Version PDF

graphique

N° 2572

--

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2005.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2006 (n° 2540)

TOME VIII

DÉFENSE

ÉQUIPEMENT DES FORCES

PAR M. Jérôme RIVIÈRE,

Député.

--

Voir le numéro : 2568 (annexe n° 10)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. -  UN EFFORT MAINTENU EN FAVEURS DES ÉQUIPEMENTS DANS UN CADRE BUDGÉTAIRE NOUVEAU 7

A. UNE ARCHITECTURE BUDGÉTAIRE NOUVELLE 7

B. DES CRÉDITS QUI S'INSCRIVENT DANS LA BONNE EXÉCUTION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 2003-2008 8

II. -  LES PROGRAMMES FRANÇAIS D'ÉQUIPEMENT 11

A. L'AVION RAFALE 11

B. LE MISSILE AASM 15

III. -  LES PROGRAMMES EUROPÉENS 16

A. L'HÉLICOPTÈRE TIGRE 16

B. LE NH 90 20

C. LE DRONE EUROMALE 24

1. Le drone MALE 24

2. Le démonstrateur EUROMALE 25

D. LE MISSILE METEOR 26

E. LES FREMM 27

F. UN PROGRAMME EN COOPÉRATION : LE DEUXIÈME PORTE-AVIONS 28

IV. - LES ORGANISMES EUROPEENS ET DE COOPERATION 30

A. L'AGENCE EUROPÉENNE DE DÉFENSE (AED) 30

B. L'ORGANISATION CONJOINTE DE COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ARMEMENT (OCCAR) 31

TRAVAUX DE LA COMMISSION 35

I. -  AUDITION DE M. FRANÇOIS LUREAU, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L'ARMEMENT 35

II. -  EXAMEN DES CREDITS 43

INTRODUCTION

L'examen des crédits d'équipement du projet de loi de finances initiale pour 2006 est le premier exercice du genre. L'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001 emportant le passage d'une logique des moyens à une logique d'objectifs et de résultats.

Certes, ce premier exercice est rendu délicat pour ce qui concerne les comparaisons avec les années passées. La loi de règlement permettra, seule, d'établir des comparaisons valables.

Cet état de fait se trouve aggravé par les nombreux changements de périmètre résultant de l'application de la LOLF qui empêche de retracer l'évolution des crédits des actions du programme « Equipement des forces ». En revanche, la documentation fournie permet d'isoler et de comparer les crédits regroupés sous le vocable barbare « d'agrégat LPM ».

Les crédits de paiement du programme « Equipement des forces » s'élèvent, pour l'exercice 2006 à 9, 463 milliards d'euros. Ils représentent 29 % des 46,8 milliards d'euros de crédits de paiement inscrits dans le projet de loi de finances pour 2006.

Cette année encore, l'effort permet le respect de la loi de programmation militaire ; il ne s'agit cependant là que de l'effort indispensable pour assurer le maintien et la consolidation de notre outil de défense.

Si, en Europe, la France et le Royaume-Uni font un effort supérieur à 2 % de leur PIB pour les dépenses militaires (respectivement de 2,5 % et 2,3 %), ce n'est pas le cas de l'Allemagne (1,4 %) ou de l'Italie (1,8 %), pas plus que celui de l'Espagne avec 1,2 %. De leur côté, les Etats-Unis y consacrent 3,7 % de leur PIB alors que notre partenaire grec en investit 3,1 % soit 7 milliards d'euros.

Si certains programmes d'équipement donnent satisfaction, trop d'incertitudes demeurent. Aussi, le rapporteur a-t-il souhaité examiner de près quelques programmes ayant, pour une raison ou une autre, contracté des retards difficilement acceptables. Cela est particulièrement vrai pour les hélicoptères Tigre et NH 90 pourtant indispensables, au moins à l'armée de terre.

Par ailleurs, le rapporteur s'étonne de constater qu'une ligne de crédit de 300 millions d'euros destinée, pour 2005, à la rénovation des hélicoptères Puma et Cougar de l'armée de terre a pu disparaître alors que cette opération avait été présentée comme indispensable. Le Parlement avait soutenu le principe de cet investissement et n'a nullement été informé et encore moins consulté sur ce changement. Dans ces conditions, il est difficile de ne pas s'interroger sur la vacuité d'un exercice qui consiste à faire voter par le Parlement des crédits en loi de finances initiales pour qu'ils fassent, par la suite, l'objet de déplacement et de suppression sans que celui-ci soit le moins du monde consulté ou informé.

Enfin, le rapporteur, relève des interrogations sérieuses sur la réalisation de deux programmes majeurs qui devraient être exemplaires en termes de coopération : les FREMM et le deuxième porte-avions.

L'article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, tel que modifié par la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005, fixe comme date limite, pour les réponses aux questionnaires budgétaires, le 10 octobre.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur.

I. -  UN EFFORT MAINTENU EN FAVEURS DES ÉQUIPEMENTS DANS UN CADRE BUDGÉTAIRE NOUVEAU

A. UNE ARCHITECTURE BUDGÉTAIRE NOUVELLE

Le présent rapport pour avis examine les crédits d'équipement des armées (anciennement titre V) dans le nouveau contexte créé par l'entrée en vigueur de la réforme budgétaire. Ainsi, ces crédits sont désormais regroupés au sein du programme 146 « Equipement des forces », placé sous l'autorité conjointe du CEMA et du DGA. Par la masse qu'ils représentent, ils constituent 29 % des crédits de paiement au sein de la mission défense.

Ce programme se décompose en cinq actions :

1 - Equipement de la composante interarmées

2 - Equipement des forces terrestres

3 - Equipement des forces navales

4 - Equipement des forces aériennes

5 - Préparation et conduite des opérations d'armement

La commission de la défense nationale et des forces armées a choisi de ne pas se limiter au simple examen des crédits par programme. Elle a préféré procéder à un redécoupage plus fin et plus explicite. Ainsi, au sein du programme 146, l'action 1 « Equipement de la composante interarmées » a été isolée et fait l'objet du rapport pour avis « Espace, communications et dissuasion ».

Cette action concerne les opérations d'armement qui bénéficient à l'ensemble des forces armées (terre, marine, air, gendarmerie). Les opérations d'armement de la composante interarmées sont réparties en deux grandes fonctions opérationnelles : la dissuasion d'une part, l'information, le commandement et le renseignement d'autre part.

Les autres opérations d'armement interarmées concernent les équipements communs des armées relatifs au recueil électronique et à la protection biologique et nucléaire. Une dernière sous-action comprend les autres crédits nécessaires au soutien de l'action interarmées.

Cette action porte, dans le projet de loi de finances pour 2006, sur 2 258 412 235 euros en crédits d'engagement, soit 21,45 % de l'ensemble des crédits d'engagement du programme « Equipement des forces ».

Répartition par action des autorisations d'engagement demandées pour 2006

graphique

B. DES CRÉDITS QUI S'INSCRIVENT DANS LA BONNE EXÉCUTION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 2003-2008

Pour la quatrième année consécutive, le budget de l'équipement pour 2006 met en œuvre les dispositions de la loi de programmation militaire pour 2003-2008 avec un montant de 10,61 milliards d'euros de crédits de paiement.

Présentation par action et titre des crédits votés pour 2005 (loi de finances initiale)

Autorisations d'engagement

(en euros)

Numéro et intitulé de l'action / sous-action

Titre 2

dépenses de personnel

Titre 3

Dépenses de fonctionnement

Titre 5

Dépenses d'investissement

Titre 6

Dépenses d'intervention

Total
pour 2005

01

Equipement de la composante interarmées

5 287 993

36 630 593

1 668 689 315

1 710 607 901

02

Equipement des forces terrestres

24 043 928

43 204 794

1 161 677 632

1 228 926 254

03

Equipement des forces navales

7 742 794

33 000 000

3 928 313 000

3 969 055 794

04

Equipement des forces aériennes

51 175 162

28 089 940

758 906 509

844 171 511

05

Préparation et conduite des opérations d'armement

899 802 780

282 497 026

981 122 459

3 187 500

2 072 359 765


Totaux

899 802 657

423 422 263

8 498 708 815

3 187 500

9 825 121 255

Source : mSource : ministère de la défense

Crédits de paiement

(en euros)

Numéro et intitulé de l'action / sous-action

Titre 2

dépenses de personnel

Titre 3

Dépenses de fonctionnement

Titre 5

Dépenses d'investissement

Titre 6

Dépenses d'intervention

Total
pour 2005

01

Equipement de la composante interarmées

5 287 993

33 790 593

1 527 629 316

1 566 707 901

02

Equipement des forces terrestres

24 043 928

20 891 794

1 600 006 532

1 644 942 254

03

Equipement des forces navales

7 742 794

14 676 000

2 241 007 000

2 263 425 794

04

Equipement des forces aériennes

57 175 162

55 769 840

2 363 942 509

2 476 887 511

05

Préparation et conduite des opérations d'armement

57 175 162

281 833 026

972 272 459

3 187 500

2 062 845 765


Totaux

899 802 657

406 961 253

8 704 875 815

3 187 500

10 014 809 225

Source : mSource : ministère de la défense

Présentation par action et titre
des crédits demandés pour 2006

(en euros)

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

01

Equipement de la composante interarmées

2 258 412 235

1 894 726 761

02

Equipement des forces terrestres

1 857 515 269

1 770 068 140

03

Equipement des forces navales

2 992 773 976

2 413 506 275

04

Equipement des forces aériennes

1 336 129 557

2 439 345 761

05

Préparation et conduite des opérations d'armement

2 083 216 994

2 092 032 094


Totaux

10 528 048 031

10 609 679 031

Source : ministère de la défense

Les tableaux, ci-dessus, ne retracent que l'évolution des crédits à périmètre courant. Il faut, en effet, relever que, pour ce qui concerne ceux ne relevant pas du champ de la loi de programmation militaire, il n'est pas possible de retracer leur, compte tenu des nombreux changements de périmètre.

En revanche, l'évolution des crédits de paiement relevant du champ de la LPM (« agrégat LPM »), peut être retracée, par actions, entre la loi de finances pour 2005 et la loi de finances pour 2006 comme le montre le tableau, ci-dessous.

Comparaison des crédits de l'agrégat LPM 2005/2006 par action

(en millions d'euros courants)

Actions

PLF 2005 AP

LFI 2006 AE

PLF 2005 CP

LFI 2006 CP

1 - Equipement de la composante interarmées

2 080,35

2 258,37

1 918,41

1 894,70

2 - Equipement des forces terrestres

1 129,74

1 802,07

1 534,94

1 715,27

3 - Equipement des forces navales

3 979,44

2 976,19

2 258,46

2 396,94

4 - Equipement des forces aériennes

767,97

1 275,71

2 369,06

2 379,12

5 - Préparation et conduite des opérations d'armement

1 176,19

1 050,09

1 169,81

1 077,33

TOTAL GENERAL

9 133,69

9 362,43

9 250,68

9 463,36

Source : ministère de la défense

En tout état de cause, seul l'examen de la loi de règlement de la loi de finances pour 2006 permettra une comparaison fondée avec l'exercice suivant. Au demeurant, les principales évolutions, pour le domaine de l'équipement, s'expliquent comme suit.

- Pour l'action 1 « Equipement de la composante interarmées », les principaux paiements concernent les programmes M51 (608 millions d'euros), Syracuse III (240 millions d'euros), ASMP-A (119 millions d'euros) et hélicoptères pour unités spécialisées (HUS) pour 60,57 millions d'euros.

- Pour l'action 2 « Equipement des forces terrestres », l'augmentation en crédits de paiement est notamment due aux livraisons et à des paiements importants sur le SAMP/T (62,12 millions d'euros). L'armée de terre se verra livrer 26 systèmes RITA valorisés, 1 250 postes PR4G-VS4, 25 DRAC, 94 SIR, 7 hélicoptères Tigre, 34 chars Leclerc, 5 dépanneurs de char Leclerc, 32 chars AMX-10 RC rénovés, 66 VBL, 358 systèmes FELIN, 5 radars COBRA et 306 véhicules VAB valorisés.

- Pour l'action 3 « Equipements des forces navales », le Rafale bénéficiera de 534,8 millions d'euros, le SNLE-NG n°4 de 389,5 millions d'euros et les FREMM de 199,3 millions d'euros (dont 73 millions d'euros la participation du ministère des finances).

- Pour l'action « Equipement des forces aériennes », les principaux postes sont le Rafale (1079,67 millions d'euros) et l'ATF (326,05 millions d'euros) qui sont en pleine phase de production pour le premier et d'industrialisation pour le second.

- Pour l'action 5 « DGA » concernant les crédits de l'agrégat LPM, à périmètre constant, la dotation en loi de finances pour 2005 (agrégat LPM) de l'action 5 aurait été de 1126,90 millions d'euros 2005 en crédits de paiement ; elle passe à 1 077,33 millions d'euros 2006 en soit une diminution de 4,4 %. 128,6 millions d'euros seront consacrés aux investissements. Par ailleurs, 925,65 millions d'euros seront transférés au CEA/DAM.

II. -  LES PROGRAMMES FRANÇAIS D'ÉQUIPEMENT

A. L'AVION RAFALE

L'avion Rafale équipe l'armée de l'air ainsi que la marine. Avion polyvalent, il a vocation à remplir aussi bien des missions de supériorité ou de défense aériennes que des missions tactiques d'attaque classiques et, le cas échéant, nucléaires ou de reconnaissance.

Lancé à la fin des années 1980, ce programme a souffert de retards dus à des reports successifs de commande et de livraison, principalement en raison de contraintes budgétaires. La maîtrise de sa conduite a été très critiquée. De fait, par sa conception de système d'armes complet et sa polyvalence, le Rafale constitue une rupture. Il implique un changement du fonctionnement des bases aériennes sur les plans de la maintenance, de la mécanique et de la simulation.

Le programme Rafale inclut trois standards successifs, tandis qu'un quatrième pourrait intervenir au-delà de la loi de programmation militaire pour 2003-2008.

- Le standard F1, à vocation air-air, mis en service opérationnel dans la première flottille de la marine nationale en 2004.

- Le standard F2, opérationnel à partir de mi 2006 au sein du 1er escadron de l'armée de l'air puis d'une flottille de la marine, complétera le standard F1 en intégrant de nouveaux capteurs, la fusion de données et en introduisant les premières capacités d'attaque au sol. Il apportera aux utilisateurs les premières capacités de polyvalence.

Pour implanter de nouvelles fonctions et conserver un fort potentiel de croissance pour les standards suivants, le standard F2 fait appel à une nouvelle architecture système s'articulant sur un ensemble modulaire de traitement des informations (EMTI).

Le développement du standard F2 a été contractualisé avec l'ensemble des industriels sous la forme d'un marché au forfait. Différents jalons permettent à l'Etat de suivre les travaux effectués et les résultats obtenus, mais ce n'est qu'à échéance du marché, mi 2006, que les engagements des industriels sont dus à l'Etat. Néanmoins, les premiers résultats de l'expérimentation en cours à Mont-de-Marsan sur un standard intermédiaire sont très positifs.

- Le standard F3 (contractuellement dû pour l'été 2008 et opérationnel dans les unités fin 2008) introduira en particulier la capacité de tir de l'arme nucléaire (ASMP-A), une capacité de reconnaissance et une conduite de tir air-mer. Le marché de développement a été notifié en février 2004.

Le calendrier et le financement d'un standard ultérieur ne figurent pas dans la loi de programmation militaire 2003-2008. Un objectif d'état-major, visant à poursuivre les extensions de capacités et les améliorations des fonctions existantes est en cours d'instruction.

En 2004, le montant de la commande de 59 Rafales F3 s'élève à 3,114 millions d'euros. Il faut rappeler que le ministère de la défense estime à 33,274 millions d'euros le coût du programme dans sa totalité en incluant le développement, lequel représente 10,636 milliards d'euros, dont 8,803 milliards d'euros à la charge de l'Etat. Le programme français a enregistré 48 % de sa dérive financière aux divers stades de développement dont 25 % des coûts sont financés par les industriels, les 75 % restant par l'Etat. Cependant, grâce au système de commandes pluriannuelles et aux efforts consentis par les industriels, les devis de production ont baissé de 7 %. Dans ces conditions, on peut estimer que le prix unitaire d'un Rafale s'élève à 113 millions d'euros. Pour mémoire, il peut être rappelé que le coût de l'avion Eurofighter EF-Typhoon est estimé, selon les mêmes critères, à 175 millions d'euros.

La commande de 59 Rafales F3 est assortie d'un échéancier de livraison qui prévoit la remise du premier appareil à l'armée de l'air en juin 2008. A cette date, le biplace B.328, premier de la série, arrivera qualifié de son nouveau standard. L'armée de l'air a établi un calendrier qui prévoit la mise en service opérationnelle du premier escadron F3 à Saint-Dizier en décembre 2006 avec 20 appareils polyvalents à capacité nucléaire (ASMP-A). La BA-113 disposera alors de 40 Rafales dont 20 F2 (7 monoplaces et 13 biplaces).

Les livraisons des 59 F3 s'échelonneront de juin 2008 à janvier 2012, réparties en 11 biplaces Rafale B et 36 monoplaces Rafale C et en 12 monoplaces Rafale M pour l'aéronautique navale. Dans son intégralité, le programme Rafale prévoit un total de 294 avions à l'horizon 2023 : 234 pour l'armée de l'air et 60 pour la marine avec un objectif de 125 commandes et 76 livraisons (standard F2) au titre de la loi de programmation militaire, c'est-à-dire à la fin de l'année 2008. Au-delà, mais sans échéancier précis (horizon 2010-2015), et en fonction des exportations éventuelles, le « rétrofit » de tous les F2 au standard F3 est prévu. A ce jour, toutes versions confondues, un total de 120 Rafale de série a été commandé.

Le tableau ci-dessous retrace le calendrier des commandes et des livraisons du Rafale pour l'armée de l'air et la marine.

Calendrier des commandes et livraisons des avions Rafale

Avant 2002

2002

2003

2004

2005

2006

Ult.

Total

Rafale air

Commandes

36

0

0

46

0

0

152


234

Livraisons

2

1

1

3

11

12

205

Rafale marine

Commandes

25

0

0

13

0

0

22


60

Livraisons

9

1

0

0

0

2

40

Source : ministère de la défense

En dépit de ses nombreuses qualités, le Rafale n'a pas été retenu par Singapour qui lui a préféré un avion américain. Il est légitime de s'interroger sur les conséquences de cet échec en termes financiers comme en termes technologiques. D'après les éléments fournis au rapporteur, il est envisagé de négocier avec les industriels afin d'éviter une nouvelle dérive financière du programme.

Pour ce qui concerne les équipements, une négociation est en cours au sujet de l'optronique secteur frontal (OSF). Disposant d'une voie infrarouge et d'une voie télévision (spectre visible), l'OSF est un capteur complémentaire du radar, qui permet - hors des nuages uniquement - d'effectuer, de façon discrète, des identifications visuelles. C'est un équipement optionnel du Rafale.

Il est intégré au Rafale dans le standard F2 et participe à l'établissement de la situation tactique et à la robustesse de la poursuite des cibles. Conçu à l'origine comme un capteur exclusivement air/air, puisqu'un pod air/sol était initialement prévu, il a depuis été adapté pour être aussi utilisé en mission air/sol. Le premier OSF a été livré à l'armée de l'air au printemps 2005 ; il est à l'heure actuelle en cours d'expérimentation.

Une commande de 48 équipements a été notifiée en 2000 à SAGEM et Thales. Les premiers OSF sont en cours de livraison à l'armée de l'air. Ils pourront être montés indifféremment sur les avions de la commande globale des 48 ou sur ceux de la commande globale des 59. Une analyse de coût/efficacité de l'OSF a conduit à ne pas commander d'équipements supplémentaires. La DGA négocie actuellement avec l'industrie les conditions dans lesquelles un éventuel OSF de nouvelle génération pourrait être lancé en fonction des besoins nationaux et des perspectives à l'exportation. Un tel équipement pourrait être disponible à l'horizon 2012.

Pour ce qui concerne le radar, la qualification du RBE2 pour le standard F1 a été prononcée fin 2001. Le développement des modes air-sol et air-mer prévus pour le deuxième standard est achevé.

A la suite de l'expérimentation du radar en vue de la mise en service opérationnel du Rafale marine (déclarée en juin 2004), certaines corrections ont été apportées sur la conduite de tir air/air. De nouvelles fonctionnalités (notamment la cartographie haute résolution et le suivi de terrain) seront apportées dans le cadre du développement du standard post F3.

A ce jour, l'Etat a commandé une première tranche de 48 radars capteurs optroniques secteur frontal (OSF), cependant : cet équipement sera bientôt frappé d'obsolescence, son amélioration doit donc faire l'objet d'une négociation avec l'industriel. Enfin, l'armée de l'air envisage de réduire de 8 unités le nombre d'appareils commandés en échange de développement de nouvelles capacités devant équiper le standard post F3, notamment radar à antenne active, indispensable à l'utilisation du missile METEOR. Cette dernière solution risque cependant de poser des problèmes en termes capacitaires dans le courant de l'année 2009.

Les tableaux, ci-dessous retracent les montants de crédits inscrits au titre du programme Rafale dans le projet de loi de finances pour 2006.

marine : autorisations d'engagement
et credits de paiement annee 2006

(millions d'euros courants)

2006

Autorisations d'engagement

Rafale ACT et M 88

131,92

Rafale Marine -Post F 3

1,31

TOTAL

133,23

Crédits de paiement

Rafale ACT et M 88

534,74

Rafale Marine -Post F 3

4,57

TOTAL

539,41

Source : ministère de la défense

Air : autorisations d'engagement
et credits de paiement annee 2006

(millions d'euros courants)

2006

Autorisations d'engagement

Rafale ACT et M 88

576,42

Rafale -Post F 3

9,17

Rafale suivi en service et moyens d'essais

0,00

TOTAL

585,59

Crédits de paiement

Rafale ACT et M 88

1 079,67

Rafale -Post F 3

18,00

Rafale suivi en service et moyens d'essais

0,00

TOTAL

1 096,47

Source : ministère de la défense

Les montants d'autorisations d'engagement 2006 ne tiennent pas compte des reports qui interviendront en début de gestion 2006.

B. LE MISSILE AASM

L'AASM, développé par la société Sagem, est basé sur le guidage d'une bombe conventionnelle de 250 kg tirée d'un avion. Sa portée est de plusieurs dizaines de kilomètres, sa précision est décamétrique ou métrique. La version décamétrique de cet armement est équipée d'un guidage par inertie et GPS. Elle sera livrée aux forces en 2006. Elle conférera la capacité de tir par tous les temps au Rafale, dans sa version air-sol (standard F2). La version métrique est dotée en outre d'un imageur infrarouge qui améliore la précision des tirs via un guidage terminal. Cette version sera livrée aux forces en 2008. La production est prévue jusqu'en 2014.

La France a commandé 3 000 exemplaires de ce missile (50 % de chaque version) L'AASM est principalement destiné à l'Armée de l'air et à la Marine nationale.

La délégation générale pour l'armement (DGA) a achevé la première campagne de mise au point de l'AASM à partir d'un Mirage 2000 d'essais. Les dix tirs, débutés le 6 septembre 2004, ont pu valider en vol les principales performances de la version décamétrique de l'armement, en particulier l'augmentation de portée à l'aide d'un propulseur.

Le potentiel à l'exportation de l'AASM n'est pas négligeable, les pays susceptibles de s'en porter acquéreurs sont les suivants : Emirats Arabes Unis (Rafale), Brésil (M2000), Chili (M5), Egypte, Pakistan, Espagne (F18), Maroc (F1).

Le coût prévisionnel du programme est de 430 millions d'euros. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, la dotation en autorisation d'engagement est de 15,6 millions d'euros et la dotation en crédits de paiement de 21,5 millions d'euros.

III. -  LES PROGRAMMES EUROPÉENS

A. L'HÉLICOPTÈRE TIGRE

Les avatars du programme Tigre doivent constituer une source d'enseignements. Né sous les meilleurs auspices, fruit d'une coopération franco-allemande, il a su se vendre à l'export avant même que l'armée française ne réceptionne le premier engin. En effet, dès 2001, l'Australie a passé commande de 22 Tigre dans la version ARH (hélicoptère de reconnaissance armé). Cependant, ce programme a connu un retard considérable.

Les principales étapes du programme Tigre

1979  Protocole franco-allemand pour la phase de définition de l'hélicoptère

1984  Signature de l'accord de développement et de production

1987  Contrat principal de développement

1991  Premiers « prototypes », décision de création d'un centre commun de formation des équipages

1993  Fiche commune de caractéristiques militaires franco-allemandes

1997  Annonce officielle de la construction du centre de formation des équipages Tigre « EFA » au Luc en Provence

1998  Intégration du programme dans l'OCCAR ; décision de création de l'école commune de formation du personnel technico-logistique Tigre à Fassberg

1999  Signature le 18 juin du contrat de production

2001  Pose de la première pierre de l'école franco-allemande « EFA » ; premier contrat d'exportation passé avec l'Australie.

2003  Vol du premier Tigre HAP de série ; ouverture le 1er juillet de l'EFA du Luc ; ouverture le 27 septembre de l'Ecole de formation de Fasseberg ; annonce de l'achat de 24 Tigre par l'Espagne

2004  Début de la formation des personnels techniques (instructeurs) à Fassberg ; contrat de développement du modèle HAD pour la France et l'Espagne

2005  Livraison des premiers Tigre aux armées de terre française (mars) et allemande (avril) ; début des cours (octobre) à l'EFA au profit des équipages du 5e RHC (France) et du Régiment 36 de Fritzlar (Allemagne).

De par sa conception, le Tigre constitue un système d'armes complet. Sur ce point, il peut être comparé à l'avion Rafale. Il a donc constitué pour les acteurs les plus directement concernés ce qu'il faut appeler un choc culturel et technique. Les sous-ensembles nationaux spécifiques français et allemands sont gérés respectivement par DGA (direction des services aéronautiques) et par l'Office fédéral de la technique militaire et des approvisionnements (BWB). C'est en 1998 que le programme a été intégré à l'organisation conjointe de coopération en matière d'armements (OCCAR). La maîtrise d'œuvre industrielle du programme est assurée par Eurocopter Tiger Gmbh.

De leur propre aveu, la DGA et la société Eurocopter reconnaissent avoir sous-estimé la complexité du programme. La mise au point d'un système d'armes constituait, pour Eurocopter une nouveauté. A cet égard, elle s'est retrouvée dans une situation comparable à celle de l'avionneur Dassault à la fin des années 1970 avec la conception du Mirage 2000. Un des interlocuteurs du rapporteur a estimé qu'il s'agissait d'un « saut » comparable au passage du AMX 13 au Leclerc « en une seule fois ». La plupart des équipements du Tigre sont très spécifiques et n'ont rien de commun avec les autres appareils construits par Eurocopter.

Equipementiers du système Tigre

MTR (MTU, Turboméca, Rolls-Royce)

Moteur

Giat Industries

Tourelle canon

MBDA

Missiles air-sol et air-air

RAYTHEON

Missiles air-air

TDA

Roquettes

EADS

Viseur de mât

SAGEM

Viseur de toit

THALES AVIONICS

THALES AVIONICS

THALES

Radio-communications

DORNIER

Eurogrid

Source : DGA

La place d'Eurocopter dans la chaîne de construction n'a pas été sans lui causer de difficultés. Concepteur de la plateforme, elle se trouve en position d'intégrateur d'équipements livrés et donc en « fin de » chaîne pour l'assemblage de ces équipements. On conçoit aisément les difficultés rencontrées lorsque, par exemple, le viseur fabriqué par SAGEM n'a pas donné satisfaction : il a fallu rediscuter l'interprétation des clauses du contrat.

Les fournisseurs d'Eurocopter sont la DGA et l'OCCAR. Cette agence n'a qu'une compétence contractuelle et non décisionnelle, dans un cadre bilatéral. Cette position a été vécue par Eurocopter comme une source de retards. De fait, pour la France, si l'OCCAR assure le suivi des contrats, c'est la DGA qui a compétence pour la qualification des matériels.

Cependant, le rôle de l'agence est vécu de façon positive par d'autres acteurs, notamment l'utilisateur final qui considère que, dans la chaîne, la place de l'OCCAR constitue une garantie de financement puisqu'elle honore les paiements de ses contrats à l'avance.

La conception de certains équipements s'est révélée bien plus longue que prévu. A titre d'exemple, la mise au point du logiciel général a pris plus de dix ans. Conçu pour moitié par la France et pour moitié par l'Allemagne, il implique plusieurs milliers de fonctions. La coopération ne semble pas avoir été toujours fraternelle, chaque pays souhaitant, au départ, conserver ses propres ingénieurs (100 pour l'Allemagne, 50 pour la France). Enfin, le fonctionnement de l'informatique embarquée ne peut être testé de façon valable qu'en vol, il y là une source incompressible de délais.

De même, pour le mode de couplage entre viseur et casque d'armement, ainsi que sur la remontée d'information du logiciel vers l'équipage, la DGA comptabilise sept ans de retard, en se fondant sur la durée du programme engagé en 2004 alors que l'industriel estime cette durée à un an.

Un autre aléa dans l'avancement du programme a été le passage à la version HAD, demandée par l'Espagne lorsque celle-ci a rejoint le programme en 2003.

Les différentes versions du Tigre

Protection (HAP) : Combat air-air / Appui - feu

canon de 30 mm en tourelle de nez
missiles air-air Mistral
2 x 22 roquettes

Appui - Destruction (HAD) : Reconnaissance / combat air / air / appui - feu / antichar

capacité roquette 70 mm
missiles antichars (Trigat)

Appui - Antichar (UHT / HAC) :Antichar / Appui - feu

4 missiles anti char
2 missiles air air
1 x 22 roquettes
1 canon de 12,7 mm en pod

Hélicoptère de reconnaissance armée (HAR)

Canon en tourelle de nez

missiles antichars (Hellfire)

La commande, par ce pays de 24 hélicoptères (18 HAD et 6 HAP qui seront rétrofités en version HAD) a constitué un changement de nature du matériel demandé. Il s'agissait de passer d'une culture de la guerre froide à celle de la guerre du Golfe. L'arrivée du HAD a entraîné des retards supplémentaires en obligeant à redéfinir certains aspects du standard HAP (logiciels) dans l'optique de sa revalorisation au standard HAD. Cette adaptation, négociée à trois et non plus à deux, a duré six mois et entraîné un an de retard dans le programme. Au final, la version HAD a été retenue par la France et l'Espagne dans des versions très voisines et devrait être livrée à compter de 2010. La version HAC est abandonnée par la France.

En termes de commande, d'après la DGA, la situation est aujourd'hui la suivante :

l'Allemagne a commandé 80 hélicoptères UHT ;

la France a commandé 80 hélicoptères (40 HAP et 40 HAD) ;

l'Espagne a commandé 24 hélicoptères (18 HAD et 6 HAP qui seront rétrofités en version HAD).

Les premiers appareils de série français et allemands ont été livrés en mars 2005.

L'Australie a commandé en 2001 22 Tigre dans la version ARH, proche de la version HAP avec un système air-sol Hellfire guidé laser mais sans système air-air Mistral. Les appareils ont été livrés fin 2004.

La France a dû modifier son calendrier de commande afin d'honorer les engagements pris auprès de l'Espagne.

La réception même du premier Tigre HAP, illustre la complexité de la chaîne de décision. La DGA a reçu cet appareil en mars 2005 alors que l'OCCAR avait signifié son accord un an auparavant. On observe là une cause supplémentaire de retard sur le calendrier prévu. La différence d'appréciation entre l'OCCAR et la DGA s'explique par une divergence de vues. L'armée française ne souhaite pas réceptionner un matériel avec un taux d'exécution du contrat inférieur à 95 %. En effet, aux dires de l'un des interlocuteurs du rapporteur « L'expérience prouve que ce que l'on n'a pas tout de suite, on ne l'a jamais ».

Au début de cette année, la DGA a passé commande à un l'ingénieur général des armées M. Daniel Berthault, d'un audit relatif aux capacités d'Eurocopter à livrer les Tigre. Il a été conclu que l'industriel avait résolu la plupart de ses difficultés.

Au demeurant, il faut conserver à l'esprit que le Tigre ne connaît aucun équivalent sur le marché, les Etats-Unis ayant renoncé au développement du Comanche.

Aujourd'hui, 3 Tigre HAP ont été livrés à l'armée de terre sur 7 attendus pour 2005. L'annexe « défense » au projet de loi de finances pour 2006 donne le calendrier de livraison suivant.

Echéancier des commandes et des livraisons d'hélicoptères Tigre

Années

< 2006

2006

2007

2008

Ult

Cible totale

Commandes

80

40

120

Livraisons

7

7

7

7

92

Source : ministère de la défense

D'après le même document, le montant des autorisations d'engagement pour ce programme en 2006 est de 107 692 000 euros et le montant des crédits de paiement de 192 171 000 euros.

B. LE NH 90

Le NH90 est un hélicoptère biturbines de la classe des 10 tonnes, conçu pour remplir une grande variété de missions. Il a été développé par le consortium NHI industries, réunissant à l'origine 4 nations européennes, rejointes marginalement par le Portugal en juin 2001.

Le NH90 est destiné à remplacer dans les années à venir plusieurs types d'appareils actuellement en service dans les armées, tels que les UH-1, Puma, Lynx et Sea King.

En effet, l'âge moyen du parc d'hélicoptères de transport des forces françaises, composé de Puma et de Cougar, atteint environ vingt-quatre ans pour les premiers et treize ans pour les seconds et leur taux de disponibilité en 2004 s'établit à respectivement 59 % et 49 % seulement, du fait de leur vieillissement, de leur utilisation intensive et des difficultés rencontrées dans l'approvisionnement en pièces de rechange. Aussi, leur renouvellement par le NH 90 s'impose, notamment au regard de l'importance des missions assurées par les hélicoptères de transport en matière de soutien logistique, de recueil de renseignement et de transport tactique des forces françaises.

Le tableau ci-dessous donne l'évolution de la disponibilité technique opérationnelle de 2000 à 2005 pour les aéronefs de l'armée de terre (exprimée en pourcentage) :

2000

2001

2002

2003

2004

2005

AERONEFS Armée de Terre

70

69

58

57

57

60

Source : ministère de la défense

Le NH 90 fait appel à des technologies avancées. L'emploi intensif de matériaux composites permet d'abaisser la masse et la signature radar de la structure, tout en augmentant sa solidité. Les réservoirs de carburant sont conçus pour résister à un crash, et des réservoirs externes peuvent être ajoutés, lui permettant de franchir une distance maximale de 890 km. Pour ce qui concerne l'avionique et le cockpit, des innovations majeures ont également été apportées : commandes de vol entièrement électriques avec circuits redondants, aides au pilotage avancées, gestion électronique des moteurs avec surpuissance en cas d'urgence, système de diagnostic des pannes... Le cockpit est équipé de cinq écrans couleurs multifonctions et le NH90 peut être piloté par un seul homme.

Dans sa version « combat », il est principalement conçu pour assurer de façon autonome (ou en liaison avec son navire de base) des missions de lutte contre les sous-marins et de lutte contre les navires de surfaces.

Dans sa version « soutien », le NH90 est conçu pour assurer de façon autonome du transport de troupes et du transport de matériel.

Le NH90-NFH peut aussi être utilisé pour des missions SAR (Search And Rescue), CSAR (Combat Search And Rescue), de mouillage de mines et d'évacuation sanitaire.

Il faut rappeler qu'il est né d'études menées par le Industrial advisory group NIAG SG 14 (OTAN) pour un hélicoptère commun de transport tactique et naval. En 1992, l'agence NAHEMA (nato helicopter management agency) est créée. Celle-ci regroupe les quatre nations participantes : l'Italie, la France, l'Allemagne et les Pays-Bas.

Le programme est conduit par l'OTAN sous l'égide de la NAHEMO (NATO helicopter management organization) qui comprend une agence, la NAHEMA susmentionnée, dans laquelle s'inscrit la maîtrise d'ouvrage nationale. La maîtrise d'œuvre est assurée par la SARL NH Industries avec la répartition suivante : 61,7 % pour EADS/Eurocopter, 31,6 % pour Agusta, 5,5 % pour Fokker, 1,2 % pour Ogma (en tant que sous traitant de EADS/Eurocopter et Agusta).

Participants européens

EADS/Eurocopter

avant du fuselage, cockpit, génération électrique, rotors, BTA, système de commandes de vol électrique et avionique, intégration des motorisations

EADS/Eurocopter Deutschland

milieu et arrière du fuselage, circuit carburant, systèmes de communication, unité de contrôle et d'affichage (contrôleur du bus de données) et intégration des systèmes de missions de la version terrestre

Agusta (Italie)

BTP, circuits hydrauliques, intégration des systèmes de missions de la version navale

Fokker (Pays-Bas)

poutre de queue, portes, trains d'atterrissage

OGMA (Portugal) intervient en tant que sous traitant de EADS/Eurocopter et d'Agusta : radome et aménagements intérieurs

Principaux équipementiers

Aliena

Contre mesure électronique

Eurotorpille

Torpille

Consortium entre

DCN & Thales (France) et Whitehead (Italie)

Hurel et Dubois

fourniture des capotages supérieurs

Matra BAé Dynamics

Autoprotection par leurrage Saphir

Sagem

Equipements de navigation, FLIR

Thales Communications

Radio-communications, Radio navigation, visualisation, Radar ENV

Thales Underwater Systems

Sonar Flash

Turboméca et Rolls-Royce

Moteur (RTM322)

Source : DGA

A ce jour, toutes versions confondues, 346 unités de NH90 ont été commandées auxquelles s'ajoutent 72 unités en option :

- 27 pour la France avec la version NFH et un besoin exprimé en version TTH ;

- 134 pour l'Allemagne avec les versions TTH et CSAR et un besoin exprimé en version NFH ;

- 117 pour l'Italie avec les versions TTH, NFH et CSAR ;

- 20 pour les Pays-Bas avec la version NFH ;

- 10 pour le Portugal avec la version TTH.

En 2001, se sont ajoutés trois pays d'exportation avec 52 unités commandées et 17 unités en option :

- la Norvège avec une commande de 14 appareils (plus 10 en option) ;

- la Suède avec une commande de 18 appareils (plus 7 en option) ;

- la Finlande avec une commande de 20 appareils.

En 2003 et 2004 :

- la Grèce avec une commande de 20 appareils ;

- le Sultanat d'Oman avec une commande de 20 appareils.

En 2005, l'Australie a signé un contrat d'acquisition pour 12 appareils. L'Espagne a annoncé son intention d'acquérir 45 NH90.

Les premières livraisons sont prévues pour 2005 pour la version TTH (Allemagne, Italie et Finlande) et pour 2007 pour la version NFH (France, Italie Suède et Norvège).

Certains interlocuteurs ont critiqué le rôle tenu par la NAHEMA, qu'ils perçoivent comme constituant une source de complication et de lenteur administrative. D'aucuns ont plaidé en faveur d'un rattachement du programme à l'OCCAR alors que d'autres ont considéré que le schéma retenu garantissait la livraison du NH 90 au meilleur coût.

En tout état de cause, le rapporteur constate que le programme a contracté au moins dix-huit mois de retard alors que, en matière d'hélicoptère, l'armée de terre n'a plus de marge opérationnelle. C'est-à-dire que, si la livraison des NH 90 venait à connaître un retard supplémentaire, les Puma n'étant plus à même de servir, l'armée de terre manquerait des moyens qui lui sont nécessaires.

Echéancier des commandes et des livraisons

graphique

Source : ministère de la défense

Le programme de rénovation des hélicoptères Puma et Cougar
ou comment égarer 300 millions d'euros

Dès l'année 2002, l'armée de terre avait décidé d'engager la rénovation de 45 hélicoptères Puma et de 24 hélicoptères Cougar.

Pour ce qui concerne le coût de ces rénovations, des discussions avaient été engagées entre l'armée de terre, la DGA et Eurocopter en 2002 : le coût des opérations fut alors estimé à 50 millions d'euros pour les 24 Cougar et à 80 millions d'euros pour les 45 Puma ; ensuite, un groupe de travail a été constitué afin de définir de façon plus détaillée les spécifications techniques des rénovations. En janvier 2004, ce groupe a proposé de changer le moteur des Puma, de refaire leur avionique, leur pilotage automatique et leurs phares de recherche infrarouges. Eurocopter a ensuite remis en mai son offre, qui chiffrait le coût total de la rénovation des Puma à 300 millions d'euros, soit un montant beaucoup plus élevé que celui envisagé deux ans auparavant, du fait des évolutions importantes des demandes de l'armée de terre.

En dépit d'une nouvelle offre d'Eurocopter, d'un montant ramené à 200 millions d'euros, la rénovation des Puma a été abandonnée. Le rapporteur s'étonne de constater qu'une opération d'un tel montant, soutenue à l'époque par le Parlement, puisse être ainsi annulée sans informations transmises à ce dernier. Ce procédé est d'autant moins admissible que les interlocuteurs du rapporteur ne fournissent pas les mêmes explications à ce sujet. D'un côté, on évoque la suppression pure et simple des crédits destinés à la rénovation des Puma (décidée en conseil économique de défense) au profit des seuls Cougar, de l'autre, on prétend que les sommes destinées aux Puma ont été utilisées pour l'entretien d'autres matériels. Il est à souhaiter que l'application de la LOLF ne permettra plus de telles pratiques.

En tout état de cause, pour ce qui concerne le maintien en condition opérationnelle des matériels et, partant, la capacité de l'armée de terre à exécuter ses missions dans de bonnes conditions, le pari est fait que les NH 90 arriveront en temps et en heure pour remplacer les Puma. Le rapporteur rappelle que l'armée de terre n'a plus, aujourd'hui, de marge en terme capacitaire pour ses hélicoptères.

C. LE DRONE EUROMALE

1. Le drone MALE

Les réflexions engagées sur les UAV (1) au sein de l'armée de l'air ont mis en lumière les avantages apportés par ces systèmes dans les trois composantes de l'action militaire que sont la maîtrise de l'information, le soutien au commandement et aux opérations et le combat. La contribution des systèmes de drones est intéressante lorsque les conditions d'exécution d'une mission sont répétitives, de longue durée ou présentent des risques inacceptables pour un équipage.

Le schéma directeur des UAV dans l'armée de l'air comporte trois grandes étapes :

- 2000-2004 : expérimentation puis mise en œuvre opérationnelle du Hunter ;

- 2006 : livraison du SIDM (2), début de l'expérimentation puis mise en œuvre opérationnelle pour une durée de 7 ans ;

- 2011: mise en service de l'UAV MALE (3) futur.

Après l'expérimentation des drones Hunter, système polyvalent de surveillance et d'action (désignation optique et laser) qui a été déployé au Kosovo, à Evian (sommet du G8) ainsi que lors des cérémonies commémoratives du 60ème anniversaire du débarquement en Normandie, puis retiré du service depuis septembre 2004, l'armée de l'air a décidé de le remplacer par les drones SIDM (4) en attendant le drone MALE qui apportera vers 2011 une capacité complète à l'armée de l'air.

Le programme SIDM a vocation à donner une première capacité opérationnelle dans le domaine des drones MALE, à maîtriser l'intégration des systèmes de drones dans les systèmes d'information et de communication des armées, à aborder les aspects relatifs à l'intégration des drones dans l'espace aérien et à affiner le concept d'emploi des drones dans un cadre interarmées.

Les missions opérationnelles de l'escadron SIDM seront la surveillance et la reconnaissance tout temps, de jour et de nuit, ainsi que la désignation d'objectifs et leur illumination laser au profit d'autres systèmes d'armes.

Le SIDM a fait l'objet d'un appel d'offres international sur performances, à l'issue duquel le choix s'est porté sur la proposition EADS, maître d'œuvre pour la fourniture du système, composé de trois drones, sur la base du porteur israélien Eagle réalisé par IAI (5). La notification du contrat est intervenue en août 2001, la livraison est retardée à début 2006 à cause de difficultés industrielles de mise au point.

La phase de réalisation du programme MALE a été lancée, en 2002, en coopération franco-néerlandaise. La livraison des premiers systèmes de série est prévue au début de la prochaine décennie. Les missions du système MALE engloberont celles du SIDM avec un besoin de performances accru : endurance de 24 heures à 1000 km de son point de départ, altitude maximale d'opération envisagée de 10 000 voire 15 000 mètres, emport de 300 à 500 kg de charges utiles variées. Il est envisagé de produire 4 systèmes de 4 véhicules aériens.

Ce programme s'appuie sur des travaux ayant fait l'objet d'un accord global de coopération avec les Pays-Bas en mai 2002. Par ailleurs, une plus large coopération européenne est recherchée dans le cadre des démarches ECAP(6).

2. Le démonstrateur EUROMALE

Le projet de démonstrateur technologique EUROMALE a été annoncé par le ministre de la défense au cours du salon Eurosatory de juin 2004. Il a vocation à contribuer au renforcement d'une compétence industrielle européenne autonome sur les drones de longue endurance en termes de conception, développement, validation et production. Le risque d'un « trou capacitaire » lié au caractère intérimaire du système SIDM impose de lancer les études de conception du programme MALE en même temps que les travaux du démonstrateur. La cohérence technique et calendaire des travaux ne pourra être atteinte que par le regroupement des deux projets dans le cadre d'un seul contrat confié à un maître d'œuvre unique.

A ce stade, les discussions sont en cours pour associer des partenaires européens sur le projet. Outre les Pays-Bas, partenaire historique du programme MALE, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, la Finlande et la Turquie ont marqué leur intérêt pour le projet de démonstrateur. Cependant, la plus grande incertitude règne au sujet de ces participations du fait du devis prévisionnel du programme susceptible de connaître une très forte augmentation.

EADS sera maître d'œuvre du projet. Les modalités d'association des autres industriels français du secteur sont en cours de discussion, en corrélation avec le montage industriel européen du projet.

Le coût du démonstrateur est estimé à 300 millions d'euros. Il sera financé sur crédits d'études amont à hauteur de 75 millions d'euros. EADS s'est engagé à autofinancer l'opération à hauteur de 100 millions d'euros, le reste du budget est à trouver en coopération. Selon les informations obtenues par le rapporteur, la dotation pour 2006 en autorisations d'engagement serait de 10,2 millions d'euros et de zéro euros en crédits de paiment.

Par son engagement dans ce programme, la France souhaite en être la locomotive. En effet, EUROMALE constitue une occasion unique pour la défense européenne de s'engager dans une création ex nihilo. De fait, dans le domaine des drones, la concurrence est rude et le Predator B, développé par les Etats-Unis, pourrait tenter certains des partenaires pressentis sur le programme.

Enfin, la question de la reprise en main de la gestion du programme par l'agence européenne de défense est souvent évoquée. Sur le plan pratique comme sur le plan emblématique, cette solution est séduisante. Elle invite cependant à la réflexion puisque certains interlocuteurs du rapporteur ont estimé que ce changement conduirait le programme à contracter un retard supplémentaire de cinq années.

D. LE MISSILE METEOR

Le destin du missile Meteor est lié à celui du Rafale dans sa version « post F3 ». En effet, ce missile de supériorité aérienne est plus performant que le Mica, notamment par sa portée No-escape zone - zone à l'intérieure de laquelle toute fuite est interdite qui lui est trois fois supérieure. Il est, par ailleurs, équipé d'une propulsion par stratoréacteur, qui aujourd'hui n'équipe que les missiles nucléaires. Sa portée peut atteindre 150 kilomètres.

Ce programme concerne 6 pays européens signataires de la LOI : la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la Suède. Le développement et la production du missile ont été notifiés à MBDA. La gestion du programme a été confiée à l'OCCAR. Il est fondé sur la base d'un juste retour industriel.

La charge de travail française s'établit à 13,4 % (5,8 % pour MBDA-France, 4,7 % pour Thales et 2,9 % pour Protac). La mise en service opérationnelle du Meteor est prévue pour 2012, la France ayant signifié une intention d'achat de 396 unités dont 296 pour l'armée de l'air et 100 pour la marine.

Le Meteor est conçu pour être utilisé à partir du Rafale, de l'Eurofighter et du JAS Gripen. Les retards pris par le programme Eurofighter ont empêché la conclusion des contrats relatifs à l'équipement de cet appareil.

Singapour a été le premier et unique pays (à ce jour) ne participant pas au programme auquel le Meteor a été proposé. L'échec de la vente du Rafale à ce pays pose un problème de financement puisqu'une association au développement d'un deuxième démonstrateur du radar RBE2 muni d'une antenne active était proposée. Il s'agit d'accroître considérablement la portée du radar RBE2 équipant actuellement le Rafale ; l'objectif de ce contrat étant de maîtriser cette technologie pour en équiper le Rafale à l'horizon 2012. En effet, cette évolution est indispensable à l'utilisation du missile Meteor.

E. LES FREMM

Ce programme associe, la France et l'Italie qui prévoient de construire à elles deux 27 frégates (17 pour la France et 10 pour l'Italie). Les industriels chargés de la réalisation des FREMM sont Armaris pour la France (société commune de DCN et Thales) et Orizzonte pour l'Italie (société de Finmeccanica et Fincatieri).

La construction des frégates multimissions répond au besoin de renouvellement de la flotte de surface, renouvellement permettant d'atteindre le modèle armée 2015. Dix-sept frégates d'une même série doivent être construites pour remplacer les frégates de trois séries en service en 1997 : les 3 frégates ASM type Tourville (le Duguay-Trouin étant aujourd'hui désarmé), les 7 frégates ASM type Georges Leygues ainsi que les 17 avisos A69. La flotte de surface passerait ainsi de 7 classes de frégates à 4 classes (Horizon, La Fayette, frégates de surveillance, FREMM), plus faciles à gérer et à entretenir. Les frégates européennes multimissions pourront intervenir dans l'ensemble des domaines de lutte, toutefois elles n'ont pas vocation à assurer la défense aérienne de la force navale qui est le domaine d'un autre programme de frégates, le programme Horizon. Elles doivent agir préférentiellement dans les domaines de l'action sous-marine (ASM), de l'action vers la terre (AVT) et de la lutte anti-navire. Deux versions seront ainsi construites :

- la version anti-sous-marine, qui sera dotée d'un système de lutte ASM optimisé avec un sonar remorqué ;

- la version action vers la terre, qui disposera d'une capacité spécifique d'appui feu naval et de mise en œuvre des commandos.

La loi de programmation militaire 2003-2008 prévoit l'acquisition de 8 frégates ASM et 9 frégates AVT. Issues d'une série de bâtiments unique, les frégates sont identiques et ne se distinguent que par les missions spécifiques qui leur seront assignées, dans le cadre respectif de l'action sous-marine et de l'action vers la terre. Elles doivent notamment embarquer l'hélicoptère NH 90. Toutes mettront en œuvre le missile de croisière naval à partir d'un lanceur vertical. Elles disposent d'une capacité d'autodéfense élargie, permettant d'assurer la protection d'une unité précieuse placée à proximité. Le lancement du programme a été décidé le 30 avril 2002, pour une livraison de la première série fin 2008. La livraison des frégates suivantes devrait ensuite s'effectuer jusqu'en 2016 au rythme de production de 1,5 à 2 bâtiments par an.

En 2004, le Gouvernement français a renoncé au mode de financement innovant, initialement prévu, après que le Premier ministre a considéré le montant des intérêts trop élevé.

Aujourd'hui, la France est engagée dans ce programme à hauteur de 3,19 milliards d'euros, l'Italie, pour sa part, à hauteur de 400 millions d'euros. Le coût total du programme est à ce jour de 11,054 milliards d'euros pour les 27 frégates (6,457 milliards d'euros pour les 17 frégates françaises).

La signature du contrat franco-italien a souffert de nombreux retards et, à l'heure où s'écrivent ces lignes, un nouvel échec vient d'être enregistré. Il faut relever que ce programme, qui peut être considéré comme le plus important programme de construction navale jamais mené en Europe, doit occuper les anciens arsenaux de la société DCN pendant une douzaine d'années et qu'il a déjà contracté plus de deux années de retard.

Echéancier commandes-Livraisons

Années

Avant 2003

2003

2004

2005

2006

Après 2006

Cible totale

Commande

-

-

-

8

-

9

17

Livraison

-

-

-

-

-

17

17

Source : ministère de la défense.

Autorisations d'engagement et crédits de paiement année 2006

(en millions d'euros courants)

2006

Autorisations d'engagement

FREMM

23,33

Crédits de paiement

FREMM

199,32

Source : ministère de la défense

D'après le ministère de la défense, le cas échéant, les crédits supplémentaires nécessaires aux besoins à couvrir en gestion 2006 seront ouverts en sus des crédits de la LPM. En outre, les montants d'AE pour 2006 ne tiennent pas compte des reports d'autorisations d'engagement pour 2005 qui interviendront en début de gestion 2006.

F. UN PROGRAMME EN COOPÉRATION : LE DEUXIÈME PORTE-AVIONS

Le deuxième porte-avions a pour mission de garantir à la France la disponibilité permanente de son groupe aéronaval, ceci à l'horizon de la seconde interruption programmée pour entretien et réparation (IPER) du porte-avions Charles de Gaulle, soit mi-2014. Ses missions sont destinées à couvrir, dans le cadre plus général de l'action contre la terre depuis la mer, la mise en œuvre de la composante nucléaire embarquée, la projection de puissance et la maîtrise des espaces aéromaritimes.

En France, la maîtrise d'œuvre industrielle est assurée par DCN-Thales. Le choix de la propulsion classique (à la différence du Charles de Gaulle) a permis à la France d'engager une coopération avec le Royaume-Uni.

A la suite de la déclaration commune des ministres de la Défense français et britannique à Portsmouth le 9 juin 2004, les études de coopération se sont orientées vers la recherche d'un périmètre de systèmes, sous-systèmes et installations qui pourraient être communs aux deux projets. Au mois de juin dernier, le résultat des études de cette approche, dite « bottom-up », a mis en évidence des possibilités de coopération dans les domaines suivants :

- propulsion, réseaux de plate-forme, systèmes fluides ;

- conduite du navire, installations de manœuvre ;

- communications internes, certains systèmes de veille et de navigation.

Lors du sommet franco-britannique du 24 novembre 2004, le président de la République a souhaité élargir les travaux de coopération et a demandé que soient étudiées de façon plus globale les possibilités d'adaptation du projet britannique commande de vol du futur (CVF) afin qu'il réponde aux besoins français.

Des études complémentaires ont ainsi été conduites sur proposition de l'industrie française, afin d'étudier l'adaptation du CVF et de définir des bâtiments aussi communs que possible. Les résultats de ces études ont été rendus le 23 juin 2005. Il en ressort qu'un design commun à 80/90 % est envisageable avec cependant des points qui demandent à être approfondis.

La poursuite du processus de coopération sur la base d'un CVF adapté doit éclaircir les points techniques identifiés, élaborer un montage industriel et un mode de passation des contrats adéquat, consolider les aspects financiers et proposer un calendrier intégré des deux projets.

Cependant, le Royaume-Uni a, pour la troisième fois, repoussé de six mois son maingate alors même que le Gouvernement français fixait son budget pour 2006. Dans ces conditions, les études commenceront, au mieux, en septembre 2006.

Le coût total du programme, quelle que soit l'option retenue, est évalué à 2,6 milliards d'euros. La dotation pour ce programme, dans le projet de loi de finances pour 2006 est que 925,72 millions d'euros en autorisations d'engagement et 52,63 millions d'euros en crédits de paiement. On ne saurait voir là la volonté clairement affichée de doter la France d'un bâtiment dont dépend pourtant son indépendance dans le domaine de la dissuasion, de la projection de puissance et de la maîtrise des espaces aéromaritimes.

IV. - LES ORGANISMES EUROPEENS ET DE COOPERATION

A. L'AGENCE EUROPÉENNE DE DÉFENSE (AED)

L'agence s'inscrit dans le cadre institutionnel unique de l'Union européenne, afin de préserver la capacité de celle-ci de mettre en œuvre une politique étrangère et de sécurité commune (PESC) cohérente, en particulier dans le domaine de la sécurité et de la défense. Ainsi l'agence, qui rassemble 24 Etats membres de l'Union européenne (le Danemark n'y participant pas), est placée sous l'autorité du Conseil, et à ce titre, de celle du secrétaire général, haut représentant pour la PESC. Au sein du Conseil, les ministres de la défense assurent l'orientation et le contrôle des travaux de l'Agence.

L'AED a atteint en juin dernier l'effectif prévu pour l'année 2005 (environ 80 personnes). Il lui faut notamment reprendre la gestion des contrats actuellement gérés par la cellule recherche de l'organisation armement de l'Europe occidentale (OAEO) superviser le code de conduite  « acquisition ».

L'agence a pour objet de développer les capacités européennes de défense en vue de la réalisation des missions de Petersberg et de « l'Objectif global 2010 ». A cette fin, elle s'est dotée de quatre branches de compétences :

la branche capacités dont le rôle est de développer les capacités militaires européennes en liaison avec la Headline Task Force (HTF), l'état-major de l'UE (EMUE), le comité militaire de l'UE (CMUE).

la branche Recherche et Technologie (R&T) dont la mission principale est d'agir comme « catalyseur » afin de renforcer l'efficacité de la R&T de défense européenne et de gérer les contrats de recherche de défense en coopération.

la branche armement qui a pour vocation de promouvoir les acquisitions d'équipements de défense en coopération, en s'appuyant autant que possible sur l'OCCAR qui conservera son rôle de développement des programmes en coopération.

la branche marchés et base industrielle et technologique de défense (BITD) qui œuvre à la création d'un marché européen des équipements de défense compétitif et à la mise en œuvre des politiques visant au renforcement de la BITD.

L'agence est dotée d'un organe exécutif, le comité directeur. Celui-ci, qui se réunit sous la présidence de son secrétaire général et du directeur de l'OCCAR, est composé des ministres de la défense représentant chaque Etat membre. Le comité directeur prend la plupart des décisions importantes selon les lignes directrices données par le Conseil de l'Union européenne. Par ailleurs, dans un souci d'efficacité, différentes formations non ministérielles du comité directeur sont constituées afin que les représentants des Etats membres disposent à la fois de l'expertise et de l'autorité nationale sur les sujets traités.

Le budget général de l'agence s'élève, en 2005, à 19,910 millions d'euros Le budget prévisionnel 2006 est estimé à 23 millions d'euros.

Le transfert vers l'agence des projets R&T issus du groupe armement de l'Europe occidentale (GAEO) est en cours. S'agissant d'autres programmes, le projet EUROMALE a été identifié par la France comme un programme potentiel à confier à l'agence qui a, par ailleurs, dans ses priorités la constitution d'une capacité européenne dans le domaine du C4ISR (command, control, communicate and compute intelligence surveillance and reconnaissance). Ce projet est toujours en phase de construction sur le plan industriel et international et pourrait être complété, à terme, par des programmes spatiaux, en particulier dans le cadre du remplacement des satellites d'observation de la terre (HELIOS, HELIOS II, SAR Lupe, Cosmo Skymed). La France a, d'ores et déjà, pris l'initiative d'une démarche auprès de ses partenaires européens pour promouvoir cette idée. Les discussions sur le choix d'autres projets à prendre en compte par l'agence se poursuivent.

B. L'ORGANISATION CONJOINTE DE COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ARMEMENT (OCCAR)

L'OCCAR, organisation multinationale destinée à gérer des programmes d'armement, a été créée par la convention de Farnborough, à valeur de traité international, ratifiée en 2001 après avoir été signée en 1998 par les quatre Etats fondateurs : France, Allemagne, Italie et Royaume-Uni, rejoints par la Belgique en 2003 puis par l'Espagne en janvier 2005.

La mission de l'OCCAR est de faciliter et de gérer en coopération des programmes d'armement et des programmes de démonstrateurs technologiques, à la satisfaction de ses « clients », c'est-à-dire des Etats membres de l'organisation ou participant à ses programmes. Son ambition est de devenir, d'ici deux à trois ans, un centre d'excellence en Europe dans le domaine de l'acquisition d'équipements de défense.

L'OCCAR applique les cinq principes dits de Baden-Baden (7) aux programmes qu'elle gère, même si elle ne peut agir qu'indirectement en matière d'harmonisation des besoins, contrairement à d'autres organisations ou initiatives telles que l'Agence européenne de défense (AED) ou la « démarche capacitaire »  (European capabilities action plan - ECAP). Toutefois, les principes de compétition et d'équilibre sont les principales caractéristiques qui font de l'OCCAR une organisation unique en son genre, susceptible d'obtenir pour ses programmes un rapport coûts/performance optimal.

L'OCCAR s'est constamment développée depuis sa création. Elle est maintenant une organisation bien établie, employant environ 200 personnes qui travaillent à Bonn, Paris et Toulouse. Elle gère six programmes, avec un budget d'environ 1,5 milliard d'euros qui atteindra quelque 2 milliards en 2006. Si l'on ajoute les personnels divers employés par les Etats, ce sont environ 600 personnes qui travaillent pour l'organisation, et l'on estime qu'une dizaine de milliers de salariés de l'industrie travaillent en relation avec les programmes gérés par elle.

L'OCCAR gère les programmes qui lui sont confiés par le program board, où sont représentés les Etats participants - le plus souvent les directeurs nationaux de l'armement ou des délégués ministériels. Le program board définit les objectifs de haut niveau (HLO) de chaque programme, notamment en termes de coût d'acquisition, de coût global de possession, de date d'entrée en service du système. Il définit en outre la taille et l'organisation de la division de programme de l'OCCAR qui gérera le programme considéré, ainsi que les arrangements financiers et de sécurité. En d'autres termes, la décision du programme board constitue le « contrat » passé entre l'OCCAR et les pays clients, devant lesquels le directeur de l'organisation répond de la livraison du produit.

Les programmes suivis par l'OCCAR sont les suivants :

- le radar de contre-batterie COBRA ;

- l'hélicoptère de combat Tigre ;

- la FSAF (famille des systèmes surface-air futurs) ;

- le véhicule blindé multi-rôles Boxer ;

- le ROLAND, système d'armes sol-air ;

- l'avion de transport militaire A 400.

Pour ce qui concerne les relations entre l'OCCAR et l'AED ainsi que la répartition de leurs missions, la première n'intervient qu'au moment où un projet peut faire l'objet d'un contrat. Par exemple, si plusieurs Etats souhaitent se doter d'un nouvel équipement, aux spécifications communes, ils peuvent confier à ce titre un budget à l'AED, laquelle intervient en amont, dès la phase de conception, jusqu'au moment où un contrat est attribué à l'industriel. L'OCCAR peut alors prendre la relève, en passant ce contrat et en contrôlant l'industriel pendant la réalisation de l'équipement.

Toutefois, nombre de détails relatifs à la répartition précise des tâches entre l'AED et l'OCCAR restent à fixer. Dix-sept années se sont écoulées entre le lancement des réflexions sur un avion de transport européen et la conclusion du contrat de l'A 400 M par l'OCCAR. On peut espérer que l'intervention de l'AED permettra de réduire considérablement de tels délais, en les ramenant à trois ou quatre années, par exemple. Cette évolution exige une démarche volontariste des Etats membres.

Par ailleurs, la fusion de l'OCCAR au sein de l'AED demeure, à terme, souhaitable. En effet, l'histoire du programme Tigre montre que l'OCCAR n'a de pouvoir que contractuel, rôle dont elle s'acquitte fort bien par ailleurs. Cependant, s'agissant d'une coopération entre plusieurs pays, n'aurait-il pas été préférable que l'organisation puisse prendre des décisions ? Il est vrai que sa structure permet à l'OCCAR de suivre des projets auxquels peuvent participer des Etats non membres de l'UE (cas de la Turquie pour l'A 400 M). Ne serait-il pas plus simple de fusionner l'AED et l'OCCAR, quitte à faire évoluer les statuts de façon à permettre la coopération avec des Etats non-membres de l'Union européenne ?

Enfin, les avatars du programme NH 90 démontrent, à l'envi, la nécessité de développer les coopérations au sein de structures européennes. En effet, la gestion du contrat de développement et des contrats d'industrialisation et de production, passée au maître d'œuvre industriel NH Industrie, a été confiée à une agence ad hoc, à statut OTAN : la NAHEMA, créée en 1992. Celle-ci n'a pas manqué de faire preuve de lourdeur dans sa gestion. La question du déplacement de ce programme vers l'OCCAR demeure posée.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. -  AUDITION DE M. FRANÇOIS LUREAU, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL POUR L'ARMEMENT

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu M. François Lureau, délégué général pour l'armement, sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540) au cours de sa réunion du 25 octobre 2005.

M. François Lureau a indiqué que la nouvelle organisation de la DGA autour de deux pôles, l'un chargé de la conduite des programmes, l'autre chargé de la préparation du futur, était en parfaite cohérence avec les principes de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ainsi qu'avec l'existence des programmes 144 et 146.

En ce qui concerne l'année 2005, l'exécution se déroule de façon conforme aux prévisions. Les engagements sont prévus à hauteur de 10,4 milliards d'euros, dont 600 millions d'euros pour les études amont et 9,8 milliards d'euros pour l'équipement des forces. Sur ce dernier montant, 4,6 milliards d'euros sont engagés au titre de la commande des FREMM. Les ressources en crédits de paiement pouvant être effectivement consommées en 2005 s'élèvent à 8,3 milliards d'euros. A la fin de l'exercice, un report de charges pour les crédits du titre V, s'élevant à environ deux milliards d'euros pour l'ensemble du ministère de la défense et compensé pour un montant presque équivalent par un report de crédits est attendu. La part revenant à la DGA représente environ les deux tiers de ces montants. Globalement les objectifs sont atteints et l'avancement des programmes est conforme aux prévisions de la LPM. Toutefois, les reports de charges ont pour effet direct d'augmenter les intérêts moratoires. Ceux-ci ont atteint 16,6 millions d'euros en 2004 et s'élèvent déjà cette année à 14,7 millions d'euros, ce qui laisse prévoir un dépassement des niveaux atteints en 2004. En 2006, leur montant sera sans doute au moins équivalent à celui constaté en 2005, cette situation est à l'évidence insatisfaisante et la DGA essaie de limiter au maximum l'effet des retards de paiements. De ce point de vue, elle est très attentive à la situation des PME-PMI : elle a mis en place en 2005 un dispositif qui leur est spécialement destiné et suit étroitement leurs facturations, compte tenu de la moindre résistance de leur trésorerie par rapport à celle des grandes entreprises.

La DGA poursuit ses efforts en matière de fonctionnement ; son coût d'intervention a encore diminué en 2005 et s'élève à environ 900 millions d'euros. Au cours des six dernières années, il a ainsi été réduit de 30 %, à périmètre et missions équivalents. Les effectifs ont diminué de 1,7 %, mais la DGA continue à renforcer sa compétence technique en effectuant des recrutements correspondant aux besoins.

Les événements marquants de l'exercice 2005 sont notamment constitués par le lancement du satellite Syracuse III-A, intervenu en octobre après avoir été différé en raison des problèmes rencontrés par le lanceur. Si le programme Tigre connaît quelques difficultés, les programmes Rafale, VBCI et Leclerc se déroulent de façon satisfaisante. De manière générale, les principales difficultés rencontrées sont liées à la qualité des matériels présentés par l'industrie et la DGA met l'accent sur la correction des défauts constatés avant leur livraison effective. Un effort important de préparation de l'avenir a également été consenti en 2005 avec l'augmentation de plus de 15 % des études amont contractualisées avec l'industrie. Deux contrats importants devraient être signés d'ici à la fin de l'année et portent sur les démonstrateurs de drone Neuron et de la bulle opérationnelle aéroterrestre (BOA). Par ailleurs, la DGA suit avec attention l'évolution des restructurations de Giat Industries ainsi que le rapprochement entre Thales et DCN. En ce qui concerne les exportations, le niveau des commandes constatées en 2005 est supérieur à celui de 2004, mais il reste insuffisant et nécessite des efforts de la part de l'ensemble des acteurs concernés ; un plan d'action est en cours sur ce sujet.

Le projet de loi de finances pour 2006 respecte la loi de programmation militaire 2003-2008. Les modalités de co-pilotage du programme 146 sont désormais en place et, dès la fin 2005, la première réunion du comité de pilotage pourra avoir lieu en s'appuyant sur les objectifs précis assignés aux budgets opérationnels de programmes. La DGA suivra avec attention l'évolution des indicateurs de performance, dont certains n'ont pas été faciles à définir et pourront, en tout état de cause, évoluer par la suite, conformément aux souhaits formés par le Parlement.

Les principales échéances des programmes d'armement pour 2006 concernent le premier essai en vol d'un missile M 51, le lancement du satellite Syracuse III-B en juin et la mise en service opérationnel du premier escadron du Rafale à Saint-Dizier. Il reste à négocier avec DCN le contrat de développement pour les sous-marins Barracuda, notamment en ce qui concerne le prix, ainsi que le développement du deuxième porte-avions, en fonction du degré de coopération possible avec les Britanniques. Pour la préparation de l'avenir, on peut noter le lancement du démonstrateur EUROMALE, les technologies futures pour hélicoptères (Hector), les opérations réseau-centrées, le démonstrateur de partie haute de missiles stratégiques et les missiles de combat terrestre.

A plus long terme, il faut relever les jalons que constitueront, pour la dissuasion, la mise en service de l'ASMP-A en 2008 et celle du M 51 en 2010. S'agissant du Rafale, il faudra envisager la commande complétant les 120 exemplaires déjà commandés. En matière de projection mobilité et soutien, la livraison du premier A 400 M devrait intervenir en 2009.

Le président Guy Teissier a souhaité savoir de quels moyens disposait le délégué général pour l'armement pour co-piloter, aux côtés du chef d'état-major des armées, le budget considérable du programme « Equipement des forces », de plus de dix milliards d'euros. Par ailleurs, lors de la dernière réunion de la mission d'information portant sur l'exécution des crédits de la défense, il a été indiqué que la consommation des crédits de paiement de titre V atteindrait 15,5 milliards d'euros, alors que le délégué général pour l'armement a évoqué le chiffre de 8,4 milliards d'euros. Quelles sont les raisons de l'écart ainsi constaté, outre la prise en compte ou non des crédits d'infrastructures ?

M. François Lureau a indiqué que le co-pilotage du programme 146 fonctionnera selon des règles simples ; l'évolution intervenue simplifie davantage l'organisation qu'elle ne la complique, puisque le nombre d'interlocuteurs passe de cinq à deux. Plusieurs mesures ont été prises afin de préparer sa mise en œuvre. La DGA a adapté sa propre organisation, dans la perspective de la nouvelle nomenclature, et a proposé des articulations cohérentes entre les budgets opérationnels de programme (BOP) et le programme lui-même. Une charte portant sur le fonctionnement du programme 146 a récemment été cosignée par le délégué général pour l'armement et le chef d'état-major des armées. Des officiers de cohérence de programme ont été mis en place à l'état-major des armées et ont pour mission de travailler avec les responsables de BOP mis en place à la DGA. Enfin, les objectifs du programme 146 sont ajustés de façon coordonnée ; un premier comité directeur se tiendra d'ici la fin de l'année afin d'entériner les objectifs pour 2006.

Le chef d'état-major des armées et le délégué général pour l'armement se réuniront trimestriellement, afin d'examiner les programmes d'armement ainsi que les indicateurs. S'agissant des difficultés susceptibles de survenir, c'est au délégué qu'il appartiendra de traiter les problèmes relevant de la gestion, tandis que le chef d'état-major des armées répondra des décisions relatives aux capacités opérationnelles.

Pour ce qui concerne la consommation des crédits d'équipement, la différence constatée s'explique pour l'essentiel par la prise en compte des crédits de maintien en condition opérationnelle.

M. Jean-Michel Boucheron a demandé si la constitution d'un « Schengen de l'armement », évoquée dernièrement par le délégué, avait connu des évolutions. Il a ensuite souhaité savoir selon quelles modalités la notion d'intelligence économique était prise en compte au sein de la DGA, et s'est demandé si certaines lacunes en ce domaine pouvaient expliquer l'échec de l'avion Rafale sur le marché singapourien.

M. François Lureau a répondu, qu'en septembre dernier, il avait souhaité qu'avec ses collègues directeurs d'armement des cinq autres pays signataires de la LoI (letter of intent), soit le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et la Suède, une réflexion s'engage sur le concept de « Schengen de l'armement ». Ses homologues ont manifesté un vif intérêt pour cette idée, dont l'objectif principal est d'obtenir la plus grande fluidité possible sur les marchés de défense, afin de ne pas gêner les programmes menés en coopération ou les entreprises implantées dans plusieurs pays. Un groupe de travail s'est vu confier le soin de proposer des mesures, lesquelles seront présentées aux ministres de la défense des différents pays au mois de novembre. On constate donc pour ce sujet une évolution certaine. En tout état de cause, il est plus réaliste d'engager d'abord cette démarche entre les six pays de la LoI, qui sont les principaux producteurs d'armement européens et représentent 90 % des investissements en matière de défense de l'Union, plutôt qu'avec les vingt-cinq Etats membres de l'Union.

Dans le cadre de la réorganisation de la DGA, une équipe spécifique s'occupant des questions d'intelligence économique a été constituée, sa principale tâche est de surveiller le tissu de PME et PMI et de prendre des mesures lorsque la situation l'impose. Pour le contrat à l'exportation singapourien, les acteurs politiques et économiques français ont fait tout leur possible, se montrant d'ailleurs inventifs et réactifs, notamment lorsqu'a été proposée à Singapour une combinaison d'offres américaine et israélienne. Plusieurs facteurs sont à l'origine de l'échec essuyé par le Rafale : le taux de change entre euro et dollar, défavorable à l'offre française ; les propositions innovantes que l'industrie israélienne est en mesure de présenter, qui ont été vraisemblablement sous-estimées. De fait, Israël constitue un concurrent très sérieux à l'exportation. Enfin, la priorité accordée par les Etats-Unis au soutien de leur industrie aéronautique, qu'ils considèrent stratégique, a également pesé sur l'issue de la compétition. Au demeurant, la France n'a pas connu de défaillance en matière d'intelligence économique sur ce contrat.

M. Jérôme Rivière a souhaité obtenir des précisions sur la rénovation des hélicoptères Puma et Cougar. La loi de finances initiale pour 2005 avait inscrit 350 millions d'euros en crédits de paiement à cet effet, pour 45 Puma et 24 Cougar. Cette opération de rénovation avait alors été présentée comme indispensable pour préserver les capacités opérationnelles de l'armée de terre. Or, cette année, elle a été abandonnée, Eurocopter ayant cependant fait une offre de 200 millions d'euros pour procéder à une rénovation simplifiée des deux types d'appareils. Quelles sont les raisons qui ont motivé la décision du ministère de la défense ? A quelles fins les 350 millions d'euros inscrits en loi de finances pour 2005 ont-ils été utilisés ?

Il a ensuite souhaité avoir des informations sur l'audit commandé par la DGA sur l'entreprise Eurocopter, suite aux glissements successifs des programmes Tigre et NH 90. Le troisième exemplaire Tigre a été réceptionné la semaine dernière, mais le programme connaît des retards importants, de même que le NH 90, notamment dans sa version marine. L'agence otanienne NAHEMA, à qui a été confiée la gestion du programme, est-elle adaptée pour cette mission ? Ne pourrait-on pas envisager de faire basculer la gestion du NH 90 vers l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) ?

Enfin, l'échec du Rafale à Singapour concerne le standard post-F3 de l'appareil, alors qu'il était prévu que l'industriel abandonne la production de huit avions, en contrepartie du développement du radar à antenne active, et qu'il devait pour ce faire s'appuyer sur le contrat singapourien. L'issue de ce dernier laisse-t-il des perspectives au développement du standard post-F3 ?

M. François Lureau a précisé que les crédits prévus en loi de finances initiale pour 2005 destinés à la rénovation des hélicoptères Cougar et Puma devraient, au départ, financer leur mise aux normes civiles de circulation aérienne, avec, il est vrai, quelques ajustements en termes d'équipement. Compte tenu de besoins impératifs, notamment en matière de maintien en condition opérationnelle des matériels, le chef d'état-major des armées a décidé de donner la priorité aux seuls Cougar, appareils les plus récents. Les économies ainsi réalisées sur les anciens Puma ont permis de financer l'entretien d'autres matériels. Ce choix n'affectera pas les capacités opérationnelles de l'armée de terre.

Pour ce qui concerne la conduite des programmes Tigre et NH 90, la DGA a constaté des problèmes de qualité incombant aux industriels. Un bilan est dressé sur cette question tous les trois mois et il donne lieu, le cas échéant, à des rappels à l'ordre par courrier. Depuis quelques mois, Eurocopter a pris des initiatives pour redresser la situation, ce qui apparaît assez nettement sur les livraisons de Tigre, dont l'objectif 2005, sans être atteint, sera approché. S'agissant du NH 90, un audit a mis en lumière des défaillances de maîtrise d'œuvre imputables à Eurocopter, là aussi en voie de solution, ainsi que des difficultés relationnelles entre partenaires industriels, notamment entre Eurocopter et Agusta Westland. La NAHEMA pourrait également avoir une part de responsabilité, ce qui soulève la question, sous réserve d'un accord général des pays concernés, d'un éventuel transfert de la responsabilité du programme à l'OCCAR, qui a fait la preuve de son efficacité.

Enfin, le programme Rafale devait effectivement faire l'objet de modifications, consistant à abandonner l'acquisition de 8 exemplaires en contrepartie de développements électroniques, dont une antenne radar active, destinés à équiper les versions après l'entrée en service du standard F 3. L'échec de la vente du Rafale à Singapour n'a pas remis en cause cette option, dont l'intérêt pour les armées est avéré. Les développements électroniques pour le Rafale, après l'entrée en service du standard F 3, seront bien présents. Une négociation devra, le moment venu, s'engager avec les industriels à ce sujet.

M. Charles Cova a souhaité avoir des précisions sur le calendrier retenu par les Britanniques au sujet de leur programme de porte-avions pour décider d'une éventuelle coopération avec la France. Il a également demandé quel était l'état d'avancement des négociations entre les ministères de la défense des deux pays. Il s'est enfin enquis de l'imminence de la signature du contrat des frégates européennes multimissions (FREMM), et a interrogé le délégué général sur une éventuelle réflexion de ses services à propos d'un programme de nouveaux avisos.

M. François Lureau a rappelé que la négociation sur le programme FREMM avait été achevée en juin 2005, le contrat étant prêt à la signature dès fin septembre. Le changement du titulaire du portefeuille des finances au sein du gouvernement italien a conduit à un contretemps dans la notification du contrat à l'OCCAR, laquelle était initialement prévue pour le 4 octobre dernier. Les Italiens ont annoncé, depuis, avoir trouvé une solution de financement. La DGA attend de connaître les détails de ce montage afin de s'assurer que la notification pourra bien être faite avant la fin de l'année.

En ce qui concerne le second porte-avions français, la DGA et son homologue britannique se mettent actuellement d'accord pour pouvoir lancer de manière conjointe une phase de définition détaillée en 2006. Il en est attendu, en fin d'exercice, des propositions industrielles intéressantes et génératrices d'économies substantielles. Techniquement, une conception commune devrait permettre de couvrir les besoins de la France et du Royaume-Uni tout en engendrant des économies.

M. Laurent Collet-Billon, adjoint au délégué général pour l'armement, a ajouté que la DGA ne réfléchit pas à un programme de nouveaux avisos, étant entendu que le programme FREMM porte sur l'acquisition de 17 bâtiments destinés à remplacer les frégates de lutte anti-sous-marine ainsi que les avisos actuels de la marine.

Le président Guy Teissier a observé que la direction de DCN lui avait fait part du manque de convergences entre les programmes de porte-avions britannique et français, dont l'un sera équipé de catapultes et de brins d'arrêt alors que les deux autres sont destinés à mettre en œuvre des avions à décollage vertical. Le tonnage envisagé semble également différent. Dans ces conditions, sur quels aspects la DGA et la Defense procurement agency (DPA) peuvent-elles parvenir à une conception commune et, par conséquent, à des économies ?

M. François Lureau a indiqué que seules la DGA et son homologue britannique peuvent se prononcer sur le degré de convergence des besoins de la France et du Royaume-Uni en matière de porte-avions. Ces besoins sont identiques à 90 %. Les industriels, dont DCN n'est qu'un opérateur parmi d'autres, n'ont qu'à se conformer aux souhaits de leurs clients et proposer les solutions techniques et financières les plus attractives.

M. Jérôme Rivière a souligné que la décision portant sur la conception détaillée - maingate pour les Britanniques - du deuxième porte-avions, après avoir été repoussée de septembre 2004 à septembre 2005, était maintenant reportée à septembre 2006 par ces derniers.

M. François Lureau a fait observer que Français et Britanniques ont chacun leurs propres processus de décision. Ces derniers ont récemment décidé de modifier le leur et devraient valider un « pré-maingate » dans les semaines à venir.

M. Jérôme Rivière a fait remarquer qu'il s'agissait encore d'un changement d'avis des Britanniques.

M. Charles Cova a souhaité connaître l'avenir du projet dans l'éventualité où les Britanniques y renonceraient et s'est notamment interrogé sur la poursuite du programme par les seuls Français.

M. François Lureau a confirmé que, le cas échéant, un développement exclusivement français pourrait être poursuivi ; des solutions de secours ont été envisagées.

M.  Jean-Michel Boucheron a demandé une estimation de la valeur vénale de DCN.

M. Lureau n'a pas souhaité donner d'indications même si, comme l'a souligné M. Boucheron, la réponse à cette question est très attendue. Différentes méthodes d'évaluation peuvent être retenues. En outre, les considérations portant sur la trésorerie compliquent le débat.

II. -  EXAMEN DES CREDITS

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jérôme Rivière, les crédits du programme « Equipement des forces » pour 2006, au cours de sa réunion du 26 octobre 2005.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jérôme Rivière, rapporteur pour avis, a présenté un amendement tendant à transférer une somme d'un montant équivalent à la moitié des crédits de paiement dévolus au deuxième porte-avions vers le programme « environnement et prospective de la défense » dont la sous-action « études amont autres » inclut les crédits dévolus à l'EUROMALE, estimant que son adoption serait, pour la commission de la défense, l'occasion de montrer sa volonté de développer l'Europe de l'armement.

M. Charles Cova, tout en reconnaissant la valeur des motivations du rapporteur, a rappelé que la coopération avec le Royaume-Uni n'est jamais aisée, comme l'a montré l'échec d'un travail commun sur la frégate Horizon. L'adoption de l'amendement ne manquerait pas d'avoir un effet négatif, risquant d'être interprétée par nos partenaires britanniques comme un début d'abandon du projet.

Admettant que les arguments du rapporteur étaient fondés, M. René Galy-Dejean s'est prononcé défavorablement à l'adoption de l'amendement après avoir estimé que l'affaire du deuxième porte-avions ne pouvait être traitée par des considérations purement rationnelles.

Après avoir marqué son approbation à la démarche du rapporteur pour avis, le Président Guy Tessier, s'est interrogé sur l'efficacité, au regard de l'avancement du projet EUROMALE, de la mesure proposée par l'amendement. En effet, la société EADS s'est montrée présomptueuse en la matière et les difficultés qu'elle rencontre dans le développement de ce programme relèvent plus de la technologie que des moyens financiers.

Estimant que tous les avis exprimés étaient également sensés, M. Jean-Michel Boucheron a estimé que le débat devait avoir lieu en séance publique afin d'obtenir des éléments de réponse de la ministre de la défense.

Le Président Guy Tessier ayant approuvé cette proposition, M. Jérôme Rivière, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il présenterait son amendement en séance publique. Sur le fond, la mesure proposée présente l'intérêt d'obliger le Gouvernement à dépenser les sommes retirées du programme « équipement des forces » dans le périmètre du programme « environnement et prospective de la politique de défense ».

Le Président Guy Tessier a estimé qu'il y avait là sujet à un débat utile en séance publique, au terme duquel, il conviendrait que le rapporteur retire son amendement.

La commission a rejeté l'amendement.

Elle a ensuite donné un avis favorable au programme « Equipement des forces ».

*

* *

La commission a ensuite examiné, pour avis, les crédits de la mission « Défense ».

M. Jean-Michel Boucheron a déclaré qu'après mûre réflexion, le groupe socialiste voterait contre les crédits de la Mission « Défense », non pour s'opposer aux intentions affichées mais parce que les crédits proposés relèvent d'un exercice virtuel, voire de l'équilibrisme.

M. Michel Voisin s'est étonné de cette prise de position, eu égard à l'effort remarquable consenti depuis quatre ans, tranchant avec une période marquée par les effets de la croyance aux « dividendes de la paix », et qui a permis de faire passer de 1,79 % à 2,17 % du PIB les crédits consacrés à la défense. Ce résultat a été obtenu de haute lutte par la ministre de la défense face au ministère des finances et justifie le vote du groupe UMP en faveur du budget de la Mission « Défense ».

Le président Guy Teissier a souligné que le Président de la République, chef des armées, avait joué un rôle décisif et constant dans les arbitrages budgétaires concernant la défense.

La commission de la défense a alors donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

--____--

------------

N° 2572-08 - Avis présenté au nom de la commission de la défense sur le projet de loi de finances pour 2006 (n° 2540), tome VIII : Défense, équipement des forces (M. Jérôme Rivière)

graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique
graphique

1 () UAV : unmanned air vehicule.

2 () SIDM : système intermédiaire de drones MALE.

3 () MALE :Moyenne Altitude Longue Endurance.

4 () L'expérimentation du Hunter a permis de confirmer l'intérêt des UAV endurants au profit des opérations militaires. Toutefois, conçu pour répondre au besoin de l'US Army, ce système ne satisfait pas le besoin de l'armée de l'air car son domaine d'action n'est pas en cohérence avec celui des aéronefs de combat.

5 () IAI : Israel Aircraft Industries.

6 () ECAP : European Capability Action Plan. Démarche née après le sommet européen d'Helsinki qui vise à donner à l'Europe les moyens de mener des opérations militaires de maintien et de restauration de la paix, dites « missions de Petersberg ».

7 () L'efficacité économique, l'harmonisation, la base industrielle compétitive, la renonciation au juste retour, l'ouverture de l'OCCAR aux autres pays.


- Cliquer ici pour retourner au sommaire général

- Cliquer ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires



© Assemblée nationale