COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 11 décembre 2002
(Séance de 9 heures 30)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Examen de la proposition de loi adoptée par le Sénat relative à la responsabilité civile médicale - n° 370 (M. Jean-Pierre Door, rapporteur) .

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- Examen de la proposition de loi adoptée par le Sénat modifiant l'article 43 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives - n° 371 (M. Bernard Depierre, rapporteur) .

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- Informations relatives à la commission

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné, sur le rapport de M. Jean-Pierre Door, la proposition de loi adoptée par le Sénat relative à la responsabilité civile médicale - n° 370.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que cette proposition de loi vise à apporter une première réponse aux difficultés que connaît aujourd'hui l'assurance en responsabilité civile médicale.

Au cours des dernières années, une augmentation considérable du nombre des sinistres d'origine médicale qui pèsent sur les assureurs des professionnels et établissements de santé a été constatée. Un certain nombre d'entre eux, jugeant le risque trop coûteux, se sont retirés du marché, notamment sous l'effet cumulé des difficultés propres du secteur de l'assurance depuis les attentats du 11 septembre 2001 et des dispositions de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malade et à la qualité du système de santé.

En ce qui concerne notamment les cliniques privées, la situation ainsi créée est préoccupante puisqu'elles réalisent près de 60 % des actes de chirurgie, 40 % des actes d'obstétrique et 20 % des actes de médecine générale. Si les choses devaient rester en l'état, la moitié au moins des établissements de santé privés pourrait se trouver sans assurance au 1er janvier 2003. C'est dans ce contexte qu'il faut adopter très rapidement la présente proposition de loi.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur, a indiqué que la présente proposition de loi, adoptée le 12 novembre dernier par le Sénat à l'initiative du président de sa commission des affaires sociales, M. Nicolas About, et avec l'accord du gouvernement, répond à une situation d'urgence, ce qui justifie son adoption rapide et sans modification par l'Assemblée nationale.

Au 1er janvier prochain, notre système de soins risque d'être paralysé par l'impossibilité pour les professionnels et établissements de santé de s'assurer contre les risques que comporte immanquablement leur activité. Le marché de l'assurance en responsabilité civile médicale est en effet aujourd'hui tellement sinistré que la plupart des compagnies d'assurance non mutualistes ont préféré s'en retirer. Il faut donc rétablir au plus vite les conditions de la confiance, ce que devrait permettre la présente proposition de loi.

La situation difficile de ce marché de l'assurance n'est pas récente. Elle tient à l'augmentation des contentieux en matière médicale, au montant de plus en plus élevé des indemnisations accordées aux victimes par les tribunaux, à la plus grande technicité des actes réalisés qui décuple les risques et à la jurisprudence de la Cour de cassation qui, depuis 1990, a remis en cause l'économie des contrats en imposant la couverture par les assureurs de sinistres dont le fait générateur pouvait être antérieur de trente ans. De manière plus générale, l'assurance civile médicale représentant le plus souvent une activité marginale, environ 5 % des grandes compagnies d'assurance, elle a eu à souffrir du contexte économique et financier dégradé du secteur à la suite des tempêtes de 1999 et de la crise boursière.

Dans ce contexte, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a accordé de nouveaux droits à réparation aux victimes des conséquences des actes médicaux. Dans son titre IV, cette loi prévoit notamment l'indemnisation systématique des infections nosocomiales par la personne morale responsable et une nouvelle définition du délai de prescription en matière de responsabilité civile médicale, soit dix ans à compter de la consolidation du dommage, laquelle peut intervenir longtemps après le fait générateur. Dans le même temps, pour assurer l'indemnisation des victimes, a été imposée une obligation d'assurance.

Cette loi, attendue pendant trop longtemps par les victimes, a cependant imposé des obligations juridiques sans se préoccuper de leur faisabilité économique, c'est-à-dire concrètement de l'assurabilité des nouveaux risques. Compte tenu de ce qu'ils ont considéré comme de nouvelles contraintes inassurables financièrement - en raison de l'absence de visibilité à long terme sur l'évolution des contentieux en responsabilité civile médicale et de la future jurisprudence des commissions régionales de conciliation et d'indemnisation - un certain nombre d'assureurs ont préféré annoncer qu'ils se désengageraient totalement du marché. Il y avait donc un risque grave que plus de la moitié des cliniques privées et un certain nombre de spécialistes, notamment en anesthésie et en gynécologie-obstétrique, ne trouvent pas d'assureurs dès l'année prochaine. Ainsi, onze spécialités sont visées à travers 800 établissements et 10 000 praticiens.

C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'intervenir, dans le courtant de l'été dernier, pour mettre l'ensemble des acteurs concernés en situation de trouver une solution acceptable par tous, c'est-à-dire rassurer les professionnels et les établissements de santé en permettant la reformation du marché de l'assurance en responsabilité civile médicale, sans pour autant remettre en cause les principes ayant fondé les avancées de la loi du 4 mars 2002. M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, a ainsi réuni le 7 octobre 2002 une table ronde avec l'ensemble des parties, qui a permis de trouver un juste compromis. Le texte juridique de ce compromis a été repris par M. Nicolas About sous la forme d'une proposition de loi, déposée sur le bureau du Sénat le 25 octobre 2002.

Il est proposé tout d'abord que les infections nosocomiales ayant les conséquences financières les plus lourdes, mais qui sont heureusement les moins nombreuses, soit avec un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % ou en cas de décès, ne soient pas indemnisées par les compagnies d'assurance mais par la solidarité nationale, à travers l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections nosocomiales et des affections iatrogènes (ONIAM). Pour éviter une déresponsabilisation dommageable des établissements de la santé en la matière, il est toutefois prévu que l'office exerce une action récursoire en cas de manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales.

Ensuite, un nouveau régime juridique est proposé pour les contrats d'assurance en responsabilité civile médicale. Ces contrats ne seront plus en base fait générateur mais en base réclamation. Ils ne couvriront plus indéfiniment dans le futur les conséquences des actes passés, mais seulement ceux qui font l'objet d'une première réclamation par la victime pendant la période de validité du contrat. Les assureurs devraient ainsi pouvoir rétablir un équilibre financier entre les primes perçues une année et les indemnités qu'elles sont censées couvrir dans des conditions qui, auparavant, ne pouvaient pas être connues.

Pour autant, il convient de garantir aux professionnels et établissements de santé une continuité de leur couverture assurancielle contre les conséquences d'actes passés. C'est pourquoi il est prévu une garantie subséquente de cinq ans en général et de dix ans pour les professionnels de santé lorsqu'ils partent à la retraite ou décèdent, par laquelle la garantie du contrat antérieur continuera à courir si la victime présente sa réclamation pendant ce laps de temps qui suit la fin du contrat.

Ce système offrira une couverture assurancielle continue aux professionnels et aux établissements de santé aussi longtemps qu'ils seront assurés et au-delà pendant une période qui devrait couvrir la quasi-totalité des réclamations susceptibles d'intervenir. Ensuite les droits des victimes sont de toute façon garantis par l'intervention de l'ONIAM, mais on peut regretter que l'action subrogatoire de l'office contre la personne responsable n'ait pas été exclue dans tous les cas. Cette imprécision de la proposition de loi mériterait d'être revue à l'occasion d'un prochain texte portant diverses dispositions d'ordre sanitaire et social.

Dès l'adoption du texte par le Sénat, des compagnies d'assurance du marché français ont constitué un groupement temporaire d'assurance médicale (GTAM) pour garantir la couverture, sur l'ensemble de l'année 2003, des professionnels et établissements de santé dont les contrats d'assurance auront été résiliés et qui n'auraient pas pu en contracter un autre, compte tenu l'état du marché, d'ici le 1er janvier 2003. Les nouveaux contrats ne seront pas signés avant l'adoption de la proposition de loi par l'Assemblée nationale, d'où l'intérêt de l'adopter sans modification d'ici la fin de l'année.

Il y a cependant de quoi être inquiet devant l'évolution des primes des nouveaux contrats d'assurance en responsabilité civile médicale. En effet, si tout le monde pourra être assuré, à quel coût ? Et qui devra finalement payer ? Les primes pourraient être multipliées par trois pour les cliniques privées et atteindre 30 % à 40 % d'augmentation pour certains médecins spécialistes (chirurgie, anesthésie, gynécologie-obstétrique). Il serait dommageable pour la qualité du système de santé que des médecins préfèrent se retirer de certaines activités compte tenu du coût prohibitif de leur assurance.

Le problème doit donc trouver rapidement une solution, dans le cadre des négociations conventionnelles et tarifaires en cours entre l'assurance maladie et les représentants des professionnels de santé. L'assurance maladie propose une solution du type contrat groupe ouvert ; les syndicats de médecins proposent que chaque professionnel de santé soit en mesure, dans le cadre de son activité propre, de financer son assurance, grâce à une modulation du tarif des actes en fonction des risques (et donc de la technicité) propres à chacun d'entre eux. Des solutions concrètes devraient être trouvées très rapidement pour rassurer les professionnels et établissements de santé. Pour autant, l'ensemble des problèmes de fond de la responsabilité civile médicale ne sont pas réglés par cette proposition de loi adoptée en urgence.

M. Pierre Hellier a souligné l'importance et l'urgence de ce texte qui met fin à l'incertitude concernant la poursuite des activités médicales faute d'assurance pour l'année 2003. La solution envisagée est cependant provisoire et il conviendra de réfléchir à l'adoption d'un dispositif pérenne dès l'année prochaine.

Après avoir indiqué qu'il comprenait le problème auquel la proposition de loi tente d'apporter une réponse, M. Maxime Gremetz a fait part de son hostilité quant à la méthode employée qui s'apparente, selon lui, à un chantage caractérisé de la part des compagnies d'assurance. Le chiffre d'affaires et les profits de ces entreprises ne cessent de progresser. Or ce texte va leur permettre d'élever encore le montant des primes des assurés sans contrepartie puisque les gros risques seront couverts par la solidarité nationale et les petits risques par l'assurance privée.

M. Claude Evin a déclaré ne pas mésestimer le problème posé par la décision prise par plusieurs compagnies d'assurance de se retirer de la couverture du risque médical. Les raisons de ce retrait doivent cependant être appréciées avec objectivité. Certes, la sinistralité, au regard du nombre de plaintes déposées par les patients, a augmenté ces dernières années mais le nombre de professionnels de santé dont la responsabilité a été mise en cause est resté stable. L'inquiétude des médecins provient surtout de la médiatisation très forte de ces questions.

Par ailleurs, les compagnies d'assurance ont tenté de faire croire que leur décision de se retirer du secteur médical est la conséquence directe de l'application de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. En réalité, cette décision était déjà en gestation avant l'adoption de ce texte, qui a apporté un certain nombre de réponses à leurs interrogations en leur permettant, notamment, de siéger dans les commissions régionales chargées d'apprécier les sinistres. De plus, il n'est pas exact d'affirmer que la loi du 4 mars 2002 a créé de nouveaux cas de mise en jeu de la responsabilité des médecins, et partant de nouveaux risques à couvrir pour les assurances, car cette loi n'a fait que confirmer une jurisprudence devenue constante. Comme l'a indiqué M. Maxime Gremetz, on assiste bien à un chantage des compagnies d'assurance.

En outre, la proposition de loi, dont le texte reprend l'accord conclu entre le ministre et les différentes parties prenantes, ne constitue qu'une solution parmi d'autres envisageables et au surplus n'apporte qu'une solution très partielle au problème posé. En effet, qu'adviendra-t-il de l'indemnisation des victimes d'un professionnel de santé qui a changé d'activité au 1er janvier 2003 ? Le texte ne prend pas en compte ce type de cas. A l'inverse, le texte intègre des dispositions qui excèdent le champ initial de la proposition de loi, par exemple pour l'association France-Hypophyse. La mutualisation des risques constituerait une solution préférable.

Enfin, l'opposition de principe du rapporteur à l'adoption de tout amendement, au motif de l'urgence, est choquante.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que le rapporteur ne refuse pas a priori tout amendement, mais qu'il souhaite, par souci de rapidité, tant les dispositions proposées sont attendues par les professionnels de santé et les victimes, que le texte soit adopté sans modification.

M. Jean-Marie Rolland a considéré que cette proposition de loi, issue d'une concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, comporte trois axes principaux : la garantie de l'indemnisation des victimes, le caractère rassurant de ses dispositions pour les professionnels de santé et la nécessaire adaptation des contrats d'assurance à la spécificité de l'activité médicale. Contrairement aux affirmations de MM. Maxime Gremetz et Claude Evin, l'assurance du risque médical n'est pas une activité très rentable. Le Sou médical, organisme mutualiste dont c'est l'unique activité, est ainsi déficitaire depuis trois ans. Le mérite de cette proposition de loi est donc double : elle permet aux praticiens d'exercer correctement leur activité durant l'année 2003 tout en maintenant le nécessaire principe de responsabilité du corps médical.

M. Georges Colombier a souligné l'urgence qu'il y a à légiférer en la matière. Le problème de la responsabilité civile médicale est une source majeure de préoccupations aussi bien pour les professionnels de santé que pour tous les citoyens et il faut éviter une dérive à l'américaine.

M. Edouard Landrain a indiqué que le véritable enjeu de ce texte est la prise en compte du bien-être des malades. En conséquence, il y a effectivement urgence à adopter ces dispositions, même si elles ne règlent pas le fond du problème. Une réflexion globale sur la responsabilité civile médicale reste à mener pour définir précisément la notion de risque médical et le rôle que doit jouer l'Etat dans le système d'indemnisation des victimes.

M. Jean-Marie Geveaux s'est opposé aux propos tenus par M. Claude Evin au motif que le nombre de préjudices liés à l'activité médicale est en inflation constante et se traduit par une augmentation des primes d'assurance des professionnels de santé. La loi du 4 mars 2002 aboutit à une judiciarisation accrue de la santé dont les effets néfastes sont déjà à l'œuvre, comme aux Etats-Unis. D'autre part, s'il est regrettable de ne pas amender un texte qui mériterait quelques modifications, le caractère urgent de la situation impose qu'il soit adopté dans les plus brefs délais.

M. Claude Evin a rappelé que le groupement temporaire d'assurance médicale ne s'est engagé à garantir, après l'adoption de la proposition de loi, que les contrats courant jusqu'au 31 décembre 2003.

M. Maxime Gremetz s'est étonné que, à l'occasion du débat sur cette proposition de loi, aucun lien ne soit établi avec une récente décision du Conseil d'Etat appliquant la disposition de la loi du 4 mars 2002 visant à contrer la jurisprudence Perruche. Cette décision a pour conséquence de dégager les personnels médicaux de toute responsabilité et de limiter les indemnisations versées aux malades comme à leur famille, ce qui n'était pas le but recherché.

M. Claude Evin a rappelé qu'une forte pression de la part des assureurs s'était exercée sur le législateur pour qu'il légifère sur l'arrêt Perruche, pression qu'il avait à l'époque refusée. Or, le Parlement a effectivement légiféré et les assureurs se sont néanmoins retirés. Aujourd'hui, la pression concerne la responsabilité civile médicale : les assurances sont devenus à cet égard une sorte de « rouleau compresseur ». A quoi servent les assureurs qui, lorsqu'ils sont confrontés à un risque, se retirent ?

M. Dominique Tian a estimé que le texte proposé, même s'il faut l'adopter, n'apporte pas de solution durable aux nombreux problèmes soulevés par les règles applicables en matière de responsabilité civile médicale. Un flou juridique persiste, le juridisme à l'américaine se développe et le problème financier posé par l'augmentation des primes des assureurs, particulièrement pour les cliniques, subsiste. Si les grands établissements hospitaliers sont exonérés d'assurance en responsabilité civile, il n'en est pas de même pour les cliniques, qui se voient obligées de négocier avec les compagnies d'assurance le montant de primes très élevées.

Tout en convenant de la pression forte exercée par les assureurs, le président Jean-Michel Dubernard a estimé qu'il ne faut pas pénaliser davantage le système hospitalier déjà dans un état critique et qu'une solution doit être trouvée pour les professionnels et pour les victimes.

M. Jean-Marie Geveaux a remarqué que le groupement temporaire d'assurance médicale ne pourra pas lui-même fixer le montant des primes. Dans ce contexte, il paraît difficile de demander à une clinique de souscrire un contrat alors même qu'elle ignore le montant de la prime.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- S'agissant de la position des assureurs, le terme de chantage ne peut effectivement pas être exclu. Il faut souligner que la fixation du taux d'incapacité à 25 % permet néanmoins de limiter l'intervention de l'ONIAM à leur place.

- On observe ces dernières années une hausse de la sinistralité, du moins du montant des indemnisations, qui, il est vrai, pourrait être mieux évaluée, par exemple par la création d'un observatoire de la sinistralité.

- Le retrait des assureurs relève d'un contexte qui s'était dégradé bien avant l'adoption de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il s'agit d'un marché très réduit où les montants des indemnisations n'ont aucun rapport avec le montant des primes, comme le montre l'exemple récent des patients de la clinique du sport. Pourtant, il est indispensable d'indemniser les victimes.

- En ce qui concerne le montant des primes, le groupement temporaire d'assurance médicale surveillera la tarification et l'assurance maladie participera financièrement à leur prise en charge.

- La proposition de loi a des points faibles dont il faut avoir conscience. En particulier, il est nécessaire de renforcer la responsabilisation des établissements de santé en ce qui concerne les infections nosocomiales. Le problème de l'assurance en responsabilité civile médicale ne sera réglé que pour l'année 2003, qui devrait voir le retour des assureurs. Pour autant, l'année prochaine, le dispositif devra être modifié et complété à l'occasion de l'examen d'un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre sanitaire et social.

- Le bureau central de tarification n'a pas encore été mis en place et le décret fixant les barèmes et taux d'incapacité en application de la loi du 4 mars 2002 n'a pas encore été pris. L'ensemble du dispositif pourra être revu à l'expérience. En attendant, l'important est l'adoption du texte en l'état avant la fin de l'année, de manière à ce que les professionnels de santé concernés puissent exercer leur activité l'année prochaine en étant pleinement assurés et rassurés.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er  (articles L. 1142-1-1 nouveau, L. 1142-2, L. 1142-5, L. 1142-8, L. 1142-15, L. 1142-17, L. 1142-17-1 nouveau, L. 1142-21, L. 1142-22, L. 1142-22-1 nouveau et L. 1142-23 du code de la santé publique) : Modifications de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades en ce qui concerne la réparation des conséquences des risques sanitaires

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé visant à réduire de 25 % à 15 % le taux d'incapacité permanente à partir duquel les infections nosocomiales sont prises en charge au titre de la solidarité nationale.

M. Olivier Jardé a précisé que le taux de 25 % n'est qu'exceptionnellement atteint. La moyenne observée étant de 12 %, un taux de 15 % permettrait de diminuer la part prise en charge par les assureurs et ferait relever de la solidarité nationale les conséquences dommageables d'un phénomène imprévisible. Si les internes ne s'inscrivent pas au diplôme d'études spécialisées de chirurgie orthopédique, cela est dû non seulement aux conditions de vie induites par le choix de cette spécialisation mais également à la judiciarisation croissante des conditions d'exercice de cette profession.

Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement, expliquant que la question de la répartition entre assureurs et ONIAM devrait être examinée après la sortie du décret fixant le taux d'incapacité permanente partielle applicable pour l'ensemble des accidents médicaux. A ce stade, un équilibre a été trouvé avec les assureurs, équilibre qu'il convient de ne pas remettre en cause.

M. Claude Evin a estimé que cette modification de la loi du 4 mars 2002 relève d'une négociation avec les assureurs, que le taux retenu est déjà faible et qu'il n'est pas opportun d'abaisser encore le seuil à partir duquel la solidarité nationale doit intervenir.

Le terme de « judiciarisation » du monde médical doit être utilisé avec beaucoup de précaution. En effet, un patient dont l'état de santé subit une dégradation non imputable à l'évolution naturelle de sa maladie subit un préjudice, qu'il faut indemniser, ce qui conduit à rechercher les responsabilités. Dans cet esprit, la loi du 4 mars 2002 n'exclut pas le recours à des juridictions de droit commun mais crée des commissions régionales où siègent des professionnels de santé et des assureurs. Elle permet justement de limiter la judiciarisation, tout en permettant la réparation des préjudices sans faire peser un poids trop lourd sur les professionnels de santé.

Le président Jean-Michel Dubernard a rappelé que la loi du 4 mars 2002 résulte d'un large consensus au sein du Parlement et parmi les professionnels de santé. Cependant, il est encore nécessaire de procéder à plusieurs ajustements pour qu'elle soit pleinement applicable. Il ne faut pas négliger l'impact des articles de presse et des délibérations du Parlement sur les choix de carrière des jeunes médecins.

M. Olivier Jardé a souligné que l'accord conclu avec les assureurs conduit au triplement des primes pour les cliniques privées. En outre, le titre IV de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé n'a pas défini l'aléa thérapeutique et n'organise pas une représentation satisfaisante des médecins au sein des commissions régionales.

Le rapporteur a précisé que le montant des primes constitue un des éléments de la négociation conventionnelle et tarifaire entre les caisses d'assurance maladie et les syndicats de médecins.

La commission a rejeté cet amendement

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé précisant le barème par rapport auquel le taux d'incapacité permanente résultant d'une infection nosocomiale est déterminé.

M. Olivier Jardé a observé qu'en raison de la multiplicité des barèmes existants, il est indispensable que la proposition de loi précise celui auquel elle se réfère dans ce cas précis.

Le rapporteur a indiqué que le barème applicable pour les infections nosocomiales sera celui prévu par la loi du 4 mars 2002 pour l'ensemble des accidents médicaux. Son contenu sera connu précisément lorsque le décret d'application sera publié.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé précisant que l'indemnisation par la solidarité nationale des dommages résultant d'infections nosocomiales s'applique également dans le cas d'une incapacité temporaire de travail égale ou supérieure à trente jours.

Le rapporteur a indiqué que les incapacités temporaires de travail étant, par définition, relativement courtes, leur indemnisation doit relever des assurances et non de la solidarité nationale.

La commission a rejeté cet amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé précisant que l'expertise déterminant le taux d'incapacité permanente doit obligatoirement relever d'une structure collégiale comprenant, à côté d'un médecin ayant une formation en droit médical, un spécialiste de la pathologie concernée.

Le rapporteur ayant observé que la loi du 4 mars 2002 avait déjà prévu une procédure d'expertise obligatoire et contradictoire dans tous les cas, cet amendement a été retiré par son auteur.

La commission a rejeté un amendement de coordination présenté par M. Olivier Jardé étendant aux incapacités temporaires de travail supérieures à trente jours l'indemnisation des dommages résultant d'une infection nosocomiale par la solidarité nationale.

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé prévoyant la transmission préalable à l'assureur du rapport d'expertise dans le cadre de la procédure d'évaluation de l'aggravation des dommages résultant d'une infection nosocomiale.

M. Claude Evin a observé que la victime ne connaissant pas l'assureur de la partie en cause, il appartient à cette dernière de prendre contact avec son assurance en cas de litige.

Le rapporteur a estimé que cet amendement ne se justifie pas, la loi du 4 mars 2002 ayant mis en place une procédure d'expertise contradictoire avec transmission du rapport d'expertise aux parties.

La commission a rejeté cet amendement.

A propos de l'article 1er, M. Claude Evin a exprimé de fortes réserves sur le transfert à l'ONIAM de l'ensemble des obligations de l'association France-Hypophyse. Cette disposition risque d'empêcher les victimes de rechercher les responsabilités réelles en la matière.

La commission a adopté l'article 1er sans modification.

Article 2 (article 98-1 nouveau de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002) : Date d'entrée en vigueur des sanctions pénales en cas de manquement à l'obligation d'assurance en responsabilité civile médicale

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 3 (article 101 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002) : Date d'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades en ce qui concerne la réparation des conséquences des risques sanitaires.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 4 (article L. 251-2 nouveau du code des assurances) : Régime juridique des contrats d'assurances en responsabilité civile médicale.

La commission a examiné un amendement de M. Olivier Jardé portant la garantie subséquente de couverture à dix ans à partir de la majorité de la victime si celle-ci était mineure au moment des faits.

Le rapporteur a indiqué que si l'indemnisation doit intervenir après l'expiration du délai de couverture assurancielle de dix ans, elle sera à la charge de l'ONIAM, lequel ne pourra pas exercer d'action récursoire contre le professionnel de santé ne bénéficiant plus d'une couverture assurancielle.

La commission a rejeté cet amendement.

M. Claude Evin a indiqué que les dispositions de l'article 4 risquent de susciter des difficultés pour les professionnels de santé ayant changé d'activité au 1er janvier 2003. Par exemple, un gynécologue-obstétricien ayant abandonné au 1er janvier ses activités d'échographie ne sera plus couvert cinq ans après cette date pour les éventuels litiges qui y seraient liés et dont le fait générateur se serait produit par hypothèse pendant la période antérieure.

Le rapporteur a observé qu'il s'agit d'un problème technique qui peut se poser pour quelques contrats non renouvelés par tacite reconduction. Le dispositif devra vraisemblablement être revu l'année prochaine.

La commission a adopté l'article 4 sans modification.

Article 5 : Modalité d'entrée en vigueur du nouveau régime juridique des contrats d'assurance en responsabilité civile médicale

La commission a examiné un amendement de M. Claude Evin visant à prévoir que les assureurs ayant conclu des contrats d'assurance comportant une garantie trentenaire demeurent tenus par leur engagement initial.

M. Claude Evin a précisé que cet amendement vise à rétablir une situation équitable à la fois pour les assureurs et pour les professionnels de santé lorsque les contrats d'assurance ont été signés sous l'ancien régime juridique applicable. En effet, les assureurs ont encaissé des primes élevées, puisqu'elles avaient été fixées au titre d'une garantie trentenaire, alors que la proposition de loi réduit ce délai à seulement cinq ans après la résiliation ou l'expiration du contrat. Cet amendement permet au nouvel assureur de se retourner contre l'assureur précédent qui avait couvert une garantie trentenaire.

Le rapporteur a observé que la formulation de l'amendement ne régle pas le problème soulevé. Il propose, en outre, une modification du régime juridique des contrats que les assureurs ne souhaitent pas. En effet, il était économiquement non viable de maintenir une couverture trentenaire (base fait générateur) alors que les primes étaient en fait calculées dans le cadre d'une garantie décennale (base réclamation). De plus, la plupart des contrats d'assurance sont renouvelés par tacite reconduction et donc relèvent de l'article 4 et non de l'article 5.

La commission a adopté l'article 5 sans modification.

Article 6 : Application outre-mer par ordonnance

La commission a adopté l'article 6 sans modification.

La commission a ensuite adopté l'ensemble de la proposition de loi sans modification.

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La commission est ensuite passée, sur le rapport de M. Bernard Depierre, à l'examen de la proposition de loi adoptée par le Sénat et modifiant l'article 43 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives (n° 371).

M. Bernard Depierre, rapporteur, a tout d'abord rappelé que cette proposition de loi est d'origine sénatoriale. Son objet, qui peut paraître a priori mineur, est en réalité d'importance puisque ce texte a le mérite de lever nombres d'ambiguïtés et de doutes qui entretiennent l'inquiétude de nombreux acteurs professionnels du sport, qu'ils soient éducateurs ou employeurs.

Il faut rappeler que, lors de la discussion devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de la loi du 6 juillet 2000 dite « loi Buffet », de nombreux parlementaires s'étaient inquiétée de l'impréparation et du flou qui caractériseraient la nouvelle rédaction de l'article 43 de la loi du 16 juillet 1984 définissant les conditions d'exercice des différentes profession afférentes à l'encadrement des activités physiques ou sportives.

Le texte initial du projet de loi visait à supprimer toute référence à la détention d'un diplôme et entendait dans le même temps s'appliquer indifféremment aux travailleurs salariés comme aux bénévoles. Ce n'est que grâce à l'action conjuguée des deux assemblées qu'a pu être votée une rédaction n'imposant pas des règles exagérément restrictives pour les bénévoles et reconnaissant la valeur des diplômes délivrés aussi bien par le ministère des sports que par les fédérations sportives. Malheureusement, le gouvernement ayant déclaré l'urgence sur ce texte de plus de soixante articles, le temps a manqué pour trouver une rédaction totalement satisfaisante de cet article 43.

Surtout, le choix commun de l'Assemblée nationale et du Sénat d'appliquer aux professions sportives le régime de droit commun de la formation professionnelle, à savoir celui de l'article 8 de la loi n° 71-577 du 16 juillet 1971 d'orientation sur l'enseignement technologique (devenu depuis l'article L. 335-6 du code de l'éducation), et de mettre ainsi un terme à la procédure spécifique d'homologation par le ministère, a suscité l'inquiétude des titulaires de diplômes homologués.

C'est pourquoi, pour apaiser cette inquiétude, le gouvernement s'est finalement décidé à proposer au législateur - dans le cadre de l'examen de la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, économique et culturel - de prolonger jusqu'au 31 décembre 2002 les « décisions d'inscription » sur la liste d'homologation ministérielle intervenues avant l'entrée en vigueur de la loi du 6 juillet 2000 précitée.

Cependant, le report ne règle pas la question de fond, à savoir si les personnes ayant obtenues leur diplôme sous l'empire prorogé de l'ancienne réglementation, et tout particulièrement les titulaires de diplômes fédéraux, pourront continuer d'exercer leur profession en 2003 sans avoir à satisfaire à de nouvelles épreuves. Cette interrogation a été particulièrement présente lors des débats menés dans toute la France à l'occasion des Etats généraux du sport.

Pour apporter une réponse à ce problème, la proposition de loi poursuit trois objectifs. Le premier est de clarifier la situation des titulaires d'un diplôme homologué par le ministère ou d'une décision d'autorisation spécifique. Ils sont expressément exclus du champ d'application de la nouvelle réglementation et pourront donc continuer d'exercer sans examen supplémentaire. Le deuxième objectif est de permettre la réintégration des militaires parmi les fonctionnaires exemptés de l'obligation de détenir un diplôme en raison de leurs conditions de recrutement puisque la loi du 6 juillet 2000 les avait involontairement exclus de cette catégorie et rendait ainsi illégal l'encadrement d'activités physiques ou sportives par les militaires. Le troisième objectif consiste à opérer une mise à jour formelle. Il subsiste en effet au deuxième alinéa du I du nouvel article 43, la référence à l'article 8 de la loi d'orientation sur l'enseignement technologique du 16 juillet 1971 qui n'a pas été remplacée en 2000 par la référence pertinente à sa version codifiée. C'est cette scorie qu'il convient d'éliminer grâce à l'introduction de la référence à l'article L. 335-6 du code de l'éducation. Cette mise à jour est d'autant plus nécessaire que cet article du code de l'éducation a été modifié par l'article 134 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale qui a introduit la procédure d'enregistrement des diplômes au sein du registre national des certifications professionnelles.

En conclusion de son intervention, le rapporteur a proposé à la commission d'adopter l'article unique de la proposition de loi sans modification, en raison notamment de l'urgence à rassurer les 15 à 18 000 diplômés qui sont actuellement dans l'incertitude.

Le président Jean-Michel Dubernard a indiqué que M. Maxime Gremetz lui avait fait connaître l'intention du groupe communiste de voter cette proposition de loi lors des débats en séance publique.

M. Edouard Landrain a relevé que cette proposition de loi est très attendue. Elle va permettre, outre de conforter la situation de quelque 15 à 18 000 personnes, d'éviter d'importants dysfonctionnements au sein des associations et des communes.

M. Jean-Claude Beauchaud s'est tout d'abord félicité du soin mis par le rapporteur à présenter ce texte sans esprit de polémique.

Il a rappelé que les deux assemblées ont, au moment de l'examen de la loi du 6 juillet 2000, éprouvé les plus grandes difficultés à rédiger de façon sereine et équilibrée l'article 43 car, à l'époque, une forte pression s'était fait sentir de la part de ceux qui plaidaient pour que seuls soient reconnus les brevets d'Etat au détriment des diplômes fédéraux. Or, sur le terrain, chacun sait que la présence des détenteurs de diplômes fédéraux est cruciale pour faire vivre les associations et les clubs sportifs notamment dans les plus petites communes.

Ce texte lève les ambiguïtés nées de la rédaction actuelle de l'article 43, et doit donc être soutenu, mais il est dommage qu'il n'aborde pas d'autres sujets importants et que le législateur soit condamné à n'intervenir qu'au coup par coup dans le domaine du sport.

M. Henri Nayrou a noté que si l'intention du législateur avait été claire lors des débats de 2000 s'agissant de l'article 43, l'application de ces dispositions pose, quant à elle, problème. La nécessité de cette proposition de loi n'est donc nullement contestable. Deux points restent cependant en suspens : d'une part le problème de la liste d'homologation qui devra être à terme examinée de près par des techniciens et, d'autre part, la question de l'absence de diplômés d'Etat dans certaines disciplines qui avait d'ailleurs motivé la rédaction initiale du projet de loi présenté par Mme Marie-George Buffet.

M. Gilles Artigues a indiqué qu'il avait déposé en vue de la séance publique un amendement prévoyant explicitement d'ajouter à la liste des fonctionnaires exemptés de l'obligation posée au I de l'article 43 , les enseignants d'éducation physique et sportive exerçant au sein des établissements privés sous contrat d'association.

Le rapporteur a relevé que cet amendement, qui devrait être examiné ultérieurement au titre de la réunion de la commission organisée en vertu de l'article 88 du règlement, était probablement inutile car les enseignants d'éducation physique et sportive dans les établissements privés sous contrat doivent être titulaire du CAFEPS-CAPEPS délivré par le ministère de l'éducation nationale et ne relèvent donc pas du champ de l'article 43.

La commission a ensuite adopté à l'unanimité l'article unique de la proposition de loi sans modification.

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Informations relatives à la commission

La commission a désigné Mme Muriel Marland-Militello pour siéger au Conseil national consultatif des personnes handicapées.

La commission a décidé de créer une mission parlementaire commune avec la commission des affaires étrangères sur la création d'une chaîne française d'information à vocation internationale.


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