COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 2

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 9 juillet 2002
(Séance de  15 heures)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Audition, ouverte à la presse, de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, de M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, de Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, et de Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, et Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que cette audition constituait une première prise de contact avec les ministres ainsi qu'un tour d'horizon des dossiers dont ils ont la charge et qu'elle ne portait pas sur le projet de loi créant un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes qui ferait l'objet d'un rendez-vous spécifique avec M. François Fillon.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que la France sortait d'une période électorale révélatrice des tensions et des doutes ainsi que des attentes et des espoirs qui parcourent le pays, le modèle français apparaissant brutalement comme grippé.

Le moteur économique français peine à donner toute sa mesure, il est en réalité marqué par un triple handicap : une culture nationale peu propice à l'initiative, caractérisée par un différentiel insuffisamment marqué entre les revenus du travail et ceux de l'assistance ; une pesanteur administrative et une pression fiscale supérieure à la moyenne ; un taux d'activité concentré sur une classe d'âge excluant une partie des jeunes et des salariés âgés.

Le modèle social français se délite et les responsables politiques se trouvent placés devant une situation d'urgence chronique. La plupart des dispositifs qui caractérisent notre modèle social se trouvent, notamment en période de faible croissance, dans une situation de vulnérabilité.

Le pacte républicain s'étiole sous les effets d'un affaiblissement du civisme et du blocage de l'ascenseur social. Deux exemples caractérisent cet état de fait : l'intégration qui est en panne et la promotion sociale qui demeure quasi inexistante. A plus de 80 %, la trajectoire scolaire, professionnelle ou salariale des enfants issus de milieux ouvriers ou employés reste identique à celle des parents.

Pour susciter la nouvelle donne qui est nécessaire deux leviers doivent être actionnés :

- Le premier est celui de la démocratie locale qui doit être comprise comme un moyen de redistribution du pouvoir d'initiative et de rénovation de l'Etat en invitant celui-ci à repenser son rôle et ses méthodes. A cet égard, l'approfondissement de la décentralisation ne constitue pas une simple mesure technique mais l'instrument d'un projet de société destiné à moderniser notre organisation et à réajuster nos comportements collectifs et individuels. La question sociale ne doit pas échapper à ce mouvement de désenclavement. La formation, les aides à l'emploi et au développement économiques, l'exclusion, l'action sociale, la politique de la ville comme la santé sont des dossiers pour lesquels il y a lieu d'explorer le champ d'une réactualisation de nos stratégies et de nos outils. Cette réactualisation ne saurait cependant rompre le principe d'égalité qui est au c_ur du pacte social mais doit conférer à ce principe plus d'efficacité à travers des politiques plus personnalisées et plus réactives.

- Le second levier est celui de la démocratie sociale. Jamais les Français n'ont été aussi avides de participation et, parallèlement, jamais les corps intermédiaires n'ont été aussi peu respectés par les pouvoirs publics. Cette absence historique de lieux de concertation sociale place l'Etat et les citoyens dans une situation de face à face qui conduit les partenaires sociaux, parfois malgré eux, à préférer la contestation à la concertation. La démocratie sociale dépendra d'une double clarification portant sur l'articulation de la loi et du contrat et, d'autre part, sur les conditions du dialogue social et les modalités qui régissent la validité des accords. Sur ce point précis, il existe une position commune co-signée par la CFDT, la CFTC, FO, la CGC et les principales organisations patronales. Le Gouvernement dialoguera avec les partenaires sociaux sur cette base.

L'élan de la réforme ne se conçoit pas sans le préalable nécessaire que constitue l'institution d'un climat de confiance avec les partenaires sociaux. Ce climat de confiance peut être fondé sur le respect mutuel et la transparence des objectifs, notamment gouvernementaux.

Dans la perspective du développement d'une méthode de travail, les partenaires sociaux se sont vus proposer des groupes de travail constitués autour de quatre thèmes :

- l'emploi ;

- la formation ;

- les conditions du dialogue social ;

- les retraites.

Ces discussions, qui ont commencé, se déroulent selon un calendrier précis. Les décisions qui seront prises à l'issue de cette concertation devront, en tout état de cause, être fidèles aux engagements pris par la majorité.

Ces engagements s'articulent autour de deux axes principaux.

Le premier axe est celui du retour à une croissance forte, durable, mieux partagée et plus riche en emplois.

Dans cette perspective trois dossiers sont prioritaires :

- L'entrée des jeunes sur le marché de l'emploi.

Le chômage des jeunes a progressé de 15 % en un an, il s'établit au double de la moyenne nationale et même à plus de 30 % pour les jeunes sans qualification. Au prochain Conseil des ministres, sera présenté un projet de loi créant un contrat sans charge pour les jeunes de 16 à 22 ans. Ce projet sera examiné en première lecture par le Sénat, puis par l'Assemblée nationale avant la fin du mois de juillet. Le dispositif se concentrera sur les jeunes peu qualifiés et le soutien de l'Etat sera ciblé sur les embauches à contrat à durée indéterminée. Il sera assuré pendant trois ans de façon dégressive lors de la dernière année ; l'employeur n'aura à payer aux jeunes que son salaire sans avoir à verser de charges patronales. Ce dispositif s'articulera avec les mesures éprouvées que sont les formations en alternance et l'apprentissage, il offrira un débouché concret aux jeunes engagés dans un parcours d'insertion. Cette ouverture vers le secteur concurrentiel prendra, pour les jeunes les moins formés, le relais des emplois-jeunes qui devront voir leur champ se resserrer.

- Le second dossier est celui du SMIC et des bas salaires.

Près de 2,6 millions de personnes sont rémunérées au SMIC qui, plus qu'une variable technique, constitue un symbole. Aujourd'hui, l'existence de cinq, et bientôt six, SMIC différents fait que celui-ci ne joue plus son rôle de référent économique et social. Cette situation kafkaïenne résulte de la mise en place des 35 heures qui, par la différence des conditions de rémunération, réservées aux salariés selon qu'ils bénéficient ou non du dispositif, entraîne une déclinaison inéquitable du salaire minimum. Tous les partenaires sociaux dénoncent cette situation préjudiciable à la lisibilité du dispositif. Dans ces conditions, le Gouvernement n'a pas estimé possible de donner un coût de pouce au SMIC au mois de juillet. En revanche, le Premier ministre a saisi le Conseil économique et social en lui demandant de dresser l'inventaire des solutions permettant la rationalisation des SMIC. Le schéma d'harmonisation ainsi déterminé servira de base de discussion avec les partenaires sociaux avant l'automne. Deux positions s'expriment dans ce domaine, l'une redoutant l'augmentation excessive du coût du travail, l'autre réclamant une augmentation du SMIC unifié « vers le haut ». Les deux parties présentent chacune des arguments recevables. Il faut donc concilier un double objectif. Le premier est celui de la compétitivité, par le biais d'un assouplissement des 35 heures, une meilleure configuration des baisses des charges pesant sur les entreprises, un bilan de la loi de modernisation sociale qui n'a fait l'objet d'aucune concertation avec les partenaires sociaux. Le second objectif est celui de l'amélioration progressive du pouvoir d'achat qui participe au dynamisme de l'économie ainsi qu'à la valorisation du travail au regard des revenus de la solidarité.

- Le troisième dossier est celui de l'assouplissement des 35 heures.

La durée légale du travail ne sera pas remise en cause mais les 35 heures seront assouplies. Il s'agit d'introduire du pragmatisme dans le dogmatisme. Le dialogue est engagé avec les partenaires sociaux qui ont tous établi le même diagnostic sur les rigidités du dispositif actuel ainsi que ses conséquences en termes d'évolution salariale et de flexibilité accrue faute d'autres marges de man_uvre dans certaines entreprises. Dans ce domaine, deux approches sont possibles : l'une ciblée sur la seule question des heures supplémentaires ; l'autre, plus vaste, intégrant les aspects multiples de la réduction du temps de travail. Cette réflexion doit être élargie à des modalités plus décentralisées et contractuelles de la négociation sur l'adaptation des 35 heures mais aussi aux garde-fous qui dissuaderont des éventuels abus et dérapages. Au terme de la concertation, le Gouvernement souhaite concrétiser sa décision avant la fin de l'automne. L'adaptation des 35 heures doit être combinée avec la perspective d'allègements des charges. La poursuite des allègements se traduira par une clarification des mécanismes au profit d'une maîtrise du coût du travail à un niveau comparable à celui observé chez nos principaux partenaires européens.

Ces trois dossiers prioritaires seront au service de la relance de la croissance. Cette dernière dépend des valeurs que constituent le travail considéré comme une source d'épanouissement personnel et d'enrichissement collectif ainsi que l'effort et, a fortiori, le mérite.

Le deuxième axe est celui du renforcement du pacte social et républicain, socle de l'unité nationale. Le progrès repose sur ce socle et doit être partagé. En effet, les forces de la mondialisation doivent être régulées notamment par une Europe plus forte. Le Gouvernement a saisi le Conseil économique et social afin de l'interroger sur les pistes permettant d'enrichir la dimension sociale de l'Union et de favoriser l'articulation entre le dialogue social national et européen. Cependant les partenaires européens ne savent se convaincre que de principes efficients. Or, le pacte républicain et social français s'essouffle et mérite donc une réactualisation.

L'accent sera mis sur trois dossiers qui participent du modèle social français.

- Le premier dossier est celui de la démocratie sociale.

Le Gouvernement prendra des initiatives sur ce dossier, vers le premier trimestre de l'année 2003. La réflexion menée préalablement avec les partenaires sociaux concernera les conditions de validité des accords, l'articulation entre la loi et les accords, la définition de « l'espace infralégislatif » et des niveaux de négociation, ainsi que le rôle et les moyens de fonctionnement des organisations syndicales.

- Le deuxième dossier est celui des retraites.

Les nombreux rapports sur ce dossier n'ont été qu'un alibi à l'inaction. Le Gouvernement ne demandera pas de rapport supplémentaire et mettra en _uvre un processus de réforme visant à maintenir le système par répartition au c_ur du pacte républicain. S'agissant d'un système aussi complexe, le processus de réforme s'inscrira sur le temps long.

Il faut s'efforcer de nouer, avec les Français comme avec les partenaires sociaux, un pacte national pour garantir l'avenir des retraites, pacte inspiré par trois grandes orientations : la sécurité, c'est-à-dire garantir un revenu aux futurs retraités, l'équité, qui signifie chercher l'équilibre entre les salariés du privé et ceux du public, en prenant également en compte la nature des parcours individuels et professionnels, en intégrant par exemple la pénibilité, et enfin, la liberté, c'est-à-dire la faculté ouverte à tous de poursuivre son activité après soixante ans. Cette liberté de choix n'a de sens que si la société française accepte de relever le double défi de l'emploi des salariés de plus de cinquante-cinq ans et la place des seniors dans notre société.

Il a été précisé aux partenaires sociaux qu'il fallait aboutir, sur ce sujet, à une première étape dans le courant du premier semestre 2003, ce qui suppose la prolongation de la convention relative à l'Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF), qui expire au 31 décembre 2002.

- Le troisième dossier est celui de la formation

La formation offre aux femmes et aux hommes le choix de l'autonomie personnelle, de l'excellence professionnelle, de la protection et de l'employabilité. Elle est l'ascenseur social de la nouvelle société de la connaissance. Il faut que les partenaires sociaux dégagent sur ce sujet, au carrefour de la compétitivité et de la solidarité, des solutions consensuelles et efficaces.

La complexité du système et la mise en place tardive de la validation des acquis professionnels expliquent un bilan en-deçà des espoirs affichés. Trois objectifs présideront à la réforme du système : la clarification, la décentralisation et la mise en place de la formation tout au long de la vie.

Il s'agit d'offrir à chacun un droit individuel à la formation professionnelle et à l'adaptation à l'emploi et de doter chaque salarié d'un capital-temps et d'une enveloppe financière. Ce projet doit être dès à présent préparé pour être concrètement formalisé durant la législature.

Si ces trois grands chantiers décideront de la force du pacte social, d'autres dossiers essentiels appellent une approche et des mesures nouvelles :

- Le dossier de l'intégration est extrêmement important. L'intégration doit devenir un atout de la République et non plus une fracture.

- La vie associative, riche de 1,6 million de personnes, contribuera à construire la société participative que le Gouvernement appelle de ses v_ux. Ce renforcement passe par la mise en place du contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), destiné aux jeunes qui s'engagent dans l'expérience associative.

- La relance de la politique de la ville, menée par M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, passe par une stratégie de l'Etat mieux ciblée et par une décentralisation accrue.

- Le défi que devra relever Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, consistera à dépasser le concept de parité pour s'orienter vers l'égalité concrète entre les hommes et les femmes.

- Dans la lutte contre l'exclusion, confiée à Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, il convient d'améliorer la coordination et mettre l'accent sur les valeurs de c_ur et de dignité.

- Enfin, en ce qui concerne la politique consacrée aux personnes âgées qui est de la responsabilité de M. Hubert Falco, il faut reconsidérer certains des facteurs structurels de notre vie sociale. En particulier, les conséquences insuffisamment anticipées de la montée en charge rapide de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) devront être analysées et discutées en concertation avec les présidents des conseils généraux.

Après l'exposé du ministre, le président Jean-Michel Dubernard a évoqué les conclusions du quatrième audit des finances publiques mené depuis 1981. Ses auteurs, MM. Bonnet et Nasse, ont d'une part critiqué l'opacité des comptes sociaux et d'autre part remis en cause la légitimité même de la procédure de l'audit financier, en s'interrogeant sur les rôles respectifs du Parlement et de la Cour des comptes. D'une manière générale, un contrôle parlementaire accru des comptes publics est nécessaire, ce qui a été en partie entrepris par la création de la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) au sein de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. Il convient maintenant de s'interroger sur le contrôle des comptes sociaux qui demeure lacunaire et auquel la commission des affaires sociales pouvait utilement contribuer avec l'aide de la Cour des comptes.

M. Bernard Perrut, notant que le chômage des jeunes conduit très souvent à la précarité et à l'exclusion, s'est réjoui du prochain dépôt du projet de loi visant à favoriser l'emploi des jeunes dans les entreprises. Il a souhaité poser deux questions à Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion :

- Comment évalue-t-elle l'accueil des jeunes en difficulté par les missions locales ? Comment simplifier les procédures ?

- S'agissant de la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU), il existe un fort effet de seuil qui donne à certains un grand sentiment d'injustice et peut même, dans certains cas, encourager l'inactivité. Des réformes sont-elles envisagées ?

M. Jean-Marie Geveaux a relevé que si l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) rencontrait un grand succès, son avenir était incertain car le nombre de ses bénéficiaires avait été sous-évalué, ce qui va probablement conduire les conseils généraux à augmenter les impôts. En outre, il faut se pencher sur la situation des personnes en établissement qui percevaient la prestation spécifique dépendance (PSD) et qui avec l'APA ont à verser une participation financière plus élevée.

M. Michel Herbillon, après avoir observé que la loi sur la réduction du temps de travail s'était traduite par de nombreuses rigidités et avait eu des conséquences salariales importantes et néfastes pour les salariés, s'est enquis du calendrier et de la méthode que comptait suivre le Gouvernement pour mettre en place les nécessaires assouplissements de cette législation. Ces adaptations sont, en effet, très attendues par les salariés comme par les chefs d'entreprise notamment ceux des petites et moyennes entreprises.

M. Gaétan Gorce a souligné le décalage qui est rapidement apparu entre les intentions, très louables, affichées par le Gouvernement et ses premières décisions. La non-revalorisation du SMIC au-delà des obligations légales au 1er juillet en a été la première illustration. En effet, sur ce sujet, la volonté de concertation a été écornée par des annonces préalables à la réunion de la commission nationale de la négociation collective. De même, la conception du projet de loi portant création du dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise n'a apparemment fait l'objet d'aucune concertation avec les partenaires sociaux. Il semble aussi que la mise en _uvre de ce nouveau dispositif se réalisera sans recours à la négociation collective ni dans les entreprises ni dans les branches.

Le flou demeure tant en matière de pouvoir d'achat - alors que les premières mesures sur le SMIC ne sont pas porteuses d'espérance - que sur la question centrale des bas salaires. En réalité, les seules mesures concrètes qui ont été annoncées semblent être essentiellement guidées par la volonté du Gouvernement actuel d'opérer des retours en arrière par rapport aux progrès réalisés par la précédente équipe. Dans ce contexte, on peut même s'inquiéter de l'éventuelle volonté du Gouvernement de remettre en cause le mécanisme des exonérations sociales prévues pour la mise en _uvre des trente-cinq heures, ou de mettre en place une véritable déréglementation des heures supplémentaires. De même, il faut s'interroger sur le souhait du Gouvernement de mettre fin aux emplois-jeunes, alors que le chômage des jeunes a tendance à augmenter fortement depuis des mois.

En conclusion, il faut espérer que le ministère de l'emploi ne sera pas celui du moins-disant social et ne se contentera pas de discours certes généreux mais sans lien avec la réalité des actes.

En réponse aux intervenants, M. François Fillon a apporté les précisions suivantes :

- On ne peut que souhaiter que le Parlement se dote de moyens de contrôle plus importants s'agissant des comptes sociaux. Il s'avère que le contrôle des dépenses en cette matière est structurellement plus difficile à assurer que sur les dépenses budgétaires. La tâche est rendue d'autant plus difficile que les mécanismes de financement, notamment ceux prévus par les trente-cinq heures, apparaissent toujours plus opaques. A l'opacité s'ajoute l'imprévision : il faut relever en effet que le financement du FOREC n'est pas assuré pour 2003. Toutefois, le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale, par le rendez-vous annuel qu'il instaure avec les parlementaires, a constitué une avancée importante.

- L'engagement a été pris d'assouplir la législation sur les trente-cinq heures en augmentant notamment le contingent des heures supplémentaires. Une large concertation avec les représentants des organisations syndicales comme patronales aura lieu cet été afin de parvenir à une solution efficace pour faire converger les différents niveaux entre le SMIC et les garanties mensuelles de rémunération (GMR). La résolution de cette difficile question se traduira nécessairement par une augmentation du coût du travail, ce qui impliquera probablement la nécessité d'une intervention de l'Etat pour la rendre supportable aux entreprises dans cette période de transition.

En septembre la commission nationale de la négociation collective sera à nouveau réunie et les mesures législatives adéquates pourraient être présentées par le Gouvernement à l'automne. Cependant, en aucun cas l'assouplissement de la loi sur les trente-cinq heures ne conduira à une dérégulation, d'une part parce qu'il subsistera toujours un plafond pour l'utilisation des heures supplémentaires et d'autre part, parce que la mise en _uvre de ces nouvelles dispositions seront renvoyées à la négociation entre les partenaires sociaux.

- Reprocher au Gouvernement d'avoir fixé le niveau du SMIC sans tenir compte des avis des partenaires sociaux relève de la « tartufferie ». Dans le contexte de l'application de la loi sur les trente-cinq heures, le gouvernement actuel n'avait pas d'autre choix que de renoncer à procéder à un coup de pouce car une telle démarche aurait abouti à rendre la nécessaire convergence encore plus difficile. D'ailleurs le gouvernement précédent était bien conscient de cette difficulté puisqu'il n'a pas accordé de coup de pouce en 1999 et en 2000 et n'a concédé qu'un coup de pouce de 0,29 % en 2001.

- Contrairement à ce que certains membres de l'opposition laissent entendre, il n'est nullement dans l'intention du Gouvernement de revenir sur le doublement de la prime de licenciement économique prévu par la loi de modernisation sociale. En revanche, ce texte comporte des dispositions qui ont véritablement créé des problèmes et des complications excessives pour les entreprises. On peut citer notamment l'ensemble des dispositions qui ont abouti à rallonger de manière démesurée les délais en matière de procédures de licenciements économiques collectifs. Certains employeurs préfèrent actuellement déposer le bilan de leur entreprise plutôt que de mettre en _uvre les nouvelles règles issues de la loi précitée.

- Le programme des emplois-jeunes n'a pas présenté que des inconvénients mais il s'est adressé trop souvent à des jeunes qui disposaient déjà d'une formation. De plus, il a été exclusivement centré sur le secteur public et le problème de la sortie du dispositif reste entier. Le Gouvernement honorera les engagements qui ont été pris, y compris ceux qui l'ont été ces derniers mois, puis il cherchera le moyen de continuer à fournir aux associations l'aide dont elles ont besoin, à financer les besoins apparus dans l'éducation nationale et à permettre aux jeunes bénéficiaires qui le souhaitent de préparer dans les meilleures conditions possibles les concours de la fonction publique.

- Le projet sur l'emploi des jeunes a fait l'objet d'une concertation avec les organisations syndicales et patronales. Ceux-ci ont, par exemple, formulé des remarques sur la durée du contrat ou sur la taille des entreprises éligibles. D'une manière générale, le Gouvernement doit sur tous les sujets sensibles concilier l'impératif de la concertation avec la nécessité et l'urgence de l'action.

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, a rappelé que, au-delà des professionnels, la société dans son ensemble devait être consciente de l'existence de l'exclusion qui est un symptôme particulièrement grave quand il touche les jeunes. Ceux-ci, en état de souffrance psychique, ne peuvent se projeter dans l'avenir en raison de la rupture des liens sociaux, professionnels, culturels, affectifs et de difficultés de logement. L'exclusion est ainsi un phénomène global qui nécessite un accompagnement humain particulier pour que puisse être engagé un processus d'insertion.

Pour cela, il est indispensable de simplifier les démarches et les procédures existantes car en raison de leur trop grande complexité elles constituent un facteur d'exclusion supplémentaire. D'ailleurs les acteurs sociaux de la lutte contre l'exclusion eux-mêmes ont des difficultés à les utiliser. Des projets expérimentaux qui lient insertion et accompagnement seront mis en place car on ne peut pas répondre à l'exclusion uniquement pas des procédures. Il faut sauver le capital humain par un accompagnement humain.

S'agissant de la couverture maladie universelle, le problème majeur de l'effet de seuil qui est un défaut structurel de la loi, n'a pas reçu de solution satisfaisante par le dispositif d'action sociale des caisses d'assurance maladie. La proposition de créer un crédit d'impôt doit être mise à l'étude, en se basant notamment sur le récent rapport de l'IGAS concernant la CMU, mais le Gouvernement n'a pas encore arrêté sa position sur ce sujet.

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, a indiqué que l'enjeu de la politique à l'égard des personnes âgées était triple : démographique (elles représentent déjà 20 % de la population et 30 % d'ici 2040), social et financier. L'APA qui permet de répondre à de véritables besoins se traduit toutefois par une dérive financière difficile à gérer. La montée en charge du dispositif a été plus rapide que prévue : en juin, 618 000 demandes ont déjà été enregistrées et 285 000 décisions favorables rendues. Cela confirme le caractère irréaliste des prévisions de dépenses, déjà dénoncé par l'opposition d'alors lors du vote de la loi.

Les départements doivent non seulement faire face au surcoût financier du dispositif mais aussi recruter du personnel supplémentaire pour traiter les dossiers. Un bilan complet du dispositif doit être ainsi réalisé d'ici la fin du mois d'août en collaboration avec les présidents de conseils généraux, pour identifier les problèmes à traiter : la sauvegarde des finances départementales, l'augmentation du coût des séjours en établissements et les difficultés d'accès à la profession d'auxiliaire de vie.

Un autre problème particulier doit effectivement être réglé rapidement : il s'agit du cas d'anciens bénéficiaires de la PSD en établissement qui ont vu leurs charges financières augmenter avec l'entrée en vigueur de l'APA, du fait de la mise en place concomitante du nouveau mode de tarification des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Cela concerne 30 000 personnes sur les 135 000 bénéficiaires de la PSD, pour un surcoût pouvant atteindre individuellement 300 euros. Conformément à l'article 19 de la loi, le montant total de ce surcoût, estimé à 36 millions d'euros, sera compensé aux bénéficiaires.

Le mécanisme de compensation envisagé par le précédent gouvernement n'étant pas opératoire, le nouveau gouvernement a décidé de mettre en place un dispositif simplifié, encore en cours de formalisation. Ce dispositif devrait s'articuler en trois niveaux : une évaluation du montant à compenser par département, la répartition entre les départements d'une dotation qui sera inscrite au budget de l'Etat et le versement de la compensation financière par le département aux établissements hébergeant les personnes concernées, en contrepartie de la signature d'une convention.

M. Jean-Paul Anciaux a souligné que la réforme de la formation professionnelle était un levier important de la lutte contre le chômage et que l'objectif de favoriser la formation tout au long de la vie était un projet majeur à concrétiser rapidement, en concertation avec les partenaires sociaux. Ceux-ci ont pour mandat de représenter l'ensemble des salariés et entreprises et il faudra de ce point de vue veiller à éviter les inégalités de formation entre grandes entreprises et PME dont tant les moyens que les objectifs diffèrent.

M. Claude Evin a souhaité connaître le calendrier précis des groupes de travail avec les partenaires sociaux qui ont été créés par le Gouvernement, car certains de ces travaux devraient déboucher sur une intervention du législateur. Il a également souhaité savoir si le nouveau Gouvernement envisageait de consolider les outils déjà mis en place dans le cadre de la réforme des retraites, à savoir le Conseil d'orientation des retraites (COR) qui a déjà permis d'avancer sur le sujet, et le Fonds de réserve pour les retraites qui doit encore être abondé.

Après avoir rappelé son attachement au dispositif du RMI qu'il avait soutenu lors de son adoption en 1988, M. Georges Colombier a regretté que le volet insertion de celui-ci soit trop souvent négligé.

Il a posé les deux questions suivantes :

- Quelles mesures la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, Mme Dominique Versini, compte-t-elle prendre afin de renforcer ce volet insertion du RMI ?

- Quelles mesures le secrétaire d'Etat aux personnes agées, M. Hubert Falco, compte-t-il prendre afin de favoriser la prise en charge des personnes de moins de soixante ans atteintes de maladies fortement invalidantes - de type Alzheimer ?

M. Pascal Terrasse a indiqué qu'il ne partageait qu'en partie le diagnostic dressé, lors de son intervention, par M. François Fillon. Les propositions avancées par le ministre portent en elles une remise en cause profonde des avancées sociales effectuées par le gouvernement précédent, notamment dans quatre domaines : la loi sur les 35 heures, la loi de modernisation sociale, l'allocation personnalisée d'autonomie ainsi que les pensions de retraite des fonctionnaires.

Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, a insisté sur la nécessité de développer le « I » - insertion - du RMI, sans toutefois apporter plus de précision. Quelles orientations le Gouvernement entend-il donner au volet insertion du RMI, avec quel contenu et selon quel calendrier ?

Mme Muguette Jacquaint a posé les questions suivantes :

- Le Gouvernement souhaite réduire le dispositif « emploi-jeunes » mis en place par le précédent gouvernement. Dans quels secteurs ces réductions vont-elles être effectuées. Le secteur associatif sera-t-il épargné ?

- Les personnes ayant cotisé quarante annuités pourront-elles bénéficier d'une retraite à taux plein dès l'âge de 60 ans ?

M. Denis Jacquat a posé les questions suivantes :

- Quelle est la position du gouvernement sur la mise en place d'un « cinquième risque » comme alternative à l'APA ?

- Quelles sont les grands axes de la politique de la ville qu'entend mener ce Gouvernement ?

En réponse aux intervenants, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a donné les indications suivantes :

- Les groupes de travail sur la formation professionnelle ont commencé à fonctionner depuis quelques semaines. Il ressort clairement de leurs travaux que la reprise à l'automne des négociations entre partenaires sociaux est tout à fait envisageable. Il serait judicieux que le projet de loi relatif à la régionalisation devant être présenté à l'automne intègre des dispositions concernant la formation professionnelle.

- Le calendrier des priorités sociales du Gouvernement est le suivant : outre la présentation du projet de loi portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en juillet, des négociations seront ouvertes à l'automne sur la formation professionnelle et la convergence des différents SMIC, en janvier 2003 sur la démocratie sociale et avant la fin du premier semestre 2003 sur les retraites.

- En ce qui concerne le fonds de réserve des retraites, il est aujourd'hui abondé à hauteur de 8,4 milliards d'euros, ce qui est insuffisant. Le Gouvernement s'attachera à assurer son bon fonctionnement - le conseil de surveillance et le directoire seront constitués prochainement à cet effet - ainsi que son alimentation grâce aux recettes exceptionnelles tirées de l'ouverture du capital de différentes entreprises publiques.

- Le Conseil d'orientation des retraites est utile pour l'information mutuelle des partenaires sociaux. Il ne peut être un instrument de concertation.

- Les dispositifs d'insertion du RMI doivent faire l'objet d'une décentralisation afin de donner plus de responsabilités aux acteurs locaux.

- 80 % des bénéficiaires d'emplois-jeunes ont actuellement un niveau d'études supérieur au bac : ils ne correspondent donc pas à la population visée par le projet de loi sur l'emploi des jeunes qui sera présenté prochainement par le Gouvernement. Quant à l'avenir des emplois-jeunes en tant que tels, il est évident que le dispositif ne sera pas pérennisé de manière globale. Les collectivités territoriales devraient pouvoir intégrer dans leurs budgets, sans difficultés majeures, les coûts correspondants aux emplois-jeunes auxquels elles ont eu recours ces dernières années. Ce n'est pas le cas des associations.

- Le versement d'une pension à taux plein pour les personnes de moins de soixante ans possédant leurs cent soixante trimestres de cotisations sera un des éléments d'une négociation globale sur les régimes de retraite comportant de nombreuses variables.

- Le Gouvernement n'envisage pas de créer un cinquième risque.

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, a indiqué que les modalités de prise en charge spécifique de la maladie d'Alzheimer feraient l'objet d'une concertation afin de tenir compte de l'avis de tous les acteurs locaux. Il s'agit, en la matière, d'accroître le nombre de places disponibles mais également d'assurer un véritable accompagnement, notamment des familles.

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, a déclaré que la réflexion sur le RMI étant en cours, il était encore beaucoup trop tôt pour décrire un nouveau dispositif de revenu minimum d'activité.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a rappelé que le champ d'intervention de la politique de la ville s'était considérablement étendu depuis quelques années, pour passer de 80 à quelques 400 quartiers. Parmi ceux-ci cependant, 150 quartiers sont en très grande difficulté et la sécurité des représentants des pouvoirs publics n'y est plus assurée. Pourtant, ces quartiers sont porteurs d'un fort potentiel de développement : un tiers de la population résidente a moins de vingt ans et, contrairement à l'image d'exclusion sociale couramment véhiculée, de nombreux habitants disposent d'un bon niveau de formation professionnelle.

Il convient donc d'abandonner la politique de rustines qui caractérise la politique de la ville depuis sa création et de mettre la République face à ses responsabilités. Pour cela, trois axes d'action doivent être retenus : rééquilibrer les financements publics entre villes riches et villes pauvres, lutter de façon beaucoup plus efficace contre le surendettement qui sévit très spécifiquement dans les quartiers en grande difficulté et enfin repenser la politique de réaménagement urbain et d'habitat social en faisant notamment cesser les démolitions d'immeuble au coup par coup, qui ne font qu'entretenir le sentiment de dégradation de l'environnement.

Mme Hélène Mignon a formulé les observations suivantes :

- Pour être tout à fait complet sur le bilan des emplois-jeunes, il convient de préciser que 60 % des bénéficiaires ont obtenu un contrat à durée indéterminée à la sortie.

- Les actions d'insertion ne peuvent être identiques pour tous les bénéficiaires du RMI : il est illusoire d'imaginer que des personnes en très grande exclusion pourront par exemple être réinsérées dans la société par un retour immédiat au travail.

- La connaissance de l'exclusion est aujourd'hui réservée aux associations et aux organisations caritatives. La population est très largement ignorante de la situation des plus pauvres, comme en témoignent par exemple les réactions recueillies à Toulouse à la suite de l'explosion de l'usine AZF. Il convient donc de mener prioritairement des actions de sensibilisation du grand public aux problèmes d'habitat et de mixité sociale.

- L'accompagnement du retour à l'emploi est une nécessité quelle que soit la personne concernée, qu'elle soit jeune ou moins jeune, insérée dans la société ou en situation d'exclusion. Cette question avait déjà été largement prise en compte par le programme TRACE. Il serait donc intéressant de savoir ce que le nouveau gouvernement entend proposer de plus.

- Faire de la lutte contre la souffrance des adolescents un axe majeur d'intervention contre la violence des jeunes ne doit pas nous conduire à ignorer le fait que, bien souvent, cette souffrance remonte à la petite enfance, qui doit également faire l'objet d'une grande vigilance.

Mme Chantal Bourragué a estimé que le bilan des zones franches était très positif et souhaité savoir comment, sous quels délais et selon quels critères le Gouvernement envisageait leur extension.

M. Yvan Lachaud a souhaité que les dispositifs de la politique de la ville soient simplifiés car ils ralentissent bien souvent les actions sur le terrain.

Mme Irène Tharin a posé une question sur les projets du Gouvernement en matière d'égalité professionnelle en complément de la loi votée sur ce sujet par la précédente majorité.

M. Jacques Domergue s'est interrogé sur le bilan que l'on peut tirer de l'application de la loi de lutte contre de l'exclusion, votée en 1998, en matière de désendettement et d'accès au logement.

Mme Catherine Génisson, après avoir rappelé que le président de la République, M. Jacques Chirac, s'était opposé, lors de la précédente législature, à l'inscription du principe de parité dans la Constitution, s'est réjouie de la nomination d'une ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, tout en remarquant que cette appellation ne couvrait pas tous les problèmes de droits de femmes, et notamment les problèmes spécifiques d'exclusion, de précarité et de violence dont souffrent les femmes. En effet, si la parité peut être un bon moyen d'assurer l'égalité de représentation des deux sexes dans les instances politiques, elles n'est pas suffisante pour assurer, de façon générale, l'égalité des hommes et des femmes.

Elle a ensuite interrogé la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle sur :

- le non-respect de la loi sur la parité par les grands partis politiques lors des dernières élections législatives,

- les perspectives de représentation paritaire des hommes et des femmes dans les instances sociales nationales,

- son sentiment sur l'absence de désignation par le groupe UMP de femmes pour siéger tant au Bureau de l'Assemblée nationale que dans les bureaux des différentes commissions permanentes.

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle, a tout d'abord souligné que la création d'un tel ministère illustrait la volonté du Premier ministre que les politiques sociales contribuent à accorder une place et une responsabilité accrues des femmes dans la société et plus particulièrement dans le domaine de l'entreprise. On constate en effet non seulement la persistance d'inégalités entre les hommes et les femmes mais également leur aggravation. Cette situation appelle donc des traitements efficaces, sur le plan de l'équité salariale, puisque le différentiel de rémunération entre hommes et femmes est de 25 %, mais plus en amont dans les questions d'orientation scolaire, d'accès au premier emploi ainsi que de parcours professionnel.

Le respect des droits des femmes entre évidemment dans le champ de compétences de ce ministère qui traitera ainsi des problèmes tels que les violences ou l'oppression ou encore la traite des êtres humains. Celle-ci requiert une lutte contre tous les réseaux, notamment mafieux, au nom du simple respect de la dignité de la personne humaine. L'action doit porter tant sur la vie sociale que la vie privée ce qui suppose une réflexion sur les temps de vie, de ville et de travail ainsi que sur l'accès à la formation.

S'agissant de la parité, la référence constitutionnelle n'a pas encore envahi la réalité politique. On assiste cependant à une modification du comportement et des consciences politiques comme le montre l'émergence lors des élections municipales de 2001 d'une génération de femmes particulièrement actives dont les responsabilités seront accrues par les initiatives à venir en matière de décentralisation. La parité est en marche, elle constitue désormais une évolution historique.

L'action en faveur de la parité et de l'égalité professionnelle doit être guidée par trois principes :

- d'abord celui de la transversalité, cette préoccupation doit être intégrée dans l'ensemble des politiques publiques ;

- le dialogue social ensuite, démarche essentielle pour faire évoluer les mentalités.

- l'expérimentation enfin.

Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, a apporté les précisions suivantes :

- L'existence d'une loi spécifique relative à l'exclusion, de dispositifs variés et le travail de nombreuses associations peut contribuer à la formation d'une idée fausse : celle que la question de l'exclusion serait réglée. Force est malheureusement de constater que celle-ci touche toute la société, qu'elle se traduit le plus souvent par une immense solitude d'autant plus difficile à comprendre et à guérir que notre société est très individualiste. Deux mesures sont de nature à améliorer la connaissance de ce phénomène : la première est la création d'un département ministériel spécifique qui reflète de façon symbolique l'importance qui lui est accordée, la seconde est une vaste campagne de sensibilisation tournée notamment vers les chefs d'entreprise et les citoyens.

- Il n'est bien sûr pas question de commencer d'emblée par une démarche d'insertion professionnelle des grands exclus. Il faut travailler à leur réinsertion sociale avant de songer à une insertion économique. A cet effet, le Gouvernement entend créer un réseau de pensions de familles.

- Le phénomène d'exclusion constitue le symptôme d'un mal-être à traiter évidemment le plus en amont possible. Il faut articuler prévention et réparation, en ayant constamment à l'esprit la nécessité d'un traitement humain des situations.

-  Il sera procédé au mois de septembre à l'évaluation des résultats de la loi de 1998 de lutte contre les exclusions, évaluation dont les conclusions seront remises au Parlement à la fin du mois de décembre.

- Il est patent que les questions du surendettement et du logement ne sont pas réglées.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine, a apporté les éléments de réponse suivants :

- Le dispositif zone franche ne fait plus aujourd'hui l'objet de polémiques. Les 44 zones urbaines concernées par ce dispositif ont permis la création de 48 000 emplois. La moitié d'entre elles constituent une totale réussite en ce qu'elles ont permis à la fois des créations d'emploi et une modification profonde de la vie dans ces quartiers. Pour un quart d'entre elles le succès est mitigé sur l'une ou l'autre de ces dimensions, voire les deux. Pour le dernier quart, il s'agit d'un échec.

- Quel est l'avenir d'un dispositif qui a indirectement injecté dans ces quartiers 21 milliards de francs de travaux d'aménagement ? S'agissant des expériences réussies, on se doit à présent de préparer la sortie en sifflet, sur cinq ans, du dispositif. Pour les quartiers dans lesquels un certain retard a été pris mais où des perspectives existent, le dispositif sera réouvert pour deux ans. Enfin, pour le dernier quart, le dispositif sera abandonné. Est par ailleurs envisagée la possible ouverture d'une quarantaine de nouvelles zones, ouverture encore subordonnée à l'accord des institutions communautaires. Les critères d'éligibilité à ce nouveau dispositif seraient à peu près les mêmes si ce n'est que l'on viserait à une plus grande implication du quartier (en passant de 20 % de personnes recrutées dans le quartier à une fourchette de 30 % à 50 %) et à une souplesse accrue du dispositif en travaillant par exemple au niveau de l'agglomération.

- Le système de logement social est aujourd'hui à bout de souffle : l'effort en sa faveur ne représente que 40 % de celui consenti il y a vingt ans et ne porte pas sur les bons endroits.


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