoriale. Elle a considéré que le taux de croissance de la TAC, calculé en fonction des prévisions de trafic, était largement et volontairement sous-estimé, avec 1,91 % pour le trafic passagers intracommunautaire et 4,58 % pour le trafic passagers extracommunautaire, soit une augmentation totale de 2,64 %, alors que, lors des auditions, la Fédération nationale de l'aviation marchande (FNAM) et le PDG d'Aéroports de Paris (ADP) l'avaient évaluée à plus de 4 %. Elle a regretté que le Gouvernement, en tablant sur des hypothèses de trafic volontairement basses, pèse en réalité sur les compagnies aériennes, risquant de pénaliser l'activité d'un secteur relativement fragile, et elle a dénoncé l'absence de dialogue présidant à la fixation de ces hypothèses, ajoutant que les différents partenaires s'en plaignaient. Enfin, elle s'est interrogée à propos de la taxe de solidarité sur les billets d'avion préconisée par le Président de la République, estimant que celle-ci risquait, si elle n'était pas appliquée par tous les pays européens, de mettre les compagnies françaises en difficulté, alors que l'augmentation du kérosène pèse de tout son poids sur ce mode de transport, et qu'elle ne manquerait pas de créer des distorsions de concurrence avec d'autres modes de transport. Le ministre a estimé que la hausse des crédits consacrés aux transports aériens était réelle et importante. La sécurité de la navigation aérienne donnera lieu en 2006 à une série de programmes d'investissement ; 73 millions d'euros seront affectés à la modernisation des cinq grands centres de contrôle aériens et 53 millions d'euros à la modernisation des équipements aéroportuaires. 11 millions d'euros sont également prévus pour les moyens outre-mer. - Les effectifs du bureau d'enquêtes et d'analyses seront substantiellement renforcés afin d'accélérer les enquêtes dont il est chargé. La France a tout lieu d'être fière de la fiabilité et de l'excellente réputation du BEA, fréquemment sollicité par des pays étrangers. La qualité de nos ingénieurs et de nos contrôleurs est unanimement reconnue ; - L'ACNUSA, autorité indépendante, a reçu, semble-t-il, les crédits qu'elle demandait. Il est à noter que si le niveau du budget annexe de la navigation aérienne augmente, c'est uniquement pour une raison technique, liée au fait que ADP a préfinancé le matériel de contrôle aérien. Le changement de statut oblige à lui rembourser en un an une somme relativement importante. Quant au FIATA, sa base budgétaire est préservée en 2006 dans la mesure où il devrait bénéficier de reports au titre de 2005 et voir ses dépenses diminuer ; - S'agissant de la préparation du contrat de régulation d'Aéroports de Paris, les propositions transmises méritent d'être attentivement analysées. Certaines compagnies aériennes n'ont effectivement pas manqué de réagir. Tout est affaire de contraintes : les aéroports doivent faire ce qu'ils ont à faire pour garantir la sécurité et améliorer leurs prestations, sans pour autant pénaliser les compagnies aériennes et en premier lieu nuire aux excellentes performances d'Air France - KLM. S'agissant de la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dont il n'est pas question pour l'heure de s'interroger sur l'opportunité ou l'inopportunité, le ministère des transports est associé à la définition de ses modalités de mise en œuvre afin qu'elle ne constitue pas un élément de rupture de la concurrence. Le déclenchement de cette surtaxe devrait être lié au fait de toucher le territoire d'un des pays engagés dans cette affaire et non à la nationalité de la compagnie. La Commission a ensuite examiné les crédits de la mission « Transports » ainsi que les crédits de la mission « Contrôle et exploitation aériens ». Contrairement aux conclusions de la rapporteure, elle a émis un avis favorable au programme « transports aériens » et à l'adoption des crédits de la mission « contrôle et exploitation aériens. ---------------- N° 2570-14 - Avis présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540), tome XIV : Contrôle et exploitation aériens (Mme Odile Saugues) 1 () Hors fonds de concours. 2 () Prévisions établies en février 2005 3 () ADP n'envisage pas pour la période 2006-2010 couverte par ce premier contrat, de mettre en place de modulations tarifaires au sens de la loi relative aux aéroports. 4 () Cette redevance aurait consisté en un supplément aux redevances de navigation aérienne en fonction des caractéristiques des aéronefs. 5 () Ce compte-rendu constitue un extrait de l'audition ayant eu lieu le 12 octobre 2005, composé uniquement des interventions relatives au secteur des transports aériens. - Cliquer ici pour retourner au sommaire général - Cliquer ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires © Assemblée nationale |