COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 12

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 5 novembre 2002
(Séance de  16 heures 15)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

pages

- Loi de finances pour 2003 :

_ Avis anciens combattants (M. Georges Colombier, rapporteur pour avis)

2

_ Avis santé (M. Jean-Luc Préel, rapporteur pour avis)

11

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Georges Colombier, les crédits des anciens combattants pour 2003.

M. Georges Colombier, rapporteur pour avis, a indiqué qu'avec 3 486,23 millions d'euros pour 2003, les crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants sont en retrait de 3,9 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2002. Compte tenu de la diminution du nombre des parties prenantes, les dotations allouées en 2003 connaîtront une progression de 0,68 %, par rapport à 2002. Certes, l'effort financier ainsi consenti par le gouvernement aux anciens combattants est certes modeste et ne satisfait pas la revendication constante du monde combattant uni pour un maintien, d'une année sur l'autre, des crédits qui lui sont destinés. Néanmoins, les marges de manœuvre budgétaires ainsi dégagées vont permettre la mise en place d'actions nouvelles et notamment l'amorce d'une solution au dossier de la cristallisation des pensions des anciens combattants ressortissant des Etats antérieurement placés sous la souveraineté française, véritable serpent de mer du monde combattant, qui jusqu'alors, n'avait pas trouvé ne serait-ce que l'ébauche d'un règlement.

En dépit de ces crédits limités, le projet de budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour 2003 se présente comme un budget volontariste animé, à l'image du secrétaire d'Etat qui en à la charge, M. Hamlaoui Mékachéra, d'une réelle détermination à faire progresser dans le sens de son affermissement le légitime droit à réparation cher à l'ensemble des anciens combattants.

La démarche engagée par le secrétaire d'Etat aux anciens combattants est claire. Elle se fonde sur deux principes : la concertation et le pragmatisme. Concertation avec les associations, nombreuses et remarquablement organisées, puisqu'on ne peut répondre aux attentes des anciens combattants que par une connaissance approfondie de leurs aspirations. Pragmatisme ensuite avec une approche sans a priori de l'ensemble des dossiers, dans le souci d'apporter une réponse adaptée aux besoins du monde combattant, sans méconnaître toutefois ni la réalité démographique de parties prenantes en déclin, ni la contrainte budgétaire.

Le rapporteur souscrit totalement à cette démarche de bon sens qui s'inscrit dans la durée de la législature : si sa réussite ne peut s'apprécier dès maintenant, des gages de sa pertinence devront être rapidement donnés. De ce point de vue, le rapporteur envisage le projet de loi de finances pour 2003 comme un texte de transition qui jette les bases de l'action future.

Ainsi, la nouvelle répartition des crédits traduit le glissement des missions du secrétariat d'Etat - compte tenu du déclin inéluctable du nombre des parties prenantes - du droit à réparation vers le devoir de mémoire ; cependant des sujets d'importance qui mobilisent à juste titre le monde combattant n'ont pas de traduction budgétaire.

Le rapporteur pour avis a indiqué que 80,1 millions d'euros étaient inscrits dans le budget présenté au titre des moyens nouveaux. Cette somme permet des avancées dans plusieurs domaines :

- L'accélération du relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant. L'année prochaine, ce plafond s'établira à 122,5 points de pension militaire d'invalidité (1 560 euros), en progression de 105 euros, soit plus de 7 %, par rapport à l'année précédente.

- La prise en compte des psychotraumatismes de guerre dans le champ du droit à réparation. Les crédits du chapitre 46-27 rebaptisé « Soins médicaux gratuits et suivi sanitaire des anciens militaires » sont ainsi abondés de 440 000 euros afin de permettre d'offrir, aux anciens militaires qui le souhaitent, un bilan gratuit en matière de santé psychique auprès de médecins spécialisés. Un observatoire de la santé des vétérans sera par ailleurs créé prochainement.

- L'amorce d'une décristallisation des pensions servies aux anciens combattants ressortissants des pays anciennement placés sous la souveraineté de la France. En effet, il doit être mis un terme à l'inégalité qui existe entre les anciens combattants selon leur nationalité. Le gouvernement a engagé 72,5 millions d'euros à cette fin. Les modalités pratiques de cette décristallisation ne sont pas encore définies, elles feront l'objet d'un projet de loi discuté par le Parlement dans les prochains mois.

- Le thermalisme combattant est sauvé des eaux. Bien qu'aucune mesure nouvelle concernant les cures thermales ne figure dans le projet de loi de finances pour 2003, le gouvernement s'est engagé à restaurer les droits anciens, c'est-à-dire le remboursement forfaitaire des frais d'hébergement à hauteur de cinq fois le remboursement de la sécurité sociale. Un arrêté devrait être signé dans les prochaines semaines et fournir une base juridique incontestable qui apportera aux anciens combattants l'accès privilégié à un mode de soins auxquels ils sont très attachés.

Le budget prend également en compte le glissement du droit à réparation vers le devoir de mémoire :

- Il est important de profiter de la « mémoire vivante » autrement dit des témoignages des anciens combattants des différents conflits encore vivants. Les crédits alloués à la politique de mémoire connaissent une forte augmentation qui traduit la volonté du gouvernement de transmettre à la jeunesse les valeurs - courage, engagement, sens de la responsabilité - et le souvenir des anciens combattants afin d'œuvrer en faveur de la paix.

- L'Office national des anciens combattants (ONAC) se voit conforté dans ses missions avec l'adoption, le 5 octobre dernier, à une très large majorité de son conseil d'administration, d'un contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2003-2005. Cependant, le rapporteur pour avis a tenu à rappeler que, depuis 1999, les parlementaires doivent mobiliser la réserve parlementaire pour abonder les crédits sociaux de l'ONAC. Il serait souhaitable que le projet de loi de finances pour 2004 soit porteur d'un financement à caractère durable.

- La pérennisation et la modernisation de l'Institut national des invalides (INI) est également assurée, puisque, après une baisse de 9 % l'an dernier, sa dotation budgétaire pour 2003 est en progression de 4,2 %.

Cependant, malgré ces avancées réelles, le rapporteur pour avis a regretté que certaines revendications importantes du monde combattant demeurent insatisfaites :

- Les conditions d'attribution de la carte du combattant au titre de l'Afrique du Nord ne sont pas harmonisées. Les anciens combattants qui, bien que titulaires du titre de reconnaissance de la nation et de la médaille commémorative, totalisent moins de douze mois de présence en Algérie sont toujours exclus de ce dispositif. Le monde combattant estime, à juste titre, nécessaire d'aligner les conditions d'attribution de la carte du combattant sur le critère de quatre mois de présence en Algérie entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, à l'instar du critère retenu, par un arrêté du 23 juillet 2000, pour les policiers et les membres des compagnies républicaines de sécurité.

- La retraite du combattant, actuellement calculée sur la base de 33 points d'indice de pension militaire d'invalidité, n'est pas revalorisée. Les associations d'anciens combattants souhaiteraient que la retraite soit désormais déterminée sur la base de 48 points d'indice. Compte tenu du coût d'une telle revendication, il convient cependant de procéder par étapes.

- Pour ce qui concerne les orphelins de déportés, le décret du 13 juillet 2000 a conduit à une discrimination injuste entre les orphelins de déportés résistants et les orphelins de déportés juifs et appelle une modification rapide.

- Aucune mesure relative aux veuves ne figure dans le projet de loi de finances pour 2003. Des propositions concrètes devraient être avancées sans tarder.

- Le rapport constant, sur lequel se fonde le calcul de la valeur du point de pension militaire d'invalidité, doit être simplifié tout en préservant les intérêts des anciens combattants. Il serait souhaitable que la concertation entamée sur ce point avec les associations aboutisse.

- En ce qui concerne le bénéfice de la campagne double, accordé aux anciens combattants des deux guerres mondiales et de la guerre d'Indochine, il est toujours choquant de constater que seuls les anciens combattants d'Algérie, Maroc et Tunisie en sont exclus.

- Enfin, des mesures seraient à prendre pour l'indemnisation des RAD-KHD, pour l'élargissement de l'attribution de la carte du combattant volontaire de la Résistance ainsi qu'en faveur des patriotes réfractaires à l'annexion de fait de l'Alsace-Moselle.

En conclusion et compte tenu des engagements pris par le ministre sur la durée de la législature, le rapporteur pour avis s'est prononcé favorablement à l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour 2003. Il a toutefois indiqué que le secrétaire d'Etat devra rapidement donner des gages de la pertinence de son action.

M. Alain Néri a fait part de sa surprise de voir le rapporteur pour avis proposer l'adoption d'un budget en régression de 4 % alors que les années précédentes, lorsqu'il était dans l'opposition, il donnerait un avis défavorable à l'adoption d'un budget dont les crédits étaient réduits de 2 % seulement. Cette démarche manque de cohérence.

Le projet de budget des anciens combattants se caractérise par des lacunes importantes :

- Pour ce qui concerne la décristallisation des pensions, la levée de la forclusion pour l'ouverture de droits nouveaux avait été engagée il y a deux ans par le précédent gouvernement. De plus, le 16 mai 2001, M. Jacques Floch et les députés membres du groupe socialiste avaient déposé une proposition de loi pour mettre fin à une mesure inique prise pour punir les ressortissant des pays qui avaient fait le choix de l'indépendance. Devenu secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants, M. Jacques Floch avait mis en place une commission de travail pour étudier les modalités de cette décristallisation. Cette commission a rendu ses conclusions et publié un rapport. Il n'y a donc aucun motif de retarder plus encore la mise en œuvre de cette réforme, comme peut le laisse craindre la création d'une nouvelle commission sur le sujet.

Par ailleurs, les 72,5 millions d'euros inscrits pour financer l'amorce de la décristallisation ne constitue pas une mesure nouvelle dans la mesure où il s'agit d'un transfert de crédits précédemment destinés au financement du Fonds de solidarité (allocation différentielle et allocation de préparation à la retraite).

La véritable question concernant la décristallisation est de savoir quand celle-ci sera amorcée et selon quelles modalités.

- La mesure proposée dans le domaine du thermalisme est certes une amélioration, mais de peu d'importance au regard des attentes du monde combattant.

- Peut-on parler de pérennisation de l'ONAC, lorsque ses crédits de fonctionnement sont, pour la première fois, en baisse et que ses effectifs et ses crédits sociaux sont également réduits ? Cette année, le recours à la réserve parlementaire viendra pallier la réduction des crédits au contraire des années précédentes où les crédits de la réserve parlementaire constituaient une augmentation réelle des ressources de l'ONAC. 

- L'attribution de la carte du combattant doit être alignée pour tous les anciens combattants en Algérie sur le critère de quatre mois de présence sur le territoire algérien entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962.

- La revalorisation de la retraite du combattant doit se faire par étapes - cinq points d'indice de pension militaire d'invalidité par an pendant trois ans - selon la même méthode retenue par le gouvernement pour le relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste. Le financement de cette mesure pourrait très bien être assuré par les crédits anciennement attribués au Fonds de solidarité.

- S'agissant de la situation des veuves, la majorité précédente avait créé la carte officielle de veuves d'anciens combattants. Mais il est urgent de prendre en faveur de ces personnes un certain nombre de mesures spécifiques.

- Tous les orphelins de parents déportés, juifs ou non, doivent bénéficier des mêmes droits. Le décret du 13 juillet 2000 constitue une mesure de réparation spécifique qu'il importe de ne pas modifier ni d'étendre eu égard au caractère particulier de la Shoah. Mais il faut créer une nouvelle mesure de réparation au profit de tous les autres orphelins de déportés, quelle que soit la raison de cette déportation.

En conclusion, M. Alain Néri a estimé que le budget présenté, qualifié de budget de transition par le rapporteur pour avis, ne résolvait aucun des problèmes pendants du monde combattant et augurait mal de l'avenir. En conséquence, il s'est prononcé, au nom du groupe socialiste, contre l'adoption de ce budget.

M. Maxime Gremetz a ensuite pris la parole. Il s'est étonné de l'adhésion de l'actuel rapporteur au budget des anciens combattants pour 2003. En tant que rapporteur pour avis, sous la précédente législature, il avait toujours, par souci de cohérence, proposé à la commission de donner un avis défavorable à ce budget lorsqu'il l'estimait insuffisant. Or les crédits du secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour 2003 peuvent faire l'objet des mêmes critiques que les années précédentes, si ce n'est qu'ils accentuent encore le fait que l'on ne profite pas de la diminution du nombre des parties prenantes pour répondre, avec les crédits ainsi libérés, aux revendications du monde combattant. En effet, le recul est encore plus important cette année puisque la baisse des crédits double passant de 2 % à 4 %.

Un certain nombre de mesures nouvelles sont proposées, notamment hors du cadre du budget. C'est le cas du retour au droit antérieur en matière de remboursement des frais d'hébergement engagés par les anciens combattants à l'occasion des cures thermales dont il faut se féliciter. Mais deux grandes revendications, qui sont soutenues par la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie - Maroc - Tunisie (FNACA), n'apparaissent pas dans le budget présenté par le gouvernement : l'attribution la carte du combattant sur le critère de quatre mois de présence en Algérie, comme c'est déjà le cas pour les policiers et les membres de la compagnie républicaine de sécurité, ce qui serait une mesure d'équité, la revalorisation de la retraite du combattant de 33 à 48 points de pension militaire d'invalidité, pour un montant de 106 millions d'euros.

Ces deux mesures qui concernent un nombre important d'anciens combattants sont budgétairement réalistes et répondent à un impératif de justice.

La discrimination entre les orphelins de déportés juifs et les autres orphelins de parents victimes des crimes nazis, auxquels ne sont pas reconnus les mêmes droits, est inacceptable et fait également l'objet de vives critiques de la part des associations unanimes. Un amendement sera proposé pour que soit établi un rapport étudiant les possibilités d'extension du dispositif du décret du 13 juillet 2000 à l'ensemble des orphelins de déportés. En cette matière, il est urgent d'agir au risque sinon de voir ressurgir des relents d'antisémitisme.

Par ailleurs, si des mesures sont annoncées pour mettre fin à la cristallisation des pensions, le flou demeure sur les modalités de leur mise en place : l'affectation des crédits inscrits à cet effet dans le budget, le coût réel de la décristallisation, les pays qui seront pris en compte,...

Enfin, il est étonnant que le rapporteur n'ait pas évoqué, dans son intervention, la question de la révision du rapport constant.

M. Pascal Terrasse a relevé le caractère inquiétant de ce budget, présenté comme étant un budget de transition - ce dont on peut prendre acte -, mais qui ne définit pas clairement les orientations qui seront celles du secrétariat d'Etat pour l'avenir. En outre, la forte diminution des crédits qu'il propose aura nécessairement des conséquences pérennes.

Compte tenu de ces incertitudes, il y a lieu de s'interroger en particulier sur :

- l'avenir des services départementaux de l'ONAC avec le risque de regroupement régional de ces services, les personnels de l'Office étant inquiets pour leur emploi ;

- la date qui pourrait être retenue pour la journée commémorative de la guerre d'Algérie ;

- les décisions à prendre pour l'attribution de la carte du combattant et l'évolution du montant de la retraite du combattant, l'attribution de cette carte pour des périodes de service relativement courtes en Afrique du Nord et l'accès à la retraite à l'âge soixante ans ne devait pas dissimuler la véritable question qui est celle du montant de cette retraite lequel est actuellement extrêmement modique ;

- la reconnaissance du statut de déporté aux personnes soumises au Service du travail obligatoire (STO). Un précédent secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants avait entamé, il y à quelques années, une étude sur cette question en concertation avec l'université de Caen. Il importerait maintenant de connaître la position du rapporteur.

Enfin, on ne peut que regretter l'inégalité profonde existant entre les orphelins de déportés qui bénéficient du dispositif mis en place par le décret du 13 juillet 2000 et ceux qui n'en bénéficient pas.

M. Pierre Hellier a observé que le choix d'une date commémorative pour la guerre d'Algérie devait venir des associations d'anciens combattants elles-mêmes et non être imposée « d'en haut » par le gouvernement ou le Parlement. En ce sens, il souscrit pleinement à la démarche de concertation entamée par le secrétaire d'Etat aux anciens combattants, M. Hamlaoui Mékachéra.

Le président Jean-Michel Dubernard a jugé ce propos plein de bon sens.

En réponse aux différents intervenants, le rapporteur pour avis a donné les indications suivantes :

- Le fait de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des anciens combattants pour 2003 n'est nullement la marque d'une incohérence ou d'un reniement mais procède de la volonté de faire confiance au secrétaire d'Etat quant à l'application des mesures qu'il a annoncées pour l'ensemble de la législature. Il s'agit clairement d'un budget de transition élaboré dans un contexte budgétaire resserré autour des priorités définies par le Président de la République et reprises par le Premier ministre, qui doit par ailleurs assumer le financement d'un certain nombre de mesures décidées par le gouvernement précédent. M. Hamlaoui Mekachéra s'est engagé à ouvrir et à régler l'ensemble des dossiers pendants d'ici la fin de la XIIème législature. Le budget pour 2003 reflète sa volonté de transparence et d'objectivité : il mérite à ce titre d'être soutenu.

- Les parlementaires présents à la commission d'étude de la revalorisation des rentes, des retraites et des pensions des anciens combattants de l'outre-mer ont unanimement soutenu la demande du monde combattant tendant à une décristallisation totale. Cette mesure est néanmoins extrêmement coûteuse à mettre en œuvre. Les 72,5 millions d'euros inscrits à cet effet dans le budget pour 2003 permettront seulement d'amorcer cette décristallisation sans pour autant régler l'ensemble des problèmes. Il est par ailleurs urgent que le Parlement adopte les dispositions législatives autorisant cette réforme, les solutions pratiques de décristallisation envisagées par le gouvernement n'étant pas connues à l'heure actuelle.

- En ce qui concerne le rétablissement du remboursement des cures thermales à son niveau antérieur, cette mesure ne figure pas dans le budget des anciens combattants et n'a certes pas une grande portée financière. Elle répond cependant à une véritable attente.

- L'inquiétude des personnels de l'ONAC au sujet de la réorganisation annoncée de l'office est légitime mais le nombre d'ayants-droit étant en diminution, il n'est pas anormal que les moyens mis à sa disposition soient revus à la baisse. Il est à souligner qu'il ne sera pas procédé à des licenciements « secs ». La réduction des effectifs sera étalée dans le temps. De plus, cent emplois de cadre A, à durée déterminée, seront créés pour remplacer les « emplois mémoire ». Enfin, le ministre s'est engagé à renforcer le rôle des assistantes sociales. Il faut donc se féliciter que la question difficile de l'avenir de l'ONAC ait été débloquée tout en veillant à ce que, dans l'avenir, les engagements pris soient respectés.

- La réduction à quatre mois de la durée de service requise pour l'attribution de la carte du combattant pour les policiers et les membres des compagnies républicaine de sécurité a été décidée par l'ancien secrétaire d'Etat aux anciens combattants, M. Jean-Pierre Masseret, à la demande du ministre de l'intérieur de l'époque. Si l'on peut s'interroger sur l'opportunité de cette décision, qui, pour certains, dévalorise la carte du combattant, il ne semble cependant pas contestable que cette mesure bénéficiant à certaines catégories d'anciens combattants, elle doive désormais être étendue à l'ensemble des anciens combattants. Rappelons néanmoins que le coût de cette généralisation s'élève à 22,5 millions d'euros.

- Plusieurs amendements proposent différentes formules de revalorisation de la retraite du combattant. Toutes ces mesures devront être examinées au regard du coût global du dispositif : le coût de l'attribution d'un point d'indice supplémentaire est supérieur à 15 millions d'euros.

- En ce qui concerne les orphelins de déportés, l'inégalité générée par le dispositif actuel est totalement inacceptable. La mesure doit bien évidemment bénéficier à l'ensemble des orphelins de déportés, quelle que soit la raison de la déportation. Le secrétaire d'Etat a décidé de désigner une personnalité extérieure au secrétariat d'Etat aux anciens combattants pour entendre l'ensemble des parties prenantes et proposer rapidement une solution. Ce problème doit être manié avec beaucoup de précaution.

- Pour le choix d'une date commémorative de la guerre d'Algérie, il faut rappeler que le secrétaire d'Etat a souhaité laisser le soin au monde combattant de se prononcer pour une date susceptible de faire consensus. A titre personnel, cependant, le rapporteur pour avis a maintenu sa position en faveur du 19 mars, qui avait été la sienne lors du vote, par l'Assemblée nationale, de la proposition de loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc. En effet, cette date, qui est celle de l'entrée en vigueur du cessez-le-feu en Algérie au lendemain des accords d'Evian, sera en tout état de cause retenue par l'histoire et elle représente à ce titre un choix approprié pour une journée de mémoire et de recueillement.

- Sur la question du rapport constant, il est vivement souhaitable que la concertation menée par le secrétariat d'Etat aux anciens combattants avec les associations aboutisse rapidement à l'adoption d'un nouveau mode de calcul clair, simple, compréhensible par tous et qui respecte, à terme, les intérêts du monde combattant.

- Enfin, concernant les personnes soumises au STO, aucune mesure nouvelle les concernant ne semble envisagée par le gouvernement.

La commission est ensuite passée à l'examen des amendements.

Article 36

(Titre III - Etat B - Anciens combattants)

La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à abonder de 645 915 euros les crédits de fonctionnement de l'ONAC figurant au chapitre 36-50 afin de les rétablir au niveau des services votés en 2002.

Le rapporteur pour avis a donné un avis favorable à cet amendement.

La commission a rejeté cet amendement.

Article 10

(Titre IV - Etat B - Anciens combattants)

La commission a examiné deux amendements du rapporteur pour avis et de M. Alain Néri ayant pour objectif commun d'augmenter de 1,52 millions d'euros les crédits sociaux de l'ONAC inscrits au chapitre 46-51.

Le rapporteur pour avis a jugé nécessaire que l'ONAC puisse, en 2003, poursuivre l'accompagnement social d'une population qui a bien souvent perdu toute autonomie économique après s'être sacrifiée pour la nation ou après avoir assumé des soins en faveur de leurs conjoints, économisant ainsi à la société des sommes considérables en soins hospitaliers ou infirmiers, au prix de leur renoncement à toute activité personnelle et de la précarisation de leur situation. Il est anormal que depuis 1999 les parlementaires soient contraints de se mobiliser et de mobiliser la réserve parlementaire afin d'abonder des crédits destinés à une action légitime et nécessaire de l'ONAC.

La commission a rejeté ces deux amendements.

Avant l'article 62

La commission a examiné, en discussion commune, un amendement du rapporteur pour avis visant à augmenter de trois points l'indice de pension applicable au calcul du montant de la retraite du combattant et un amendement de M. Alain Néri proposant une augmentation de cinq points de ce même indice.

La commission a rejeté ces deux amendements.

Article 62

Augmentation du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à fixer à 130 points de pension militaire d'invalidité le plafond majorable de la retraite mutualiste du combattant.

Après que M. Alain Néri a précisé que cette mesure, à laquelle il était favorable, ne représentait pas une priorité au regard des revendications du monde combattant, notamment en faveur de la revalorisation de la retraite du combattant, et que le rapporteur pour avis a donné un avis défavorable au motif qu'elle ne touchait qu'une minorité de cotisants, la commission a rejeté cet amendement.

Après l'article 62

La commission a ensuite examiné trois amendements identiques du rapporteur pour avis, de M. Maxime Gremetz et de M. Alain Néri, visant à harmoniser sur la base du critère de quatre mois de présence en Algérie, entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, les conditions d'attribution de la carte du combattant pour les anciens combattants d'Afrique du nord.

Après que M. Maxime Gremetz a souligné l'importance du signal en direction du gouvernement que constituerait l'adoption par la commission de ce dispositif, la commission a rejeté ces trois amendements.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Alain Néri dont le but est de permettre la délivrance de la carte du combattant aux anciens soldats stationnés aux frontières de l'Algérie (au Maroc et en Tunisie) et ayant participé à des opérations durant la guerre d Algérie.

Le rapporteur pour avis a opposé un avis défavorable à l'adoption de cet amendement. En effet, le secrétariat d'Etat mène en ce moment même une étude dont le but est de dénombrer les effectifs ainsi concernés et la réalité de leur engagement dans la guerre d'Algérie. Tant que ces travaux ne sont pas achevés, il n'apparaît pas opportun de légiférer en la matière.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Maxime Gremetz visant à mettre un terme à la cristallisation des pensions des anciens combattants ressortissants des pays antérieurement placés sous la souveraineté française, sur le fondement de l'arrêt M. Diop rendu par le Conseil d'Etat le 30 novembre 2001.

M. Alain Néri a souligné que cet amendement allait dans le sens des conclusions rendus par la commission ad hoc créée sous la précédente législature et auxquelles il souscrit.

Le rapporteur pour avis a émis un avis défavorable à l'adoption de cet amendement, le gouvernement ayant décidé d'entamer le processus de décristallisation et prévu l'inscription de crédits à cet effet dans le présent projet de loi de finances. Par ailleurs, les modalités de décristallisation proposées par l'amendement représentent un coût considérable estimé à plus de 457 millions d'euros.

Après que M. Alain Néri a rappelé que la cristallisation des pensions avait été envisagé, à sa création, comme une mesure visant à « punir » les ressortissants des pays ayant choisis l'indépendance à l'égard de la France, la commission a rejeté cet amendement.

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à instituer, à la date du 25 septembre, une journée nationale de commémoration en souvenir des actes de bravoure des harkis et des drames qu'ils ont connus.

M. Alain Néri a indiqué qu'une telle journée d'hommage national aux harkis existait déjà et avait été célébrée ces deux dernières années. Néanmoins, son statut demeure flou, puisque, à l'origine, il s'agissait d'une commémoration unique et non renouvelable. Il convient donc, par l'adoption de cet amendement, de pérenniser son existence.

Le rapporteur pour avis a émis un avis défavorable à l'adoption de cet amendement en précisant que le gouvernement s'était engagé à poursuivre cette commémoration dans les années à venir et que, par conséquent, il n'était pas opportun de légiférer en cette matière.

M. Pascal Terrasse a ensuite rappelé qu'il convenait d'être très attentif à ce que cette célébration ne disparaisse pas dans les années qui viennent. L'expérience montre que la tentation d'instituer un « memorial day » à l'anglo-saxonne - jour unique de célébration des victimes de la guerre - était grande pour certaines personnes et notamment pour l'actuelle ministre de la défense qui avait déposé une proposition de loi en ce sens lorsqu'elle était députée.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à instituer la date du 27 mai, jour de la formation du Conseil national de la résistance, comme date de célébration de la journée de la Résistance.

Le rapporteur pour avis a opposé un avis défavorable à l'adoption de cet amendement. En effet, comme pour la date de célébration des victimes de la guerre d'Algérie, il est préférable de s'en remettre à la concertation et de laisser les associations d'anciens combattants choisir une date susceptible de faire consensus. En effet, le 18 juin, jour anniversaire de l'appel du général De Gaulle, est également proposé par certaines associations comme date de commémoration de la journée nationale de la Résistance. Il convient de ne pas diviser le monde combattant par l'adoption d'une date qui ne fasse pas l'unanimité.

Le président Jean-Michel Dubernard a souligné que la classe politique ne sous-estimait pas le rôle du CNR - en particulier les gaullistes et les communistes - mais qu'il n'était pas souhaitable de multiplier les journées de commémoration.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a enfin examiné un amendement de M. Maxime Gremetz demandant au gouvernement de présenter au Parlement, au plus tard le 1er septembre 2003, un rapport sur l'extension du décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites à l'ensemble des orphelins des victimes du nazisme.

M. Pierre-Louis Fagniez s'est prononcé en faveur de l'adoption de l'amendement.

Le rapporteur pour avis s'est déclaré favorable à l'adoption de cet amendement qui permet d'envoyer un signal fort au gouvernement afin que des mesures en faveur de tous les orphelins de déportés, quel que soit le motif de cette déportation, soient prises rapidement. Toutefois, le gouvernement s'est d'ores et déjà saisi de la question et envisageait de nommer, dans les prochaines semaines, une personnalité indépendante afin qu'elle réalise la synthèse des demandes et formule des propositions.

M. Alain Néri a précisé que le décret en question visait une situation bien particulière, celle des victimes de la Shoah et prenait en compte le problème de la spoliation des biens juifs. Il convient donc d'adopter un dispositif distinct afin de préserver la spécificité de cette mesure de réparation.

M. Patrick Beaudouin a indiqué, qu'en l'état actuel, ce dispositif conduisait à des situations aberrantes aussi bien pour les orphelins de parents morts en déportation pour faits de résistance que pour les orphelins de parents juifs. Les enfants de parents juifs morts dans les camps de transit sur le sol français sont ainsi exclus du bénéfice des dispositions du décret du 13 juillet 2000.

La commission a adopté cet amendement.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits des anciens combattants pour 2003.

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La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Luc Préel, les crédits de la santé pour 2003.

Le rapporteur pour avis a tout d'abord salué la création d'un ministère de la santé de plein exercice, même si certains domaines, tel celui de la formation, demeurent partagés avec d'autres ministères. Le budget de la santé au sens strict s'élève à 8,4 milliards d'euros, alors que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) adopté par l'Assemblée nationale s'élève à 123,5 milliards d'euros. Cette séparation a un caractère artificiel. Dans les faits, le ministre est responsable de l'hôpital, des cliniques, du médicament et de la quasi-totalité des soins ambulatoires. La prochaine clarification des relations entre l'Etat et l'assurance maladie dans le cadre de la « nouvelle gouvernance » devrait permettre l'examen unifié des crédits de la santé.

En 2003, les crédits du ministère, à périmètre constant, progressent de 5 %. On peut y distinguer trois agrégats.

Le montant du premier agrégat, « santé publique et sécurité sanitaire », s'élève à 392 millions d'euros à structures constantes. Il comprend en premier lieu le financement des sept agences sanitaires, dont certaines disposent de ressources propres. Trois points méritent d'être relevés :

- la création de l'Institut national de prévention et d'éducation de la santé ;

- la forte diminution de la dotation de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) dont les crédits s'élèvent à 4,67 millions d'euros contre 25,2 en loi de finances initiale pour 2002. La trésorerie de l'agence est florissante ;

- l'accroissement des moyens de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) de 5,8 à 8,7 millions d'euros (les dysfonctionnements de l'agence ont été relevés par la Cour des comptes).

L'agrégat comprend en second lieu des actions de santé publique. Les crédits destinés à financer les programmes de prévention augmentent de 30 % et atteignent 173 millions d'euros. Le dépistage des cancers du sein et du colon devrait pouvoir être rapidement généralisé.

Le deuxième agrégat concerne l' « offre de soins et l'accès aux soins ». L'offre de soins est essentiellement financée par l'ONDAM. La dotation de l'agrégat atteint 1,184 milliards d'euros en crédits de paiement. La contribution de l'Etat au fonds de financement de la couverture maladie universelle s'élève à 960 millions d'euros, le reliquat étant assuré par les organismes d'assurance complémentaire. Il convient enfin de noter la lenteur de la montée en charge du FIMHO.

Le troisième agrégat a trait à la « gestion des politiques de santé et de solidarité ». Il n'est pas toujours évident de déterminer ce qui ressort au ministère de la santé et ce qui ressort au ministère des affaires sociales. Les crédits atteignent un milliard d'euros, en hausse de 2,7 %, et servent essentiellement à financer les dépenses de personnel. L'effort de repyramidage se traduit par une augmentation des postes de catégorie A. Le montant de la dotation de l'Ecole nationale de santé publique progresse de 5,2 millions d'euros, celui de la dotation aux ARH de 2 millions d'euros.

Il convient, enfin, de signaler la poursuite des modifications du champ de compétences entre l'Etat et l'assurance maladie, compétences qui devraient être mieux clarifiées à l'avenir. Trois modifications importantes sont à noter : le coût des stages de résidanat chez les médecins généralistes agréés est transféré au budget de l'Etat pour 40 millions d'euros ; en revanche, les dépenses afférentes à l'interruption volontaire de grossesse (24,7 millions) et aux centres de soins spécialisés pour les toxicomanes (107,5 millions) sont transférés aux régimes de l'assurance maladie.

Le rapporteur pour avis a ensuite précisé que la partie thématique de son avis est consacrée aux relations des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) avec le ministère de la santé, les préfets, les directions régionales de l'action sanitaire et sociale (DRASS) et les directions départementales de l'action sanitaire et sociale (DDASS), ainsi qu'aux modifications envisageables dans le cadre d'une transformation de ces ARH en agences régionales de santé (ARS). Trois étapes importantes sont intervenues ces vingt dernières années : les lois de décentralisation de mars 1982 et juillet 1983 ont entraîné la première partition des services déconcentrés entre les DDASS et les conseils généraux ; l'ordonnance d'avril 1996 a créé les ARH ; enfin, en 1998, sont apparues les agences sanitaires.

Après cinq années de fonctionnement, le bilan des ARH apparaît comme globalement positif. Elles sont pourtant « au milieu du gué », et plusieurs problèmes doivent être résolus : les relations avec le secteur ambulatoire et médico-social ; la prise en compte de la prévention et de l'éducation à la santé ; les relations avec les divers échelons de l'Etat et de l'assurance maladie ; le contrôle démocratique des ARH.

L'ARH, institution originale, constitue une forme de modernisation administrative réussie. Les agences ont permis d'améliorer la coopération entre les services de l'Etat et ceux de l'assurance maladie et ont posé les jalons d'une authentique planification hospitalière. Les ARH sont des structures légères, personnes morales de droit public, constituées sous la forme juridique d'un groupement d'intérêt public (GIP) entre l'Etat et l'assurance maladie. Les décisions sont prises soit par le directeur, soit par la commission exécutive qui associe de manière paritaire l'Etat et l'assurance maladie. Cette administration de mission a peu de moyens propres qu'il s'agisse des personnels (260 agents) ou de moyens financiers. Les ARH font donc appel à 1 030 équivalents temps plein en provenance de l'Etat et 1 080 des services de l'assurance maladie. Les « équipes rapprochées » ne comptent que 10 à 15 personnes et s'organisent sur une base thématique ou géographique.

Les directeurs sont dans une situation administrative ambiguë. Nommés par décret en conseil des ministres, ils sont en théorie autonomes par rapport à la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) ou à la Direction générale de la santé (DGS). Cependant, ils sont révocables. La DHOS leur adresse une lettre de mission. L'administration centrale, par la procédure des crédits fléchés, limite leur marge de manœuvre, même s'il est vrai que le suivi de ces crédits n'est guère assuré. Les relations avec le ministère, où ils sont réunis régulièrement, ne sont donc pas claires.

S'agissant des préfets, des DRASS et des DDASS, la création des ARH a été vécue avec circonspection, voire avec hostilité. Aujourd'hui, les relations se sont améliorées mais, en raison d'un chevauchement de compétences, des clarifications semblent nécessaires.

Le préfet conserve des compétences sanitaires et a autorité sur les services déconcentrés. Il est responsable de la sécurité des bâtiments et de la sécurité sanitaire. Il est également responsable de l'élaboration et de la réalisation des contrôles mais c'est le directeur de l'ARH qui doit en tirer les conséquences. Le préfet doit aussi organiser la permanence des soins : il préside le Comité départemental de l'aide médicale urgente (CODAMU) et le comité des transports ; il est habilité à réquisitionner les médecins. Il joue un rôle central dans le fonctionnement des conférences régionales de santé, définit et fait appliquer les programmes régionaux de santé et les programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins. Le préfet est également un acteur essentiel dans la négociation des contrats de plan qui comportent souvent des volets sanitaires ; il contrôle la légalité des délibérations des COMEX et des marchés publics des établissements, note les directeurs d'établissements de santé, gère une partie des personnels médicaux (essentiellement les personnels employés à temps partiel) et met en congé de longue durée les praticiens atteints de certaines affections. Enfin, il convient de signaler une curiosité : le préfet de région préside le conseil d'administration du centre anti-cancéreux de la région ; il doit donc demander les moyens correspondants à l'ARH.

Quant aux 22 DRASS et 102 DASS qui sont les services déconcentrés de l'Etat placés sous l'autorité du préfet elles s'interrogent sur leur rôle réel dans le domaine sanitaire. Elles assurent la définition, la gestion et l'animation des politiques sociale et sanitaire au niveau régional et départemental. Il convient de noter qu'il n'y a pas de hiérarchie de la DRASS sur les DDASS.

L'ARH, structure légère, dispose de personnels mis à disposition par les DRASS et les DDASS. Si l'ARH définit leur mission ces personnels continuent néanmoins d'être notés par les préfets, ce qui n'est guère cohérent. De plus, certaines ARH ont désigné des « chargés de mission départementaux » qui œuvrent donc au niveau du département. Or, comme seul le directeur de la DDASS siège à la COMEX, il en est parfois résulté quelques difficultés. Ces directeurs ont-ils une certaine latitude pour apprécier les propositions du directeur de l'ARH ou doivent-ils s'y conformer lors du vote à ses décisions ? Les personnels traversent par ailleurs une crise d'identité profonde, aggravée par de nombreuses vacances de postes. Ils déplorent l'élargissement constant de leur champ d'action et la multiplication non programmée de programmes prioritaires.

Il est donc urgent et nécessaire de clarifier les compétences de chacun.

S'agissant des relations avec les établissements, l'ARH exerce une tutelle budgétaire et administrative. Elle arrête les SROS et la carte sanitaire, adopte les projets d'établissement, « négocie » les contrats d'objectifs et de moyens, définit les budgets et les décisions modificatives, veille à l'utilisation des crédits fléchés et, enfin, décide des créations de postes. Les pouvoirs des ARH, en théorie très importants, posent le problème de l'autonomie des établissements et du pouvoir des conseils d'administration. De tels pouvoirs, pour être réels, nécessiteraient un personnel plus nombreux et plus compétent. Il convient à cet égard de noter la situation particulière de l'AP-HP.

Deux autres problèmes méritent d'être relevés.

D'abord l'absence de fongibilité entre les enveloppes sanitaires au sein de l'ONDAM provoque une division artificielle entre l'hôpital, le secteur ambulatoire et le secteur médico-social. Le dysfonctionnement du pilotage empêche d'avoir une action de coordination sur des « sujets-frontières » comme l'hospitalisation à domicile, l'organisation des urgences et la gérontologie.

Enfin, il n'existe pas de contrôle démocratique des décisions des ARH. L'étatisation du système de santé est quasiment achevée en 2002. On peut noter l'absence de réels contrôles démocratiques, alors même que la légitimité du paritarisme pour gérer l'assurance maladie est contestable et que l'ONDAM n'est pas médicalisé. Il est donc nécessaire de responsabiliser les acteurs de la santé pour mieux tenir compte des besoins. Cela permettra d'éviter le chevauchement des compétences des différents services de l'Etat et de clarifier les frontières entre les secteurs sanitaire et médico-social.

La régionalisation du système de santé permettrait de réaliser une politique de santé de proximité, de rendre chaque acteur responsable et de permettre un véritable contrôle démocratique. La création des agences régionales de santé (ARS) en constituerait un maillon essentiel. Il convient donc de définir leur champ de compétences, notamment par rapport à l'Etat.

Il est ainsi temps de mettre fin au cloisonnement entre secteur ambulatoire et secteur hospitalier afin de gérer l'ensemble du soin, d'éviter les reports d'un secteur sur l'autre et de permettre de développer les alternatives, notamment l'hospitalisation de jour et à domicile. Les ARS permettront d'avoir une vision globale des besoins, de la gestion des personnels et du développement des réseaux. Elles pourraient se voir confier la gestion des carrières des personnels hospitaliers et de la formation des personnels médicaux et paramédicaux.

Il est également artificiel de vouloir séparer le curatif et le préventif. Les ARS devraient donc être compétentes en matière de prévention et d'éducation à la santé, ce qui serait le gage d'une politique de prévention rigoureuse, coordonnée et apte à rééquilibrer le système de santé actuellement trop centré sur le curatif. Dans ce cadre, il serait sans doute nécessaire de réfléchir à l'opportunité de confier aux ARS la définition et le financement des actions de prévention, de dépistage et d'éducation pratiquées en milieu scolaire. En effet, La politique régionale de santé ne devrait pas s'arrêter aux portes des établissements scolaires.

On peut se demander s'il ne serait pas souhaitable, dans un second temps, de confier aux conseils généraux la responsabilité du secteur médico-social en ce qui concerne la prise en charge des personnes âgées, à condition que des conventions soient passées avec l'Etat et l'assurance maladie pour définir le financement des soins. S'agissant des personnes handicapées, qui relèvent le jour de la compétence de l'Etat et la nuit de celle des conseils généraux, une clarification pourrait être opérée au bénéfice exclusif des ARS.

L'Etat, au niveau national, garderait la responsabilité de la définition de la politique de santé publique et serait le garant de l'équité et de l'égal accès aux soins. Au niveau régional, les services de l'Etat assureraient le respect de ces principes, le contrôle de légalité, la définition de la prévention des risques et la sécurité sanitaire. Le préfet coordonnerait l'ensemble des services déconcentrés, les DRASS et les DDASS du chef-lieu de région pouvant fusionner. Les services centraux auraient ainsi une véritable mission stratégique et les services déconcentrés pourraient assurer la gestion des dispositifs sociaux (ville, logement, intégration, veille sanitaire) avec des personnels plus motivés en raison de la clarification des compétences.

Pour assurer l'ensemble de leurs missions, les ARS devraient avoir le statut d'établissement public car la forme de groupement d'intérêt public (GIP), qui est celle des ARH, n'est pas adaptée à cette évolution. Les ARS constitueraient les exécutifs régionaux de la santé, avec regroupement de la gestion du secteur hospitalier régional public et privé, de la médecine ambulatoire et de la prévention.

En conclusion, le rapporteur pour avis a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la santé pour 2003.

M. Bernard Perrut s'est inquiété de la prise en charge des soins palliatifs, sujet important qui n'a guère évolué depuis la loi de 1999 favorisant l'accès à ces soins. Il s'agit du « parent pauvre » de la santé. Seul un tiers des besoins sont couverts, faute de lits d'accueil en nombre suffisant, malgré les deux programmes d'action engagés (sur 1999-2001 pour l'hôpital et 2002-2005 pour l'aide à domicile) et les 122 unités actuellement en activité.

M. Pascal Terrasse a rappelé la faiblesse du budget du ministère de la santé par rapport aux montants du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce budget est très en retrait dans la prise en compte des politiques sociales, qu'il s'agisse des droits des femmes ou des moyens des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP). Les services déconcentrés de l'Etat voient leurs moyens réduits avec la suppression de 75 emplois alors que des postes d'administrateurs civils sont créés à l'administration centrale. Or, les attentes des personnels des services déconcentrés sont fortes. On peut également se demander si la localisation unique de l'Ecole nationale de la santé publique (ENSP) permettra de faire face aux besoins de formation des nombreux cadres du secteur sanitaire et social dans la perspective de départs massifs à la retraite.

S'agissant des agences de sécurité sanitaire, on peut douter que la réduction de leurs moyens de fonctionnement leur permette de poursuivre au mieux leurs missions. Ainsi, la subvention allouée à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) diminue de 81,4 %, celle de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) reste inchangée, celle de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) est réduite de 22,8 %, tandis que l'Institut de veille sanitaire (IVS) perd 500 000 euros et l'Etablissement français de greffes voit sa dotation réduite de 70,3 %.

M. Alain Néri s'est demandé comment la future loi de programmation quinquennale en santé publique sera articulée avec les autorisations budgétaires annuelles, notamment pour assurer la poursuite des actions de santé publique engagées dans le cadre de la loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. En ce qui concerne notamment la lutte contre le cancer, on peut se demander si la priorité affichée se traduit réellement par des moyens financiers adéquats : la mesure nouvelle de 35 millions d'euros pour les actions déconcentrées apparaît bien faible par rapport à l'ensemble des moyens déjà engagés, qui s'élevaient à 226,9 millions d'euros en 2002, tous financeurs confondus.

Enfin, il n'est rien prévu de particulier dans ce budget en faveur de la lutte contre les maladies orphelines qui causent souvent des difficultés sociales, financières et psychologiques importantes pour les personnes malades.

En réponse aux intervenants, le rapporteur pour avis a formulé les observations suivantes :

- On peut effectivement regretter la lenteur du développement depuis 1999 des moyens accordés pour favoriser l'accès aux soins palliatifs, notamment au niveau des départements.

- Il est difficile d'articuler le budget du ministère de la santé tant avec le budget de la sécurité sociale qu'avec le budget du ministère des affaires sociales qui regroupe les mesures relatives aux droits des femmes et aux COTOREP.

- Les postes supprimés en services déconcentrés n'étaient pas pourvus.

- Il serait souhaitable de favoriser la régionalisation de la formation des professions médicales, paramédicales et sociales.

- La trésorerie abondante des agences sanitaires devrait leur permettre de faire face à leurs besoins sans moyens nouveaux, notamment si elles acceptent de ne pas financer à 100 % certains investissements immobiliers, comme l'Etat le leur demande.

- L'intérêt de la loi de programmation quinquennale en santé publique sera de définir des priorités que le gouvernement devra ensuite financer dans le cadre budgétaire annuel, comme c'est le cas pour les crédits de la défense nationale.

- La lutte contre les maladies orphelines passe surtout par l'augmentation de l'aide à la recherche pharmaceutique dans ce domaine.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la santé pour 2003.

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