COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 10


(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 24 juillet 2002
(Séance de  15 heures 30)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-François Lamour, ministre des sports

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- Audition, ouverte à la presse, de M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Jean-François Lamour, ministre des sports.

M. Jean-François Lamour a d'abord remercié la commission de le recevoir et a indiqué qu'il comptait sur son aide pour mener à bien ses objectifs et être digne de la confiance qui lui a été accordée par la création, pour la première fois, d'un ministère entièrement dédié au sport et aux sportifs. Cette innovation témoigne de l'importance accordée à ce secteur et le caractère prioritaire des actions qui vont être menées avec tous les acteurs et grâce à la mobilisation des services du ministère des sports. Une certaine inquiétude est née de la séparation de la jeunesse et des sports, elle n'est en aucun cas justifiée. En effet, le ministre des sports disposera de toutes les directions d'administration centrale, à l'exception, évidemment, de celle de la jeunesse, de tous les services déconcentrés et de l'ensemble des établissements à l'exception de l'INJEP qui relèvera du ministère de la jeunesse. Le ministère des sports travaillera avec celui de la jeunesse et avec tous les ministères concernés par son action, aussi bien l'intérieur que les affaires sociales, la santé ou la ville.

Les conditions sont maintenant réunies pour mettre en _uvre une politique des sports mobilisatrice, en veillant au rétablissement de la concertation et du dialogue, en ayant une exigence de méthode : la proximité avec le terrain.

Trois priorités guideront cette politique : rétablir la sécurité, restaurer le dialogue et libérer les énergies.

- Lutter contre la violence et les incivilités dans et autour du sport est la première priorité. Les outils réglementaires mais aussi les moyens matériels doivent être donnés aux clubs pour juguler la violence et faire des enceintes sportives des lieux de convivialité où règne le sentiment de sécurité. Les actions de prévention et de sensibilisation des éducateurs et des sportifs doivent être renforcées quand elles existent ou rapidement mises en place. Pour cela, une lettre, co-signée avec le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), a été adressée à tous les acteurs du monde sportif pour les mobiliser et les services du ministère ont été appelés à accroître leurs actions de lutte contre la violence. Des actions en matière de formation et de sensibilisation seront lancées dès la rentrée à titre expérimental sur au moins deux régions et, après évaluation, elles auront vocation à être renforcées et généralisées.

Il faut insister tout particulièrement sur la fonction d'arbitre. Essentiels pour une bonne pratique sportive, les arbitres sont souvent désemparés face aux comportements violents de certains sportifs, de supporters et quelquefois de parents. Pour faire face à ces dérives, ils doivent être formés. Dans des régions pilotes, le ministère va leur proposer une formation complémentaire spécifique pour gérer ces comportements anormaux quand ils se présentent.

Plus généralement, le mouvement sportif devra s'impliquer plus encore dans la défense des valeurs de respect de l'autre et d'engagement citoyen qu'il incarne. En effet, la pratique sportive doit être le cadre privilégié de l'apprentissage du respect librement consenti de la règle, un instrument de la lutte contre les incivilités et un élément essentiel des contrats locaux de sécurité. Pour atteindre cet objectif, il convient naturellement d'étendre la pratique sportive au plus grand nombre mais dans des structures organisées bénéficiant d'un encadrement toujours mieux formé.

Dans le cadre de la seconde priorité, - restaurer le dialogue - l'Etat et le mouvement sportif organiseront au cours de l'automne des Etats généraux du sport dans l'optique de moderniser le sport français. Ces Etats généraux du sport, initiés par le président de la République, visent à créer les conditions d'un véritable dialogue entre les acteurs du sport français. Ils seront organisés en partenariat étroit avec le CNOSF et leurs travaux, auxquels les parlementaires seront associés, seront organisés autour de six grands thèmes :

- l'avenir du modèle fédéral ;

- le rôle de l'Etat dans le sport ;

- la place du sport professionnel en France ;

- la fonction éducative et sociale du sport ;

- la relation entre le sport et les territoires ;

- le couple sport-santé.

Le sport tricolore a connu, jusqu'à cet été, de grands succès. Ces victoires sont dues à la valeur de nos sportifs mais aussi à la qualité de l'organisation, de la formation et de l'encadrement ainsi qu'au dévouement de milliers de bénévoles. Pour autant, on ne doit pas se cacher les difficultés que traverse actuellement le sport français sous peine de mettre en péril la pérennité de son organisation originale.

Il importe de réaffirmer l'unité du mouvement sportif et d'éviter une césure avec le sport de haut niveau confronté à la pression de l'argent et des médias.

Ces Etats généraux aborderont la question de l'avenir et des modalités de financement public du sport français, dont la spécificité tient au Fonds national pour le développement du sport (FNDS). La contrainte juridique qui doit nécessairement conduire à une évolution du FNDS impose cette réflexion, car avec ses 205,81 millions d'euros en 2002, le FNDS est plus que jamais indispensable au développement du mouvement sportif, en particulier grâce à sa part régionale. Il convient de préserver le caractère paritaire et pour une grande part régionalisé de cet instrument indispensable d'intervention. La simple budgétisation des crédits aujourd'hui mobilisés au service du développement du sport et du mouvement sportif serait une réponse sans doute inadaptée.

Libérer les énergies constitue la troisième priorité.

En premier lieu, un champ d'action important peut s'ouvrir si l'on fait confiance à l'ensemble des acteurs du monde associatif et si l'Etat les soulage d'un certain nombre de contraintes administratives. Plusieurs dispositifs seront proposés pour permettre plus de liberté et d'esprit d'initiative. Des signes tangibles seront envoyés aux bénévoles, en les informant et en facilitant leur travail quotidien par une simplification des dispositifs qui leur sont applicables. Des « centres ressources » seront créés pour les clubs, permettant la mise en commun de moyens, notamment dans les domaines juridiques ou comptables. Les projets pilotes existants seront généralisés après évaluation.

Un deuxième axe de réflexion sera celui de la meilleure intégration du sport dans toutes les composantes de la société française. A cet égard, l'accessibilité des infrastructures sportives aux personnes handicapées, tout particulièrement dans la pratique du sport loisir est une préoccupation majeure.

Le sport étant un secteur économique à part entière et un puissant vecteur d'insertion, il recèle un gisement d'emplois important et non encore exploité. Dans ce domaine, une évaluation de l'action des 30 000 emplois-jeunes du secteur sportif a été envisagée et, dans la mesure du possible, les modalités les plus efficientes de prolongement de l'action conduite seront recherchées.

De même, sport et santé doivent être conjugués. La préservation par la pratique sportive du capital santé de chacun doit être mieux prise en compte et devenir un nouvel axe des politiques du ministère. Cela signifie aussi traiter de la question du dopage. Un cadre législatif existe mais l'absence de réelle hiérarchisation des priorités rend son application sur le terrain difficile. Il convient notamment de renforcer l'environnement médical et scientifique, ce qui passe par une approche globale et par une concertation renforcée au niveau européen, puis mondial. Le dossier de l'Agence mondiale antidopage (AMA) et la rédaction du code mondial anti-dopage doivent aussi avancer.

Enfin, l'Etat doit à la fois inciter et réguler le développement du sport sur l'ensemble du territoire. Il doit organiser la concertation pour définir les priorités d'une politique du sport harmonieusement répartie. A ce titre, les services déconcentrés de l'Etat doivent jouer un rôle de conseil et de soutien aux clubs et aux collectivités locales qui doivent voir leur rôle consacré. Le sport prendra toute sa part à la réflexion relative à la décentralisation que le Premier ministre a engagée. Les politiques sportives doivent être conçues au niveau des bassins de vie ou d'emploi, le plus souvent dans un cadre intercommunal. Elles doivent intégrer les dimensions économiques, sociales, touristiques et environnementales. La valorisation des espaces naturels et ruraux et la promotion d'un accès raisonné à ceux-ci sont des priorités. Il s'agit de concilier l'essor des activités de pleine nature avec la préservation du milieu rural et la recherche d'un développement équilibré des territoires.

En conclusion, M. Jean-François Lamour a rappelé les grands défis des prochains mois : défis sportifs, comme la préparation des championnats du monde d'athlétisme au Stade de France en 2003, mais surtout défis budgétaires.

La prochaine loi de finances sera l'occasion de traduire les objectifs qui ont été exposés et l'importance politique accordée au sport désormais doté d'un ministère plein et exclusif, afin que les attentes de l'ensemble des acteurs et des composantes du monde sportif ne soient pas déçues.

Après l'exposé du ministre, le président Jean-Michel Dubernard a d'abord observé qu'en vingt ans, le sport était devenu une réelle valeur marchande. L'intervention croissante de nouveaux acteurs économiques a profondément fragilisé les structures traditionnelles du sport français qui reposent sur la délégation par l'Etat de l'animation et de la gestion du sport à des structures essentiellement associatives et sur le lien de solidarité, maintenu au sein des fédérations sportives, entre le sport amateur et le sport professionnel. Alors que l'encadrement juridique du sport en France repose essentiellement sur des structures associatives, on peut se demander si le partenariat avec le monde économique doit permettre de « vendre » les valeurs fondamentales de ce dernier en utilisant, par exemple, des logos fédéraux pour promouvoir des sociétés privées. Que penser de l'obligation faite à un sponsor fédéral d'imposer aux associations d'une fédération des publicités ou des opérations promotionnelles au profit de celle-ci augmentant ainsi les ressources liées aux missions de service public, mais limitant inéluctablement celles du monde associatif et des autres acteurs dans l'organisation des événements ?

Enfin, doit-on laisser le marché réguler les négociations entre des acteurs souvent de compétences et de cultures différentes : des fonctionnaires ou bénévoles face à des équipes juridiques structurées ?

M. Jean-François Lamour, ministre des sports, a convenu que le modèle actuel avait effectivement du mal à rassembler l'ensemble des pratiques : la fédération peine à garder le contact à la fois avec les clubs, enclins à rechercher une coopération plus étroite avec les collectivités locales, et également avec le sport professionnel. Ce problème constituera un des enjeux des prochains Etats généraux du sport. Il est en effet indispensable que la fédération, qui est délégataire de service public, conserve un rôle de régulation et une vue d'ensemble du système, amateur et professionnel. Les récentes tensions survenues dans le monde du football entre la fédération et les clubs amateurs en est une illustration. Des conventions de partenariat devront permettre aux fédérations de gérer de manière transparente leur secteur d'activité et d'assumer leur responsabilité à son égard.

Si la loi sur le sport a permis une clarification des règles, elle n'a pas pour autant réglé la question des relations entre les groupements privés et le socle associatif. L'imposition d'un sponsor fédéral pose la question de la coexistence entre des structures fonctionnant sous les règles de l'économie de marché et la pratique associative. Elle traduit également la mutualisation de la recherche et de l'utilisation de moyens financiers, qui bénéficie à la fois aux clubs professionnels et aux clubs amateurs. Il apparaît sage de conserver ce système car il y a danger lorsque les clubs gèrent eux-mêmes leurs droits. Il faut donner plus d'autonomie au secteur professionnel dans le respect du principe de mutualisation des ressources.

M. Edouard Landrain, après s'être félicité de l'autonomie donnée au secteur « sports » et de la priorité ainsi affichée en direction de ce secteur, a ensuite posé les questions suivantes :

- Comment sera gérée la séparation des crédits « jeunesse » et « sports » ? Que se passera-t-il au niveau des structures déconcentrées comme les directions départementales et régionales ?

- Quelles assurances peuvent être données quant à la pérennité des crédits affectés au FNDS et leur mode de gestion paritaire ?

- Le mécanisme de taxation à hauteur de 5 % des recettes audiovisuelles sera-t-il maintenu ?

- Peut-on envisager l'adaptation du dispositif proposé par M. François Fillon, de soutien à l'emploi des jeunes au monde sportif ?

M. Gaétan Gorce a posé des questions sur :

- les relations entre les droits de retransmission sportives et la garantie du financement du sport amateur, notamment en ce qui concerne le football professionnel ;

-  la gestion de la fédération française de football (FFF), afin notamment que soit garantie la transparence de ses marchés, ainsi que l'avait préconisé la Cour des comptes ;

- l'éventualité d'un transfert aux régions des centres d'éducation populaire et de sport (CREPS) dans le cadre des nouveaux projets de décentralisation.

Mme Muriel Marland-Militello a interrogé le ministre sur :

- la possibilité de donner un statut juridique aux bénévoles afin de leur rembourser leurs frais et de prendre en charge leurs accidents du travail.

- en ce qui concerne la sécurité dans les lieux sportifs, le recours à de nouveaux intervenants, par exemple des psychologues, dans l'éducation des sportifs.

M. Georges Colombier, après avoir rappelé que le dopage était un véritable fléau, a demandé un bilan des résultats de la politique menée jusqu'à présent et a souhaité obtenir des informations sur les intentions du Gouvernement, compte tenu de la nécessité en ce domaine d'une action menée à l'échelle européenne, voire mondiale.

Mme Henriette Martinez a rappelé que des associations rurales proposaient des activités mêlant le sport et les loisirs. De quel ministère relèvent-elles désormais ?

M. Pierre Hellier a soulevé le problème des difficultés de recrutement de personnels qualifiés destinés à la surveillance des piscines.

M. Henri Nayrou a fait les remarques suivantes :

- Des avancées ont été opérées à destination des bénévoles mais le montant de la déduction fiscale n'est pas suffisant et le seuil d'exonération pour les dons est trop faible.

- La mise en place en 1999 d'un prélèvement de 5 % sur les droits télévisuels au profit des fédérations est une bonne mesure à préserver.

- La part régionale du FNDS n'est pas assez importante.

- Les nouveaux contrats prévus par le projet de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise devraient également bénéficier aux clubs professionnels.

- Les clubs professionnels remettent en question les dispositions législatives qui ont attribué les droits de télévision aux fédérations.

M. Pierre-Christophe Baguet a posé des questions :

- sur les moyens de renforcer les équipes d'animateurs municipaux dans les écoles de sport ;

- sur la possibilité de fixer un quota de mètres carrés d'équipements sportifs dans le cadre de la révision de la loi de solidarité et de renouvellement urbain (SRU), compte tenu de la diminution du nombre de mètres carrés sportifs liée la rurbanisation de l'espace.

M. Jean-Marie Geveaux est intervenu sur les points suivants :

- L'aide au bénévolat doit être repensée car les aides fiscales ne bénéficient pas aux personnes exonérées de l'impôt sur le revenu.

- Les emplois-jeunes en matière sportive ont permis de répondre à des besoins réels, par exemple au niveau des cadres techniques des fédérations et des ligues. Il faut donc trouver des solutions pour les pérenniser

- Il faut faciliter le développement du sport en milieu rural par la promotion d'animateurs et d'agents techniques.

M. Bernard Perrut a souligné que le sport constituait une excellente école pour l'insertion des jeunes qui apprennent ainsi le sens du respect. Il convient donc d'encourager les communes à favoriser le développement de la pratique sportive des jeunes. Dans ce cadre, il conviendrait également d'augmenter la place du sport dans les rythmes scolaires.

M. Jean-Claude Beauchaud a exprimé la crainte que la séparation en deux du ministère de la jeunesse et des sports ne permette plus une véritable prise en compte des problèmes sportifs au niveau des dispositifs plus globaux comme les contrats éducatifs locaux, ni ne permette au secteur de la jeunesse de trouver véritablement sa place institutionnelle.

M. Lionnel Luca s'est interrogé sur les moyens à donner aux clubs professionnels pour qu'ils rivalisent sur un pied d'égalité avec les clubs étrangers ainsi que sur l'attitude à adopter face aux comportements peu sportifs de jeunes ou de parents dans certaines compétitions amateurs.

M. Jean-Pierre Door a rappelé que les jeunes doivent passer une visite médicale d'aptitude avant d'obtenir une licence sportive. Au moment où on entend lutter contre l'exclusion sociale par le sport, il est dommage que ces visites ne soient pas remboursées par la sécurité sociale pour les jeunes issus de milieux défavorisés.

M. Bernard Depierre a rappelé l'existence d'une trop forte évasion de sportifs de haut niveau à l'étranger en raison de l'inattractivité du système fiscal français, ce problème ayant été rendu encore plus important avec l'affirmation de la libre circulation des sportifs au sein de l'Union européenne par l'arrêt Bosman. En outre, la France ne se donne pas les moyens de garder les jeunes talents qu'elle a formés.

En réponse aux intervenants, M. Jean-François Lamour, ministre des sports, a fait les observations suivantes :

- La scission de l'ancien ministère de la jeunesse et des sports ne remet pas en cause l'unité des services déconcentrés qui resteront hébergés au même endroit. Le ministre de l'éducation nationale peut y faire appel en tant que de besoin, mais les deux ministres sont convenus de se concerter afin de ne pas surcharger le secteur jeunesse de trop de demandes au détriment du secteur sportif. Les directions départementales, qui accordent notamment les agréments de centres d'hébergement de loisirs, conservent la même forme. L'ensemble des personnels travaille sur les mêmes dossiers afin qu'il n'y ait pas de changement d'interlocuteur. Les crédits budgétaires seront partagés entre les deux ministères mais il n'y aura pas de modifications du mode d'utilisation de ces crédits.

- La budgétisation du FNDS n'est pas une solution à retenir car elle aboutirait à faire entrer ce fonds dans le système de régulation budgétaire. Une solution doit être proposée à la suppression du FNDS, programmée avec la réforme de la procédure de la loi de finances. Elle sera étudiée dans le cadre des Etats généraux du sport. On peut envisager la création par la loi d'une fondation du sport qui conserverait le même mode de gestion paritaire que le FNDS et les mêmes ressources fiscales affectées en provenance notamment de la Française des jeux.

- Les 5 % de droits télévisuels au bénéfice du sport amateur ne seront pas remis en cause.

- En ce qui concerne le mandat de gestion confié en vue de l'utilisation, l'exploitation ou la reproduction du sigle de la FFF et de l'image collective de l'équipe de France, il y a eu un appel à concurrence par lequel la fédération s'est mise en conformité avec les règles qui lui sont imposées.

- La décentralisation est un important chantier qui permettra de mieux articuler les compétences pour que toutes les collectivités soient plus efficaces. Il ne s'agit pas pour autant de remettre en cause le rôle de l'Etat en matière sportive, rôle indispensable notamment en ce qui concerne la gestion du sport de haut niveau.

- Il faut protéger et reconnaître le bénévolat en matière sportive, notamment par une protection juridique contre les risques de procédures judiciaires, mais il ne faut pas le semi-professionnaliser, par le remboursement des frais. Les associations sportives doivent rester exclusivement bénévoles. On peut par exemple envisager une forme de reconnaissance par l'attribution de points retraite supplémentaires.

- Pour lutter contre les incivilités dans le domaine du sport, une formation spécifique sera offerte dès la prochaine rentrée aux futurs professeurs de sports et aux jeunes arbitres. - En tout cas, il est nécessaire de renforcer le rôle des éducateurs et de rappeler les règles de base afin de juguler les comportements agressifs dans les enceintes sportives.

- Il y a eu des dysfonctionnements dans le cadre de la mise en _uvre de la lutte contre le dopage, par exemple avec un engorgement du Laboratoire national de dépistage du dopage (LNDD) ou de mauvais choix de compétitions à contrôler. Mais le problème essentiel en la matière est de définir a priori un ensemble de règles internationales contre le dopage qui seraient clairement identifiées pour tous les sportifs avant le début de la compétition.

- Il manque effectivement des surveillants et maîtres-nageurs sauveteurs pour les piscines, en raison du coût trop important de leur formation. Il faut examiner avec les maîtres-nageurs sauveteurs leurs conditions de travail et leur parcours de formation pour éviter la fermeture de piscines.

- Il est souhaitable de conférer plus de souplesse et d'autonomie aux clubs professionnels tout en conservant un rôle central aux fédérations qui ont une mission de service public. Dans ce cadre, on peut réfléchir à la possibilité de rendre les clubs propriétaires de leurs droits télévisuels si trois conditions sont réunies : le maintien du flux financier entre clubs professionnels et clubs amateurs, le maintien du lien entre fédérations et clubs professionnels et la mutualisation des ressources entre les différents clubs professionnels sur la base d'une répartition validée par tous.

- Il serait utile que les nouveaux contrats prévus par le projet de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise puissent être offerts dans le domaine sportif mais il se pose un problème de formation car les emplois-jeunes dans ce secteur étaient au moins de niveau IV, ce qui excède le niveau de formation prévu par le nouveau dispositif. Il apparaît plus pertinent de privilégier la consolidation du plan sport-emploi qui a donné de bons résultats.

- Avant de prévoir la fixation d'un nombre de mètres carrés d'équipements sportifs en zone urbaine, il faudrait précisément évaluer l'importance des équipements existants et leur état de vétusté.

- Il est toujours difficile de mettre en place de nouveaux rythmes scolaires au sein de l'éducation nationale. Il est possible d'engager des nouvelles discussions avec M. Luc Ferry pour une meilleure prise en compte du sport à l'école, mais il faut surtout recourir aux contrats éducatifs locaux (CEL) qui sont plus adaptés pour cela.

- La prise en charge du coût de la visite médicale d'aptitude à la pratique du sport se heurte à la recherche de l'équilibre des comptes de la sécurité sociale.

- Le remède à l'exil de nos meilleurs joueurs ne réside pas dans la création d'un statut dérogatoire, mais doit naître de la conjonction d'une plus grande autonomie des clubs professionnels et des réformes fiscales générales élaborées par le Gouvernement.

- La protection des jeunes issus des centres de formation doit résulter des négociations entre la fédération et les clubs formateurs. Il convient de signaler que les cahiers des charges des centres de formation qui relèvent de la compétence de ces derniers n'ont à ce jour pu être homologués en raison de l'absence de transmission au ministère.

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a ensuite entendu M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.

Le président M. Jean-Michel Dubernard a souhaité la bienvenue à M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, en affirmant que c'était un grand honneur que de le recevoir en ce lieu. La figure du ministre rappelle celles évoquées par le capitaine et poète Borelli qui, parlant parmi les tombes à ses soldats ensevelis, dans l'un de ces cimetières dont la France a couvert le monde déclarait : « Tous ici sont des Français, les uns par le sang reçu, les autres par le sang donné... ». La France et ses armées, dans lesquelles le ministre a servi notre pays, ont combattu sur des terres lointaines et dans des situations cruelles. Aujourd'hui, ce passé doit être évoqué moins comme une faute que comme un malheur, avec davantage de respect et de compassion que cela n'a été le cas ces dernières décennies.

M. Hamlaoui Mékachéra peut être remercié au titre du passé, pour les services qu'il a rendus à la France et l'honneur dans lequel ils ont été accomplis et, pour l'avenir, pour le signe fort de réconciliation que sa personne représente en direction de l'Algérie, de la mémoire du Maghreb et plus généralement en direction de la France d'outre-mer qui est avant tout le creuset de précieux atouts pour la France.

M. Hamlaoui Mékachéra a indiqué que le Gouvernement était conscient de ses devoirs vis-à-vis du monde combattant et soucieux d'apporter des réponses concrètes, et si possible rapides, à ses attentes et à ceux de leurs ayant-cause. Lors de sa prise de fonctions, le 7 mai 2002, Mme Michèle Alliot-Marie, qui portait alors le titre de ministre de la défense et des anciens combattants, avait d'emblée engagé le dialogue avec les associations. C'est cette dynamique de concertation dans laquelle s'inscrit l'action menée par le Gouvernement depuis plusieurs semaines. On ne peut répondre aux attentes des anciens combattants que par une connaissance approfondie de leurs aspirations, ce qui n'exclut pas qu'il doive exister, d'autre part, une impulsion forte émanant du plus haut niveau de l'Etat. Ainsi, le Président de la République a marqué, en maintes occasions, son implication dans les actions de mémoire et dans le dialogue avec le monde combattant. Ainsi le Premier ministre, dimanche dernier, présidait en personne les cérémonies commémoratives du soixantième anniversaire de la Rafle du Vel d'Hiv.

L'action du secrétariat d'Etat aux anciens combattants se déclinera selon deux grands axes : les volets traditionnels et des pistes plus novatrices.

S'agissant des volets traditionnels, l'action du secrétariat d'Etat aux anciens combattants suivra la distinction classique reconnaissance - réparation - mémoire, tout en sachant que les éléments de ce triptyque sont étroitement liés, voire indissociables.

Le projet de loi de finances pour 2003 est encore en phase d'élaboration. Il serait donc prématuré d'entreprendre aujourd'hui une description fine des mesures qui seront engagées dans les prochains mois. Pour autant, on peut d'ores et déjà dégager quelques lignes de force. 

Dans le domaine de la reconnaissance, un nombre important de titres existe déjà. Ils reflètent les pages tragiques et glorieuses de l'histoire de notre pays. L'effort principal doit par conséquent porter sur les conditions d'accès à ces titres avec une certaine harmonie entre les différentes générations du feu. Les délais exigés par les textes méritent parfois d'être réexaminés dans le sens d'une plus grande équité. Une réflexion sur ce thème qui répond à une réelle attente sera menée en ce sens.

Par ailleurs, et dans le même temps, il est nécessaire de développer chez les militaires et chez les anciens militaires issus des opérations extérieures, le sentiment d'appartenance au monde combattant. La quatrième génération du feu doit être encouragée à s'impliquer, au plus tôt et en nombre, dans la vie associative. Elle est porteuse des engagements de la France au service de la paix sous le drapeau des Nations Unies. Elle est aussi porteuse d'une perception forte des nouvelles formes de menaces - non conventionnelles - auxquelles la France et ses alliés sont désormais exposés. Elle exprime par conséquent une générosité, mais aussi un devoir de vigilance, qu'il est essentiel de faire partager à la jeunesse. La France, par ses armées, ne sort plus de l'hexagone pour faire la guerre, mais pour participer au maintien de la paix. La démarche de reconnaissance doit accompagner cette évolution.

Dans le domaine de la réparation, plusieurs thèmes importants sont déjà en chantier. Ils mobilisent à juste titre le monde combattant, mu par un souci d'équité que l'on ne peut que louer. C'est le cas de la décristallisation des pensions et des retraites des anciens combattants ressortissants de pays étrangers anciennement sous souveraineté française, du statut des orphelins de déportés, de la situation des veuves de guerre, de l'évolution du rapport constant... pour n'en citer que quelques-uns parmi les principaux. Dans certains de ces domaines, le Gouvernement est tenu une obligation de résultat qui procède de décisions de justice. C'est le cas pour la décristallisation. Il faut donc aller vite, mais il faut aussi savoir que dans plusieurs registres ayant une forte implication budgétaire - tel que la retraite du combattant - les progrès ne seront perceptibles qu'à échéance de plusieurs années. Il est donc primordial de fixer des objectifs planifiés et d'assurer une marge de progression annuelle qui, pour être apparemment modeste, permettra néanmoins d'atteindre à terme ces objectifs. Selon une méthode qui procède de cette démarche de partenariat que suit l'ensemble du Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin, le secrétariat d'Etat aux anciens combattants a la volonté d'apporter des solutions qui traduisent un progrès dans le sens de l'équité.

Dans le domaine de la mémoire, il faut orienter l'action du ministère vers la transmission aux jeunes générations du témoignage des combats menés pour la défense des idéaux de liberté et de dignité. Ces valeurs sont plus que jamais essentielles à notre temps. Les associations sont désireuses d'apporter leur concours à cette démarche. Elles multiplient déjà les gestes en direction de la jeunesse. Il convient donc de donner une plus grande cohérence à nos interventions et de les fédérer, de façon innovante, autour de quelques projets conjuguant une forte capacité d'évocation et une incontestable modernité.

Dans ce registre, l'année 2003 devrait se prêter à une campagne dédiée à la commémoration des événements qui, soixante ans plus tôt, ont marqué l'année 1943 : le début de la campagne d'Italie, épisode trop souvent occulté de l'histoire des combats menés au cours de la seconde guerre mondiale, mérite d'être salué avec force. Il marque la reprise de la lutte en Europe de l'ouest, il annonce la chute prochaine du fascisme en Italie. Il figure également une page glorieuse de la contribution des forces françaises à la victoire finale. L'armée française, qui participe à cette épopée, qui bientôt libèrera la Corse où le général de Gaulle se rendra en octobre 1943, compte dans ses rangs de nombreux soldats nord-africains : Marocains, Tunisiens et Algériens. Un hommage devra leur être rendu.

Sur un sujet aussi crucial que l'héritage de la guerre d'Algérie, le secrétariat d'Etat aux anciens combattants entend également inciter les associations à choisir une date commémorative qui recueille l'assentiment général. L'Etat ne peut pas, ne doit pas, décider à leur place. Cette date doit rassembler, et en aucun cas, diviser le monde combattant. Par conséquent, les associations seront prochainement invitées à se concerter, éventuellement avec le concours d'une personnalité extérieure, afin d'aboutir à l'expression commune d'une date qui sera à la fois consensuelle et chargée de signification.

Ces domaines traditionnels figurent au c_ur de l'action du secrétariat d'Etat aux anciens combattants qui entend les aborder sous un angle résolument moderne et dynamique, afin que la politique gouvernementale dans ce registre marque non seulement la concrétisation des devoirs de la France vis-à-vis du monde combattant, mais aussi la hauteur des ambitions du pays à l'égard de sa jeunesse.

Dans le même esprit, le Gouvernement est résolu à ouvrir un certain nombre de nouveaux chantiers - actuellement au stade de l'évaluation - qui traduisent une ouverture par rapport à l'approche qui prévaut généralement.

Tout d'abord, une plus grande attention doit être portée à la relation entre le monde combattant et l'administration qui est à son service. Il convient d'établir une plus grande proximité entre cette administration, en particulier les services déconcentrés de l'Etat et ceux de l'Office national des anciens combattants (ONAC), et les ressortissants. Dans cette logique, le secrétariat d'Etat aux anciens combattants va étudier la place qui pourrait être faite aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC). Nombreux sont ceux qui, parmi les anciens combattants, ont de la curiosité et du goût pour les NTIC. Il faut donc aller à leur rencontre. C'est une piste de recherche parmi d'autres dont les potentialités doivent être explorées.

Un autre thème d'importance est la place que le monde combattant doit occuper dans la défense des valeurs fondatrices de notre société. L'actualité politique récente a montré combien la défense des principes de liberté et de dignité restait d'actualité, combien le devoir de vigilance s'imposait à tous. Parce qu'ils ont été des acteurs de cette lutte pour la liberté et la dignité, les combattants du second conflit mondial, les déportés, les résistants, les anciens de la France Libre, partagent un devoir supplémentaire de témoignage sur les périls qui n'ont jamais complètement cessé de peser sur notre société. Ils doivent être rejoints dans cette action par les jeunes des opérations extérieures qui ont participé aux opérations de maintien de la paix conduites sous l'égide de l'ONU. Le sens de leur engagement au service d'une cause universelle était déjà largement reconnu, puisque les casques bleus avaient collectivement reçu le prix Nobel de la paix en 1984 pour leur action au Liban. Depuis le 11 septembre, la valeur universelle de leur action est encore plus évidente. Ils doivent donc être associés pleinement à la démarche d'éveil de la jeunesse face aux menaces du terrorisme.

Le partage d'expérience avec d'autres pays dans le domaine de la reconversion du combattant doit également être l'objet de l'attention du Gouvernement. De nombreux pays, sur tous les continents et parfois près de nos frontières, ont connu récemment des affrontement armés d'une extrême gravité qui ont amené des dizaines de milliers de jeunes gens, souvent de très jeunes gens, voire des enfants, à subir l'épreuve des armes. Ces pays sont actuellement en phase de sortie de crise, mais la paix ne sera véritablement enracinée que s'il parviennent à réinsérer dans la société civile, à ancrer dans une vie professionnelle ordinaire, ces jeunes anciens combattants. S'ils y parviennent, ils en feront des acteurs de la reconstruction. S'ils échouent, cette masse de jeunes désorientés deviendra un frein au développement. Fruit de son histoire, la France dispose de politiques, d'une organisation, de moyens, d'un tissu associatif et de savoir-faire. Cet ensemble n'est pas transposable en l'état, mais il peut se décliner sur différents modes. Il est du devoir de la France de réfléchir au moyen d'aborder ce thème avec des pays qui se trouvent en difficulté. Cette démarche s'inscrirait dans le prolongement des engagements de la France au service de la paix.

Le président Jean-Michel Dubernard s'est félicité de la franchise du ministre sur la question difficile de la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. Nombreux sont les parlementaires qui ont mal vécu l'impasse à laquelle a conduit la proposition de loi examinée le 15 janvier de cette année. Il est donc tout à fait positif que le ministre encourage les associations à trouver une solution. A ce sujet, où en est l'avancement de la construction du mémorial de la guerre d'Algérie ?

M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a précisé que le chantier suivait son cours et que l'inauguration aurait lieu à l'automne prochain, vraisemblablement en novembre.

M. Lionnel Luca a posé des questions sur :

- les perspectives d'évolution du budget des anciens combattants en 2003, la baisse des crédits observée depuis plusieurs années en raison de la diminution du nombre d'anciens combattants ne permettant pas d'apporter une réponse satisfaisante aux différents problèmes et attentes du monde combattant.

- la construction d'un mémorial de l'_uvre de la France en outre-mer qui permettrait, pour une fois, d'exercer le devoir de mémoire d'une façon positive en valorisant les réalisations de la France outre-mer - tel que la francophonie -, comme s'y est engagé le président Jacques Chirac pendant la campagne présidentielle.

M. Jean-Claude Beauchaud a rappelé que, depuis plusieurs années, la base de calcul de la retraite du combattant avait été revalorisée de cinq points par an pour atteindre 115 points dans la loi de finances 2002. Il serait souhaitable que ce rythme de progression perdure dans les années à venir.

Mme Henriette Martinez a souhaité connaître la position du ministre sur le principe d'une réversion des pensions d'anciens combattants à leurs veuves.

M. Edouard Landrain a posé des questions sur :

- la position des associations d'anciens combattants quant au choix d'une date autre que celui malencontreux du 19 mars pour la journée nationale du souvenir de la guerre d'Algérie et sur l'éventualité de mettre en place un « memorial day », comme cela existe dans les pays anglo-saxons.

- l'indemnisation des soldats d'outre-mer qui réclament aujourd'hui la reconnaissance des services rendus à la France.

En réponse aux intervenants, M. Hamlaoui Mékachéra a donné les éléments suivants :

- Il est encore trop tôt pour donner des indications précises sur le budget des anciens combattants pour 2003 puisque celui-ci fait actuellement l'objet des derniers arbitrages.

- La construction du mémorial de la France d'outre-mer est un projet lancé il y a plus de quinze ans qui connaît encore aujourd'hui plusieurs problèmes. En ce qui concerne le site de construction tout d'abord, la ville de Marseille a successivement proposé plusieurs lieux sans qu'un choix définitif ait pu être arrêté. Dans un premier temps, la municipalité avait proposé le site du fort Saint-Jean, mais celui-ci ne pouvait être utilisé qu'au prix d'une opération très coûteuse de dépollution. La ville avait ensuite proposé de construire le mémorial sur le site du « Silo » et, dernièrement, son choix semble s'être arrêté sur l'esplanade adjacente à ce dernier. Mais la définition du maître d'ouvrage est également en suspens car l'Etat et la ville de Marseille sont en désaccord sur la question. Il est bien évidemment souhaitable que ce projet se réalise mais son aboutissement ne dépend pas que de l'Etat puisque la ville de Marseille et des associations sont également parties prenantes.

- En ce qui concerne la retraite mutualiste, les associations souhaitent effectivement que la démarche de revalorisation entamée depuis plusieurs années soit poursuivie sur le rythme d'une hausse de 5 points par an. Ces mêmes associations sont actuellement consultées sur l'ensemble des dossiers du ministère des anciens combattants afin d'indiquer l'ordre de leurs priorités. Il est donc encore un peu tôt pour savoir si le dossier de la retraite mutualiste sera considéré comme prioritaire.

- Ce n'est pas à l'Etat de choisir de façon autoritaire une date pour la journée de commémoration du souvenir des victimes de la guerre d'Algérie. Une large consultation a été lancée sur ce sujet et les grandes associations représentatives ont déjà rendu leur avis. Il ressort de ces contributions que tout le monde est désireux de résoudre ce problème qui donne une image dégradée du monde combattant. En effet, il n'est pas envisageable que l'esprit de fraternité qui caractérise ce dernier laisse place à un affrontement devant les monuments aux morts. L'Etat aidera à l'aboutissement de la négociation mais n'y participera pas.

- En ce qui concerne la réversion de la pension des anciens combattant à leurs veuves, le dossier a été ouvert et un début de concertation s'est engagé. Sur ce sujet comme sur plusieurs autres dossiers du ministère, les décisions devront être prises dans un esprit d'équité.

M. Gérard Cherpion a évoqué la situation des orphelins des victimes du nazisme et la discrimination instaurée par le décret du 13 juillet 2000. Le ministre envisage-t-il de revenir sur ce problème afin de permettre à tous les orphelins de déportés d'obtenir réparation ?

M. Denis Jacquat a déploré la diminution annuelle régulière du budget des anciens combattants au prétexte d'une réduction du nombre de ces derniers et a demandé au minimum le maintien des crédits afin que le ministère puisse apporter des solutions à nombre de problèmes encore pendants comme par exemple, en Alsace-Lorraine, l'indemnisation des RAD-KHD, c'est-à-dire les jeunes femmes enrôlées de force pour participer à l'effort de guerre nazi dans les usines d'armement allemandes. Alors que tout le monde semble d'accord pour attribuer la somme résiduelle gérée par l'entente franco-allemande au bénéfice des RAD-KHD celle-ci n'a jamais été débloquée. Ce fonds a été créé en 1980 à la suite d'un accord entre les présidents M. Valéry Giscard d'Estaing et M. Helmut Schmidt afin de procéder à l'indemnisation des « malgré nous » enrôlés de force dans l'armée nazie. Aujourd'hui, l'entente franco-allemande est prête à utiliser les sommes inemployées pour indemniser les RAD-KHD. Elle propose de soutenir pour moitié cet effort financier, à charge pour l'Etat de s'acquitter de la seconde moitié. Or ce dernier n'a jamais répondu officiellement à cette demande.

M. Georges Colombier, après s'être félicité de la sincérité et de l'écoute du ministre ainsi que de la volonté affirmée du Gouvernement d'instaurer des relations de confiance avec le monde combattant, a posé des questions sur :

- l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant, qui sont actuellement beaucoup trop inégales ;

- la décristallisation des pensions des anciens combattants ressortissants des anciennes colonies françaises. Un rapport présenté le 17 février 2002 par la commission d'étude de la revalorisation des pensions a proposé trois solutions : une décristallisation totale, une décristallisation partielle fondée sur la base de la parité de pouvoir d'achat des différents pays publiée par l'ONU - adopter cette solution conduirait à réduire les pensions de certains anciens combattants, notamment ceux résidant en Afrique noire - et, enfin, une décristallisation partielle fondée sur cette même base mais corrigée de façon à ce que tous les ressortissants puissent bénéficier d'une revalorisation de leur pension. La première solution est soutenue par les associations ; elle est bien évidemment coûteuse mais permettrait de réparer la faute commise par la France dans ce dossier.

M. Jean-Claude Viollet a interrogé le ministre sur l'indemnisation des orphelins des victimes du nazisme au-delà du dispositif prévu par le décret du 13 juillet 2000 lequel n'a concerné que les orphelins nés de parents juifs morts en déportation dans le cadre des persécutions antisémites. Il a ensuite souhaité savoir comment il sera répondu aux demandes des réfractaires du STO, qu'ils aient participé ou non aux combats de la Libération, qui sont dans l'attente d'une reconnaissance de la Nation pour les risques qu'ils ont pris et qu'ils ont fait encourir à leurs proches.

M. Patrick Beaudouin a souligné l'importance du devoir de mémoire qui devrait constituer un élément fondamental d'une politique de défense de nos valeurs, notamment en direction des jeunes générations qui cernent difficilement les enjeux des conflits passés. Cette mémoire, nationale et internationale, repose sur une multitude de témoignages conservés sur des supports des plus divers. Assurer leur conservation nécessiterait que soit mise en _uvre une politique exhaustive de recensement des documents concernant les conflits où la France a été engagée depuis la fin du XIXème siècle. Une telle action est-elle envisagée et, le cas échéant, sera-t-elle dotée des moyens appropriés ?

En réponse aux intervenants M. Hamlaoui Mékachéra, secrétaire d'Etat aux anciens combattants a apporté les informations suivantes :

- La question des orphelins est un sujet difficile. Comme pour d'autres problèmes déjà évoqués, il n'appartient pas à l'Etat de fixer seul les critères du patriotisme. Il ne faudra pourtant pas rester inactif face à cette exigence d'équité qui a été énoncée par le Président de la République. Une mission sera donc confiée à une personnalité de renom sur cette question.

- La commission qui a travaillé sur la décristallisation des pensions a en effet formulé trois propositions : soit appliquer le taux actuellement en vigueur pour les anciens combattants Français aux ressortissants des pays étrangers, soit appliquer la parité de pouvoir d'achat fixée par l'ONU, soit appliquer les taux fixés par l'ONU mais en les affectant d'un correctif car leur application stricte aboutirait à ce que les ressortissants de certains pays voient leur pension diminuer. C'est vers cette troisième solution que le Gouvernement s'oriente.

- La diversité des durées de service exigées pour l'attribution des cartes de combattants résulte de la succession de décisions sans vue d'ensemble et incite les bénéficiaires de demander leur alignement sur le régime le plus favorable. Il sera donc nécessaire de trouver une solution harmonieuse.

- La qualification de déportés ne saurait être accordée aux personnes qui ont été requises au titre du STO. En effet, dans notre législation comme dans notre mémoire collective, le terme « déportation » désigne spécifiquement le système concentrationnaire mis en place par les nazis pour éliminer physiquement certaines populations en raison de leur religion ou de leur origine. Quant aux réfractaires du STO qui, comme d'autres personnes relevant de statuts différents, tels que les déportés ou les internés politiques, ont été victimes des conflits mais sans participer aux combats en tant que membres de formations armées ou sans servir dans la Résistance, ils ne peuvent se voir attribuer le titre de reconnaissance de la Nation quel que soit le mérite et le courage qu'on leur reconnaisse.

- Un groupe de réflexion aura pour mission de définir les actions nécessaires au recueil, à la centralisation et à la pérennisation de la mémoire, aussi bien écrite qu'orale, des conflits du XXème siècle.

- La constitution de l'entente franco-allemande a apporté un début de solution par une contribution financée par l'Allemagne mais la question de l'implication de la France dans ce dédommagement n'est toujours pas tranchée et les décisions sur l'utilisation des sommes résiduelles n'ont pas évolué depuis 1981.


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