COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 60

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 30 septembre 2003
(Séance de  15 heures)

12/03/95

Présidence de M. Jean-Michel Dubernard, président.

SOMMAIRE

 

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- Audition, ouverte à la presse, de M. Marc Tessier, président de France Télévisions, sur le contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions et de MM. Christopher Baldelli, directeur général de France 2, Rémy Pflimlin, directeur général de France 3, Jean-Pierre Cottet, directeur général de France 5 .

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- Information relative à la commission

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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Marc Tessier, président-directeur général de France Télévisions, sur l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions durant l'année 2002 et MM. Christopher Baldelli, directeur général de France 2, Rémy Pflimlin, directeur général de France 3, Jean-Pierre Cottet, directeur général de France 5.

Le président Jean-Michel Dubernard, , a fait état de sa satisfaction d'entendre le président-directeur général de France Télévisions afin qu'il présente à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales le rapport sur l'exécution en 2002 du contrat d'objectifs et de moyens signé entre France Télévisions et l'Etat.

Depuis la loi du 1er août 2000, les relations entre les différents organismes de l'audiovisuel public et l'Etat, actionnaire unique, sont - en principe - organisées par des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels, qui fixent notamment le montant prévisionnel de ressources que l'Etat s'engage à verser chaque année ainsi que les objectifs qualitatifs et quantitatifs que les différentes sociétés doivent réaliser en contrepartie de ce financement. Le Parlement étant amené à voter le montant de la redevance à allouer aux différents organismes de l'audiovisuel public, l'article 53 de la loi a fort opportunément prévu que le président de la holding France Télévisions, qui reçoit environ 60 % de la redevance, devrait venir chaque année rendre compte de l'exécution de ce contrat devant les commissions culturelles de chaque assemblée.

En cette période de préparation budgétaire, l'intérêt, les questions et les préoccupations des membres de la commission débordent cependant ce cadre législatif pour s'étendre à l'avenir même du groupe France Télévisions. Comme toujours, bien des sujets interpellent, comme la télévision numérique de terre, l'intégration de RFO ou encore la participation du groupe à la future chaîne d'information internationale, dont la commission s'est beaucoup occupée au printemps dernier.

Plus précisément sur ce sujet, M. Bernard Brochand a rendu la semaine dernière ses conclusions au Premier ministre, qui a approuvé sa proposition d'un montage à 50/50 entre France Télévisions et TF1. Dans un entretien publié hier par le Figaro, le président-directeur général de France Télévisions a accueilli favorablement ce dispositif, qualifié d' « alliance entre égaux ». Il reste que ce rapprochement entre les deux concurrents les plus immédiats du paysage audiovisuel français ne semble pas évident. On peut s'interroger sur la véritable égalité de cette alliance puisque, apparemment, le financement sera lui entièrement public. Comment cela pourra-t-il se décliner au plan pratique ? Comment parvenir à une entente ? Et finalement, qui décidera ? Appliquera-t-on le principe du « qui paie, décide », évoqué à plusieurs reprises par notre collègue Bernard Brochand, lorsqu'il était membre de la mission d'information commune ?

M. Marc Tessier, président-directeur général de France Télévisons, s'est félicité de l'occasion qui lui est offerte de présenter à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales l'exécution du contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions. En effet, si cet exercice est intéressant pour les parlementaires, il l'est également pour le groupe car il lui permet de travailler à livre ouvert et de présenter au Parlement sa politique d'orientation. Cela conduit aussi à une exigence de rationalisation pour France Télévisions et constitue une aide à l'Etat actionnaire dans la formalisation de ses attentes et de ses choix.

Le bilan pour l'année 2002 est clos. Pour ce qui concerne l'année 2003, le contrat entre l'Etat et le groupe est en cours de révision. Les discussions avec le ministère sont centrées sur le contenu des programmes et la quote-part de financement de l'Etat, le calendrier et l'ampleur de l'engagement du groupe dans la télévision numérique de terre ainsi que, pour demain, les perspective d'intégration de RFO et de participation à la chaîne d'information internationale. Dans ce contexte, il n'est pas possible de comparer les différents exercices de façon scolaire puisque des modifications et des compléments sont en cours.

En matière de programmes, les différents indicateurs contenus dans le contrat d'objectifs et de moyens demeurent néanmoins le cadre des politiques de programmes des chaînes du groupe. En complément des cahiers des charges, ils reflètent les engagements du groupe en la matière.

Tous les indicateurs prévus dans le contrat d'objectifs et de moyens - diversité, part des programmes scientifiques et culturels, diffusion de spectacles vivants, volume horaire de l'information, etc. - sont respectés voire dépassés. Seule l'augmentation de la proportion de programmes régionaux sur France 3 fait défaut, ce qui s'explique par les trois semaines de grève que la chaîne a connu cet été et durant lesquels les programmes régionaux ont dû être remplacés par des programmes nationaux. Ainsi, pour l'année 2003, les engagements pris par France Télévisions auprès de l'Etat en matière de programmes ont été respectés.

Trois points de révision font actuellement l'objet de discussions importantes avec le ministère de la culture :

Le doublement de la part des programmes régionaux sur France 3 d'ici 2006. La chaîne devrait notamment développer son information de proximité, celle-ci trouvant sa place en fin de matinée et en début d'après-midi. Ces émissions régionales supplémentaires seront réalisées par les antennes régionales ; il n'y aura donc pas de modifications de la structure. Par ailleurs, des émissions interrégionales seront développées et il est prévu d'accroître le volume des diffusions en langues régionales. Le montant des investissements prévus pour cette régionalisation est égal à celui initialement envisagé pour le développement des télévisions numériques régionales de plein exercice. Cela répond à la demande des téléspectateurs et permet d'anticiper l'arrivée sur le marchée de nouvelles chaînes locales.

Le sous-titrage de 50 % des émissions, à l'attention des téléspectateurs sourds et mal entendants. Tous les types de programmes seront concernés, y compris le direct et donc l'information. Plusieurs millions d'euros par an seront consacrés à ce développement.

L'augmentation significative des moyens consacrés à la programmation culturelle. De nouveau indicateurs seront définis dans ce sens, le spectacle vivant et les émissions scientifiques devant être regroupées dans le même agrégat. Par ailleurs, pour les premières parties de soirées, les grandes fictions adaptée de la littérature seront développées.

Les indicateurs financiers du contrat d'objectifs et de moyens ont également été satisfaits en 2002 à l'exception de la masse salariale. En effet, le poids de la masse salariale dans le coût de grille des informations régionales a été sous-estimé ; France Télévision corrigera et adaptera cet indicateur. Sur le plan des effectifs, si une légère augmentation du volume des personnels permanents est constatée, le bilan laisse apparaître une baisse des effectifs non permanents de 150 postes en équivalent temps plein. Le montant des frais généraux s'est élevé à 6,7 % du coût total du groupe ; il est en constante diminution, comme prévu par le programme d'économies engagé par le groupe. Au total, la situation financière est saine et les comptes de France Télévisions sont désormais structurellement positifs, ce qui est une nécessité si l'on souhaite que les Français ait une bonne image de la télévision publique et de l'usage qu'elle fait des deniers publics.

Le programme de développement du groupe inscrit dans le contrat d'objectifs et de moyens avait initialement été conçu pour accompagner la création de nouvelles chaînes pour la télévision numérique de terre et emportait sa propre logique de financement. A la demande du gouvernement, ce projet a été abandonné et les objectifs du groupe réorientés vers ses chaînes premium. Ce changement d'orientation explique les moindres versements de redevance en 2003, comparativement à 2002 et aux objectifs fixés par le contrat d'objectifs et de moyens.

A la demande du ministre, le groupe a travaillé sur l'utilisation des canaux préemptés pour le service public et a proposé d'y diffuser les chaînes thématiques Histoire et Festival. Dans cette perspective, il conviendrait néanmoins de transformer quelque peu ces chaînes et de racheter les parts détenues par les actionnaires privés, dans la limite des moyens financiers du groupe. France Télévisions attend, sur ce point, la décision du gouvernement. Celle-ci est annoncée pour la fin de l'automne.

Des perspectives de développement sont également étudiées en ce qui concerne des chaînes thématiques proches du service public. A cet égard, une expérience a été menée avec succès avec le groupe Canal Plus à travers la création de la chaîne Planète Thalassa. Le coût de cette expérience a été nul pour France Télévisions puisque c'est le groupe Canal Plus qui assure le financement et la diffusion de la chaîne sur le bouquet Canal Satellite. L'apport de France Télévisions concerne les programmes. Au début du mois d'octobre prochain, une chaîne destinée à la jeunesse et nommée « Ma planète », construite sur le même modèle, devrait également être lancée.

En outre, une réflexion est actuellement menée sur l'opportunité d'augmenter la participation du groupe public dans la chaîne de musique classique Mezzo. Ce mode de développement, qui associe financement privé et programme public sur la base d'un contrôle éditorial partagé est naturel s'agissant de chaînes relevant de la même philosophie que les groupes publics.

Concernant la création de la chaîne française d'information internationale, le gouvernement avait posé en avril dernier aux différents opérateurs de télévision la question de savoir s'ils étaient prêts à participer au développement d'une telle chaîne, avec des décrochages en anglais et en arabe. Le gouvernement a recueilli trois réponses positives.

Le groupe France Télévisions considère ce projet comme doublement utile. Il est utile d'abord pour le pays. Ainsi, durant la guerre en Irak, la France était le pays qui disposait du plus grand nombre d'équipes sur place après les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Or, les images françaises ont été très peu diffusées à l'international, faute d'un canal adapté. Une remarque similaire peut être faite à propos de la récente intervention du Président de la République dans l'enceinte de l'Assemblée générale des Nations Unies. Le projet est également utile pour le groupe France Télévisions, qui pourra faire jouer des synergies avec l'Agence France Presse (AFP) et utiliser au mieux ses nombreux bureaux à l'étranger. En l'absence d'un canal international, nos correspondants à l'étranger ont moins de légitimité et risquent de devenir des correspondants de troisième zone.

Par contre, s'agissant des ressources, un tel programme ne peut pas s'autofinancer. Les perspectives de recettes publicitaires pour un média international en français sont en effet très limitées, comme le montre l'expérience de TV5, qui fonctionne pratiquement sans publicité. L'intervention de l'Etat semble donc inévitable.

M. Bernard Brochand, chargé d'une mission sur ce sujet par le Premier ministre en mai dernier, a invité les groupes de télévision intéressés à discuter entre eux. Il est rapidement apparu que la seule solution envisageable était une coopération équilibré, à 50/50, entre deux actionnaires égaux, en l'occurrence TF1 et France Télévisions. Les deux groupes décideront des questions stratégiques, fixeront le périmètre de la couverture géographique, nommeront le personnel d'encadrement et définiront le cahier des charges éditorial. Une rédaction en assumera ensuite la charge opérationnelle et la réalisation quotidienne. Entre les deux groupes circule déjà un canevas respectant ces principes. L'Etat financera la chaîne : il aura donc besoin que le projet soit encadré précisément par un contrat, document qui fixera notamment le contenu éditorial et les obligations de la chaîne. L'Etat recevra également les comptes de l'organisme, qui sera présidé par un dirigeant responsable de la publication.

L'association de deux actionnaires à égalité fonctionne déjà dans un grand nombre de domaines et pourrait donc constituer la solution optimale s'agissant de la création de cette chaîne d'information internationale. L'Etat exercera les fonctions d'arbitre en cas de conflit. Le besoin de financement est évalué à environ 70 millions d'euros, ce qui est une somme importante mais pas irréaliste. Par contre, il ne revient pas au président du groupe France Télévisions d'indiquer à l'Etat où trouver les fonds nécessaires pour financer un projet qui reste très attrayant.

M. Pierre-Christophe Baguet, rapporteur pour avis des crédits de la communication, a formulé les observations et les questions suivantes :

- Pour mieux valoriser son effort en matière de programmes culturels, France Télévisions devrait présenter dans son rapport un tableau croisant les audiences des différents programmes par horaire et leur coût respectif.

- Il est regrettable que le rapport de M. Bernard Brochand n'ait pas été communiqué aux parlementaires et qu'il préconise une alliance à 50/50 entre France Télévisions et TF1 alors que la mission d'information commune suggérait une entente à six partenaires, plus aisée à réaliser. Le face à face risque d'être périlleux et l'on peut s'interroger sur la réalité de la parité revendiquée, alors même que le financement sera assuré à 100 % par l'Etat.

- Quel intérêt présente pour France Télévisions l'intégration de RFO et qu'en sera-t-il des activités radio ?

- S'agissant de la télévision numérique terrestre, le service public a été longtemps en avance : or le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel a remarqué qu'il est désormais à la traîne, même si France Télévisions n'est pas totalement responsable de cet état de fait. Quelle sera l'utilisation du troisième canal préempté pour le service public ?

- Un effort a été engagé en matière de réduction des emplois précaires. Comment sera-t-il poursuivi et qu'en est-il de l'emploi d'intermittents du spectacle par les chaînes du groupe France Télévisions ?

- Quelles sont les synergies attendues du rapprochement des rédactions de France 2 et France 3 ?

- Comment s'organisera le développement régional de France 3, qui semble contradictoire avec l'apparente consolidation de la rédaction nationale ?

- S'agissant du financement pour 2004, l'avis plutôt réservé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur le croisement des fichiers de la redevance et des abonnés au câble et au satellite pourrait conduire à diminuer les ressources tirées de la redevance. Dans ce cas, comment le groupe France Télévisions fera-t-il face ?

M. Dominique Richard a d'abord noté trois évolutions positives du groupe : la spécialisation des chaînes, la politique de création et enfin la maîtrise des coûts. Il a ensuite posé des questions sur les points suivants :

- Quelle sera la politique de soutien au spectacle vivant ? Le titre du magazine culturel de France 3, « J'ai pas sommeil », laisse malheureusement augurer d'une programmation tardive. Il serait bon d'avoir des précisions sur l'application progressive du rapport de Mme Catherine Clément sur la culture à la télévision publique.

- Le soutien à la production audiovisuelle n'est-il pas artificiellement mis en œuvre par la multiplication des rediffusions ?

- Concernant la chaîne d'information internationale, le président du groupe France Télévisions a déclaré en mars dernier aux membres de la mission d'information commune qu'il serait très compliqué d'associer le public et le privé. A-t-il changé d'avis aujourd'hui ? Quel serait la place de CFI, RFI, Euronews et TV5 dans ce projet ?

Après avoir noté que l'augmentation prévue du produit de la redevance est remise en question par l'avis défavorable de la CNIL à un croisement des fichiers de la redevance et des abonnés à des chaînes payantes, M. Patrick Bloche a estimé que, pour 2004, les recettes du groupe étaient surestimées et ses dépenses sous-calibrées. En effet, l'ouverture des secteurs interdits à la publicité télévisée ayant été reportée à 2007 pour les chaînes hertziennes, les recettes publicitaires n'augmenteront pas de manière conséquente. La question est donc de savoir comment, dans un an, la direction agira dans un contexte budgétaire contraint. Que sacrifiera-t-elle en premier ? Par ailleurs, s'agissant des intermittents du spectacle, il serait souhaitable de savoir si des moyens accrus seront alloués aux chaînes afin de mettre fin aux abus. Enfin, concernant le projet de chaîne d'information internationale, il est regrettable que la mission d'information commune ait été court-circuitée par la nomination de M. Bernard Brochand, dont les propositions s'éloignent sensiblement des conclusions de la mission. Il sera très difficile d'associer France Télévisions et TF1 dans une structure paritaire, les relations entre les deux groupes relevant plus de la concurrence que de la coopération. En outre, l'avenir de la francophonie et de TV5 ne semble pas du tout garantie par cette solution.

Mme Juliana Rimane s'est interrogée sur la contribution du groupe France Télévisions à l'objectif gouvernemental de réduction de l'illettrisme, en particulier par la promotion du livre. En outre, il serait opportun d'accroître la visibilité de l'Outre-mer dans les programmes diffusés en métropole. Sur ce sujet, qu'apportera l'intégration de RFO à France Télévisions ?

M. Frédéric Dutoit a posé les questions suivantes :

- Existent-ils des dérives en ce qui concerne l'emploi des intermittents à France Télévisions ?

- Le schéma proposé pour la constitution de la nouvelle chaîne d'information internationale n'est-il pas, tant sur la forme que sur le fond, préjudiciable au développement de la francophonie ?

- Quelle est la politique de France Télévisions à l'égard des télévisions locales ?

M. Christian Kert a rappelé que la plupart des émissions de plateau sont produites en France par un très petit nombre de sociétés de production, ce qui constitue une menace pour le pluralisme et la diversité culturelle dans ce secteur. France Télévisions estime-elle avoir un rôle spécifique à jouer en la matière ? Par ailleurs, pour consolider son développement France 5 ne souhaiterait-elle pas pouvoir poursuivre sa diffusion en soirée sur le cinquième canal, créneau actuellement occupé par une chaîne qui n'appartient pas au groupe France Télévisions ?

Revenant sur la question de l'intermittence, M. Emmanuel Hamelin a souhaité connaître l'état des lieux en ce domaine tant en terme d'effectifs présents que d'objectifs pour l'avenir. Il a également demandé des précisions sur la place dévolue aux programmes scientifiques, actuellement confondus avec les émissions culturelles, au sein de la grille de programmes.

Mme Françoise de Panafieu a relevé que le projet de chaîne d'information internationale va faire cohabiter deux cultures d'entreprises audiovisuelles très différentes et souhaité connaître l'avenir réservé à la chaîne Euronews, qui dépend de France Télévisions.

Mme Muriel Marland-Militello a formulé le vœu que les créations contemporaines réalisées localement - tant en matière de spectacle vivant que d'art plastique - bénéficient d'une meilleure couverture par France Télévisions.

M. André Samitier a posé une question sur les modalités de diffusion prévues pour la chaîne d'information internationale.

En réponse aux intervenants, le président-directeur général de France Télévisions a fait les remarques suivantes :

- En ce qui concerne la chaîne d'information internationale, l'expérience montre que dans les structures 100% publiques, l'Etat finance directement la chaîne, par exemple TV5, ce qui a pour conséquence de déposséder les opérateurs associés de leur capacité d'encadrement. Il est donc nécessaire de faire transiter le financement public par les différents partenaires. La proposition de la mission d'information parlementaire de créer un groupement d'intérêt public associant un grand nombre de partenaires publics et privés a pour défaut de décourager ces derniers, qui ne souhaitent pas être minoritaires. Le choix est dès lors circonscrit à une structure entièrement publique ou à un partenariat égalitaire. En tout état de cause, le groupe public ne peut être absent d'une telle chaîne.

France Télévisions renouvelle son attachement à la chaîne Euronews dont le projet est toutefois différent du souhait émis par le Président de la République en matière de chaîne d'information internationale. Les deux projets sont complémentaires et doivent être menés de front, avec l'aide de l'Union européenne et des chaînes publiques européennes partenaires dans le cas d'Euronews. Durant la guerre en Irak, Euronews a obtenu d'excellents résultats en Italie et en Afrique francophone, ce qui témoigne de son utilité face aux médias américains notamment. Mais elle n'est pas une chaîne française et demeure définie par un format très spécifique, qui interdit les directs et les débats. Par ailleurs, il va de soi que l'AFP a vocation à être un fournisseur privilégié de la future chaîne d'information internationale, même si elle n'est pas partenaire au sens capitalistique. Quant à RFI, elle peut tout à fait demeurer associée à France Télévisions au sein de la quote-part publique de la chaîne d'information internationale, à condition bien entendu que France Télévisions conserve le dernier mot dans le face à face avec TF1.

La notion de tutelle doit être nuancée car il s'agit en réalité d'un engagement contractuel avec l'État. Celui-ci ne devrait pas siéger au conseil d'administration. En tout état de cause, la chaîne n'a nullement vocation à être « aux ordres » puisqu'elle associe deux groupes indépendants.

Enfin, la diffusion de la chaîne s'effectuera en numérique, via le satellite et les réseaux câblés, en prenant appui sur les réseaux commerciaux d' Eurosport et d'Euronews.

M. Rémy Pflimlin, directeur général de France 3 a indiqué que le développement de sa chaîne s'articule autour de la régionalisation des programmes et de la décentralisation des structures. Ainsi la nouvelle mouture du « 19-20 » laisse une plus large part à l'échelon régional et est conçue de manière décentralisé.

Le positionnement éditorial de France 3 permet aisément une distinction avec les télévisions de proximité, qui sont centrées sur le local et diffusées uniquement dans les zones riches et peuplées. La présence de ces télévisions est source de concurrence, ce qui est stimulant pour le service public qui réussit d'ailleurs assez bien dans cette configuration. Il est possible de conclure des partenariats avec ces chaînes locales en matière de régie publicitaire ou de moyens de production.

L'offre de France 3 met l'accent sur l'interactivité et la captation d'évènements locaux, aux premiers rangs desquels se placent les manifestations culturelles. Une nouvelle case a été ouverte à cet effet le dimanche en début d'après midi pour diffuser de spectacles montés en région comme la Biennale de la danse à Lyon, les concerts de l'Orchestre régional des Pays de Loire ou encore le théâtre en Alsace. Des contacts ont été pris avec les collectivités territoriales pour qu'elles soutiennent ces manifestations.

Le président-directeur général du groupe France Télévisions a ajouté que l'art contemporain n'est pas oublié puisqu'un vaste panorama va être prochainement diffusé par France 5 sous la forme d'une série de six émissions de 52 minutes.

M. Jean-Pierre Cottet, directeur général de France 5, a rappelé que les programmes en faveur de la lecture constituent depuis longtemps une des originalités de la télévision française. Cette spécificité est d'ailleurs bien vivante si l'on en juge par la diversité des programmes tels que « Le bateau livre » ou « Ubik » sur France 5, les émissions quotidiennes de France 2 et France 3 du type « Un livre un jour » ainsi que celles de Guillaume Durand et Franz-Olivier Giesbert. Cet engagement se traduit également dans de nombreux prix littéraires et par le biais de partenariats avec le salon du livre et la FNAC. Pour ce qui concerne plus spécifiquement les livres pour enfants, l'émission quotidienne de France 5 « Les maternelles », qui rencontre beaucoup de succès, aborde ce sujet presque tous les jours. Pour faire lire les enfants, il semble en effet important d'intéresser d'abord les mères.

M. Christopher Baldelli, directeur général de France 2, a indiqué que le groupe France Télévisions a pris de multiples initiatives en matière de culture scientifique, avec en particulier une nouvelle émission mensuelle, « On vous dit pourquoi », qui permet d'expliquer des notions scientifiques à travers le prisme de l'actualité. Le module « Rayon X », diffusé à une heure de grande écoute avant ou après le journal de vingt heures, aborde des questions scientifiques sous la forme d'un programme numérique en 3D, avec une esthétique proche de la bande dessinée. Cette formule bien adaptée est très suivie par les adolescents. De même, le programme « C'est pas sorcier », destiné au jeune public, est désormais diffusé de façon quotidienne sur France 3. Enfin, pour les questions médicales, France Télévisions propose un magazine hebdomadaire sur France 2, « Savoir plus santé », et « Le journal de la santé » diffusé tous les jours sur France 5. Cette programmation régulière est complétée par des opérations plus exceptionnelles, comme « Les grandes énigmes de la science », de François de Closets, le Téléthon ou encore la soirée « martienne », programmée sur France 2 cet été en première et deuxième partie de soirée, qui a été suivie par plus d'un téléspectateur sur quatre.

Le président-directeur général de France Télévisions a poursuivi ses réponses aux différents intervenants en apportant les précisions suivantes :

- Si France Télévisions n'existait pas, les deux tiers des maisons de production fermeraient sans doute. Par rapport aux télévisions privées, qui concentrent leurs commandes sur quelques sociétés, France Télévisions est en effet la seule à fournir cet effort vis-à-vis des petits producteurs.

- S'agissant des perspectives en matière de ressources publicitaires, le renvoi à 2007 de l'ouverture de la publicité pour les secteurs interdits sur les chaînes hertziennes n'est pas un véritable problème. En effet, les recettes publicitaires des chaînes de France Télévisions devraient connaître une hausse de 8 % en 2003, malgré l'atonie du marché. Ce résultat montre que le qualitatif paie et que le bas de gamme a plutôt un effet dissuasif sur les annonceurs. Les perspectives pour 2004 sont donc plutôt encourageantes.

- Le cahier des charges du rapprochement avec RFO a été défini par le gouvernement par le biais d'une lettre cosignée par les ministres de l'Outre-mer et de la communication. On peut tout à fait considérer que la holding a vocation à regrouper l'ensemble des chaînes de télévision publique. Un groupe de travail a donc été constitué afin d'étudier les conditions et les conséquences de ce rapprochement. S'il peut y avoir quelques spécificités à trouver, concernant notamment les statuts de RFO, il ne semble pas y avoir d'obstacle majeur à cette intégration, d'autant que la plupart de ses programmes sont actuellement produits par France Télévisions.

Quant à la présence de l'Outre-mer sur les chaînes diffusées en métropole, il n'existe bien sûr pas de statistiques à ce sujet, la loi l'interdisant, mais des efforts significatifs ont été engagés à France Télévisions au cours de l'année passée, en particulier pour l'intégration de journalistes. Ces efforts devront naturellement être poursuivis dans la mesure où ils répondent à une demande croissante des téléspectateurs de toutes origines, qui souhaitent que la population française soit représentée dans son ensemble. A l'évidence, cette question constitue l'un des apports positifs de l'intégration de RFO.

- Concernant l'emploi des intermittents, il convient de souligner que le groupe France Télévisions applique les conditions prévues par la convention UNEDIC : il n'est donc en aucun cas dans l'illégalité. Pour ses activités de production, France Télévisions ne peut pas se passer de l'emploi d'intermittents du spectacle : les fictions diffèrent trop les unes des autres pour pouvoir les produire avec des personnels toujours identiques. Reste cependant la question des émissions temporaires reconduites régulièrement qui appellent, dans certains cas, des requalifications d'emplois temporaires en emplois permanents. Les chiffres avancés sont toutefois surestimés, dans la mesure où de telles requalifications n'ont concerné, en 2002, que 80 personnes sur les 5 000 emplois de France Télévisions.

En réalité, la vraie question est la suivante : que l'entreprises soit publique ou privée, dans quels cas est-il nécessaire de recourir à l'intermittence ? On peut donc essayer de réfléchir aux qualifications qui doivent relever de ce régime spécifique, mais il n'est pas certain que les syndicats soient d'accord pour ce type de remise en cause. La télévision publique doit par ailleurs trouver les moyens de limiter le recours au travail temporaire quel qu'il soit, mais cela requiert la renégociation des accords sur le recrutement des collaborateurs afin de revoir leurs conditions d'emplois (week-end, congés).

Il n'est pas possible aujourd'hui d'évaluer le coût pour l'UNEDIC des intermittents employés à France Télévisions, puisqu'ils peuvent également travailler ailleurs, mais il serait très surprenant que ce soient eux qui coûtent le plus cher, étant donné leur volume horaire. En conclusion sur ce sujet, il convient de procéder aux requalifications des statuts des collaborateurs lorsqu'elles sont nécessaires, mais également de développer la négociation collective, afin de diminuer le recours à l'emploi temporaire dans son ensemble.

- Concernant les risques pesant sur les perspectives d'augmentation de la redevance annoncées par le gouvernement, il ne revient pas au président de France Télévisions de se prononcer sur les modalités de perception de la taxe. Le ministre des finances s'est engagé à ce que la redevance augmente de 3 % pour la holding ; celle-ci, pour sa part, remplira ses obligations.

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Information relative à la commission

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M. Christian Kert a été désigné rapporteur sur la proposition de résolution de M. Dominique Paillé tendant à la création d'une commission d'enquête sur les abus et fraudes dans l'intermittence et l'avenir du financement de la création et de la diffusion du spectacle vivant (n° 1054) et sur la proposition de résolution de M. Jean-Pierre Brard tendant à la création d'une commission d'enquête relative à la crise dans les domaines du spectacle vivant et de la création audiovisuelle en France ainsi qu'aux mesures nécessaires pour permettre leur essor et garantir à leurs professionnels un statut protecteur (n° 1063).

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