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CHAPITRE V : LA POLICE JUDICIAIRE, CHAMP PRIVILÉGIÉ DE LA COOPÉRATION ENTRE SERVICES

Dans le domaine de la police judiciaire plus peut-être que dans d'autres, une étroite coopération entre services de police et forces de gendarmerie prend tout son sens. Cela vaut autant pour les moyens humains mis en œuvre et leur indispensable coopération dans la recherche et la constatation des infractions que pour la mutualisation de fichiers ou des outils sans cesse plus étoffés de la police technique et scientifique.

En lien avec cette activité, il faut souligner le poids que représente le concours à la justice, volontiers qualifié, de façon peu amène, de « charge indue ». D'importants effectifs de policiers et de gendarmes sont ainsi mobilisés au détriment d'une action plus efficace contre la délinquance.

I.- LA MISE EN COMMUN DE MOYENS ET DE COMPÉTENCES EN POLICE JUDICIAIRE, FERMENT DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT

1.- Une évidence formalisée dans la LOPSI

La mise en commun de moyens entre la police et la gendarmerie nationale s'analyse, dans le domaine de la documentation criminelle, en termes de recherche de convergences. Cette orientation figure parmi les objectifs fixés par la LOPSI, et entre dans le cadre des mesures visant à renforcer l'efficacité des enquêtes en matière de police technique et scientifique.

Outre la coopération s'exerçant déjà dans le cadre des offices centraux de police judiciaire, les travaux relatifs à la convergence ont été pilotés par des groupes de travail police-gendarmerie réunis à plusieurs reprises au cours de 2003 et 2004. Ces travaux ont permis d'aboutir à un certain nombre de réalisations, dans le domaine des accès partagés aux fichiers de police judiciaire notamment.

De nombreux autres travaux menés en commun témoignent du rapprochement entre police et gendarmerie, qui justifie chaque jour davantage l'existence d'une mission interministérielle. Citons, par exemple, le site Internet de recherches criminelles de la police nationale lié depuis juin 2003 au site de police judiciaire de la gendarmerie nationale, le répertoire automatisé pour l'analyse des contrefaçons de l'euro, l'unité nationale d'identification de victimes de catastrophes, mais aussi des séminaires de formation communs.

2.- Une application démultipliée : les groupes d'intervention régionaux (GIR)

Les GIR ont été mis en place au sein de chaque région administrative ainsi que dans les départements et autres collectivités d'outre-mer pour lutter contre l'économie souterraine et les différentes formes de délinquance organisée qui l'accompagnent, en application de la circulaire interministérielle du 22 mai 2002. En métropole, il existe 29 groupes dont 21 ont une compétence calquée sur le ressort d'une région administrative et 8 sont attachés à la région Ile-de-France avec une compétence départementale. N'étant pas considérés comme des services nouveaux, ces groupes ont été rattachés, pour 19 d'entre eux, à une direction régionale ou interrégionale de la police judiciaire, et pour les 10 autres à une section de recherches de la gendarmerie.

Les structures permanentes comprennent de 6 à 12 personnes et le volume global des « personnes-ressources » de chaque groupe varie entre 30 et 100 personnes. 288 fonctionnaires et militaires travaillent actuellement dans les unités d'organisation et de commandement. Les « personnes-ressources » sont des policiers, des gendarmes, des douaniers, des fonctionnaires des services fiscaux, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ainsi que de la direction du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, au nombre de 1.398 au total.

En termes d'équipement matériel, la réciprocité des charges entre la police et la gendarmerie a été parfaite tant pour les véhicules que pour la bureautique.
Tous les engagements ont été remplis ou sont en voie de finalisation. La logique d'efficacité a également conduit à mettre en place une mixité des moyens radio et informatiques. Pour la radio, chacun des véhicules livrés aux GIR bénéficie d'un double équipement discret composé d'un poste mobile numérique ACROPOL et d'un poste mobile analogique 85 MHz ou est équipé en terminaux RUBIS, avec un jeu d'émetteurs-récepteurs portables et des valises de « rebouclage » permettant le passage d'un système de transmission à un autre.

S'agissant des GIR qui relèvent de la police, en moyens budgétaires, le coût global de fonctionnement des groupes s'est élevé à 1,39 million d'euros en 2002, pour six mois à peine. En 2003, le budget de fonctionnement des GIR a été consolidé à hauteur de 663.000 euros, et intégré dans le budget global des services ou directions de police judiciaire du ressort où ils sont installés. Cette consolidation a été pérennisée pour 2004.

À la création des GIR rattachés à la gendarmerie, les services territoriaux de la police judiciaire ont reçu une dotation budgétaire de 43.000 euros, couvrant les frais de mission des fonctionnaires de police, l'entretien des véhicules et le carburant, dotation consolidée en 2003 à hauteur de 75.500 euros et pérennisée en 2004. Les frais des personnels et des véhicules de la police nationale affectés à un groupe de la gendarmerie sont couverts par la dotation prévue et rattachée au SRPJ territorialement compétent. Ce qui représente, pour la gendarmerie, un total de dépenses annuelles en faveur des GIR stable à 475.000 euros.

Depuis l'année 2003, les entretiens de gestion menés avec les différents services ont abouti à une consolidation du budget attribué à chaque GIR, qu'il relève de la police ou de la gendarmerie, au sein du budget globalisé du service territorial de la police judiciaire dont relève hiérarchiquement (pour la police) ou géographiquement (pour la gendarmerie) chaque groupe. La direction des douanes et celle des services fiscaux prennent en charge leurs fonctionnaires.

Votre Rapporteur spécial se félicite de la consolidation de ces structures permanentes pluridisciplinaires et interministérielles auxquelles il avait consacré un rapport d'information (14) qui démontrait toute l'utilité d'une coopération établie à l'échelle pertinente pour lutter contre l'économie souterraine.

II.- UNE ORGANISATION DIFFÉRENTE POUR DES FINALITÉS COMMUNES

A.- LES MOYENS DE LA POLICE MARQUÉS PAR L'EXTENSION APPLAUDIE DE LA QUALIFICATION D'OPJ

1.- 3.000 OPJ supplémentaires en 2006

Dans son volet statutaire, la réforme des corps et carrières de la police nationale comporte un important développement de la qualification d'OPJ qui doit tout à la fois permettre une revalorisation du métier de gardien de la paix et une amélioration du service rendu à la population.

Le tableau suivant retrace l'évolution des effectifs des OPJ depuis 1999 :

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DES PERSONNELS OPJ ENTRE 1999 ET 2005

AU PREMIER JANVIER DE CHAQUE ANNÉE

Corps (1)

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Évolution

C&D

2.022

1.980

1.981

1.955

1.955

1.898

1.798

- 224

- 11,1 %

C&E

16.302

15.840

15.457

14.951

14.496

14.184

14.015

- 2.287

- 14 %

M&A

549

1.475

2.868

4.343

5.911

7.800 (a)

+ 7.800

Total (b)

18.324

18.369

18.913

19.774

20.794

21.993

23.613

+ 5.289

+ 28,9 %

(1) Conception et direction, commandement et encadrement, maîtrise et application.

(a) : Soit 469 brigadiers-majors, 3.346 brigadiers-chefs, 2.358 brigadiers et 1.627 gardiens de la paix

(b) : Il s'agit de l'effectif possédant la « qualité d'OPJ » et non pas de l'effectif habilité

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Sur le graphique suivant, on observe la nette inflexion qui se produit en faveur des gradés et gardiens de la paix :

ÉVOLUTION DES OPJ ENTRE 1995 ET 2005

graphique

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

En 2006 sont prévues 3.000 habilitations d'OPJ supplémentaires.

Cette mesure a une incidence budgétaire, car le décret n° 99-708 du 3 août 1999 permet d'attribuer une prime aux fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale exerçant les attributions d'OPJ, l'arrêté d'application du 27 février 2003 disposant que la prime est forfaitaire et qu'elle est attribuée trimestriellement, pour un montant annuel de 600 euros. Cette dépense a évolué de la manière suivante :

COÛT ANNUEL DE LA PRIME D'OPJ

(en millions d'euros)

Année

Consommation

2004

3,344

2003

2,261

2002

1,080

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Ainsi, en 2006, l'extension supplémentaire de la qualification d'OPJ représentera un coût de 1,8 million d'euros.

2.- Le renforcement de la DCPJ et des offices centraux

Les effectifs des offices centraux de la direction centrale de la police judiciaire ont augmenté de 88 fonctionnaires depuis le 1er janvier 2002, dont 62 renforts pour la sous-direction des affaires criminelles et 26 personnes pour la sous-direction des affaires économiques et financières. L'évolution des effectifs totaux est retracée dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA DCPJ DEPUIS 2002

01/01/2002

01/01/2003

01/01/2004

01/01/2005

Total DCPJ

983

1.047

1.088

1.123

Total services territoriaux

3.042

3.178

3.383

3.448

Total laboratoires de la P.J.

268

273

288

327

Total général

4.293

4.498

4.759

4.898

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Rappelons que les structures de la direction centrale ont été récemment redéfinies par l'arrêté du 13 mai 2005 relatif aux missions et à l'organisation en sous-directions de la DCPJ et portant création de services à compétence nationale. Au directeur central sont rattachés des services ayant pour mission des tâches d'état-major, de relations internationales (Interpol - Europol - Schengen), ou de liaison avec la gendarmerie nationale, et chaque sous-direction comprend une division de la logistique opérationnelle chargée de la gestion transversale de la sous-direction.

La sous-direction des liaisons extérieures a également été restructurée en sous-direction des ressources et des études, incluant la division des ressources et des moyens, anciennement rattachée au directeur central sous le nom de division du personnel et des moyens. Enfin, la division des études, des liaisons et de la formation se substitue au centre national de recherche, de documentation et de formation, mis en place en 1996 lors de la délocalisation de la sous-direction de la police technique et scientifique à Ecully. Cette mutation s'inscrit dans le cadre de la restructuration de la sous-direction de la police technique et scientifique suite à la création de l'institut national de police scientifique en novembre 2004 et à la nécessité d'adapter les structures de l'ancien centre national de recherche.

B.- L'AUGMENTATION DES MOYENS DES SECTIONS DE RECHERCHES DE LA GENDARMERIE

1.- Un renforcement en personnel et en matériel, un accès étendu aux fichiers

Les sections de recherches ont vu leurs effectifs passer de 864 à 1.122 personnels entre 2001 et 2004. Ce renforcement sera poursuivi sur les deux dernières années de la LOPSI. En moyens matériels, depuis 2003, les acquisitions de véhicules faites au profit des unités de recherches au titre du renouvellement et du renforcement de leurs capacités se sont déroulées selon le cadencement suivant : 65 véhicules en 2003, 163 en 2004, 51 en 2005 et 113 sont prévus en 2006. Par ailleurs, 45 motocyclettes banalisées et 12 scooters ont été achetés depuis 2003. Pour leur armement, les personnels de ces sections seront prochainement dotés de pistolets automatiques GLOCK 26, en lieu et place de l'actuel PA MAS G1 sécurisé. 800 armes de ce type sont programmées en 2006.

En matière de télécommunications et d'informatique, les sections de recherches et les unités de niveau départemental disposent, depuis deux ans, d'accès aux bases judiciaires centrales par intranet : système de rapprochements judiciaires (JUDEX), fichier national des automobiles, fichier national des permis de conduire, fichier national et Schengen des personnes recherchées, fiches de recherche diffusées en urgence, fichier national et Schengen des véhicules volés, fichier des objets signalés, ainsi que deux applications documentaires d'aide à l'identification des véhicules et des plaques d'immatriculation étrangères.

Depuis le 1er juillet dernier, elles peuvent consulter le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS). En outre, dès décembre 2005, les OPJ des unités départementales auront accès au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) avant une extension à l'ensemble des unités territoriales en 2007.

Le développement des synergies police et gendarmerie s'est, en outre, traduit par la mise à disposition réciproque d'accès aux bases de documentation criminelle (STIC pour la police et Judex pour la gendarmerie). Ainsi, l'architecture CHEOPS (communication haptique et objets physiques simulés) de la police est déployée au service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD) et l'intranet judiciaire de la gendarmerie au service central de documentation criminelle (SCDC) de la sous-direction de la police technique et scientifique d'Écully. Ces accès devraient être étendus à 30 sites pilotes dès le 1er janvier 2006.

2.- La mise en place de nouvelles brigades de recherches et des plates-formes judiciaires des groupements

Au 30 juin 2005, on dénombrait, sur les 402 compagnies de gendarmerie, dont 382 en métropole, 359 compagnies disposant d'une brigade de recherches, dont 10 outre-mer. La montée en puissance du nombre de ces brigades devrait se poursuivre avec la création de 21 d'entre elles d'ici la fin de l'année 2007. À terme, seules 10 compagnies de métropole ne devraient pas disposer de brigade de recherches. Quant aux plates-formes techniques judiciaires de la gendarmerie nationale, leur création a été engagée dès la fin de l'année 2004.

Les brigades départementales de renseignements et d'investigations judiciaires ont été créées à la date du 15 janvier 2005 par arrêté du ministère de la défense. Celle de Paris a été créée par décret le 18 avril 2005, elles de Corse devaient l'être à partir du 15 juillet 2005.

Le renforcement des moyens alloués aux unités de recherche, en progression depuis 2002, se traduit par l'augmentation du budget consacré à leurs équipements de police technique et scientifique, lequel est passé de 440.000 euros en 2002 à 1 million d'euros en 2003 et 2004. Il a atteint 2,85 millions d'euros en 2005. L'effort sera toujours important en 2006 avec 1,93 million d'euros.

3.- Les nouveaux offices centraux de police judiciaire confiés à la gendarmerie en 2004 et 2005

a) Premier bilan pour les offices créés en 2004

L'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique a été créé par le décret n° 2004-612 du 24 juin 2004. Depuis août 2005, ses effectifs ont été renforcés par six militaires de la gendarmerie, portant le nombre total de personnels à 22. Le poste d'adjoint au chef de l'office doit revenir à un représentant de la police nationale. En outre, au cours de la période 2005-2006, des protocoles d'accord entre l'office central, l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et la direction générale de l'alimentation du ministère de l'agriculture devraient être établis afin de renforcer la coordination inter-services.

L'office central a, au cours de l'année 2004-2005, dans le domaine de la sécurité alimentaire et de la santé publique, été très rapidement saisi, par les magistrats du pôle santé publique du TGI de Paris, d'enquêtes judiciaires complexes. Le démarrage du pôle santé publique du TGI de Marseille, en septembre 2005, devrait conduire à un renforcement du nombre de saisines. Par ailleurs, au cours de cette même période, l'office central a pu développer une coopération interministérielle par des enquêtes judiciaires menées en concertation avec la brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires du ministère de l'Agriculture.

L'office central de lutte contre la délinquance itinérante, créé par le décret interministériel n° 2004-611 du 24 juin 2004 et rattaché à la sous-direction de la police judiciaire de la direction générale de la gendarmerie nationale, a pour domaine de compétence la lutte contre la criminalité et la délinquance commises par des malfaiteurs d'habitude, auteurs, co-auteurs ou complices qui agissent en équipes structurées et itinérantes en plusieurs points du territoire. Il est implanté depuis le 1er avril 2005 à Arcueil et se compose de deux divisions : une division d'analyse criminelle et une division opérationnelle.

Composé de 38 militaires de la gendarmerie et 8 fonctionnaires de police, il bénéficie par ailleurs du concours des agents des administrations partenaires : la direction nationale des enquêtes fiscales et la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières.

Sur le plan opérationnel, l'office a traité conjointement plusieurs affaires liées à la criminalité organisée avec l'office central pour la répression du banditisme et l'office central de lutte contre le trafic de biens culturels de la direction centrale de la police judiciaire. Au titre du premier semestre 2005, il a animé et coordonné 21 cellules d'enquêtes qui ont abouti à l'interpellation de 294 personnes, dont 97 ont fait l'objet d'un mandat de dépôt et 27 ont été placées sous contrôle judiciaire.

Pour 2005, le montant destiné aux équipements techniques des deux offices précités s'élevait à 360.000 euros, dont 354.000 euros pour le second. Sur le plan immobilier, les offices devraient, à l'horizon 2009-2010, quitter Arcueil et rejoindre le pôle de police judiciaire au quartier Lange à Pontoise constitué de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie et du service technique de renseignements judiciaires et de documentation.

Les dotations de fonctionnement de ces deux offices centraux pour 2005 sont de 123.400 euros pour l'office central de lutte contre la délinquance itinérante et de 101.500 euros pour l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique.

b) Un nouvel office rattaché à la gendarmerie en 2005

L'office central de lutte contre le travail illégal a été créé par le décret n° 2005-455 du 12 mai 2005. Il sera amené à coopérer avec l'office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre. Son action, répressive, est complémentaire de celle de la délégation interministérielle à la lutte contre le travail illégal chargée des actions de formation, de la réglementation et de l'animation des structures locales. Il sera le point de contact de la France avec les services des autres États. Son action se fera toujours en relation très étroite avec les directions centrales de la police judiciaire et de la police aux frontières. Installé provisoirement à Rosny-sous-Bois, il devrait rejoindre le fort de Montrouge à Arcueil en 2006. il sera composé d'une cellule commandement, de deux groupes opérationnels d'enquête et d'une plate-forme d'appui, d'analyse criminelle et de documentation.

La première condition d'efficacité de l'office repose sur la qualité des remontées de l'information. Dans ce but, il existe d'ores et déjà un dispositif d'information propre à la gendarmerie, le réseau ARAMIS, messagerie organique établie entre les unités constituées. Par ailleurs, par l'intermédiaire du système ADER reliant la messagerie des différentes administrations, les « comités opérationnels de lutte contre le travail illégal » adresseront directement les informations dont ils disposent en complément des services répressifs locaux. Des connexions automatisées avec les services de la police seront également mises en place.

Trois militaires de la gendarmerie ont été chargés de préparer la montée en puissance de cet office, renforcés à l'été 2005 par trois autres gendarmes. La participation combinée des ministères partenaires, en cours de finalisation, pourrait être de l'ordre de dix fonctionnaires (police, URSSAF, impôts et douanes). L'office devrait aboutir à un format définitif proche de 30 personnes en 2007.

III.- LES PROMESSES DE L'EXPERTISE TECHNIQUE ET SCIENTIFIQUE : LA MONTÉE EN PUISSANCE DU FNAEG ET LA CRÉATION DE L'INPS

A.- DES MISSIONS ÉTENDUES

Initialement destiné à recevoir les empreintes génétiques (traces ou individus) dans le seul cadre de la délinquance sexuelle (loi n° 98-468 du 17 juin 1998, relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs), le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) a bénéficié d'une première extension à la plupart des crimes contre les personnes et les biens (loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne). L'article 29 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a modifié les articles du code de procédure pénale afin d'augmenter encore l'aspect opérationnel de ce fichier. Les extensions réalisées ne portent pas seulement sur le champ des catégories d'infractions, mais aussi sur celui des catégories de personnes désormais concernées. La loi contient, par ailleurs, une série de mesures propres à faciliter l'usage du fichier et à accroître encore son efficacité.

Concernant les personnes, les nouvelles dispositions prévoient notamment :

- l'enregistrement du génotype des personnes mises en cause, qui jusqu'à présent ne pouvait qu'être l'objet d'une comparaison avec ceux déjà insérés dans la base de données (traces et condamnés) ;

- la (simple) comparaison (sans enregistrement) de l'empreinte génétique des personnes suspectées d'avoir commis un crime ou un délit ;

- l'enregistrement du profil génétique des personnes disparues.

Par ailleurs, la loi consacre le pouvoir propre de l'officier de police judiciaire qui peut, sans autorisation préalable d'un magistrat, procéder ou faire procéder à un prélèvement sur un individu et demander son inscription au fichier après avoir requis un laboratoire aux fins d'analyses. La mise à niveau des moyens du FNAEG tire les conséquences de cette extension de compétence.

B.- DES MOYENS MIS À NIVEAU

Afin de satisfaire aux normes de l'assurance qualité ainsi qu'aux nécessités de traitement d'un nombre très important d'analyses génétiques, un plan d'équipement des laboratoires a été défini sous l'égide d'une mission d'étude, mise en place en juillet 2003 par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et présidée par M. Ramiro RIERA, inspecteur général de l'administration. Ce projet, proposé fin 2003, prévoyait :

en 2004, l'équipement des laboratoires de police scientifique de Lyon et de Paris par deux chaînes de traitement (traces et individus) séparées (coût de l'opération : 1.233.000 euros). Ces équipements sont devenus pleinement opérationnels à Lyon à la fin du premier semestre 2005 ; ils devaient l'être à Paris en septembre/octobre 2005. En outre, le laboratoire de Lyon va être équipé, sur des crédits 2005, d'une unité de génotypage de masse lui permettant de traiter 125.000 profils génétiques d'individus par an (coût de l'opération : 2.210.000 euros). Les marchés d'équipement sont en cours. Les travaux d'aménagement débutent en août 2005 et l'unité devrait être pleinement opérationnelle à la fin du premier semestre 2006 ;

en 2005, l'équipement des laboratoires de Lille, Toulouse et Marseille (coût de l'opération : 1.560.000 euros). Là encore, les installations seront pleinement opérationnelles à compter du premier semestre 2006.

À ce jour, les objectifs du plan ont été quasiment atteints. Ce dispositif inclut la gendarmerie nationale, dont l'Institut de recherche criminelle s'est équipé de matériels équivalents, et notamment d'une unité susceptible de traiter 60.000 profils d'individus par an. Toutefois, en attendant que ce dispositif soit opérationnel et afin de résorber une partie des dossiers en attente de traitement dans les laboratoires, une première opération d'externalisation a pu être lancée à partir d'avril 2005 grâce aux crédits votés en loi de finances rectificative pour 2004. 26.000 prélèvements effectués sur des individus, mis en cause ou condamnés, ont été confiés à un laboratoire privé choisi après mise en concurrence, pour une somme de 2,94 millions d'euros. Une nouvelle opération devait être lancée en septembre pour 700.000 euros. Il s'agit de soulager les laboratoires relevant de l'Institut national de police scientifique qui avaient en stock à traiter, fin juin 2005, 57.000 analyses de prélèvements relatifs à des individus.

Le plan comprenait également un volet immobilier, pour partie déjà réalisé. Enfin, en moyens informatiques, les nouvelles dispositions législatives imposent une refonte logicielle importante du FNAEG. À ce jour, le calendrier de déploiement est le suivant :

- fin septembre 2004, enregistrement des mis en cause et simple comparaison pour les suspects ;

- fin avril 2005, enregistrement des personnes disparues, consultation et transmissions par voie télématique par les OPJ ;

- fin 2005-début 2006, transmissions télématiques à partir des laboratoires d'analyses.

Une version ultérieure, qui pourrait être livrée fin 2006, permettra également aux laboratoires et à l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale de transmettre directement leurs résultats analytiques au fichier par voie télématique. La même version autorisera un accès à la base de données au bénéfice du service de préservation des prélèvements biologiques géré par la gendarmerie nationale.

La politique de recrutement associée à la montée en puissance du FNAEG a permis de recruter 47 personnels techniques et scientifiques pour les sections biologie des laboratoires au titre de 2004. En raison des retards pris par la livraison des liaisons télématiques au profit des OPJ qui leur auraient permis une alimentation du fichier en temps réel par les données administratives, l'unité gestionnaire du fichier a été contrainte de recruter des opérateurs de saisie supplémentaires. Elle a bénéficié de l'affectation de 11 agents supplémentaires en février 2005. Toutefois, cet apport s'est révélé insuffisant pour résorber le nombre de dossiers en attente de traitement (de l'ordre de 26.000 au début de l'année 2005) ainsi que ceux, à venir, découlant de l'arrivée d'un flux supplémentaire de 26.000 résultats analytiques résultant de l'externalisation susmentionnée. En conséquence, afin de faire face à cette situation, un recrutement exceptionnel et transitoire de 15 vacataires pour 8 mois a été effectué entre le 1er juillet et le 10 août 2005, à partir de la ressource attribuée par la loi de finances rectificative pour 2004, pour un montant de 150.000 euros.

L'augmentation de l'effectif global de la police scientifique et technique est due à la montée en puissance du FNAEG ; elle figure dans le tableau suivant :

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA POLICE TECHNIQUE ET SCIENTIFIQUE

01/01/01

30/06/01

30/06/02

30/06/03

30/06/04

30/06/05

État-major

5

5

5

5

6

5

Division logistique opérationnelle (Ecully + Paris)

32

30

17

23

19

18

DELF (ex-Centre national de recherche, de documentation et de formation)

20

20

21

20

26

25

SCIJ
(Ecully + Paris)

103

104

99

106

103

150 dont 39 FNAEG (*)

Service central de documentation criminelle (Ecully + Paris)

142

137

125

128

113

106

SCL/INPS
(depuis le 01/12/04)

21

22

19

28

35 dont 23 FNAEG (*)

7

Service de l'informatique et des traces technologiques (Ecully + Paris)

-

36

40

41

40

Total

323

318

322

350

343

351

(*) Les effectifs FNAEG ont été intégrés au SCIJ le 01/12/2004, date de création de l'INPS incluant le SCL

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

En crédits budgétaires le FNAEG, qui a déjà bénéficié d'un montant de 4,23 millions d'euros de reports sur crédits ouverts en loi de finances rectificative pour 2004, afin de permettre l'absorption du retard des analyses dans les laboratoires de police scientifique, a été doté en 2005 d'un budget de 6 millions d'euros répartis comme suit :

- équipement des laboratoires et du site du FNAEG à Écully : 3,46 millions d'euros ;

- fonctionnement des laboratoires : 2,37 millions d'euros ;

- achats de kits de prélèvements buccaux : 38.000 euros ;

- fonctionnement du FNAEG : 128.000 euros.

Le tableau suivant retrace l'évolution du budget global consacré par la police à la sous-direction de la police technique et scientifique ainsi qu'aux laboratoires de police scientifique depuis 2001 :

ÉVOLUTION DU BUDGET GLOBAL DE LA POLICE TECHNIQUE ET SCIENTIFIQUE

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

2004
(exécuté)

2005
(initial)

Total

2001-2005

Équipement (hors renouvellement)

1,93

1,43

2,43

1,73

4,04

11,55

Fonctionnement

4,33

4,82

4,53

6,42

6,97

27,07

Total

6,26

6,26

6,95

8,14

11,01

38,62

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Pour sa part, la gendarmerie accorde au FNAEG une dotation de fonctionnement qui s'est élevée à 650.000 euros en 2005.

L'évolution du nombre d'empreintes enregistrées peut être ainsi retracée :

ÉVOLUTION DU NOMBRE D'EMPREINTES ENREGISTRÉES PAR LE FNAEG

31 déc. 2002

31 déc. 2003

30 juill. 2004

30 juin 2005

Profils de personnes définitivement condamnées

2.824

11.796

20.829

42.855

Traces non identifiées

179

716

1.956

5.201

Personnes mises en cause aux fins de comparaison

1.366

4.529

10.737

22.042

Rapprochements

32

82

286

1.087

Source : d'après le ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Le nombre de génotypes enregistrés dans le FNAEG a d'ores et déjà atteint les 100.000 il y a quelques semaines. Compte tenu des éléments qui précèdent, votre Rapporteur spécial ne peut que dire combien la progression de la base de données, en 2006, est étroitement liée à la livraison effective des nouveaux équipements ainsi qu'au développement des applications informatiques nécessaires.

Enfin, l'unité de génotypage de la gendarmerie (le futur « SCAGGEND » intégré à l'Institut de recherche criminelle) créée en application de la loi du 18 mars 2003 relative au fichier national automatisé des empreintes génétiques, doit être opérationnelle à compter du 1er janvier 2006. L'objectif est d'être en mesure d'effectuer 60.000 profils génétiques par an. Le coût s'élève à 2 millions d'euros en investissement pour l'acquisition de matériels technologiques et informatiques.

En conclusion sur ce point, on peut établir une comparaison avec l'homologue britannique du FNAEG :

L'HOMOLOGUE BRITANNIQUE DU FNAEG

Au Royaume-Uni, le Forensic science service dispose de 7 laboratoires (6 opérationnels et 1 dédié à la recherche) et employait environ 2.465 personnes en 2004. Il couvre 90 % du marché de la criminalistique en Angleterre et au Pays de Galles.

Outre la gestion du fichier national britannique des empreintes génétiques, il assure environ 78 % des analyses ADN destinées à l'alimentation de cette base de données au sein de 3 des 7 laboratoires avec un effectif d'environ 500 personnes. Ces examens sont entièrement automatisés tant pour les prélèvements buccaux que pour les échantillons biologiques issus de traces collectées sur les scènes d'infraction (au moins 13 séquenceurs ADN à 16 capillaires).

Le gouvernement britannique a financé un vaste programme d'extension de la NDNAD à hauteur de 182 millions de livres jusqu'en mars 2004. Un complément de 61 millions de livres a été alloué pour la période 2004-2005.

Au 22 mai 2005, le fichier comptait plus de 3 millions de profils « individu » et plus de 240.000 profils « trace ».

Enfin, les crédits de la mission « Sécurité » financent aussi une partie de l'activité du laboratoire central de la Préfecture de police, à hauteur de 40 % de ses missions pour un montant de 3,7 millions d'euros en 2006, ainsi que l'activité du laboratoire de toxicologie de la même Préfecture de police, pour 1,66 million d'euros en 2006, en légère hausse par rapport à 2005. Ce laboratoire va intégrer l'Institut national de police scientifique conformément à l'article 58 de la loi relative à la sécurité quotidienne (15). Un décret du 9 novembre 2004 est venu préciser les modalités d'organisation de l'Institut. En 2007, cet établissement public administratif en cours de mise en place sera présenté dans les documents budgétaires en tant qu'opérateur de l'État.

IV.- LA LANCINANTE PROBLÉMATIQUE DES « CHARGES INDUES » AU TITRE DU CONCOURS À LA JUSTICE

A.- POUR LA POLICE, LA CHARGE PÈSE ESSENTIELLEMENT SUR LES CRS

Les transfèrements, extractions et autres missions d'escorte représentent pour plusieurs services de police un coût important en termes d'indisponibilité des personnels actifs. Concernant les compagnies républicaines de sécurité, les concours apportés à la justice recouvrent les missions suivantes : les présentations, extractions, comparutions et transfèrements, la police des audiences, la tenue des dépôts, la garde des détenus hospitalisés et les conduites aux soins des détenus. L'ensemble des ces missions correspond à l'emploi de 2.510 fonctionnaires de police en 2004 pour l'ensemble des circonscriptions de sécurité publique. La ventilation de la charge en heures / fonctionnaires a évolué comme suit :

ACTIVITÉS NON OPÉRATIONNELLES DES CRS AU TITRE DU CONCOURS À LA JUSTICE

Charges en heures/fonctionnaire (H/F)

Évolution 2003/2004

Équivalent en poste pour l'année 2003

2002

2003

2004

Escortes et présentations

1.089.767

1.229.774

1.227.417

787

Police des audiences

965.745

1.116.450

1.022.729

- 8 %

656

Tenues des dépôts

819.420

784.288

712.088

- 9 %

457

Garde des détenus hospitalisés

625.777

712.148

698.352

- 2 %

448

Conduites aux soins

47.832

59.099

64.950

+ 8 %

42

Total

3.548.541

3.901.759

3.725.536

2.390

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

La mise en place des cours d'assises d'appel avait provoqué un accroissement sensible de la charge de police des audiences et de tenue des dépôts. À présent le système semble s'être régulé, entraînant une légère diminution de cette charge. Quant à la garde des détenus hospitalisés, elle enregistre une légère baisse due essentiellement à la mise en place des unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI). En revanche, les conduites aux soins augmentent, conséquence de l'augmentation et du vieillissement de la population carcérale.

Sur un thème voisin, votre Rapporteur spécial, en rappelant son déplacement de l'an dernier à Roissy, veut dénoncer à nouveau le poids que représentent, pour les agents de la police aux frontières, les transfèrements de personnes retenues dans la zone d'attente dite « ZAPI 2 » à proximité de l'aéroport. Le moyen de mettre un terme à cette activité coûteuse en personnel existe pourtant : une salle d'audience neuve construite sur place aux frais du contribuable. Avant même d'être utilisée, elle a dû être remise en chantier pour satisfaire aux demandes complémentaires des magistrats et auxiliaires de justice, et sera livrée en 2007 après 1,5 million d'euros de travaux supplémentaires.

B.- POUR LA GENDARMERIE MOBILE, LE FARDEAU S'ALOURDIT

Sur le fondement de l'article R. 97 du code de procédure pénale, des indemnités kilométriques sont attribuées annuellement à la gendarmerie par le ministère de la justice au titre des transfèrements judiciaires et administratifs effectués avec les véhicules de service de la gendarmerie (0,175 euro/km) (16). Ainsi, selon les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, 2,3 millions d'euros devraient être rétablis au budget de la gendarmerie en 2005 au titre de la gestion 2004.

L'augmentation du nombre de services déjà constatée en 2003 s'est poursuivie : celui-ci s'est élevé à 129.002 en 2004, soit une hausse de 2,29 % sur un an : 118.799 transfèrements et extractions judiciaires, 10.067 transfèrements et extractions dites administratives (dont 1.837 extractions médicales) et 136 transfèrements militaires.

La gendarmerie y a consacré 1.968.697 « heures gendarme » au lieu de 1.784.198 en 2003, soit une augmentation de 10,34 %. Ce quantum se répartit entre la gendarmerie départementale et la gendarmerie mobile, respectivement pour 1.541.587 et 427.110 « heures gendarmes », à l'exécution des missions de transfèrements et d'extractions.

La gendarmerie ne disposant pas d'unités dédiées à ces missions, les services de transfèrements ont une implication directe sur ses missions de sécurité publique : la charge qui en découle se fait au détriment de la présence sur le terrain. De surcroît, cette augmentation continue des charges de transfèrements et d'extractions, qui trouve pour partie son origine dans la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes (17), est appelée à s'amplifier en raison, notamment, de la médicalisation croissante de la population carcérale et de l'augmentation continue du nombre de personnes présentées ou écrouées du fait de l'action de la gendarmerie.

L'hospitalisation des détenus dans les unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI, créées par un arrêté du 24 août 2000) implantées en zone de compétence de la gendarmerie entraîne une augmentation importante de la charge des unités de gendarmerie. Les trois premières unités ont été ouvertes à Nancy, Lille et Lyon, respectivement le 16 février 2004, le 25 octobre 2004 et le 1er février 2005.

La LOPSI disposant qu'il convient de rechercher les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements de détenus ainsi que la surveillance des détenus hospitalisés afin de recentrer les forces de l'ordre sur leurs missions de sécurité publique, des travaux ont été conduits entre l'Intérieur et la Chancellerie. Un conseiller référendaire à la Cour des comptes avait été désigné pour évaluer les moyens consacrés aux transfèrements dans le cadre d'une expérimentation sur le ressort de la direction régionale de l'administration pénitentiaire de Strasbourg (régions de gendarmerie départementale d'Alsace et de Lorraine). Le rapport de cette mission d'évaluation fait ressortir que, quel que soit le champ retenu pour l'expérimentation, celle-ci ne pourra être conduite qu'au prix d'un important surcoût pour le budget de l'État, l'administration pénitentiaire demandant, pour procéder à l'expérimentation, des transferts de postes budgétaires et de moyens matériels. Le cabinet du Premier ministre a ajourné la mise en œuvre de l'expérimentation.

L'utilisation de la visioconférence s'inscrit dans le cadre général de la réflexion sur la réduction de la charge des transfèrements. La mise en œuvre de moyens de visioconférence permettrait de limiter les mouvements de détenus. À ce titre, il est à noter qu'une expérimentation est prévue à compter du mois de septembre 2005 dans le ressort de la juridiction interrégionale spécialisée de Nancy entre les juridictions équipées et les établissements pénitentiaires de Metz et de Nancy. Celle-ci durera un an.

Une application plus systématique des articles 664, 712 et D.298 du code de procédure pénale pourrait être recherchée afin de limiter le nombre de ces missions. En effet, aux termes de ces articles, les magistrats saisis initialement peuvent déléguer un acte de procédure, telle une audition, ou transférer l'ensemble d'une procédure aux juridictions du lieu de détention de la personne afin d'éviter le transfèrement du détenu.

En définitive, les mesures prises en matière d'organisation du service en interne et la participation active de la gendarmerie à tous les projets qui permettraient d'alléger la charge des extractions et des transfèrements n'ont pas permis pour l'instant de contenir leur progression continue, qui reflète aussi, pour une large part, l'augmentation de l'activité de la gendarmerie dans la lutte contre la délinquance.

CHAPITRE VI

LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE, UNE PRIORITÉ QUI ABSORBERA UNE GRANDE PART DES MOYENS NOUVEAUX EN 2006

I.- LA POLICE CONSACRE UNE ACTION SPÉCIFIQUE AU CONTRÔLE DES FLUX MIGRATOIRES

A.− LA POLICE AUX FRONTIÈRES, FER DE LANCE DE LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE

Outre ses missions traditionnelles dont certaines sont très spécialisées, telles que la police aéronautique ou la sûreté des moyens de transport, la direction centrale de la Police aux frontières se consacre, en priorité, à la maîtrise des flux migratoires irréguliers.

Modifiée par la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, la mission de contrôle transfrontière repose sur deux types de contrôles :

− les contrôles aux frontières intérieures, le plus souvent mobiles, en application de l'article 78.2 alinéa 4 du code de procédure pénale qui autorise le contrôle d'identité de toute personne présente dans la bande des 20 kilomètres et dans les zones ouvertes au public des gares ferroviaires et routières, des ports et des aéroports internationaux (la zone de contrôle sur les autoroutes ayant été étendue au-delà de la bande des 20 km jusqu'au premier péage autoroutier) ;

− les contrôles plus approfondis aux frontières extérieures, exécutés au profit de l'ensemble des pays dits « Schengen ».

La lutte contre l'immigration irrégulière et l'emploi illégal des étrangers comprend :

− le démantèlement des filières d'immigration clandestine et l'arrestation des « aidants » à l'immigration (passeurs ou logeurs) et, depuis la loi du 26 novembre 2003 précitée, ceux qui participent volontairement, qui organisent ou qui tentent d'arranger des mariages de complaisance ;

− l'interpellation des étrangers en situation irrégulière, notamment dans les zones frontalières et leur placement éventuel en centre de rétention administrative ;

− la coopération internationale et la mise en place de nouvelles structures dans ces domaines ;

− la participation à l'élaboration des textes juridiques spécifiques ;

− la collecte des éléments d'information nécessaires à une meilleure connaissance du phénomène migratoire ;

− le démantèlement des réseaux d'emploi d'irréguliers et la répression des infractions en ce domaine, avec la possibilité depuis la nouvelle loi sur l'immigration de mettre à contribution financière l'employeur d'étranger en situation irrégulière pour leur réacheminement dans leurs pays d'origine ;

− l'animation et la coordination des actions conduites par les autres services de police en collaboration avec l'inspection du travail, l'URSSAF et les services fiscaux.

La lutte contre la fraude documentaire s'appuie, pour son expertise et des documents de voyages et d'identité − y compris des permis de conduire depuis 2003 −, sur un système informatique de base de données (SINDBAD) enrichi en permanence. Cette base qui intègre des documents de voyage et de séjour authentiques de 130 pays est à la disposition de l'ensemble des services déconcentrés de la PAF ; elle est communiquée aux autres directions de la police nationale et à la gendarmerie nationale ainsi qu'à d'autres ministères et administrations et aux gardes frontières suisses. La base SINDBAD a vocation à venir enrichir la future base européenne FADO (False and Authentic Documents, système européen d'archivage d'images sur les documents authentiques et leur contrefaçon.

La mission d'éloignement des étrangers en situation irrégulière est un terme générique qui regroupe l'ensemble des mesures coercitives à caractère judiciaire ou administratif, visant à exclure un étranger du territoire national, à titre temporaire ou définitif, pour des motifs et selon des procédures prévues par la loi.

Les mesures administratives sont les suivantes : l'arrêté ministériel ou préfectoral d'expulsion, l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière qui s'applique à l'étranger en séjour irrégulier sur le territoire français, et la réadmission d'un étranger non membre de l'Union européenne, qui, se trouvant en situation irrégulière en France, est remis à l'État membre qui l'a admis à entrer sur son territoire ou dont il provient directement.

Les mesures judiciaires sont  les interdictions du territoire français prises en vertu de l'article 131-30 du code pénal, définitives ou temporaires (3 à 10 ans selon les cas). La mise en œuvre des décisions administratives et judiciaires d'éloignement du territoire national exige toujours davantage de moyens humains et matériels.

La PAF est organisée au tour d'une direction centrale composée de 3 sous-directions, et s'appuie sur 7 directions zonales (Nord, Est, Sud-Est, Sud, Sud-Ouest, Ouest, Antilles), 6 directions (Charles-de-Gaulle / Le Bourget et Orly et 4 outre-mer, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon), et 41 directions départementales, soit une de moins qu'en 2004 suite à la fermeture de celle des Alpes de Haute-Provence. Cependant, 6 nouvelles directions départementales devraient voir le jour en 2006 (cf. infra).

Le tableau suivant retrace l'évolution des effectifs de la police aux frontières, tous corps confondus, sur la période 2001-2005 ; il fait apparaître une progression significative, à hauteur de 572 personnels, soit une hausse de 7,9 %, largement concentrée sur 2005 :

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA PAF

(au 31 décmbre)

2001

2002

2003

2004

10/08/2005

Évolution
2001-2005

1. Corps de conception & de direction

75

74

77

75

76

+ 1,3 %

Haut fonctionnaire

4

4

5

6

7

Commissaire divisionnaire fonctionnel

7

6

23

21

25

Commissaire divisionnaire

15

16

Commissaire principal

28

25

30

29

28

Commissaire de police

21

23

19

19

16

2. Corps de commandement

683

659

636

624

581

- 14,9 %

Commandant fonctionnel

34

41

30

25

34

Commandant de police

192

157

170

166

145

Capitaine de police

232

254

218

197

183

Lieutenant de police

225

207

218

236

219

3. Corps d'encadrement et d'application

5.259

5.527

5.462

5.411

6.047

+ 15 %

Brigadier major

117

126

124

115

113

Brigadier chef de police

894

Brigadier de police

791

872

900

850

127

Gardien de la paix

4.351

4.529

4.438

4.446

4.904

4. Personnel administratif

340

352

393

405

430

+ 26,5 %

Attaché de police

8

10

12

9

13

Secrétaire administratif

30

27

30

31

33

Adjoint administratif

154

171

212

232

270

Agent administratif

148

144

139

133

114

5. Policiers auxiliaires

0

0

0

0

0

6. Adjoints de sécurité

887

846

759

739

692

- 22 %

TOTAL GENERAL

7.244

7.458

7.327

7.254

7.826

+ 7,9 %

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Cette tendance générale est appelée à se poursuivre compte tenu de l'évolution des missions de la PAF, dans le cadre de la nouvelle impulsion de l'action gouvernementale sur ce dossier. Selon les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, les besoins en effectifs seraient de l'ordre de 500 fonctionnaires supplémentaires.

Dans le « bleu » pour 2006, l'action Police des étrangers et sûreté des transports internationaux regroupe non seulement, par convention, l'ensemble des effectifs de la PAF, mais également une partie des effectifs de la sécurité publique, de la Préfecture de police et des CRS, pour aboutir à un total de 9.083 ETPT.

Le tableau suivant indique l'évolution du budget global de la PAF :

ÉVOLUTION DU BUDGET DE LA PAF

(en millions d'euros)

Budget global

Services nouveaux

Total des budgets

Service spécialisé à vocation nationale

Services territoriaux

Service spécialisé à vocation nationale

Services territoriaux

2001

8,62

11,66

0,15

0,63

21,05

2002

8,19

10,83

0,21

0,59

19,82

2003

8,81

13,01

0,52

0,34

22,67

2004

10,31

13,59

0,19

0,12

24,2

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Le parc roulant de la PAF se composait en 2004 de 1.002 véhicules, soit 5,6 % de plus qu'en 2001. Par ailleurs, une enveloppe de quelque 611.000 euros a été affectée au renouvellement automobile des services spécialisés à vocation nationale pour l'année 2005, concernant 34 véhicules. En outre, dans le cadre de la lutte contre l'immigration irrégulière dans les départements et collectivités d'outre-mer, la police aux frontières a renforcé ses moyens nautiques en dotant la direction de Mayotte d'une vedette de 11,95 mètres, mise en service en juillet dernier. Les autres moyens techniques de la PAF (transmission, informatique), sont également en progression. En particulier, en 2004, 318 lecteurs optiques de documents de voyage ont été répartis sur 34 sites de la police aux frontières dont 7 implantés outre-mer. Ces derniers, autorisant la lecture automatique des bandes MRZ (zones lisibles en machine) présentes sur les passeports, les visas et les cartes d'identité françaises, permettent une interrogation automatique du fichier national des personnes recherchées et du système d'interrogation Schengen.

Le tableau ci-après résume et illustre la tendance des principaux indicateurs d'activité de l'ensemble des services de la police aux frontières en métropole et en outre-mer :

PRINCIPAUX INDICATEURS D'ACTIVITÉ DE LA POLICE AUX FRONTIÈRES

2002

2003

2004

Évolution 2003/2004

1er semestre 2004

1er semestre 2005

Évolution 2004/2005

Non-admissions

28.811

24.668

23.476

− 4,83 %

10.602

12.124

14,36 %

Réadmissions France vers extérieur

16.188

11.963

12.344

3,18 %

5.889

7.149

21,4 %

Clandestins maritimes

621

516

424

− 17,83 %

235

268

14,04 %

Placement en zone d'attente

21.066

17.442

17.689

1,42 %

7.941

8.898

12,05 %

Étrangers en situation irrégulière

56.171

54.935

56.518

2,88 %

28.316

36.868

30,2 %

Aidants à l'immigration

1.241

1.393

1.892

35,82 %

936

1.439

53,74 %

Éloignements effectifs

19.294

22.578

31.186

38,13 %

15.683

15.857

1,11 %

Porteurs de faux

13.952

11.898

12.051

1,29 %

5.826

6.205

6,51 %

Employeurs (travail illégal)

1.126

1.291

1.142

− 11,54 %

604

794

31,46 %

Salariés (travail illégal)

1.795

1.827

1.412

− 22,71 %

661

1.497

126,48 %

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Cette évolution est illustrée par le graphique suivant :

ÉVOLUTION DE L'ACTIVITÉ DE LA PAF DEPUIS 2001

graphique
Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

L'étude de la pression migratoire enregistrée aux frontières fait apparaître, en métropole, pour le premier semestre 2005, une pression migratoire en progression, fortement réprimée et donc mise en relief par l'activité policière. Aucun indicateur ne contrarie cette progression constante.

En matière de lutte contre l'immigration irrégulière, la police aux frontières enregistre en 2005, en métropole, une hausse généralisée et soutenue de son activité sous toutes ses formes. Les Irakiens, Marocains et Algériens sont les nationalités les plus présentes parmi les étrangers en situation irrégulière interpellés en métropole, représentant à eux trois près de 30 % de cette population. Pour ce qui concerne les aidants, on note la prééminence des Français, des Turcs, des Algériens et des Marocains, totalisant à eux quatre près d'un aidant sur deux (46,85 % exactement). Le nombre d'interpellations d'aidants a été retenu comme indicateur associé à l'objectif « Améliorer la lutte contre l'immigration irrégulière organisée ». La prévision pour 2005 s'établit à 1.987 interpellations par la PAF et 300 par les autres services de police ; la cible pour 2006 s'établit respectivement à 2.000 et 300 interpellations d'aidants.

En matière d'éloignement effectif des étrangers en situation irrégulière, la progression est générale. Indicateur de la réalisation de l'objectif « Contribuer, pour ce qui relève de la police nationale, à l'amélioration des reconduites à la frontière », le nombre d'éloignements effectifs devrait, selon le « bleu » pour 2006, atteindre 23.000 en 2005 et 25.000 l'an prochain en métropole.

Au sein de la direction centrale de la PAF, la sous-direction de la lutte contre l'immigration irrégulière s'appuie notamment sur l'office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre (OCRIEST). Cet office identifie les structures criminelles impliquées et met un terme à leurs activités en neutralisant leurs principaux organisateurs. Depuis sa création, en 1996, l'OCRIEST a démantelé 161 filières d'immigration irrégulière et 183 structures clandestines employant des étrangers en situation irrégulière, avec un total à la fin 2004 de 3.078 personnes interpellées. Le tableau suivant complète ces données :

INDICATEURS D'ACTIVITÉ DE LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

2003

2004

2005

Filières démantelées 

12

7

4

Structures employant des clandestins  

3

8

0

Mesures de garde à vue 

214

dont 94 ESI (*)

187

dont 61 ESI

96

Organisateurs et complices déférés 

72

97

35

(*) étrangers en situation irrégulière.

Source : ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Plusieurs facteurs sont à la source de la mise en place de réseaux structurés d'émigration illégale : l'éloignement géographique, la difficulté à se procurer les documents nécessaires au voyage, la logistique prévoyant étapes, hébergements et moyens de transports tant humains que matériels. La France est la cible de nombreuses filières d'immigration illégale. L'office oriente en particulier sa lutte vers les flux irréguliers les plus préoccupants : ceux en provenance du sous-continent indien (Inde, Pakistan, Sri Lanka), d'Afrique noire (République démocratique du Congo), d'Asie (Chine) et également d'Europe de l'Est (Roumanie, Moldavie).

B.− LE PLAN D'ACTION SUR LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE ACCAPARE TOUS LES MOYENS NOUVEAUX HORS LOPSI EN 2006

Le plan d'action du Gouvernement en matière de lutte contre l'immigration irrégulière a trouvé ses premières traductions dans la création du Comité interministériel du contrôle de l'immigration et dans la décision de mettre en place une police de l'immigration.

Une circulaire du 23 août 2005 fixe l'organisation, les attributions respectives et le fonctionnement des services chargés de la police de l'immigration. Sur le plan opérationnel, la direction centrale de la Police aux frontières est chargée de la coordination du dispositif, sous l'autorité du directeur général de la Police nationale.

L'encadré page suivante reproduit le résumé de la circulaire.

CIRCULAIRE DU 23 AOÛT 2005

RELATIVE À LA MISE EN PLACE DE LA POLICE DE L'IMMIGRATION

Résumé

La mise en œuvre de la politique de l'immigration et du contrôle des flux migratoires exige une coordination très forte à un double niveau :

− au niveau interministériel, à travers le pilotage du Comité interministériel de contrôle de l'immigration, institué par le décret du 26 mai 2005. Son secrétaire général est placé auprès du ministre de l'Intérieur et chargé d'animer le comité des directeurs des administrations centrales et des établissements publics concernés ;

− au plan opérationnel, par l'organisation d'une police de l'immigration. Elle s'articule autour d'une direction spécialisée, la direction centrale de la police aux frontières, aux compétences redéfinies et au maillage territorial élargi, chargée, sous l'autorité du directeur général de la police nationale, d'une mission générale de coordination. Elle repose aussi nécessairement sur la mobilisation des services territoriaux de la police et de la gendarmerie nationales (directions départementales de la sécurité publique et groupements de gendarmerie départementale de la gendarmerie nationale). La coordination sera assurée au niveau central par l'unité de coordination de la lutte contre l'immigration irrégulière (UCOLII) placée auprès du directeur central de la police aux frontières, et, au niveau de la zone de défense, par une cellule de coordination aux attributions comparables, placée sous l'autorité du préfet de zone.

Les instructions de la circulaire fixent l'organisation, les attributions respectives et le fonctionnement des services chargés de la police de l'immigration.

Pour la PAF, ce plan d'action rend nécessaire la création de nouvelles structures :

− une unité de coordination de la lutte contre l'immigration irrégulière (UCOLII) placée auprès du directeur central ;

− des cellules de coordination opérationnelle zonales (CCOZ) aux attributions comparables, placées sous l'autorité des préfets de zones ;

− la création d'antennes de brigades mobiles de recherche (BMR) et de nouvelles directions départementales.

Sur le plan juridique, différents textes réglementaires sont en cours de publication. Sur le plan logistique, l'installation de l'unité de coordination au siège de la direction centrale va provoquer une demande d'extension de surface. Quant aux autres structures nouvelles, elles vont devoir bénéficier de locaux et de budgets, à savoir :

− les antennes de brigades mobiles de recherche qui devraient être créées d'ici la fin de l'année à Orléans, Dijon et Grenoble ;

− les antennes de Reims, Limoges, Caen, Saint-Etienne et Avignon programmées pour 2006 :

− les directions départementales de Seine-et-Marne, des Yvelines, du Val d'Oise et de l'Oise, dont la création est également prévue en 2006 ;

− les 6 cellules de coordination opérationnelle zonales.

Le nombre de personnels supplémentaires que nécessite cette réforme est estimé à 220, répartis comme suit :

MOYENS HUMAINS SUPPLÉMENTAIRES SPÉCIFIQUES À LA POLICE DE L'IMMIGRATION

Corps de conception et de direction

Corps de commandement

Corps d'encadrement et d'application

Personnels administratifs

Total

Unité de coordination de la lutte contre l'immigration irrégulière

1

2

4

3

10

6 cellules de coordination opérationnelle zonales

4 x 6

2 x 6

36

3 directions départementales de la PAF (Seine-et-Marne, Yvelines, Val d'Oise)

2 x 3

21 x 3

2 x 3

75

DDPAF de l'Oise

2

30

3

35

8 antennes de brigades mobiles de recherche

1 x 8

6 x 8 (1)

1 x 8

64

Total

17

2

169

32

220

(1) dont 2 x 8 officiers de police judiciaire.

Source : d'après le ministère de l'Intérieur et de l'aménagement du territoire.

Un groupe de travail devait être mis en place dès le mois de septembre. Il aura pour mandat la conduite d'un projet de nouvel outil statistique dans ses dimensions théoriques (détermination du contenu) et technique (règles de collecte des données, modalités de fonctionnement de l'outil). L'objectif est de pouvoir disposer de ce nouvel outil d'ici le début de 2006.

Les crédits de paiement correspondant à l'exécution l'an prochain de ce plan de lutte représenteront 38,4 millions d'euros de moyens nouveaux par rapport à 2005, décomposés comme suit :

− 22,7 millions d'euros sur l'action « Police des étrangers » ;

− 15,7 millions d'euros sur l'action support, à raison de 11 millions d'euros pour l'augmentation du nombre de places en centre de rétention administrative et 4,7 millions d'euros pour l'outil statistique précité.

En 2006, l'action Police des étrangers et sûreté des transports internationaux sera dotée de 534,66 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, dont 106,89 millions d'euros hors titre 2. Sur ce dernier montant, la fonction « contrôle des flux migratoires et sûreté des transports » accaparera 46,89 millions d'euros, les 60 millions restants allant à la fonction « lutte contre l'immigration clandestine ». C'est elle qui supporte le coût des centres de rétention administrative.

C.− LES CENTRES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE REPRÉSENTENT UN LOURD PROGRAMME

La politique de lutte contre l'immigration irrégulière comporte un important volet de fonctionnement et surtout d'investissement avec la construction, l'entretien et la surveillance des centres de rétention administrative (CRA). Rénovation des centres existants suite à un décret du 30 mai 2005, extension des capacités et meilleure répartition géographique se conjuguent pour donner à ce programme un poids très important.

La capacité totale des centres, qu'ils ressortissent à la compétence de la police ou à celle de la gendarmerie, est récapitulée dans le tableau suivant :

CAPACITÉ EN NOMBRE DE PLACES DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

Sites

juin-02

juin-05

Variation

IMPLANTATIONS POLICE NATIONALE

Capacité disponible

06 - Nice - Auvare SP

72

40

13 - Marseille Arenc y compris ZA

48

60

13 - Marseille Le Canet DPAF

34 - Sete DPAF

16

24

30 - Nîmes

31 - Toulouse - Blagnac 1

20

37

31 - Toulouse - Blagnac 2

33 - Bordeaux - HP

8

24

64 - Hendaye - DPAF

15

15

44 - Nantes - HP

10

8

76 - Rouen - Oissel ENP

6

38

62 - Coquelles - DPAF

39

76

59 - Lille - Lesquin 1

20

41

59 - Lille - Lesquin 2

69 - Lyon St Exupéry

54

95

75 - Paris - dépôt PJP

56

98

75 - Paris - Vincennes 1

134

146

75 - Paris - Vincennes 2

93 - Bobigny

30

52

95 - Deuil la Barre

78 - Plaisir (Versailles)

20

91 - Palaiseau

92 - Nanterre

26

94 - Orly

971 - Guadeloupe - Morne Vergain

20

20

973 - Guyane - Rochambeau

40

38

976 - Mayotte - Pamandzi / Dzaoudzi

60

60

Projets à l'étude: Montbéliard, Sens, Le Chesnay, Nantes, Vincennes

Places en local de rétention administrative

153

223

Total PN

847

1.095

248

88 %

84 %

IMPLANTATIONS GENDARMERIE NATIONALE

77- Mesnil Amelot 1

70

140

77- Mesnil Amelot 2

66 - Rivesaltes - Perpignan

18

22

68 - Strasbourg - Geispolsheim

18

28

57 - Metz 1

35 - Rennes 1

57 - Metz 2

35 - Rennes 2

Places en local de rétention administrative

6

19

total GN

112

209

97

12 %

16 %

Total

959

1.304

345

Accroissement du nombre de places

36 %

En 2004 ont été effectuées les opérations suivantes :

− la construction du centre et de la zone d'attente de 126 places sur le site de Marseille-Le Canet, soit 5.660 m² pour 15,5 millions d'euros ;

− la création du centre de Rouen-Oissel (40 places) ;

− l'extension et la réhabilitation du centre de Lyon Saint-Exupéry (+ 25 places).

L'extension du programme consacré aux CRA pour 30 millions d'euros a constitué un important effort d'investissement sur le 1er semestre de 2005.

Les frontalières ou aéroportuaires ne sont pas les seules à être concernées par cette question. La Préfecture de police de Paris a ainsi lancé, dans le cadre de ses grands travaux immobiliers prévus sur 10 ans à compter de 2002, les opérations suivantes :

− la création en 2003, de 40 places supplémentaires dans les deux centres existants (site de Vincennes et site du dépôt du Palais de Justice de Paris) ;

− d'importants travaux d'humanisation des locaux de rétention et d'amélioration de la sécurité des sites en 2003 et 2004 ;

− l'extension en cours (2005-2006) des capacités d'accueil sur le site de Vincennes par la création d'un second centre en vue de fermer le site du dépôt au Palais de Justice.

Avec 14.600 personnes en rétention, pour une durée moyenne de 10 jours, le taux d'occupation des centres qui relèvent de la police atteint 80 %. Le plan d'action précité doit porter la capacité des CRA à 1.300 places fin 2005, 2.000 fin 2006 et 3.000 fin 2008.

En 2006, le coût de fonctionnement des CRA et des zones d'attente représentera 20 millions d'euros en moyens nouveaux. Une place en CRA nécessite, en moyens humains, 0,8 à 1 fonctionnaire de police. L'indicateur spécifique « coût moyen d'une rétention en CRA police » devrait être chiffré dans le projet annuel de performances pour 2007 ; il a été judicieusement préféré à l'indicateur du coût moyen d'un éloignement, lequel ne dépendait pas des seules forces de police.

Ce coût global de fonctionnement augmente sous l'effet notamment, concernant la gestion des centres, d'un désengagement de l'administration pénitentiaire. Le ministère de l'Intérieur réfléchit à l'externalisation de certaines fonctions d'hébergement et de restauration. Quant à la baisse du coût des reconduites, elle est recherchée par un recours plus systématique aux vols groupés avec nos partenaires européens − en faisant par exemple appel aux Allemands vers la Turquie ou aux Britanniques vers l'Irak.

II.- LA GENDARMERIE POURRAIT MIEUX DISTINGUER SA POLITIQUE CENTRÉE SUR LES TRANSPORTS ET L'IMMIGRATION

Par comparaison avec la police, les documents budgétaires donnent l'impression que la gendarmerie n'intervient pas dans la sûreté des transports ni dans la lutte contre l'immigration clandestine, ce qui est évidemment faux. Des gendarmeries spécialisées comme une implication dans la gestion des CRA démontrent le contraire.

A.− GENDARMERIE DES TRANSPORTS AÉRIENS ET GENDARMERIE MARITIME, SPÉCIALISÉES MAIS PLEINEMENT INTÉGRÉES À L'ARME

1.− La gendarmerie des transports aériens emploie 1.000 militaires

Environ 1.000 personnels (31 officiers, 600 sous-officiers, 13 militaires du corps technique et administratif, 340 gendarmes adjoints et 6 personnels civils) servent au sein de la gendarmerie des transports aériens. Les militaires de la gendarmerie qui la composent sont tous issus de la gendarmerie départementale, de la gendarmerie mobile ou de la garde républicaine : tous appartiennent bien à la même arme, au sein de laquelle se déroule leur carrière.

 La gendarmerie des transports aériens est une formation spécialisée placée pour emploi auprès du ministère des Transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, de même que la gendarmerie départementale ou la gendarmerie mobile sont placées pour emploi auprès du ministre de l'Intérieur, tout en étant par nature rattachées au ministre de la Défense.

Elle comprend plusieurs subdivisions :

− 2 groupements à Roissy et Aix-en-Provence ;

− 1 section de recherche à Roissy ;

− 11 compagnies à Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Athis-Mons, Brest, Strasbourg, Lyon, Marseille, Nice, Bordeaux, Toulouse et Ajaccio ;

− 2 brigades de recherche à Paris-Charles de Gaulle et Paris-Orly ;

− 40 brigades dont 3 à Paris-Charles de Gaulle et 2 au Bourget-Paris-Orly ;

− 8 pelotons de surveillance et d'intervention à Paris-Charles de Gaulle (3), Paris-Orly (2), Lyon, Marseille et Nice ;

− 6 brigades implantées outre-mer (Réunion, Polynésie, Guyane, Nouvelle Calédonie, Martinique et Guadeloupe.

Les gendarmes des transports aériens ont des compétences identiques à celles attribuées aux autres militaires de la gendarmerie nationale, mais étendues aux domaines de l'aviation civile (notamment ceux relatifs à la sûreté aéroportuaire ainsi qu'aux accidents d'aéronefs civils).

Ainsi, ils exercent une mission prioritaire de sûreté, qui a pour but de protéger les installations et les aéronefs de l'aviation civile contre tous les types d'actes illicites, de contrôler les personnes et véhicules admis en zone réservée, et de protéger les aéronefs d'État à l'arrivée ou au départ des aéroports français ainsi que les hautes personnalités.

Au titre de sa mission de renseignement, la gendarmerie des transports aériens est chargée de prévenir les troubles à l'ordre public et de lutter contre le terrorisme. Elle exerce également des missions de police (police militaire, police administrative qui recouvre essentiellement la police de la circulation routière en zone réservée, et police judiciaire au titre des infractions pénales de toute nature constatées sur les plates-formes aéroportuaires, qu'il s'agisse de travail clandestin ou de toxicomanie).

En outre, ses missions spécifiques consistent à assurer la sûreté du transport aérien à l'intérieur de la zone réservée des plates-formes aéroportuaires, à protéger les installations sensibles (Centre en Route de la Navigation Aérienne), à participer à la police de la navigation aérienne (recherche et constatation des infractions aéronautiques, constatation des accidents et incidents aériens).

D'autres missions correspondent à la gestion des alertes en liaison avec les autres forces de police : fouille et sécurisation des aéronefs, des installations, des bagages, du fret par les équipes cynophiles de recherche en explosifs ou par contrôle radioscopique.

Enfin, la gendarmerie des transports aériens assure des missions de formation en sûreté au profit de certains pays étrangers dans le cadre de relations de coopération, ou au profit de l'École nationale de l'aviation civile, et encore certaines missions occasionnelles (évacuations sanitaires, transit des unités gendarmerie, etc.).

Ses moyens en personnel ont été évoqués supra. En principe, seuls les gradés et les gendarmes confirmés, comptant au moins trois ans de service dans la gendarmerie départementale, peuvent solliciter une affectation dans la GTA. Toutefois, les personnels de la gendarmerie mobile et de la garde républicaine peuvent être admis en GTA en fonction des besoins et compétences particulières détenues (tireur d'élite, brevet de pilote, etc.). La formation est dispensée, au cours de la première année d'affectation, par un stage de formation aéronautique de base organisé à l'état-major de la GTA, de manière continue au sein des unités et pour certains personnels, lors d'un stage de perfectionnement se déroulant à l'école nationale de l'aviation civile de Toulouse.

Les moyens matériels nécessaires au fonctionnement des unités sont mis en place par la gendarmerie nationale (armement, véhicules, moyens de transmission) et par la direction générale de l'Aviation civile pour les moyens spécifiques complémentaires.

2.−  La gendarmerie maritime est forte de 1.100 hommes

1.100 militaires servent au sein de la gendarmerie maritime : 32 officiers, 248 gradés, 617 gendarmes et 199 gendarmes adjoints. Comme pour la GTA, les officiers et sous-officiers de la gendarmerie maritime sont tous issus de la gendarmerie départementale, de la gendarmerie mobile ou de la garde républicaine.

Commandée par un colonel, assisté d'un état-major implanté à Paris, la gendarmerie maritime est articulée en 3 groupements, 8 compagnies et 75 unités (brigades de recherches, brigades de surveillance du littoral, peloton de sûreté des zones protégées, peloton de surveillance d'intervention et de renfort, patrouilleurs, vedettes côtières de surveillance maritime) dont la répartition géographique est la suivante.

En métropole :

− le groupement de la Manche et de la Mer du Nord à Cherbourg (1 compagnie) ;

− le groupement de l'Atlantique à Brest (4 compagnies) ;

− le groupement de la Méditerranée à Toulon (2 compagnies) ;

− la compagnie de Paris à Carrières-sur-Seine (sous l'autorité de l'état-major) ;

− le Centre national d'instruction de la gendarmerie maritime à Toulon.

Outre-mer : en Guadeloupe 1 patrouilleur, en Guyane 2 vedettes de 20 mètres, à la Réunion 1 patrouilleur, en Polynésie Française 1 patrouilleur et une brigade, en Nouvelle-Calédonie 1 vedette de 20 mètres et 2 brigades, à Saint-Pierre-et-Miquelon 1 patrouilleur, en Martinique 1 patrouilleur, et à Mayotte 1 vedette de 20 mètres.

La gendarmerie maritime remplit ses missions au profit du chef d'état-major de la marine nationale, des préfets maritimes, coordonnateurs des actions de l'État en mer, dont elle assure l'exécution des arrêtés et décisions, des procureurs de la République et des administrateurs des affaires maritimes. Ces missions se décomposent en deux grandes catégories :

− les missions de défense nationale recouvrent la participation à la sûreté et à la protection des établissements militaires de la marine nationale, la surveillance générale des sites militaires (ports, bases...), la protection et le contrôle des personnes et des biens, le maintien et rétablissement de l'ordre sur les sites à protéger, la recherche du renseignement à l'intérieur et aux abords des établissements militaires de la marine nationale. Dans le cadre de la défense maritime du territoire, elle participe à la surveillance des eaux nationales ;

− les missions de police générale en mer comprennent la police judiciaire en mer (tous les personnels de la gendarmerie maritime, sont officiers, agents de police judiciaire ou agents de police judiciaire adjoints), le contrôle de la salubrité publique, le contrôle de l'immigration clandestine, le contrôle du travail illégal, la lutte contre les trafics (stupéfiants, contrefaçons...), la police de la navigation de plaisance et des pêches, la protection du trafic maritime et l'assistance aux personnes en danger.

 La gendarmerie maritime peut également apporter le concours de ses personnels spécialisés à la gendarmerie départementale ou à d'autres services de police à l'occasion d'enquêtes nécessitant sa compétence technique. Dans le cadre européen, elle constitue l'un des acteurs de la police transfrontalière.

Au titre de ses moyens nautiques, la gendarmerie maritime dispose de bâtiments de types « patrouilleur » et « vedettes » : 1 patrouilleur de 38 mètres, 2 patrouilleurs rapides de 37 mètres, 4 patrouilleurs côtiers de 32 mètres, 1 vedette de 24 mètres, 17 vedettes côtières de surveillance maritime de 20 mètres (à compter de la fin 2005), 5 vedettes de surveillance côtière de 14 mètres et 7 vedettes de surveillance côtière de 10 mètres, auxquels s'ajoutent 10 embarcations pneumatiques dans les brigades de surveillance du littoral et 32 embarcations pneumatiques sur les patrouilleurs et les vedettes.

B.− LA GENDARMERIE APPORTE UNE NOTABLE CONTRIBUTION À LA LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION IRRÉGULIÈRE

Bien que cette donnée ne soit pas mise en exergue dans le projet annuel de performances du programme Gendarmerie nationale, sous la forme d'une action par exemple, la contribution de la gendarmerie à la lutte contre l'immigration irrégulière y est citée. Son engagement se traduit par la mise en œuvre de formations spécifiques, de contrôles renforcés des voies de communication et d'un programme immobilier visant à doubler la capacité d'accueil de ses centres de rétention administrative.

1.- Un poste d'activité en forte augmentation pour les unités

La gendarmerie a accueilli au cours de l'année 2004, dans les 3 centres de rétention administrative dont elle a la charge (Le Mesnil-Amelot, Rivesaltes et Geispolsheim), 6.182 retenus. Elle a également relevé, la même année, 10.118 infractions à la législation sur les étrangers et mis en cause 9.739 personnes. Sur le premier trimestre 2005, les résultats enregistrés pour la métropole uniquement sont en nette augmentation puisque, par rapport à la même période de 2004, la hausse est de 64,9 % pour les faits constatés et de 38,1 % pour les personnes mises en cause. La tendance s'accentue puisqu'à la fin septembre, avec 4.076 faits constatés en métropole, la hausse atteignait 97 % d'une année sur l'autre.

Outre-mer, 3.845 faits ont été enregistrés sur les 9 premiers mois de 2005 : on constate une diminution sensible des infractions relevées (- 29,37 %), pour des raisons le plus souvent externes à la gendarmerie, comme par exemple à Mayotte pour les raisons d'indisponibilité de moyens maritimes signalée supra et récemment résorbée. La situation se redresse ainsi outre-mer avec une progression en septembre de 17,47 % du nombre de personnes mises en cause.

Au-delà des unités spécialisées susmentionnées, c'est bien l'ensemble des unités de la gendarmerie qui participe à cette action. La croissance de cette mission a conduit, en 2005, à la création d'une équipe dédiée au sein de chacun des escadrons départementaux de sécurité routière, afin d'assurer l'interface avec le pôle de compétence de chaque préfecture et les unités. Cette équipe a également vocation à être un relais de formation.

Par ailleurs, deux escadrons de gendarmerie mobile sont en moyenne employés chaque jour au contrôle de l'immigration irrégulière, notamment sur les grands axes routiers aux frontières.

2.- Des moyens croissants qui justifient l'identification d'une action ad hoc

Pour assurer le fonctionnement et la garde des 3 centres dont elle a la charge, ainsi que les escortes des retenus en phase d'éloignement, 234 militaires sont nécessaires, dont 200 gendarmes mobiles. Il est prévu en 2006 deux nouveaux centres provisoires de 30 places à Metz et à Rennes, qui nécessiteront chacun l'engagement de 42 personnels. La construction d'un nouvel établissement de 240 places au Mesnil-Amelot justifiera, en 2008, d'y consacrer 335 militaires. De même l'ouverture des centres définitifs de Metz et Rennes, pour des capacités respectives de 95 et 60 places réclamera-t-elle 210 militaires supplémentaires. En outre, la gendarmerie est sollicitée pour la création d'un centre de 95 places à Garchy dans la Nièvre et pour le maintien des centres provisoires de Metz et Rennes au-delà même de l'ouverture des centres définitifs. Enfin, la gendarmerie va comme la police se heurter au désengagement de l'administration pénitentiaire des actuels et futurs centres, à compenser par des personnels de soutien.

En 2004, la charge des 3 centres existants a représenté 19,4 millions d'euros en rémunérations et charges sociales et en fonctionnement courant, ainsi qu'1 million d'euros en crédits d'investissement et d'infrastructure. La dépense resterait stable en 2005, mais en 2006, les 2 centres provisoires précités qui ouvriront à compter de juin nécessiteront de dégager 3,5 millions d'euros en crédits de personnel et de fonctionnement courant, 230.000 euros pour l'investissement initial, 728.000 euros au titre de la location des structures modulaires, et 5,4 millions d'euros pour les opérations d'infrastructure, ce dernier montant comprenant 2 millions d'euros au profit du centre de Rivesaltes.

En outre, la participation des unités de gendarmerie départementale à la mission d'interpellation d'étrangers en situation irrégulière a été évaluée pour 2004 à 4,2 millions d'euros. Pour 2005, l'engagement des unités faisant apparaître tendanciellement un doublement du nombre d'interpellations, ce coût devrait lui aussi doubler.

*

Avec, par rapport à la police, environ la moitié moins de personnes retenues, la contribution de la gendarmerie reste très significative, et elle doit prendre sa part de l'effort supplémentaire demandé par le ministre d'État dans le domaine de la lutte contre l'immigration clandestine. Il serait ainsi, pour permettre une véritable analyse comparative du coût de cette politique, de disposer d'indicateurs « miroirs » de ceux mis en place par la police. La donnée selon laquelle, par exemple, le coût des CRA de la gendarmerie exprimé en nombre de personnels par place − qui serait de 1,4 environ − est légèrement supérieur à celui de la police, mériterait un examen plus attentif.

Sans céder à la tentation de modeler la nomenclature des « bleus » en fonction des priorités politiques du moment, mais bien parce qu'il s'agit d'une dimension importante et particulière de l'action des forces de sécurité intérieure, votre Rapporteur spécial suggère d'explorer sérieusement l'hypothèse de la création, de façon pérenne au sein du programme Gendarmerie nationale, d'une action « Gendarmeries des transports et lutte contre l'immigration irrégulière » assortie d'indicateurs symétriques de ceux de la police (coût moyen d'une rétention en CRA gendarmerie, nombre d'éloignements effectifs, nombre d'interpellations d'aidants).

CHAPITRE VII

LES MISSIONS MILITAIRES DE LA GENDARMERIE POSENT LA QUESTION DE LA CHARGE DES ACTIVITÉS HORS DE LA MÉTROPOLE

Les sujétions qu'impose à la gendarmerie son statut militaire constituent un enjeu quotidien et important ; sans remettre en cause ces missions hors de France continentale, c'est-à-dire en Corse, outre-mer ou sur les théâtres d'opérations extérieures - en « OPEX » -, il faut les quantifier et les analyser aussi précisément que possible. C'est par convention qu'elles sont regroupées ici, mais cette convention est partagée par tous les observateurs car elle correspond à une réalité : rendre les forces qui y concourent durablement indisponibles pour les missions de maintien de l'ordre, de sécurité générale, de police judiciaire ou de sécurité routière dans les 94 départements de France continentale.

I.- LES MISSIONS HORS DE MÉTROPOLE ET EN CORSE REPRÉSENTENT UN POIDS IMPORTANT POUR LA GENDARMERIE MOBILE

A.- UNE MOBILISATION QUI N'A PAS FLÉCHI EN 2005

En 2004, l'équivalent de 24 escadrons de gendarmerie mobile ont été quotidiennement déplacés en outre-mer, en OPEX et en Corse.

L'année 2004 a été marquée par l'engagement d'un escadron en Haïti pendant une durée de quatre mois, par la montée en puissance du dispositif de la gendarmerie mobile à 4 escadrons en Côte-d'Ivoire en fin d'année (octobre et novembre), et le renforcement du dispositif mis en œuvre en Polynésie française (4 escadrons de d'octobre 2004 à février 2005 au lieu de 2 en temps normal)

Au 30 juin 2005, 23 escadrons ont été quotidiennement engagés sur l'ensemble de ces missions. Sont temporairement revenus à 2 escadrons les dispositifs de la Polynésie française de la Côte-d'Ivoire, mais dans ce dernier cas la situation est par nature très évolutive et un troisième escadron a dû récemment être déployé de nouveau.

Or sur les 123 escadrons de gendarmerie mobile, on peut estimer que 70 sont effectivement opérationnels à un instant T. Par conséquent, la proportion de missions militaires considérée comme représentant 4 à 5 % du total de l'activité de la gendarmerie cache en fait, ponctuellement, et pour les forces mobiles tout particulièrement, de réelles tensions sur les effectifs.

B.- UN ENGAGEMENT MONDIAL

La carte suivante illustre l'engagement temporaire des gendarmes hors du territoire national :

graphique
Source : Mémo Gend 2005, avec l'aimable autorisation du SIRPA Gendarmerie.

Si l'on agrège les missions temporaires en OPEX ou assimilées et les missions permanentes dans les ambassades, en qualité d'attaché de sécurité intérieure, les personnels détachés ou encore les missions de coopération, ce sont au total, au gré des roulements, 1.000 à 1.500 militaires que la gendarmerie a déployés en 2004 dans le monde. Au 31 décembre 2004, ils étaient 1.297, dont 153 officiers.

II.- DES MISSIONS VARIÉES ET SPÉCIALISÉES

A.- LE COMMANDEMENT DE LA GENDARMERIE OUTRE-MER

Créé le 5 janvier 1990, le commandement de la gendarmerie outre-mer est un état-major du niveau « Région de gendarmerie » qui administre les formations implantées dans les départements, les collectivités départementales ou territoriales et les territoires d'outre-mer. L'ensemble des formations de l'outre-mer représente 166 brigades, 22 groupes de commandement compagnie et 2 postes permanents. 

En outre, 15 escadrons de gendarmerie mobile et deux état-majors de groupement de gendarmerie mobile sont déployés en permanence en renfort des unités territoriales avec le maintien de l'ordre public et le renfort de sécurité publique générale pour missions.

 Le commandement de la gendarmerie outre-mer administre également les militaires en opérations extérieures servant dans les unités prévôtales et désigne les personnels affectés en ambassade. Le service de la prévôté consiste à exercer la police administrative générale et la police judiciaire aux armées, dans le cadre du code de procédure pénale et du code de justice militaire.

Enfin, le Groupement des opérations extérieures lui est rattaché, qui administre les 52 officiers et sous-officiers de cette unité en plein développement avec la formation de l'état-major de police européenne.

B.- LA FORCE DE GENDARMERIE EUROPÉENNE, INITIATIVE FRANÇAISE

Spécialisée dans la gestion des phases de sortie de crises, la Force de gendarmerie européenne, proposée par le ministre français de la défense durant la présidence néerlandaise en septembre 2004, regroupe 5 pays européens : la France, les Pays-Bas, l'Espagne, le Portugal et l'Italie. Elle répond aux objectifs qui consistent à disposer d'une capacité extérieure de gestion de crise, à renforcer nos capacités de commandement interarmées et interalliées et à optimiser l'emploi des forces mobiles de la gendarmerie nationale, objectif majeur du programme « Gendarmerie nationale ».

Ce réservoir de forces rapidement déployables sur les théâtres d'opérations, avec une capacité initiale de projection de 800 hommes dans un délai de 30 jours, couvrira un spectre très large d'activités de police : maintien de l'ordre, sécurité publique, police judiciaire, lutte antiterroriste, recherche et exploitation du renseignement. Il s'agit de contribuer à la mise en place de mesures de sécurité, principalement durant la phase de transition d'un environnement militaire opérationnel à un environnement civil, afin de préparer et soutenir la reconstruction des pays concernés.

14 () Doc. AN n° 1098, octobre 2003.

15 () Loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001.

16 () Ces indemnités ont été théoriquement calculées pour tenir compte de la consommation en carburant, de l'entretien et de l'amortissement des véhicules. Toutefois, le montant fixé par arrêté du garde des sceaux en date du 15 juin 1993 ne couvre pas l'ensemble des dépenses de ce type. La revalorisation de l'indemnité kilométrique est un sujet abordé de façon récurrente par la gendarmerie sans qu'il ait été donné de suite favorable à ce jour.

17 () Qui a instauré le juge de la liberté et de la détention mais aussi de nouveaux recours juridictionnels (appel devant une juridiction nationale de la libération conditionnelle pour une décision rendue par la juridiction régionale de la libération conditionnelle, appel devant la chambre des appels correctionnels contre une décision prise par le juge d'application des peines, appel en matière criminelle conduisant aux transfèrements éventuels des accusés vers une nouvelle chambre criminelle de la Cour de cassation chargée de réexaminer le dossier).


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