COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 55

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 28 mai 2003
(Séance de 9 heures 15)

Présidence de M. Edouard Balladur, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Abdou Diouf, Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie


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Audition de M. Abdou Diouf, Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF)

Le Président Edouard Balladur a félicité M. Abdou Diouf pour ses nouvelles fonctions à la tête de l'Organisation internationale de la Francophonie. Il a souhaité obtenir des précisions sur les évolutions de cette organisation et notamment sur les actions entreprises en faveur des droits de l'Homme et de la paix dans le monde, valeurs autour desquelles se rassemblent les Francophones.

Le Président Abdou Diouf a remercié la Commission pour son invitation qui témoigne de l'intérêt qu'elle porte à la Francophonie.

Il a rappelé que la France avait su répondre avec grandeur aux attentes des francophones du monde entier, et aux appels des pères fondateurs, Léopold Sédar Senghor, Hamani Diori, Habib Bourguiba et Norodom Sihanouk, pour favoriser le développement de la communauté francophone. La France est devenue un acteur majeur de la Francophonie multilatérale, et n'a cessé de lui apporter une contribution de qualité, qui la situe au dessus de tous les autres Etats membres de l'Organisation internationale de la Francophonie.

Aujourd'hui face à un contexte international très préoccupant marqué par la guerre en Irak, le terrorisme international, mais aussi par de nombreuses crises qui hypothèquent le développement et le dialogue des cultures, le Président Abdou Diouf a déclaré que la Francophonie, avec cet atout essentiel que constitue une langue commune, avec ses valeurs de paix, de démocratie, de défense des droits de l'Homme, de solidarité, avait un rôle actif à jouer et qu'elle avait pleinement conscience de ses responsabilités.

Avec l'aide de tous, le Secrétaire général a indiqué avoir entrepris, depuis sa prise de fonctions en janvier dernier, de mettre en œuvre les orientations définies par les Chefs d'Etat et de Gouvernement en octobre 2002 à Beyrouth. Cinq grands axes prioritaires pour l'OIF ont ainsi été retenus.

La première priorité, c'est naturellement la langue française. Dans les pays francophones du Sud, et tout particulièrement en Afrique, les systèmes éducatifs traversent une crise grave qui met elle-même en péril la langue française. Du 17 au 20 mars dernier, à Libreville, ont été réunis les premiers Etats généraux de l'enseignement du français et en français en Afrique francophone Subsaharienne. Avec les opérateurs de l'Agence intergouvernementale de la Francophonie et de l'Agence universitaire de la Francophonie, avec la Fédération internationale des professeurs de français, avec les meilleurs experts, avec les responsables nationaux des politiques d'éducation, il a été défini avec clarté le rôle central du français pour l'enseignement. Ce travail sur l'enseignement du français et en français sera poursuivi dans toutes les autres zones géographiques de l'ensemble francophone. Au plan international, le Président Abdou Diouf a insisté sur la question préoccupante de la situation du français dans les institutions européennes et dans le système des Nations unies. Il a déclaré avoir lu avec grand intérêt et plaisir la lettre circulaire que le Premier Ministre français a envoyée à son administration à propos de l'utilisation du français au niveau international et a indiqué que récemment encore à Genève, il avait rappelé aux responsables des Agences spécialisées des Nations unies leur responsabilité vis-à-vis du français. L'Agence universitaire de la Francophonie organise pour sa part la formation en français des diplomates, fonctionnaires et interprètes des dix nouveaux pays européens.

La deuxième priorité est l'éducation. Dans ce domaine plus que dans tout autre, il faut mettre davantage la compétence et le savoir faire de l'Organisation de la Francophonie au service du renforcement des systèmes éducatifs nationaux des pays du Sud que nous devons aider à obtenir l'aide des grands bailleurs de fonds multilatéraux.

La troisième priorité est la diversité culturelle et linguistique. Dans notre monde multipolaire, le respect de la diversité culturelle est la condition de la réussite du dialogue des cultures dans le respect des identités. Conformément à la décision prise au Sommet de Beyrouth, la Francophonie travaille afin de faire adopter par l'UNESCO, dès 2005, d'une Convention internationale sur la diversité culturelle.

Le quatrième axe est celui de la culture démocratique, des droits de l'Homme et de la paix, pour lequel la Déclaration de Bamako de novembre 2000 offre un cadre de référence novateur. Le Président Abdou Diouf a sur cette question évoqué la situation dans différents pays africains et le rôle que l'OIF entend y jouer.

En Côte d'Ivoire, touchée depuis septembre 2002 par une crise d'une gravité exceptionnelle, le rôle de la France a été courageux et positif. Faisant partie du Comité de suivi des accords de Marcoussis, l'OIF a délégué sur place l'ambassadeur Lansana Kouyaté et a décidé d'installer un bureau appelé à suivre l'évolution de la crise et à coordonner des projets susceptibles de ramener ce pays à une paix durable. Le plus dur reste à faire pour amener les frères ennemis d'hier à s'entendre. Pour cela, il faut sécuriser la frontière ouest de la Côte d'Ivoire, ne pas laisser les crimes impunis, établir les responsabilités, faire respecter les droits de l'Homme, préparer dans le consensus les élections futures qui devront être libres, transparentes et démocratiques, assurer la liberté d'expression, notamment de la presse écrite, parlée et télévisée, former les journalistes, bref, consolider un véritable Etat de droit.

En République Centrafricaine, l'OIF a condamné le coup de force du Général Bozizé, conformément à la Déclaration de Bamako. L'OIF a effectué le mois dernier une mission à Bangui, où le changement intervenu le 15 mars dernier a reçu une très forte adhésion de la part de toutes les forces politiques centrafricaines et de la société civile. Elles appellent à la tenue d'un dialogue national pour décider de manière consensuelle de l'avenir du pays, dont la situation serait si catastrophique que dix huit à trente mois seraient nécessaires pour le remettre en état de marche et pour préparer les élections.

Le Président Abdou Diouf a indiqué qu'il s'était rendu au Togo les 15 et 16 avril dernier pour y rencontrer le Président Eyadéma, son gouvernement et le collectif de l'opposition. Tous ont souhaité que la Francophonie observe les élections du 1er juin. Il s'y est engagé en indiquant que la Francophonie conduira cette mission d'observation en toute indépendance et en toute objectivité. Il faudra, après cette élection, sortir le Togo de la crise dans laquelle il est plongé depuis dix ans.

Le Président Abdou Diouf a ensuite fait référence à la conférence de Brazzaville qui s'est tenue du 25 au 28 avril 2003, sur le thème des droits de l'Homme dans les structures gouvernementales. En application du chapitre 5 de la Déclaration de Bamako qui doit maintenant entrer dans les faits, cette conférence a mis en réseau les structures gouvernementales chargées des droits de l'Homme dans l'espace francophone.

Enfin, le cinquième axe de l'action entreprise porte sur le renforcement de la concertation entre francophones, afin d'harmoniser plus systématiquement leurs positions sur les grands enjeux internationaux, de favoriser la participation active des pays francophones les plus démunis aux grandes négociations internationales, et, enfin de donner aux pays francophones du Sud de meilleures chances d'accéder aux financements internationaux pour leur développement.

Pour toutes ces tâches, il est nécessaire d'obtenir une adhésion plus forte de l'opinion publique et des médias. Les progrès de la chaîne multilatérale francophone TV5 sont très significatifs. Les ambitions nouvelles de la France dans ce domaine sont indiscutablement légitimes et contribueront à amplifier l'impact de nos idées et de notre vision du monde. Le Président Abdou Diouf a conclu en réitérant à l'intention des députés l'appel qu'il avait lancé lors du Sommet de Versailles en 1986 auquel il avait assisté en qualité de Chef d'Etat : « soyez au moins aussi francophones que nous ! ».

Le Président Edouard Balladur a remercié M. Abdou Diouf pour la richesse de son exposé. Si l'organisation francophone a toujours joué un rôle dans le domaine culturel et linguistique, elle tend aujourd'hui à devenir un lien de concertation et de dialogue. Elle comporte par ailleurs des pays dont le français n'est pas la langue officielle, ni même la langue la plus parlée. Quels sont donc les critères qui permettent d'entrer dans l'Organisation internationale de la Francophonie ? L'adhésion de nouveaux pays n'est en effet pas sans conséquence sur les objectifs de cette organisaiton et sur le renforcement de son caractère politique.

Le Président Abdou Diouf a indiqué que la question des critères requis pour l'adhésion à la Francophonie avait été évoquée au sommet de Beyrouth. Pour être membre à part entière, il faut que l'usage du français dans la population, dans les médias et à l'école atteigne une masse critique. Il faut également adhérer aux valeurs de l'organisation francophone. En revanche, les critères d'admission en tant que membre observateur sont plus fluctuants : sont pris en compte l'usage du français au moment de la demande d'adhésion, ainsi que les perspectives d'évolution. De nombreux pays veulent adhérer car ils se disent francophiles. Mais cela ne suffit pas ; l'entrée dans l'OIF suppose l'engagement de ces pays candidats à défendre et promouvoir le français et les valeurs de la francophonie et si ces pays veulent intégrer pleinement la Francophonie, il faut aller plus loin. L'Autriche, la Hongrie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Georgie, le Soudan se sont manifestés pour adhérer. Pour sa part, Israël fait valoir qu'elle est plus francophone que certains membres de l'organisation : il n'y a toutefois pas de consensus sur son adhésion, alors que celle-ci est nécessaire. Enfin, depuis le Sommet de Beyrouth, le statut d'observateur ne donne plus automatiquement le droit de devenir ensuite membre à part entière.

M. Bruno Bourg-Broc a rappelé que M. Abdou Diouf serait entendu avec plaisir et intérêt à l'automne par la section française de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, dont il assure la présidence. La Francophonie est passée d'un rôle de promotion culturelle et linguistique à un rôle plus politique. Certains pays, comme la Georgie, manifestent une forte demande pour faire partie du monde francophone. Comment l'Organisation internationale de la Francophonie peut-elle y répondre ? Que peut-on faire pour lutter contre le recul de l'usage du français dans les institutions internationales ? L'Union européenne a refusé d'envoyer des observateurs au Togo pour surveiller la régularité des élections, au motif que celles-ci n'étaient pas organisées dans des conditions satisfaisantes. Pour quelles raisons l'OIF a-t-elle décidé d'envoyer des observateurs ? Quel rôle les parlementaires des pays francophones peuvent-ils jouer dans le mécanisme d'alerte précoce instauré lors du sommet de Bamako pour prévenir les violations des droits de l'Homme ?

M. Michel Destot a demandé si les grandes universités et les grandes écoles françaises étaient suffisamment ouvertes aux étudiants francophones. Quel rôle les grandes villes et les régions peuvent-elles jouer en matière de coopération décentralisée ? La conférence des villes francophones qui doit se tenir à Ouagadougou est-elle de nature à renforcer la francophonie ?

Mme Martine Aurillac a indiqué qu'elle était frappée par le nouvel engagement de l'OIF en matière de défense de la stabilité et de la paix dans le monde. S'agissant de l'enseignement du français, force est de constater que l'enseignement de base n'est le plus souvent pas à la hauteur. Quelles améliorations peuvent-elles être entreprises dans ce domaine ?

Le Président Abdou Diouf a estimé que l'afflux de candidatures au statut de membre ou d'observateur de l'OIF était révélateur de l'existence d'une demande importante de faire partie de la communauté francophone. Le rôle de l'OIF est d'étudier ces candidatures et de les présenter aux instances décisionnelles, mais il doit aussi être de favoriser une action plus vigoureuse pour promouvoir la langue française et les valeurs de la francophonie en direction des pays qui n'en sont pas membres. Ce travail doit être réalisé en relation avec les ONG comme les Alliances françaises, qui font souvent un travail remarquable pour la diffusion du français dans les pays non francophones, comme par exemple le Mexique ou Malte, pays dans lesquels la demande est plus forte que l'offre disponible. L'effort en faveur de la diffusion de la langue française doit être partagée entre l'OIF, les ONG et les Etats, dont la France qui devrait accroître son action dans ce domaine.

En ce qui concerne le recul de l'enseignement du français dans certains pays francophones, le Président Abdou Diouf a déclaré que la présence et la qualité du français étaient directement liées à l'efficacité du système éducatif : lorsque ce dernier est en bonne santé, le français se porte bien, et inversement lorsque le français est malade. Cette situation est le résultat d'un système éducatif malade. Bien sûr, l'OIF peut aussi agir dans ce domaine, à l'image de la récente réunion de Libreville consacrée à l'enseignement du français en Afrique subsaharienne, initiative à renouveler dans d'autres régions (Europe orientale, Océan Indien, Asie du Sud-Est...). Pour autant, la réussite dans ce domaine passe aussi par un accroissement des moyens et par une pédagogie efficace : amélioration de la formation des maîtres, y compris la formation continue, prise en compte de l'importance des langues maternelles, dont le Président Senghor disait que la maîtrise était une condition de celle de la langue française...

Sur l'observation des élections présidentielles au Togo, M. Abdou Diouf a répondu qu'il s'était lui-même rendu à Lomé où il avait rencontré le Président Eyadema, les partis de la mouvance présidentielle, et les différentes oppositions : tous ces interlocuteurs ont demandé que l'OIF soit présente afin de veiller à la régularité et à la sincérité du scrutin, mission qu'elle a accepté qu'elle assurera sans complaisance. En effet, tenir un pays indéfiniment sous des sanctions n'est pas une bonne méthode, il en résulte que les relations entre le Togo et l'Union européenne ne sont pas saines. Par ailleurs, on peut se demander si l'opposition togolaise n'a pas une part de responsabilité dans la situation, dans la mesure où elle n'est pas parvenue à s'unir et présente six candidats différents face au président sortant alors qu'il n'y a qu'un seul tour de scrutin.

Le Président Abdou Diouf a expliqué qu'un système d'évaluation permanente et d'alerte précoce avait été mis en place en application de la déclaration de Bamako sur la démocratie et les droits de l'Homme : les parlementaires de l'Assemblée permanente de la Francophonie (APF) ont un rôle majeur à jouer dans ce domaine. En effet, l'APF est l'institution de la Francophonie la mieux placée pour garantir la démocratie au sein de l'espace francophone, ce dont le Secrétaire général pourra discuter avec les membres de l'APF qu'il rencontrera lors de leur réunion de Niamey en juillet prochain.

En ce qui concerne l'ouverture des Universités françaises aux étudiants francophones, il n'y a aucun problème d'accès, ni même de visas étudiants depuis 1998, suite aux instructions du Président de la République. En fait, le problème est plutôt du côté de l'accueil des étudiants (logements, bourses...), éléments sur lesquels il est possible de progresser.

Le Président Abdou Diouf a indiqué que la coopération décentralisée était une dimension très importante de la Francophonie. Il existe d'ailleurs un opérateur qui en est chargé, l'AIMF (Association internationale des maires francophones), créée lorsque Jacques Chirac était maire de Paris, ce qui n'empêche pas l'existence d'autres initiatives intéressantes, comme la création de l'Association des régions francophones, l'action menée par Cités Unies sous la présidence de M. Bernard Stasi ou des initiatives plus ciblées comme celle citée par M. Destot.

Le rôle de l'OIF vis-à-vis des systèmes éducatifs est un rôle de conseil, de concertation, et d'interface avec les bailleurs de fonds, et non pas un rôle direct de construction d'infrastructures. Ainsi, la Banque mondiale estime que les dossiers qui lui sont présentés sont souvent de mauvaise qualité : l'OIF a donc décidé d'organiser un symposium avec tous les bailleurs de fonds pour rapprocher les points de vue, les experts de ces organismes étant souvent anglo-saxons et n'examinant pas les dossiers selon les mêmes critères que les Francophones.

M. François Loncle s'est étonné de la position prise par l'OIF sur les élections au Togo. Il a fait valoir que de nombreux parlementaires ne partageaient pas l'optimisme du Secrétaire général. Ainsi, plusieurs membres du Bureau de l'Assemblée nationale ont refusé d'observer les élections dans un pays où le Président sortant a modifié la constitution en vue d'être élu à vie et a écarté de la course à la présidence son principal opposant, M. Olympio. Il a estimé que l'on ne pouvait pas accorder un label démocratique à une telle élection.

Evoquant une rencontre au cours de laquelle il s'était permis d'amicales pressions auprès du Président Abdou Diouf pour que celui-ci présente sa candidature au poste de Secrétaire général de l'OIF, M. Serge Janquin s'est réjoui de voir que, malgré les réticences exprimées à l'époque par l'intéressé, ses pressions avaient abouti. Il a souhaité connaître le sens profond, les limites, la spécificité et la vocation politique de l'OIF face à des candidatures comme celle du Soudan ou face aux conflits en Afrique, notamment en Côte d'Ivoire et en République centrafricaine. L'OIF mène-t-elle des actions spécifiques ? Quelle est sa place par rapport aux autres organisations internationales comme l'Union Africaine ou l'Union européenne ? Comment gère-t-elle la prévention des conflits ? Ainsi, prenant l'exemple du Soudan où plusieurs organisations interviennent, où le Président de la République a désigné un représentant, où l'autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) s'intéresse à l'application des accords de Machakos, quel rôle peut jouer l'OIF ?

En tant que Président de la Commission politique de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, M. Richard Cazenave s'est interrogé sur la manière dont les différentes organisations francophones pouvaient agir sur l'éducation et la formation. Comment peuvent-elles aider notamment au développement de filières universitaires Bac+ 2 ? Il s'est demandé s'il ne serait pas utile de développer non seulement des partenariats de région à région, mais surtout avec des organismes privés comme le font les Américains. La sphère publique ne devrait-elle pas encourager les opérateurs du privé dans ce domaine ?

Le Président Abdou Diouf a expliqué qu'il n'était pas spécialement optimiste sur le processus électoral togolais, qu'il n'avait pas pris position, que son rôle était de recevoir la demande d'un gouvernement pour observer un processus, de se rendre dans le pays, d'écouter aussi bien le gouvernement que les différents partis de l'opposition. C'est ainsi qu'il a agi au Togo où il s'est rendu et a constaté que chacune des parties demandait que l'OIF envoie des observateurs à ses élections. Elle le fera et dira ce qui s'est passé, sans a priori.

M. François Loncle a déclaré respecter la position du Président Abdou Diouf.

Le Président Abdou Diouf a remercié M. Serge Janquin de son intervention pour le pousser à être candidat au poste qu'il occupe actuellement, et a reconnu qu'à l'époque, il n'était pas convaincu.

S'agissant du règlement et de la prévention des conflits, il a expliqué qu'il n'y avait pas de rôle spécifique de l'OIF en la matière. Celle-ci a le souci d'être présente aux côtés d'autres organisations comme dans les pays où il n'y en a aucune. A cet égard, il a cité l'exemple des Comores : l'Union africaine s'en était occupée, mais la situation étant totalement bloquée en raison de positions dogmatiques, l'OIF a tenté de rétablir le dialogue entre les parties.

En Côte d'Ivoire, l'OIF est représentée au Comité de surveillance de l'application des accords de Marcoussis. Son représentant a joué un rôle clé. Il a pris l'initiative de réunir les chefs d'Etat concernés autour du Président de la République du Togo, ce qui a permis d'attirer l'attention sur la situation dans l'ouest de la Côte d'Ivoire. Ainsi, des manœuvres conjointes auxquelles participent les troupes gouvernementales, celles de la CEDEAO, celles de l'opération Licorne, les Fanci et les rebelles, se déroulent actuellement dans l'Ouest ivoirien pour sécuriser la zone. Selon lui, la spécificité de la francophonie réside dans sa souplesse ce qui ne signifie pas qu'elle renonce aux principes et aux valeurs qui la fondent.

En ce qui concerne les filières Bac + 2, il a reconnu qu'on ne les développait pas assez alors que ces formations sont recherchées et bien adaptées à la demande. Prenant l'exemple du Sénégal, il a précisé que le secteur privé avait déjà été dans le passé associé à l'organisation de ces filières éducatives, ce qui avait donné des résultats encourageants. Il a estimé utile d'inciter des organismes privés comme les chambres de commerce ou le forum francophone des affaires à participer à ces filières de formation qui sont nécessaires au développement, qui est une valeur essentielle de la Francophonie.

Le Président Edouard Balladur a remercié chaleureusement le Président Abdou Diouf de la clarté et de la pertinence de ses réponses et a souligné que l'exposé du Président montrait bien que l'OIF n'a pas seulement une vocation purement technique, mais encore un rôle politique d'organisation internationale vouée à la défense de la paix et d'un certain nombre de valeurs. Contrôler le respect par les autres de valeurs communes conduit à des conséquences difficiles devant lesquelles tous les organismes internationaux reculent. Il a déclaré vouloir encourager l'OIF sur cette voie. Cette organisation est vouée à la diffusion de la Francophonie dans le respect des différences culturelles. Cependant, il est essentiel qu'elle joue un rôle dans la diffusion des valeurs de la démocratie. C'est une chance pour elle d'avoir à sa tête le Président Abdou Diouf.

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